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Décisions | Chambre des baux et loyers

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C/11955/2020

ACJC/1224/2023 du 25.09.2023 sur JTBL/774/2022 ( OBL ) , CONFIRME

Normes : CO.271a.al1.leta; CO.271; CO.272.al1; CO.272c
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/11955/2020 ACJC/1224/2023

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des baux et loyers

DU LUNDI 25 SEPTEMBRE 2023

 

Entre

1) Monsieur A______, domicilié ______,
2) Monsieur B
______, domicilié ______,
appelants et intimés sur appel joint d'un jugement rendu par le Tribunal des baux et loyers le 7 octobre 2022, comparant tous deux par Me Serge PATEK, avocat, boulevard Helvétique 6, 1211 Genève 12, en l'Etude duquel ils font élection de domicile,

 

et

 

Monsieur C______ et Madame D______, domiciliés ______, intimés et appelants sur appel joint, tous deux représentés par l'ASLOCA, rue du Lac 12, case postale 6150, 1211 Genève 6, en les bureaux de laquelle ils font élection de domicile.

 

 

 


EN FAIT

A. Par jugement JTBL/774/2022 du 7 octobre 2022, le Tribunal des baux et loyers a déclaré valable le congé notifié le 29 mai 2020 pour le 31 décembre 2020 concernant l'appartement de 5 pièces situé au 3ème étage de l'immeuble sis rue 1______ 8 à E______ [GE] (ch. 1 du dispositif), a déclaré valable le congé notifié le 29 mai 2020 pour le 31 décembre 2020 concernant la place de parc intérieure sise rue 2______ à E______ (ch. 2), a octroyé à D______ et à C______ une prolongation de leurs baux de trois ans, échéant au 31 décembre 2023 (ch. 3), a autorisé D______ et C______ à résilier leurs baux en tout temps, moyennant un préavis écrit de 15 jours pour le 15 ou la fin d'un mois (ch. 4) a diminué de 17.36% le loyer de l'appartement en question et l'a fixé à 18'540 fr. par année, hors charges, dès le 1er janvier 2021 (ch. 5), a condamné A______ et B______ à rembourser à D______ et à C______ le trop-perçu de loyer en découlant (ch. 6), a débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 6; recte 7) et a dit que la procédure était gratuite (ch. 7; recte 8).

En substance, les premiers juges ont considéré que rien ne permettait de retenir que les congés étaient contraires à la bonne foi, de sorte que les congés devaient être validés. En revanche, une prolongation du bail de trois ans s'imposait, au vu des intérêts en présence. Enfin, le Tribunal a procédé à une diminution du loyer sur la base de la baisse du taux hypothécaire.

B. a. Par acte déposée au greffe universel le 16 novembre 2022, A______ et B______ forment appel contre ce jugement. Ils sollicitent la confirmation des chiffres 1, 2, 7 et 8 de son dispositif et l'annulation des chiffres 3 à 6 dudit dispositif et concluent, principalement, au déboutement de D______ et C______ de l'entier de leurs conclusions.

b. Par acte expédié le 19 décembre 2022 à la Cour, D______ et C______ répondent à l'appel et forment appel contre ce jugement. Sur appel, ils concluent à la confirmation du jugement. Sur appel joint, ils sollicitent l'annulation du jugement et concluent, principalement, au déboutement de A______ et de B______ de l'entier de leurs conclusions.

c. Par réplique sur appel principal et réponse sur appel joint du 20 janvier 2023, A______ et B______ ont persisté dans leurs conclusions.

d. Par réplique sur appel joint et duplique sur appel principal du 2 mars 2023, D______ et C______ ont persisté dans leurs conclusions.

e. Par duplique sur appel joint du 11 avril 2023, A______ et B______ ont persisté dans leurs conclusions.

f. Les parties ont été avisées le 23 mai 2023 par le greffe de la Cour de ce que la cause était gardée à juger.

C. Les faits pertinents suivants résultent de la procédure :

a. En date du 19 mars 2002, les consorts A______/B______, alors propriétaires, et F______ et D______, locataires, ont conclu un contrat de bail à loyer portant sur la location d'un appartement de 5 pièces situé au 3ème étage de l'immeuble sis rue 1______ 8 à E______.

Les locaux étaient destinés à l'usage d'habitation.

Le contrat a été conclu pour une durée initiale d'une année et neuf mois, du 1er avril 2002 au 31 décembre 2003, renouvelable ensuite tacitement d'année en année. Le préavis de résiliation était de trois mois.

Le loyer annuel, charges de 1'800 fr. non comprises, a été fixé par le contrat à 16'584 fr. et l'immeuble était soumis au régime HLM.

b. A partir du 1er octobre 2008, le loyer s'est élevé à 19'416 fr. par année et les charges à 2'160 fr.

c. Par avis de majoration de loyer du 7 septembre 2010, un nouveau bail de cinq ans valable dès le 1er janvier 2011, renouvelable de cinq ans en cinq ans, a été proposé aux locataires.

Le loyer était échelonné les trois premières années et fixé à 20'400 fr. du 1er janvier au 31 décembre 2011, à 21'360 fr. du 1er janvier au 31 décembre 2012 et à 22'380 fr. dès le 1er janvier 2013. Il était indexable dès le 1er janvier 2014.

Il était précisé que le loyer proposé se situait dans les limites des loyers usuels du quartier au sens de l'article 269a let. a CO.

d. Le loyer annuel a été indexé à 22'440 fr. dès le 1er janvier 2014.

e. Les parties ont également conclu le 18 février 1998 un contrat de bail portant sur la location d'une place de parc intérieure sise rue 2______ à E______.

Le contrat a été conclu pour une durée initiale d'une année et dix mois, du 1er mars 1998 au 31 décembre 1999.

Le loyer annuel a été fixé par le contrat à 1'932 fr.

f. A______ et B______ sont devenus propriétaires de l'immeuble litigieux à une date indéterminée.

g. L'appartement était occupé par les locataires, ainsi que leur fils, C______, actuellement majeur.

h. Entre avril et août 2017, les locataires se sont plaints à plusieurs reprises auprès de la régie représentant les bailleurs (ci-après : la régie) de nuisances sonores diurnes et nocturnes de la part de leur voisin du dessous, G______, faisant notamment parvenir à celle-ci une pétition signée par sept autres personnes, dont H______, fille de B______. La police avait dû intervenir.

Fin 2018, G______ et son épouse I______ ont interpellé la régie au sujet du comportement des locataires qui manifestaient une hostilité virulente et injustifiée à leur égard. Une intervention des bailleurs était requise.

D______ a porté plainte le 17 décembre 2018 contre J______ pour l'avoir injuriée en sortant de l'ascenseur et avoir été agressive à son encontre, et le 29 octobre 2019 contre I______ pour lui avoir donné un coup d'épaule. Ces deux plaintes ont fait l'objet d'une ordonnance de non-entrée en matière le 6 mars 2019, respectivement le 10 mars 2020, les déclarations des parties étant contradictoires.

En mars et décembre 2019, la situation ne s'était pas améliorée selon les locataires qui se plaignaient toujours de nuisances nocturnes.

i. Par avis de résiliation du 29 mai 2020, les bailleurs ont résilié le bail de l'appartement et de la place de parc intérieure pour le 31 décembre 2020.

j. Les locataires ont requis le 4 juin 2020 le motif des congés.

k. Les bailleurs ont répondu le 9 juin 2020 que le motif des résiliations était leur besoin propre de loger K______, fille de B______.

l. Par requête du 25 juin 2020, déclarée non conciliée à l'audience de la Commission de conciliation du 29 septembre 2020 et portée devant le Tribunal le 27 octobre 2020, les locataires ont conclu principalement à l'annulation des congés et subsidiairement à l'octroi d'une prolongation des baux de quatre ans échéant au 31 décembre 2024, avec possibilité de restituer en tout temps les biens moyennant un préavis de 15 jours pour le 15 ou la fin d'un mois, ainsi qu'à la diminution du loyer sur la base de la baisse du taux hypothécaire depuis la dernière augmentation du loyer et ce dès le 1er janvier 2021 (causes C/11955/2020 et C/6______/2020).

Ils ont allégué que les bailleurs étaient propriétaires de nombreux immeubles à Genève, produisant à ce sujet des extraits du Registre foncier, et ont contesté que leur appartement soit le seul disponible dans le parc immobilier de ces derniers. Par ailleurs, la résiliation de leur bail avait des conséquences pénibles pour eux dans la mesure où ils souffraient d'affections médicales graves.

m. Par ordonnance du 23 novembre 2020, le Tribunal a ordonné la jonction des causes C/11955/2020 et C/6______/2020 sous le numéro de cause C/11955/2020.

n. Dans leur réponse du 8 février 2021, les bailleurs ont conclu à la validation des résiliations et au déboutement des locataires, exposant que K______ (anciennement K______ [nom de famille de A______/B______/e.a.]) était locataire d'un appartement de quatre pièces dans l'immeuble sis rue 1______ 4 et qu'elle souhaitait s'installer dans un appartement de cinq pièces, car elle s'apprêtait à agrandir sa famille. L'appartement litigieux se trouvait par ailleurs sur le même palier que celui où vivait sa sœur, H______, qui pourrait ainsi facilement lui venir en aide en cas de besoin. Enfin, aucun appartement de cinq pièces faisant partie du parc immobilier des consorts A______/B______ n'était disponible lors de la résiliation du bail ou immédiatement avant, les bailleurs produisant à ce sujet l'état locatif au 31 décembre 2020 des immeubles sis rue 1______ 4, 6 et 8 et rue 2______ 2, 4, 6, 8 et 10. Ils ont en outre relevé à ce sujet que presque toutes les mutations intervenues au sein dudit parc immobilier depuis 2013 avaient été motivées par le besoin des bailleurs de disposer des locaux considérés pour leurs proches, lesquels vivaient encore dans lesdits logements, ce qui démontrait la véracité du motif du congé, et ont précisé que l'appartement de K______ serait repris par son frère, L______. Compte tenu de la rareté des mutations, les bailleurs n'avaient pas eu d'autre choix que de résilier le bail de l'appartement litigieux.

o. Lors de l'audience du 16 avril 2021 devant le Tribunal, les locataires ont allégué que le motif réel du congé était un problème de voisinage entre eux-mêmes, qui se plaignaient de nuisances sonores, et leurs voisins, qui en étaient les auteurs, ajoutant que leur état de santé s'était aggravé depuis la résiliation du bail.

Ils ont produit un chargé de pièces complémentaire comprenant notamment des certificats médicaux les concernant, des extraits du Registre foncier relatifs à des immeubles sis chemin 3______ no. ______ (propriété de B______), chemin 4______ 8 (propriété de A______), chemin 4______ 8A (propriété de M______) et rue 5______ no. ______ (propriété de A______ et B______), ainsi que des confirmations d'inscriptions pour des logements de remplacement auprès du Secrétariat des fondations immobilières de droit public, de la Gérance immobilière municipale, de la Fondation de la Ville de Genève pour le logement social et de [la caisse de pensions] N______.

Les bailleurs ont contesté les nouveaux allégués des locataires. Les parties se sont ensuite prononcées sur les mesures d'instruction sollicitées et ont persisté dans leurs conclusions dans le cadre des premières plaidoiries.

Entendu, A______ a déclaré s'occuper de toute la gestion des immeubles et des locataires et être en charge de répartir les appartements, précisant qu'ils avaient toujours donné la priorité aux enfants de la famille pour l'attribution des appartements lorsque des disponibilités s'étaient présentées. Ainsi, sur les sept enfants et petits-enfants de la famille, cinq avaient habité ou habitaient encore des appartements du complexe, lequel comprenait huit immeubles construits dans les années nonante. L'immeuble sis rue 5______ no. ______, dans lequel il habitait, était construit sur une parcelle voisine, dans le vieux E______, et ne faisait pas partie de l'ensemble. K______ l'avait approché deux ans auparavant pour demander un appartement plus grand, de cinq pièces, pour fonder une famille. Il lui avait répondu qu'ils attendaient toujours qu'il y ait une résiliation pour proposer un appartement. Il n'y avait toutefois eu aucun départ depuis 2018. Devant l'insistance de l'intéressée et vu le temps qui s'écoulait, ils avaient choisi de récupérer le logement de cinq pièces situé à côté de celui de sa sœur, H______. Ces dernières habitaient déjà à proximité l'une de l'autre, mais pas dans la même allée. L'appartement actuel de K______ était destiné au frère de celle-ci, L______, qui n'habitait pas encore sur place. L'immeuble sis chemin 3______ no. ______ était la villa familiale dans laquelle vivait B______, celui sis chemin 4______ 8 était la villa qu'il occupait avant de déménager à la rue 5______ no. ______ et celui sis chemin 4______ 8A était la villa de sa mère qui était en location, dans la mesure où celle-ci était en EMS. Deux ou trois ans auparavant, suite aux problèmes de voisinage, il avait été proposé aux locataires de déménager dans l'immeuble rue 5______ no. ______, ce qu'ils avaient refusé, en évoquant le prix et leur absence d'envie de déménager. Les bailleurs avaient comme politique de ne pas intervenir dans les problèmes de voisinage, mais ils avaient su que les locataires avaient eu un souci avec la famille G______/I______/J______. Ils avaient organisé trois séances de conciliation entre les protagonistes, mais les locataires ne s'étaient pas déplacés à la dernière séance.

p. Le Tribunal a procédé à l'audition de K______ lors de l'audience du 24 septembre 2021.

Celle-ci a déclaré que son projet d'installation dans l'immeuble sis rue 1______ 8 remontait au printemps 2019 lorsque son mari et elle avaient décidé de fonder une famille. Elle s'était alors adressée à son oncle pour lui demander un appartement plus grand. Ils habitaient en effet dans un quatre pièces et avaient besoin d'une pièce en plus. Elle était, au jour de l'audience, enceinte de cinq mois, un certificat de grossesse étant produit à ce sujet. Son mari et elle-même faisaient en outre du télétravail depuis le COVID et, selon la convention passée avec leurs employeurs respectifs, ils devaient disposer d'une pièce séparée pour le travail. Au jour de l'audience, elle faisait un jour de télétravail par semaine et son mari deux, précisant qu'il ne s'agissait pas des mêmes jours, et ils souhaitaient tous deux pouvoir continuer par la suite. Elle n'avait pas spécifiquement demandé l'appartement litigieux, mais elle était très proche de sa sœur et il était plus pratique pour elle d'avoir l'appartement à côté d'elle. En effet, sa sœur disposait du temps libre et il lui arrivait déjà de garder les enfants de leur frère, de sorte qu'elle serait susceptible de garder également son futur enfant, étant précisé qu'ils n'avaient rien décidé de concret concernant une éventuelle aide de sa part. Elle ignorait comment avait été prise la décision de résilier le bail des locataires et n'avait pas été associée à ces discussions. Elle n'avait pas connaissance du fait qu'un appartement de cinq pièces se serait libéré dans le complexe d'immeubles, précisant que ce dernier comportait de nombreux logements de quatre pièces et peu de cinq pièces. Si son père et son oncle avaient décidé de lui attribuer un autre appartement du complexe, elle l'aurait accepté. Elle comptait s'installer dans l'appartement litigieux lorsqu'il se libérerait et son appartement actuel serait attribué à son frère L______.

q. Convoqués pour leur interrogatoire à une audience fixée le 12 novembre 2021, les locataires ne s'y sont pas présentés, sans être excusés. Le Tribunal a décidé de reconvoquer la cause pour leur interrogatoire, précisant qu'il y renoncerait en cas de non-comparution, quel qu'en soit le motif.

r. Suite au décès de F______ le 30 décembre 2021, le Tribunal a, par ordonnance du 14 mars 2022, ordonné sa substitution par C______.

s. C______ a été entendu par le Tribunal lors de l'audience du 6 mai 2022. Convoquée, D______ était absente, n'ayant, selon son fils, pas voulu venir, car elle ne se sentait pas bien.

C______ a déclaré avoir habité dans l'appartement litigieux avec ses parents depuis le début du bail. Avant le décès de son père, ses parents avaient entrepris des recherches pour trouver un nouveau logement pour les reloger tous les trois. Depuis le décès de son père, il ignorait si sa mère avait poursuivi ses recherches, ajoutant que pour sa part, il n'en avait pas fait. Sa mère percevait une rente AI, ainsi que, vraisemblablement, une rente de veuve, dont il ignorait les montants. Il n'avait lui-même aucun revenu et n'était pas en formation. Depuis le décès de son père, il souffrait de phobie sociale. Sa mère avait eu des soucis avec les voisins qui habitaient l'appartement exactement en-dessous du leur et mettaient de la musique très forte. Au jour de l'audience, il y avait toujours de la musique à fort volume, mais plus de violences ni d'insultes. Ils évitaient ces voisins. Ils n'avaient jamais eu de problèmes avec d'autres voisins de l'immeuble.

t. A l'issue de l'audience du 6 mai 2022, le Tribunal a clôturé l'administration des preuves, ordonné l'ouverture des plaidoiries finales et fixé aux parties un délai au 10 juin 2022 pour déposer leurs plaidoiries écrites.

u. Par écritures du 10 juin 2022, les bailleurs ont persisté dans leurs conclusions.

Par écritures du même jour, les locataires ont également persisté dans leurs conclusions principales et ont précisé leurs conclusions subsidiaires en ce sens que le loyer devait être ramené à 12'469 fr. 50 par année, charges non comprises, dès le 1er janvier 2021, correspondant à une baisse de 24.81 % depuis la dernière fixation du loyer le 19 mars 2002, le trop-perçu en découlant devant leur être remboursé, D______ et L______ devant être entendus préalablement.

Les bailleurs ont répliqué le 29 juin 2022, alléguant notamment que la date de référence s'agissant de la demande de baisse de loyer était l'échéance de la clause d'échelonnement, soit le 31 décembre 2013, justifiant une baisse de 8.26 %.

La cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1. Pour des raisons de clarté, les bailleurs, qui ont formé appel, seront désignés ci-après comme les appelants, alors que les locataires seront désignés comme les intimés, quand bien même ils ont formé un appel joint.

1.1 L'appel est recevable contre les décisions finales et les décisions incidentes de première instance (art. 308 al. 1 let. a CPC). Dans les affaires patrimoniales, l'appel est recevable si la valeur litigieuse au dernier état des conclusions est de 10'000 fr. au moins (art. 308 al. 2 CPC).

Selon la jurisprudence constante du Tribunal fédéral, les contestations portant sur l'usage d'une chose louée sont de nature pécuniaire (arrêt du Tribunal fédéral 4A_388/2016 du 15 mars 2017 consid. 1).

Lorsque l'action ne porte pas sur le paiement d'une somme d'argent déterminée, le Tribunal détermine la valeur litigieuse si les parties n'arrivent pas à s'entendre sur ce point ou si la valeur qu'elles avancent est manifestement erronée (art. 91 al. 2 CPC). La détermination de la valeur litigieuse suit les mêmes règles que pour la procédure devant le Tribunal fédéral (Rétornaz in : Procédure civile suisse, Les grands thèmes pour les praticiens, Neuchâtel, 2010, p. 363; Spühler, Basler Kommentar, Schweizeriche Zivilprozessordnung, 3ème édition, 2017, n. 9 ad art. 308 CPC).

Dans une contestation portant sur la validité d'une résiliation de bail, la valeur litigieuse est égale au loyer de la période minimum pendant laquelle le contrat subsiste nécessairement si la résiliation n'est pas valable, période qui s'étend jusqu'à la date pour laquelle un nouveau congé peut être donné ou l'a effectivement été. Lorsque le bail bénéficie de la protection contre les congés des art. 271 ss CO, il convient, sauf exceptions, de prendre en considération la période de protection de trois ans dès la fin de la procédure judiciaire qui est prévue par l'art. 271a al. 1 let. e CO (ATF 137 III 389 consid. 1.1; 136 III 196 consid. 1.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_388/2016 du 15 mars 2017 consid. 1).

En l'espèce, le loyer annuel du logement, charges comprises, s'élève à 24'600 fr. (22'440 fr. + 2'160 fr. de charges), de sorte que la valeur litigieuse est supérieure à 10'000 fr.

La voie de l'appel est donc ouverte.

1.2 Selon l'art. 311 CPC, l'appel, écrit et motivé, est introduit auprès de l'instance d'appel dans les trente jours à compter de la notification de la décision, laquelle doit être jointe au dossier d'appel. Il en va de même de l'appel joint qui peut être introduit dans le cadre de la réponse (art. 311 ss CPC).

L'appel a été interjeté dans le délai et suivant la forme prescrits par la loi (art. 130, 131, 311 al. 1 CPC). Il est ainsi recevable. Il en va de même de la réponse et de l'appel joint.

1.3 L'appel peut être formé pour violation du droit (art. 310 let. a CPC) et constatation inexacte des faits (art. 310 let. b CPC). La Cour revoit la cause avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC; Hohl, Procédure civile, tome II, 2ème éd. 2010, n. 2314 et 2416; Retornaz in : Procédure civile suisse, Les grands thèmes pour les praticiens, Neuchâtel, 2010, p. 349 ss, n. 121).

1.4 Selon l'art. 243 al. 2 let. c CPC, la procédure simplifiée s'applique aux litiges portant sur des baux à loyer d'habitations et de locaux commerciaux en ce qui concerne la consignation du loyer, la protection contre les loyers abusifs, la protection contre les congés ou la prolongation du bail. La maxime inquisitoire sociale régit la procédure (art. 247 al. 2 let. a CPC).

2. Les intimés remettent en cause la validation du congé par le Tribunal, grief qu'il convient dès lors de traiter en premier lieu.

2.1 Lorsque le contrat de bail est de durée indéterminée, ce qu'il est lorsqu'il contient une clause de reconduction tacite, chaque partie est en principe libre de le résilier pour la prochaine échéance convenue en respectant le délai de congé prévu (cf. art. 266a al. 1 CO; ATF 140 III 496 consid 4.1; 138 III 59 consid 2.1). Le bail est en effet un contrat qui n'oblige les parties que jusqu'à l'expiration de la période convenue. Au terme du contrat, la liberté contractuelle renaît et chacune des parties a la faculté de conclure ou non un nouveau contrat et de choisir son cocontractant (arrêts du Tribunal fédéral 4A_19/2016 du 2 mai 2017 consid 2.1; 4A_484/2012 du 28 février 2013 consid 2.3.1; 4A_167/2012 du 2 août 2012 consid 2.2; 4A_735/2011 du 16 janvier 2012 consid 2.2). La résiliation ordinaire du bail ne suppose pas l'existence d'un motif de résiliation particulier (art. 266a al. 1 CO), et ce même si elle entraîne des conséquences pénibles pour le locataire (ATF 141 III 496 consid 4.1; 138 III 59 consid 2.1).

En principe, le bailleur est libre de résilier le bail, notamment dans le but d'adapter la manière d'exploiter son bien selon ce qu'il juge le plus conforme à ses intérêts (ATF 136 III 190 consid 3), pour effectuer des travaux de transformation, de rénovation ou d'assainissement (ATF 142 III 91 consid 3.2.2 et 3.2.3; 140 III 496 consid 4.1), pour des motifs économiques (ATF 120 II 105 consid 3b/bb; arrêts du Tribunal fédéral 4A_293/2016 du 13 décembre 2016 consid 5.2.1 et 5.2.3 non publié in ATF 143 III 15; 4A_475/2015 du 19 mai 2016 consid 4.1 et 4.3) ou encore pour utiliser les locaux lui-même ou en faveur de ses proches parents ou alliés (arrêts du Tribunal fédéral 4A_198/2016 du 7 octobre 2016 consid 4.3 et 4.5; 4A_18/2016 du 26 août 2016 consid 3.3 et 4). 

La seule limite à la liberté contractuelle des parties découle des règles de la bonne foi : lorsque le bail porte sur une habitation ou un local commercial, le congé est annulable lorsqu'il contrevient aux règles de la bonne foi (art. 271 al. 1 et 271a CO).

La protection conférée par les art. 271 et 271a CO procède à la fois du principe de la bonne foi (art. 2 al. 1 CC) et de l'interdiction de l'abus de droit (art. 2 al. 2 CC).

Les cas typiques d'abus de droit (art. 2 al. 2 CC), à savoir l'absence d'intérêt à l'exercice d'un droit, l'utilisation d'une institution juridique contrairement à son but, la disproportion grossière des intérêts en présence, l'exercice d'un droit sans ménagement et l'attitude contradictoire, permettent de dire si le congé contrevient aux règles de la bonne foi au sens de l'art. 271 al. 1 CO. Il n'est toutefois pas nécessaire que l'attitude de la partie donnant congé à l'autre constitue un abus de droit "manifeste" au sens de l'art. 2 al. 2 CC (ATF 136 III 190 consid 2;
135 III 112 consid 4.1; 120 II 31 consid 4a). Ainsi, le congé doit être considéré comme abusif lorsqu'il ne répond à aucun intérêt objectif, sérieux et digne de protection (ATF 135 III 112 consid 4.1). Tel est le cas lorsque le congé apparaît purement chicanier, lorsqu'il est fondé sur un motif qui ne constitue manifestement qu'un prétexte ou lorsque sa motivation est lacunaire ou fausse (ATF 140 III 496 consid 4.1; 136 III 190 consid 2; 135 III 112 consid 4.1).

Le but de la réglementation des art. 271 et 271a CO est uniquement de protéger le locataire contre des résiliations abusives. Un congé n'est pas contraire aux règles de la bonne foi du seul fait que la résiliation entraîne des conséquences pénibles pour le locataire (ATF 140 III 496 consid 4.1) ou que l'intérêt du locataire au maintien du bail paraît plus important que celui du bailleur à ce qu'il prenne fin (arrêts du Tribunal fédéral 4A_297/2010 du 6 octobre 2010 consid 2.2; 4A_322/2007 du 12 novembre 2007 consid 6). Pour statuer sur la validité d'un congé, il ne faut examiner que l'intérêt qu'a le bailleur à récupérer son bien, et non pas procéder à une pesée entre l'intérêt du bailleur et celui du locataire à rester dans les locaux. Cette pesée des intérêts n'intervient que dans l'examen de la prolongation du bail (arrêts du Tribunal fédéral 4A_18/2016 consid 3.2; 4A_484/2012 précité consid 2.3.1 et les arrêts cités).

Pour pouvoir examiner si le congé ordinaire contrevient ou non aux règles de la bonne foi (art. 271 et 271a CO), il faut déterminer quel est le motif de congé invoqué par le bailleur dans l'avis de résiliation et si le motif est réel (arrêt du Tribunal fédéral 4A_19/2016 du 2 mai 2017 consid 2.2).

Si le bailleur fournit un faux motif à l'appui de la résiliation et qu'il n'est pas possible d'en établir le motif réel, il faut en déduire que le congé ne repose sur aucun motif sérieux ou en tout cas sur aucun motif légitime et avouable, ce qui justifie son annulation. Pour en juger, le juge doit se placer au moment où la résiliation a été notifiée (arrêt du Tribunal fédéral 4A_198/2016 précité consid 4.4.1). Des faits survenus ultérieurement ne sont en effet pas susceptibles d'influer a posteriori sur cette qualification : si le motif pour lequel le congé a été donné tombe par la suite, le congé ne devient pas abusif a posteriori. En revanche, des faits ultérieurs peuvent fournir un éclairage sur les intentions du bailleur au moment de la résiliation (ATF 140 III 496 consid. 4.1; 138 III 59 consid 2.1 in fine ; arrêt du Tribunal fédéral 4A_435/2021 du 14 février 2022 consid. 3.1.1).

Contrairement à ce qui prévaut lorsque le bailleur résilie le bail de manière anticipée - cas dans lequel le fardeau de la preuve de son besoin propre incombe au bailleur, - il appartient au locataire, qui est le destinataire de la résiliation, de supporter les conséquences de l'absence de preuve d'un congé contraire aux règles de la bonne foi. Le bailleur qui résilie et qui doit motiver le congé a toutefois le devoir de collaborer loyalement à la manifestation de la vérité en fournissant tous les éléments en sa possession nécessaires à la vérification du motif invoqué par lui (arrêt du Tribunal fédéral 4A_198/2016 précité consid 4.4.2).

La jurisprudence admet que le congé n'est pas contraire à la bonne foi lorsqu'il est motivé par le besoin du bailleur d'utiliser lui-même les locaux ou de les attribuer à l'un de ses proches (arrêts du Tribunal fédéral 4A_200/2017 du 29 août 2017 consid 3.2.2; 4A_198/2016 précité consid 4.4.2).

Le besoin invoqué par le bailleur ne doit pas être immédiat ou urgent. On ne saurait en effet lui imposer d'attendre le moment où le besoin se concrétise, au vu du temps habituellement nécessaire pour récupérer effectivement un logement après une résiliation. Même le fait qu'un bailleur soit propriétaire de plusieurs immeubles n'implique pas nécessairement qu'une résiliation d'un contrat de bail pour ses besoins propres ou ceux de l'un de ses proches soit contraire aux règles de la bonne foi (ACJC/106/2023 du 23 janvier 2023 consid 4.3). En revanche, le besoin du bailleur doit être sérieux, concret et actuel, et ne doit apparaître ni futile, ni trop vague, faute de quoi, selon les circonstances, le juge pourra retenir une disproportion manifeste des intérêts en présence, dans des situations où la résiliation entraîne des conséquences particulièrement pénibles pour des locataires de longue date (Lachat/Grobet-Thorens/Rubli/Stastny, Le bail à loyer, 2ème édition, Lausanne, 2019, p. 960).

Le juge décide si le propriétaire a un besoin propre en tenant compte de toutes les circonstances pertinentes du cas particulier au moment de la résiliation (arrêt du Tribunal fédéral 4A_195/2016 du 9 septembre 2016 consid 3.1.2).

2.2 Selon l'article 271a al. 1 let. a CO, parmi d'autres cas spécialement énumérés par cette disposition, le congé est annulable lorsqu'il est donné par le bailleur parce que le locataire fait valoir de bonne foi des prétentions fondées sur le bail. Cette disposition vise à permettre au locataire d'exercer librement ses droits - par exemple, réclamer la suppression de défauts de la chose louée - sans avoir à craindre un congé en représailles. 

Il incombe au locataire de prouver qu'il existe un rapport de cause à effet entre la prétention qu'il a élevée et la résiliation. Le bailleur a le droit d'apporter la contre-preuve en démontrant que le congé répond à un autre motif. Le juge constate alors le véritable motif du congé selon l'impression objective qui résulte de toutes les circonstances; le congé-représailles est d'autant plus vraisemblable qu'il survient plus rapidement après que le locataire a élevé une prétention (arrêt du Tribunal fédéral 4A_210/2014 du 17 juillet 2014).

2.3 En l'espèce, le motif invoqué par les appelants, soit leur besoin de mettre l'appartement litigieux à disposition de leur fille et nièce, n'a pas varié pendant la durée de la procédure. Désireuse de fonder une famille, elle a confirmé sa volonté d'occuper ledit appartement, plus spacieux que son logement actuel, et était tombée enceinte et nécessait une pièce supplémentaire, dès lors que son époux et elle-même faisaient du télétravail régulier à domicile. De plus, sa sœur habitait sur le même palier que l'appartement en question, ce qui était un avantage pour elle, quand bien même elles n'avaient pas encore parlé de l'aide que sa sœur pourrait apporter à sa famille. Certes, les appelants ont expliqué qu'ils ne procédaient en principe pas à des résiliations de bail dans le but de mettre des appartements à disposition de leurs proches, mais ils ont indiqué avoir décidé une telle résiliation dans la mesure où leur fille et nièce insistait et où aucun appartement ne s'était libéré depuis 2018.

Il ne résulte pas de la procédure que le motif donné par les appelants constituerait un prétexte et ne correspondrait pas à la réalité, les déclarations et témoignages ayant été concordants. Or, dans la mesure où ledit besoin apparaît comme suffisamment étayé et concret, quand bien même il n'est pas absolument urgent, la fille et nièce des appelants vivant actuellement dans un appartement de quatre pièces, il doit être considéré comme digne de protection. Il convient de plus de souligner qu'aucun autre appartement équivalent ne s'est libéré dans le parc immobilier des appelants.

Il ne peut être nié que les intimés subissent des problèmes de santé. Le décès de leur mari et père est intervenu en cours de procédure. De plus, ils ont vécu une vingtaine d'années dans l'appartement et disent peiner à retrouver un logement. Toutefois, dans la mesure où le besoin des appelants a été démontré et qu'il ressort de la procédure qu'il est réel et concret, il n'apparaît pas que le congé consacre une disproportion manifeste des intérêts en présence, étant précisé que la pesée des intérêts quant aux conséquences du congé sera effectuée en lien avec la prolongation du bail.

Par ailleurs, les intimés ont eu un différend avec plusieurs voisins et s'en sont plaint aux appelants, pendant plusieurs années et jusqu'à quelques mois avant la résiliation du bail. Aucun élément, si ce n'est la proximité temporelle, ne ressort de la procédure qui soit propre à remettre en doute le motif avancé à la résiliation du bail, dont la réalité a été démontrée par les appelants et qui n'apparaît pas être manifestement un prétexte, contrairement à ce que soutiennent les intimés.

Au surplus, le fait que les appelants aient dérogé à leur politique consistant à ne pas résilier les baux en cours pour mettre des appartements à disposition de leurs proches, tout en expliquant les raisons, ne suffit pas à infirmer ce qui précède.

Par conséquent, le raisonnement du Tribunal est exempt de toute critique. Le jugement querellé sera ainsi confirmé s'agissant de la validité du congé.

3. Les appelants font grief au Tribunal d'avoir prolongé le bail pour une durée de trois ans, en violation de l'art. 272 CO.

3.1 Selon l'art. 272 al. 1 CO, le locataire peut demander la prolongation d'un bail de durée déterminée ou indéterminée lorsque la fin du contrat aurait pour lui ou sa famille des conséquences pénibles sans que les intérêts du bailleur le justifient.

Le juge apprécie librement, selon les règles du droit et de l'équité (art. 4 CC), s'il y a lieu de prolonger le bail et, dans l'affirmative, pour quelle durée.

Il doit procéder à la pesée des intérêts en présence et tenir compte du but d'une prolongation, consistant à donner du temps au locataire pour trouver des locaux de remplacement ou à tout le moins d'adoucir les conséquences pénibles résultant d'une extinction du contrat (arrêt du Tribunal fédéral 4A_67/2016 du 7 juin 2016 consid. 7.1). La pesée des intérêts en présence imposée par l'art. 272 al. 2 in initio CO implique que l'on ait égard aux intérêts des deux cocontractants. Il incombe au juge de prendre en considération tous les éléments pertinents du cas particulier (arrêt du Tribunal fédéral 4A_552/2009 du 1er février 2010 consid. 2.5.1 et les références citées) et notamment les circonstances de la conclusion du bail et le contenu du contrat, la durée du bail, la situation personnelle, familiale et financière des parties ainsi que leur comportement, le besoin que le bailleur ou ses proches parents ou alliés peuvent avoir d'utiliser eux-mêmes les locaux ainsi que l'urgence de ce besoin, et la situation sur le marché local du logement ou des locaux commerciaux (art. 272 al. 2 CO; ACJC/1141/2022 du 5 septembre 2022 consid 4.1).

L'octroi d'une prolongation suppose que le locataire ait entrepris ce que l'on pouvait raisonnablement attendre de lui pour remédier aux conséquences pénibles du congé, et cela même lorsqu'il sollicite une première prolongation de son bail, le juge se montrant toutefois moins rigoureux à ce stade qu'à celui de la seconde prolongation (ATF 116 II 448 consid. 1; ATF 110 II 254 consid. 4, JT 1985 I 265; ATF 102 II 254, JT 1977 I 558; ACJC/1166/2020 du 31 août 2020 consid 3.1).

Le besoin propre du bailleur doit être sérieux, concret et actuel, et le juge doit également tenir compte de l'urgence du besoin; sur le principe, le besoin légitime du bailleur de recouvrer les locaux l'emporte sur les intérêts du locataire à obtenir une prolongation (ATF 136 III 190 consid. 6; arrêt du Tribunal fédéral 4A_103/2015 du 3 juillet 2015).

3.2 En l'espèce, à l'appui d'une prolongation de trois ans qu'il considérait équitable, le Tribunal a retenu que les intimés occupaient l'appartement litigieux depuis vingt ans, que leurs moyens financiers étaient limités et qu'ils avaient perdu leur mari et père en cours de procédure, circonstances ayant un impact négatif sur leurs recherches de logement de remplacement. S'agissant du besoin des appelants, le Tribunal a retenu que le besoin était démontré, mais pas urgent, leur fille et nièce pouvant provisoirement continuer à loger dans son appartement actuel.

Les appelants critiquent le raisonnement du Tribunal, soutenant que les recherches d'appartement des intimés n'étaient pas démontrées ou à tout le moins échues, les inscriptions pour un logement auprès de fondations immobilières de droit public étant valables durant un an, faute de renouvellement. Ainsi, le décès du mari et père des intimés n'avait pas eu d'impact sur lesdites recherches. De plus, les premiers juges auraient, à tort, omis de retenir que les intimés n'étaient pas intégrés dans la vie associative communale de E______ et retenu les moyens financiers limités des intimés. Les appelants rappellent également que leur fille et nièce ne pouvait vivre durablement avec sa famille dans son appartement actuel pour des raisons de manque de place en lien avec son télétravail et celui de son époux.

Les intimés, quant à eux, critiquent le fait que le Tribunal n'a pas retenu que l'intimée souffrait d'importants problèmes de santé et avait perdu son mari en cours de procédure, ni qu'ils avaient procédé à des recherches d'appartements. Ils estiment par conséquent qu'une prolongation de quatre ans devrait leur être accordée.

Certes, les intimés n'ont pas démontré avoir continué d'effectuer des recherches de logement et en particulier avoir veillé à la prolongation de validité de leurs recherches initiales. Ils ont toutefois procédé auxdites recherches. Il apparaît par ailleurs trop strict d'affirmer que le décès de leur mari et père ne pouvait avoir d'impact sur les recherches effectuées, tout comme il n'est pas pertinent de retenir que les intimés ne seraient pas intégrés à la vie associative communale. C'est à juste titre que le Tribunal a tenu compte des conséquences dudit décès et il convient également de prendre en compte les problèmes de santé de l'intimée. Enfin, si la situation financière des intimés n'a pas été instruite par le Tribunal, il ressort toutefois de la procédure que l'intimée perçoit une rente AI.

S'agissant du besoin des appelants de récupérer l'appartement litigieux, le Tribunal a tenu compte de son existence et de son urgence, raisonnement qui ne donne pas lieu à critique.

Dès lors, compte tenu de l'ensemble des circonstances et du but poursuivi par la loi, à savoir de donner au locataire du temps pour trouver une solution de remplacement, respectivement d'adoucir les conséquences pénibles résultant d'une extinction du contrat, il n'apparaît pas que les premiers juges auraient mésusé de leur pouvoir d'appréciation en fixant la durée de la prolongation. Même compte tenu des éléments rectifiés et précisés ci-dessus, la durée de prolongation arrêtée par le Tribunal apparaît proportionnée et sera confirmée.

4. Les appelants reprochent également au Tribunal d'avoir erré dans le calcul qu'il a effectué relativement à la baisse de loyer octroyée aux intimés.

4.1 Lorsque le bail est prolongé, une partie peut demander que la décision de prolongation modifie le contrat en l'adaptant à la nouvelle situation; si la décision de prolongation n'a pas modifié le contrat, celui-ci reste en vigueur sans changements pendant la prolongation; sont réservées les possibilités d'adaptation légale (art. 272c CO; ACJC/1071/2019 du 15 juillet 2019 consid. 5.1).

Le locataire peut contester le montant du loyer et en demander la diminution pour le prochain terme de résiliation (art. 270a al. 1 CO). Le bailleur peut s'opposer à la demande de baisse, notamment en démontrant que le rendement de l'immeuble est insuffisant ou que le loyer se situe dans les limites des loyers du quartier ou de la localité (art. 269 et 269a let. a et c CO).

Une demande de diminution de loyer s'apprécie en règle générale selon la méthode relative. Le locataire peut demander une diminution notamment à cause d'une baisse des charges du bailleur, en particulier d'une baisse du taux hypothécaire de référence intervenue depuis la dernière fixation du loyer (ATF 133 III 61 consid. 3.2.2.2). Par dernière fixation, il faut entendre, en dehors de la détermination du loyer en début de bail, la modification du loyer correspondant à une adaptation à de nouvelles bases de calcul; une modification du bail qui ne remet pas en cause le montant du loyer, en d'autres termes qui ne constitue pas une nouvelle fixation du loyer en fonction de bases de calcul modifiées, ne constitue pas un point de référence pour juger de l'admissibilité d'une adaptation ultérieure (ATF
126 III 124 consid. 2a p. 126; arrêt du Tribunal fédéral 4A_489/2010 du 6 janvier 2011 consid. 4.1). 

Lors d'une modification de loyer faisant suite à une variation du taux hypothécaire, il y a lieu en outre de voir si et dans quelle mesure les variations antérieures ont entraîné une modification du loyer (art. 13 al. 4 OBLF). Il s'agit d'une brèche pratiquée dans la méthode relative. Le juge ne s'arrête pas à la dernière modification du loyer déclarée unilatéralement, mais poursuit son examen rétrospectif jusqu'à la dernière modification du loyer consécutive à une variation du taux hypothécaire (ATF 119 II 348 consid. 4b/dd). La portée de cette règle a toutefois été atténuée; le juge ne remonte pas au-delà d'une modification consensuelle du loyer, ou d'une transaction qui a pris en compte le taux hypothécaire, ou d'une précédente majoration de loyer fondée sur le taux hypothécaire que le locataire n'a pas contestée, ou enfin d'une fixation du loyer selon la méthode absolue (ATF 119 II 348 consid. 4b; cf. aussi ATF 124 III 67 consid. 3; arrêt du Tribunal fédéral 4A_489/2010 du 6 janvier 2011 consid. 4.1).

Les parties peuvent convenir à l'avance que le loyer est adapté en fonction de l'indice suisse des prix à la consommation. Le contrat est valable si le bail est conclu pour une durée déterminée minimale de cinq ans pendant laquelle le bailleur ne peut pas donner le congé (art. 269b CO; art. 17 al. 4 OBLF). La clause d'indexation continue à s'appliquer après l'écoulement de cette durée originale si le bail se renouvelle, par reconduction tacite ou en vertu d'une option, pour cinq ans au moins (ATF 124 III 57 consid. 3b). L'indexation est le mode exclusif de fixation du loyer pendant la durée du bail; sous réserve de prestations supplémentaires, l'évolution des charges et autres facteurs ne sont pas pris en considération (ATF 124 III 57 consid. 3a). Le bailleur et le locataire peuvent par contre solliciter une majoration respectivement une diminution du dernier loyer indexé pour le prochain terme de résiliation (art. 269d et 270a CO), à savoir pour l'échéance du bail, original ou reconduit. Cette majoration ou diminution peut être déterminée soit à l'aide de la méthode relative, soit au moyen de la méthode absolue, selon le choix de la partie requérante (ATF 123 III 76 consid. 4c; arrêt du Tribunal fédéral 4A_489/2010 du 6 janvier 2011 consid. 4.2). 

Le mode particulier de fixation du loyer indexé, qui revêt un caractère aléatoire, autorise le recours à la méthode absolue en dérogation à la jurisprudence imposant de relativiser les motifs absolus en cours de bail. Les parties conviennent en effet de ne tenir compte que de la variation de l'indice des prix à l'exclusion de tous les autres facteurs susceptibles d'influer sur le rendement, pari qui peut se révéler en fin de compte favorable au bailleur ou au locataire. Le locataire ne peut ainsi pas présumer de bonne foi que le dernier loyer indexé procure un rendement suffisant au bailleur, puisque celui-ci est empêché d'invoquer une hausse fondée sur d'autres facteurs (ATF 123 III 76 consid. 4c; arrêt du Tribunal fédéral 4A_489/2010 du 6 janvier 2011 consid. 4.1).

4.2 En l'espèce, les appelants n'ont pas opposé de motif absolu à la demande de baisse de loyer. Reste néanmoins litigieuse la question de savoir quelle date doit être prise en compte pour calculer la baisse du taux hypothécaire formulée le 26 juin 2020 et applicable à la nouvelle échéance du contrat, à savoir à compter du 1er janvier 2021, date à laquelle a débuté la prolongation du bail.

Le bail a été conclu le 19 mars 2002, date à laquelle le taux hypothécaire s'élevait à 4%. Il a ensuite été prolongé sans évolution, puis a été échelonné, par avis du 7 septembre 2010, à partir du 1er janvier 2011, avant d'être indexé dès le 1er janvier 2014, avec échéance au 31 décembre 2015, reconductible ensuite de cinq ans en cinq ans. La modification du bail précitée s'appuyait sur les loyers usuels du quartier, à savoir une méthode absolue de fixation du loyer, moment auquel le juge doit s'arrêter dans le cadre de l'analyse rétrospective des modifications du loyer. Par la suite, le loyer a été fixé exclusivement en tenant compte de la variation de l'ISPC. Dès lors, c'est bien à juste titre que le Tribunal a tenu compte du taux hypothécaire applicable le 7 septembre 2010 et non de la date de conclusion du bail (jusqu'à laquelle il n'était pas tenu de remonter), comme les intimés soutiennent qu'il aurait dû le faire, ou de celle d'échéance de la clause d'échelonnement, selon l'avis des appelants.

Le 7 septembre 2010, le taux hypothécaire s'élevait à 3% et le 26 juin 2020 il était de 1.25%, de sorte que la baisse de loyer de 17.36% à laquelle aboutit le Tribunal est fondée.

Il découle de ce qui précède que le jugement querellé sera intégralement confirmé.

5. A teneur de l'art. 22 al. 1 LaCC, il n'est pas prélevé de frais dans les causes soumises à la juridiction des baux et loyers (ATF 139 III 182 consid. 2.6).

* * * * *



PAR CES MOTIFS,
La Chambre des baux et loyers :


A la forme :

Déclare recevables l'appel interjeté le 16 novembre 2022 par A______ et B______, ainsi que l'appel joint interjeté par D______ et C______ le 19 décembre 2022 contre le jugement JTBL/774/2022 rendu le 7 octobre 2022 par le Tribunal des baux et loyers dans la cause C/11955/2020.

Au fond :

Confirme le jugement entrepris.

Dit que la procédure est gratuite.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Siégeant :

Madame Nathalie LANDRY-BARTHE, présidente; Madame Sylvie DROIN et Monsieur Laurent RIEBEN, juges; Monsieur Nicolas DAUDIN et Madame
Zoé SEILER, juges assesseurs; Madame Maïté VALENTE, greffière.

 

La présidente :

Nathalie LANDRY-BARTHE

 

La greffière :

Maïté VALENTE

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF ; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 15'000 fr.