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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3150/2023

ATA/335/2024 du 05.03.2024 ( FORMA ) , REJETE

Descripteurs : JONCTION DE CAUSES;FORMATION(EN GÉNÉRAL);ÉTUDES UNIVERSITAIRES;ÉTUDIANT;EXCLUSION(EN GÉNÉRAL);PRINCIPE DE LA BONNE FOI;CIRCONSTANCE EXTRAORDINAIRE
Normes : LPA.70; Cst.9; unistatut.58
Résumé : Contestation par la recourante de son élimination de la faculté des sciences et de la modification du résultat d'un examen pour appliquer un bonus de 0.5. Absence de violation du principe de la bonne foi par son élimination et absence de circonstance exceptionnelle conduisant à renoncer à l'élimination. Confirmation de l'élimination, premier recours rejeté. Absence d'intérêt à contester la modification du résultat d'examen, deuxième recours manifestement irrecevable.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3150/2023-FORMA ATA/335/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 5 mars 2024

2ème section

 

dans la cause

 

A______ recourante
représentée par Me Sandrine TORNARE, avocate

contre

UNIVERSITÉ DE GENÈVE intimée


EN FAIT

A. a. A______, née B______, s'est immatriculée à l'Université de Genève (ci-après : l'université) au semestre d'automne 2018-2019 pour suivre le cursus de baccalauréat universitaire en médecine humaine au sein de la faculté de médecine. Dans sa demande d'immatriculation, elle a indiqué comme adresse le______, chemin C______ à D______. Elle a ensuite demandé son exmatriculation le 23 janvier 2019 et l'a obtenue le 25 janvier 2019.

b. Elle a par la suite obtenu sa réimmatriculation au sein de l'université pour suivre le même cursus dès le semestre d'automne 2019-2020. Dans sa demande de réimmatriculation, elle a indiqué être domiciliée au ______, chemin E______ à D______.

c. Après avoir échoué au terme de l'année universitaire 2020-2021 dans ce cursus, le 10 août 2021, A______ a demandé à changer de faculté, pour rejoindre celle des sciences où elle souhaitait obtenir un baccalauréat universitaire en sciences pharmaceutiques. Elle a indiqué dans sa demande être domiciliée au ______, chemin C______ à D______.

Elle a été, par décision du 27 août 2021, autorisée à entrer en première année de baccalauréat universitaire en sciences pharmaceutiques dès le semestre d'automne 2021, avec la condition d'avoir réussi, d'ici la session d'août et septembre 2022, tous les examens de première année, sans redoublement possible.

d. Durant l'année universitaire 2021-2022, elle ne s'est pas présentée à trois examens auxquels elle était inscrite, absences qui ont été excusées sur présentation de certificats médicaux, lesquels indiquaient qu'elle était domiciliée au ______, chemin C______, à D______.

Au terme de cette année universitaire, elle a notamment obtenu les notes de 3 en mathématiques générales à la session de janvier/février 2022, ainsi que de 2.75 dans la même branche et en physique générale D à la session d'août/septembre 2022, conformément à ses relevés de notes, notifiés au ______, chemin E______.

e. Par décision du 4 octobre 2022, le doyen a prononcé l'élimination de A______ du cursus de baccalauréat universitaire en sciences pharmaceutiques.

À l'issue de la session d'examens d'août/septembre 2022, elle n'avait pas rempli la condition d'admission de réussite de l'année propédeutique en deux semestres. Elle avait échoué à deux reprises à l'examen de mathématiques générales, ayant obtenu la note de 2.75 en dernière tentative. Elle ne pouvait plus remplir les conditions de réussite de la première année du baccalauréat universitaire convoité.

L'étudiante a formé opposition contre cette décision, indiquant comme adresse le ______, chemin C______.

f. Par décision sur opposition du 18 novembre 2022, le doyen a levé l'élimination de l'étudiante et lui a accordé une tentative dérogatoire pour l'examen de mathématiques générales – automne et une tentative pour les examens de physique D, chimie organique et chimie générale. Il ne s'agissait pas d'un redoublement et elle n'avait pas deux nouvelles tentatives par examen mais une seule. Elle devrait avoir validé son année propédeutique au plus tard à l'issue de la session d'examens d'août et septembre 2023.

