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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1715/2023

ATA/595/2024 du 14.05.2024 ( AIDSO ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1715/2023-AIDSO ATA/595/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 14 mai 2024

2ème section

 

dans la cause

 

A______ recourant

contre

HOSPICE GÉNÉRAL intimé



EN FAIT

A. a. A______, né le ______ août 1967, est de nationalité suisse.

b. Marié de 2000 à 2020 avec B______, il a eu avec cette dernière deux filles, C______, née le ______ novembre 2000 et D______, née le ______ juin 2003.

c. Aux termes du jugement de divorce rendu par le Tribunal civil le 29 septembre 2020, A______ devait verser à son ex-épouse, par mois et d'avance, la somme de CHF 580.-, allocations familiales ou d'études non comprises, à titre de contribution de D______, cela jusqu'à sa majorité, voire jusqu'à l'âge de 25 ans au plus en cas de formation professionnelle ou d'études régulières.

Le jugement ratifiait en outre la convention conclue entre les époux le 23 décembre 2019, qui prévoyait le versement d'une contribution d'entretien mensuelle de CHF 870.- pour C______.

B. a. En février 2021, A______ a sollicité une aide financière de l'Hospice général (ci-après : l'hospice). Il a rempli, le 25 février 2021, le formulaire correspondant dans lequel il a indiqué être divorcé depuis le 29 septembre 2020 et devoir s'acquitter pour ses deux filles d'une contribution d'entretien totale de CHF 1'500.- par mois. Il a signé le document « Mon engagement en demandant une aide financière à l’hospice ».

b. En mars 2021, A______ a remis à son assistante sociale la copie du jugement de divorce ainsi que l'attestation de scolarité concernant C______.

c. Fin mars 2021, il a reçu un chèque de CHF 2'289.75 correspondant aux prestations pour le mois de février 2021, et un même montant a été versé sur son compte postal à titre de prestations pour le mois de mars 2021.

d. Selon l'hospice, lors de l'entretien du 21 avril 2021 avec son assistante sociale, A______ lui a indiqué ne pas vouloir faire modifier le montant de la contribution d'entretien en faveur de ses filles. L'assistante sociale lui a indiqué que l'hospice ne pouvait prendre en charge l'intégralité de ladite contribution, mais CHF 580.- pour D______ et CHF 673.- pour C______, soit au total CHF 1'253.- par mois.

e. Le 10 mai 2021, A______ a reçu de l'hospice CHF 4'679.50 à titre de prestations financières pour les mois d'avril et mai 2021.

f. Le 2 juin 2021, sur demande de son assistante sociale, A______ a transmis l'attestation de scolarité de sa fille D______.

g. Le 7 juin 2021, l'hospice a versé sur le compte de A______ CHF 4'937.-, somme correspondant aux contributions d'entretien pour ses filles pour les mois de février à mai 2021.

h. Le 8 juin 2021, l'hospice a versé sur le compte de A______ CHF 3'842.75, somme qui incluait les contributions d'entretien du mois de juin 2021.

i. En juillet et août 2021, A______ n'a pas reçu de prestations financières car il se trouvait au-dessus des barèmes de l'aide sociale.

j. Le 13 août, il a fait parvenir à son assistante sociale la preuve du paiement à son ex-épouse des contributions d'entretien des mois de février à juin 2021.

k. Les 3 septembre et 4 octobre 2021, l'hospice a versé sur le compte de A______ respectivement CHF 3'166.10 et CHF 3'359.25, sommes qui incluaient les contributions d'entretien des mois de septembre et octobre 2021.

l. Le 4 novembre 2021, répondant à la demande de l'hospice de produire le justificatif attestant du paiement des contributions d'entretien des mois de septembre et octobre 2021, A______ a indiqué avoir utilisé cet argent pour payer des factures de santé. Le fait de ne pas avoir reçu de prestations en juillet et août 2021 l'avait mis en découvert.

m. Lors de l'entretien du 23 novembre 2021, l'assistante sociale a appris que les filles de A______ n'étaient plus scolarisées pendant l'année scolaire 2021‑2022, si bien qu'elle lui a indiqué que les contributions d'entretien pour ses filles ne seraient plus comptabilisées pour le calcul du droit aux prestations.

n. Le 14 février 2022, l'assistante sociale a précisé à A______ qu'il allait faire l'objet d'une décision de restitution pour les contributions d'entretien des mois de septembre et octobre 2021, qu'il n'avait pas versées à la crédirentière.

o. Par décision du 17 février 2022, le centre d'action sociale (ci-après : CAS) d'E______ a demandé à A______ la restitution de CHF 2'506.-.

