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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/2073/2021

JTAPI/51/2022 du 24.01.2022 ( ICCIFD ) , REJETE

REJETE par ATA/1235/2022

Descripteurs : OBLIGATION D'ENTRETIEN
Normes : LIFD.33.al1.letc; LIPP.33
En fait
En droit
Par ces motifs

république et

canton de genève

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2073/2021 ICCIFD

JTAPI/51/2022

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 24 janvier 2022

 

dans la cause

 

Madame A______ et Monsieur B______, représentés par Me B______, avocat, avec élection de domicile

contre

ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE

ADMINISTRATION FÉDÉRALE DES CONTRIBUTIONS

 


 

 

EN FAIT

1.             Par jugement du 9 mars 2010, le Tribunal de première instance (TPI), statuant sur requête commune, a :

-          prononcé le divorce de Madame C______ et Monsieur B______ ;

-          dit que les deux ex-époux continueraient d'exercer conjointement l'autorité parentale sur leurs deux enfants communs (D______, née le ______ 1998 et E______, né le ______ 2001), ainsi qu'une garde alternée selon des modalités auxquelles il pouvait être dérogé par accord ;

-          dit que chacune des parties assumerait l'entretien des enfants pendant qu'elle en aurait la garde (plus importante que celle de l’ex-époux) ;

-          dit que les allocations familiales seraient versées à l’ex-épouse ;

-          donné acte à M. B______ de son engagement à verser à son ex-épouse, dès le 9 février 2010, à titre de contribution d'entretien de chaque enfant, par mois et d'avance, les sommes suivantes : CHF 1'000.- jusqu'à l'âge de 10 ans révolus, CHF 1'200.- de 10 ans à 15 ans révolus et CHF 1'500.- de 15 ans jusqu'à la majorité, voire au-delà, mais au maximum jusqu'à l'âge de 25 ans en cas d'études sérieuses et suivies ;

-          donné acte à Mme C______ de son engagement de prendre à sa charge exclusive, pour les deux enfants, avec les montants alloués par M. B______ et les montants reçus à titre d'allocations familiales, les primes d'assurances, les avances de frais médicaux hors thérapies, les frais de garde et d'habillement, les frais scolaires, les frais relatifs aux loisirs ainsi qu'aux activités parascolaires et extrascolaires ;

-          donné acte à M. B______ de son engagement d'avancer la totalité des frais de thérapie des enfants dont le remboursement par l'assurance-maladie se ferait sur le compte bancaire ouvert par les parties en faveur de enfants ;

-          donné acte aux parties de ce qu'elles renonçaient à toute contribution à leur propre entretien.

2.             Le 11 mai 2010, M. B______ s'est remarié avec Madame A______ (ci-après : les contribuables, puis les recourants).

3.             Dans leurs déclarations fiscales 2011, 2012 et 2013, ces derniers ont indiqué deux charges de famille pour les enfants du contribuable et demandé qu'un montant de CHF 28'800.- soit déduit de leurs revenus pour les années fiscales 2011 et 2012, respectivement un montant de CHF 30'000.- pour l'année fiscale 2013, au titre de paiement de contributions d'entretien.

4.             Dans le cadre de leur taxation pour ces années, ils ont notamment expliqué à l’administration fiscale cantonale (ci-après : AFC-GE) qu'à partir de 2011, le contribuable n'avait certes plus versé la totalité des contributions d'entretien à son ex-épouse, mais qu'un autre système avait été mis en place avec elle, dès lors qu'elle ne lui restituait pas les montants avancés pour les frais médicaux et remboursés par l'assurance-maladie : il déclarait avoir opéré une compensation entre les contributions d'entretien qu'il devait verser selon le jugement de divorce et les nombreuses et diverses dépenses qu'il avait directement assumées en lien avec l'entretien de se ses enfants.

5.             En les taxant pour ces années, par bordereaux du 8 février 2016, l'AFC-GE a admis, au titre de contributions d'entretien, la totalité des frais médicaux payés par le contribuable pour ses enfants, à l'exclusion de tout autre montant en l'absence d'une modification du jugement de divorce. Elle a refusé pour le reste les deux charges de famille, celles-ci étant attribuées à la bénéficiaire des contributions d'entretien.

6.             Ces taxations ont été confirmées tant par le Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal), que par la chambre administrative de la Cour de justice et le Tribunal fédéral (cf. arrêt du 21 avril 2020 dans la cause 2C_544/2019).

Devant le Tribunal fédéral, la question litigieuse était de savoir si un contribuable qui ne versait pas les contributions d'entretien de la manière prévue par le jugement de divorce, mais qui prétendait avoir mis en place de manière informelle un système de paiements indirects avec son ex-épouse, pouvait déduire ceux-ci de son revenu, étant précisé que les montants admis en déduction devaient le cas échéant être ajoutés au revenu imposable du crédirentier. Le Tribunal fédéral a jugé que cette question pouvait rester ouverte, le recours du contribuable devant être rejeté en raison du fait qu’il n’avait pas établi avoir payé les contributions d'entretien de ses enfants de manière indirecte, ni qu'un accord informel avait été passé avec son épouse pour mettre en place un tel système de paiement. Le Tribunal fédéral a par ailleurs confirmé que les contribuables ne pouvaient pas bénéficier des charges de famille.

7.             Dans leur déclaration fiscale pour l’année 2014, les contribuables ont indiqué que le contribuable avait versé à son ex-épouse CHF 30'000.- au titre contribution d'entretien, précisant que cette obligation datait du 9 février 2010 (date du début du versement des contributions d'entretien, prévu par le jugement de divorce), sans avoir joint les preuves du versement de cette prestation. Ils ont à nouveau fait valoir les deux charges de famille pour les enfants du contribuable.

8.             Par courrier du 3 juin 2016, l'AFC-GE les a invités à lui remettre, d’ici au 1er juillet suivant, des justificatifs pour le versement de la pension alimentaire en 2014, avec le détail des montants par personne. Par la suite, à leur demande, elle leur a accordé les prolongations de ce délai (au 31 août, puis au 30 septembre 2016).

9.             Par courriel du 30 septembre 2016, le contribuable a communiqué à l'AFC-GE un tableau, précisant qu’il s’agissait d’un « résumé de 3 postes (frais médicaux [CHF 6'176,05], frais des enfants payés par la carte visa [CHF 48’482,95] et frais divers payés par virement bancaire [CHF 2'844.-]) », divers relevés bancaires et des factures de thérapie pour son fils, et lui a demandé de suspendre la taxation jusqu’à droit connu dans la cause 2C_544/2019.

10.         Par bordereaux du 25 novembre 2019, l'AFC-GE a taxé les contribuables pour les impôts fédéral direct (IFD), cantonal et communal (ICC) 2014. Ce faisant, elle a refusé la déduction de CHF 30’000.- requise pour les contributions d'entretien, au motif qu’ils n’avaient pas apporté les justificatifs y relatifs.

11.         Le 19 décembre 2019, les contribuables ont formé réclamation contre ces bordereaux.

Par courriel du 30 septembre 2019, ils avaient produit les justificatifs requis, mais l'AFC-GE les avait soit perdus soit ignorés. En outre, cette dernière n’avait pas suspendu leur taxation 2014 dans l’attente d’une décision finale concernant leurs taxations pour les années 2011 à 2013, la problématique étant identique. Elle leur avait par ailleurs refusé à tort le barème pour couple, puisqu’ils étaient mariés et vivaient en ménage commun avec les enfants du contribuable. Il en résultait que leur taxation 2014 était nille, car violant des règles essentielles de la procédure. L'AFC-GE devait constater cette nullité ou annuler les taxations entreprises, celles-ci ayant pour effet de leur faire perdre un degré d’instance, par la seule faute de l'AFC-GE. En outre, l'AFC-GE devait compléter leur dossier, puis leur donner l’accès à celui-ci afin qu’ils s’assurent de son exhaustivité. Enfin, leur déclaration fiscale 2014 devait être confirmée en tous points.

12.         Le 10 août 2020, les contribuables ont saisi l'AFC-GE d’une demande de reconsidération de leurs taxations pour les années 2011 à 2013. Par décisions du 17 septembre 2020, l'AFC-GE a refusé d’entrer en matière sur cette requête, aucun motif légal de révision n’étant réalisé. Le 19 octobre 2020, les contribuables ont formé une réclamation également contre ces décisions, que l'AFC-GE a rejetée par décisions du 22 avril 2021. Par acte du 31 mai 2021, les contribuables ont recouru contre ces décisions devant le tribunal. Ce recours a été enregistré sous le n° de cause A/1______.

13.         Par courrier du 30 octobre 2020, puis par rappel recommandé du 11 janvier 2021, l'AFC-GE a demandé aux contribuables de lui remettre le justificatif pour le versement des cotisations à la prévoyance professionnelle liée (3ème pilier) et à la caisse AVS et pour les primes à l’assurance-maladie.

14.         Aucune suite n’a été donnée à cette requête.

15.         Par décisions du 12 mai 2021, l'AFC-GE a admis partiellement la réclamation du 19 décembre 2019 relative à l’année fiscale 2014, en sens que seuls les frais de thérapie de l’enfant (CHF 6'176.-) étaient admis au titre de contribution d’entretien, la rejetant pour le surplus (sur des points ne faisant pas l’objet du présent litige), motif pris du fait que les contribuables n’avaient pas donné suite à ses demandes de renseignements des 30 octobre 2020 et 11 janvier 2021.

16.         Par acte du 14 juin 2021, les contribuables ont recouru contre ces décisions auprès du tribunal, concluant principalement, sous suite des frais et dépens, à ce que leur nullité et celle des bordereaux y relatifs soit constatée et, subsidiairement, à leur annulation et à « l’admission de leur déclaration fiscale » 2014.

Préalablement, ils ont sollicité la suspension de l’instruction de leur recours jusqu’à droit connu dans la cause A/1______ et dans « la demande de révision formée dans le cadre de la taxation 2014 », relevant que l'AFC-GE ne s’était pas encore prononcée sur cette demande.

L’AFC-GE n'avait pas examiné si le contribuable, qui avait assumé l'entretien des enfants dans une mesure plus importante que celle à laquelle il était tenu, bénéficiait pour « les années concernées d'une remise de dette » de la part de la mère des enfants, cette remise pouvant équivaloir au paiement de la contribution d’entretien. Il avait apporté de nombreuses preuves, à savoir non seulement les justificatifs des paiements en faveur des enfants, mais aussi des échanges de courriels avec la mère au sujet des frais. Si son ex-épouse avait le bénéfice de charges de famille en raison des contributions d'entretien fixées par le jugement de divorce, l'AFC-GE devait soit admettre qu’il avait effectivement payé ces contributions, soit lui accorder deux demi-charges de familles, ainsi que le barème réduit, puisqu’il s’était remarié, tandis que son ex-épouse ne l'était pas.

On était en présence d’un résultat choquant heurtant le sentiment de l’équité, dès lors que le contribuable avait assumé la garde alternée des enfants, les frais de leur entretien pendant cette garde, les frais de leur thérapie, les frais que l’assurance avait remboursés à la mère mais que celle-ci ne lui avait pas rétrocédé et une grande partie des frais d'entretien revenant à la mère, mais qu’il avait lui-même supportés « par le biais de contributions directes en faveur des enfants en exécution des contributions d'entretien fixées par le jugement de divorce ». Il ne pouvait déduire aucun des frais d'entretien des enfants, alors qu’il avait assumé presque exclusivement leur entretien, tandis que la mère des enfants, qui n'avait assumé qu'une infime partie de leur entretien, était récompensée par le bénéfice de charges de famille.

Les décisions entreprises étaient nulles parce que l'AFC-GE ne s’y était pas prononcées sur les conclusions formulées dans leur réclamation du 19 décembre 2019, dont notamment celles tendant à la consultation de leur dossier, à la nullité des taxations querellées et à la reprise de la procédure de taxation ab ovo, compte tenu des vices de procédure. Confirmant les décisions de taxation du 25 novembre 2019, sans pour autant aborder la question de leur nullité, ni leur permettre de consulter le dossier, les décisions du 12 mai 2021 violaient des règles essentielles de procédure, si bien qu’elles étaient nulles. Par ailleurs, la procédure de révision en cours n'y était même pas mentionnée, ce qui les empêchait de recourir utilement.

Ces décisions devaient être annulées, dès lors que l'AFC-GE ne s’y était prononcée ni sur les arguments mis en exergue dans la procédure de réclamation, ni sur ceux avancés dans le cadre de la procédure de révision en cours.

Enfin, ils avaient déposé une déclaration fiscale complète, accompagnée de toutes ses annexes et pièces justificatives. Pour cette raison, ils avaient demandé à consulter leur dossier en mains de l'AFC-GE pour s'en assurer, requête que cette dernière avait purement et simplement ignorée « afin de [leur] reprocher de ne pas avoir répondu à la demande de renseignements, ce qui [était] parfaitement faux, comme la réclamation le faisait valoir ».

17.         Dans sa réponse du 23 juillet 2021, l'AFC-GE a conclu principalement au rejet du recours et, subsidiairement, à la rectification des taxations 2014 en défaveur des recourants, en ce sens que les frais de thérapie déductibles devaient être ramenés à CHF 5’040,60. Préalablement, elle a conclu au rejet de la demande de suspension de l’instruction du recours.

Les recourants faisaient valoir que leur demande de révision du 10 août 2020 concernait également l'année 2014, alors qu’elle visait uniquement les périodes fiscales 2011 à 2013. En tout état de cause, une demande de révision ne pouvait pas être formée contre une taxation qui n'était pas encore entrée en force, ce qui était précisément le cas de celle en cause ici.

Il ne se justifiait aucunement de suspendre la présente procédure dans l'attente du droit connu dans la cause A/1______, celle-ci ayant un objet différant. Elle s’opposait donc à cette suspension.

Les décisions contestées ne répondaient certes pas explicitement à l'argument de nullité des taxations du 25 novembre 2019. Toutefois, elle avait bel et bien pris en compte les justificatifs que le recourant lui avait envoyés, en ce sens que la déduction des frais de thérapie justifiés par pièces avait été acceptée. Pour le surplus, après le dépôt de leur réclamation du 19 décembre 2019, les recourants n’avaient pas pris contact avec elle pour venir consulter leur dossier. A cet égard, elle soulignait le fait que les recourants avaient connaissance et étaient en possession de toutes les pièces relatives à la procédure de taxation, leur dossier auprès d’elle n’étant constitué que de pièces produites par eux-mêmes. En tout état, elle avait produit intégralement leur dossier, de sorte que si un vice de procédure devait exister au sujet de l'accès à ce dossier, il serait de toute façon réparé devant le tribunal de céans, qui disposait d'un plein pouvoir d’examen.

Sur le fond, le recourant n'ayant nullement démontré avoir payé directement en mains de son ex-épouse les contributions d'entretien pour ses deux enfants, telles que prévues par le jugement de divorce, c'était à raison qu’elle lui avait refusé la déduction des CHF 30'000.- requise dans sa déclaration fiscale 2014. Sur la base des justificatifs que le recourant lui avait remis au stade de la réclamation, elle avait accepté une déduction de CHF 6'176.- pour frais de thérapie, ce quand bien même une facture y relative de CHF 1'135,60 datait de 2013 et non de 2014. S'agissant des autres frais listés dans le tableau fourni par le recourant, ils concernaient majoritairement des frais de restaurants, de coiffeur et de magasins. L'on ne voyait pas en quoi ces frais avaient été déboursés en faveur des enfants du recourant. Il s'agissait plutôt des frais d'entretien privés non déductibles. Pour le surplus, tout comme pour les années 2011 à 2013, le recourant n'avait pas prouvé, pour 2014, s'être mis d'accord avec son ex-épouse sur un nouveau système de paiement de la pension alimentaire sous la forme d'un paiement indirect en lieu et place du système prévu par le jugement de divorce, à supposer encore qu'un tel mode de paiement non prévu par ce jugement soit déterminant sur le plan fiscal. Partant, en l'absence de la preuve d'un arrangement clair, les différents justificatifs produits par le recourant ne permettaient pas de démontrer la réalité d'un paiement indirect des contributions d'entretien en remplacement d'un versement en numéraire en mains de son ex-épouse. C'était donc à raison qu’elle avait limité la déduction aux frais de thérapie pris en charge et justifiés par le recourant. Elle s'en rapportait toutefois à justice s'agissant d'une reformatio in peius d'une déduction admissible de CHF 5'040,60, en lieu et place de CHF 6’176.-, la facture de CHF 1'135,45 concernant l'année fiscale 2013.

18.         Par réplique du 20 septembre 2021, les recourants ont notamment ajouté que les points (nullité des taxations, accès au dossier, suspension de la taxation et remise de dette) sur lesquels l'AFC-GE ne s’était pas prononcée dans les décisions querellées ne sauraient être traités pour la première fois par le tribunal de céans, faute de quoi celui-ci outrepasserait « sa compétence fonctionnelle, enfreindrait le principe de l'épuisement des voies de droit préalables et, en définitive, priverait les recourants d'un degré de juridiction » (cf. page 2 s). C’était seulement dans sa réponse que l'AFC-GE indiquait les motifs pour lesquels ces points devaient être rejetés, violant ainsi les principes relatifs à l'objet du litige. Le tribunal de céans pouvait exceptionnellement guérir, au stade du recours, une violation du droit d'être entendu, mais tel n'était pas le cas lorsque, comme en l'espèce, la décision entreprise était dénuée de toute motivation sur des objets soumis à l'autorité.

S'agissant de la consultation du dossier, ils soulignaient à nouveau que la décision de taxation du 25 novembre 2019 leur faisait faussement reproche de ne pas avoir produit de documents, alors qu’ils l’avaient fait. Ils rappelaient que dans leur réclamation, ils avaient demandé que leur dossier soit complété et qu'ensuite l’accès à celui-ci leur soit donné, pour qu'ils puissent s'assurer de son exhaustivité, et qu’ils avaient déposé un dossier complet, accompagné de toutes les pièces. Ils avaient en outre demandé la suspension de la procédure de réclamation jusqu'à droit connu dans la cause pendante devant le Tribunal fédéral. L'AFC-GE n'avait répondu à aucune de ces requêtes. Compte tenu de l'obligation de l'AFC-GE d'agir de bonne foi, ils étaient légitimés à attendre qu'elle complète leur dossier et les avertisse que cela avait été fait et que celui-ci était disponible pour consultation et vérification avant que la décision sur réclamation ne soit rendue. Prétendre, au stade du recours, que leur dossier tel que présenté devant le tribunal de céans était celui que l'AFC-GE leur aurait mis à disposition s'ils l'avaient demandé revenait à « refuser de statuer et à imposer une probatio diabolica aux contribuables qui ne peuv[ai]ent que constater, après consultation du dossier en mains du tribunal que le dossier de l'AFC [était] incomplet car ne comportant pas toutes les pièces déposées par les contribuables ».

Enfin, l'AFC-GE n’avait répondu à aucune des requêtes contenues dans leur réclamation du 19 décembre 2019 et avait refusé de statuer sur celles-ci, de mettre à leur disposition leur dossier pour consultation, de statuer sur la nullité des décisions de taxation, de prendre en compte « le complément » présenté le 10 août 2020, de statuer sur la recevabilité de leur demande de révision du 10 août 2020 et de motiver sa décision. Elle ne leur avait pas donné l'opportunité de se déterminer après l'arrêt du Tribunal fédéral 2C_544/2019 et avait produit, après coup, une réponse « en contravention flagrante du cadre de l'objet du litige ». La procédure suivie par l'AFC-GE était à ce point « irrespectueuse des [leurs] droits essentiels » et des garanties essentielles de procédure que la nullité des décisions entreprises s'imposait.

19.         Dans sa duplique du 14 octobre 2021, l'AFC-GE a elle-aussi persisté dans ses conclusions, relevant que les recourants n’avançaient aucun argument nouveau susceptible d'influer sur le sort du litige et qu'ils ne produisaient aucune nouvelle pièce déterminante.

 

EN DROIT

1.             Le tribunal connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions sur réclamation de l'AFC-GE (art. 115 al. 2 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 49 de la loi de procédure fiscale du 4 octobre 2001 - LPFisc - D 3 17 ; art. 140 de la loi fédérale sur l’impôt fédéral direct du 14 décembre 1990 - LIFD - RS 642.11).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable sous l’angle de des art. 49 LPFisc et 140 LIFD.

3.             A titre préalable, les recourants sollicitent la suspension de l’instruction du recours jusqu’à droit connu dans la cause A/1______ et celui dans « la demande de révision formée dans le cadre de la taxation 2014 ».

4.             L’art. 14 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10), applicable en matière fiscale par renvoi de l’art. 2 al. 2 LPFisc, prévoit que lorsque le sort d’une procédure administrative dépend de la solution d’une question de nature civile, pénale ou administrative relevant de la compétence d’une autre autorité et faisant l’objet d’une procédure pendante devant ladite autorité, la suspension de la procédure administrative peut, le cas échéant, être prononcée jusqu’à droit connu sur ces questions.

L'art. 14 LPA est une norme potestative et son texte clair ne prévoit pas la suspension systématique de la procédure chaque fois qu'une autorité civile, pénale ou administrative est parallèlement saisie. La suspension de la procédure ne peut pas être ordonnée chaque fois que la connaissance du jugement ou de la décision d'une autre autorité serait utile à l'autorité saisie, mais seulement lorsque cette connaissance est nécessaire parce que le sort de la procédure en dépend. Une procédure ne saurait dès lors être suspendue sans que l'autorité saisie n'ait examiné les moyens de droit qui justifieraient une solution du litige sans attendre la fin d'une autre procédure. Il serait en effet contraire à la plus élémentaire économie de procédure et à l'interdiction du déni de justice formel fondée sur l'art. 29 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) d'attendre la décision d'une autre autorité, même si celle-ci est susceptible de fournir une solution au litige, si ledit litige peut être tranché sans délai sur la base d'autres motifs (ATA/1278/2021 du 23 novembre 2021 consid. 2 et les arrêts cités).

5.             En l’espèce, l’objet du litige dans la cause A/1______ se limite seulement à la question de savoir si c’est à bon droit ou non que l'AFC-GE a refusé d’entrer en matière sur la demande de révision du 10 août 2020 (cf. à ce sujet not. ATA/338/2020 du 7 avril 2020 consid. 5), si bien que l’issue dans cette cause n’aura aucune incidence sur celle de la présente procédure compte tenu de la problématique juridique à résoudre, comme il sera expliqué ci-après.

Pour le surplus, force est de constater, avec l’autorité intimée, que les recourants n’ont à aucun moment requis la révision des taxations 2014 - ce qu’ils ne pouvaient du reste pas faire, celles-ci n’étant pas encore entrées en force parce que faisant précisément l’objet du présent litige -, mais seulement de celles des périodes 2011 à 2013, de sorte qu’une éventuelle suspension de l’instruction du recours pour ce motif est exclue. En effet, leur requête du 10 août 2020 et les décisions sur réclamation subséquentes de l'AFC-GE du 17 septembre 2020 ne portent que sur les ICC et IFD 2011 à 2013. Les recourants semblent perdre de vue que leur réclamation du 19 octobre 2020 formée contre ces décisions comportait manifestement une erreur de plume [« IFD (année fiscale 2014 ; cf. pièce 6) »], ce qui est corroboré par le fait que la pièce en question était la décision relative à l’IFD 2013 et non à l’IFD 2014 en cause ici. En s’attachant seulement à leur propre erreur de plume pour insister sur le fait que l'AFC-GE aurait prétendument dû statuer en révision également à l’égard des ICC et IFD 2014, leurs griefs à cet égard frôlent la témérité.

Dès lors, la demande de suspension de la procédure sera rejetée.

6.             Dans un grief d'ordre formel, qu'il convient d'examiner en premier lieu (cf. ATF 141 V 557 consid. 3), les recourants font valoir que les décisions entreprises sont nulles et se plaignent notamment du manque de motivation de celles-ci et du fait que l'AFC-GE leur aurait refusé l’accès à leur dossier.

7.             La nullité absolue ne frappe que les décisions affectées des vices les plus graves, manifestes ou particulièrement reconnaissables, et pour autant que la constatation de la nullité ne mette pas sérieusement en danger la sécurité du droit. Hormis les cas de nullité expressément prévus par la loi, la nullité ne doit être admise qu'exceptionnellement, lorsque les circonstances sont telles que le système d'annulabilité n'offre manifestement pas la protection nécessaire. Des vices de fond n'entraînent qu'à de rares exceptions près la nullité d'une décision ; en revanche, de graves vices de procédure, ainsi que l'incompétence qualifiée de l'autorité qui a rendu la décision sont des motifs de nullité (ATF 143 III 495 consid. 2.2 ; 139 II 243 consid. 11.2 ; 138 II 501 consid. 3.1 et les références). Des vices de procédure qui tiennent à des violations du droit d'être entendu sont en soi guérissables et ne conduisent en règle générale qu'à l'annulabilité de la décision entachée du vice. S'il s'agit cependant d'un manquement particulièrement grave aux droits essentiels des parties, les violations du droit d'être entendu entraînent aussi la nullité. C'est en particulier le cas quand la personne concernée par une décision, à défaut d'avoir été citée, ignore tout de la procédure ouverte à son encontre et, partant n'a pas eu l'occasion d'y prendre part (ATF 129 I 361 consid. 2.1 et les arrêts cités).

Il résulte ainsi en particulier de ce qui précède que l'illégalité d'une décision ne constitue pas par principe un motif de nullité (ATF 130 II 249 consid. 2.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_538/2013, 6B_563/2013 du 14 octobre 2013 consid. 5.3).

Dans cette mesure, en règle générale, un acte administratif illégal est simplement annulable dès lors que la plupart des décisions viciées le sont par leur contenu. Reconnaître la nullité autrement que dans des cas tout à fait exceptionnels conduirait à une trop grande insécurité ; par ailleurs, le développement de la juridiction administrative offrant aux administrés suffisamment de possibilités de contrôle sur le contenu des décisions, on peut attendre d'eux qu'ils fassent preuve de diligence et réagissent en temps utile (ATF 138 III 49 consid. 4.4.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_1/2013 du 11 janvier 2013 consid. 4 ; 9C_333/2007 du 24 juillet 2008 consid. 2.1).

La nullité d'une décision peut être invoquée en tout temps, devant toute autorité et doit être constatée d'office (cf. ATF 139 II 243, 260 ; 138 II 501, 503 ; 137 I 273, 275 ; 129 I 361, 363 ; 122 I 97, 98 ; Benoît BOVAY, Procédure administrative, 2000, p. 281).

8.             Garanti par l'art. 29 al. 2 Cst., le droit d'être entendu est une garantie constitutionnelle de caractère formel, dont la violation doit entraîner l'annulation de la décision attaquée, indépendamment des chances de succès du recourant sur le fond (ATF 142 II 218 consid. 2.8.1 et les références). Il implique notamment, pour l'autorité, l'obligation de motiver sa décision. Selon une jurisprudence constante, l'obligation de motiver n'impose pas à l'autorité d'exposer et de discuter tous les faits, moyens de preuve et griefs invoqués par les parties (ATF 141 V 557 consid. 3.2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_298/2017 du 30 avril 2018 consid. 2.1). Il suffit, au regard de ce droit, qu'elle mentionne, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidé et sur lesquels elle a fondé sa décision, de manière à ce que les intéressés puissent se rendre compte de la portée de celle-ci et l'attaquer en connaissance de cause (ATF 142 II 154 consid. 4.2 ; 139 IV 179 consid. 2.2 ; 138 I 232 consid. 5.1). La portée de l'obligation de motiver dépend des circonstances concrètes, telles que la nature de la procédure, la complexité des questions de fait ou de droit, ainsi que la gravité de l'atteinte portée à la situation juridique des parties. Dès lors que l'on peut discerner les motifs qui ont guidé la décision de l'autorité, le droit à une décision motivée est respecté, même si la motivation présentée est erronée. En outre, la motivation peut être implicite et résulter des différents considérants de la décision (ATF 141 IV consid. 3.2.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_415/2019 du 27 mars 2020 consid. 2.1 et les arrêts cités ; 1C_298/2017 du 30 avril 2018 consid. 2.1). Il n'y a ainsi violation du droit d'être entendu que si l'autorité ne satisfait pas à son devoir minimum d'examiner les problèmes pertinents (ATF 134 I 83 consid. 4.1 ; 133 III 439 consid. 3.3 ; 130 II 530 consid. 4.3 et les arrêts cités ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_56/2015 du 13 mai 2015 consid. 2.1).

9.             Le droit d'être entendu garantit également au justiciable le droit d'avoir accès au dossier pour connaître préalablement les éléments dont dispose l'autorité, et jouir ainsi d'une réelle possibilité de faire valoir ses arguments avant qu'une décision ne soit prise touchant sa situation juridique, et celui de s'exprimer à propos de toute pièce décisive, dans la mesure où elle l'estime nécessaire (ATF 142 II 218 consid. 2.3 ; 141 V 557 consid. 3.1 ; 140 I 285 consid. 6.3.1 ; 137 II 266 consid. 3.2 ; 135 II 286 consid. 5.1 et les références citées). Le droit de consulter le dossier n'est cependant pas absolu et son étendue doit être définie de cas en cas, en tenant compte des intérêts en présence et de toutes les circonstances de l'espèce. Il peut être restreint, voire supprimé pour la sauvegarde d'un intérêt public prépondérant, dans l'intérêt d'un particulier ou dans l'intérêt du requérant lui-même. Lorsque le litige porte sur l'accès à un document déterminé, les parties ne peuvent évidemment invoquer leur droit d'être entendues pour en obtenir la communication en cours de procédure (arrêt du Tribunal fédéral 1C_277/2016 du 29 novembre 2016 consid. 2.1).

10.         Selon la jurisprudence, la violation du droit d'être entendu peut cependant être réparée lorsque la partie lésée a la possibilité de s'exprimer devant une autorité de recours jouissant d'un plein pouvoir d'examen (ATF 142 II 218 consid. 2.8.1). Une réparation de la violation du droit d'être entendu peut également se justifier, même en présence d'un vice grave, lorsque le renvoi constituerait une vaine formalité et aboutirait à un allongement inutile de la procédure (cf. ATF 137 I 195 consid. 2.3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_742/2016 du 26 janvier 2017 consid. 10.1 et les références citées).

11.         En l’espèce, les recourants soutiennent que les décisions litigieuses seraient nulles en raison du fait que l'AFC-GE : ne s’est pas prononcée sur tous les griefs formulés dans leur réclamation du 19 décembre 2019, n’a pas mis à leur disposition leur dossier pour consultation, n’a pas motivé ses décisions, n’a pas suspendu la procédure de réclamation jusqu’à droit jugé dans la cause 2C_544/2019 et ne leur a pas donné l’occasion de se déterminer sur l’arrêt que Tribunal fédéral a rendu dans cette cause.

Mêmes si elles étaient avérées, aucune de ces raisons ne remplit cependant les conditions posées par la jurisprudence pour constater la nullité des décisions entreprises. En effet, s’il est vrai que l'AFC-GE ne s’est pas prononcée sur leurs griefs formels, cela n’a eu aucune conséquence pour les recourants, qui ont pu faire efficacement usage de leur droit de recours devant le tribunal, qui jouit d'un plein pouvoir d'examen.

S’agissant en particulier de l’accès à leur dossier, ils ne l’ont à aucun moment requis concrètement de l'AFC-GE, mais se sont limités, dans leur réclamation 19 décembre 2019, à la constatation que cette dernière « devait » leur en donner droit, si bien qu’ils ne l’ont même pas mise en situation de leur refuser ce droit. Agissant ainsi, les recourants contreviennent manifestement aux règles de la bonne foi, lesquelles exigent, tant de l'administration et que des administrés, de se comporter réciproquement de manière loyale et non contradictoire (sur le principe de la bonne foi not. ATF 137 II 182 consid. 3.6.2). De plus, ils se plaignent du fait que leur dossier, tel que produit par l'AFC-GE devant le tribunal, ne contiendrait pas toutes les pièces qu’ils y auraient versées, sans même préciser de quelles pièces il s’agirait concrètement.

Pour le surplus, le caractère succinct de la motivation des décisions entreprises n’a de toute évidence pas empêchés les recourants d’en comprendre le sens et la portée, ni d’exposer en détails dans leur recours les raisons qui commanderaient à leur sens leur annulation. Il ne se justifie donc aucunement de renvoyer la cause à l’autorité intimée pour ce motif, ce qui entraînerait une procédure purement formelle et un retard inutile, ce d’autant que cette dernière s’est expliquée plus en détail depuis lors (cf. not. ATF 137 I 195 consid. 2.3.2 ; ATA/301/2012 du 15 mai 2012). C’est le lieu de rappeler qu’un défaut de motivation peut être réparé par la prise de position de l’autorité intimée, suite à un recours, si l’administré se voit offrir la possibilité de s’exprimer à son sujet et que l’autorité de recours peut examiner librement les questions de fait et de droit (cf. ATF 133 I 201 consid. 2.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_272/2010 du 16 mars 2011 consid. 2.6.2), ce qui a été le cas en l’occurrence. Les recourant perdent en outre de vue que la non production de justificatifs qui leur est reprochée dans ces décisions concerne les justificatifs que l'AFC-GE leur a demandé à l’égard de leurs cotisations à l’AVS et à la prévoyance, justificatifs qu’ils n’ont effectivement jamais produits, et non pas ceux relatifs à la contribution d’entretien, dont l'AFC-GE a bel et bien tenu compte.

En outre, l'AFC-GE n’était aucunement tenue de suspendre l’instruction de la réclamation du 19 décembre 2019 jusqu’à droit jugé dans la cause 2C_544/2019, étant donné que dans cette cause, la question était de savoir si le recourant avait effectivement versé ou non une contribution d’entretien au cours des années 2011 à 2013, et non pas au cours de l’année 2014 en cause ici, si bien que l’issue dans cette cause ne conditionnait aucunement le sort de leur réclamation.

Enfin, dans la mesure où le Tribunal fédéral a rendu son arrêt dans ladite cause plus d’une année avant que l'AFC-GE ne statue sur leur réclamation, les recourants ne sauraient se plaindre du fait que cette autorité ne les a pas invités à se déterminer sur cet arrêt. Rien ne les empêchait en effet de le faire spontanément, s’ils estimaient que cet arrêt pouvait avoir une quelconque incidence sur le sort de leur réclamation, et ils disposaient d’un délai de plus d’une année pour le faire, si bien que les griefs qu’ils font à l’autorité intimée à cet égard contreviennent ici encore au principe de la bonne foi.

Il découle de ce qui précède que tous leurs griefs de nature formelle doivent être écartés.

12.         En principe, le contribuable ne peut déduire de son revenu ses frais d'entretien et ceux de sa famille (cf. art. 34 let. a LIFD et 38 let. a de la loi sur l’imposition des personnes physiques du 27 septembre 2009 - LIPP - D 3 08). D'après les art. 33 al. 1 let. c LIFD et 33 LIPP, sont en revanche déductibles du revenu la pension alimentaire versée au conjoint divorcé, séparé judiciairement ou de fait, ainsi que les contributions d'entretien versées à l'un des parents pour les enfants sur lesquels il a l'autorité parentale, à l'exclusion toutefois des prestations versées en exécution d'une obligation d'entretien ou d'assistance fondée sur le droit de la famille. La pension alimentaire que le contribuable divorcé ou séparé judiciairement ou de fait obtient pour lui-même, ainsi que les contributions d'entretien obtenues par l'un des parents pour les enfants sur lesquels il a l'autorité parentale, constituent, pour leur part, des revenus imposables en application des art. 23 let. f LIFD et 26 let. f LIPP.

Peuvent constituer des contributions d'entretien déductibles les prestations versées de manière régulière ou irrégulière au parent bénéficiaire, ainsi que les paiements indirects, c'est-à-dire le règlement, par le parent astreint à contribution, de charges d'entretien particulières, telles les primes d'assurance-maladie ou l'écolage de l'enfant (arrêts du Tribunal fédéral 2C_502/2015 du 29 février 2016 consid. 4.2 et 2C_1008/2013 du 6 juin 2014 consid. 2). A teneur de la loi, pour pouvoir déduire une contribution d'entretien, le contribuable doit toutefois l'avoir effectivement « versée » (cf. art. 33 al. 1 let. c LIFD et 33 LIPP), ce qu'il lui appartient de démontrer conformément aux règles de répartition du fardeau de la preuve en matière fiscale. Ce ne sont donc que les contributions effectivement payées qui peuvent être prises en compte. Le corollaire de cette règle est que seules les contributions d'entretien effectivement « payées » sont imposables auprès de leur destinataire en vertu des art. 23 let. f LIFD et 26 let. f LIPP (cf. arrêts 2C_233/2017 du 13 avril 2018 consid. 6.2 et 2C_585/2014 du 13 février 2015 consid. 5.1).

Sous l'angle du droit civil, le contribuable ne peut prétendre avoir payé « par compensation » les contributions qu'il devait normalement verser à son ex-épouse pour ses enfants, au motif qu'il aurait assumé l'entretien de ceux-ci à la place de leur mère. La compensation n'étant possible qu'entre deux créances réciproques et, au demeurant, dans une mesure limitée s'agissant de contributions d'entretien, un parent ne peut pas compenser ce qu'il doit au titre de contributions d'entretien pour ses enfants mineurs avec les créances qu'il affirme avoir contre l'autre parent, qui n'est pas le créancier desdites contributions, mais bien les enfants. Selon la jurisprudence civile, le parent débirentier qui fait en sorte que l'autre parent renonce à réclamer les contributions d'entretien dues pour les enfants communs selon le jugement de divorce, après avoir payé certains frais d'entretien qui n'étaient normalement pas à sa charge, bénéficie d'une remise de dette accordée par le parent gardien au nom et pour le compte desdits enfants. Cette jurisprudence ne tranche cependant pas le point de savoir si une telle prise en charge de frais d'entretien supplémentaires par le parent débirentier, en lieu et place de versements directs à l'autre parent tels qu'initialement prévus par le jugement de divorce, peut équivaloir au paiement de contributions d'entretien au sens de l'art. 33 al. 1 let. c LIFD (cf. arrêt du Tribunal fédéral 2C_544/2019 du 21 avril 2020 consid. 6.4 et les réf.).

Le Tribunal fédéral a jugé plusieurs fois que les arrangements à bien plaire entre époux s'écartant du jugement de divorce ne sont en principe pas déterminants sur le plan fiscal, à tout le moins au moment de déterminer qui des deux parents doit bénéficier du taux d'imposition spéciale et des déductions sociales liées à la garde des enfants communs (cf. ATF 141 II 338 consid. 6.3.2 p. 349; 131 II 553 consid. 3.5 p. 557 s.; arrêts 2C_122/2012 du 1er novembre 2012 consid. 4.1 ; 2C_472/2008 du 19 mars 2009 consid. 3.3). Il a laissé ouverte la question de savoir si cette jurisprudence s'applique également en matière de déductions pour contributions d'entretien - ce qui aurait pour conséquence d'empêcher la déduction des paiements indirects non expressément prévus par le jugement de divorce (cf. arrêt 2C_544/2019 du 21 avril 2020 consid. 6.6 et la réf.).

13.         Le contribuable désirant obtenir des déductions fiscales au titre de paiement de contributions d'entretien doit en tous les cas attester la conclusion d'un accord clair (et chiffré) de la charge d'entretien avec l'autre parent et démontrer qu'il a véritablement exécuté les obligations financières qui en découlent. Une certaine rigueur s'impose sur ce point pour des raisons de justice fiscale, car l'admission de déductions au titre de paiement de contributions d'entretien chez l'un des parents conduit en principe à une augmentation du revenu imposable dans une mesure équivalente chez l'autre parent, conformément au principe de correspondance. S'agissant de cet autre parent, il appartiendra du reste à l'autorité fiscale de démontrer la réalité des contributions d'entretien versées avant de pouvoir les imposer auprès de celui-ci, conformément aux règles sur le fardeau de la preuve. Il convient à cet égard d'éviter que des déductions fiscales ne soient admises en application de l'art. 33 al. 1 let. c LIFD, sans qu'aucun montant correspondant ne puisse être qualifié de revenu au sens de l'art. 23 let. f LIFD, faute de preuve suffisante (arrêt du Tribunal fédéral 2C_544/2019 du 21 avril 2020 consid. 6.7 et la réf.).

14.         En l’espèce, le recourant a eu deux enfants d'une première épouse dont il a divorcé en 2010. Aux termes du jugement de divorce, il s'est engagé à lui verser une contribution d'entretien mensuelle pour chacun des deux enfants communs, alors encore mineurs, de CHF 1'000.- jusqu'à l'âge de 10 ans révolus, de CHF 1'200.- de 10 ans à 15 ans révolus et, enfin, de CHF 1'500.- à partir de 15 ans jusqu'à la majorité. Il ressort du dossier qu’il a néanmoins cessé de verser de telles contributions d'entretien dès 2011 déjà.

Cela étant, dans sa déclaration fiscale 2014, le recourant s’est prévalu d’une déduction de CHF 30'000.- pour les contributions d’entretien versées, sans y avoir joint aucun justificatif y relatif. Dans le cadre de la taxation, et sur demande de l’autorité intimée, il s’est limité, à teneur du dossier en possession du tribunal, à produire un « résumé de 3 postes (frais médicaux [CHF 6'176,05], frais des enfants payés par la carte visa [CHF 48’482,95] et frais divers payés par virement bancaire [CHF 2'844.-]) », divers relevés bancaires et des factures de thérapie pour son fils E______, se prévalant ainsi implicitement de la déduction de ces sommes au titre de contributions d’entretien, ce que l'AFC-GE a refusé, excepté le premier de ces montants. C’est le lieu de rappeler que les parties ont le devoir de collaborer à l'établissement des faits (cf. art. 22 LPA), et en particulier à ceux dont ils prétendent tirer un droit, conformément aux principes régissant la répartition du fardeau de la preuve. Les recourants ne peuvent donc se contenter, comme ils le font dans le cadre de la présente procédure, de soutenir que l’autorité intimée aurait égaré ou ignoré des pièces qu’ils lui auraient fait parvenir. S’ils estiment que le dossier transmis au tribunal est potentiellement lacunaire et que certaines preuves qu’ils ont fournies au stade de la procédure non-contentieuse n’y figurent pas, il leur incombe de les fournir derechef et de permettre ainsi au tribunal de statuer non pas sur la base de leurs allégués, mais des faits documentés.

Dans son recours, le recourant ne soutient pas avoir versé une quelconque contribution directement en mains de son ex-épouse. Il prétend, à tous le moins implicitement, avoir droit à la déduction de ces montants au titre de contributions d’entretien qu’il aurait versées indirectement, en assumant lui-même certains frais d'entretien des enfants. A cet égard, il convient de renvoyer au consid. 6.8 de l’arrêt du Tribunal fédéral 2C_544/2019 relatif aux taxations 2011 à 2013 des recourants, à savoir qu’il ne ressort pas non plus du présent dossier que le recourant « se serait engagé à prendre systématiquement en charge certains frais d'entretien déterminés des enfants (p. ex. les primes d'assurances, les avances de frais médicaux hors thérapies, les frais scolaires), ni que son ex-épouse ait accepté que ce report de charges s'assimile à un paiement de contributions d'entretien sous forme indirecte, imposable chez elle. Le recourant, qui ne conteste pas les faits sous cet angle, prétend uniquement avoir modifié, de manière générale, les modalités de versement des contributions d'entretien prévues par le jugement de divorce, tout en faisant grand cas des justificatifs de paiement qu'il a produits - consistant essentiellement en des relevés de carte de crédit - sur lesquels il a mis en évidence les postes en rapport, selon lui, avec des frais d'entretien des enfants. De telles allégations n'ont toutefois que peu de pertinence en la cause. Le système informel mis en place ne permet effectivement pas de poser une limite entre les frais découlant strictement de l'obligation d'entretien de la famille, de même que ceux intervenant pendant l'exercice du droit de garde à charge du parent accueillant les enfants, et ceux qui seraient assumés au titre du réaménagement des modalités des contributions d'entretien fixées par jugement. Cette impossibilité résulte du fait que le recourant et son ex-épouse ne se sont en tout état de cause jamais accordés sur un nouveau système de paiement des contributions d'entretien précis, compréhensible et contrôlable. Partant, en l'absence d'arrangement clair, [ ] les justificatifs de paiement divers produits par le recourant ne permettent pas de démontrer la réalité d'un paiement indirect des contributions d'entretien en remplacement d'un versement en numéraire en mains de son ex-femme. Il convient de rappeler, comme indiqué ci-avant [cf. supra consid. 13], qu'une certaine rigueur s'impose en ce domaine, dès lors que ce qui n'est pas imposé chez l'un des parents doit l'être chez l'autre ».  

Pour le surplus, dès lors qu’il est tenu de verser une contribution d’entretien pour ses enfants, le recourant n’a pas le droit au barème réduit, ni aux charges de famille pour ces derniers. En tout état, dans la mesure où selon le jugement de divorce, il avait une garde des enfants, alors mineurs, moins importante que celle de son ex-épouse, ces allégements fiscaux doivent être attribués à cette dernière (cf. ATF 133 II 305).

Enfin, dans la mesure où le jugement de divorce impose au recourant de prendre en charge les frais de thérapie des enfants, c’est à bon droit que l'AFC-GE les a finalement admis au stade de la réclamation, à concurrence du montant dûment prouvé (CHF 6'176.-). S’agissant de la reprise de la facture datant de 2013 (CHF 1'135,45), le tribunal y renoncera exceptionnellement, étant précisé qu’il n’est pas tenu d’y procéder, les art. 51 al. 1 LPFisc et 143 al. 1 LIFD étant rédigés en la forme potestative.

15.         Au vu de ce qui précède, les décisions contestées et les bordereaux y relatifs doivent être confirmés.

16.         Partant, le recours, mal fondé, doit être rejeté.

17.         Vu cette issue, un émolument de CHF 700.- sera mis à la charge des recourants, qui succombent (art. 144 al. 1 LIFD et 52 al. 1 LPFisc) ; il est couvert par l’avance de frais versée à la suite du dépôt du recours.

18.         Pour les mêmes motifs, les recourants n’ont pas le droit à une indemnité de procédure (art. 87 al. 2 LPA a contrario).

 


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 14 juin 2021 par Madame A______ et Monsieur B______ contre les décisions sur réclamation de l'administration fiscale cantonale du 12 mai 2021 ;

2.             le rejette ;

3.             met à la charge des recourants, conjointement et solidairement, un émolument de CHF 700.-, lequel est couvert par leur avance de frais du même montant ;

4.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Siégeant: Olivier BINDSCHEDLER TORNARE, président, Alia CHAKER MANGEAT et Stéphane TANNER, juges assesseurs.

 

Au nom du Tribunal :

Le président

Olivier BINDSCHEDLER TORNARE

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties.

Genève, le

 

La greffière