Aller au contenu principal

Décisions | Chambre pénale de recours

1 resultats
P/20677/2022

ACPR/917/2023 du 20.11.2023 sur ONMMP/2042/2023 ( MP ) , REJETE

Descripteurs : ORDONNANCE DE NON-ENTRÉE EN MATIÈRE;ABUS DE CONFIANCE
Normes : CPP.310

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/20677/2022 ACPR/917/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du lundi 20 novembre 2023

 

Entre

A______ et B______, domiciliés ______, représentés par Me Gérard BRUTSCH, avocat, WOODTLI & ASSOCIÉS, rue Prévost-Martin 5, case postale 60, 1211 Genève 4,

recourants,

 

contre l'ordonnance de non-entrée en matière rendue le 23 mai 2023 par le Ministère public,

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A. a. Par acte expédié le 2 juin 2023, A______ et B______ recourent contre l'ordonnance de non-entrée en matière du 23 mai 2023, communiquée par pli simple, par laquelle le Ministère public a décidé de ne pas entrer en matière sur leur plainte contre C______.

Ils concluent à l'annulation de l'ordonnance querellée et au renvoi de la cause au Ministère Public pour instruction contre C______ du chef d'abus de confiance ainsi qu'à la condamnation de ce dernier aux frais de la procédure et à ce qu'il leur soit accordé une juste indemnité pour les dépenses obligatoires occasionnées par la procédure.

b. Les recourants ont versé les sûretés en CHF 1'200.- qui leur étaient réclamées par la Direction de la procédure.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a.        Le 28 septembre 2022, A______ et B______ ont déposé plainte contre C______ pour abus de confiance (art. 138 ch. 1 al. 2 CP), voire escroquerie (art. 146 al. 1 CP).

A______ avait conclu avec l’entreprise individuelle C______/D______, exploitée par C______, trois contrats de prestation de services portant sur la restauration complète d'une [voiture de sport de marque] F______, et de deux G______/1______ [marque, modèle].

Ils avaient laissé le champ libre à C______ sans contrôler l'exécution des prestations convenues; de tels travaux s'exécutaient sur de nombreux mois, les véhicules ayant été démontés et la restauration des parties intérieures ayant été confiée à des entreprises spécialisées, C______ coordonnant toutes les phases de restauration des véhicules tandis qu'il devait notamment restaurer les carrosseries. Cependant, trois ans plus tard, les quelques travaux réalisés sur les véhicules ne correspondaient pas à l'importance des acomptes versés. En juin 2022, ils avaient ainsi résilié les contrats, exigé la restitution des trois véhicules et le remboursement des acomptes versés ainsi que l'ensemble des factures des travaux réalisés. À la restitution, ils avaient constaté que la F______ avait fait l'objet de travaux de carrosserie partiels et que les G______ n'avaient fait que l'objet d'un démontage, les parties intérieures étant confiées à une entreprise spécialisée en vue de leur restauration.

C______/D______ ayant été radiée le ______ 2022 du Registre du commerce, à la suite d'une cessation de l'exploitation, ils craignaient que des fonds versés aient été investis dans l'écurie de sport automobile C______/E______ SNC, inscrite au Registre du commerce le ______ 2022 transformée en C______/E______ SA en ______ 2022.

Ils ont estimé leur dommage à CHF 156'340.-, en l'absence de tout décompte.

b.        Les contrats produits, rédigés de manière identique, stipulaient que 50% du prix des prestations serait versé au départ de la réalisation; cette somme serait réservée pour les pièces détachées nécessaires pour la prestation de service. L'entreprise serait ensuite "cotisée selon avancement de la prestation le montant correspondent, jusqu'à la livraison du véhicule". Les factures devaient être soumises, selon avancement de la prestation, au client pour le paiement à l'entreprise.

Ainsi, les parties avaient convenu, le 26 juin 2019, d'un prix forfaitaire fixe de CHF 70'000.- (TTC) concernant:

a.      le véhicule de marque F______. Les époux A______/B______ avaient ainsi versé:

-     le 27 juin 2019, un acompte de CHF 15'000.-, à la suite de l'offre 2______ de C______/D______ du même jour, portant sur un total de CHF 30'000.- concernant "pièces selon besoin inclus transport et dédouanement, prix forfaitaire CHF 5'000.- et main-d'œuvre (équivalent à 18 jours effective) CHF 23'200.-";

-     le 6 septembre 2019, CHF 20'000.-, "pour la restructuration complète de la F______";

-     les 26 septembre, 29 octobre et 4 décembre 2019, un acompte de CHF 5'000.-, à chaque fois, à la suite d'offres 2______, aux mêmes dates, à hauteur de CHF 70'000.- "pour restauration complète (prix forfaitaire)";

-     le 30 janvier 2020, un acompte de CHF 5'000.- à la suite de la facture 3______, faisant référence à un document du 6 décembre 2019, dont les prestations décrites étaient "restauration complète carrosserie inclus peinture; remise en état intérieur; révision complète système électrique; restauration complète de suspension statique et dynamique et restauration système de freinage; restauration partielle moteur et boite a vitesse, de CHF 70'000.-";

-     le 27 février 2020, un acompte de CHF 5'000.-, à la suite de la facture 4______, faisant référence à un document du 6 décembre 2019, dont les prestations décrites étaient "restauration complet prix forfaitaire";

-     le 11 décembre 2020, un acompte de CHF  6'340.-, à la suite de la facture 3______ identique à celle du 30 janvier précédent.

b.      le véhicule de marque G______/1______ de 1969, modèle blanc. Les plaignants avaient versé:

-     le 25 juillet 2019, un acompte de CHF 35'000.- , sans autre précision;

-     les 26 septembre, 29 octobre et 4 décembre 2019, un acompte de CHF 5'000.-, à chaque fois, à la suite des offres 5______, aux mêmes dates, pour CHF 70'000.- "concernant restauration complète carrosserie inclus peinture; remis en état intérieur; révision complète système électrique; restauration complète de suspension statique et dynamique et restauration système de freinage; restauration partielle moteur et boite à vitesse";

-     le 30 janvier 2020, un acompte de CHF 5'000.-, à la suite d'une facture 4______ de CHF 70'000.-, faisant référence à un document du 6 décembre 2019, dont les prestations décrites étaient "restauration complète prix forfaitaire";

-     le 27 février 2020, un acompte de CHF 5'000.-, à la suite d'une facture 3______ de CHF 70'000.- faisant référence à un document du 6 décembre 2019, dont les prestations décrites et chiffrées étaient "restauration complète carrosserie inclus peinture; remise en état intérieur; révision complète systeme électrique; restauration complète de suspension statique et dynamique et restauration système de freinage; restauration partielle moteur et boite à vitesse".

En outre, le 1er juin 2020, les parties ont convenu d'un contrat semblable portant sur un second véhicule de marque G______/1______, de 1969, modèle rouge, pour un prix estimé à CHF 95'000.- (TTC). Les époux A______/B______ ont versé CHF 30'000.-, le 8 juin 2020, à la suite de l'offre 6______, du même jour, pour un total de CHF 95'000.- concernant "restauration complète carrosserie inclus peinture; remise en état intérieur; révision complète systeme électrique; restauration complète de suspension statique et dynamique et restauration système de freinage; restauration partielle moteur et boite à vitesse, divers espièces".

c.         Entendu par la police, C______ a confirmé avoir reçu du couple A______/B______ environ CHF 120'000.- pour les travaux de rénovation des trois véhicules et que lesdits travaux n'avaient pas été menés jusqu'à leur terme.

Les époux A______/B______ lui avaient demandé de restaurer leur F______/7______ de 1974 dont il avait constaté que le châssis était complètement rouillé ainsi que d'une G______/1______ de couleur blanche. Ils avaient convenu du prix de CHF 70'000.- par voiture. En août 2019, il avait commencé à restaurer la F______, avec plusieurs employés (électricien, mécanicien, tôlier et peintre); durant environ un mois et demi, ils avaient fait une expertise pour chaque étape de démontage dudit véhicule avant de commencer les travaux, par domaine d'activité. En décembre 2019, il avait envoyé les deux véhicules en Allemagne pour effectuer des travaux de traitement chimique sur les châssis, avec l'accord des propriétaires. Il les avait réceptionnés en mars 2020. La pandémie de Covid 19 avait tout arrêté; il ne recevait aucune de ses commandes. Fin 2020, en commençant les travaux sur la F______, il s'était rendu compte qu'il y avait plus de travaux à faire. Précédemment, il était allé chercher une autre G______/1______ de 1969, de couleur rouge, en Suisse alémanique, que les époux A______/B______ avaient achetée, et il l'avait stockée dans son garage. Il n'avait pas commencé la restauration de cette voiture, ayant déjà trop de retard avec les deux autres véhicules. En juin 2022, il avait restitué les trois véhicules au couple A______/B______.

Il avait utilisé l'argent versé notamment pour payer les quatre employés, les divers traitements chimiques (environ EUR 25'000.- par voiture), le déplacement des véhicules ainsi que les diverses pièces commandées. Les acomptes versés représentaient quatre mois de travaux sur les véhicules pour les quatre employés. Or, ces derniers avaient travaillé plus de quatre mois sur les deux véhicules.

d.        Par courrier du 27 mars 2023, le Ministère public a imparti un délai au 10 avril 2023 à C______ afin qu'il fournisse tout document utile pouvant attester de l'attribution des acomptes versés par les époux A______/B______ à la restauration des véhicules susmentionnés.

e.         Par courrier du 10 avril 2023, C______ a répondu qu’il allait contacter la société chargée du traitement chimique pour obtenir une attestation. Il suggérait par ailleurs de prendre contact avec l’Office cantonal des assurances sociales de Genève afin d’obtenir les fiches de salaire de ses employés. C______ se disait également atteint dans sa santé mentale en raison de cette affaire.

C. Dans l'ordonnance querellée, le Ministère public considère que les éléments constitutifs des infractions d'abus de confiance (art. 138 ch. 1 al. 2 CP) et d'escroquerie (art. 146 al. 1 CP) n'étaient pas réunis. Il retient qu'il ne ressortait pas du dossier que le mis en cause avait utilisé les acomptes versés à d'autres fins qu'à la restauration des véhicules confiés ni agi contrairement aux instructions reçues, en s'écartant de la destination fixée. Au contraire, les plaignants lui avaient laissé une certaine liberté durant environ trois années, sans lui donner d'instructions précises ni de délais à respecter. Il ressortait en outre tant de la plainte pénale que des déclarations du mis en cause que des travaux avaient effectivement été entrepris durant cette période. Le fait que l'avancement des travaux ne soit pas satisfaisant relevait du droit civil et ne permettait pas de soupçonner une volonté du concerné de s'écarter des instructions reçues ou d'allouer les sommes versées à d'autres fins qu'à la rénovation des véhicules.

Il ne ressortait en outre pas des éléments dénoncés que la condition de l'astuce exigée pour l'infraction d'escroquerie soit réalisée. En effet, aucune des pièces au dossier ne permettait d'établir que C______ ait cherché à tromper de manière intentionnelle les époux A______/B______ dans le but de les induire en erreur et de se procurer un enrichissement illégitime. En outre, l'entreprise individuelle C______/D______ n'était pas encore déclarée en faillite lors de la conclusion des contrats.

D. a. Dans leur recours, les époux A______/B______ considèrent que les acomptes avaient été versés pour les travaux de restauration des véhicules. Or, C______ n'avait pas fait l'usage déterminé des fonds, et encore moins dans leur intérêt. Il ne leur appartenait pas d'assumer le salaire des employés du mis en cause, d'autant plus qu'ils n'avaient déployé qu'une infime activité, ni les conséquences de la pandémie Covid 19. Aucun document n'établissait que des pièces avaient été commandées, et payées, concernant leurs véhicules, qu'il y avait eu un transport des voitures en Allemagne, lequel n'avait jamais été convenu. Ils contestent que les G______ aient subi des traitements chimiques, leur carrosserie étant toujours revêtue, lors de leur restitution, de leur couleur d'origine et rien ne permettait de démontrer qu'un tel traitement ait été effectué sur la F______. Ils contestent que quatre employés aient travaillé durant plus de quatre mois sur leurs voitures lesquelles leur avaient été restituées en pièces détachées et seule la F______ avait vu des travaux être réalisés. Ils n'avaient reçu aucun décompte permettant de déterminer l'utilisation des fonds versés dans le cadre des trois contrats de prestations.

Ils pensaient que les fonds avaient été utilisés, à tout le moins dans une certaine mesure, au passage de C______/E______ SNC en société anonyme.

b. Dans ses observations, le Ministère public réitère que le litige opposant les parties relevait de l'inexécution d'un contrat. L'argent remis par les plaignants au mis en cause l'avait été au titre d'avance sur le paiement du prix des travaux; C______ n'avait pas l'obligation d'en conserver la contrevaleur, de la même manière que le contrat ne prévoyait pas la restitution des fonds; son pouvoir de disposition sur les fonds n'était dès lors pas limité.

EN DROIT :

1.             Le recours a été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerne une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. a CPP) et émane des plaignants qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. b CPP), ont qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).

2.             Les recourants ne reviennent pas sur l'infraction d'escroquerie de sorte que la Chambre de céans ne se penchera pas sur cette question.

3.             Ils reprochent au Ministère public de ne pas être entré en matière sur leur plainte pour abus de confiance.

3.1.       Selon l'art. 310 al. 1 let. a CPP, le ministère public rend immédiatement une ordonnance de non-entrée en matière s'il ressort de la dénonciation ou du rapport de police que les éléments constitutifs de l'infraction ou les conditions à l'ouverture de l'action pénale ne sont manifestement pas réunis.

3.2.       Au moment de statuer sur l'ouverture éventuelle de l'instruction, le ministère public doit examiner si les conditions d'exercice de l'action publique sont réunies, c'est-à-dire si les faits qui sont portés à sa connaissance sont constitutifs d'une infraction pénale et si la poursuite est recevable. Il suffit que l'un des éléments constitutifs de l'infraction ne soit manifestement pas réalisé pour que la non-entrée en matière se justifie (Y. JEANNERET / A. KUHN / C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), Commentaire romand : Code de procédure pénale suisse, 2ème éd., Bâle 2019, n. 8 ad art. 310).

Des motifs de fait peuvent justifier la non-entrée en matière. Il s'agit des cas où la preuve d'une infraction, soit de la réalisation en fait de ses éléments constitutifs, n'est pas apportée par les pièces dont dispose le ministère public. Il faut que l'insuffisance de charges soit manifeste. De plus, le ministère public doit examiner si une enquête, sous une forme ou sous une autre, serait en mesure d'apporter des éléments susceptibles de renforcer les charges contre la personne visée. Ce n'est que si aucun acte d'enquête ne paraît pouvoir amener des éléments susceptibles de renforcer les charges contre la personne visée que le ministère public peut rendre une ordonnance de non-entrée en matière. En cas de doute sur la possibilité d'apporter ultérieurement la preuve des faits en question, la non-entrée en matière est exclue (Y. JEANNERET / A. KUHN / C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), op. cit., n. 9 ad art. 310).

La non-entrée en matière peut également résulter de motifs juridiques. La question de savoir si les faits qui sont portés à sa connaissance constituent une infraction à la loi pénale doit être examinée d'office par le ministère public. Des motifs juridiques de non-entrée en matière existent lorsqu'il apparaît d'emblée que le comportement dénoncé n'est pas punissable (Y. JEANNERET / A. KUHN / C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), op. cit., n. 10 ad art. 310).

3.3. Commet un abus de confiance au sens de l'art. 138 ch. 1 al. 2 CP, celui qui, sans droit, aura employé à son profit ou au profit d'un tiers des valeurs patrimoniales qui lui avaient été confiées.  

Sur le plan objectif, l'infraction suppose qu'une valeur ait été confiée, autrement dit que l'auteur ait acquis la possibilité d'en disposer, mais que, conformément à un accord (exprès ou tacite) ou un autre rapport juridique, il ne puisse en faire qu'un usage déterminé, en d'autres termes, qu'il l'ait reçue à charge pour lui d'en disposer au gré d'un tiers, notamment de la conserver, de la gérer ou de la remettre (ATF
133 IV 21 consid. 6.2). Le comportement délictueux consiste à utiliser la valeur patrimoniale contrairement aux instructions reçues, en s'écartant de la destination fixée (ATF 129 IV 257 consid. 2.2.1). L'alinéa 2 de l'art. 138 ch. 1 CP ne protège pas la propriété, mais le droit de celui qui a confié la valeur à ce que celle-ci soit utilisée dans le but qu'il a assigné et conformément aux instructions qu'il a données; est ainsi caractéristique de l'abus de confiance au sens de cette disposition le comportement par lequel l'auteur démontre clairement sa volonté de ne pas respecter les droits de celui qui lui fait confiance (ATF 129 IV 257 consid. 2.2.1; 121 IV 23 consid. 1c). Bien que cet élément ne soit pas explicitement énoncé par l'art. 138 ch. 1 al. 2 CP, la disposition exige que le comportement adopté par l'auteur cause un dommage, qui représente en l'occurrence un élément constitutif objectif non écrit (ATF
111 IV 19 consid. 5; arrêt 6B_249/2017 du 17 janvier 2018 consid. 2.1). 

Les contrats synallagmatiques ne font naître en principe que des prétentions à une contre-prestation, et non une obligation de conservation. Il n'y a ainsi pas de valeur confiée lorsqu'une partie à un contrat reçoit de l'argent pour son propre compte, en contrepartie d'une prestation qu'elle doit elle-même fournir (ATF 133 IV 21 consid. 7.2, arrêt du Tribunal fédéral 6B_312/2009 du 17 juillet 2009). Ainsi, les acomptes versés en vue de l’exécution d’un contrat de construction ne sont pas des sommes confiées, même si le maître de l’ouvrage était parti de l’idée que l’entrepreneur utiliserait cet argent pour acheter le matériel nécessaire. Dans le cadre d'un contrat d'entreprise (art. 363 ss CO), les acomptes versés par le maître de l'ouvrage à l'entrepreneur constituent des valeurs patrimoniales confiées, pour autant que les parties aient convenu de l'affectation des acomptes, par exemple au règlement des factures relatives à la construction faisant l'objet du contrat. Il en va en particulier ainsi à défaut d'une convention contraire, des versements du maître de l'ouvrage à l'entrepreneur général, dans la mesure où ces montants doivent servir à l'achat du matériel et au paiement des sous-traitants. Peu importe à cet égard la nature du compte sur lequel les montants ont été versés (arrêts du Tribunal fédéral 6B_1429/2019 du 5 février 2020 consid. 2.3; 6B_972/2018 du 20 novembre 2018 consid. 2.2.1 ; 6B_160/2012 du 5 avril 2013 consid. 2.2).

3.4. En l'espèce, c'est à raison que le Ministère public soutient que les faits dénoncés par les recourants relèvent uniquement de l’exécution d’obligations contractuelles et s'inscrivent dans le cadre d'un litige à caractère civil, faute d'infraction pénale.

En effet, si les contrats signés par les parties prévoyaient que 50% du prix convenu devait servir à l'acquisition de pièces, il apparaît que dès l'origine, elles ont convenu d'autre chose comme cela ressort des quittances attestant du versement régulier d'acomptes pour diverses prestations et non l'achat de pièces. Les recourants auraient pu contester les offres et factures soumises mais ils n'en ont rien fait. Au contraire, ils précisent dans leur plainte avoir laissé le champ libre au mis en cause et avoir su que des prestations devaient être effectuées par des sous-traitants. Ainsi, s'agissant des contrats de prestations de services, les recourants n'ont pas confié des valeurs au mis en cause, en vue d'une affectation précise et exclusive, au sens de la jurisprudence. L'inexécution ou mauvaise exécution contractuelle relève dès lors exclusivement du droit des obligations et des tribunaux civils.

4.             Infondé, le recours sera rejeté et l'ordonnance querellée confirmée.

5.             Les recourants, qui succombent, supporteront les frais envers l'État, fixés en totalité à CHF 1'200.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03).

* * * * *


 


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

 

Rejette le recours.

Condamne A______ et B______, conjointement et solidairement, aux frais de la procédure de recours, arrêtés à CHF 1'200.-.

Dit que ce montant sera prélevé sur les sûretés versées.

Notifie le présent arrêt, en copie, aux recourants (soit pour eux leur conseil) et au Ministère public.

Siégeant :

 

Madame Daniela CHIABUDINI, présidente; Mesdames Alix FRANCOTTE CONUS et Françoise SAILLEN AGAD, juges; Madame Oriana BRICENO LOPEZ, greffière.

 

La greffière :

Oriana BRICENO LOPEZ

 

La présidente :

Daniela CHIABUDINI

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).

P/20677/2022

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

 

- délivrance de copies (let. b)

CHF

 

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

1'115.00

 

 

 

Total

CHF

1'200.00