C. a. Après avoir, le 14 mars 2022, adressé au CAS un courrier dans lequel il se disait conscient de devoir rembourser la somme précitée et demandait une déduction mensuelle de CHF 50.- pour ce faire, A______ a, par courrier du 8 avril 2022, indiqué former opposition à la décision de restitution de ce montant et en demander la remise.

b. Il a confirmé faire opposition et complété celle-ci le 17 mai 2022.

Ces prestations avaient été perçues en septembre et octobre 2021. Il n'avait jamais reçu de décomptes de prestations. Toutes ses dettes représentaient pour lui un stress considérable, qui nuisait à sa santé. Il avait donc utilisé le surplus de ces montants pour régler des dettes, afin que son endettement diminue. Il était dans un état dépressif et de burn-out, éprouvant alors une énorme difficulté pour gérer des dossiers. S'il avait eu un décompte de prestations, il se serait rendu compte que cet argent était destiné à sa fille et le lui aurait reversé. Sa fille D______ était devenue majeure le ______ 2021, si bien qu'il avait compris que le « versement en surplus » lui était destiné et non à sa fille.

c. Par décision du 19 avril 2023, la direction de l'hospice a rejeté l'opposition.

Un décompte de prestations pouvait être obtenu par simple courriel adressé à l'assistante sociale en charge du dossier. Il ne pouvait par contre pas partir du principe que le montant qui lui était alloué avait soudainement augmenté. Il avait reçu des sommes les mois précédents au titre des contributions d'entretien en faveur de ses filles et avait parfaitement compris qu'elles devaient être reversées à la mère de ses enfants, si bien que l'on ne comprenait pas pourquoi il avait agi différemment pour les contributions de septembre et octobre 2021. Dès lors qu'il avait bénéficié de sommes pour la contribution de sa fille C______, qui était majeure dès le début de l'aide financière, il était inexplicable qu'il ait pu penser que la majorité de sa fille D______ lui donnait droit à un surplus de prestations.

Dans ces circonstances, il ne pouvait être de bonne foi, si bien que l'une des conditions de la remise n'était pas donnée.

Des retenues mensuelles ayant déjà été opérées, c'était désormais la somme de CHF 1'906.- qui lui restait à rembourser.

D. a. Par acte du 12 mai 2023 adressé à l'hospice, A______ a interjeté recours contre la décision sur opposition et demande de remise précitée, sans prendre de conclusions formelles.

Il avait été de bonne foi, faisant preuve d'une transparence totale envers son assistante sociale pendant toute la période où il avait été aidé par l'hospice et en dépression. Son discernement pendant ces périodes était toutefois altéré. Il était sincère lorsqu'il avait écrit avoir utilisé cet argent pour payer ses dettes, car la date des versements coïncidait avec l'accession de sa fille cadette à la majorité. Le stress engendré par ses dettes le « limitai[t] grandement dans [s]on discernement administratif ».

S'agissant des décomptes de prestations, il avait suivi dès qu'il l'avait pu les cours destinés aux bénéficiaires de l'hospice, mais ne se souvenait pas avoir été informé de la possibilité de demander des décomptes de prestations.

b. Le 19 mai 2023, l'hospice a transmis le courrier précité à la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) pour raison de compétence.

c. Le 29 juin 2023, l'hospice a conclu au rejet du recours.

Ce dernier ne portait que sur la question de la remise. Il n'était pas contesté que le recourant avait reçu pour les mois de septembre et octobre 2021 des contributions d'entretien pour un montant total de CHF 2'506.- et qu'il n'avait pas versé ces sommes à son ex-épouse. Le recourant avait donc perçu indûment des prestations à hauteur du montant précité et il était correct de lui en réclamer le remboursement.

Le recourant ne pouvait ignorer que les prestations qui lui étaient versées comprenaient une somme mensuelle de CHF 1'253.- à titre de contribution d'entretien pour ses filles et qu'il était tenu de reverser ce montant. En effet, son assistante sociale lui avait expliqué le mécanisme de prise en charge de ces contributions d'entretien par l'hospice et lui avait déjà plusieurs fois demandé de fournir des preuves de leur versement.

On ne pouvait suivre le recourant dans ses explications au sujet de son état de santé et de la majorité de sa fille. Il recevait en effet depuis le début de la période d'aide un montant pour la contribution d'entretien de sa fille aînée, qui était majeure, si bien qu'il ne pouvait raisonnablement penser que la majorité d'un enfant faisait obstacle au versement de la contribution d'entretien. Le recourant ne démontrait de plus pas en quoi son état de santé – qui n'était pas documenté – aurait eu brutalement pour conséquence qu'il ait été incapable de comprendre que les contributions d'entretien devaient être reversées comme les mois précédents. Dans ces conditions, il ne pouvait ignorer qu'il ne pouvait utiliser les sommes précitées pour le remboursement de ses dettes, et ne pouvait ainsi être de bonne foi, si bien que c'était à juste titre qu'une remise lui avait été refusée.

Au vu des retenues effectuées, A______ restait devoir à l'hospice la somme de CHF 1'706.-.

d. Le juge délégué a fixé aux parties un délai au 8 septembre 2023 pour formuler toutes requêtes ou observations complémentaires, après quoi la cause serait gardée à juger.

e. Le 6 septembre 2023, l'hospice a indiqué ne pas avoir de requêtes ni d'observations complémentaires à formuler.

f. Le 23 septembre 2023, le recourant a persisté dans les termes de son recours, écriture qui a été acceptée au titre du droit inconditionnel à la réplique. Ses dettes étaient maintenant remboursées et il remerciait l'hospice pour l'aide apportée. Lors de la période considérée il subissait une profonde dépression. S'il avait reçu un décompte de prestations, cela aurait attiré son attention sur le bon comportement à adopter.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile et transmis à la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a et 64 al. 2 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10).

2.             Ni le recours ni la réplique du recourant ne contiennent de conclusions.

2.1 Selon l’art. 65 LPA, l’acte de recours contient sous peine d’irrecevabilité, la désignation de la décision attaquée et les conclusions du recourant (al. 1). En outre, il doit contenir l’exposé des motifs ainsi que l’indication des moyens de preuve. Les pièces dont dispose le recourant doivent être jointes. À défaut, un bref délai pour satisfaire à ces exigences est fixé au recourant, sous peine d’irrecevabilité (al. 2).

2.2 Compte tenu du caractère peu formaliste de cette disposition, il convient de ne pas se montrer trop strict sur la manière dont sont formulées les conclusions du recourant. Le fait que ces dernières ne ressortent pas expressément de l’acte de recours n’est pas en soi un motif d’irrecevabilité, pourvu que le juge et la partie adverse puissent comprendre avec certitude les fins du recourant (ATA/595/2020 du 16 juin 2020 consid. 2b). Une requête en annulation d’une décision doit par exemple être déclarée recevable dans la mesure où le recourant a de manière suffisante manifesté son désaccord avec la décision ainsi que sa volonté qu’elle ne développe pas d’effets juridiques (ATA/593/2023 du 6 juin 2023 consid. 2.2).

2.3 En l'espèce, on comprend que le recourant souhaite contester le refus de remise. Sa référence à l'absence de décomptes de prestations, bien que moins explicite, suggère qu'il entend également contester la décision de restitution. Il sera ainsi entré en matière sur ces deux aspects.

