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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/4287/2021

JTAPI/478/2022 du 10.05.2022 ( OCPM ) , REJETE

REJETE par ATA/431/2023

Descripteurs : CAS DE RIGUEUR
Normes : LEI.30.al1.letb; OASA.30a
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4287/2021

JTAPI/478/2022

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 10 mai 2022

 

dans la cause

 

Madame A______, représentée par Me Roxane MOUSSARD, avocate, avec élection de domicile

 

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

 


EN FAIT

1.             Madame A______, née le ______ 2001, est ressortissante du Sénégal.

2.             Son père, Monsieur B______, réside en Suisse depuis le 30 septembre 2004, au bénéfice d'une autorisation de séjour délivrée suite à son mariage célébré le 13 août 2004 avec Madame C______, ressortissante portugaise au bénéfice d'une autorisation d'établissement. Le couple s'est séparé en décembre 2005 et le divorce a été prononcé par jugement du 28 mars 2017.

3.             Le 27 juillet 2009, M. B______ a été victime d’un accident professionnel dont il a gardé des séquelles (troubles neuropsychologiques) et, le 3 mai 2011, il a été mis au bénéfice d’une autorisation de séjour pour raisons personnelles majeures. Celle-ci a régulièrement été renouvelée par la suite.

4.             Le 26 juillet 2013, Mme A______ et son frère aîné, Monsieur D______, sont entrés en Suisse munis d'un visa de type C, pour rendre visite à leur père.

5.             Le 13 septembre 2013, M. B______ a sollicité auprès de l'office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) la délivrance d'autorisations de séjour pour regroupement familial en faveur de sa fille et de son fils.

6.             Par décision du 17 juillet 2015, déclarée exécutoire nonobstant recours, l'OCPM a refusé de faire droit à cette demande, tout en impartissant aux enfants un délai au 30 septembre 2015 pour quitter la Suisse.

7.             Par acte du 14 septembre 2015, agissant également au nom de ses deux enfants, M. B______ a recouru contre cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal).

8.             Par jugement du 8 juin 2016, (JTAPI/1______), le tribunal a rejeté le recours.

9.             Par arrêt du 3 octobre 2017 (ATA/2______), la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après: la chambre administrative) a rejeté le recours interjeté contre le jugement du tribunal.

Le Tribunal fédéral a confirmé cet arrêt en date du 2 juillet 2018 (arrêt 3______).

10.         Le 13 juillet 2018, l’OCPM a imparti à Mme A______ un nouveau délai au 13 octobre 2018 pour quitter la Suisse.

11.         Le 1er novembre 2018, sous la plume de son mandataire, Mme A______ a sollicité la délivrance d'une autorisation de séjour pour cas de rigueur, sous l'angle de l'opération Papyrus, invoquant notamment ses cinq années de séjour à Genève ainsi que ses études en cours auprès de E______ (ci-après : E______).

12.         Par décision du 9 mai 2019, l'OCPM a refusé de donner une suite favorable à cette demande et prononcé son renvoi de Suisse, tout en lui impartissant avec nouveau délai au 9 août 2019 pour quitter le territoire.

L'intégration de l'intéressée ne revêtait aucun caractère exceptionnel et la durée de son séjour devait être relativisée dans la mesure où elle résultait de procédures de recours relatives à la première décision du 17 juillet 2015.

13.         Par acte du 11 juin 2019, sous la plume de son mandataire, Mme A______ a interjeté recours contre cette décision.

A cette occasion, elle a notamment fait valoir qu'elle avait passé toute son adolescence en Suisse et qu'elle vivait depuis bientôt six ans sous le même toit que son père, la nouvelle compagne de celui-ci, son frère et ses deux demi-frère et sœur. Si elle devait retourner au Sénégal, elle perdrait son investissement scolaire à Genève et, à peine majeure, serait confrontée à des difficultés particulièrement importantes de réintégration.

14.         Par jugement du 29 juin 2020, le tribunal a rejeté le recours (JTAPI/4______), confirmant en substance que l'intéressée ne se trouvait pas dans une situation constitutive d'un cas de rigueur au sens des art. 30 al. 1 let. b LEI et 31 OASA.

15.         Le 31 août 2020, Mme A______ a interjeté recours contre ce jugement auprès de la chambre administrative (procédure A/5______).

16.         Par courrier daté du 31 août 2020, reçu par l'OCPM le 7 septembre 2020, Mme A______ a sollicité la délivrance d'une autorisation de séjour pour formation initiale, au sens des art. 30 al. 1 let. b LEI et 30a OASA.

Elle a notamment fait valoir qu'elle séjournait en Suisse depuis 2013 et qu'elle y avait suivi l'école obligatoire de manière ininterrompue durant ces sept dernières années, soit une année à l'école primaire, trois années au cycle d'orientation et trois années à E______.

Elle était à présent inscrite auprès de F______ (ci-après: F______) pour suivre une formation professionnelle initiale en commerce et marketing, raison pour laquelle elle sollicitait une telle autorisation.

A l'appui de sa demande, elle a produit une attestation de F______ du 28 août 2020, selon laquelle elle était inscrite en programme de formation «Commerce et Marketing» pour la période du 7 septembre 2020 au 24 juin 2021.

17.         Par décision du 3 novembre 2020 (ATA/6______), la chambre administrative a suspendu la procédure A/5______ jusqu'à droit connu sur la demande d'autorisation reçue par l'OCPM le 7 septembre 2020.

18.         Par courriel du 11 mars 2021, F______ a informé l'OCPM que Mme A______ avait commencé sa formation le 21 septembre 2021 mais que l'accès aux cours lui avait été interdit dès le 11 janvier 2021 pour des raisons financières. Une proposition de paiement différé lui avait été faite dans le but de lui éviter une interruption de fréquentation des cours mais l'intéressée n'y avait pas donné suite.

19.         Le 28 avril 2021, Mme A______ a sollicité un visa de retour d'une validité de soixante jours pour se rendre au Sénégal (visite à sa mère).

20.         Par courrier du 18 mai 2021, sous la plume de son nouveau mandataire, Mme A______ a informé l'OCPM qu'elle avait changé d'orientation professionnelle et s'était inscrite auprès de G______ (ci-après: G______) à H______ afin d'entreprendre une formation dans le domaine de la petite enfance.

Pour intégrer cette formation, elle devait toutefois effectuer au préalable un stage rémunéré de huit-cents heures dans le domaine. A cette fin, elle avait d'ores et déjà été engagée par I______ à partir du 30 août 2021. Elle sollicitait dès lors l'autorisation de commencer ce stage si la décision de l'OCPM devait ne pas avoir été rendue d'ici là.

En annexe à ce courrier, Mme A______ a notamment produit un formulaire M rempli en sa faveur par I______ pour un contrat de durée déterminée, soit du 30 août 2021 au 19 août 2022 en qualité d'« Aide en crèche », trente-neuf heures par semaine, pour un salaire mensuel brut de CHF  4'394.85, ainsi qu'une attestation d'engagement du 14 mai 2021 signée par Monsieur J______, secrétaire comptable en charge des ressources humaines de I______.

21.         Par courrier du 3 juin 2021, l'OCPM a fait part à Mme A______ de son intention de refuser cette nouvelle demande, sous l'angle notamment de l'art. 30a OASA, au motif que les critères édictés dans la LEI ainsi que dans les directives y relatives n'étaient pas remplis concernant la condition de « formation initiale ». Pour le surplus, elle ne remplissait pas les critères relatifs à un cas individuel d'extrême gravité.

22.         Par courrier du 5 juillet 2021, sous la plume de son conseil, Mme A______ a pu faire valoir ses arguments.

Le stage était un prérequis obligatoire pour intégrer G______ et les directive LEI mentionnaient spécifiquement la notion de « stage ». Par ailleurs, le fait d'avoir changé de formation ne constituait pas un motif permettant de refuser sa demande, la Loi fédérale sur la Formation professionnelle (LFPr) admettant le cumul de plusieurs formations. Enfin, au vu notamment de la durée de son séjour en Suisse, pays où elle avait vécu toute son adolescence, elle considérait remplir les critères d'un cas individuel d'extrême gravité en lien avec la formation professionnelle initiale au sens des art. 30 al. 1 let. b LEI et des art. 30a et 31 OASA.

23.         Par courrier du 5 août 2021, l'OCPM a confirmé à J______ que Mme A______ était autorisée à travailler auprès du I______ durant l'instruction de son dossier auprès de ses services.

24.         Par décision du 18 novembre 2021, l'OCPM a refusé d'accéder à la requête de régularisation des conditions de séjour de Mme A______ du 31 août 2020 et, par conséquent, de préaviser favorablement son dossier auprès du secrétariat d'État aux migrations (ci-après : SEM). L'intéressée était dès lors invitée à se conformer à la décision du 9 mai 2019 ayant prononcé son renvoi de Suisse en application de l'art. 64 al. 1 let. c LEI.

Pour rappel, il ressortait des pièces produites que la première année de formation entreprise par Mme A______ auprès de F______ en septembre 2020 avait été interrompue et était restée inachevée. L'intéressée avait ensuite présenté un nouveau projet professionnel dans le domaine de la petite enfance, lequel nécessitait huit-cents heures de pratique professionnelle préalables pour pouvoir intégrer G______ à H______. A cette fin, elle avait débuté en août 2021 un stage auprès du I______. Dans ces circonstances, sa situation ne répondait pas aux critères relatifs à un séjour pour formation initiale selon l'art. 30a OASA. En effet, sa première formation professionnelle initiale avait été interrompue, alors que l'art. 30a OASA ne s'appliquait qu'à la première formation faisant suite à la fin de la formation scolaire obligatoire, ce qui n'était pas le cas de sa formation à G______.

De plus, Mme A______ avait déposé une demande d'autorisation de travail en qualité d'aide de crèche pour une durée d'une année, ceci étant un prérequis pour pouvoir intégrer G______. Cet emploi ne pouvait ainsi pas être considéré comme une offre de formation transitoire au sens des directives LEI (ch. 56.11.2).

Les directives LEI auxquelles Mme A______ se référait, mentionnant spécifiquement la notion de stage, s'appliquaient aux demandes d'autorisations de séjour pour formation et formation continue selon l'art. 27 LEI, et non aux demandes pour formation initiale selon l'art. 30a OASA. Enfin, elle ne remplissait pas les critères relatifs à un cas individuel d'extrême gravité au sens des art. 30 al.  l let. b LEI et 31 OASA pour toutes les raisons déjà invoquées dans la décision du 9 mai 2019 et dans le jugement du tribunal du 29 juin 2020.

25.         Par acte du 20 décembre 2021, sous la plume de son conseil, Mme A______ a interjeté recours contre cette décision auprès du tribunal, concluant, sous suite de frais et dépens, à son annulation et à l'octroi d'un permis de séjour. Préalablement, elle a conclu à la jonction de la présente procédure avec la procédure A/5______.

Elle avait effectivement débuté une formation auprès de F______ en septembre 2020 mais avait été contrainte d'interrompre ce cursus pour des raisons financières. Malgré une proposition de paiement différé, il ne lui avait pas été possible de s'acquitter de l'écolage au vu de la situation obérée de son père. Elle avait donc cherché une nouvelle formation et souhaitait désormais s'inscrire auprès de G______ à H______. A cette fin, elle avait trouvé un stage qui lui procurait un revenu lui permettant de faire face à ses besoins courants.

Par ailleurs, elle ne pourrait pas entreprendre une telle formation au Sénégal, où ce type d'école n'existait pas. Enfin, elle avait gardé des contacts avec sa mère qui vivait au Sénégal mais n'avait pas de liens avec ses demi-frères et sœurs vivant sur place.

Pour le surplus, elle avait effectué sa scolarité obligatoire à Genève, dès son arrivée à l'âge de douze ans. Elle avait ainsi passé en Suisse toute son adolescence, soit les années les plus importantes pour le développement. Un retour dans son pays engendrerait des difficultés beaucoup plus importantes pour elle que pour d'autres individus. En cas de renvoi, elle serait en outre séparée de son père, gravement malade, et de son frère avec qui elle vivait depuis son arrivée en Suisse. Elle habitait également avec la compagne de son père et ses demi-frère et sœur auxquels elle était très attachée. Le fait qu'elle avait gardé contact avec sa mère ne pouvait lui être reproché et n'impliquait pas que son retour au pays serait facilité.

L'OCPM avait d'autre part violé son pouvoir d'appréciation en retenant qu'elle n'avait pas achevé sa première formation auprès de F______ alors qu'elle avait dû interrompre ce cursus pour des raisons financières. De plus, la formation de G______ remplissait les critères de formation initiale, indépendamment de la nécessité de réaliser un stage dans le secteur de la Petite Enfance. Cette formation transitoire lui permettrait en outre d'acquérir des connaissances spécifiques en la matière, tout en étant rémunérée afin de subvenir à ses besoins.

A suivre le raisonnement de l'autorité intimée, un jeune adulte disposant de ressources financières lui permettant de s'acquitter des frais d'une école privée remplirait les conditions d'admission sur le territoire aux fins de formation professionnelle initiale mais non les personnes en situation délicate. Cela reviendrait à avantager de manière choquante les individus des classes supérieures et créerait des inégalités de traitement insoutenables.

Enfin, elle se trouvait avec sa famille en Suisse puisqu'elle vivait avec son père gravement atteint dans sa santé et son frère. Elle réalisait donc les critères d'un cas individuel d'extrême gravité en lien avec la formation professionnelle initiale au sens des art. 30 al.  1 let. b LEI, 30a et 31 OASA.

26.         Dans ses observations du 17 février 2022, l'OCPM a conclu au rejet du recours.

A titre liminaire, il n'était pas possible de joindre la présente procédure avec la procédure A/5______ puisque celle-ci était pendante auprès d'une autorité différente, soit la chambre administrative.

Sur le fond, la recourante ne satisfaisait pas aux strictes conditions nécessaires à l'octroi d'un permis humanitaire au sens de l'art. 30 al. 1 let. b LEI. En particulier, la durée de son séjour et son intégration en Suisse ne revêtaient pas une importance suffisante à cette fin, la recourante n'ayant en outre pas démontré qu'en cas de retour au Sénégal elle serait exposée à des conditions socioéconomiques ou sanitaires autrement plus difficiles que celles auxquelles est confrontée la plupart de ses compatriotes restés au pays. Son séjour en Suisse était par ailleurs essentiellement dû à la répétition des procédures contentieuses engagées à l'encontre des décisions visant son statut administratif sur le territoire. Pour le surplus, le stage entrepris aux fins de préparer son entrée auprès de G______ ne respectait pas les critères de l'art. 30a OASA, tels qu'explicités par les Directives LEI du SEM (ch. 5.6.11).

27.         La recourante a répliqué le 14 mars 2022, sous la plume de son conseil.

En préambule, la jonction de la présente cause avec la cause A/5______ était possible et même recommandée dans la mesure où les deux causes concernaient les mêmes parties et que l'objet du litige était le même.

Sur le fond, en cas de retour au Sénégal, elle serait exposée à des conditions de vie précaires, sa mère ayant refait sa vie et se trouvant dans l'incapacité de lui venir en aide.

A l'appui de ses écritures, elle a produit une lettre manuscrite du 2 mars 2022 signée par sa mère, Madame K______, indiquant en substance qu'elle était sans emploi et n'arrivait pas « à joindre les deux bouts ».

28.         Par duplique du 1er avril 2022, l'OCPM a indiqué qu'il n'avait pas d'observations complémentaires à formuler.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions de l'office cantonal de la population et des migrations relatives au statut d'étrangers dans le canton de Genève (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 3 al. 1 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 60 et 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

3.             Selon l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l’espèce.

Il y a en particulier abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu'elle viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire et de l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3 ; 140 I 257 consid. 6.3.1 ; 137 V 71 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_763/2017 du 30 octobre 2018 consid. 4.2 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2018, n. 515 p. 179).

4.             Saisi d’un recours, le tribunal applique le droit d’office. Il ne peut pas aller au-delà des conclusions des parties, mais n’est lié ni par les motifs invoqués par celles-ci (art. 69 al. 1 LPA), ni par leur argumentation juridique (cf. ATA/386/2018 du 24 avril 2018 consid. 1b ; ATA/117/2016 du 9 février 2016 consid. 2 ; ATA/723/2015 du 14 juillet 2015 consid. 4a).

5.             A titre liminaire, la recourante sollicite la jonction de la présente procédure avec la procédure A/5______.

6.             Aux termes de l'art. 70 al. 1 LPA, l'autorité peut, d'office ou sur requête, joindre en une même procédure des affaires qui se rapportent à une situation identique ou à une cause juridique commune.

7.             En l'espèce, le tribunal a déjà statué dans la cause A/5______, par jugement rendu le 29 juin 2020 (JTAPI/4______) qui fait actuellement l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative.

La procédure A/5______ n'étant plus inscrite au rôle du tribunal - mais pendante auprès de la juridiction de recours - sa jonction avec la présente procédure n'est donc manifestement plus possible.

8.             Sur le fond, le recourante conclut à la délivrance d'une autorisation de séjour pour formation professionnelle initiale au sens des art. 30 al.1 let. b LEI et 30a OASA.

9.             La LEI et ses ordonnances d’exécution, en particulier l’ordonnance relative à l’admission, au séjour et à l’exercice d’une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201), règlent l’entrée, le séjour et la sortie des étrangers dont le statut juridique n’est pas réglé par d’autres dispositions du droit fédéral ou par des traités internationaux conclus par la Suisse (art. 1 et 2 LEI), ce qui est le cas pour les ressortissants du Sénégal.

10.         Les conditions d’entrée d’un étranger en Suisse sont régies par les art. 5 ss LEI.

Les dérogations aux prescriptions générales d’admission (art. 18 à 29 LEI) sont énoncées de manière exhaustive à l’art. 30 al. 1 LEI ; il est notamment possible de déroger aux conditions d’admission dans le but de tenir compte des cas individuels d’extrême gravité ou d’intérêts publics majeurs (let. b).

11.         Il ressort de la formulation de l’art. 30 al. 1 let. b LEI, qui est rédigé en la forme potestative, que l’étranger n’a aucun droit à l’octroi d’une dérogation aux conditions d’admission pour cas individuel d’une extrême gravité et, partant, à l’octroi (respectivement au renouvellement ou à la prolongation) d’une autorisation de séjour fondée sur cette disposition (cf. ATF 138 II 393 consid. 3.1 et 137 II 345 consid. 3.2.1).

12.         Aussi, conformément à la pratique et à la jurisprudence constantes en la matière, les conditions mises à la reconnaissance d’une situation d’extrême gravité doivent être appréciées de manière restrictive. Il est nécessaire que l’étranger concerné se trouve dans une situation de détresse personnelle. Cela signifie que ses conditions de vie et d’existence, comparées à celles applicables à la moyenne des étrangers, doivent être mises en cause de manière accrue, autrement dit qu’une décision négative prise à son endroit comporte pour lui de graves conséquences (arrêt du Tribunal administratif fédéral F-6658/2018 du 12 mai 2020 consid. 6.4).

Lors de l’appréciation d’un cas de rigueur, il y a lieu de tenir compte de l’ensemble des circonstances du cas d’espèce. La reconnaissance d’une situation d’extrême gravité n’implique pas forcément que la présence de l’étranger en Suisse constitue l’unique moyen pour échapper à une situation de détresse. Par ailleurs, le fait que l’étranger ait séjourné en Suisse pendant une assez longue période, qu’il s’y soit bien intégré (au plan professionnel et social) et que son comportement n’ait pas fait l’objet de plaintes ne suffit pas, à lui seul, à constituer un cas individuel d’extrême gravité ; encore faut-il que la relation de l’intéressé avec la Suisse soit si étroite qu’on ne puisse exiger de lui qu’il aille vivre dans un autre pays, notamment dans son pays d’origine (arrêt du Tribunal fédéral 2C_754/2018 du 28 janvier 2019 consid. 7.2 et références citées ; arrêt du Tribunal administratif fédéral F-6658/2018 du 12 mai 2020 consid. 6.5 et références citées).

13.         Ainsi, l’art. 30 al. 1 let. b LEI n’a pas pour but de soustraire des étrangers aux conditions de vie de leur pays d’origine, mais implique que ceux-ci se trouvent personnellement dans une situation si rigoureuse qu’on ne saurait exiger d’eux qu’ils tentent de se réadapter à leur existence passée. On ne saurait tenir compte des circonstances générales (économiques, sociales, sanitaires) affectant l’ensemble de la population restée sur place, auxquelles les personnes concernées pourraient être également exposées à leur retour, sauf si celles-ci allèguent d’importantes difficultés concrètes propres à leur cas particulier (arrêt du Tribunal administratif fédéral F-6616/2017 du 26 novembre 2019 consid. 6.5 et références citées).

Parmi les éléments déterminants pour la reconnaissance d’un cas d’extrême gravité, il convient en particulier de citer la très longue durée du séjour en Suisse, une intégration sociale particulièrement poussée, une réussite professionnelle remarquable, l’intéressé possédant des connaissances professionnelles si spécifiques qu’il ne pourrait les mettre en œuvre dans son pays d’origine, une maladie grave ne pouvant être traitée qu’en Suisse, la situation des enfants, notamment une bonne intégration scolaire aboutissant après plusieurs années à une fin d’études couronnée de succès. Constituent en revanche des facteurs allant dans un sens opposé le fait que la personne concernée n’arrive pas à subsister de manière indépendante et doive recourir aux prestations de l’aide sociale ou des liens conservés avec le pays d’origine, par exemple sur le plan familial, susceptibles de faciliter sa réintégration (arrêt du Tribunal fédéral 2A.543/2001 du 25 avril 2002 consid. 5.2 ; arrêts du Tribunal administratif fédéral F-6322/2016 du 1er mai 2018 consid.4.6 et les références citées ; ATA/1130/2017 du 2 août 2017 consid. 5b).

La durée totale du séjour constitue un critère important de reconnaissance d’un cas de rigueur. Il importe cependant de rappeler que selon la jurisprudence applicable en la matière, le simple fait pour un étranger de séjourner en Suisse pendant de longues années ne permet pas d’admettre un cas personnel d’une extrême gravité. En outre, la durée d’un séjour illégal, ainsi qu’un séjour précaire ne doivent normalement pas être pris en considération ou alors seulement dans une mesure très restreinte (arrêt du Tribunal administratif fédéral F-4145/2017 du 10 octobre 2018 consid. 5.1 et les références citées). Par durée assez longue, la jurisprudence entend une période de sept à huit ans (arrêt du Tribunal administratif fédéral C-7330/2010 du 19 mars 2012 ; ATA/1538/2017 du 28 novembre 2017).

D’une manière générale, lorsqu’un enfant a passé les premières années de sa vie en Suisse et y a seulement commencé sa scolarité, il reste encore attaché dans une large mesure à son pays d’origine, par le biais de ses parents. Son intégration au milieu socioculturel suisse n’est alors pas si profonde et irréversible qu’un retour dans sa patrie constituerait un déracinement complet (ATAF 2007/16 du 1er juin 2007 et les jurisprudence et doctrine citées). Avec la scolarisation, l’intégration au milieu suisse s’accentue. Dans cette perspective, il convient de tenir compte de l’âge de l’enfant lors de son arrivée en Suisse et au moment où se pose la question du retour, des efforts consentis, de la durée, du degré et de la réussite de la scolarité, de l’état d’avancement de la formation professionnelle, ainsi que de la possibilité de poursuivre ou d’exploiter, dans le pays d’origine, la scolarisation ou la formation professionnelle entamée en Suisse. Un retour dans la patrie peut, en particulier, représenter une rigueur excessive pour des adolescents ayant suivi l’école durant plusieurs années et achevé leur scolarité avec de bons résultats. L’adolescence, une période comprise entre douze et seize ans, est en effet une période importante du développement personnel, scolaire et professionnel, entraînant souvent une intégration accrue dans un milieu déterminé (ATF 123 II 125 consid. 4b ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_75/2011 du 6 avril 2011 consid. 3.4 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral C-6237/2012 du 2 mai 2014 consid. 5.4 ; ATA/465/2017 du 25 avril 2017).

Cela étant, il ne faut enfin pas perdre de vue qu’il est parfaitement normal qu’une personne, ayant effectué un séjour prolongé dans un pays tiers, s’y soit créé des attaches, se soit familiarisée avec le mode de vie de ce pays et maîtrise au moins l’une des langues nationales. Aussi, les relations d’amitié ou de voisinage, de même que les relations de travail que l’étranger a nouées durant son séjour sur le territoire helvétique, si elles sont certes prises en considération, ne sauraient constituer des éléments déterminants pour la reconnaissance d’une situation d’extrême gravité (ATF 130 II 39 consid. 3 ; arrêts du Tribunal administratif fédéral F-1714/2016 du 24 février 2017 consid. 5.3 ; F-3298/2017 du 12 mars 2019 consid. 7.3).

14.         À teneur de l’art. 30a OASA, afin de permettre à un étranger en séjour irrégulier de suivre une formation professionnelle initiale, une autorisation de séjour peut lui être octroyée pour la durée de la formation aux conditions suivantes: le requérant a suivi l’école obligatoire de manière ininterrompue durant cinq ans au moins en Suisse et a déposé une demande dans les douze mois suivants; la participation à des offres de formation transitoire sans activité lucrative est comptabilisée comme temps de scolarité obligatoire (let. a); l’employeur du requérant a déposé une demande conformément à l’art. 18 let. b LEI (let. b); les conditions de rémunération et de travail visées à l’art. 22 LEI sont respectées (let. c); le requérant remplit les critères d’intégration définis à l’art. 58a al. 1 LEI (let. d); il justifie de son identité (let. f).

L’autorisation peut être prolongée au terme de la formation initiale si les conditions visées à l’art. 31 sont remplies (art. 30a al. 2 OASA).

15.         Selon les Directives et commentaires, Domaine des étrangers édictées par le SEM, version d’octobre 2013, actualisée le 1er mars 2022 (ci-après : directives LEI; ch. 5.6.11), qui, conformément à l’art. 89 OASA, ne lient pas le juge, mais dont celui-ci peut en tenir compte pour assurer une application uniforme de la loi envers chaque administré, pourvu qu’elles respectent le sens et le but de la norme applicable (ATA/1015/2015 du 29 septembre 2015; ATA/450/2014 du 17 juin 2014), « l’art. 30a OASA énonce les critères déterminants à prendre en compte lors de la délivrance d’une autorisation de séjour pour cas de rigueur aux personnes en séjour irrégulier qui désirent effectuer une formation professionnelle initiale et/ou accéder à une offre de formation transitoire nécessitant l'exercice d'une activité lucrative. Tout comme l’art. 31 OASA, il complète la réglementation actuelle relative aux cas de rigueur de la LEI et de la LAsi, mais se rapporte à la situation particulière de la formation professionnelle initiale.

Concernant la motion de formation professionnelle initiale (art. 30a al. 1 OASA), bien que la LFPr admette le cumul de plusieurs formations professionnelles initiales, l’art. 30a OASA ne s'applique qu'à la première formation suivie. Les personnes qui désirent poursuivre leur formation peuvent déposer une demande d'autorisation de séjour pour cas de rigueur ordinaire en vertu des dispositions actuelles régissant les cas de rigueur (voir l’art. 30a al. 2 OASA et ch. 5.6.11.5).

16.         Les offres de formation transitoires sont des mesures mises sur pied pour préparer les jeunes en fin de scolarité obligatoire à une formation professionnelle initiale (formation professionnelle initiale en 2, 3 ou 4 ans, école de commerce, école des métiers) ou à accéder à une formation scolaire de degré II. Il s'agit de formations qui ne font pas partie de l'école obligatoire et qui impliquent pour certaines une activité lucrative de 2 à 3 jours par semaine (ex.: stages, semestres de motivation, préapprentissages). Les personnes qui désirent fréquenter entre la fin de l'école obligatoire et le début de leur formation professionnelle initiale des offres de formation transitoire impliquant l’exercice d’une activité lucrative doivent déposer une demande d’autorisation de séjour pour cas de rigueur et remplir les conditions de l’art. 30a OASA. La participation à de telles offres est comprise dans la première phrase de l'al. 1 « permettre une formation professionnelle initiale. L’autorité cantonale compétente soumet la demande pour approbation au SEM (cf. ch. 1.3.2 let. d). L’autorisation initiale de séjour est en principe octroyée pour une période d’une année au plus (art. 58 OASA). Si la formation prend fin de façon prématurée, une nouvelle autorisation de séjour doit être sollicitée (art. 54 OASA) ».

17.         Il sied enfin de rappeler que dans le cadre de l’exercice de leur pouvoir d’appréciation, les autorités compétentes doivent tenir compte des intérêts publics, de la situation personnelle de l’étranger, ainsi que de son degré d’intégration (art. 96 al. 1 LEI). Sauf prescription particulière de la loi ou d’un traité international, l’étranger n’a donc en principe aucun droit à la délivrance et au renouvellement d’un permis de séjour pour cas de rigueur.

18.         En l'espèce, il ressort de pièces produites que la recourante a sollicité, par demande datée du 31 août 2021, la délivrance d'une autorisation de séjour pour formation initiale au sens des art. 30 al. 1 let. b LEI et 30a OASA, faisant valoir qu'elle était inscrite auprès de F______ pour suivre une formation professionnelle initiale en «  Commerce et Marketing », du 7 septembre 2020 au 24 juin 2021. Elle a cependant interrompu cette formation, qui est restée inachevée, suite à son exclusion des cours, dès le 11 janvier 2021, faute de paiement de l'écolage dû à F______.

Force est dès lors de constater que la nouvelle formation qu'elle entend suivre auprès de G______, de même que le stage pré-requis qu'elle a commencé à cette fin, ne remplissent pas la condition de formation « initiale », soit de première formation faisant suite à la fin de la formation scolaire obligatoire au sens de l'art. 30a OASA.

Enfin, comme indiqué dans les directives LEI précitées, bien que la loi sur la LFPr admette le cumul de plusieurs formations professionnelles initiales, l’art. 30a OASA ne s'applique qu'à la première formation suivie. Les personnes qui désirent poursuivre leur formation peuvent déposer une demande d'autorisation de séjour pour cas de rigueur ordinaire en vertu des dispositions actuelles régissant les cas de rigueur.

Au vu de ces circonstances, l'appréciation que l'autorité intimée a faite de la situation de la recourante en rejetant sa demande sous l'angle des art. 30 al. 1 let. b  LEI et 30a OASA ne prête aucunement le flanc à la critique. Dans ces conditions, le tribunal, qui doit faire preuve de retenue et respecter la latitude de jugement conférée à l'OCPM, ne saurait en corriger le résultat en fonction d'une autre conception, sauf à statuer en opportunité, ce que la loi lui interdit de faire (art. 61 al. 2 LPA ; cf. aussi ATF 140 I 201 consid. 6.1 et les références citées).

19.         Pour le surplus, par jugement du 29 juin 2020 (JTAPI/4______), confirmant la décision de l’OCPM du 9 mai 2019 qui refusait de préaviser favorablement la demande d'autorisation de séjour de la recourante et prononçait son renvoi, en dépit de la durée de son séjour et de la bonne intégration en Suisse dont elle se prévalait, a déjà considéré que la situation de cette dernière n'était pas constitutive d'un cas de rigueur personnel, notamment sous l'angle de l'opération Papyrus (art. 30 al. 1 let. b LEI et 31 OASA).

Un recours étant actuellement pendant contre ce jugement, il appartient désormais à la chambre administrative de se prononcer sur ce point.

20.         Compte tenu de ce qui précède, le recours, mal fondé, doit être rejeté.

21.         Vu cette issue, un émolument de CHF 500.- sera mis à la charge de la recourante, qui succombe (art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03). Cette dernière n'a pas droit à une indemnité de procédure (art. 87 al. 2 LPA a contrario).

22.         En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent jugement sera communiqué au SEM.

 


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 20 décembre 2021 par Madame A______ contre la décision de l'office cantonal de la population et des migrations du 18 novembre 2021 ;

2.             le rejette ;

3.             met à la charge de la recourante un émolument de CHF 500.-, lequel est couvert par l'avance de frais ;

4.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

 

Au nom du Tribunal :

La présidente

Michèle PERNET

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties, ainsi qu’au secrétariat d'État aux migrations.

Genève, le

 

La greffière