Aller au contenu principal

Décisions | Chambre des baux et loyers

1 resultats
C/22896/2018

ACJC/1095/2022 du 29.08.2022 sur JTBL/865/2021 ( OBL ) , CONFIRME

Recours TF déposé le 04.10.2022, rendu le 27.03.2023, CONFIRME, 4A_431/2022
Normes : CO.262; CO.257f.al3; CO.271; CO.272
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/22896/2018 ACJC/1095/2022

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des baux et loyers

du LUNDI 29 AOÛT 2022

 

Entre

A______ SA, sise ______, appelante d'un jugement rendu par le Tribunal des baux et loyers le 20 octobre 2021, représentée par Monsieur O______, administrateur, ______,

et

SOCIETE COOPERATIVE B______, sise ______, intimée, comparant par
Me Nadia CLERIGO CORREIA, avocate, quai des Bergues 23, 1201 Genève, en l'étude de laquelle elle fait élection de domicile.

 

 


EN FAIT

A. Par jugement JTBL/865/2021 du 20 octobre 2021, communiqué aux parties par pli du 22 octobre 2021, le Tribunal des baux et loyers a déclaré efficaces les congés notifiés à A______ SA par la SOCIETE COOPERATIVE B______ par avis officiels du 10 septembre 2018 pour le 31 octobre 2018, concernant l'arcade de 140 m2 située au rez-de-chaussée ainsi que le box n° 39 situé au sous-sol de l'immeuble sis 1______ à Genève (ch. 1 du dispositif), a déclaré valable le congé notifié à A______ SA par la SOCIETE COOPERATIVE B______ par avis officiel du 23 novembre 2018 pour le 30 juin 2019, concernant l'appartement de 7 pièces au 1er étage de l'immeuble sis 1______ à Genève (ch. 2), a octroyé à A______ SA une unique prolongation du bail de l'appartement de deux ans et demi, échéant le 31 décembre 2021 (ch. 3), a condamné A______ SA à évacuer immédiatement de sa personne, de tout tiers dont elle est responsable et de ses biens, l'arcade de 140 m2 au rez-de-chaussée ainsi que le box n° 39 situé au sous-sol de l'immeuble sis 1______ à Genève (ch. 4), a débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 5) et a dit que la procédure était gratuite (ch. 6).

B. a. Par acte expédié le 1er décembre 2021 au greffe de la Cour de justice, A______ SA (ci-après également : la locataire) forme appel contre ce jugement, dont elle sollicite l'annulation.

Elle conclut, préalablement, à ce que soit ordonnée la réouverture de la procédure probatoire, notamment à ce qu'il soit procédé à l'audition des témoins C______ et D______, et à la comparution personnelle des parties, principalement, à ce que la résiliation du bail de l'appartement soit déclarée abusive et à l'inefficacité de la résiliation du bail de l'arcade à l'enseigne E______, subsidiairement, à ce que la résiliation de l'appartement soit déclarée injustifiée et à l'annulation de la résiliation du bail de l'arcade à l'enseigne E______, plus subsidiairement, à l'annulation des chiffres 3 et 4 du jugement entrepris et, cela fait et statuant à nouveau, à l'octroi d'une unique prolongation de 6 ans des baux de l'appartement, de l'arcade et du box n° 39.

Elle a produit, comme pièces nouvelles, l'accord d'annulation du contrat d'achat du fonds de commerce E______ non daté et son courriel du 27 août 2021 à la SOCIETE COOPERATIVE B______ avisant celle-ci de cette annulation.

b. Dans sa réponse du 21 janvier 2022, la SOCIETE COOPERATIVE B______ (ci-après également : la bailleresse ou la B______) conclut au rejet de l'appel et à la confirmation du jugement entrepris.

Elle a produit des pièces nouvelles, à savoir les décisions d'exclusion de la société coopérative de A______ SA des 12 avril et 1er novembre 2019, le certificat du Tribunal de première instance émis le 30 juillet 2021 relatif à l'autorisation de procéder APTPI/300/2020 et ses statuts.

c. Par réplique du 7 mars 2022, A______ SA a conclu à ce que soit constaté son droit de sous-louer les locaux abritant E______ à F______ SARL en 2018. Pour le surplus, elle a persisté dans ses conclusions.

d. Par duplique du 25 mars 2022, la bailleresse a conclu à l'irrecevabilité de la nouvelle conclusion de la locataire en constatation de droit et a persisté pour le surplus dans ses conclusions.

e. Les parties ont été avisées le 28 mars 2022 par le greffe de la Cour de ce que la cause était gardée à juger.

f. Par courrier du 4 avril 2022, la bailleresse a informé la Cour qu'elle avait récemment constaté que la locataire avait mis en gérance l'établissement E______ en faveur d'un tiers inconnu, joignant à l'appui de ses explication un courrier adressé à A______ SA le jour même et des photographies.

C. Il résulte du dossier les faits pertinents suivants :

a. A______ SA a pour but social notamment la création, l'achat, la vente et l'exploitation de cafés, restaurants, débits de boissons, cantines, hôtels et pensions.

G______ en est l'administrateur.

b. La société précitée est locataire, depuis le mois de décembre 1980, d'un appartement de sept pièces (suite à la réunion de deux appartements), au 1er étage de l'immeuble sis 1______, à Genève, propriété de la SOCIETE COOPERATIVE B______.

L'appartement est destiné exclusivement à l'habitation.

Le loyer annuel a été fixé en dernier lieu à 13'056 fr., charges non comprises, dès le 1er juillet 2016.

c. Depuis le mois de juillet 2008, A______ SA loue également à la B______ une arcade de 140 m2 à la même adresse, exploitée en tant que café-restaurant à l'enseigne E______.

Le loyer, incluant quatre dépendances sous forme de dépôts situés au sous-sol, s'élève à 22'560 fr. par an depuis le 1er octobre 2015.

d. Au sous-sol du même immeuble se trouve un bar-dancing, exploité sous l'enseigne H______, transféré par A______ SA à F______ SARL par contrat du 10 juillet 2018, contresigné par la bailleresse, avec effet au 1er août 2018.

e. Un contrat du 23 juillet 2018 prévoyait la cession du fonds de commerce du restaurant E______ par A______ SA à F______ SARL, pour un prix de 300'000 fr. Le paiement devait se faire moyennant le versement immédiat de 50'000 fr. à titre d'arrhes, puis de 50 mensualités. Le transfert de propriété devait devenir effectif le 1er octobre 2022. Le bail arrivant à échéance le 30 juin 2021, la cédante s'est engagée à solliciter de la bailleresse la conclusion d'un nouveau bail de 10 ans ou le transfert du bail en cours à la cessionnaire.

En cas de retard de paiement d'une mensualité, le contrat de vente pouvait être résilié par A______ SA après l'expiration d'un délai comminatoire de 30 jours. Les mensualités versées auparavant et les arrhes resteraient dans ce cas acquises à la cédante. Les mensualités impayées jusqu'au départ du cessionnaire resteraient dues.

f. Le conseil de A______ SA a informé la B______ de cette mise en gérance-vente par courriel du 26 juillet 2018, indiquant que les locaux du E______ et ses dépendances seraient par conséquent sous-loués dès le 1er août 2018, aux mêmes conditions que le bail principal. Il a sollicité une rencontre avec la bailleresse afin d'entériner cette situation.

Par courrier du 2 août 2018, la B______ a fait grief au conseil de la locataire de ne lui avoir annoncé la sous-location que quelques jours avant qu'elle ne soit effective. Elle a demandé les documents usuels nécessaires pour se déterminer et a indiqué que la sous-location serait considérée comme illicite avant l'octroi de son consentement.

g. Par courriel du 9 août 2018 adressé à la B______, le conseil de A______ SA a précisé qu'il s'agissait d'une vente du fonds de commerce par paiement échelonné sur plusieurs années. Le terme de sous-location avait été utilisé relativement à l'exploitation de l'établissement par F______ SARL jusqu'au paiement total du prix de vente.

h. Le 24 août 2018, A______ SA et F______ SARL ont signé un avenant au contrat de cession du fonds de commerce. Le prix de la cession a été réduit à 250'000 fr., le versement d'arrhes supprimé et la date du versement de la dernière mensualité reportée au 1er décembre 2022.

i. Par courrier du même jour, la bailleresse a réitéré sa demande des documents relatifs à la sous-location du restaurant E______, afin qu'elle puisse prendre connaissance des conditions convenues pour se déterminer. D'ici-là, toute exploitation par F______ SARL serait considérée comme une sous-location illicite faute de son consentement et pourrait entraîner une résiliation du bail avec effet immédiat pour justes motifs.

j. Le 10 septembre 2018, la B______ a résilié le bail à loyer portant sur l'arcade abritant le restaurant E______, ainsi que cinq autres baux pour des locaux commerciaux et des boxes la liant à A______ SA, pour le 31 octobre 2018.

k. Par courriel du 17 septembre 2018, le conseil de A______ SA a fait parvenir à la B______ le contrat de cession du fonds de commerce du restaurant à F______ SARL et une copie non signée de l'avenant. Il a relevé qu'il s'agissait d'une vente à terme du fonds de commerce avec la mise en exploitation par un tiers jusqu'au terme et non pas d'une simple sous-location. Il a sollicité le retrait de la résiliation du bail.

l. Par requêtes du 10 octobre 2018 déclarées non conciliées à l'audience du 3 décembre 2018 devant la Commission de conciliation en matière de baux et loyer (ci-après : la Commission), puis portées le 21 janvier 2019 devant le Tribunal, la locataire a contesté les résiliations de bail, enregistrées sous nos C/22896/2018 (arcade abritant le restaurant E______), C/2______/2018 (local commercial de 39 m2 au sous-sol de l'immeuble sis 1______), C/8______/2018 (box double n° 3 au sous-sol du centre commercial de I______), C/3______/2018 (box n° 2 au sous-sol du centre commercial de I______), C/4______/2018 (local commercial de 39 m2 au 1er sous-sol de l'immeuble sis 5______) et C/6______/2018 (box n° 39 au sous-sol de l'immeuble sis 1______).

Elle a conclu, préalablement, à ce qu'il soit constaté qu'elle était en droit de sous-louer les locaux à F______ SARL, principalement, à ce que les résiliations du 10 septembre 2018 soient déclarées inefficaces et à ce que la bailleresse soit condamnée à une amende pour plaideur téméraire ainsi qu'à une indemnité équitable en sa faveur et, subsidiairement, à ce que les résiliations soient annulées.

Elle a contesté le motif de résiliation, alléguant que la bailleresse n'avait pas demandé de renseignements au sujet des précédentes gérances du E______, relevant s'être tenue à disposition de celle-ci pour une rencontre au sujet de la mise en gérance par F______ SARL et considérant que le courrier de la B______ du 24 août 2018 ne remplissait pas les conditions d'une mise en demeure.

m. J______, locataire de l'immeuble abritant E______ et H______, s'est plainte par courriel du 21 octobre 2018 auprès de la B______ de nombreuses allées et venues autour de l'appartement sis au premier étage, suspectant un lieu de prostitution.

Elle a envoyé un nouveau courriel à la bailleresse le 19 novembre 2018, signalant qu'une personne avait été embarquée de force dans une voiture aux abords de la boîte de nuit située au sous-sol de l'immeuble.

n. Par avis du 23 novembre 2018, distribué à la locataire le 1er décembre 2018, la bailleresse a résilié le contrat de bail de l'appartement pour le 30 juin 2019.

o. Le conseil de la locataire a sollicité la communication des motifs de la résiliation du bail de l'appartement par courriel du 16 décembre 2018.

p. La bailleresse ayant mandaté une agence de détectives privés aux fins de déterminer qui occupait réellement l'appartement litigieux, un détective s'est rendu aux abords de celui-ci durant les soirées des samedi 22, vendredi 28 et samedi 29 décembre 2018, entre 21h30 et 23h. Il a observé cinq ou six femmes, vêtues de manière « aguichante », sortir de l'appartement pour se rendre au H______ par la sortie de secours. Elles « faisaient un peu de bruit mais sans plus ». Le détective a observé des femmes venant de l'extérieur et attendant qu'un des hommes de la boîte de nuit vienne leur ouvrir la porte de l'immeuble, avant de se rendre dans l'appartement et en ressortir peu après. Ces femmes rentraient exclusivement par l'une des deux portes de l'appartement, sur laquelle ne figurait aucun nom. Celle comportant le nom de G______ n'était pas utilisée.

Le détective a indiqué ne pas avoir aperçu G______ au cours de ses visites sur place. Dans son rapport, il a conclu que ce dernier ne résidait pas dans l'appartement, mis à disposition par F______ SARL pour les hôtesses de la boîte de nuit.

q. Par requête du 27 décembre 2018, déclarée non conciliée à l'audience de la Commission du 27 février 2019, puis portée devant le Tribunal le 8 avril 2019, A______ SA a conclu à l'annulation du congé donné le 23 novembre 2018 pour l'appartement, subsidiairement à l'octroi d'une prolongation de bail de quatre ans (C/7______/2018).

Elle a soutenu que le congé lui avait été donné à titre de représailles, en lien avec les transferts de fonds de commerce du H______ et du E______.

r. Par courriel à la B______ du 10 février 2019, J______ et son époux se sont plaints d'être dérangés sur leur lieu de vie, notamment par une « sono à fond » jusqu'au petit matin. L'appartement du 1er étage était toujours un lieu de prostitution.

s. Par ordonnance du 9 mai 2019, les causes entre les parties C/7______/2018, C/2______/2018, C/8______/2018, C/3______/2018, C/4______/2018 et C/6______/2018 ont été jointes sous numéro C/22896/2018.

t. Dans sa réponse du 11 juin 2019, la bailleresse a conclu à la validation des résiliations notifiées à A______ SA le 10 septembre 2018 pour les six objets locatifs, dont E______, et au refus de toute prolongation des baux.

Elle a formé une demande reconventionnelle en évacuation des locaux, avec prononcé des mesures d'exécution directe.

Le motif de la résiliation résidait dans le fait que le restaurant et ses cinq dépendances avaient été sous-loués de manière illicite. La locataire s'était contentée de l'informer d'une manière confuse et tardive, puis avait refusé de communiquer toutes les conditions du contrat conclu avec F______ SARL, alors qu'il s'agissait d'un transfert de bail déguisé.

La bailleresse avait constaté, le 3 septembre 2018, que le restaurant annonçait le changement de propriétaire, ainsi que ses horaires d'ouverture, malgré sa mise en demeure du 24 août 2018.

u. Par réponse du même jour, la bailleresse a conclu à la validation du congé notifié le 23 novembre 2018 pour l'appartement et au refus de toute prolongation de bail.

Le congé donné pour l'appartement était motivé par le fait que celui-ci était occupé de manière non conforme à l'usage prévu par le bail et générait des nuisances pour les voisins. G______ n'y habitant pas, il s'agissait d'une sous-location non autorisée.

La bailleresse a formé une demande reconventionnelle en évacuation de l'appartement, avec le prononcé des mesures d'exécution directe.

v. Par ordonnance du 13 juin 2019, le Tribunal a limité les débats, sur demande reconventionnelle, à la conclusion visant l'évacuation de la locataire, celle relative à l'exécution directe étant, le cas échéant, examinée ultérieurement par le Tribunal dans la composition légalement requise pour prononcer les mesures d'exécution.

w. Par écriture du 16 août 2019, A______ SA a conclu au déboutement de la bailleresse sur demande reconventionnelle.

Elle a soutenu que G______ s'était trouvé en Italie du 18 décembre 2018 au 4 janvier 2019, soit au moment où selon le rapport de détective, il ne résidait pas dans l'appartement. Elle a admis que celui-ci avait donné l'accès à son appartement aux employées de F______ SARL afin qu'elles puissent y déposer leurs affaires et se changer, mais elles n'y logeaient toutefois pas.

x. A l'audience du 29 novembre 2019, le représentant de la B______, K______, a expliqué que la bailleresse avait souhaité connaître les conditions de la sous-location du E______ à F______ SARL, soit le début et la fin du contrat et les conditions d'une éventuelle reprise de commerce. Celle-ci était au courant des précédentes mises en gérance du H______ et du E______.

Suite à la reprise de l'exploitation du H______ par F______ SARL, en octobre 2018, des nuisances s'étaient produites, confirmée par la plainte de J______.

G______ a déclaré habiter dans l'appartement litigieux depuis 40 ans. Sa femme vivait entre cet appartement et l'Italie et ses enfants majeurs venaient pour les fêtes et pour les vacances. Ceux-ci utilisaient les deux chambres meublées, non utilisées le reste du temps. L'appartement disposait d'une partie accessible séparément, qui comprenait lesdites chambres et un bureau à l'usage de A______ SA, une salle de bains et une cuisine.

Le personnel féminin du E______ et du H______ se rendait dans l'appartement pour se changer et se doucher, de longue date. En reprenant ces deux établissements, F______ SARL avait demandé à G______ de perpétuer cette pratique. Ce dernier avait donné les clés de l'appartement à un responsable de cette société. Il a contesté que le personnel précité dormait dans l'appartement et qu'une activité de prostitution s'y déroulait.

y. Par ordonnance du 9 juin 2020, le Tribunal a refusé d'entendre comme témoin D______, figurant sur la liste de témoins de la locataire, en tant que cette audition était, selon le Tribunal, inutile car le fait que le E______ ait été mis en gérance par le passé n'était pas pertinent.

z. Le Tribunal a entendu trois témoins aux audiences des 30 octobre 2020 et 19 mars 2021.

L______, employé de la bailleresse en qualité concierge de l'immeuble litigieux depuis huit ans à cette époque, a déclaré qu'il voyait des femmes sortir de l'appartement concerné depuis 4-5 ans. Les locataires s'en étaient plaints, car celles-ci « laissaient du chenit » et utilisaient la buanderie durant la nuit. Deux ou trois ans auparavant, le témoin avait vendu des cartes de buanderie au responsable du E______. G______ se rendait régulièrement dans l'appartement. Le témoin ne connaissait en revanche ni son épouse ni ses enfants.

M______, qui a emménagé au 1er étage de l'immeuble concerné au début du mois de juillet 2019, a indiqué que G______ était son voisin, qu'elle le croisait occasionnellement, et qu'elle n'était pas dérangée par lui. La deuxième partie de l'appartement avait été occupée par un couple avec un bébé, puis par 5-6 dames jusqu'au début de la crise du COVID. Elle s'était plainte de l'utilisation de la buanderie vers 4 heures du matin. Elle avait entendu également, le soir, le « bruit des talons des femmes qui sortaient » de l'appartement à 22h45. Deux autres dames plus tranquilles étaient arrivées par la suite.

aa. Par écriture de plaidoiries finales du 22 avril 2021, la B______ a indiqué retirer ses conclusions relatives aux quatre objets qui avaient été restitués (locaux commerciaux de 39 m2 au sous-sol de l'immeuble sis 1______ et au 1er sous-sol de l'immeuble sis 5______, box doubles nos 2 et 3 au sous-sol du centre commercial de I______).