3.             Le litige porte sur le bien-fondé de la décision de restitution de CHF 2'506.-.

3.1 La LIASI a pour but de prévenir l’exclusion sociale et d’aider les personnes qui en souffrent à se réinsérer dans un environnement social et professionnel (art. 1 al. 1). Elle vise à garantir à ceux qui se trouvent dans la détresse matérielle et morale des conditions d’existence conformes à la dignité humaine (art. 1 al. 2 2e phr.). Avec le règlement d’exécution de la LIASI du 25 juillet 2007 (RIASI - J 4 04.01), elle concrétise les art. 12 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) et 39 al. 1 de la Constitution de la République et canton de Genève du 14 octobre 2012 (Cst-GE - A 2 00 ; ATA/256/2020 du 3 mars 2020 consid. 4b).

3.2 Ont droit aux prestations d'aide financière les personnes dont le revenu mensuel déterminant n'atteint pas le montant destiné à la couverture des besoins de base et dont la fortune ne dépasse pas les limites fixées par règlement du Conseil d'Etat (art. 21 al. 1 LIASI).

Sont prises en compte à titre de déductions sur le revenu la pension alimentaire effectivement versée au conjoint divorcé, séparé judiciairement ou de fait, ou au partenaire enregistré dont le partenariat est dissous ou qui vit séparé, ainsi que les contributions d’entretien versées à l’un des parents pour les enfants sur lesquels il a l’autorité parentale dans les limites et aux conditions fixées par règlement du Conseil d’État (art. 22 al. 4 LIASI).

En application de cette disposition, le règlement d'exécution de la LIASI précise que les pensions alimentaires ainsi que les contributions d'entretien fixées par le juge sont prises en compte contre remise des justificatifs de versement, pour autant qu'elles aient été régulièrement versées par le débiteur avant l'ouverture de son droit à l'aide sociale (art. 4A al. 1 du règlement d'exécution de la LIASI, du 25 juillet 2007 - RIASI - J 4 04.01). Le paiement des pensions alimentaires et des contributions d'entretien fait l'objet d'un contrôle mensuel systématique. Sans preuve originale du paiement, ces montants ne sont pas pris en compte dans les charges du mois suivant et les montants indûment perçus doivent être restitués (art. 4A al. 3 RIASI).

3.3 Selon l’art. 32 al. 1 LIASI, le demandeur ou son représentant légal doit fournir gratuitement tous les renseignements nécessaires pour établir son droit et fixer le montant des prestations d’aide financière. Le bénéficiaire doit immédiatement déclarer à l’hospice tout fait nouveau de nature à entraîner la modification du montant des prestations d’aide financière qui lui sont allouées ou leur suppression (art. 33 al. 1 LIASI).

Le document intitulé « Mon engagement en demandant une aide financière à l’Hospice général » concrétise l’obligation de collaborer et de renseignement. Le bénéficiaire ou son représentant légal doit immédiatement déclarer à l’hospice tout fait nouveau de nature à entraîner la modification du montant des prestations d’aide financière qui lui sont allouées ou leur suppression (art. 33 al. 1 LIASI ; ATA/1304/2021 du 30 novembre 2021 consid. 3a ; ATA/93/2020 du 28 janvier 2020 consid. 3a). Il atteste notamment du fait que le bénéficiaire a été informé du caractère subsidiaire des prestations d’aide financière exceptionnelle et du fait que des prestations sociales ou d’assurances sociales ne peuvent se cumuler avec les prestations d’aide financière dont elles doivent être déduites (ATA/1231/2022 du 6 décembre 2022 consid. 4c). Ces obligations valent pour tous les membres du groupe familial (art. 32 al. 4 LIASI).

3.4 L'art. 35 al. 1 LIASI décrit six cas dans lesquels les prestations d'aide financière peuvent être réduites, suspendues, refusées ou supprimées. Tel est notamment le cas lorsque la personne bénéficiaire ne répond pas ou cesse de répondre aux conditions de la loi (let. a) ou lorsqu'elle ne s'acquitte pas intentionnellement de son obligation de collaborer telle que prescrite par l'art. 32 (let. c) ou qu'elle refuse de donner les informations requises au sens des art. 7 et 32, donne des indications fausses ou incomplètes ou cache des informations utiles (let. d). Conformément à l’art. 35 al. 2 LIASI, l’hospice rend alors une décision écrite et motivée, avec les voies de droit (al. 2).

La suppression ou la réduction des prestations d'assistance doit être conforme au principe de la proportionnalité, imposant une pesée de l'ensemble des circonstances. Il faut alors prendre en considération la personnalité et la conduite du bénéficiaire des prestations, la gravité des fautes qui lui sont reprochées, les circonstances de la suppression des prestations ainsi que l'ensemble de la situation de la personne concernée (ATF 122 II 193 consid. 3b, in JdT 1998 I 562 ; ATA/1662/2019 du 12 novembre 2019 consid. 7).

La chambre de céans a déjà considéré à plusieurs reprises qu'il n'appartenait pas à l'État, et indirectement à la collectivité, de désintéresser d'éventuels créanciers. En effet, tel n'est pas le but de la loi, qui poursuit celui de soutenir les personnes rencontrant des difficultés financières, en les aidant à se réinsérer socialement et professionnellement, étant rappelé que l'aide est subsidiaire, de manière absolue, à toute autre ressource. Il n'est ainsi pas acceptable d'être au bénéfice d'une aide sociale ordinaire et d'utiliser sa fortune personnelle et récemment acquise pour désintéresser ses créanciers (ATA/398/2024 du 19 mars 2024 consid. 3.7 ; ATA/1001/2022 du 4 octobre 2022 consid. 5 ; ATA/815/2021 du 10 août 2021 consid. 5e ; ATA/26/2021 du 12 janvier 2021 consid. 4f).

3.5 Sous le titre « Prestations perçues indûment », l'art. 36 LIASI dispose qu'est considérée comme étant perçue indûment toute prestation qui a été touchée sans droit (al. 1). Par décision écrite, l'hospice réclame au bénéficiaire, à sa succession ou à ses héritiers qui l'ont acceptée, le remboursement de toute prestation d'aide financière perçue indûment par la suite de la négligence ou de la faute du bénéficiaire (al. 2). Le remboursement des prestations indûment touchées peut être réclamé si le bénéficiaire, sans avoir commis de faute ou de négligence, n'est pas de bonne foi (al. 3). L’action en restitution se prescrit par cinq ans, à partir du jour où l’hospice a eu connaissance du fait qui ouvre le droit au remboursement. Le droit au remboursement s’éteint au plus tard dix ans après la survenance du fait (al. 5).

De jurisprudence constante, toute prestation obtenue en violation de l'obligation de renseigner l'hospice est une prestation perçue indûment (ATA/15/2023 du 10 janvier 2023 consid. 2g ; ATA/850/2022 du 23 août 2022 consid. 5b ; ATA/918/2019 du 21 mai 2019 consid. 2).

3.6 En l'espèce, il n'est pas contesté que le recourant a reçu la somme de CHF 2'506.- au titre de contributions d'entretien pour ses deux filles, à reverser à son ex-épouse, ce qu'il n'a pas fait. Dès lors, en application de l'art. 4A al. 3 RIASI, le recourant devait en principe restituer ces montants.

Le recourant se plaint à cet égard de ne pas avoir reçu de décompte de prestations lui rappelant que lesdites sommes constituaient les CHF 1'253.- pris en charge par l'hospice pour la contribution à l'entretien de ses filles. Il ne cite toutefois aucune disposition légale ou réglementaire qui obligerait l'intimé à fournir d'office de tels documents, et ne remet pas non plus en cause la possibilité d'en obtenir sur simple demande. De plus, le recourant avait déjà reçu ces montants, au sujet desquels l'assistante sociale lui avait donné toutes explications utiles, s'étant déjà vu réclamer à au moins deux reprises des preuves de paiement desdites contributions. Il a de plus utilisé les montants pour désintéresser des créanciers, ce qui n'est, selon la jurisprudence citée plus haut, pas admissible.

Quant à l'état de santé déficient qu'il invoque, à savoir une dépression et/ou un burn‑out, d'une part il ne fournit pas le moindre certificat médical ni aucune autre pièce pour l'étayer, et d'autre part l'allégation selon laquelle il était « limité dans son discernement administratif » est infirmée par le fait qu'il a été en mesure de faire les paiements souhaités à ses créanciers, en cherchant à éviter le risque d'un accroissement de son endettement.

L'argumentation du recourant en lien avec le fait que sa fille cadette avait atteint sa majorité à peu près au même moment que les versements litigieux est peu compréhensible. Quand bien même cet événement aurait entraîné la suppression du versement par l'hospice de la contribution de sa fille D______ – ce qui n'était pas le cas, ce que savait immanquablement le recourant dès lors qu'il recevait aussi un montant à ce titre pour sa fille majeure –, on ne voit pas en quoi cela aurait pu entraîner un versement additionnel de prestations d'aide financière en sa faveur. Il n'existe dès lors aucun élément qui pourrait, à quelque titre que ce soit, être pris en compte pour admettre une utilisation correcte de l'aide financière reçue.

Il s'ensuit que le remboursement des CHF 2'506.- litigieux doit être confirmé.

4.             Reste à examiner le bien-fondé de la demande de remise sollicitée à titre subsidiaire.

4.1 Conformément à l'art. 42 LIASI, le bénéficiaire de bonne foi n’est tenu au remboursement, total ou partiel, que dans la mesure où il ne serait pas mis, de ce fait, dans une situation difficile (al. 1). Dans ce cas, il doit formuler par écrit une demande de remise dans un délai de 30 jours dès la notification de la demande de remboursement. Cette demande de remise est adressée à l'Hospice général (al. 2).

De jurisprudence constante, les conditions de la bonne foi et de la condition financière difficile sont cumulatives (ATA/50/2024 du 16 janvier 2024 consid. 4.1 ; ATA/1231/2022 du 6 décembre 2022 consid. 4g).

La condition de la bonne foi doit être réalisée dans la période où l’assuré concerné a reçu les prestations indues dont la restitution est exigée (arrêt du Tribunal fédéral 8C_766/2007 du 17 avril 2008 consid. 4).

4.2 Selon la jurisprudence de la chambre administrative, un assuré qui viole ses obligations d’informer l’hospice de sa situation financière ne peut être considéré de bonne foi (ATA/93/2020 précité consid. 4b et les références citées). La bonne foi doit être niée quand l’enrichi pouvait, au moment du versement, s’attendre à son obligation de restituer parce qu’il savait ou devait savoir, en faisant preuve de l’attention requise, que la prestation était indue (art. 3 al. 2 CC ; ATF 130 V 414 consid. 4.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_385/2011 du 13 février 2012 consid. 3; ATA/1310/2023 du 5 décembre 2023 consid. 3).

4.3 En 'espèce, il découle des considérants qui précèdent que le recourant savait, ou à tout le moins devait savoir, qu'une partie de l'aide financière reçue correspondait à des contributions d'entretien en faveur de ses deux filles et que CHF 2'506.- devaient être reversés à ce titre à son ex-épouse. Il en découle qu'il a fait preuve de négligence et qu'il ne saurait avoir été de bonne foi en utilisant cet argent à d'autres fins.

En l'absence de bonne foi, le recourant ne remplit pas l'une des deux conditions cumulatives nécessaires pour obtenir la remise sollicitée.

Mal fondé également sur ce point, le recours sera rejeté.

5.             Vu la nature du litige, aucun émolument ne sera perçu (art. 11 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 ‑ RFPA – E 5 10.03), et au vu de son issue aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 12 mai 2023 par A______ contre la décision sur opposition et demande de remise de l'Hospice général du 19 avril 2023 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument, ni alloué d'indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à A______ ainsi qu'à l'Hospice général.

Siégeant : Claudio MASCOTTO, président, Florence KRAUSKOPF, Jean-Marc VERNIORY, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

D. WERFFELI BASTIANELLI

 

 

le président siégeant :

 

 

C. MASCOTTO

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :