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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2743/2022

ATA/822/2023 du 09.08.2023 sur JTAPI/503/2023 ( PE ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2743/2022-PE ATA/822/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 9 août 2023

1ère section

 

dans la cause

 

A______ recourant
représenté par Me Yann ARNOLD, avocat

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS intimé

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 5 mai 2023 (JTAPI/503/2023)


EN FAIT

A. a. A______, né le 1______1966, se dit ressortissant sénégalais. En dernier lieu, il prétend se nommer B______ et être né le 2______1962.

b. Selon l'extrait du casier judiciaire, A______ a été condamné :

-       le 9 octobre 2015, par le Ministère public du canton de Genève (ci-après : MP), à une peine pécuniaire de 30 jours-amende, à CHF 30.-, avec sursis, délai d'épreuve 3 ans, et à une amende de CHF 100.-, pour entrée et séjour illicites (art. 115 al. 1 let. a et b de la loi fédérale sur les étrangers et l’intégration du 16 décembre 2005 [LEI - RS 142.20]) ;

-       le 2 juin 2016, par le MP, à une peine pécuniaire de 90 jours-amende à CHF 30.- avec sursis, délai d'épreuve 3 ans, pour violation de domicile (art. 186 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 - CP - RS 311.0), violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires (art. 285 CP) et séjour illicite (art. 115 al. 1 let. b LEI) ;

-       le 4 avril 2017, par le MP, à une peine privative de liberté de 4 mois, pour injure (art. 177 CP), violation de domicile (art. 186 CP), violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires (art. 285 CP) et séjour illicite (art. 115 al. 1 let. b LEI).

Sous l’identité de C______, né le 3______1957, originaire de Sierra Leone, muni d’un passeport falsifié, il a été condamné le 28 janvier 1988 par le Tribunal de police de Genève, à une peine d'emprisonnement de 3 ans, pour trafic d'héroïne. Une expulsion judiciaire de 15 ans avait été prononcée à son encontre. Il avait été refoulé du territoire suisse vers Accra (capitale du Ghana), via Moscou, le 18 novembre 1989. Il conteste être cette personne.

c. Le 25 novembre 2015, le secrétariat d'État aux migrations (ci après : SEM) a prononcé une interdiction d'entrée en Suisse à l'encontre de A______, pour une durée de trois ans, valablement notifiée le 17 juin 2016.

d. Le 20 juin 2016, une décision de renvoi au sens de l'art. 64 LEI a été prononcée à l'encontre de l'intéressé par l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM). L’intéressé n’a toutefois pas pu être renvoyé aux Pays-Bas dans la mesure où, bien que les autorités hollandaises aient admis sa réadmission le 27 juillet 2016, il se trouvait en détention préventive puis avait été transféré à l’hôpital de psychiatrie de Belle-Idée. Ce dernier n’avait pas collaboré avec la police en octobre 2016, laquelle n’avait donc pas pu exécuter le renvoi.

e. Par ordonnance du 4 août 2017, le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant a instauré une curatelle de représentation et de gestion en faveur de A______ et désigné deux curateurs à cet effet.

f. Selon un rapport médical du 15 octobre 2020, A______ souffre de trouble délirant chronique, d'une maladie cardiovasculaire, d'un diabète de type 2 compliqué d'une atteinte rénale et des pieds, d'un glaucome bilatéral, d'un excès de poids et d'un canal lombaire étroit avec lombalgies associées. Il suivait un traitement médicamenteux et bénéficiait de contrôles médicaux spécifiques en fonction des pathologies relatées. Son pronostic sans traitement était défavorable à moyen terme et le placerait dans une situation à risque de complications. Son pronostic à moyen terme, avec traitement, était qualifié de bon. L'absence d'affiliation au système de santé local et d'accès à des soins spécialisés en santé mentale pourrait aller à l'encontre d'un traitement médical dans son pays d'origine.

Selon un consulting médical du secrétariat d’État aux migrations (ci-après : SEM) du 10 décembre 2021, A______ était suivi par un médecin généraliste, par des infirmières spécialisées et bénéficiait d’un suivi psychiatrique depuis 2007, après un accident vasculaire, à raison de deux à quatre fois par année. Il avait également un suivi ophtalmologique, biologique et en podologie. Il prenait comme médicaments de l’aspirine, du Crestor (contre le cholestérol), du Jardiance et du Janumet (contre le diabète), du Lisinopril (contre l’hypertension artérielle et l’insuffisance cardiaque ) et du Risperdal (neuroleptique), cette dernière substance à hauteur de 1 × 50 mg toutes les deux semaines par voie intramusculaire. « L’analyse pays SEM » n’était pas en mesure de juger si les traitements et médicaments disponibles étaient suffisants au Sénégal d’un point de vue médical. Elle ne se prononçait pas sur le caractère raisonnable du renvoi et ne formulait pas de recommandations.