La bailleresse a persisté dans ses conclusions relatives à l'appartement et à l'arcade hébergeant E______, soulignant l'absence de transparence des conditions de sous-location à F______ SARL.

Elle a versé au dossier une partie du procès-verbal d'une audience tenue le 4 septembre 2020 dans une procédure opposant la B______ à F______ SARL. Le représentant de cette dernière, N______, avait déclaré que le contrat du 24 août 2018 relatif au transfert du E______ avait été annulé. L'établissement était exploité par une société appartenant à G______. Entre août et octobre 2018, les artistes se produisant au H______ avaient été hébergés dans l'appartement du 1er étage. Il ne s'agissait pas de prostituées.

ab. Dans ses plaidoiries finales du 22 avril 2021, A______ SA a persisté dans ses conclusions. Elle a soutenu avoir transmis à la bailleresse les éléments essentiels de la sous-location à venir, sous réserve de sa durée. Le contrat de gérance, couplé avec un achat à terme, contenait des informations sensibles, qui n'avaient pas à être divulguées à ce moment-là. Le contrat de cession avait de surcroît été modifié le 24 août 2018, notamment quant à la durée de la sous-location.

La locataire a relevé que les mensualités de 5'000 fr. générées par la vente du E______ étaient l'unique complément de la rente AVS perçue par G______.

ac. Par déterminations du 14 mai 2021, la B______ a indiqué qu'elle ignorait qui exploitait à cette époque le restaurant, au vu de la déclaration de N______ à cet égard.

Puis la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1. 1.1 L'appel est recevable contre les décisions finales et les décisions incidentes de première instance (art. 308 al. 1 let. a CPC). Dans les affaires patrimoniales, l'appel est recevable si la valeur litigieuse au dernier état des conclusions est de 10'000 fr. au moins (art. 308 al. 2 CPC).

Selon la jurisprudence constante du Tribunal fédéral, les contestations portant sur l'usage d'une chose louée sont de nature pécuniaire (arrêt du Tribunal fédéral 4A_388/2016 du 15 mars 2017 consid. 1).

Dans une contestation portant sur la validité d'une résiliation de bail, la valeur litigieuse est égale au loyer de la période minimum pendant laquelle le contrat subsiste nécessairement si la résiliation n'est pas valable, période qui s'étend jusqu'à la date pour laquelle un nouveau congé peut être donné ou l'a effectivement été. Lorsque le bail bénéficie de la protection contre les congés des art. 271 ss CO, il convient, sauf exceptions, de prendre en considération la période de protection de trois ans dès la fin de la procédure judiciaire qui est prévue par l'art. 271a al. 1 let. e CO (ATF 137 III 389 consid. 1.1; 136 III 196 consid. 1.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_388/2016 du 15 mars 2017 consid. 1).

1.2 En l'espèce, en ne considérant que le loyer de l'appartement, charges non comprises, la valeur litigieuse s'élève à 39'168 fr. (13'056 fr. x 3 ans). Elle est donc supérieure à 10'000 fr.

La voie de l'appel est ainsi ouverte.

1.3 Selon l'art. 311 al. 1 et 2 CPC, l'appel, écrit et motivé, est introduit auprès de l'instance d'appel dans les 30 jours à compter de la notification de la décision, laquelle doit être jointe au dossier.

L'appel a été interjeté dans les délais et suivant la forme prescrits par la loi (art. 130, 131 et 311 al. 1 CPC). Il est ainsi recevable.

1.4 La Cour revoit la cause avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC; Hohl, Procédure civile, tome II, 2ème éd., 2010, n. 2314 et 2416; Rétornaz in : Procédure civile suisse, Les grands thèmes pour les praticiens, Neuchâtel, 2010, p. 349 ss, n. 121).

2. L'appelante a renoncé à sa conclusion en constatation de son droit de sous-louer les locaux abritant E______ dans son mémoire d'appel avant d'y conclure à nouveau au stade de sa réplique.

2.1
2.1.1
Le recours doit contenir des conclusions. Celles-ci doivent être interprétées selon les règles de la bonne foi. Il suffit à cet égard que le sens dans lequel la modification de la décision attaquée est demandée résulte clairement de la motivation du recours, le cas échéant mise en relation avec la décision attaquée (ATF 137 III 617 consid. 4.2; arrêt du Tribunal fédéral 4A_112/2018 du 20 juin 2018 consid. 2.1).

Selon l'art. 317 al. 2 CPC, la demande ne peut être modifiée que si les conditions fixées à l'art. 227 al. 1 CPC sont remplies (let. a) et si la modification repose sur des faits ou des moyens de preuve nouveaux. Les deux conditions sont cumulatives (Jeandin, Code de procédure civile commenté, Bâle, 2011, n. 10 ad art. 317 CPC).

2.1.2 En l'espèce, l'appelante n'a pas pris de conclusion en constatation de son droit de sous-louer les locaux hébergeant E______ dans son mémoire d'appel, de sorte qu'elle ne pouvait pas y conclure au stade de sa réplique sans faits ou moyens de preuve nouveaux, qu'elle n'a pas allégués ou produits. Cette conclusion est donc irrecevable.

2.2 L'appelante a produit à l'appui de son appel, comme pièces nouvelles, l'accord d'annulation du contrat d'achat du fonds de commerce de l'enseigne E______, non daté, et son courriel du 27 août 2021 à l'intimée avisant cette dernière de cet accord.

A l'appui de sa réponse du 21 janvier 2022, l'intimée a produit, comme pièces nouvelles, les décisions d'exclusion de l'appelante de la société coopérative des 12 avril et 1er novembre 2019, le certificat du Tribunal de première instance émis le 30 juillet 2021 relatif à l'autorisation de procéder n° APTPI/300/2020 et ses statuts.

Elle a également informé la Cour le 4 avril 2022 de ce qu'elle avait récemment constaté que l'appelante avait mis en gérance l'établissement E______ en faveur d'un tiers inconnu, avec copie du courrier du même jour à la locataire et photographies à l'appui.

2.2.1 Selon l'art. 317 al. 1 CPC, les faits et les moyens de preuves nouveaux ne sont pris en considération en appel que s'ils sont invoqués ou produits sans retard (let. a) et s'ils ne pouvaient pas être invoqués ou produits devant la première instance bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de diligence (let. b). Les deux conditions sont cumulatives (Jeandin, op. cit., n. 6 ad art. 317 CPC).

Lorsque la procédure est soumise à la maxime inquisitoire, les faits et moyens de preuve nouveaux peuvent être invoqués jusqu'à l'entrée en délibération de l'instance d'appel (VOLKART, DIKE-Komm ZPO, 2011, n. 17 ad art. 317 CPC; BRUNNER, KuKo ZPO, 2010, n. 8 ad art. 317 CPC; SPÜHLER, Basler Kommentar, 2ème éd. 2013, n. 7 ad art. 317 CPC; RETORNAZ, op. cit., p. 349 ss, n. 166). Les faits et moyens de preuve nouveaux sont des novas et l'art. 317 al. 1 CPC vise tant les vrais novas que les faux novas, les premiers étant les faits survenus après le jugement de première instance ainsi que les pièces invoquées à leur appui, les seconds visant les faits qui se sont déjà réalisés avant le jugement, mais qui n'ont pas été invoqués par négligence ou ont été invoqués de manière imprécise (SPÜHLER, op. cit., n. 1-4 ad art. 317 CPC).

Pour faire état de novas improprement dits, il appartient au plaideur de démontrer devant l'instance d'appel qu'il a fait preuve de la diligence requise; il doit ainsi exposer précisément les raisons pour lesquelles le moyen de preuve n'a pas été produit en première instance (arrêt du Tribunal fédéral 4A_334/2012 du 16 octobre 2012 consid. 3.1).

A propos de la diligence requise, il ne suffit pas qu'une pièce ait été créée ou obtenue après la survenance du jugement querellé pour en faire un vrai nova dans la mesure où le critère relevant consiste à déterminer si ledit moyen de preuve aurait pu être obtenu avant la clôture des débats principaux de première instance, à l'instar d'attestations (p. ex. médicales) utiles dans le cadre d'un litige ayant pour objet la garde d'un enfant (arrêts du Tribunal fédéral 5A_86/2016 du 5 septembre 2016 consid. 2, 5A_266/2015 du 24 juin 2015 consid. 3.2.3).

Lorsque l'invocation des faits ou la production de moyens de preuve nouveaux dépendent de la seule volonté d'une partie, ils ne peuvent être considérés comme des vrais nova (arrêts du Tribunal fédéral 4A_583/2019 du 19 août 2020 consid. 5.3, 4A_76/2019 du 15 juillet 2020 consid. 8.1.2).

2.2.2 En l'espèce, le courriel du 27 août 2021 de l'appelante à l'intimée l'avisant de l'accord d'annulation du contrat d'achat du fonds de commerce de l'enseigne E______ est recevable du fait qu'il a été envoyé après la mise en délibération de la cause par le Tribunal. Il en est de même, pour une raison identique, du certificat du Tribunal de première instance du 30 juillet 2021 relatif à l'autorisation de procéder APTPI/300/2020 produit par l'intimée. Les faits que ces deux pièces contiennent seront repris dans la procédure s'ils sont utiles pour la résolution du litige.

En revanche, l'accord d'annulation non daté du contrat d'achat du fonds de commerce de l'enseigne E______ est irrecevable, du fait qu'il aurait pu être produit devant les premiers juges. En effet, le représentant de F______ SARL, N______, avait fait référence à l'annulation de ce contrat à l'audience du 4 septembre 2020 devant le Tribunal dans une autre procédure, soit avant le dépôt par les parties de leurs plaidoiries finales le 22 avril 2021. L'appelante n'explique pas pourquoi elle n'aurait pas pu le produire devant les premiers juges.

Sont également irrecevables pour des raisons identiques les décisions d'exclusion de l'appelante par l'intimée des 12 avril et 1er novembre 2019 et les statuts de l'intimée.

Quant au courrier de l'intimée du 4 avril 2022 et des pièces qu'il contient, il est également irrecevable, car communiqué après l'entrée en délibération de la Cour.

3. L'appelante sollicite de la Cour l'audition de D______ et de C______, anciens gérants du E______ respectivement du H______, afin qu'ils confirment qu'ils ont toujours bénéficié du droit d'user d'une partie de l'appartement. Elle requiert également que la Cour ordonne la comparution personnelle des parties.

3.1 La preuve a pour objet les faits pertinents et contestés (art. 150 al. 1 CPC). Toute partie a droit à ce que le tribunal administre les moyens de preuve adéquats proposés régulièrement et en temps utile (art. 152 CPC).

La jurisprudence a déduit du droit d'être entendu (art. 29 al. 2 Cst), en particulier le droit pour le justiciable de fournir des preuves quant aux faits de nature à influer sur le sort de la décision (ATF 132 V 368 consid. 3.1 et les références). L'autorité a l'obligation, sous l'angle du droit d'être entendu, de donner suite aux offres de preuves présentées en temps utile et dans les formes requises, à moins qu'elles ne soient manifestement inaptes à apporter la preuve ou qu'il s'agisse de prouver un fait sans pertinence (cf. ATF 131 I 153 consid. 3; 124 I 241 consid. 2, JdT 2000 I 130; 121 I 306 consid. 1b; arrêt du Tribunal fédéral 5A_403/2007 du 25 octobre 2007 consid. 3.1).

Le juge peut renoncer à une mesure d'instruction pour le motif qu'elle est manifestement inadéquate, porte sur un fait non pertinent ou n'est pas de nature à ébranler la conviction qu'il a acquise sur la base des éléments déjà recueillis (arrêt du Tribunal fédéral 4A_452/2013 du 31 mars 2014 consid. 3.1 et réf. citées).

3.2 En l'espèce, l'appelante a requis l'audition de D______ dans sa liste de témoins devant les premiers juges, laquelle a été refusée par ordonnance du Tribunal du 9 juin 2020, en tant qu'elle était, selon le Tribunal, inutile. L'appelante n'a pas persisté à conclure devant les premiers juges dans ses plaidoiries finales du 22 avril 2021 à l'audition de ce témoin, de sorte que la Cour retient qu'elle avait renoncé à l'entendre.

Quant au témoin, C______, l'appelante n'a pas demandé son audition devant le Tribunal.

S'agissant de la question de la comparution personnelle des parties, l'appelante n'y a pas conclu en première instance et n'indique pas pour quels motifs la Cour devrait donner suite à sa conclusion en appel en ce sens.

L'appelante ne saurait donc requérir la comparution personnelle des parties et l'audition de ces deux témoins devant la Cour, l'offre de preuve étant nouvelle et par conséquent tardive. Elle n'allègue en effet pas de faits nouveaux, de sorte que ses conclusions à cet effet sont irrecevables en appel.

En tout état de cause, ces offres de preuve ne sont pas nécessaires pour permettre à la Cour de statuer, de sorte que les conclusions de l'appelante sur ces points seront rejetées.

4. L'appelante fait grief au Tribunal d'avoir violé les art. 262 et 257f CO en retenant qu'elle n'avait pas l'intention de reprendre l'exploitation des locaux. En outre, elle aurait communiqué à l'intimée les conditions de la sous-location si ce n'est en ce qui concerne sa durée. Elle soutient également qu'il y avait eu un problème de communication du fait qu'elle avait conclu un contrat de cession de fonds de commerce, ce qu'elle était autorisée à faire, alors que l'intimée lui réclamait les conditions de la sous-location ou du transfert de bail, faisant alors preuve de mauvaise foi. De plus, son contrat avec F______ SARL contenait des informations sensibles et la mise en demeure du 24 août 2018 de l'intimée ne lui impartissait pas un délai raisonnable pour communiquer les conditions de la sous-location.

4.1 Selon l'art. 262 al. 1 CO, de droit semi-impératif, le locataire peut sous-louer tout ou partie de la chose avec le consentement du bailleur. Le bailleur ne peut refuser son consentement que dans les hypothèses prévues à l'art. 262 al. 2 CO, à savoir si le locataire refuse de lui communiquer les conditions de la sous-location (let. a), si les conditions de la sous-location, comparées à celles du contrat de bail principal, sont abusives (let. b) et, enfin, si la sous-location présente pour le bailleur des inconvénients majeurs (let. c). Cette disposition s'applique par analogie lorsque le locataire d'une surface commerciale abritant un restaurant confie l'exploitation de l'établissement à un tiers par un contrat de gérance libre, c'est-à-dire par un bail à ferme non agricole (arrêts du Tribunal fédéral 4A_162/2014 du 26 août 2014 consid. 2.2.1 et 4A_127/2008 du 2 juin 2008 consid. 2.1 et 2.2, in SJ 2008 I 467).

4.2 Aux termes de l'art. 257f al. 3 CO, lorsque le maintien d'un bail d'habitation est devenu insupportable pour le bailleur parce que le locataire, nonobstant une protestation écrite, persiste à enfreindre son devoir de diligence, le bailleur peut résilier le contrat moyennant un délai de congé minimum de 30 jours pour la fin d'un mois.

Cette disposition est applicable lorsque le locataire sous-loue la chose louée remise à bail sans requérir le consentement du bailleur en violation de l'art. 262 CO (ATF 134 III 300 consid. 3.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_347/2016 du 10 novembre 2016 consid. 3.1.1).

Le bailleur qui notifie un congé fondé sur l'art. 257f al. 3 CO doit prouver les faits qui en sont la condition (arrêt du Tribunal fédéral 4A_367/2010 du 4 octobre 2010 consid. 2.2).

Si les conditions de l'art. 257f al. 3 CO ne sont pas remplies, la résiliation anticipée est inefficace (ATF 135 III 441; arrêt du Tribunal fédéral 4A_347/2016 précité consid. 3.1.2).

4.3 La sous-location est, en principe, conçue pour le cas où le locataire n'a temporairement plus l'usage de la chose louée - par exemple en raison d'un stage professionnel ou d'études dans un autre lieu -; il le remet alors provisoirement à un tiers pour se décharger, d'un point de vue économique, du fardeau du loyer le temps de son absence. Il y a abus de droit si le locataire a perdu toute idée de reprendre dans un avenir prévisible l'usage de la chose louée et qu'il a procédé en réalité à une substitution de locataires, ce qui est un but étranger à l'institution même de la sous-location (ATF 138 III 59 consid. 2.2.1; 134 III 446 consid. 2.4; arrêts du Tribunal fédéral 4A_227/2017 du 5 septembre 2017 consid. 4.2.1.1 et 4A_290/2015 du 9 septembre 2015 consid. 4.3.1).

4.4 Un congé anticipé remplissant les conditions de l'art. 257f al. 3 CO peut être annulé lorsqu'il apparaît contraire à la bonne foi (art. 271 al. 1 CO). Une telle annulation présuppose des circonstances particulières et ne peut être que très rarement admise (arrêt du Tribunal fédéral 4A_87/2012 du 10 avril 2012 consid. 6.2; LACHAT, Le bail à loyer, Lausanne 2019, p. 894, n. 3.2.2).

Le fardeau de la preuve d'une résiliation contraire à la bonne foi incombe au locataire (ATF 140 III 591 consid. 1 et 2; arrêt du Tribunal fédéral 4A_436/2018 du 17 janvier 2019 consid. 5.1).

4.5 En l'espèce, l'appelante a informé l'intimée, cinq jours à l'avance, que l'arcade abritant E______ serait sous-louée aux mêmes conditions que le contrat de bail principal, à F______ SARL par une gérance-vente.

Or, les conditions n'étaient pas les mêmes, notamment les mensualités visant à rémunérer la mise à disposition du fonds de commerce s'élevant à 5'000 fr. et celles-ci devant être acquises à l'appelante en cas de résiliation du contrat de cession notamment pour non-paiement.

L'intimée n'était donc pas en possession de toutes les conditions de la sous-location pour se prononcer sur son admissibilité.

En outre, l'appelante n'a pas démontré avoir l'intention d'exploiter à nouveau l'arcade dans le futur, vu les modalités du contrat de cession du fonds de commerce du 23 juillet 2018 et son avenant du 24 août 2018. Au contraire, sa volonté de vendre, à terme, le fonds de commerce démontre qu'elle n'envisageait plus d'occuper les locaux.

L'appelante n'a par ailleurs pas indiqué quelles étaient les informations sensibles qu'elle ne pouvait pas communiquer à l'intimée, étant précisé que si tel était le cas, il lui suffisait de caviarder les informations sensibles inutiles à l'intimée pour prendre sa décision.

Dans ces circonstances, la Cour retiendra, à l'instar des premiers juges, que les courriers des 2 et 24 août 2018 constituent des protestations écrites suffisantes au sens de l'art. 257f al. 3 CO, l'intimée ayant indiqué à l'appelante rester dans l'attente des documents pour se déterminer en connaissance de cause sur la sous-location et que, dans l'intervalle, cette dernière demeurait illicite. Le second courrier précisait encore une possible résiliation du bail pour justes motifs si l'appelante ne se conformait pas à ses obligations.

L'appelante ne s'étant pas exécutée et ayant passé outre le consentement de l'intimée, c'est à raison que les premiers juges ont déclaré efficace le congé anticipé notifié le 10 septembre 2018, soit plus d'un mois après la première protestation du 2 août 2018.

Le jugement entrepris sera donc confirmé sur ce point.

5. L'appelante fait grief aux premiers juges d'avoir violé les art. 257f al. 2, 271 et 271a CO, du fait qu'ils n'ont pas retenu que la résiliation du contrat de bail à loyer de l'appartement était un prétexte, voir un congé-représailles consécutif à ses prétentions relatives à l'exploitation du E______ et du H______ par F______ SARL. En outre, l'absence de G______ dans l'appartement litigieux n'avait pas été démontrée et les témoins n'avaient pas permis d'établir les nuisances reprochées.

5.1 Chaque partie est en principe libre de résilier un bail de durée indéterminée pour la prochaine échéance convenue en respectant le délai de congé prévu. La résiliation ordinaire du bail ne suppose pas l'existence d'un motif de résiliation particulier (cf. art. 266a al. 1 CO; ATF 142 III 91 consid. 3.2.1; 140 III 496 consid. 4.1; 138 III 59 consid. 2.1). En principe, le bailleur est donc libre de résilier le bail, notamment, dans le but d'adapter la manière d'exploiter son bien selon ce qu'il juge le plus conforme à ses intérêts (ATF 136 III 190 consid. 3), pour effectuer des travaux de transformation, de rénovation ou d'assainissement (ATF 142 III 91 consid. 3.2.2 et 3.2.3; 140 III 496 consid. 4.1), pour des motifs économiques (arrêts du Tribunal fédéral 4A_19/2016 précité consid. 4.2; 4A_475/2015 du 19 mai 2016 consid. 4.1 et 4.3) ou encore pour utiliser les locaux lui-même ou pour ses proches parents ou alliés (arrêts du Tribunal fédéral 4A_198/2016 du 7 octobre 2016 consid. 4.3 et 4.5; 4A_18/2016 du 26 août 2016 consid. 3.3 et 4).

Lorsque le bail porte sur une habitation ou un local commercial, la seule limite à la liberté contractuelle des parties réside dans les règles de la bonne foi : le congé qui y contrevient est alors annulable (art. 271 al. 1 CO; cf. également art. 271a CO). La protection assurée par les art. 271 et 271a CO procède à la fois du principe de la bonne foi (art. 2 al. 1 CC) et de l'interdiction de l'abus de droit (art. 2 al. 2 CC). De manière générale, un congé est contraire aux règles de la bonne foi lorsqu'il ne répond à aucun intérêt objectif, sérieux et digne de protection et qu'il apparaît ainsi purement chicanier ou consacrant une disproportion crasse entre l'intérêt du preneur au maintien du contrat et celui du bailleur à y mettre fin (ATF 142 III 91 consid. 3.2.1; 140 III 496 consid. 4.1;
138 III 59 consid. 2.1).

5.2 En l'espèce, le motif du congé donné par la bailleresse réside dans l'utilisation de l'appartement non conforme au contrat et générant des nuisances.

Comme le soutient à juste titre l'appelante, l'intimée n'a pas prouvé que G______ n'occuperait pas du tout l'appartement, vu les explications de celui-ci et les déclarations des témoins, L______ et M______.

En revanche, comme les premiers juges l'ont retenu, aucun élément au dossier ne confirme la présence intermittente de la famille de G______. D'ailleurs, ce dernier a admis ne pas occuper l'entier de l'appartement.

La procédure a établi que des employées du H______ ont été hébergées durant environ trois mois avant la résiliation du bail dans une partie de l'appartement, selon la déclaration du représentant de F______ SARL dans une autre procédure. Contrairement à ce que soutient l'appelante, cette déclaration ne saurait être remise en cause, celle-ci n'alléguant pas d'éléments permettant de douter de son bien-fondé.

Selon le témoin, M______, cette même partie de l'appartement a été occupée par un couple avec un bébé, puis par cinq ou six dames jusqu'au début de la crise du COVID, puis par deux autres dames par la suite.

En outre, G______ a admis l'utilisation régulière d'une partie de son appartement par des employées du H______, de sorte que cette partie est utilisée à d'autres fins que celle d'habitation prévue par le contrat de bail.

S'agissant des nuisances, la procédure a permis de les établir par les explications de J______, qui a rapporté en avoir subies, et les témoins, L______ et M______, qui en ont fait état de l'utilisation nocturne de la buanderie. Cette dernière a aussi déclaré de manière crédible avoir entendu des bruits de talons à des heures tardives.

L'appelante a échoué à établir que le bail avait été résilié en représailles à l'exercice de son droit à la sous-location du restaurant E______, comme elle le prétend à tort, la procédure ayant permis de démontrer les motifs de la résiliation du bail de l'appartement.

Au vu de ce qui précède, le congé de l'appartement n'ayant pas été donné de manière contraire à la bonne foi, il sera validé et le jugement confirmé sur ce point.

6. L'appelante fait grief au Tribunal d'avoir violé les art. 272 et 272b al. 1 CO, ayant refusé toute prolongation en ce qui concerne l'arcade et en accordant deux ans et demi pour l'appartement en lieu et place d'une unique prolongation de six ans pour chacun des deux objets loués.

6.1 Selon l'art. 272 al. 1 CO, le locataire peut demander la prolongation du bail lorsque la fin du contrat aurait pour lui ou sa famille des conséquences pénibles sans que les intérêts du bailleur ne le justifient. Pour trancher la question, le juge doit procéder à une pesée des intérêts en présence, en prenant en considération notamment les critères énumérés à l'al. 2 de cette disposition. La durée maximale de la prolongation est de six lorsqu'il s'agit de locaux commerciaux et de quatre ans lorsqu'il s'agit de bail d'habitations. Dans cette limite, le juge peut accorder une ou deux prolongations (art. 272b al. 1 CO).

Selon la jurisprudence, la prolongation du bail n'a de sens que si le report du congé permet d'espérer une atténuation des conséquences pénibles qu'entraînerait ce congé et laisse prévoir qu'un déménagement ultérieur présenterait moins d'inconvénients pour le locataire, lequel ne saurait, en revanche, invoquer les conséquences nécessairement liées à la résiliation du bail en tant que telle. Il s'agit d'accorder au locataire plus de temps que ne lui en donne le délai de résiliation ordinaire pour chercher de nouveaux locaux, et non pas de lui donner l'occasion de profiter le plus longtemps possible de locaux au loyer avantageux (ATF
116 II 446 consid. 3b; arrêts du Tribunal fédéral 4A_639/2018 du 21 novembre 2019 consid. 6.1; 4A_556/2015 du 3 mai 2016 consid. 4.2).

Lorsqu'il doit se prononcer sur une prolongation du bail, le juge apprécie librement, selon les règles du droit et de l'équité (art. 4 CC), s'il y a lieu de prolonger le bail et, dans l'affirmative, pour quelle durée. Il doit procéder à la pesée des intérêts en présence et tenir compte du but de la prolongation, consistant à donner du temps au locataire pour trouver des locaux de remplacement (ATF 125 III 226 consid. 4b) ou à tout le moins pour adoucir les conséquences pénibles résultant d'une extinction du contrat (ATF 116 II 446 consid. 3b; arrêt du Tribunal fédéral 4C.139/2000 du 10 juillet 2000 consid. 2a). Il lui incombe de prendre en considération tous les éléments du cas particulier, tels que la durée du bail, la situation personnelle et financière de chaque partie, leur comportement, de même que la situation sur le marché locatif local (ATF 136 III 190 consid. 6 et les arrêts cités; 125 III 226 consid. 4b). Il peut tenir compte du délai qui s'est écoulé entre le moment de la résiliation et celui où elle devait prendre effet, comme de la durée de la procédure judiciaire qui prolonge en fait le bail (arrêts du Tribunal fédéral 4A_639/2018 précité consid. 6.1; 4A_545/2013 du 28 novembre 2013 consid. 3.1), ainsi que du fait que le locataire n'a pas entrepris de démarches sérieuses pour trouver une solution de remplacement (cf. ATF 125 III 226 consid. 4c; arrêt du Tribunal fédéral 4C.425/2004 du 9 mars 2005 consid. 3.4).

Le choix entre une ou deux prolongations doit permettre au juge de retenir la solution la plus adaptée aux circonstances (arrêts du Tribunal fédéral 4A_386/2014 du 11 novembre 2014 consid. 4.3.1; 4A_105/2009 du 5 juin 2009 consid. 3.1 et la référence au Message du Conseil fédéral); il peut donc, dans la pesée des intérêts des deux parties, décider d'accorder une première prolongation du bail ou une prolongation définitive et, cas échéant, en fixer la durée. Il n'y a pas de priorité de l'une de ces solutions par rapport à l'autre (arrêts du Tribunal fédéral 4A_386/2014 précité consid. 4.3.1; 4A_105/2009 précité consid. 3.2).

Aucune prolongation n'est accordée lorsqu'un congé est donné pour violation grave par le locataire de son devoir de diligence ou pour de graves manques d'égards envers les voisins (art. 257f al. 3 et 4 CO).

6.2 En l'espèce, le Tribunal a considéré à juste titre que la question d'une éventuelle prolongation de bail ne se posait pas s'agissant de l'arcade abritant E______, le bail ayant été résilié en application de l'art. 257f al. 3 CO.

Pour ce qui est de l'appartement, les premiers juges ont procédé à une pesée des intérêts en présence.

Concernant l'appelante, ils ont tenu compte de la longue durée du bail, du fait que l'appelante n'avait pas fait état de conséquences pénibles pour elle générées par la résiliation du bail et qu'elle n'avait pas allégué avoir cherché un logement de remplacement depuis l'avis de résiliation du contrat de bail.

Les autres allégations de l'appelante à l'appui de son appel au sujet de sa situation financière n'ont pas été établies, de sorte qu'elles ne sauraient entrer en considération. Il en est de même du fait que G______ n'a plus, selon l'appelante, « les moyens physiques de déménager de son appartement ». Quoi qu'il en soit, la prolongation du bail ne permettrait pas d'espérer qu'un déménagement ultérieur présenterait moins d'inconvénients sur ce dernier point.

Concernant l'intimée, les premiers juges ont considéré qu'elle n'avait pas un besoin urgent de voir partir la locataire.

Du fait que la durée de la procédure devant le Tribunal a permis à l'appelante de bénéficier, de fait, de plus de deux ans de prolongation, une unique prolongation de l'appartement de deux ans et demi jusqu'au 31 décembre 2021, telle qu'arrêtée par les premiers juges, concilie équitablement les intérêts en présence.

La Cour confirmera donc le jugement dans son intégralité.

7. A teneur de l'art. 22 al. 1 LaCC, il n'est pas prélevé de frais dans les causes soumises à la juridiction des baux et loyers, étant rappelé que l'art. 116 al. 1 CPC autorise les cantons à prévoir des dispenses de frais dans d'autres litiges que ceux visés à l'art. 114 CPC (ATF 139 III 182 consid. 2.6).

* * * * *


 


PAR CES MOTIFS,
La Chambre des baux et loyers :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 1er décembre 2021 par A______ SA contre le jugement JTBL/865/2021 rendu le 20 octobre 2021 par le Tribunal des baux et loyers dans la cause C/22896/2018.

Au fond :

Confirme ce jugement.

Dit que la procédure est gratuite.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Siégeant :

Madame Nathalie LANDRY-BARTHE, présidente; Madame Sylvie DROIN et Monsieur Laurent RIEBEN, juges; Madame Zoé SEILER et Monsieur Nicolas DAUDIN, juges assesseurs; Madame Maïté VALENTE, greffière.

 

La présidente :

Nathalie LANDRY-BARTHE

 

La greffière :

Maïté VALENTE

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF;RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 15'000 fr. cf. consid. 1.2.