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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/1944/2022

JTAPI/183/2023 du 15.02.2023 ( LCR ) , REJETE

Descripteurs : RECONSIDÉRATION;RETRAIT DE PERMIS;PERMIS DE CIRCULATION
Normes : LPA.48
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1944/2022 LCR

JTAPI/183/2023

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 15 février 2023

 

dans la cause

 

Monsieur A______, représenté par B______ SARL, avec élection de domicile

 

contre

OFFICE CANTONAL DES VÉHICULES

 


EN FAIT

1.             Par décision du 20 novembre 2018 rendue dans le cadre d'une campagne de rappel pour défaut technique, l'office cantonal des véhicules (ci-après : OCV) a ordonné le retrait du permis de circulation du véhicule Porsche Cayenne appartenant à Monsieur A______ et immatriculé à Genève.

2.             Le 25 janvier 2019, l'OCV a dénoncé la situation à la police et ordonné la saisie du permis de circulation et des plaques de contrôle du véhicule en question.

3.             Le 6 février 2019, M. A______ a été interpellé par les gardes-frontières au passage de Thônex-Vallard pour avoir circulé avec son véhicule dont les plaques de contrôle se trouvaient sous retrait.

4.             Par jugement du 15 juin 2020, le Tribunal de police du canton de Genève a condamné M. A______ pour non-restitution de permis ou de plaques de contrôle, conduite d'un véhicule ne répondant pas aux prescriptions légales et conduite sous défaut de permis de circulation ou de plaques de contrôle.

5.             Sur appel de M. A______, la chambre pénale d'appel et de révision de la Cour de public de Genève (CPAR), par arrêt du 12 janvier 2021, a réformé ce jugement en acquittant le précité de conduite d'un véhicule ne répondant pas aux prescriptions légales, mais l'a reconnu coupable de non-restitution de permis ou de plaques de contrôle et de conduite sous défaut de permis de circulation ou de plaques de contrôle.

Dans son arrêt, la CPAR a retenu notamment que la décision de l'OCV du 20 novembre 2018 avait été distribuée à M. A______ le 21 novembre 2018.

6.             Sur recours de M. A______ contre l'arrêt de la CPAR du 12 janvier 2021, le Tribunal fédéral a écarté le grief de notification irrégulière de la décision rendue par l'OCV le 20 novembre 2018. Le fait que, comme il le prétendait, il se trouvait en Russie au moment de la notification de cette décision, était un fait nouveau qui ne ressortait pas de l'arrêt du 12 janvier 2021 et qui ne pouvait donc pas être présenté au Tribunal fédéral. Au demeurant, il n'expliquait pas en quoi il aurait été empêché de produire devant la CPAR son billet d'avion et l'extrait de son passeport à l'appui de ce nouvel élément factuel.

Par arrêt du 27 septembre 2021 (______/2021), le Tribunal fédéral a ainsi rejeté le recours de M. A______.

7.             Par écritures du 10 février 2022 adressées à l'OCV, M. A______ a demandé le réexamen de la décision du 20 novembre 2018. Lors de son audition par la police le 6 février 2019, il avait clairement indiqué n'avoir jamais reçu cette décision. Lors de la procédure devant la CPAR, il avait été découvert que la décision du 20 novembre 2018 avait été retirée par son épouse qui ne l'avait pas informé de cette notification. À la veille du dépôt de son recours auprès du Tribunal fédéral, il avait découvert des preuves confirmant que dès le 10 novembre 2018, il se trouvait en Russie et ne pouvait donc pas prendre connaissance de la décision du 20 novembre 2018. Finalement, lors de la procédure devant le Tribunal fédéral, il avait découvert que cette décision n'avait pas été signée et faisait mention d'un « p.o » inconnu dont on ne connaissait pas les pouvoirs. Ces différents éléments nouveaux étaient susceptibles d'entraîner une modification de la décision du 20 novembre 2018, puisqu'il était ainsi démontré qu'aucune autorité n'avait prouvé l'avoir informé que son véhicule était sous le coup d'un rappel.

8.             Par décision du 11 mai 2022, l'OCV a refusé d'entrer en matière sur cette demande de reconsidération, les conditions légales d'une telle demande n'étant pas réalisées.

9.             Par acte du 13 juin 2022, M. A______ a recouru contre cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal) en concluant principalement à son annulation. Il a pour l'essentiel repris les arguments développés dans le cadre de ses écritures du 10 février 2022.

10.         Par courrier du 15 août 2022, l'OCV a conclu au rejet du recours.

11.         Par courrier du 9 septembre 2022, M. A______ a indiqué au tribunal qu'il n'avait rien à rajouter par rapport à son recours.

 

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions de l'office cantonal des véhicules (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 17 de la loi d'application de la législation fédérale sur la circulation routière du 18 décembre 1987 - LaLCR - H 1 05).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

3.             De façon générale, une demande de réexamen (ou reconsidération) peut être présentée en tout temps et par toute personne qui aurait la qualité pour recourir contre la décision, objet de la demande au moment du dépôt de celle-ci. Elle a pour but d'obtenir la modification de la décision d'origine. Le plus souvent, elle tendra à la révocation d'une décision valable imposant une obligation à un particulier (ATA/355/2011 du 31 mai 2011 consid. 4e et les références citées ; cf. aussi Thierry TANQUEREL, op. cit., n. 1414 ss p. 489).

Une demande de reconsidération ne doit pas permettre de remettre continuellement en cause des décisions entrées en force et d'éluder les dispositions légales sur les délais de recours (ATF 136 II 177 consid. 2.1 ; Thierry TANQUEREL, op. cit., n. 1417 p. 489 s). C'est pourquoi il n'existe en principe pas de droit non seulement à une nouvelle décision, mais déjà à ce que l'autorité saisie procède à un nouvel examen de la situation (ATA/355/2011 du 31 mai 2011 consid. 4f ; Thierry TANQUEREL, op. cit., n. 1417 p. 490). La jurisprudence a en effet déduit des garanties générales de procédure de l'art. 29 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) l'obligation, pour l'autorité administrative, d'entrer en matière sur une demande de réexamen lorsque les circonstances de fait ont subi, depuis la première décision, une modification notable, ou si le requérant invoque des faits ou des moyens de preuve importants qu'il ne connaissait pas lors de la première décision ou dont il ne pouvait pas se prévaloir ou n'avait pas de raison de se prévaloir à cette époque (ATF 136 II 177 consid. 2.1 ; 130 II 32 consid. 2.4 ; 124 II 1 consid. 3a ; 120 Ib 42 consid. 2b ; 113 Ia 146 consid. 3a ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_165/2013 du 29 août 2013 consid. 2 ; 2A.506/2003 du 6 janvier 2004 ; Thierry TANQUEREL, op. cit., n. 1417 p. 490 et 1421s. p. 491).

C'est ce que prévoit, en droit genevois, l'art. 48 LPA (cf. infra ; Thierry TANQUEREL, op. cit., n. 1422 p. 478).

Lorsque des motifs de cette nature sont établis, l'autorité est donc tenue d'entrer en matière (Pierre MOOR/Etienne POLTIER, op. cit., ch. 2.4.4.2 p. 399 ; cf. aussi ATA/1013/2017 du 27 juin 2017 consid. 2).

4.             Selon l'art. 48 al. 1 LPA, les demandes en reconsidération de décisions prises par les autorités administratives sont recevables lorsque : a) il existe un motif de révision au sens de l'art. 80 let. a et b LPA ou b) si les circonstances se sont modifiées dans une mesure notable depuis la première décision.

L'art. 80 LPA prévoit qu'il y a lieu à révision lorsque, dans une affaire réglée par une décision définitive, il apparaît qu'un crime ou un délit, établi par une procédure pénale ou d'une autre manière, a influencé la décision (let. a), ou que des faits ou des moyens de preuve nouveaux et importants existent, que le recourant ne pouvait connaître ou invoquer dans la procédure précédente (let. b).

5.             Par faits nouveaux, il faut entendre des événements qui se sont produits antérieurement à la procédure précédente, mais dont l'auteur de la demande de révision a été empêché, sans sa faute, de faire état à cette occasion. Sont ainsi nouveaux, au sens de cette disposition, les faits qui, survenus à un moment où ils pouvaient encore être allégués dans la procédure principale, n'étaient pas connus du requérant, malgré toute sa diligence (ATA/224/2011 du 5 avril 2011 consid. 4c et les références citées ; Pierre MOOR/Etienne POLTIER, op. cit., ch. 2.4.4.1 p. 397 et 405).

Les preuves nouvelles, quant à elles, doivent servir à prouver soit des faits nouveaux importants qui motivent le réexamen, soit des faits qui étaient connus lors de la procédure précédente, mais qui n'avaient pas pu être prouvés, au détriment du requérant. Si les nouveaux moyens sont destinés à prouver des faits allégués antérieurement, le requérant doit aussi démontrer qu'il ne pouvait pas les invoquer dans la précédente procédure (ATA/224/2011 du 5 avril 2011 consid. 4c et les références citées).

6.             Sous l'angle de l'art. 48 al. 1 let. b LPA, il faut que la modification notable des circonstances soit pertinente en ce qui concerne le dispositif de la décision en cause. Par modification notable des circonstances, il faut entendre des faits nouveaux « nouveaux » (vrais nova), c'est-à-dire survenus après la prise de la décision litigieuse, et qui modifient de manière importante l'état de fait ou les bases juridiques sur lesquels l'autorité a fondé sa décision, justifiant par là sa remise en cause (ATA/159/2018 du 20 février 2018 consid. 3a ; ATA/1013/2017 du 27 juin 2017 consid. 2b et les références citées ; Thierry TANQUEREL, op. cit., n. 1422 p. 478 ; Pierre MOOR/Etienne POLTIER, op. cit., ch. 2.4.4.2 p. 399).

7.             L'intéressé doit expliquer en quoi les faits dont il se prévaut représenteraient un changement notable des circonstances depuis la décision entrée en force ; à défaut, l'autorité de première instance n'entre pas en matière et déclare la demande irrecevable (ATA/573/2013 du 28 août 2013 consid. 4).

La charge de la preuve relative à l'existence d'une situation de réexamen obligatoire d'une décision en force incombe à celui qui en fait la demande, ce qui implique qu'il produise d'emblée devant l'autorité qu'il saisit les moyens de preuve destinés à établir les faits qu'il allègue (ATA/291/2017 du 14 mars 2017 consid. 4).

8.             Le prononcé d'une autorité à propos de la requête de reconsidération dont elle a été saisie étant une décision administrative, celle-ci peut faire l'objet d'un recours conformément aux règles générales de procédure. Comme la reconsidération ne doit cependant pas permettre à un administré de se ménager une voie de recours là où il n'en avait pas ou plus contre la décision initiale, le recours dirigé contre la décision relative à la requête de reconsidération peut porter sur le fond seulement si et dans la mesure où l'autorité saisie est entrée en matière (cf. ATA/338/2020 du 7 avril 2020 consid. 5).

9.             Ainsi, dans la mesure où la décision attaquée ne porte que sur la question de la recevabilité de la demande de réexamen, le recourant ne peut que contester le refus d'entrer en matière que l'autorité intimée lui a opposé, mais non invoquer le fond, des conclusions prises à cet égard n'étant pas recevables (cf. ATF 126 II 377 consid. 8d ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_115/2016 du 31 mars 2016 consid. 5 ; 2C_172/2013 du 21 juin 2013 consid. 1.4 ; 2C_504/2013 du 5 juin 2013 consid. 3).

10.         En l'espèce, l'ensemble des arguments développés par le recourant à l'appui de sa demande de reconsidération du 10 février 2022, ainsi que ceux qu'il reprend dans son recours pour critiquer la décision litigieuse, sont de nature purement appellatoires et ne sauraient ouvrir la voie un réexamen de la décision du 20 novembre 2018. En effet, le recourant se contente de remettre en cause, d'une part, le fait que son véhicule aurait présenté des défauts techniques et, d'autre part, le fait que la décision du 20 novembre 2018 lui aurait été valablement notifiée. Or, l'ensemble de ces éléments ont déjà été examinés et tranchés dans le cadre de la procédure pénale qui a abouti au jugement du Tribunal fédéral du 27 septembre 2021 dans la cause 6B_192/2021, de sorte qu'il n'y a plus lieu d'y revenir. Quant au fait qu'il aurait découvert durant la procédure devant le Tribunal fédéral que la décision du 20 novembre 2018 n'aurait pas été valablement signée, les éléments sur lesquels il se fonde pour soutenir cet argument figurent sur cette décision elle-même et auraient ainsi également pu être mis en avant pour contester cette décision par la voie ordinaire.

11.         Par conséquent, c'est de manière parfaitement fondée que l'autorité intimée a refusé d'entrer en matière sur la demande de reconsidération du recourant.

12.         Le recours devra ainsi être rejeté.

13.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), le recourant, qui succombe, est condamné au paiement d’un émolument s'élevant à CHF 500.- ; il est couvert par l’avance de frais de même montant versée à la suite du dépôt du recours. Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 13 juin 2022 par Monsieur A______ contre la décision de l'office cantonal des véhicules du 11 mai 2022 ;

2.             le rejette ;

3.             met à la charge du recourant un émolument de CHF 500.-, lequel est couvert par l'avance de frais ;

4.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Au nom du Tribunal :

Le président

Olivier BINDSCHEDLER TORNARE

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties.

Genève, le

 

La greffière