B. a. Par décision du 24 juin 2022, faisant suite à une demande d'autorisation de séjour déposée le 16 janvier 2020, l'OCPM a refusé de soumettre le dossier de A______ avec un préavis positif au SEM et a prononcé son renvoi de Suisse et de l'espace Schengen. En raison de son état de santé et de l'absence de garantie de l'accessibilité à ses traitements au Sénégal, l'exécution de ce renvoi n'était pas raisonnablement exigible. Il entendait proposer au SEM son admission provisoire, dès l'entrée en force de sa décision.

b. Il ressort de cette décision que C______, muni d'un passeport sierra léonais falsifié, avait été arrêté le 22 novembre 1987 à Genève. Une expulsion de 15 ans avait été prononcée à son encontre à la suite de sa condamnation pour trafic d'héroïne. Il avait été refoulé au Ghana le 18 novembre 1989. Interpellé par la police le 9 octobre 2015 sans documents d'identité, il avait déclaré être arrivé en Suisse vers le 1er octobre 2015 et avoir perdu son passeport sénégalais lors d'un voyage en Côte d'Ivoire. Il avait effectué sa scolarité au Sénégal. Le 3 juin 2016, une dactyloscopie avait pu mettre en relation l'identité de A______, né le1 ______1966, ressortissant sénégalais, avec celle de C______, né le 3______1957, originaire de Sierra Leone. Lors de son interpellation du même jour, il avait déclaré avoir déchiré son passeport près du lac d'Annecy en France. Le 26 juillet 2016, les autorités migratoires néerlandaises avaient accepté de réadmettre l'intéressé, connu depuis 1993, sous l'identité, C______, né le 1______ 1966, ressortissant du Soudan et au bénéfice d'une autorisation de séjour depuis 2001. Toutefois, n'ayant pas pu être localisé dans les délais, il n'avait pas pu être rapatrié aux Pays-Bas.

Il avait remis des attestations établies par des proches justifiant un séjour en Suisse depuis février 2015 et remis une copie d'un acte de naissance duquel il ressortait qu'il serait né le 2______ 1962. Il avait été hébergé par D______ entre le 30 mars 2017 et le 25 octobre 2021, où il était bénévole depuis 2016, puis au foyer E______ à F______. Il était en incapacité de travailler en raison de ses troubles, n'émergeait pas à l'aide sociale, ne faisait pas l'objet de poursuite et s'exprimait en français. Il n'avait pas de famille à Genève. Un frère et des membres de sa famille vivaient au Sénégal où sa mère était décédée le 28 janvier 2020.

Il ne remplissait pas les conditions des art. 30 al. 1 let. b LEI et 31 de l’ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201) régissant l'octroi d'une autorisation de séjour pour cas individuel d'extrême gravité. De nombreuses contradictions s'agissant de son identité demeuraient, étant précisé que le seul document en sa possession et relatif à celui-ci, était un extrait du registre des naissances, non légalisé par la représentation suisse à Dakar. Il se trouvait en Suisse depuis à peine sept ans et la durée de son séjour devait être relativisée par rapport aux nombreuses années passées à l'étranger. Il ne pouvait pas se prévaloir d'une intégration sociale ou professionnelle particulièrement marquée au point d'admettre qu'il ne puisse quitter la Suisse sans devoir être confronté à des obstacles insurmontables. Il n'avait pas crée des attaches à ce point profondes et durables qu'il ne puisse plus raisonnablement envisager un retour dans son pays d'origine. Son intégration ne revêtait aucun caractère exceptionnel. Son comportement n'était pas exempt de reproche au vu de ses condamnations pénales. Les maladies dont il souffrait existaient déjà avant sa venue en Suisse. Sa situation personnelle ne se distinguait guère de celle de bon nombre de ses concitoyens connaissant les mêmes réalités au Sénégal.

C. a. Le 26 août 2022, A______ a recouru contre cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) en concluant à son annulation et à l'octroi d'une autorisation de séjour en sa faveur, subsidiairement au renvoi de la cause à l'OCPM pour complément d'instruction.

Il se nommait B______ et était né le 2______1962. Il avait quitté le Sénégal au plus tard en 1981 et n'y était plus retourné. Il y avait conservé un lien lâche avec son frère, lequel le sollicitait ponctuellement pour des raisons financières. Il s'était rendu en Côte d'Ivoire puis en France, avant de résider au Pays-Bas. Il avait quitté ce pays alors qu'il était placé dans une institution psychiatrique. Il était arrivé à Genève en novembre 2014, alors âgé de 52 ans, dans le cadre d'un « voyage pathologique ». Il avait vécu dans des conditions très précaires, sans logement, ni soins médicaux ni revenu avant d'être hébergé à D______, de bénéficier d'un suivi médical auprès de la CAMSO et de fréquenter très régulièrement des institutions à vocation sociale. Il fréquentait assidument l'église et avait été baptisé le 20 avril 2018. Sa psychose serait apparue en 2007.

S’agissant de ses antécédents, il n'avait plus récidivé depuis six ans. Vu la quotité des peines prononcées, son atteinte à l'ordre public était très mesurée. Son degré de culpabilité n'était pas d'une intensité importante dès lors qu'il avait commis les faits reprochés alors qu'il ne possédait pas une pleine et entière responsabilité pénale. Il avait agi sur une courte période pénale. Il contestait être C______, né le 3______ 1957, ayant fait l'objet d'une condamnation pénale et d'une expulsion à la fin des années 1980. En dépit des lourdes atteintes à sa santé, il s'était créé un important cercle social et était actif en tant que bénévole, notamment au sein de l'association G______, de la pastorale des Milieux, de l'association H______ et de D______, ce qui était exceptionnel au vu de son état. Il avait distribué des sacs de vivres durant la crise sanitaire.

Il maîtrisait le français, n'avait pas fait l'objet de poursuites. La durée de son séjour en Suisse, de huit ans, était relativement conséquente. Il bénéficiait d'une aide de l'assistance publique uniquement en raison de ses pathologies. Dans la mesure où ses médecins avaient retenu une incapacité de travail à 100%, une démarche en vue d'obtenir une rente d’invalidité avait été initiée. Il devait bénéficier d'un cas de rigueur pour des motifs médicaux sans qu’il soit tenu compte du fait qu'il était déjà malade avant sa venue en Suisse ; la jurisprudence du Tribunal fédéral sur ce sujet n'avait plus lieu d'être. Sa réintégration au Sénégal, qu’il avait quitté depuis 40 ans, était gravement compromise car il était âgé, gravement atteint dans sa santé et sous curatelle, donc dans l'incapacité de gérer ses affaires. Un retour dans son pays d'origine constituerait un réel déracinement.

Il a produit notamment une attestation de bénévolat de D______, un certificat attestant d'un accueil de nuit dans cette structure depuis le 30 mars 2017 et une vingtaine de témoignages relevant son caractère généreux, respectueux et humble malgré sa santé fragile.

b. L’OCPM a conclu au rejet du recours et s'est référé à la décision querellée.

c. Dans sa réplique du 6 décembre 2022, le recourant a souligné l’étroitesse de ses liens sociaux. Son séjour en Suisse était de longue durée au regard des recommandations du Comité des Ministres du Conseil de l'Europe sur la sécurité de résidence des immigrés de longue durée. On ne saurait lui reprocher une absence d'intégration professionnelle eu égard à ses maladies. Les démarches afin de faire établir son identité étaient complexes et il n'était pas exclu qu'il doive se rendre auprès des autorités sénégalaises à Paris pour ce faire. Il sollicitait la suspension de la procédure jusqu'à ce que son identité soit établie. Sa réintégration au Sénégal était compromise étant donné sa conversion au christianisme et la stigmatisation à laquelle il s'exposerait vu ses problèmes psychiques.

d. Dans sa duplique, l'OCPM s'est opposé à la suspension de la procédure, l’identité de A______, qui avait seul entretenu une incertitude en s'identifiant de manière différente, n'était pas déterminante pour l'issue de la cause.

e. Le TAPI a, par jugement du 5 mai 2023, admis partiellement le recours. Le dossier devait être retourné à l’autorité intimée afin qu'elle le soumette au SEM avec un préavis favorable à une admission provisoire.

L’intégration de C______ ne saurait être qualifiée d'exceptionnelle pour justifier un cas de rigueur.

Célibataire et sans domicile fixe avant son hébergement auprès de D______ le 30 mars 2017, il maîtrisait parfaitement le français et n'avait pas fait l'objet de poursuite. La durée de son séjour en Suisse, à partir de février 2015 selon les témoignages, qui ne pouvait être qualifiée de très longue, était de plus à relativiser vu son illicéité. Il avait de plus passé 50 ans hors du territoire suisse. Si ses relations sociales pouvaient être qualifiées de bonnes vu ses amitiés et sa participation aux associations locales, ses attaches en Suisse ne pouvaient pour autant être considérées comme profondes et irréversibles.

Il avait contrevenu à l’ordre public suisse vu ses trois condamnations entre 2015 et 2017, non seulement à l'égard du bon fonctionnement des organes étatiques, mais également pour des faits de violence et d'atteinte à l'honneur. Sa responsabilité pénale restreinte n'y changeait rien. S’y ajoutait sa condamnation pour trafic d'héroïne le 28 janvier 1988, sous son alias inscrit au casier judiciaire, bénéficiant d'une empreinte officielle et d'une force probante accrue, dans une moindre mesure toutefois vu l'écoulement du temps.

Son mauvais état de santé actuel était établi. Cela étant, le fait pour un étranger de souffrir de maladies physiques et psychiques et de nécessiter de soins, ne suffisait pas pour admettre un cas de rigueur sans que n'existent des liens d'une certaine intensité avec la Suisse, ce qui n'était pas le cas en l'espèce.

Il n'avait pas produit de pièces de légitimation valables et reconnues au sens de l'art. 13 al. 1 LEI ni démontré qu'il avait entrepris toutes les démarches utiles en vue de les obtenir. Au contraire, il s'était présenté auprès des autorités sous différentes identités et avait déchiré son passeport avant son arrivée en Suisse. Son absence de collaboration à l'établissement de son identité était manifeste.

Compte tenu des pathologies dont A______ souffrait, le suivi et l’encadrement tant médical qu’administratif nécessités par son état n’apparaissaient actuellement pas envisageables dans son pays d'origine. Selon le rapport médical du 15 octobre 2020, l'absence d'accès à des soins spécialisés en santé mentale au Sénégal pourrait aller à l'encontre du traitement médical en cours. L’exécution du renvoi au Sénégal ne pouvait être raisonnablement exigée actuellement. Cette appréciation devrait être réévaluée en fonction de l’évolution de sa situation, le pronostic ayant été qualifié de bon à moyen terme s'il suivait son traitement.

D. a. A______ a formé recours contre ce jugement par acte expédié le 9 juin 2023 à la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative). Il a conclu préalablement à la suspension de la procédure dans l’attente de l’obtention d’une pièce de légitimation et à ce que soient prises toutes les démarches en vue d’infirmer ou de confirmer le lien avec la personne condamnée en 1988. Principalement, il a conclu au constat que les conditions de délivrance d’une autorisation de séjour étaient réalisées, à l’annulation de la décision de l’OCPM et à l’octroi d’une autorisation, subsidiairement au renvoi de son dossier à cette autorité pour complément d’instruction, plus subsidiairement à ce qu’il soit enjoint à cette autorité de soumettre son dossier au SEM avec un préavis favorable en vue de son admission provisoire.

Le TAPI avait violé les art. 30 al. 1 let. b, 31 al. 1 OASA et 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101).

Il est revenu sur son parcours depuis son départ du Sénégal il y avait plus de 40 ans. Il était arrivé à Genève en novembre 2014, soit il y avait plus de huit ans, une durée « intrinsèquement propre à créer des attaches profondes avec la Suisse », peu importe que cela ait été dans l’illégalité. Un départ constituerait un véritable déracinement. Il avait été baptisé le 20 avril 2018 sous le nom de I______. Il revenait sur ses graves et chroniques problèmes de santé tant psychiques que physiques, l’empêchant de travailler, et son implication dans le bénévolat, « particulièrement remarquable et méritoire au regard de sa situation personnelle ». Il ne faisait pas l’objet de poursuites et était originaire d’un pays dont l’une des langues officielles était le français.

Il excluait être celui qui avait été condamné à la fin des années 1980 et vivait mal cette accusation. Les recherches effectuées par la police le 9 octobre 2015 dans l’AFIS s’étaient révélées négatives et cette question devait faire l’objet d’une instruction, par une comparaison des empreintes prélevées sur le tiers en 1987 et les siennes, prélevées en octobre 2015 et janvier 2020. Les trois condamnations dont il avait fait l’objet concernaient des actes isolés, dus à son état, et ne trahissaient pas un défaut d’intégration.

Le TAPI ne pouvait retenir à son encontre un manque de collaboration pour ne pas avoir justifié son identité, vu les atteintes graves à sa santé et la curatelle en place. Il avait accepté que le service de protection des adultes (ci-après : SPAd) contacte les autorités sénégalaises en vue de la délivrance à tout le moins d’un certificat de nationalité et d’un acte de naissance de l’un de ses parents, étant relevé que son frère n’avait pas donné suite à ses demandes. Il disposait d’un acte de naissance sénégalais, l’identifiant comme B______.

Le TAPI avait omis de prendre en compte qu’il était venu en Suisse alors qu’il bénéficiait d’un droit de séjour aux Pays-Bas « certainement dans le cadre d’un voyage pathologique », ayant en effet déclaré à la police le 9 octobre 2015 qu’il était poursuivi par les hollandais qui « voulaient sa peau ». Sa situation avait été tolérée et avait même conduit la justice civile à lui accorder des mesures de protection. Il n’était pas venu en Suisse pour s’y faire soigner.

Le TAPI n’avait pas discuté « sauf erreur » la question de sa réintégration au Sénégal, qui serait gravement compromise vu son absence depuis plus de 40 ans, le fait qu’il soit proche de l’âge de la retraite, gravement atteint dans sa santé, dans l’incapacité de travailler et de recevoir les soins nécessaires. Il s’y retrouverait seul et livré à lui-même, d’autant plus vu sa conversion au christianisme. Il se prévalait d’un arrêt récent de la chambre administrative présentant de grandes similitudes avec sa situation (ATA/219/2023 du 7 mars 2023)

b. L’OCPM a conclu au rejet du recours, rappelant sa proposition d’admission provisoire.

c. Les parties ont été informées, le 18 juillet 2023, que la cause était gardée à juger.

d. Les arguments des parties et la teneur de pièces du dossier seront pour le surplus repris ci-dessous dans la mesure utile au traitement du litige.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2.             Le recourant conclut préalablement à la suspension de la procédure et sollicite des actes d’enquêtes.

2.1 Selon l’art. 14 al. 1 LPA lorsque le sort d’une procédure administrative dépend de la solution d’une question de nature civile, pénale ou administrative relevant de la compétence d’une autre autorité et faisant l’objet d’une procédure pendante devant ladite autorité, la suspension de la procédure administrative peut, le cas échéant, être prononcée jusqu’à droit connu sur ces questions. Cette disposition est une norme potestative et son texte clair ne prévoit pas la suspension systématique de la procédure chaque fois qu'une autorité civile, pénale ou administrative est parallèlement saisie (ATA/444/2023 du 26 avril 2023 consid. 3.1).

La suspension de la procédure ne peut pas être ordonnée chaque fois que la connaissance du jugement ou de la décision d’une autre autorité serait utile à l’autorité saisie, mais seulement lorsque cette connaissance est nécessaire parce que le sort de la procédure en dépend (ATA/630/2008 du 16 décembre 2008 consid. 5). Une procédure ne saurait dès lors être suspendue sans que l’autorité saisie ait examiné les moyens de droit qui justifieraient une solution du litige sans attendre la fin d’une autre procédure. Il serait en effet contraire à la plus élémentaire économie de procédure et à l’interdiction du déni de justice formel fondée sur l’art. 29 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) d’attendre la décision d’une autre autorité, même si celle-ci est susceptible de fournir une solution au litige, si ledit litige peut être tranché sans délai sur la base d’autres motifs (ATA/812/2021 du 10 août 2021 consid. 2a ; ATA/1493/2019 précité consid. 3b).

2.2 Tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 Cst., le droit d'être entendu comprend notamment le droit pour l'intéressé d'offrir des preuves pertinentes et d'obtenir qu'il y soit donné suite (ATF 132 II 485 consid. 3.2 ; 127 I 54 consid. 2b). Ce droit ne s'étend qu'aux éléments pertinents pour l'issue du litige et n'empêche pas le juge de renoncer à l'administration de certaines preuves et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, s'il acquiert la certitude que celles-ci ne l'amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 138 III 374 consid. 4.3.2 ; 131 I 153 consid. 3).

2.3 En l’espèce, aucune procédure civile, pénale ou administrative n’est en cours. Seules des démarches, récentes, le sont pour permettre la délivrance de documents d’identité au recourant par son pays d’origine. Il souhaiterait par ailleurs que de nouvelles comparaisons d’empreintes interviennent pour démontrer qu’il ne serait pas la personne condamnée en 1988 pour trafic d’héroïne et refoulée du territoire suisse le 18 novembre 1989 en exécution d’une mesure d’expulsion pénale valable 15 ans.

Le fait que son identité soit encore douteuse est sans pertinence pour l’issue du litige. Le dossier contient en effet tous les éléments nécessaires pour évaluer la situation personnelle du recourant et s’il remplit ou non les conditions d’un cas de rigueur ou peut se prévaloir de l’art. 8 CEDH pour obtenir une autorisation de séjour.

Quant à sa condamnation en 1988, une dactyloscopie du 3 juin 2016 a mis en évidence l’identité de personnes entre C______, né le 3______1957, ayant fait l’objet de la condamnation en 1988 et A______, né le 1______1966, soit l’identité sous laquelle le recourant a par la suite été condamné par trois fois, en 2015, 2016 et 2017, condamnations qu’il ne remet pas en cause. Au demeurant, cette condamnation de 1988 ne revêt pas l’importance que le recourant lui donne pour évaluer les critères du cas de rigueur, comme il sera vu ci-dessous.

Il n’y a donc aucune raison de suspendre la présente procédure, pas plus que de lancer de nouvelles recherches de comparaisons d’empreintes.

Ces deux requêtes seront rejetées. Le dossier est complet et permet à la chambre de céans de trancher le litige en toute connaissance de cause.

3.             Le litige porte sur la conformité au droit du jugement confirmant la décision de l'OCPM de refuser de transmettre au SEM le dossier du recourant avec un préavis favorable en vue de la délivrance d’une autorisation de séjour.

N’est plus litigieuse au stade du recours la question du renvoi du dossier à l’OCPM afin qu’il le soumette au SEM avec un préavis favorable en vue d’une admission provisoire du recourant, telle que tranchée par le TAPI.

3.1 Le 1er janvier 2019 est entrée en vigueur une modification de la LEI et de l’OASA. Conformément à l'art. 126 al. 1 LEI, les demandes déposées, comme en l'espèce, après le 1er janvier 2019 sont régies par le nouveau droit.

3.2 L'art. 30 al. 1 let. b LEI permet de déroger aux conditions d'admission en Suisse, telles que prévues aux art. 18 à 29 LEI, notamment aux fins de tenir compte des cas individuels d'une extrême gravité ou d'intérêts publics majeurs.

3.3 L'art. 31 al. 1 OASA, dans sa teneur au moment des faits, prévoit que pour apprécier l'existence d'un cas individuel d'extrême gravité, il convient de tenir compte notamment de l'intégration du requérant sur la base des critères d’intégration définis à l’art. 58a al. 1 LEI (let. a), de sa situation familiale, particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité des enfants (let. c), de sa situation financière (let. d), de la durée de sa présence en Suisse (let. e), de son état de santé (let. f) ainsi que des possibilités de réintégration dans l'État de provenance (let. g). Les critères énumérés par cette disposition, qui doivent impérativement être respectés, ne sont toutefois pas exhaustifs, d'autres éléments pouvant également entrer en considération, comme les circonstances concrètes ayant amené un étranger à séjourner illégalement en Suisse (directives LEI, état au 1er janvier 2021, ch. 5.6.12).

3.4 Les dispositions dérogatoires des art. 30 LEI et 31 OASA présentent un caractère exceptionnel et les conditions pour la reconnaissance d'une telle situation doivent être appréciées de manière restrictive (ATF 128 II 200 consid. 4). Elles ne confèrent pas de droit à l'obtention d'une autorisation de séjour (ATF 138 II 393 consid. 3.1 ; 137 II 345 consid. 3.2.1). L'autorité doit néanmoins procéder à l'examen de l'ensemble des circonstances du cas d'espèce pour déterminer l'existence d'un cas de rigueur (ATF 128 II 200 consid. 4 ; 124 II 110 consid. 2 ; ATA/38/2019 du 15 janvier 2019 consid. 4c).

3.5 La reconnaissance de l'existence d'un cas d'extrême gravité implique que l'étranger concerné se trouve dans une situation de détresse personnelle. Parmi les éléments déterminants pour la reconnaissance d'un cas d'extrême gravité, il convient en particulier de citer la très longue durée du séjour en Suisse, une intégration sociale particulièrement poussée, une réussite professionnelle remarquable, la personne étrangère possédant des connaissances professionnelles si spécifiques qu'elle ne pourrait les mettre en œuvre dans son pays d'origine ou une maladie grave ne pouvant être traitée qu'en Suisse (arrêt du Tribunal fédéral 2A.543/2001 du 25 avril 2002 consid. 5.2).

3.6 La jurisprudence requiert, de manière générale, une très longue durée (Minh SON NGUYEN/Cesla AMARELLE, Code annoté de droit des migrations, LEtr, vol. 2, 2017, p. 269 et les références citées). Par durée assez longue, la jurisprudence entend une période de sept à huit ans (arrêt du Tribunal administratif fédéral [ci-après : TAF] C-7330/2010 du 19 mars 2012 consid. 5.3 ; Minh SON NGUYEN/Cesla AMARELLE, op. cit., p. 269). Après un séjour régulier et légal de dix ans, il faut en principe présumer que les relations sociales entretenues en Suisse par la personne concernée sont devenues si étroites que des raisons particulières sont nécessaires pour mettre fin à son séjour dans ce pays (ATF 144 I 266 consid. 3.8). La durée d'un séjour illégal, ainsi qu'un séjour précaire, ne doivent normalement pas être pris en considération ou alors seulement dans une mesure très restreinte (ATF 130 II 39 consid. 3 ; ATAF 2007/45 consid. 4.4 et 6.3 ; 2007/44 consid. 5.2).

Bien que la durée du séjour en Suisse constitue un critère important lors de l'examen d'un cas d'extrême gravité, elle doit néanmoins être examinée à la lumière de l'ensemble des circonstances du cas particulier et être relativisée lorsque l'étranger a séjourné en Suisse de manière illégale, sous peine de récompenser l'obstination à violer la loi (ATF 130 II 39 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2D_13/2016 du 11 mars 2016 consid. 3.2).

3.7 Aux termes de l'art. 96 al. 1 LEI, les autorités compétentes tiennent compte, en exerçant leur pouvoir d'appréciation, des intérêts publics, de la situation personnelle de l'étranger ainsi que de son intégration.

3.8 La question est ainsi de savoir si, en cas de retour dans le pays d'origine, les conditions de sa réintégration sociale, au regard de la situation personnelle, professionnelle et familiale de l'intéressé, seraient gravement compromises (arrêts du Tribunal fédéral 2C_621/2015 du 11 décembre 2015 consid. 5.2.1 ; 2C_369/2010 du 4 novembre 2010 consid. 4.1).

3.9 Selon la jurisprudence, des motifs médicaux peuvent, selon les circonstances, conduire à la reconnaissance d'un cas de rigueur lorsque la personne concernée démontre souffrir d'une sérieuse atteinte à la santé qui nécessite, pendant une longue période, des soins permanents ou des mesures médicales ponctuelles d'urgence, indisponibles dans le pays d'origine, de sorte qu'un départ de Suisse serait susceptible d'entraîner de graves conséquences pour sa santé. En revanche, le seul fait d'obtenir en Suisse des prestations médicales supérieures à celles offertes dans le pays d'origine ne suffit pas à justifier une exception aux mesures de limitation. De même, la personne étrangère qui entre pour la première fois en Suisse en souffrant déjà d'une sérieuse atteinte à la santé ne saurait se fonder uniquement sur ce motif médical pour réclamer une telle exemption (ATF 128 II 200 consid. 5.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_861/2015 du 11 février 2016 consid. 4.2 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral F-6860/2016 du 6 juillet 2018 consid. 5.2.2 ; ATA/1279/2019 du 27 août 2019 consid. 5f).

En l'absence de liens d'une certaine intensité avec la Suisse, l'aspect médical et les éventuelles difficultés de réintégration de la personne concernée dans le pays d'origine ne sauraient justifier, à eux seuls, l'octroi d'un permis humanitaire pour cas de rigueur. Le cas échéant, ces critères ne peuvent en effet être pris en considération que dans le cadre de l'examen de la licéité et de l'exigibilité de l'exécution du renvoi (arrêt du TAF F-4125/2016 du 26 juillet 2017 consid. 5.4.1 ; ATA/506/2023 du 16 mai 2023 consid. 7.7 ; ATA/41/2022 du 18 janvier 2022 consid. 9).

3.10 La notion mentionnée à l'art. 84 al. 5 LEI d'exigibilité d'un retour dans son pays de provenance d'un étranger admis provisoirement n'est pas identique à la notion d'exigibilité de l'exécution du renvoi telle qu'elle apparaît à l'art. 83 LEI. Il faut, en effet, distinguer les personnes visées par l'art. 84 al. 5 LEI – qui sont par essence au bénéfice d'une admission provisoire, c'est-à-dire d'une mesure qui suspend, du moins temporairement, l'exécution du renvoi pour l'un des motifs relevant de l'art. 83 LEI, y compris celui relatif à l'inexigibilité de l'exécution du renvoi – et celles visées par l'art. 83 LEI, dont l'examen du cas déterminera précisément si elles doivent ou peuvent être mises au bénéfice d'une admission provisoire (ATAF C-1136/2013 du 24 septembre 2013 consid. 6.3.2).

3.11 Sous l'angle étroit de la protection de la vie privée, l'art. 8 CEDH ouvre le droit à une autorisation de séjour, mais à des conditions restrictives, l'étranger devant établir l'existence de liens sociaux et professionnels spécialement intenses avec la Suisse, notablement supérieurs à ceux qui résultent d'une intégration ordinaire (ATF 130 II 281 consid. 3.2.1). Lorsque l'étranger réside légalement depuis plus de dix ans en Suisse, il y a lieu de partir de l'idée que les liens sociaux qu'il y a développés sont suffisamment étroits pour qu'il bénéficie d'un droit au respect de sa vie privée. Lorsque la durée de la résidence est inférieure à dix ans, mais que l'étranger fait preuve d'une forte intégration en Suisse, le refus de prolonger ou la révocation de l'autorisation de rester en Suisse peut également porter atteinte au droit au respect de la vie privée (ATF 144 I 266). Les années passées en Suisse dans l'illégalité ou au bénéfice d'une simple tolérance ne sont pas déterminantes (ATF 137 II 1 consid. 4.3 ; 134 II 10 consid. 4.3).

Récemment le Tribunal fédéral a expressément admis que la reconnaissance finale d’un droit à séjourner en Suisse issu du droit au respect de la vie privée garanti par l'art. 8 § 1 CEDH pouvait s’imposer même sans séjour légal de dix ans à condition toutefois que le requérant atteste d’une intégration particulièrement réussie (ATF 144 I 266 consid. 3.8 et 3.9 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_734/2022 du 3 mai 2023 consid. 5.3).

3.12 Une ingérence dans l’exercice du droit au respect de la vie privée et familiale garanti par l’art. 8 CEDH est possible aux conditions de l’art. 8 § 2 CEDH, pour autant qu’elle soit prévue par la loi et qu’elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sécurité publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l’ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d’autrui. Le refus de prolonger une autorisation de séjour ou d’établissement fondé sur l’art. 8 § 2 CEDH suppose une pesée des intérêts en présence et l’examen de la proportionnalité de la mesure (ATF 139 I 145 consid. 2.2 ; 135 II 377 consid. 4.3). L’examen de la proportionnalité sous l’angle de l’art. 8 § 2 CEDH se confond avec celui imposé par l’art. 96 LEI (arrêts du Tribunal fédéral 2C_419/2014 du 13 janvier 2015 consid. 4.3 ; ATA/1539/2017 du 28 novembre 2017 consid. 6b).

3.13 L’examen de la proportionnalité de la mesure, imposé par l’art. 96 LEI, se confond avec celui qui est prévu à l’art. 8 § 2 CEDH (ATF 139 I 31 consid. 2.3.2 ; 139 I 145 consid. 2.2).

4.             En l’espèce, il ressort du dossier que le recourant est arrivé en Suisse au début de l’année 2015, de sorte qu’il s’y trouve depuis sept ans et demi. Cette période, qui peut être qualifiée de longue, doit néanmoins être fortement relativisée, dans la mesure où le séjour s’est passé en totalité dans l’illégalité et alors même que le recourant a fait l’objet de condamnations en octobre 2015, juin 2016 et avril 2017 notamment pour infraction à l’art. 115 al. 1 let. b LEI, puis au bénéfice d'une tolérance des autorités depuis le dépôt de la demande en janvier 2020. Il a par son comportement placé l'autorité devant le fait accompli et devait s'attendre à ce que celle-ci se préoccupe davantage de rétablir une situation conforme au droit que d'éviter les inconvénients qui en découlent pour lui (ATF 123 II 248 consid. 4a ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_33/2014 du 18 septembre 2014 consid. 4.1).

Sur le plan professionnel et financier, le recourant n’a jamais travaillé depuis son arrivée en Suisse, en raison de ses problèmes psychiatriques et somatiques avérés. Il bénéficie d’un encadrement mis en place par la ville de Genève, D______ et le TPAE, sous la forme d’une curatelle, et bénéficie d’un hébergement de nuit, de repas pris dans des structures d’accueil, d’un montant mensuel de CHF 450.- versé par l’hospice général et des soins médicaux requis par sa situation. Il dépend ainsi entièrement du tissu social et médical mis en place en sa faveur. Il n’est pas possible dans ces circonstances de conclure à l’existence d’une intégration exceptionnelle au sens de la jurisprudence précitée.

Dans la mesure où il est originaire du Sénégal, ses connaissances de la langue française ne sont pas une gageure d’une intégration particulière.

Le recourant a démontré, par des attestations datant pour les plus récentes de l’automne 2020, des liens amicaux et affectifs à Genève. Non seulement il n’est pas établi que ces liens soient toujours d’actualité, mais encore ils ne sont pas d'une intensité telle qu'il ne pourrait être exigé de sa part de poursuivre ses contacts par les moyens de télécommunication modernes. En tout état, ses liens avec d’autres bénévoles, une église à Genève ou les structures dans lesquelles il trouve l’appui nécessaire ne sauraient suffire à retenir une intégration poussée. En outre, les relations de travail, d'amitié, de voisinage que l'étranger noue durant son séjour en Suisse, telles que reflétées dans les attestations établies par diverses personnes entre août et octobre 2020, ne constituent pas, à elles seules, des circonstances de nature à justifier un cas de rigueur (arrêts du TAF F-3168/2015 du 6 août 2018 consid. 8.5.2 ; F-643/2016 du 24 juillet 2017 consid. 5.2.3 ; ATA/429/2023 du 25 avril 2023 consid. 4). Il ne peut dès lors être retenu qu'il aurait fait preuve d'une intégration sociale exceptionnelle en comparaison avec d'autres étrangers se trouvant dans une situation identique à la sienne.

Il a de plus été condamné, comme déjà relevé, en octobre 2015, juin 2016 et avril 2017, non seulement s’agissant de ces deux dernières condamnations, pour séjour illégal, mais également pour violation de domicile ainsi que violence ou menaces contre les autorités et les fonctionnaires, quand bien même ses problèmes psychiatriques expliquent en partie les faits à la base desdites condamnations.

Le recourant ne remplit en l’occurrence pas les critères d’intégration stricts requis par la jurisprudence.

Il a passé au Sénégal toute son enfance, son adolescence et une partie de sa vie d’adulte. Il en maîtrise la langue et en connaît les us et coutumes. À cet égard, il doit se voir opposer qu’il n’est pas possible de retracer concrètement son parcours personnel avant sa présence en Suisse en 2015, puisqu’il a sans arrêt varié dans ses dires s’agissant de son identité, de son origine et de son parcours de vie. Il est néanmoins établi qu’il a eu un statut légal aux Pays-Bas et qu’il pouvait encore y être admis le 27 juillet 2016. Malgré son séjour en Suisse et aux Pays-Bas, son pays d’origine ne peut lui être devenu étranger. L’un de ses frères y vit encore. Il est certes âgé de 57 ans et atteint dans sa santé tant psychique que somatique. Il concède qu’un frère y vit et il n’est pas démontré qu’il ne lui apporterait pas l’aide nécessaire au moment de son retour. Dans ces circonstances, il apparaît que la réintégration du recourant au Sénégal, si elle ne s’avère pas évidente, n’est toutefois pas gravement compromise au point de retenir une situation de détresse personnelle au sens des art. 30 al. 1 let. b LEI et 31 al. 1 OASA. Il ne se justifie en conséquence pas de déroger aux conditions, strictes, d'admission en Suisse en sa faveur.

Au vu de ce qui précède, c’est conformément à la loi et sans violer son pouvoir d’appréciation que l’autorité intimée a refusé de préaviser favorablement auprès du SEM la demande d’autorisation de séjour présentée par le recourant.

5.             Reste toutefois à examiner sa situation médicale sous l’angle du renvoi.

5.1 Selon l'art. 83 al. 4 LEI, l'exécution de la décision de renvoi peut ne pas être raisonnablement exigée si le renvoi ou l'expulsion de l'étranger dans son pays d'origine ou de provenance le met concrètement en danger, notamment parce qu'il ne pourrait plus recevoir les soins dont il a besoin. L'autorité à qui incombe la décision doit donc dans chaque cas confronter les aspects humanitaires liés à la situation dans laquelle se trouverait l'étranger concerné dans son pays après l'exécution du renvoi à l'intérêt public militant en faveur de son éloignement de Suisse (ATAF 2014/26 consid. 7.6, 7.9 et 7.10).

5.2 En l’occurrence, l’OCPM, suivi par le TAPI qui a admis partiellement le recours, a indiqué dans la décision attaquée entendre soumettre le dossier du recourant au SEM, dès l’entrée en force de sa décision, afin qu’il se prononce sur la délivrance d’une admission provisoire au sens de l’art. 83 al. 4 LEI, considérant qu’au vu des éléments médicaux, l’exécution du renvoi n’est pas raisonnablement exigible.

Il lui en est donné acte.

Les considérants qui précèdent conduisent au rejet du recours.

6.             Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge du recourant qui succombe (art. 87 al. 1 LPA) et il ne sera pas alloué d’indemnité de procédure (art. 87 al. 2 LPA).

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 9 juin 2023 par A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 5 mai 2023 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 400.- à la charge de A______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Yann ARNOLD, avocat du recourant, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.

Siégeant : Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, présidente, Valérie LAUBER, Eleanor McGREGOR, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. SCHEFFRE

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. PAYOT ZEN-RUFFINEN

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :

 

 

 

 


 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l’entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l’admission provisoire,

4. l’expulsion fondée sur l’art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d’admission,

6. la prolongation d’une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d’emploi du titulaire d’une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d’asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l’objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l’acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

______________________________________________

Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l’objet d’aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

___________________________________________

 

Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.