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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3247/2021

ATA/835/2023 du 09.08.2023 sur JTAPI/1244/2022 ( LCI ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3247/2021-LCI ATA/835/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 9 août 2023

3ème section

 

dans la cause

 

A______ et B______ recourants
représentés par Me Paul HANNA, avocat

contre

COOPÉRATIVE DE L’HABITAT ASSOCIATIF

représentée par Me Claire BOLSTERLI, avocate

et

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE-OAC

et

C______
représentée par Me Jean-Jacques MARTIN, avocat

et

D______

et

E______

et

F______ intimés

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 17 novembre 2022 (JTAPI/1244/2022)


EN FAIT

A. a. C______, D______, E______ et F______ sont propriétaires des parcelles nos 10'909 et 10'910, feuille 1______, de la commune de G______, situées en zone 5, d’une surface de 4'324 m2 et 613 m2.

D______ est propriétaire de la parcelle no 10'908, feuille 1______, de la même commune, d’une surface de 1'576 m2.

b. Le 19 juin 2019, ces propriétaires ont conclu avec la COOPÉRATIVE DE L’HABITAT ASSOCIATIF (ci-après : CODHA) une promesse de vente et d’achat portant sur les parcelles nos 10'909 et 10'910, voisines des parcelles précitées, soumise à la condition suspensive de l’obtention d’une autorisation de construire en force pour des logements d’une surface brute de plancher (ci-après : SBP) de 1'631 m2.

c. Le 10 juin 2020, CODHA a déposé auprès du département du territoire (ci-après : le département) une demande d’autorisation de construire (DD 2______) cinq « villas », avec quatorze appartements en propriété sans but lucratif (PBSL), deux salles communes, trois couverts à vélos, un poulailler, et dix places de stationnement extérieures sur les parcelles nos 10'909 et 10'910. Les villas auraient pour adresses 12, 12A, 14, 14A et 14B chemin H______.

d. Le 19 février 2021, la CODHA, informée le 4 septembre 2020 que le projet devait être modifié pour se conformer à certains des préavis usuels émis, en a soumis une nouvelle version au département.

Elle a notamment transmis un formulaire modifié de sécurité incendie.

e. Après l’émission de nouveaux préavis, un troisième projet a été déposé auprès du département, le 14 juin 2021. Un courrier annexé demandait l’application de l’art. 59 al. 4 de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05) en raison de l’intégration dans le calcul de la SBP des surfaces de la salle commune, de la chambre d’amis, et des rangements, caves et locaux techniques au rez-de-chaussée, faisant passer l’indice de densité de 30% à 32.90%. Diverses constructions de peu d’importance (ci-après : CDPI), à savoir l’abri à vélos sur le chemin H______, la cabane perchée et le poulailler, étaient abandonnées, tandis que la surface d’autres CDPI était réduite.

f. Toutes les instances consultées ont émis des préavis favorables :

-          le 18 juin 2021, la direction des autorisations de construire (ci-après : DAC), avec dérogations (art. 59 al. 4 LCI et art. 70 LCI pour la distance entre bâtiments) et sous conditions ; un engagement devait prévoir que la parcelle n° 10'908 cédait 500 m2 (150 m2 de SBP) à la parcelle n° 10'909 ;

-          le 22 juin 2021, la commission d’architecture (ci-après : CA), avec dérogations selon les art. 59 al. 4 et 70 LCI (32.90% THPE) ; la DAC devait changer le taux des SBP dans le libellé ;

-          le 1er juillet 2021, l’office de l’urbanisme (SPI), sans observation ;

-          le 1er juillet 2021, l’office cantonal des transports (OCT), sous conditions en lien avec les places de stationnement ;

-          le 5 juillet 2021, la police du feu, sous conditions et avec dérogation au ch. 7.3 let. b de la directive n° 7 du règlement d’application de la loi sur la prévention des sinistres, l’organisation et l’intervention des sapeurs-pompiers du 25 juillet 1990 (RPSSP - F 4 05.01 ; ci-après : directive n° 7) concernant les voies d’accès des engins des services d’incendie et de secours (ci-après : SIS) soumises à l’autorisation de construire, en raison de la configuration des appartements (accès de plain-pied), de la distance entre la voirie publique et l’entrée d’appartement la plus éloignée et des aménagements extérieurs permettant l’accès aux façades par une échelle portable ;

-          le 15 juillet 2021, la commune.

g. Par décision du 23 août 2021, le département a délivré l’autorisation de construire DD 2______, indiquant notamment : « construction de cinq bâtiments pour un total de 14 logements (30% THPE) – sondes géothermiques – abattage d’arbres – panneaux solaires en toiture. Dérogations accordées : art. 70 LCI - art. 59 al. 4 LCI ». Les conditions figurant notamment dans le préavis de la police du feu du 5 juillet 2021 devaient être respectées et faisaient partie intégrante de l’autorisation.

B. a. Par acte du 12 février 2021, A______ et B______ ont interjeté recours contre cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI).

Le préavis du 22 juin 2021 de la CA aurait dû contenir une motivation explicite des circonstances ayant mené à l’octroi des dérogations accordées et être voté en plénière.

Presque aucun des services et offices spécialisés ni la commune n’avaient rendu de préavis favorable sur la base d’une surface de construction de 33%. Le libellé de l’autorisation était trompeur (« 5 villas pour 14 logements »), de même que la mention « 30% THPE » dans l’autorisation, laissant croire que le projet était non dérogatoire. Le THPE n’était nullement établi. Les mécanismes d’ombrage des bâtiments avaient été supprimés des calculs des CDPI et on ignorait s’ils seraient ou non maintenus. Le gabarit de l’immeuble dépassait celui autorisé en zone 5 et aucune dérogation prévue à l’art. 11 LCI ne pouvait trouver application.

La police du feu avait mis le projet au bénéfice de la dérogation prévue au ch. 7.3 let. a RPSSP sans la moindre motivation ni base légale. Son préavis dérogeant « à l’entièreté du chiffre 7 let. b RPSSP », l’un de ses inspecteurs devrait expliquer, sur place, comment les pompiers, munis de simples échelles, pourraient intervenir efficacement en cas de sinistre sur les deux immeubles au nord de la parcelle.

La fiche A03 du plan directeur cantonal 2030 (ci-après : PDCn 2030) prévoyait expressément qu’aucune dérogation à l’art. 59 al. 4 LCI n’était autorisée dans le périmètre en cause. Le préavis de la CA semblait ignorer les caractéristiques particulières du coteau de G______ retranscrites dans le plan directeur communal (ci-après : PDCom).

L’art. 3 al. 3 du règlement d’application de la loi sur les constructions et les installations diverses du 27 février 1978 (RCI - L 5 05.01) était violé. Conformément à la directive 024-v7 sur les CDPI (ci-après : directive CDPI), seule la surface des parcelles en cause (4'937 m2) devait être prise en considération, à l’exclusion d’un report de droit à bâtir résultant d’une autre parcelle. Le plan « rapport des surfaces et volumes - CDPI » du 14 juin 2021, qui retenait une surface totale de CDPI de 99.80 m2, omettait à tort de prendre en compte les avant-toits, les terrasses en bois, le bassin d’oiseau en béton, le poulailler, l’abri vélos, le couvert déchetterie, le banc public et la cabane perchée, d’où un large dépassement du maximum de 100 m2.

Le nombre de places de stationnement était en deçà du minimum légal, ce qui générerait du stationnement sauvage et aucune place de stationnement pour personnes à mobilité réduite (PMR) n’était prévue.

b. Le département et la CODHA ont conclu au rejet du recours en discutant tous les griefs de A______ et B______.

c. Après un nouvel échange d’écritures, le TAPI a procédé à un transport sur place le 1er septembre 2022.

d. Après que les parties ont pu se déterminer une nouvelle fois, le TAPI a, par jugement du 17 novembre 2022, rejeté le recours. S’agissant des points qui sont encore litigieux au stade du recours, il a relevé que A______ et B______ avaient un intérêt pratique à se plaindre d’une éventuelle violation relative à la surface totale des CDPI.

La demande tendant à la comparution d’un inspecteur de la police du feu, en soi non obligatoire, était – de manière motivée – rejetée. Le préavis de la police du feu du 5 juillet 2021 exposait de manière précise les raisons l’ayant conduite à se dire favorable au projet.

Le département avait comptabilisé comme CDPI l’abri à vélos au nord de la parcelle (10 m2), le couvert déchetterie (10 m2), des terrasses couvertes des bâtiments A, B, D et E (9.50 m2, 7.50 m2, 16.50 m2 et 7.80 m2) ainsi qu’une surface en sous-sol de 38.50 m2 pour le bâtiment B, soit un total de 99.80 m2.

À juste titre, il n’avait pas pris en compte les surfaces de l’abri à vélos sur le chemin H______, de la cabane perchée ainsi que du poulailler et de son enclos fermé, installations retirées de la troisième version du projet, comme confirmé par la CODHA lors et suite au transport sur place. Les nichoirs pour oiseaux, amovibles et d’une dimension largement inférieure à 5 m2, n’avaient pas à être pris en compte dans le calcul des CDPI, ni les terrasses en bois non couvertes du rez-de-chaussée, le bassin d’oiseau en béton et le banc public. Il s’agissait d’aménagements extérieurs au sol, non couverts et sans émergence pour les premiers et de mobilier urbain pour le troisième. Les avant-toits qui s’avançaient au-delà de la façade ne dépassaient pas, à teneur des coupes A-A et B-B, l’implantation du rez-de-chaussée de plus de 1.50 m. C’était par conséquent à juste titre qu’ils n’avaient pas été pris comme CDPI, étant donné qu’une profondeur de 1.50 m devait être déduite des avant-toits « casquette », conformément à la figure n° 4 – et non n° 2 – de la page 4 de la directive CDPI. Au surplus, ainsi que noté par le département lors du transport sur place, ce que confirmaient d’ailleurs les plans au dossier, le fait que le premier étage soit en retrait par rapport au rez-de-chaussée n’entrait pas en ligne de compte, la surface au rez-de-chaussée comptant déjà dans les SBP.

Le transport sur place avait permis de constater que si diverses constructions ou installations étaient effectivement érigées sur la parcelle n° 10'908, elles n’y occupaient qu’une surface d’environ 30 m2 (à savoir 2 m2, 6 m2, 4.90 m2 et 8 m2 pour les couverts, 5 m2 pour le pavillon/rotonde, 3.60 m2 pour les deux constructions en bois servant de compost, moins de 1 m2 pour l’hôtel à insectes), de sorte que même en les prenant en compte, la parcelle n° 10'908 disposerait encore de suffisamment de surface libre de toute construction pour céder ces droits à bâtir.

La police du feu avait demandé des pièces complémentaires le 11 mars 2021 avant de préaviser favorablement le projet le 5 juillet 2021, sous conditions et avec l’octroi – dûment motivé – d’une dérogation. L’absence de position sur les questions d’accès à la parcelle ne signifiait pas pour autant qu’elle n’avait pas procédé à un examen circonstancié et rigoureux de la situation. À teneur des plans d’ensemble et de stationnement ainsi que de la directive n° 7, un véhicule de pompier pourrait, en cas d’incendie, se stationner à l’entrée de la parcelle, sur le chemin H______, où ce dernier était plus large que la distance de 3.20 m mesurée juste après la parcelle de A______ et B______, quitte à bloquer le transit lors de son intervention, puis déployer sa conduite sur un maximum de 80 m depuis cet endroit pour accéder aux bâtiments projetés. En outre, le chemin menant au bâtiment le plus éloigné de l’entrée était suffisamment large pour permettre aux sapeurs-pompiers de circuler, avec leur matériel léger (une échelle portable en cas de besoin), sans entrave. Il n’était donc pas nécessaire d’exiger une place de travail devant chacun des bâtiments.

L’arrêt du Tribunal fédéral 1C_341/2020 du 18 février 2022 n’était d’aucune utilité dans le présent cas, puisqu’une voie d’accès existait déjà, laquelle permettait d’ailleurs aux services de secours d’accéder à la parcelle de A______ et B______. L’allégation d’une absence du formulaire sécurité n’était pas suffisamment étayée. L’argument d’un risque de propagation d’incendie était infondé. Aucune construction ne pouvant être érigée à moins de 5 m de la limite parcellaire en vertu de l’art. 69 al. 2 LCI, le bâtiment de A______ et B______ serait en tout cas éloigné de 10 m de celui, le plus proche, projeté, ce qui correspondait à la distance de sécurité incendie minimale (recte) préconisée par les normes de protection incendie de l'Association des établissements cantonaux d'assurance incendie (AEAI).

C. a. A______ et B______ ont formé recours contre ce jugement par acte expédié le 9 janvier 2023 à la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : chambre administrative). Ils ont conclu à l’annulation dudit jugement, de même qu’à celle de l’autorisation de construire DD 2______, subsidiairement au renvoi de la cause au TAPI pour nouveau jugement dans le sens des considérants.

Le TAPI avait procédé à un calcul erroné des CDPI et considéré à tort que le projet litigieux offrait des garanties suffisantes de sécurité.

Il avait fait siens les calculs des intimés détaillés dans la troisième version du document « Rapport des surfaces et volumes », en omettant d’inclure certains surplombs d’étage et certaines parties couvertes extérieures des bâtiments A, B et D dotés de murs ou de pilotis. En incluant les CDPI du 1er étage des bâtiments A à E, soit 130 m2 selon le détail donné, pourtant comptabilisées dans la seconde version du projet, leur total s’élevait à 230 m2. C’était à tort aussi que les importants avant-toits, de 520 m2, ou du moins la surface couverte par ces avant-toits, en particulier lorsqu’ils dépassaient l’emprise au sol des bâtiments, n’avaient pas été comptabilisés comme CDPI. Si l’abri à vélos situé à proximité du bâtiment E avait certes été supprimé du calcul des CDPI, il ne l’avait pas été des plans visés ne varietur, contraignants pour les requérants, de sorte qu’il pourrait être réalisé sans que le département puisse se prévaloir d’une infraction à la LCI.

Le calcul du TAPI devait être revu et « pourrait aboutir » à une violation de l’art. 3 al. 3 RCI. Les pièces du dossier ne leur permettaient pas de compléter directement le calcul des CDPI, de sorte que la chambre administrative devait clarifier ce point ou renvoyer la cause au TAPI pour complément d’instruction.

Les normes de sécurité incendie étaient inviolables et devaient être respectées en vertu du droit intercantonal. Le Tribunal fédéral retenait que les accès SIS devaient être garantis, tant sur le plan juridique que factuel, au moment de la délivrance du permis de construire. En l’espèce, aucun plan précis ne permettait de s’assurer du respect des voies d’accès, dans la mesure notamment où le « formulaire sécurité – incendie 001 » ne donnait aucune information précise sur la forme d’accès prévue à « l’entrée de la parcelle », ni sur la résistance des chaussées. Or, le chemin H______ était étroit et ne permettait pas la création d’une place de travail ; les vérins seraient dans l’herbe. Les services du feu ne pourraient pas « déborder » en créant une telle place à l’entrée de la parcelle, dans la mesure où des places de stationnement étaient prévues des deux côtés du seul accès aux immeubles prévu. Même à supposer que ces places ne seraient pas utilisées, le revêtement gravier concassé ne permettait pas de faire office d’emplacement résistant suffisant répondant aux réquisits légaux. La seule voie d’accès traversant la parcelle, de même que les revêtements aux abords de celle-ci (gravier, pleine terre, prairies sèches, potager, dalles en béton coulé) ne permettaient techniquement pas l’élaboration d’une place de travail, même à 80 m du chemin H______, comme suggéré par le TAPI. Ils peinaient à comprendre comment la taille de la parcelle, les accès plain-pied des appartements ou la distance, de plusieurs dizaines de mètres, entre la voie publique et l’appartement le plus éloigné, apporteraient une prérogative particulière en matière de sécurité. En cas d’incendie, une personne qui se trouverait à l’autre bout de la parcelle serait contrainte d’attendre de longues minutes avant d’être secourue par les pompiers qui, ne pouvant stationner leur véhicule ni à l’entrée de la parcelle, ni à l’intérieur, ne pourraient accéder au sinistre qu’à pied, avec leurs outils de travail. Ainsi, l’espace envisagé par la police du feu comme voie d’accès et future place de travail n’atteignait pas les prescriptions requises de résistance, de forme et de distance aux façades des bâtiments concernés, mettant ainsi en péril la sécurité des futurs habitants. La parcelle n’était donc pas correctement équipée pour accueillir le projet et la police du feu n’avait pas été valablement consultée, puisqu’elle ne s’était pas prononcée sur le respect des art. 7.3, 7.5, 7.6 et 7.9 de la directive n° 7 ni n’avait examiné si ces aspects devaient faire l’objet d’une dérogation.

b. La CODHA a conclu, le 10 février 2023, au rejet du recours.

C’était par erreur qu’une précédente version du document B03, du 20 octobre 2020, avait pris en compte au titre de CDPI des surfaces du 1er étage des bâtiments A à E, correspondant aux loggias. Ces loggias, creusées dans le volume du bâtiment et constituant des surfaces triangulaires intégrées dans la façade, se superposaient aux surfaces du rez-de-chaussée déjà comptabilisées dans les SBP. Elles ne correspondaient à aucun schéma de la directive CDPI. Les bâtiments A à E ne comportaient aucune terrasse couverte au rez-de-chaussée, ni surplomb d’étage avec structure de type pilotis, poteau ou mur. Les terrasses se trouvaient sur le pourtour « du bâtiment », et n’avaient pas d’autre couvert que les avant-toits de 1.50 m, qui n’étaient pas soutenus par des pilotis. Ces avant-toits, ne dépassant pas l’implantation du rez-de-chaussée de plus de 1.50 m, ne devaient pas être pris en compte, puisque la surface du rez-de-chaussée qu’ils surplombaient comptait déjà dans les SBP. L’abri à vélos au sud de la parcelle avait été supprimé et remplacé par des places extérieures, ce qui ressortait notamment et très clairement du plan d’ensemble – aménagement extérieur.

Les coupes, plans et maquettes versés au dossier démontraient à l’envi que le calcul des CDPI effectué par l’architecte dans la troisième et dernière version du calcul détaillé des rapports des surfaces correspondait à la directive CDPI.

L’indice de densité du projet, de 33%, était nettement inférieur au maximum admis par l’art. 59 al. 4 let. a LCI. Le projet aurait donc pu contenir des SBP supplémentaires, comme des loggias qui auraient pu être fermées. Toutefois, dans un souci de qualité architecturale et paysagère, notamment eu égard aux voisins, mais au détriment de ses intérêts économiques, ces surfaces avaient été laissées ouvertes.

La directive n° 7 n’avait pas été violée pour les raisons – largement – développées.

c. Le département a conclu, le 17 février 2023, au rejet du recours.

Les recourants n’avaient nullement démontré, dans leur recours, que le grief formulé quant à l’art. 3 RCI influencerait leur situation de fait ou de droit. Contrairement à l’abri à vélos se situant au nord de la parcelle, les places de stationnement pour vélos situées au sud, à côté du local poubelles, ne comportaient pas d’abri. Il ne s’agissait donc pas d’une CDPI. De plus, ces places ne causaient aucune gêne au voisinage. Tel était également le cas de la « bonne quinzaine de m2 (surplombs d’étage et parties couvertes) » devant être selon eux ajoutée aux surfaces des CDPI, ne représentant de plus que 0,34% de la parcelle de 4'324 m2. Ce grief devait être déclaré irrecevable.

La DAC avait procédé à l’examen et à la vérification des surfaces relatives aux CDPI pour chaque version du projet. Elle avait sollicité, le 23 février 2021, des pièces complémentaires et une modification du projet. Elle avait spécifié que les CDPI étaient limitées à 100 m² pour une parcelle. Le calcul détaillé du rapport des surfaces enregistré le 19 février 2021 aboutissait à une surface de 126 m² de CDPI. Dans la troisième version du projet, il s’agissait de 99.8 m2. Comme justement retenu par le TAPI, les avant-toits ne devaient pas être pris en compte à ce titre, point que la DAC n’avait pas apprécié différemment entre la deuxième et la troisième version du projet. Pour le surplus, la CA avait, à trois reprises, émis un préavis favorable, ayant immédiatement reconnu les qualités du projet. Il rappelait à ce titre que le but de la disposition relative aux CDPI était d’éviter une dispersion et une multiplication de surfaces, but manifestement atteint par le projet querellé qui s’implantait sur une parcelle étendue et présentait une morphologie qualitative découlant de la forme « papillon » des cinq bâtiments dotés en tout de quatorze appartements.

Il reproduisait un extrait du plan du rez-de-chaussée visé ne varietur le 23 août 2021 dont il découlait que l’emplacement de travail pompiers était clairement indiqué. Afin d’émettre son préavis, la police du feu avait disposé non seulement du dossier complet de plans, dont celui du rez-de-chaussée, mais également des documents joints, à savoir la note explicative de protection incendie de I______, enregistrée le 10 juin 2020, les plans de protection incendie, enregistrés les 10 juin 2020 et 17 juin 2021, et le formulaire 001 (questionnaire sécurité incendie). Elle pouvait de plus consulter d’autres outils d’information, dont le système d’information du territoire à Genève (SITG). Les recourants tentaient de substituer leur propre appréciation à celle effectuée par cette instance spécialisée en la matière.

d. Dans leur réplique, A______ et B______ ont relevé que le TAPI leur avait reconnu la qualité pour se prévaloir de la violation de l’art. 3 al. 3 RCI. Ils détaillaient les surfaces à prendre en compte au titre de CDPI pour les bâtiments, à savoir 3.3 m² pour le bâtiment A (2ème entrée couverte au rez), 4.5 m² et 16 m² pour le bâtiment B (2ème entrée couverte au rez et l’avant-toit soutenu par des pilotis), et 5.4 m² pour le bâtiment C (2ème entrée couverte au rez), ce qui portait le total des CDPI à 129 m2.

Ils sont ensuite longuement revenus sur la problématique de la police du feu.

e. Dans une duplique spontanée, la CODHA a relevé que les petits surplombs triangulaires que les recourants voulaient voir inclus dans le calcul des CDPI étaient fermés sur deux côtés seulement et ne comportaient pas de pilotis. Ils ne correspondaient à aucun schéma de la directive CDPI.

f. Les époux A______ et B______ se sont sur ce encore déterminés le 10 mai 2023, faisant valoir que la fermeture sur deux côtés seulement des surplombs d’étages en triangle ne changeait rien au fait qu’ils doivent être traités de la même manière que les entrées couvertes rectangulaires fermées sur trois côtés. Dans les deux cas, seul un côté demeurait ouvert. Les autres pans de ces surfaces étaient ouverts en prolongement du toit. Peu importait donc que ces surfaces soient triangulaires et non rectangulaires, puisqu’elles étaient intégralement couvertes et que le couvert en question était dans les deux cas soutenu intégralement par des murs porteurs. Ces surfaces devaient être appréhendées comme les autres surplombs d’étage fermés, comme CDPI. Si la CODHA n’avait pas considéré ces éléments comme étant exactement de même nature, elle les aurait clairement identifiés différemment dans son projet en les distinguant spécifiquement des « autres » entrées couvertes.

g. À la demande de la juge déléguée, le département s’est prononcé le 7 juin 2023 sur les « trois triangles allégués par les recourants». Les triangles des bâtiments A et B mesureraient approximativement 2.4 m2 et celui du bâtiment C, d’« une profondeur maximale d’environ 1 m et une largeur maximale d’environ 11.7 m, ce qui donne une surface d’approximativement 5.85 m2 ». Vu les faibles dimensions/profondeurs de ces éléments, ils ne pouvaient servir à un usage en tant que couvert, mais visaient plutôt à assurer une « certaine esthétique » au projet. La faible profondeur découlait de l’angle très ouvert du triangle, raison pour laquelle il ne s’apparentait pas à un couvert ordinaire, en forme de quadrilatère. Ces éléments n’étaient pas couverts par la directive CDPI. Afin de pouvoir assurer la qualité architecturale, saluée par la CA et la commune, il était parfois opportun de se libérer des seules formules mathématiques, de prendre du recul et de constater que la dizaine de m2 de surface des trois triangles n’avait aucune influence sur l’étendue et l’impact du projet. La prise en compte de ces trois toitures triangulaires n’aboutirait qu’à un total légèrement en-dessus de la marge d’erreur de l’ordre de 3 % admise par le Tribunal fédéral. Il y avait dans le cas d’espèce lieu de procéder à une interprétation raisonnée et raisonnable de l’art. 3 al. 3 RCI. Le grief était irrecevable, en l’absence d’atteinte causée aux recourants.

Subsidiairement, en application du principe de proportionnalité, il s’agirait uniquement de réformer la décision litigieuse en indiquant, comme condition supplémentaire, que le maximum de 100 m2 devait être respecté, sachant qu’une modification de l’emplacement des poteaux de l’abri à vélos au nord de la parcelle et du couvert à déchetterie permettrait d’en réduire la dimension à prendre en considération. Il pourrait s’agir de prévoir des couverts à deux poteaux, tels que figurant dans la directive CDPI.

Plus subsidiairement, une déduction de 1.5 m (soit de 0.5 m vu la déduction de 1 m pour l’avant-toit du pourtour du bâtiment) devait être effectuée en cas de toitures triangulaires à angle ouvert. Les surfaces seraient ainsi réduites à un total de 2.5 m² (2 x 0.875 m2 (0.7 m x 2.5 m)/2) et (1 x 1.625 m2 (0.5 m x 6.5 m/2)), ce qui démontrait leur très faible importance (bagatelle). Par ailleurs, l’adjonction de 2.5 m² au total des CDPI de 99.8 m2 respecteraient alors la limite de 103 m² en incluant la marge d’erreur jurisprudentielle. Plus subsidiairement, vu les spécificités des toitures triangulaires, leur très faibles dimensionnement et nombre, elles pouvaient ne pas être prises en considération en l’application de l’art. 59 al. 3 LCI.

h. Seule la CODHA s’est manifestée dans le délai imparti au 19 juin 2023 pour déposer d’éventuelles ultimes déterminations après avoir eu connaissance de la position du département du 7 juin 2023.

i. Les parties ont été informées, le 26 juin 2023, que la cause était gardée à juger.

j. Il sera pour le surplus revenu sur la teneur des pièces figurant à la procédure et leurs divers arguments ci-dessous dans la mesure nécessaire au traitement du litige.

 

EN DROIT

1. 1.1 Le recours a été interjeté en temps utile devant la juridiction compétente (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

Le département conteste la qualité pour recourir des voisins de la parcelle litigieuse en lien avec leur grief relatif à la violation de l’art. 3 RCI.

1.2 Il ressort toutefois du dispositif du jugement litigieux que le TAPI a déclaré recevable le recours et, dans ses considérants, a retenu que les recourants avaient un intérêt pratique à se plaindre d’une éventuelle violation relative à la surface totale des CDPI. Leur recours est recevable. Autre est la question de la recevabilité de ce grief qui souffrira de demeurer indécise vu ce qui suit.

2.             Le recours porte sur l’autorisation de construire DD 2______ délivrée par le département le 23 août 2021 et confirmée par le TAPI dans son jugement du 17 novembre 2022.

Le projet litigieux, soit sa troisième version, approuvée par toutes les instances ayant émis des préavis, dont la commune, la CA, la DAC et la police du feu, vise la construction, sur les parcelles nos 10'909 et 10'910 de la commune de G______, situées en zone 5, de cinq bâtiments comportant quatorze logements THPE d’un indice de densité de 32.90%, avec dérogations selon les art. 70 et 59 al. 4 LCI. Il implique la cession de 500 m2 (soit 150 m2 de SBP), selon restriction devant être inscrite au registre foncier.

2.1 Le recours peut être formé pour violation du droit y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation (art. 61 al. 1 let. a LPA) ainsi que pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (art. 61 al. 1 let. b LPA). Les juridictions administratives n'ont pas compétence pour apprécier l'opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l'espèce.

2.2 Selon une jurisprudence bien établie, la chambre de céans observe une certaine retenue pour éviter de substituer sa propre appréciation à celle des commissions de préavis pour autant que l’autorité inférieure suive l’avis de celles-ci. Les autorités de recours se limitent à examiner si le département ne s’écarte pas sans motif prépondérant et dûment établi du préavis de l’autorité technique consultative, composée de spécialistes capables d’émettre un jugement dépourvu de subjectivisme et de considérations étrangères aux buts de protection fixés par la loi (ATA/1098/2019 du 25 juin 2019 consid. 2e).

3.             Les recourants contestent le calcul des CDPI, considérant en dernier lieu que leur surface globale excèderait d’environ 29 m2 le maximum de 100 m2 prévu à l’art. 3 al. 3 RCI.

3.1 Selon l’art. 59 LCI, en cinquième zone, la surface de la construction, exprimée en m2 de plancher, ne doit pas excéder 25 % de la surface de la parcelle. Cette surface peut être portée à 27,5% lorsque la construction est conforme à un standard de HPE, respectivement à 30% lorsque la construction est conforme à un standard de THPE, reconnue comme telle par le service compétent (al.1). Par surface de plancher prise en considération dans le calcul du rapport des surfaces, il faut entendre la SBP de la totalité de la construction hors sol (al. 2). Lorsque les circonstances le justifient et que cette mesure est compatible avec le caractère, l’harmonie et l’aménagement du quartier, le département peut renoncer à prendre en considération dans le calcul du rapport des surfaces, la surface de plancher : a) des combles dont la hauteur est inférieure à 1,8 m ; b) des combles de peu d’importance, indépendamment du vide d’étages ; c) des garages de dimensions modestes, lorsque ceux-ci font partie intégrante du bâtiment principal ; d) des serres, jardins d’hiver ou constructions analogues en matériaux légers et de dimensions modestes (al. 3).

3.2 Le 28 novembre 2020 est entré en vigueur le nouvel al. 3bis de l'art. 59 LCI (adopté le 1er octobre 2020), selon lequel une surface en pleine terre, à savoir dénuée de toute construction en surface ou en sous-sol et non revêtue, de la parcelle ou du groupe de parcelles considérées par la demande d'autorisation de construire doit être préservée. Cette disposition s'applique seulement aux demandes d'autorisation déposées après son entrée en vigueur (art. 156 al. 5 LCI).

Dans le cas présent, il n'y a pas lieu d'appliquer cette disposition, entrée en vigueur postérieurement au dépôt de la demande d'autorisation de construire litigieuse, en juin 2020.

3.3 La surface des constructions, selon l’art. 59 LCI, comprend les constructions annexes faisant corps avec le bâtiment principal, à l’exclusion de celles qui seraient admises comme CDPI (art. 29 RCI).

Les CDPI ne sont pas prises en considération pour le calcul du rapport des surfaces (art. 59 al. 7 LCI).

3.4 Sont réputées CDPI, à la condition qu’elles ne servent ni à l’habitation, ni à l’exercice d’une activité commerciale, industrielle ou artisanale, celles dont la surface n’excède pas 50 m2 et qui s’inscrivent dans un gabarit limité par une ligne verticale dont la hauteur n’excède pas 2.5 m, une ligne oblique faisant avec l’horizontale partant du sommet de la ligne verticale un angle de 30°, une ligne horizontale de faîtage située à 4.5 m du sol au maximum. Dans le cadre d’un projet de construction en ordre contigu ou sous forme d’habitat groupé, et afin d’améliorer l’insertion dans le site et pour autant qu’il n’en résulte pas de gêne pour le voisinage, le département peut autoriser, après consultation de la CA, des CDPI groupées d’une surface de plus de 50 m2 au total. Dans tous les cas, la surface totale des CDPI ne doit pas excéder 8% de la surface de la parcelle et au maximum 100 m2 (art. 3 al. 3 RCI).

3.5 Les CDPI font l’objet d’une directive du département du 3 février 2014, modifiée d’abord le 10 mars 2017 sous le numéro 024-v5, puis le 9 mars 2021 sous le numéro 024-v7. Cette dernière version comporte quelques ajouts issus de la jurisprudence (ATA/805/2020 du 25 août 2020 ; ATA/1300/2019 du 27 août 2019 consid. 4e et les arrêts cités : pour le calcul relatif aux balcons/terrasses), mais ne change pas le contenu de la version antérieure, en particulier s’agissant de la prise en compte des avant-toits et des éléments en saillie du bâtiment principal.

3.6 La chambre de céans se fonde, de jurisprudence constante, sur la directive CDPI pour déterminer les surfaces à prendre en compte à ce titre, sous la réserve suivante (ATA/93/2021 du 26 janvier 2021 consid. 9d et 10 ; ATA/1104/2020 du 3 novembre 2020 consid. 3d et 4). D'après la jurisprudence, afin d'assurer l'application uniforme de certaines dispositions légales, l'administration peut expliciter l'interprétation qu'elle leur donne dans des directives. Celles-ci n'ont pas force de loi et ne lient ni les administrés, ni les tribunaux, ni même l'administration. Elles ne dispensent pas cette dernière de se prononcer à la lumière des circonstances du cas d'espèce (ATF 145 II 2 consid. 4.3). Par ailleurs, elles ne peuvent sortir du cadre fixé par la norme supérieure qu'elles sont censées concrétiser. En d'autres termes, à défaut de lacune, elles ne peuvent prévoir autre chose que ce qui découle de la législation ou de la jurisprudence (ATF 141 II 338 consid. 6.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_522/2012 du 28 décembre 2012 consid. 2.3 ; ATA/639/2020 du 30 juin 2020 consid. 8d ; ATA/829/2019 du 25 avril 2019 consid. 6a).

3.7 La directive 024-v7 précise que le respect du 8% est impératif.

3.8 Il ressort des travaux préparatoires que l’habitabilité constitue l’élément décisif pour juger qu’une construction est de peu d’importance au sens de l’art. 3 al. 3 RCI (MGC 1983 p. 437 ss).

Dans le cadre de l’application de l’art. 3 al. 3 RCI, la chambre de céans a déjà été amenée à préciser que les surfaces déterminantes étaient celles de l’emprise au sol d’une construction (ATA/93/2021 du 26 janvier 2021 ; ATA/168/2020 du 11 février 2020 ; ATA/1300/2019 du 27 août 2019 ; ATA/1345/2015 du 15 décembre 2015 confirmé par l’arrêt du Tribunal fédéral 1C_55/2016 du 3 mars 2016).

En conséquence, lors du calcul du rapport des surfaces, en 5ème zone, certaines surfaces : - sont exclues du calcul, à savoir les CDPI (art. 59 al. 7 LCI), celles-ci étant toutefois soumises aux conditions particulières de l’art. 3 al. 3 RCI et autorisées pour autant qu’elles soient compatibles avec les normes de la zone de construction dans laquelle elles sont projetées (directive n° 024-v7) ; ainsi, certains garages, ateliers non professionnels, couverts à voitures, couverts à plaisance, cabanes de jardins, pool-house ou vérandas ont été reconnus comme CDPI (MGC 1992 p. 4'657 ; ATA/1345/2015 précité ; ATA/592/2014 du 29 juillet 2014 ; ATA/726/2012 du 30 octobre 2012) ; - peuvent être exclues du calcul du rapport de surfaces, à savoir certaines constructions, décrites à l’art. 59 al. 3 LCI, à certaines conditions (directive rapport des surfaces en zone 5 n° 021-v7 du 1er mars 2013) ; ainsi, certains combles, garages ou vérandas (de moins de 20 m2) ont été exclus du calcul du rapport de surfaces (ATA/1064/2018 du 9 octobre 2018 ; ATA/475/2011 du 26 juillet 2011 et les références citées).

La chambre administrative a déjà jugé que les surfaces des balcons/terrasses du premier étage – et du deuxième étage –, qui sont superposés à ceux du rez-de-chaussée, n'ont pas à être prises en compte dans la surface totale des CDPI puisque leur emprise au sol recouvre celle des terrasses du rez-de-chaussée. Elle a en revanche pris en compte la surface des terrasses du rez-de-chaussée, dans la surface à prendre en compte à titre de CDPI (ATA/1304/2018 du 4 décembre 2018 consid. 9g ; ATA/1064/2018 du 9 octobre 2018 consid. 8).

La chambre administrative a retenu que même si les balcons/terrasses ne figurent pas dans la liste des exemples de CDPI mentionnés à la première page de la directive CDPI, cette dernière contient, à la page 4, un chapitre intitulé « Prise en compte des éléments en saillies du bâtiment principal ». Vu l'intégration de ce chapitre dans la directive CDPI, les éléments en saillie qui y sont mentionnés tels que les balcons/terrasses doivent être considérés comme des CDPI dont la surface est prise en compte, entièrement ou partiellement suivant les cas de figure (avec ou sans poteau/mur de soutien), à titre de CDPI, les exemples de CDPI mentionnés à la première page de ladite directive l'étant à titre exemplatif et non exhaustif (ATA/1300/2019 du 27 août 2019). La directive CDPI a d’ailleurs été complétée le 9 mars 2021 par un exemple de calcul de CDPI de type balcon/terrasse dans un angle de deux façades.

3.9 Doivent encore être distinguées les constructions de très peu d’importance, tels que jardins d’hiver, pergolas, prévues par l’art. 1 al. 4 et 5 LCI, lesquelles ne sont pas soumises à autorisations de construire.

3.10 En l’espèce, au stade du recours devant la chambre de céans, les recourants ont d’abord soutenu que le total des CDPI s’élevait à 230 m2, puisque devraient être inclus à ce titre, selon la deuxième version du projet, qui n’est donc pas celle qui a fait l’objet de l’autorisation litigieuse, 130 m2 du 1er étage des bâtiments A à E. Au stade de la réplique, ils semblent admettre que c’est suite à une erreur qu’une précédente version du document B03, du 20 octobre 2020, avait pris en compte au titre de CDPI ces surfaces du 1er étage des bâtiments A à E, correspondant aux loggias. Il n’y sera donc pas revenu plus avant.

Les recourants ont aussi initialement soutenu que c’était à tort que les avant-toits, de 520 m2, ou du moins la surface couverte par ces importants avant-toits, en particulier lorsqu’ils dépassaient l’emprise au sol des bâtiments, n’avaient pas été comptabilisés comme CDPI. Ils ne semblent plus remettre en cause, au stade de la réplique, le raisonnement détaillé du TAPI sur ce point, à savoir que lesdits avant-toits ne dépasseraient pas depuis la façade, à teneur des coupes A-A et B-B, l’implantation du rez-de-chaussée de plus de 1.50 m, une telle profondeur (de 1.50 m) devant être déduite des avant-toits « casquette », conformément à la figure n° 4 de la page 4 de la directive CDPI. De plus, le fait que le premier étage soit en retrait par rapport aux rez-de-chaussée n’entre pas en ligne de compte, la surface au rez-de-chaussée comptant déjà dans les SBP. Rien ne permet de remettre en cause ce raisonnement.

Les recourants ont aussi initialement soutenu devant la chambre de céans que l’abri à vélos situé à proximité du bâtiment E devait entrer dans le calcul des CDPI. Tant le département que la CODHA ont relevé que cet abri à vélos n’existerait pas et serait remplacé par des places de stationnement pour vélos. Les recourants concèdent que cet abri a été supprimé du calcul des CDPI, mais faisaient valoir qu’il pourrait être réalisé tel que dessiné sur les plans visés ne varietur, sans que le département puisse se prévaloir d’une infraction à la LCI. Au stade de leur réplique, ils ne remettent pas en cause et ne comprennent plus dans l’excédent de CDPI admissibles ledit abri à vélos, à juste titre. Ce ne sont en effet que suppositions et procès d’intention qu’ils font à la CODHA que de supposer qu’elle construise ledit abri alors qu’il n’est plus question que tel soit le cas selon l’autorisation délivrée.

Reste en définitive litigieuse, au stade de la réplique des recourants, une surface d’environ 29 m2 devant, selon ces derniers, être prise en compte au titre de CDPI à savoir 3.3 m² pour le bâtiment A, correspondant à la 2ème entrée couverte au rez, 4.5 m² et 16 m² pour le bâtiment B, correspondant à la 2ème entrée couverte au rez et l’avant-toit soutenu par des pilotis, et 5.4 m² pour le bâtiment C, correspondant à la 2ème entrée couverte au rez, ce qui porterait le total des CDPI à 129 m2.

Sans être contredite, l’intimée a expliqué dans sa duplique que les petites surfaces triangulaires en question, contrairement aux autres surplombs d’étages fermés sur trois côtés et ayant été dûment comptabilisés à titre de CDPI, ne sont fermées que sur deux côtés et ne comportent pas de pilotis. Aussi, elles ne correspondraient selon elle à aucun schéma de la directive CDPI. Tel est également l’avis du département qui, dans ses dernières écritures portant spécifiquement sur les trois triangles en question, a indiqué que vu leurs faibles dimensions/profondeurs, ils ne pouvaient servir à un usage en tant que couvert, mais visaient plutôt à assurer une « certaine esthétique » au projet. Leur angle très ouvert avait pour conséquence qu’ils ne s’apparentaient pas à un couvert ordinaire, en forme de quadrilatère. Ces éléments n’étaient donc pas couverts par la directive CDPI. Quand bien même ils le seraient, une déduction de 1.5 m (soit de 0.5 m vu la déduction de 1 m pour l’avant-toit du pourtour du bâtiment) devait être effectuée en cas de toitures triangulaires à angle ouvert. Les surfaces seraient ainsi réduites à un total de 2.5 m² (2 x 0.875 m2 (0.7 m x 2.5 m)/2) et 1 x 1.625 m2 ((0.5 m x 6.5 m)/2)), ce qui démontrait leur très faible importance (bagatelle). Ainsi, l’adjonction de 2.5 m² au total des CDPI de 99.8 m2 respecterait alors la limite de 103 m² en incluant la marge d’erreur jurisprudentielle. Ce dernier calcul n’a pas été remis en cause par les recourants.

Sur la base du dossier et en particulier du formulaire B03 enregistré le 17 juin 2021 par le département, comportant le calcul détaillé du rapport des surfaces, la DAC, instance spécialisée, a entériné dans son plus récent préavis du 18 juin 2021, la troisième version du projet et retenu un total de CDPI de 99.8 m2. Rien ne permet de mettre en doute le fait que la DAC n’aurait, à l’occasion de l’examen du dossier, pas pris connaissance de l’intégralité des plans fournis à la base de la demande d’autorisation, n’aurait pas analysé avec précision chacune des surfaces et la catégorie dans laquelle elle était censée entrer, en particulier la SBP et les CDPI.

Le département a suivi le préavis favorable de la DAC. Il doit toutefois être tenu compte de sa dernière position, à savoir, si ces triangles devaient être considérés comme des CDPI comme soutenu par les recourants, ce qui est donc douteux, que la surface totale des CDPI n’excéderait que de 3% le maximum de 100 m2 de CDPI prévu à l’art. 3 al. 3 RCI, soit un dépassement admissible au vu de la jurisprudence en la matière (arrêt du Tribunal fédéral 1C_159/2020 du 5 octobre 2020 consid. 4.3.2 et les références citées).

Au surplus, même à retenir une surface globale d’environ 2.5 m2 pour les trois triangles en cause et à les exclure du calcul des CDPI, la spécificité desdits triangles permet de ne pas les inclure dans le calcul du rapport de surfaces, à l’instar de certains combles, garages ou vérandas (de moins de 20 m2) (ATA/1064/2018 du 9 octobre 2018 ; ATA/475/2011 du 26 juillet 2011 et les références citées).

Ce grief doit être rejeté.

4.             Les recourants soutiennent que le projet envisagé ne respecterait pas les exigences de sécurité, en particulier d'accès au service du feu.

4.1 Conformément à l'art. 22 al. 2 let. b LAT, l'autorisation de construire n'est délivrée que si le terrain est équipé. Tel est le cas selon l'art. 19 al. 1 LAT lorsqu'il est desservi d'une manière adaptée à l'utilisation prévue par des voies d'accès.

Une voie d'accès est adaptée à l'utilisation prévue lorsqu'elle est suffisante d'un point de vue technique et juridique pour accueillir tout le trafic de la zone qu'elle dessert. La loi n'impose ainsi pas des voies d'accès idéales; il faut et il suffit que, par sa construction et son aménagement, une voie de desserte soit praticable pour le trafic lié à l'utilisation du bien-fonds et n'expose pas ses usagers ni ceux des voies publiques auxquelles elle se raccorderait à des dangers excessifs. Par ailleurs, la sécurité des usagers doit être garantie sur toute sa longueur, la visibilité et les possibilités de croisement doivent être suffisantes et l'accès des services de secours (ambulance, service du feu) et de voirie doit être assuré. Les accès doivent être garantis tant sur le plan juridique que factuel au moment de la délivrance du permis de construire (arrêt du Tribunal fédéral 1C_585/2021 du 27 octobre 2022 et références citées).

4.2 Conformément à l’art. 96 al. 1 RCI, hormis les villas, toute construction au sens de l’art. 1 let. a et c RCI, doit être facilement accessible aux engins du service du feu.

Des emplacements résistants doivent être aménagés, de façon à permettre aux engins de sauvetage du service du feu d’atteindre, par les façades, les zones définies, selon le type d'affectation des bâtiments. Ces éléments sont précisés dans la directive technique n° 7 du RPSSP (art. 96 al. 2 RCI).

Le ch. 7.4 de cette directive intitulé (« voies d’accès ») prévoit, s’agissant de la résistance de celles-ci, que les chaussées et aires d’accès doivent être construites en matériau dur pouvant supporter une charge de 25 t (let. a).

La largeur minimale de la chaussée doit être de 3.50 m en ligne droite. Pour un rayon intérieur de chaussée égal ou supérieur à 7 m, la largeur minimum de la chaussée doit être de 5 m, pour un rayon intérieur égal ou supérieur à 9 m, de 4.50 m et pour un rayon intérieur de chaussée égal ou supérieur à 13 m, de 4 m. La hauteur libre de passage doit être de 4.50 m et un dévers de 5% maximum est possible (let. b).

La pente de la voie d’accès doit être de 15% au maximum (let. c).

4.3 En l’espèce, le plan de rez-de-chaussée visé ne varietur le 23 août 2021 comporte un emplacement pour l’aire de travail des pompiers.

Nul ne soutient que la police du feu n’aurait pas disposé, aux fins d’émettre son préavis, non seulement des plans complets, dont du rez-de-chaussée, mais également des documents joints y relatifs. Le dossier comporte ainsi la note explicative de protection incendie de I______, enregistrée le 10 juin 2020, les plans protection – incendie, enregistrés le 10 juin 2020 et 17 juin 2021, et le formulaire 001 questionnaire sécurité – incendie. La police du feu disposait donc manifestement des informations nécessaires pour examiner la situation, examen au terme duquel elle a considéré que s’agissant de l’accès aux futurs bâtiments pour les sapeurs-pompiers, la dérogation à l’art. 7 de la directive 7 du RSSP était possible.

Quant aux modalités concrètes d’intervention, le département relève que les sapeurs-pompiers n’auraient pas besoin d’un camion échelle nécessitant l’emploi de vérins, mais d’un fourgon pompe, pour lequel la stabilisation du camion au moyen de vérins n’est pas nécessaire. Un tel camion serait tout à fait adapté pour circuler sur le chemin H______ et desservir les bâtiments. La largeur de l’aire de pompiers était d’ailleurs généreusement dimensionnée pour accueillir ce type de camion, d’une largeur d’environ 2.50 m, sans qu’il ne « déborde » sur les places de stationnement. Un fourgon pompe pourrait ainsi être entièrement garé sur du bitume. La largeur du chemin H______ avait ainsi été correctement considérée comme suffisante par la police du feu pour octroyer la dérogation au ch. 7.3 let. b de la directive n° 7. Il n’y avait rien à redire au raisonnement du TAPI qui avait retenu que ledit chemin était plus large que la distance de 3.20 m juste après la parcelle des recourants, quitte à bloquer le transit lors d’une intervention, étant rappelé qu’il s’agissait de situations d’urgence et que les sapeurs-pompiers pourraient circuler avec leur matériel léger, échelle portable en cas de besoin, sans entrave.

Enfin, une voie d’accès existait déjà.

Les recourants ne démontrent aucun élément concret permettant de remettre en cause ce raisonnement du département qui a suivi le préavis favorable de la police du feu.

Vu la teneur fouillée dudit préavis, rappelé ci-dessus, auquel il peut être expressément renvoyé, et les diverses exigences y requises, étant rappelé l’aspect technique des questions en cause, il convient de s'en remettre à l'avis de l'instance spécialisée.

Par ailleurs, la bonne réalisation du projet fera l’objet d'une attestation de conformité, devant notamment certifier que la directive n° 7 du RSSP, et plus globalement que la construction est conforme à l'autorisation de construire, ainsi qu'aux lois et règlements applicables au moment de son entrée en force (art. 7 al. 1 et 2 LCI ; art. 38 al. 2, 3 et 4 RCI).

Rien ne permet en définitive de considérer que l'instance spécialisée aurait rendu son préavis en s'abstenant de vérifier la conformité du projet sur les points mis en exergue par les recourants, notamment aux exigences de la directive n° 7 du RPSSP, de sorte que la chambre de céans ne s'en éloignera pas.

Le grief tiré de la violation de l’art. 96 RCI et de la directive technique n° 7 du RSSP doit ainsi être écarté.

En tous points mal fondé, le recours sera rejeté.

5.             Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 2’000.- sera mis à la charge solidaire des recourants (art. 87 al. 1 LPA). Une indemnité de procédure de CHF 2’000.- sera allouée à la CODHA, qui y a conclu, à la charge solidaire des recourants, étant relevé que C______, D______, E______ et F______ne se sont pas manifestés dans le cadre de la procédure de recours (art. 87 al. 2 LPA).

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 9 janvier 2023 par A______ et B______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 17 novembre 2022 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 2'000.- à la charge solidaire de A______ et B______ ;

alloue une indemnité de procédure de CHF 2'000.- à la COOPÉRATIVE DE L’HABITAT ASSOCIATIF, à la charge solidaire de A______ et B______ ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Paul HANNA, avocat des recourants, à Me Claire BOLSTERLI, avocate de la COOPÉRATIVE DE L’HABITAT ASSOCIATIF, au département du territoire, à Me Jean-Jacques MARTIN, avocat de C______, à D______, E______ et F______ ainsi qu’au Tribunal administratif de première instance.

Siégeant : Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, présidente, Florence KRAUSKOPF, Valérie LAUBER, juges.

 

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. SCHEFFRE

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. PAYOT ZEN-RUFFINEN

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :