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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/407/2023

ATA/426/2023 du 25.04.2023 ( PROF ) , ADMIS

Descripteurs : DÉLÉGATION DE COMPÉTENCE;DÉLÉGATION LÉGISLATIVE;ÉMOLUMENT;AVOCAT;SECRET PROFESSIONNEL
Normes : Cst.5.al1; Cst-GE.2; Cst-GE.109.al4; LPAv.49; LPAv.49A; LPAv.52; RPAv.9; LPA.87.al1
Résumé : Recours contre la décision de la commission du barreau mettant à charge de l'avocat le paiement des émoluments de décisions dans une procédure de levée du secret professionnel. La commission du barreau avait délié l'avocat du secret professionnel. Le Conseil d'État a outrepassé sa compétence d'exécution en incombant à l'avocat ou l'avocat-stagiaire le paiement des émoluments liés à l'activité juridictionnelle et administrative de la commission du barreau. Dans le cadre de la procédure de levée du secret professionnel, le principe général de procédure administrative qui veut que la partie qui succombe doit supporter les frais devait s'appliquer. Recours admis et dossier renvoyé à la commission du barreau pour nouvelle décision.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/407/2023-PROF ATA/426/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 25 avril 2023

 

dans la cause

 

Monsieur A______ recourant

contre

COMMISSION DU BARREAU

 

et

Madame et Monsieur B______ intimés
représentés par Me Sarah Braunschmidt, avocate



EN FAIT

A. a. Monsieur A______, avocat, a été mandaté en 2014 par Madame et Monsieur B______ pour les assister dans diverses démarches et procédures à l'encontre d'assureurs privés et sociaux.

b. M. A______ soutient qu’au vu de la situation financière des époux B______, il a été impossible de les solliciter pour obtenir le paiement de ses honoraires. Il s'est donc adressé à diverses assurances juridiques, sans succès.

c. Le 20 mai 2022, M. A______ a résilié le mandat. Les époux avaient, selon lui, refusé de lui verser une provision malgré la réception de plus de CHF 440'000.- de la part de diverses assurances.

d. Afin de pouvoir réclamer en justice ses honoraires, M. A______ a sollicité la levée de son secret professionnel auprès de la nouvelle avocate des époux B______.

Par courrier du 20 juillet 2022, il lui a été répondu que les époux B______ refusaient de le délier du secret professionnel, de même que de payer ses frais et honoraires.

B. a. Le 26 juillet 2022, M. A______ a sollicité de la commission du barreau
(ci-après : la commission) la levée du secret professionnel le liant aux époux B______ en vue de recouvrer sa créance d'honoraires.

b. Après disjonction de la cause par la commission, chacun des époux s’est, le
26 août 2022, formellement opposé à la levée du secret professionnel.

c. Le 22 décembre 2022, la commission, par deux décisions distinctes, a délié l'avocat du secret professionnel tant à l'égard de Mme B______ que de M. B______.

Elle a mis à charge de M. A______ un émolument de CHF 300.- pour chaque décision.

d. Par réclamation du 3 janvier 2023, M. A______ a conclu à l'annulation de sa condamnation au paiement de ces deux émoluments et à leur mise à la charge de ses anciens clients.

e. Par décision du 16 janvier 2023, la commission a prononcé la jonction des dossiers de Mme B______ et M. B______ et a rejeté la réclamation.

C. a. Par acte du 6 février 2023, M. A______ a interjeté recours devant la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre cette décision du 16 janvier 2023. Il a conclu à son annulation ainsi qu'à la condamnation de Mme et M. B______ au paiement de l'émolument de CHF 300.- chacun.

Depuis l’arrêt du Tribunal fédéral 142 II 307, la procédure de levée du secret professionnel d’un avocat était devenue essentiellement contentieuse. Le principe de la hiérarchie des normes et les art. 87 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10) et 49 de la loi sur la profession d’avocat du
26 avril 2002 (LPAv - E 6 10), cette dernière disposition renvoyant à la LPA, avaient été violés. L’art. 49A LPAv ne réglait pas, ne serait-ce que dans les grandes lignes, la question de savoir qui était redevable des frais et émoluments de procédure. L’art. 9 al. 3 RPAV n’était pas conforme au droit supérieur.

Ainsi, ses anciens clients qui avaient succombé devant la commission devaient supporter les frais de procédure.

b. Le 7 mars 2023, la commission a transmis ses dossiers et a persisté dans les termes de sa décision du 16 janvier 2023.

c. Bien qu’interpellés, les époux B______ ne se sont pas manifestés.

d. Le 16 mars 2023, M. A______ a renoncé à faire usage de son droit à la réplique.

e. Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a LPA).

2.             L’objet du litige est la décision sur réclamation du 16 janvier 2023 confirmant la mise à la charge du recourant de deux émoluments de CHF 300.- au terme des deux décisions ayant prononcé la levée de son secret professionnel à l’égard d’anciens clients pour faire valoir ses créances d’honoraires devant les juridictions civiles.

3.             Le recourant invoque la violation du principe de la légalité.

3.1 De jurisprudence constante, la chambre administrative est habilitée à revoir, à titre préjudiciel et à l'occasion de l'examen d'un cas concret, la conformité des normes de droit cantonal au droit fédéral (ATA/914/2019 précité consid. 7 ; ATA/319/2018 du 10 avril 2018 consid. 6a et les arrêts cités ; Pierre MOOR/Alexandre FLÜCKIGER/Vincent MARTENET, op. cit., p. 345 ss n. 2.7.3). Cette compétence découle du principe de la primauté du droit fédéral sur le droit des cantons, ancré à l'art. 49 al. 1 Cst. (ATF 138 I 410 consid. 3.1 ; ATA/914/2019 précité consid. 7). D'une manière générale, les lois cantonales ne doivent rien contenir de contraire à la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), aux lois et ordonnances du droit fédéral (ATF 141 V 455 consid. 6.1 et l'arrêt cité ; Giorgio MALINVERNI/Michel HOTTELIER/Maya HERTIG RANDALL/Alexandre FLÜCKIGER, Droit constitutionnel suisse, vol. I, 4ème éd., 2021, p. 868 ss n. 2370 ss). Le contrôle préjudiciel permet de déceler et de sanctionner la violation par une loi ou une ordonnance cantonale des droits garantis aux citoyens par le droit supérieur. Toutefois, dans le cadre d'un contrôle concret, seule la décision d'application de la norme viciée peut être annulée (ATA/914/2019 précité consid. 7 ; Pierre MOOR/Alexandre FLÜCKIGER/ Vincent MARTENET, op. cit., p. 352 ss n. 2.7.4.2).

3.2 Selon l’art. 5 al. 1 Cst., le droit est la base et la limite de l’activité de l’État. Le principe de la légalité se compose de deux éléments : le principe de la suprématie de la loi et le principe de l’exigence de la base légale. Le premier signifie que l’autorité doit respecter l’ensemble des normes juridiques ainsi que la hiérarchie des normes. Le second implique que l’autorité ne peut agir que si la loi le lui permet ; son action devant avoir un fondement dans une loi (ATA/43/2022 du 18 janvier 2022 consid. 5 ; Pierre MOOR/Alexandre FLÜCKIGER/Vincent MARTENET, Droit administratif, vol. I, 3ème éd., 2012, p. 621s, 624 et 650 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2ème éd., 2018, n. 448, 467 ss et 476 ss).

Au niveau fédéral, le principe de la séparation des pouvoirs est implicitement contenu dans la Constitution fédérale (Pierre MOOR/Alexandre FLÜCKIGER /Vincent MARTENET, op. cit., Vol. I, p. 458). Il s'agit d'un droit constitutionnel dont peut se prévaloir le citoyen (ATF 130 I 1 consid. 3.1). Le principe de la séparation des pouvoirs interdit à un organe de l'État d'empiéter sur les compétences d'un autre organe ; en particulier, il interdit au pouvoir exécutif d'édicter des dispositions qui devraient figurer dans une loi, si ce n'est dans le cadre d'une délégation valablement conférée par le législateur (ATF 142 I 26 consid. 3.3 ; 138 I 196 consid. 4.1 ; 134 I 322 consid. 2.2 ; 119 Ia 28 consid. 3 ; 118 Ia 305
consid. 1a).

Dans le canton de Genève, l'art. 2 de la Constitution de la République et canton de Genève du 14 octobre 2012 (Cst-GE - A 2 00) consacre expressément le principe de la séparation des pouvoirs. Le pouvoir législatif incombe au Grand Conseil (art. 80 Cst-GE). Le Conseil d'État est chargé de l'exécution des lois et adopte à cet effet les règlements et arrêtés nécessaires (art. 109 al. 4 Cst-GE). À moins d'une délégation expresse, le Conseil d'État ne peut pas poser de nouvelles règles qui restreindraient les droits des administrés ou leur imposeraient des obligations, même si ces règles étaient conformes au but de la loi (ATF 134 I 313 consid. 5.3 ; 133 II 331 consid. 7.2.2 ; 130 I 140 consid. 5.1 ; 114 Ia 286 consid. 5a ; ATA/52/2015 du 13 janvier 2015 consid. 2 ; ATA/168/2008 du 8 avril 2008
consid. 3a ; ACST/28/2018 du 12 décembre 2018 consid. 8b).

Le mécanisme de la délégation législative est solidement ancré dans le droit public cantonal (ATA/52/2015 du 13 janvier 2015 consid. 2b ; ATA/585/2014 du 29 juillet 2014 consid. 4e ; ATA/391/2007 du 7 août 2007 consid. 6). Il est en effet admis que le législateur cantonal a le droit de déléguer au gouvernement la compétence d'adopter des lois au sens matériel et de l'autoriser à créer des règles de droit sous forme d'ordonnance de substitution dépendante, fondée précisément sur une délégation législative. Ce droit est limité par quatre règles établies par une longue jurisprudence du Tribunal fédéral (ATF 128 I 113 consid. 2 ;118 Ia consid. 3 ; 115 Ia 277 consid. 7) et qui ont elles-mêmes valeur constitutionnelle. La délégation ne doit pas être prohibée par le droit cantonal. Elle doit se limiter chaque fois à une matière déterminée. Elle doit figurer dans une loi au sens formel. La norme de délégation doit indiquer le contenu essentiel de la réglementation, y compris en cas de rapport de droit spécial tel que le droit de la fonction publique (ATF 128 I 113 consid. 3c ; Thierry TANQUEREL, op. cit., n. 497). Un acte législatif qui ne respecte pas l'une ou l'autre de ces quatre conditions ainsi qu'une décision qui se base sur une telle ordonnance, manquent de base légale et violent le principe de la séparation des pouvoirs (ATA/52/2015 précité consid. 2b ; ATA/585/2014 précité consid. 4e ; ATA/391/2007 précité consid. 6 ; Andreas AUER/Giorgio MALINVERNI/Michel HOTTELIER, op. cit., p. 543 ss.).

Le gouvernement peut édicter des règles de droit soit dans des ordonnances législatives d'exécution, soit dans des ordonnances législatives de substitution fondées sur une délégation législative. Les ordonnances d'exécution concrétisent les règles qui figurent dans la loi en précisant les modalités pratiques de son application, les questions d'organisation et de procédure, ou les termes légaux vagues et imprécis. Elles doivent rester dans le cadre tracé par la loi ; elles ne peuvent contenir que des normes dites secondaires. Une norme secondaire est une règle qui ne déborde pas du cadre de la loi, qui ne fait qu'en préciser certaines dispositions et fixer, lorsque c'est nécessaire, la procédure applicable. Par contre, les ordonnances de substitution fondées sur une délégation législative contiennent des normes dites primaires. Une norme primaire est une règle dont on ne trouve aucune trace dans la loi de base, une règle qui étend ou restreint le champ d'application de cette loi, confère aux particuliers des droits ou leur impose des obligations dont la loi ne fait pas mention. Ces normes primaires doivent toutefois respecter le cadre légal défini par la clause de délégation législative ; celle-ci doit notamment être ancrée dans la loi formelle et indiquer le contenu essentiel de la réglementation (ATF 134 I 322 consid. 2.4 ; 133 II 331 consid. 7.2.2 ; 132 I 7 consid. 2.2 ; 104 Ib 205 consid. 3b ; ATA/52/2015 du 13 janvier 2015 consid. 2c ; ATA/571/2014 du 29 juillet 2014 consid. 6 ; Andreas AUER/Giorgio MALINVERNI/Michel HOTTELIER, op. cit., p. 540 ss ; Pierre MOOR/Alexandre FLÜCKIGER/Vincent MARTENET, op. cit., vol. I, p. 244 ss et 251 ss ; Thierry TANQUEREL, op. cit., n. 323 ss et 371).

Pour déterminer l'étendue du pouvoir réglementaire, il faut interpréter la loi quelle que soit la nature de la norme (Pierre MOOR/Alexandre FLÜCKIGER/Vincent MARTENET, op. cit., vol. I, p. 244 ss)

4.             Selon l'art. 49 LPAv, la LPA s'applique dans la mesure où la LPAv n'y déroge pas.

L'art. 49A LPAv prévoit que le règlement d'application de la LPAv fixe notamment les frais et émoluments de procédure. Le Conseil d'État édicte les dispositions réglementaires nécessaires à l'exécution de la LPAv (art. 52 LPAv).

Sur cette base, le Conseil d'État a adopté le RPAv.

4.1 Selon l’art. 9 al. 1 RPAv, en rendant sa décision, la commission, son bureau ou son président statue sur les éventuels frais de procédure, qui comprennent notamment les indemnités payées aux experts, interprètes et témoins, ainsi que le coût des expertises et des traductions écrites.

Un émolument de CHF 100.- à CHF 600.- est perçu pour les décisions concernant la levée du secret professionnel (art. 9 al. 2 let. g RPAv), dont le débiteur est l'avocat ou l'avocat stagiaire concerné par la décision ou l'acte (art. 9 al. 3 RPAv).

4.2 Selon les travaux préparatoires, l'adoption de l'art. 49A LPAv avait pour but de donner la possibilité à la commission de percevoir des frais et émoluments dans le cadre de son activité (Mémorial des séances du Grand Conseil de la République et canton de Genève [ci-après : MCG], 2008/2009/IV, Volume des annexes, p. 5938-5972, p. 5958). En effet, jusqu'à la modification de la LPAv du 26 avril 2002, la commission était considérée comme une autorité administrative dépendante, ce qui lui permettait d'assortir ses décisions des frais de procédure et émoluments en vertu des art. 86 ss LPA (MCG, 2008/2009/IV, Volume des annexes, p. 5938-5972, p. 5968). Avec son nouveau statut d'« autorité cantonale de surveillance », la LPAv devait être complétée formellement par l’adoption de l'art. 49A LPAv. Il était précisé que « [l]es frais et émoluments liés tant à l'activité juridictionnelle qu'administrative de la Commission ser[aient] ensuite détaillés dans le règlement d'application » (MCG, 2008/2009/IV, Volume des annexes, p. 5938-5972, p. 5968).

4.3 En l'espèce, l'art. 49A LPAv se borne à renvoyer au RPAv pour la fixation des frais et émoluments de procédure, sans donc mentionner à la charge de qui ces frais et émoluments doivent être mis. Seul l'art. 9 al. 3 RPAv impose à l'avocat ou l'avocat-stagiaire le paiement des émoluments prévus notamment en cas de décision de levée du secret professionnel.

Le cadre tracé par la LPAv délègue au Conseil d'État la compétence de fixer les frais et émoluments liés tant à l'activité juridictionnelle qu'administrative de la commission. Toutefois, concernant la compétence de déterminer à qui incombe le paiement desdits frais et émoluments, les conditions de base de la délégation ne sont pas respectées. Le contenu essentiel de cette délégation n’a trait en effet qu’à la fixation des frais et émoluments. Or, le Conseil d'État impose une nouvelle règle qui oblige l'avocat ou l'avocat-stagiaire à s'acquitter des émoluments relatifs à l'exercice de la profession d'avocat. Le Conseil d'État, en adoptant l’art. 9 al. 3 RPAv a donc outrepassé sa compétence d'exécution de la loi en édictant une norme primaire, alors que l’art. 49A LPAv ne lui donne comme compétence que celle d'édicter des normes secondaires d'application de la LPAv. L'art. 9 al. 3 RPAv n'ayant aucun fondement dans une clause de délégation législative ne peut constituer une base légale valable.

Par conséquent, la décision litigieuse, prise en application du RPAv, se fonde sur une base légale insuffisante et viole de ce fait le principe de la légalité.

5.             Reste à déterminer si les émoluments litigieux peuvent être mis à la charge du recourant sur une autre base.

5.1 Comme déjà relevé, la LPA s'applique à la LPAv, dans la mesure où cette dernière n'y déroge pas (art. 49 LPAv).

5.2 En vertu de l'art. 87 al. 1 LPA, la juridiction administrative qui rend la décision statue sur les frais de procédure et émoluments. Un principe général de procédure administrative veut que les frais soient supportés par la partie qui succombe et dans la mesure où elle succombe (ATA/882/2016, consid. 3 ; René RHINOW et al., Öfflentliches Prozessrecht, 3ème éd., 2021, n. 971 ; Regina KIENER/Bernhard RÜTSCHE/Mathias KUHN, Öffentliches Prozessrecht, 3ème éd., 2021, n. 1673 ; Benoît BOVAY, Procédure administrative, 2ème éd., 2015, p. 642).

Il est de jurisprudence constante que la partie qui succombe doit supporter une partie des frais découlant du travail qu’elle a généré par sa saisine (ATA/182/2018 du 27 février 2018 consid. 2). Les frais de justice sont des contributions causales qui trouvent leur fondement dans la sollicitation d'une prestation étatique et, partant, dépendent des coûts occasionnés par le service rendu. Il est cependant notoire que, en matière judiciaire, les émoluments encaissés par les tribunaux n'arrivent pas, et de loin, à couvrir leurs dépenses effectives (ATF 143 I 227 consid. 4.3.1 ; 141 I 105 consid. 3.3.2 ; 133 V 402 consid. 3.1).

     En matière de levée du secret professionnel, l'avocat doit d'abord rechercher le consentement de son client (Benoît CHAPPUIS/Pascal MAURER, Loi sur les avocats, Commentaire Romand, 2ème éd., 2022, n 286 ad art. 13 LLCA). Une procédure de levée du secret professionnel de l’avocat ne saurait par conséquent avoir lieu que dans la mesure où le client s’oppose à la levée de ce secret ou n’est plus en mesure de donner son consentement (Jean-Louis COLLART/Ernst STAEHELIN, Pratique de la profession d’avocat/Rechtsprechung Zum Anwaltsrecht, Revue de l'avocat 2015 p. 283 ss, 290).

5.3 En l'espèce, c’est parce que les deux anciens clients du recourant ont refusé la levée du secret professionnel que le recourant s'est vu contraint de saisir la commission pour pouvoir agir en justice en vue du recouvrement de ses honoraires. Cette dernière a fait droit à cette requête et, partant, donné raison à l’avocat. Ce dernier a donc obtenu gain de cause et ses deux anciens clients ont succombé. Autrement dit, il a été retenu que c’est à tort qu’ils se sont opposés à cette demande de levée de secret professionnel.

Par conséquent, en application de l'art. 87 al. 1 LPA cum 49 LPAv et des principes qui précèdent, c’est à leur charge que les émoluments de décision de la commission doivent être mis et non à celle de l’avocat qui a obtenu gain de cause.

Au vu de ce qui précède, le recours sera admis et la décision sur réclamation de la commission annulée. La procédure sera renvoyée à la commission pour nouvelles décisions dans le sens des considérants.

6.             Aucun émolument ne sera mis à la charge du recourant, qui obtient gain de cause (art. 87 al. 1 LPA). En tant qu’il plaide en personne et n'expose pas que le recours lui aurait occasionné des frais, le recourant ne peut se voir allouer une indemnité de procédure (art. 87 al. 2 LPA).

* * * * *

 

 

 

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 6 février 2023 par Monsieur A______ contre la décision de la Commission du barreau du 16 janvier 2023 ;

au fond :

l'admet;

annule la décision sur réclamation de la Commission du barreau du 16 janvier 2023 ;

renvoie la procédure à la Commission du barreau pour nouvelles décisions dans le sens des considérants ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument ni alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Monsieur A______, à Me Sarah Braunschmidt Scheidegger, représentant les époux B______ ainsi qu'à la Commission du barreau.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, M. Verniory, Mme Lauber,
M. Mascotto, Mme Michon Rieben, juges

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :