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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1440/2023

ATA/606/2023 du 07.06.2023 ( EXPLOI ) , ACCORDE

RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1440/2023-EXPLOI ATA/606/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Décision du 7 juin 2023

sur effet suspensif

 

dans la cause

 

A______

B______ SA recourants
représentés par Me Christophe GAL, avocat

contre

SERVICE DE POLICE DU COMMERCE ET DE LUTTE CONTRE LE TRAVAIL AU NOIR intimé



Vu, en fait, la décision, déclarée exécutoire nonobstant recours, du service de police de commerce et de lutte contre le travail au noir (ci-après : PCTN) du 21 avril 2023 révoquant l’autorisation accordée le 24 novembre 2021 à A______ d’exploiter l’établissement à l’enseigne « La C______ » situé D______, au motif que B______ SA (ci-après : B______) employant A______ n’était plus l’unique propriétaire de l’établissement après avoir conclu un contrat de société avec E______ SA (ci-après : E______), que sa désignation en tant qu’exploitant par le propriétaire de l’entreprise n’était plus valable et faisait défaut et que le changement de propriétaire était avéré et indubitablement corroboré par la requête en changement de propriétaire déposée le 15 mars 2022 et par les nombreux rapports d’intervention de la police, si bien que la condition de l’art. 9 let. f de la loi sur la restauration, le débit de boissons, l’hébergement et le divertissement du 19 mars 2015 (LRDBHD - I 2 22) n’était plus remplie ;

attendu que par acte remis à la poste le 28 avril 2023, B______ et A______ ont recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre cette décision, concluant à son annulation ; que B______ était l’unique propriétaire du fonds de commerce de « La C______ » et que A______ gérait l’établissement en son nom et pour son compte, ce que mentionnait le contrat de société conclu avec E______, qui lui réservait la propriété du fonds de commerce ; qu’E______ était son partenaire opérationnel et lui fournissait du personnel ; qu’un conflit entre B______ et E______ avait provoqué l’invalidation du contrat de société et poussé E______ à se déclarer exploitante le 15 mars 2022 ; que toutefois la coopération avait repris et E______ n’avait jamais eu cette qualité et que les annonces faites au PCTN devaient être considérées comme nulles et non avenues, ce qui avait par la suite été attesté par écrit, notamment les 25 mars, 11 et 29 avril et 29 juillet 2022 ; que A______ était resté l’employé de B______ et continuait de gérer « La C______ », B______ demeurant l’unique propriétaire du fonds de commerce et E______ son cocontractant chargé de fournir du personnel d’exploitation ; que le PCTN avait révoqué l’autorisation neuf mois plus tard, sans demander d’informations ;

que sur mesures provisionnelles urgentes puis sur mesures provisoires, l’effet suspensif devait être restitué au recours ;

que sur mesures provisionnelles urgentes, le juge délégué a restitué l’effet suspensif au recours le 3 mai 2023 ;

que le 15 mai 2023, le PCTN s’est opposé à la restitution de l’effet suspensif ; que le formulaire de changement de propriétaire, accompagné d’une attestation de la société F______ SA autorisant E______ à exploiter elle-même exclusivement l’établissement, et les déclarations de A______ constituaient des indices du changement de propriétaire ; que B______ n’avait pas depuis lors démontré disposer des locaux et qu’une procédure était pendante devant le Tribunal des baux et loyers (ci-après : TBL) ; que le contrat de société entre B______ et E______ portait sur la mise en gérance du fonds de commerce de l’établissement ; que la requête d’E______ était incomplète et que la procédure en cours devant le TBL empêchait de la reconnaître comme propriétaire ;

que par réplique du 2 juin 2023, B______ et A______ ont persisté dans leurs conclusions sur mesures provisoires ; que A______ était présent dans l’établissement lors de cinq interventions de la police ; que E______, dont G______ était l’administrateur, intervenait comme remplaçant de l’exploitant ;

que le 5 juin 2023, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger sur effet suspensif ;

considérant, en droit, l'art. 9 al. 1 du règlement interne de la chambre administrative de la Cour de justice du 26 mai 2020, à teneur duquel les décisions sur effet suspensif sont prises par la présidente de ladite chambre, respectivement par la vice-présidente, ou en cas d'empêchement de ceux-ci, par un juge ;

qu’aux termes de l’art. 66 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10), sauf disposition légale contraire, le recours a effet suspensif à moins que l’autorité qui a pris la décision attaquée n’ait ordonné l’exécution nonobstant recours (al. 1) ; que toutefois, lorsque aucun intérêt public ou privé prépondérant ne s’y oppose, la juridiction de recours peut, sur la demande de la partie dont les intérêts sont gravement menacés, retirer ou restituer l’effet suspensif (al. 3) ;

que, par ailleurs, l'art. 21 al. 1 LPA permet le prononcé de mesures provisionnelles ;

que selon la jurisprudence constante de la chambre administrative, des mesures provisionnelles – au nombre desquelles compte la restitution de l’effet suspensif – ne sont légitimes que si elles s’avèrent indispensables au maintien d’un état de fait ou à la sauvegarde d’intérêts compromis (ATF 119 V 503 consid. 3 ; ATA/503/2018 du 23 mai 2018 ; ATA/955/2016 du 9 novembre 2016 consid. 4 ; ATA/1244/2015 du 17 novembre 2015 consid. 2) ; qu’elles ne sauraient, en principe, anticiper le jugement définitif (Isabelle HÄNER, Vorsorgliche Massnahmen in Verwaltungsverfahren und Verwaltungsprozess, RDS 1997 II 253-420, spéc. 265) ;

que, par ailleurs, l’octroi de mesures provisionnelles présuppose l’urgence, à savoir que le refus de les ordonner crée pour l’intéressé la menace d’un dommage difficile à réparer (ATF 130 II 149 consid. 2.2 ; 127 II 132 consid. 3 = RDAF 2002 I 405 ; ATA/941/2018 du 18 septembre 2018) ;

que la restitution de l’effet suspensif est subordonnée à l’existence de justes motifs, qui résident dans un intérêt public ou privé prépondérant à l’absence d’exécution immédiate de la décision (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1161/2013 du 27 février 2014 consid. 5.5.1) ;

que pour effectuer la pesée des intérêts en présence qu’un tel examen implique, l’autorité de recours n’est pas tenue de procéder à des investigations supplémentaires, mais peut statuer sur la base des pièces en sa possession (ATF 117 V 185 consid. 2b ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_435/2008 du 6 février 2009 consid. 2.3 et les arrêts cités ; ATA/812/2018 du 8 août 2018) ;

que la chambre de céans dispose dans l’octroi de mesures provisionnelles d’un large pouvoir d’appréciation (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1161/2013 précité consid. 5.5.1 ; ATA/941/2018 précité) ;

qu’en l’espèce, la décision querellée retire à A______ son autorisation d’exploiter l’établissement « La C______ » et met ainsi fin à un droit ;

que les recourants concluent au maintien de ce droit jusqu’à droit connu au fond ;

que les indices mis en avant par le PCTN pour rendre vraisemblable une situation durablement illicite remontent au printemps 2022 et que les recourants et E______ ont depuis lors produit des documents rendant a priori vraisemblable le maintien de la situation initiale, soit l’exploitation de « La C______ » par B______ et A______ ; que les rapports de police produits par le PCTN montrent certes que G______ s’est présenté comme responsable lors des contrôles des 12 juin 2022 (pièce 17), 2 octobre 2022 (pièce 18), 30 octobre 2022 (pièce 24), 5 novembre 2022 (pièce 19) et 10 décembre 2022 (pièce 21) ; que A______ était toutefois présent en qualité d’exploitant lors des contrôles des 10 novembre 2022 (pièce 19), 19 novembre 2022 (pièce 20), 8 décembre 2022 (pièce 22), 16 décembre 2022 (pièce 23) et 19 janvier 2023 (pièce 25) ;

que la situation n’est pas claire et appelle une instruction ;

qu’ainsi l’existence d’une infraction continue depuis plus d’un an n’apparaît prima facie pas suffisamment caractérisée à ce stade de la procédure, de sorte que le PCTN échoue à faire prévaloir un intérêt public au respect de la LRDBH sur l’intérêt privé des recourants à la poursuite de l’exploitation, qui justifierait l’entrée en force nonobstant recours de la décision de retrait d’autorisation ;

qu’au vu de ces éléments, la requête de restitution de l’effet suspensif sera admise ;

qu’il sera statué sur les frais de la présente décision avec l’arrêt sur le fond.

 

LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

restitue l’effet suspensif au recours ;

réserve le sort des frais de la procédure jusqu’à droit jugé au fond ;

communique la présente décision à Me Christophe GAL, avocat des recourants, ainsi qu'au service de police du commerce et de lutte contre le travail au noir.

 

 

La présidente :

 

 

V. LAUBER

 

 

Copie conforme de cette décision a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

la greffière :