La commission d'opposition avait rendu un préavis positif. Le maintien de son élimination serait disproportionné.

Cette décision a été expédiée par courrier recommandé au ______, chemin C______, mais retournée à l'université pour cause de destinataire introuvable à l'adresse indiquée. L'université l'a donc exceptionnellement communiquée par courriel le 24 novembre 2022, en demandant à l'intéressée de bien vouloir clarifier son adresse et vérifier qu'elle était bien à jour sur son portail. L'étudiante a écrit le lendemain au secrétariat des étudiants en indiquant avoir « reçu [le jour même] la réponse à [s]on opposition concernant [s]on renvoi de la faculté des sciences pharmaceutiques[, qui avait] été acceptée pour [s]a plus grande joie ».

g. Durant l'année académique 2022-2023, elle a obtenu les notes de 2.5 en mathématiques générales et 4 en chimie générale aux examens de février 2023, de 3.5 en physique générale D aux examens de mai et juin 2023, ainsi que de 3.25 en introduction à la génétique / biochimie I –printemps et 4 en chimie organique en juillet 2023.

Après prise de connaissance de son résultat en mathématiques générales dans le bulletin de notes du 20 février 2023, elle a échangé le lendemain des courriels avec son professeur dans cette branche et sollicité auprès du vice-doyen la possibilité d'effectuer un travail supplémentaire pour obtenir un bonus, argumentant avoir intégré le semestre mi-novembre, ce qui l'avait empêchée de participer aux quiz nécessaires à l'obtention d'un bonus. Le vice-doyen a donné une suite favorable à sa demande en mars 2023, de sorte qu'elle a effectué un quiz de rattrapage qui lui a permis d'obtenir le bonus convoité.

h. Par décision du doyen de la faculté du 14 juillet 2023, l'université a prononcé l'élimination de A______ du baccalauréat universitaire en sciences pharmaceutiques.

Ayant présenté plusieurs certificats médicaux l'année précédente, les dernières tentatives d'examens correspondant à son année de redoublement dérogatoire étaient prévues durant l'année 2022-2023. À l'issue de la session de juin 2023, elle avait obtenu la note de 2.5 en mathématiques générales et 3.5 en physique générale au semestre de printemps. Elle n'avait donc pas validé son année propédeutique malgré son redoublement.

À cette décision était annexé le procès-verbal des examens du même jour.

Cette décision a été adressée par courrier recommandé au ______, chemin E______ et également transmise par courriel le 20 juillet 2023, à la demande de l'étudiante.

B. a. Le 20 juillet 2023, A______ a formé opposition contre cette décision, demandant à pouvoir bénéficier d’une dérogation.

Elle a produit un rapport médical du 22 mai 2023 la diagnostiquant d'un trouble du déficit de l'attention avec hyperactivité (ci-après : TDAH).

b. Par décision du 22 août 2023, déclarée exécutoire nonobstant recours, notifiée le 31 août 2023, la doyenne de la faculté a rejeté l'opposition.

Les éléments invoqués ne constituaient pas des circonstances exceptionnelles dont il pouvait être tenu compte lors du prononcé d'une élimination. Elle confirmait le préavis négatif de la commission d'opposition.

C. a. Par acte du 29 septembre 2023, enregistré sous cause A/3150/2023, A______ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci‑après : la chambre administrative) contre cette décision, concluant à son annulation, à l'annulation de la décision du 14 juillet 2023, à sa réintégration au sein du baccalauréat universitaire en sciences pharmaceutiques et à son autorisation à repasser son année propédeutique en sciences pharmaceutiques en lui permettant de se présenter lors de la prochaine session envisageable aux examens de mathématiques générales, physique générale D et introduction à la génétique.

La décision sur opposition ne lui avait jamais été notifiée, ce qui avait entraîné un préjudice important. Elle n'avait pas pu recourir à son encontre dans les délais légaux et son droit d'être entendue avait été violé. Elle n'avait pas connaissance des conditions strictes de sa réadmission et pensait avoir à nouveau deux tentatives si elle en avait besoin.

Elle avait obtenu en juin 2023 un bonus en mathématiques qui devait être appliqué à l'examen de septembre 2023. Ni le professeur, ni le vice-doyen n'avaient attiré son attention sur le fait que l'obtention de ce bonus était inutile car elle avait épuisé ses tentatives. Au contraire, le vice-doyen l'avait autorisée exceptionnellement à présenter ce travail supplémentaire valant bonus. Ce faisant, on lui avait fait croire qu'elle bénéficiait d'une deuxième tentative, de sorte que le principe de la bonne foi avait été violé.

Elle se trouvait dans une situation exceptionnelle, vu la violation de ses droits procéduraux. Elle pensait être soumise aux conditions classiques et avoir deux tentatives. Son ignorance ne pouvait lui être opposée. Au regard de ses notes et de l'absence de mise en œuvre d'accompagnement scolaire pour son TDAH, son élimination était disproportionnée. Elle aurait pu facilement réussir avec une dernière tentative.

b. Le 19 octobre 2023, l'université a notifié un nouveau bulletin de notes à l'étudiante annulant et remplaçant celui du 14 juillet 2023. Un bonus de 0.5 avait été ajouté à la note de 2.5 obtenue en mathématiques générales en février 2023, pour une note finale de 3.

La recourante a formé opposition contre ce nouveau bulletin, car le bonus devait être appliqué à l’examen qu'elle passerait à l'avenir, conformément à sa demande de nouvelle tentative pendante devant la chambre administrative.

c. L'université a sollicité la suspension de la procédure afin que la question du bonus relatif à l'examen du cours de mathématiques générales puisse être tranchée sur opposition.

d. L'étudiante s'est opposée à la suspension de la procédure.

e. Le 27 novembre 2023, la chambre administrative a renoncé à suspendre la procédure, dans la mesure où l'université avait manifesté son intention de rendre une décision sur opposition rapidement et répondre au recours après son prononcé.

f. Par décision du 15 décembre 2023, déclarée exécutoire nonobstant recours, l'université a rejeté l'opposition contre le bulletin de notes du 19 octobre 2023.

Elle a rendu cette décision après avoir obtenu la détermination du professeur de mathématiques générales, lequel avait expliqué que le bonus était valable tant pour l'examen de janvier-février et que pour l'examen de rattrapage d'août-septembre, si l'étudiant s'y présentait à nouveau.

g. Par réponse du 18 décembre 2023, l'université a conclu au rejet du recours.

Si la décision du 18 novembre 2022 avait été retournée à la faculté, l'intéressée avait encore indiqué l'adresse du ______, chemin C______ dans son courrier à l'université du 11 décembre 2023. Elle avait accusé réception de cette décision par courriel le 25 novembre 2022 et n'avait pas recouru à son encontre dans le délai à cet effet, l'ayant ainsi acceptée tout comme les conditions qu'elle posait. Si elle avait un doute au sujet des conditions fixées dans cette décision, elle devait se renseigner auprès de la faculté, ce qu'elle n'avait pas fait.

À l'issue des deux sessions ordinaires de 2022-2023, elle avait échoué aux dernières tentatives d'examens autorisées de mathématiques générales et de physique générale, auxquelles elle avait obtenu les notes insuffisantes et éliminatoires de 3 (bonus compris) et 3.5. Son élimination avait donc à juste titre été prononcée.

La faculté ne l'avait nullement autorisée à présenter une nouvelle tentative d'examen de mathématiques générales à la session de rattrapage d'août/septembre 2023, en dérogation aux conditions claires posées par le doyen. Les questions d'admission conditionnelle ou en lien avec l'élimination étaient du ressort de la doyenne, et non de l'enseignant, du secrétariat des étudiants ou du vice‑doyen. Elle avait uniquement obtenu du vice-doyen une dérogation quant à la forme et à la passation tardive d'un bonus. Il n'y avait pas de violation du principe de la bonne foi.

Contrairement à ce qu'elle indiquait, la recourante avait connaissance de ses conditions d'études en 2022-2023. Elle avait obtenu au cours de son cursus plusieurs dérogations qui tenaient compte des difficultés personnelles et familiales. Pour bénéficier d'aménagements en raison de son TDAH, elle devait s'adresser au service institutionnel dédié. Si elle ne s'estimait pas pleinement apte à subir des examens universitaires selon les modalités communes à tous, il lui appartenait alors de ne pas les présenter en faisant valoir une inaptitude pour raisons de santé.

h. Dans sa réplique, la recourante a exposé qu’elle allait prochainement déposer son recours contre la décision du 15 décembre 2023

L'université n'avait pas tenté de lui notifier la décision sur opposition du 18 novembre 2022 au 12, chemin E______. Le courriel du 25 novembre 2022 avait été envoyé depuis son adresse électronique privée et ne constituait pas une réponse au courriel du 24 novembre 2022 expédié par l'université sur son adresse électronique d'étudiante, comme le confirmait le fait qu'elle ne répondait pas à la demande de clarification de son adresse. Elle n'avait pas expressément accepté la notification électronique.

Le commission d'évaluation des besoins particuliers de l'université avait admis que sa situation justifiait la mise en place d'aménagements particuliers pour les examens écrits et oraux au sein de la faculté des sciences.

i. Sur ce, la cause A/3150/2023 a été gardée à juger.

D. a. Par acte du 1er février 2024, enregistré sous cause A/359/2024, A______ a recouru auprès de la chambre administrative contre la décision sur opposition du 15 décembre 2023, concluant à son annulation, au constat que le bonus acquis concernant son examen de mathématiques générales serait comptabilisé lors de sa prochaine tentative après sa réadmission au baccalauréat universitaire en sciences pharmaceutiques et à la dispense des frais de justice. Préalablement, elle demandait la jonction de la procédure avec la cause A/3150/2023, subsidiairement l'apport de celle-ci.

b. La cause A/359/2024 a immédiatement été gardée à juger.

EN DROIT

1.             Les recours ont été interjetés en temps utile devant la juridiction compétente (art. 43 al. 2 de la loi sur l'université du 13 juin 2008 - LU - C 1 30 ; art. 36 al. 1 du règlement relatif à la procédure d’opposition au sein de l'université du 16 mars 2009 - RIO-UNIGE ; art. 20 ch. 1 du règlement d'études général de la faculté des sciences du 20 septembre 2021 [ci-après : REG] ; art. A 11 novies ch. 2 du règlement du baccalauréat universitaire en sciences pharmaceutiques du 16 septembre 2019 [ci-après : RET] ; art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10). Le premier recours est recevable. La recevabilité du deuxième recours sera examinée ultérieurement.

2.             La recourante demande la jonction des deux causes.

2.1 Selon l'art. 70 al. 1 LPA, l'autorité peut, d'office ou sur requête, joindre en une même procédure des affaires qui se rapportent à une situation identique ou à une cause juridique commune. La jonction n’est toutefois pas ordonnée si la première procédure est en état d’être jugée alors que la ou les autres viennent d’être introduites (art. 70 al. 2 LPA).

2.2 En l'espèce, les procédures A/3150/2023 et A/359/2024 concernent deux recours émanant de la même recourante contre deux décisions de la même autorité. Par ailleurs, les litiges concernent deux questions connexes, les conclusions du recours dans la cause A/359/2024 reposant sur la réadmission de la recourante au sein de son cursus et donc sur l'admission du recours dans la cause A/3150/2023. Finalement, la cause A/359/2024 est, tout comme la cause A/3150/2023, en état d'être de jugée, vu ce qui suit (consid. 7 ci-dessous).

Il se justifie par conséquent de joindre les deux causes sous le numéro A/3150/2023.

3.             3.1 Le litige porte sur la conformité au droit, d'une part, de l'élimination de la recourante du baccalauréat universitaire en sciences pharmaceutiques et, d'autre part, de l'application du bonus de 0.5 au résultat de mathématiques générales obtenu à l'examen de février 2023, pour une note finale de 3 dans cette branche.

3.2 Il convient d'analyser en premier les griefs concernant la première décision. En effet, la seule modification opérée par le bulletin de notes du 19 octobre 2023 correspond à la modification de la note de mathématiques générales de 2.5 à 3 par application du bonus obtenu grâce au quiz de rattrapage. Or, ladite note, avec ou sans l'application contestée du bonus, reste inférieure à la moyenne, de sorte que la modification ou non du bulletin de note du 19 octobre 2023, et donc la seconde question, n'a aucune incidence sur l'élimination de la recourante, soit sur la première question.

4.             En ce qui concerne la décision d'élimination, la recourante invoque une violation des art. 46 et 47 LPA et de son droit d'être entendue car la décision sur opposition du 18 novembre 2022 ne lui avait pas été notifiée et qu'elle n'avait dès lors pas eu connaissance des conditions auxquelles était soumise son année académique 2022‑2023.

Il ressort toutefois du dossier que l'autorité intimée lui a transmis par courriel la décision du 18 novembre 2022 le 24 novembre 2022 et que celle-ci a indiqué le lendemain avoir « reçu aujourd'hui la réponse à [s]on opposition concernant [s]on renvoi de la faculté des sciences pharmaceutiques » et que son « opposition a[vait] été acceptée à [s]a plus grande joie ».

Si la communication par courriel ne constitue en tant que telle pas une notification valable à un administré n'ayant pas accepté ce mode de notification (art. 46 al. 2 LPA), la recourante ne peut de bonne foi contester avoir eu connaissance des conditions de son admission durant l'année académique 2022-2023.

Le fait qu'elle ait envoyé son courriel du 25 novembre 2022 depuis son adresse privée et qu'il ne constitue pas une réponse directe au courriel de la faculté du jour précédent ne change rien à ce qui précède. Le contenu dudit courriel est en effet explicite et ne permet pas de doute quant au fait qu'elle a eu connaissance du contenu de la décision du 18 novembre 2022 le 25 novembre 2022.

Si elle souhaitait contester les conditions contenues dans cette décision, il lui appartenait de contester celle-ci en temps utile. L'irrégularité de la notification de la décision ne lui permettait de bonne foi pas d'attendre son échec en juillet 2023 pour la contester, alors qu'elle en avait déjà connaissance depuis novembre 2022, étant rappelé que la tentative de notification a été opérée à l'adresse indiquée en tête de l’opposition formée par l’étudiante.

La décision du 18 novembre 2022 et les conditions qu'elle contient sont par conséquent entrées en force et opposables à la recourante. Le grief sera écarté.

5.             La recourante reproche ensuite à l'autorité intimée d'avoir violé le principe de la bonne foi.

5.1 Ancré à l'art. 9 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), et valant pour l'ensemble de l'activité étatique, le principe de la bonne foi exige que l'administration et les administrés se comportent réciproquement de manière loyale. En particulier, l'administration doit s'abstenir de tout comportement propre à tromper l'administré et ne saurait tirer aucun avantage des conséquences d'une incorrection ou insuffisance de sa part (ATF 138 I 49 consid. 8.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_596/2022 du 8 novembre 2022 consid. 8.1).

5.2 Le principe de la bonne foi protège le citoyen dans la confiance légitime qu’il met dans les assurances reçues des autorités lorsqu'il a réglé sa conduite d'après des décisions, des déclarations ou un comportement déterminé de l'administration (ATF 143 V 95 consid. 3.6.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_204/2022 du 21 mars 2023 consid. 5.1 ; ATA/386/2023 du 18 avril 2023 consid. 6a). Ainsi, un renseignement ou une décision erronés de l'administration peuvent obliger celle-ci à consentir à un administré un avantage contraire à la réglementation en vigueur, à condition que (1) l'autorité soit intervenue dans une situation concrète à l'égard de personnes déterminées, (2) qu'elle ait agi ou soit censée avoir agi dans les limites de ses compétences et (3) que l'administré n'ait pas pu se rendre compte immédiatement de l'inexactitude du renseignement obtenu. Il faut encore (4) qu'il se soit fondé sur les assurances ou le comportement dont il se prévaut pour prendre des dispositions auxquelles il ne saurait renoncer sans subir de préjudice et (5) que la réglementation n'ait pas changé depuis le moment où l'assurance a été donnée (ATF 146 I 105 consid. 5.1.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_204/2022 du 21 mars 2023 consid. 5.1 ; ATA/386/2023 du 18 avril 2023 consid. 6a).

5.3 En l'espèce, la recourante affirme qu'au vu des échanges de courriels et de son autorisation à effectuer un quiz bonus de rattrapage, le vice-doyen, le secrétariat des étudiants ainsi que son professeur de mathématiques générales lui avaient fait croire à tort qu'elle pouvait se présenter à la prochaine session de rattrapage de l'examen de mathématiques générales. Elle estime donc que l'autorité intimée est liée par le principe de la bonne foi.

Toutefois, aucune assurance ne lui a été donnée dans ce contexte concernant la possibilité de bénéficier d'une tentative supplémentaire à l'examen de mathématiques générales. Ces échanges portent, en effet, uniquement sur son autorisation ou non à effectuer un travail de rattrapage pour obtenir un bonus à appliquer sur sa note d'examen, car elle n'avait pas effectué durant le semestre les quiz prévus à cet effet pour tous les étudiants. Ils ne portent pas sur l'existence ou non d'une nouvelle tentative à l'examen de mathématiques générales, comme d'ailleurs dans tout autre examen.

Certes, la demande initiale de la recourante mentionnait le bonus lié à l'examen de mathématiques générales de septembre 2023, le destinataire n'ayant dans sa réponse pas relevé sa méprise quant au fait qu'elle n'était pas autorisée à se présenter à l'examen en septembre. Toutefois, cette demande a été adressée au professeur de la branche, qui ne pouvait avoir connaissance des conditions applicables à chaque étudiant suivant ses cours et n'était pas compétent pour revenir sur les conditions fixées à la recourante. Par ailleurs, l'absence de réaction dudit professeur ne peut être assimilée à des assurances.

Les échanges suivants, notamment ceux avec le vice-doyen, ne mentionnent pas de session d'examens en particulier. Ce dernier n'est du reste pas non plus compétent pour revenir sur les conditions posées à l’étudiant pour son année académique, la compétence en la matière revenant au seul doyen.

Au vu de ce qui précède, la recourante ne peut se prévaloir du principe de la bonne foi pour remettre en cause son élimination confirmée le 22 août 2023.

6.             La recourante se prévaut de l'existence de circonstances exceptionnelles.

6.1 Est éliminé l’étudiant ou l’étudiante qui échoue à un examen ou à une session d’examens auxquels elle ou il ne peut plus se présenter en vertu du règlement d’études (let. a), l’étudiant ou l’étudiante qui ne subit pas les examens ou qui n’obtient pas les crédits requis dans les délais fixés par le règlement d’études (let. b ; art. 58 al. 3 statut). La décision d’élimination est prise par la doyenne ou le doyen de l’unité principale d’enseignement et de recherche ou la directrice ou le directeur du centre ou de l’institut interfacultaire, lesquels tiennent compte des situations exceptionnelles (art. 58 al. 4 statut).

Selon la jurisprudence constante, l'admission d'une situation exceptionnelle doit se faire avec restriction. Il en va de l'égalité de traitement entre tous les étudiants s'agissant du nombre de tentatives qu'ils sont autorisés à effectuer pour réussir leurs examens. N'est ainsi exceptionnelle que la situation particulièrement grave et difficile pour l'étudiant, ce tant d'un point de vue subjectif qu'objectif. Les effets perturbateurs doivent avoir été dûment prouvés par l'étudiant et être en lien de causalité avec l'événement. Les autorités facultaires disposent dans ce cadre d'un large pouvoir d'appréciation, dont l'autorité de recours ne censure que l'abus (ATF 136 I 229 consid. 6.2 ; 131 I 467 consid. 3.1 ; ATA/427/2022 du 26 avril 2022 consid. 3b ; ATA/281/2021 du 3 mars 2021).

Ont ainsi été considérées comme des situations exceptionnelles le décès d'un proche s'il est établi qu'il a causé un effet perturbateur en lien de causalité avec l'échec de l'étudiant, de graves problèmes de santé ou encore l'éclatement d'une guerre civile avec de très graves répercussions sur la famille de l'étudiant. En revanche, des difficultés financières, économiques ou familiales ainsi que l'obligation d'exercer une activité lucrative en sus des études ne constituent pas des circonstances exceptionnelles, même si elles représentent une contrainte. Ces difficultés sont certes regrettables, mais font partie d'une réalité commune à de très nombreux étudiants (ATA/1255/2023 du 21 novembre 2023 consid. 4.10.2 ; ATA/459/2020 du 7 mai 2020 consid. 5b ; ATA/250/2020 du 3 mars 2020 consid. 4b).

Les candidats qui ne se sentent pas aptes, pour des raisons de santé, à se présenter à un examen doivent l’annoncer avant le début de celui-ci. À défaut, l’étudiant accepte le risque de se présenter dans un état déficient qui ne peut justifier par la suite l’annulation des résultats obtenus. Un motif d'empêchement ne peut, en principe, être invoqué par le candidat qu'avant ou pendant l'examen (ATA/128/2023 du 7 février 2023 consid. 2.2.1 ; ATA/345/2020 du 7 avril 2020 consid. 7b ; ATA/250/2020 du 3 mars 2020 consid. 4c ; ATA/192/2020 du 18 février 2020).

6.2 Les examens sont réussis si : le candidat obtient pour chaque épreuve une note au moins égale à 4 ; exceptionnellement les règlements d'études de chaque titre peuvent admettre des notes inférieures à 4, mais en tout cas pas inférieures à 2 ; cependant, dans tous les cas, la moyenne des notes doit être égale ou supérieure à 4 (art. 14 ch. 1 REG).

Est notamment éliminé du titre brigué l'étudiant qui n'a pas respecté les conditions imposées lors de son admission conditionnelle (art. 3 REG) ou a répété sans succès l'année propédeutique (let. a) ou qui ne peut plus répéter l’évaluation d’un enseignement des études de base (let. b ; art. 19 ch. 1 REG). Les éliminations sont prononcées par le doyen (art. 19 ch. 5 REG).

6.3 L’examen de l’année propédeutique est soumis aux conditions définies aux art. 10 et 14 REG et avec les conditions particulières suivantes : l’examen est réussi si le candidat obtient une moyenne pondérée des notes égale ou supérieure à 4, le candidat n’obtient pas de note principale inférieure à 4, le candidat n’obtient pas de note partielle inférieure à 3 (let. a) ; en cas d’échec à l’examen de l’année propédeutique, les notes égales ou supérieures à 4 restent acquises et l’étudiant bénéficie à nouveau de deux tentatives maximum pour chaque évaluation qu’il doit refaire (let. b ; art. A 11 octies ch. 4 RET). Est éliminé du titre l’étudiant qui se trouve dans une des situations précisées dans l’art. 19 REG (art. A 11 novies ch. 1 RET).

6.4 En l'espèce, la recourante a obtenu, au terme de ses examens passés durant l'année académique 2022-2023, les notes en dernière tentative de 3 en mathématiques générales et 3.5 en physique générale D, soit deux notes inférieures à 4 qui conduisent à son échec de la première année du baccalauréat universitaire en sciences pharmaceutiques, ce que la recourante ne conteste pas en tant que tel.

Elle affirme cependant qu'il existerait dans son cas des circonstances exceptionnelles qui devraient conduire à renoncer à son élimination.

À titre de circonstances exceptionnelles, elle invoque sa méconnaissance des conditions auxquelles était soumise son année académique 2022-2023, soit le fait qu'elle ne bénéficiait plus que d'une tentative dans les quatre branches qu'elle était autorisée à suivre durant ladite année académique. Toutefois, comme vu précédemment, son allégation ne résiste pas à l'examen, la recourante ne pouvant, de bonne foi, contester avoir eu connaissance desdites conditions.

Elle invoque ensuite son TDAH et le fait que la connaissance de son diagnostic et des conseils en découlant, couplée aux mesures d'accompagnement, lui auraient permis de réussir les examens non validés. Cependant, si un rapport du 22 mai 2023 confirme ce TDAH, la recourante avait déjà demandé des mesures d'aménagement en mars 2023, de sorte qu'elle avait connaissance de ses difficultés avant mai 2023. Elle s'est donc présentée à ses examens de mai et juin 2023 en toute connaissance de cause et sans requérir de mesures d'aménagement. Si elle ne se sentait pas apte à effectuer l’examen en physique générale D, auquel elle a obtenu la note éliminatoire de 3.5, sans mesures d'aménagement en raison de son TDAH, elle devait l'annoncer et renoncer à s'y présenter, conformément à la jurisprudence, ce qu'elle n'a pas fait. Elle a donc accepté le risque de se trouver dans un état déficient au moins pour cet examen, dont le résultat est à lui seul éliminatoire. Elle ne remplit donc pas les conditions permettant d’admettre l’existence de circonstances exceptionnelles au sens de l'art. 58 al. 4 statut.

Finalement, comme le souligne l'autorité intimée, la recourante a déjà bénéficié d'une dérogation pour circonstances exceptionnelles à l'issue de l'année académique 2021-2022, ceci après avoir été admise au sein de la faculté des sciences sous condition en raison de son échec définitif au sein de la faculté de médecine.

Au vu de ce qui précède, l'autorité intimée n'a pas abusé de son pouvoir d'appréciation en niant l’existence de circonstances exceptionnelles au sens de l'art. 58 al. 4 du statut et en prononçant son élimination de la faculté des sciences.

Mal fondé, le recours contre la décision du 22 août 2023 sera rejeté.

7.             Vu la confirmation de son élimination, la recourante n'a pas d'intérêt à voir tranchée la question de savoir si le bonus de 0.5 devait être appliqué ou non à l'examen de mathématiques générales de février 2023, puisqu'elle ne pourra de toute manière plus obtenir l'application dudit bonus à une prochaine session d'examens.

Il sera par ailleurs relevé que son intérêt à recourir était déjà douteux indépendamment de la confirmation ou non de son élimination, puisque, selon les explications du professeur de mathématiques générales dans le cadre de l'instruction de l'opposition du 31 octobre 2023, le bonus était valable tant pour la session de janvier-février que pour la session d'août‑septembre 2023.

Le recours du 1er février 2024 est par conséquent manifestement irrecevable, sans qu'il ne soit nécessaire de l'instruire (art. 72 LPA).

8.             Vu l’issue du litige contre la décision du 22 août 2023, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge de la recourante, qui succombe, n’indique pas être exonérée des taxes universitaires et n'a pas sollicité l'assistance juridique dans le cadre de cette procédure (art. 87 al. 1 LPA ; art. 11 et 13 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03), et aucune indemnité de procédure ne lui sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

Conformément à sa pratique, la chambre administrative ne percevra pas d’émolument pour le second recours. L’issue du litige ne justifie pas l’octroi d’une indemnité de procédure (art. 87 LPA).

 

* * * * *

 

 

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

préalablement :

ordonne la jonction des causes A/3150/2023 et A/359/2024 sous cause A/3150/2023 ;

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 29 septembre 2023 par A______ contre la décision de l'Université de Genève du 22 août 2023 ;

déclare irrecevable le recours interjeté le 1er février 2024 par A______ contre la décision de l'Université de Genève du 15 décembre 2023 ;

au fond :

rejette le recours interjeté le 29 septembre 2023 par A______ contre la décision de l'Université de Genève du 22 août 2023 ;

met un émolument de CHF 400.- à la charge de A______ ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral :

- par la voie du recours en matière de droit public ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF, s'il porte sur le résultat d'examens ou d'autres évaluations des capacités, en matière de scolarité obligatoire, de formation ultérieure ou d'exercice d'une profession (art. 83 let. t LTF) ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Sandrine TORNARE, avocate de la recourante, ainsi qu'à l'Université de Genève.

Siégeant : Claudio MASCOTTO, président, Florence KRAUSKOPF, Jean-Marc VERNIORY, juges.

Au nom de la chambre administrative :

 

la greffière-juriste :

 

S. HÜSLER ENZ

 

 

le président siégeant :

 

C. MASCOTTO

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

Genève, le 

 

 

la greffière :