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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/18651/2014

ACPR/461/2023 du 16.06.2023 sur OCL/700/2018 ( MP ) , ADMIS/PARTIEL

Recours TF déposé le 24.08.2023, 7B_498/23
Descripteurs : FRAIS DE LA PROCÉDURE;ILLICÉITÉ;GESTION D'AFFAIRES
Normes : CPP.426

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/18651/2014 ACPR/461/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du vendredi 16 juin 2023

 

Entre

A______, domicilié ______, Ghana, comparant par Mes S______ et/ou T_______, avocats,

recourant,

 

contre l'ordonnance de classement rendue le 19 juin 2018 par le Ministère public,

 

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A. a. Par acte déposé le 2 juillet 2018, A______ a recouru contre l'ordonnance du 19 juin 2018, par laquelle le Ministère public a classé la procédure ouverte contre lui et/ou inconnu à la suite de diverses plaintes déposées entre 2014 et 2017 par B______, C______ GROUP SA et C______ COMMODITIES SA, en tant que ses prétentions en indemnisation pour ses frais de défense, le préjudice économique résultant de la procédure et le tort moral subi étaient rejetées et les frais, d'un montant de CHF 4'384.-, mis à sa charge (ch. 2 et 3).

b. Par arrêt ACPR/50/2020 du 20 janvier 2020, la Chambre de céans a rejeté les recours formés contre cette ordonnance par A______ et C______ GROUP SA, et très partiellement admis ceux déposés B______ et C______ COMMODITIES SA. Les frais de la procédure de recours, arrêtés à CHF 7'000.-, ont été répartis à raison d'un quart chacun (CHF 1'750.-) à charge de C______ GROUP SA, B______ et A______, le solde étant laissé à la charge de l'État.

c. Par arrêt du 19 mai 2020 (6B_221/2020), le Tribunal fédéral, saisi par A______, a annulé l'arrêt du 20 janvier 2020 et renvoyé la cause à l'autorité cantonale pour nouvelle décision.

L'argumentation développée dans l'ACPR/50/2020 se révélait problématique, dans la mesure où elle ne distinguait pas les frais de procédure occasionnés par les différents volets de l'affaire, même en fixant des pourcentages ou des fractions, alors même que certaines infractions dénoncées avaient débouché sur un classement définitif, tandis que d'autres devaient encore faire l'objet d'une instruction. En outre, l'autorité cantonale avait retenu que, par son attitude peu diligente au regard de ses obligations dans la conduite des sociétés concernées, A______ avait fait naître des soupçons quant à la licéité de sa gestion et des opérations auxquelles il s'était adonné. Or, la procédure avait été déclenchée et conduite principalement autour des accusations portées contre lui par B______. Ce n'était donc pas de manière abstraite, pour un observateur neutre, qu'il convenait de se demander quelle impression pouvait résulter de l'observation de la conduite des sociétés concernées, mais en tenant compte du point de vue du prénommé. Les frais de la procédure ne pouvaient en effet se trouver en relation de causalité avec le comportement du recourant que si B______ avait des raisons valables de solliciter l'intervention des autorités pénales et présenté à celles-ci des éléments laissant à penser que des infractions avaient été commises.

À cet égard, il ressortait de l'arrêt du 20 janvier 2020 que B______ avait, s'agissant des infractions dénoncées dont le classement avait été confirmé, formulé des plaintes jugées infondées. La Chambre de céans avait en effet retenu que le prénommé était rompu aux affaires et n'avait en aucune manière pu être astucieusement trompé par les agissements de A______ concernant l'acquisition d'actions par le biais d'une société offshore. Il avait par ailleurs livré des informations contradictoires s'agissant du projet qu'il avait formé avec le prévenu, voire avait reconnu s'être trouvé à l'origine d'ordres de transfert litigieux. Il n'était pas non plus possible d'affirmer que A______ dût amener des fonds dans le cadre de l'éventuelle société simple formée avec B______ et rien ne pouvait être déduit des sommes perçues par C______ GROUP SA au titre de "prêts" ou d'"avances". On ne percevait donc pas, en définitive, quels agissements illicites et fautifs de A______ auraient concrètement justifié l'intervention des autorités pénales, s'agissant de chaque infraction dénoncée.

La cause a ainsi été renvoyée à la Chambre de céans afin qu'elle indique précisément, si elle entendait mettre des frais de procédure à la charge du recourant en application de l'art. 426 al. 2 CPP, quel comportement fautif et illicite avait pu se trouver en lien de causalité avec l'instruction conduite concernant l'une ou l'autre des infractions dénoncées pour lesquelles un classement avait été confirmé.

d. Statuant sur renvoi le 9 juin 2020 (ACPR/390/2020), la Chambre de céans a admis le recours du 2 juillet 2018 formé par A______, laissé les frais de la procédure cantonale de recours concernant ce dernier (CHF 1'750.-) à la charge de l'État, alloué à l'intéressé une somme de CHF 1'500.- TTC à titre de participation à ses honoraires d'avocat pour la procédure de recours et renvoyé la cause au Ministère public pour qu'il se prononce, entre autres, sur le sort des frais de la procédure et, éventuellement, l'indemnisation du prévenu, à l'issue de l'instruction.

e. Par arrêt du 24 novembre 2020 (6B_804/2020), le Tribunal fédéral a annulé cet arrêt et renvoyé la cause à l'autorité cantonale, estimant que celle-ci devait statuer – dans une décision distincte de celle que pourrait rendre le Ministère public à l'avenir à propos des faits faisant encore l'objet d'une instruction – sur le sort des frais judiciaires liés aux infractions dénoncées pour lesquelles un classement définitif avait été prononcé. La Chambre de céans était par ailleurs invitée à se prononcer ensuite sur la question des frais et dépens pour la procédure cantonale, étant précisé que, quel que soit le sort du recours cantonal de A______, des frais judiciaires liés audit recours ne pourraient être mis à sa charge, une indemnité de CHF 1'500.- lui étant par ailleurs en tous les cas acquise.

f. Par arrêt ACPR/394/2021 du 11 juin 2021, la Chambre de céans a partiellement admis le recours du 2 juillet 2018; annulé l'ordonnance querellée en tant que les prétentions de A______ étaient rejetées et les frais de la procédure mis à sa charge (ch. 2 et 3); alloué à l'intéressé, à la charge de l'État, une somme de CHF 77'400.85 TTC à titre de participation à ses frais d'avocat pour la procédure préliminaire et CHF 5'086.- TTC à titre de participation à ses frais d'avocat pour la procédure de recours ; l'a condamné aux 20% des frais de la procédure préliminaire, soit CHF 876.80, aux 3/16èmes des frais de CHF 7'000.- résultant de la procédure de recours relative à l'arrêt ACPR/50/2020 du 20 janvier 2020 (soit CHF 1'312.50), et aux ¾ des frais de la procédure de recours relative à l'arrêt ACPR/394/2021 du 11 juin 2021 (CHF 1'500.-), soit CHF 2'812.50 au total; compensé à due concurrence la charge des frais de la procédure avec l'indemnité de défense accordée pour celle-ci.

Ce faisant, la Chambre de céans a examiné, pour chaque complexe de fait allégué par les parties plaignantes, si A______ avait, de manière illicite ou fautive, provoqué l'ouverture de la procédure, ou rendu plus difficile la conduite de celle-ci (art. 426 et 430 CPP). Elle en a tiré le constat d'une violation de ses devoirs d'administrateur/mandant par A______, notamment en ce qui concernait le remboursement anticipé d'un prêt par C______ COMMODITIES SA (consid. 4.5), des retraits et paiements non documentés (consid. 4.6), la conclusion d'un mandat avec C______ COMMODITIES SA alors qu'il s'était engagé, du temps où il en était administrateur, à effectuer gratuitement les tâches concernées (consid. 4.6) et l'absence de document justifiant ensuite les sommes facturées (consid. 4.6), carences qui avaient suscité ou alimenté les soupçons de gestion déloyale formulés contre lui.

La proportion des frais de la procédure préliminaire liés à ces deux complexes de fait pouvait être estimée à 20%; une autre part de 20% correspondait à des agissements pour lesquels le classement avait été annulé et la procédure renvoyée au Ministère public; le solde de 60% était laissé à la charge de l'État, les agissements de A______ dénoncés en lien avec celui-ci ne pouvant soit pas être considérés comme illicites (cf. consid. 4.2), soit, bien que problématiques, ayant été avalisés, à tout le moins tacitement, par B______, à l'initiative duquel la procédure pénale avait été ouverte et qui ne pouvait ignorer l'inanité de ses accusations.

Conformément à la jurisprudence, cette répartition a été appliquée à l'indemnité due à A______ pour ses frais d'avocat afférant à la procédure préliminaire, soit l'allocation d'un montant de CHF 77'400.85 sur un total admis de CHF 129'001.45 TTC (60% de CHF 129'001.45).

g. Par arrêt du 16 novembre 2022 (6B_853/2021), le Tribunal fédéral a partiellement admis le recours formé par A______ contre cet arrêt et renvoyé la cause à l'autorité cantonale pour nouvelle décision.

En effet, si la Chambre de céans avait bien distingué chaque complexe de fait, conformément aux injonctions du Tribunal fédéral, elle n'avait pas conduit son raisonnement du point de vue de la partie plaignante, en l'occurrence de B______, contrairement aux considérants contraignants de l'arrêt de renvoi du 19 mai 2020.

Par ailleurs, en mettant à la charge de A______ une partie des frais de la procédure de recours, la Chambre de céans s'était écartée de manière inadmissible de l'arrêt de renvoi du 24 novembre 2020 (6B_804/2020). En effet, comme le Tribunal fédéral l'y avait précisé, des frais judiciaires liés au recours ne pouvaient être mis à la charge du recourant et ce, quelle qu'en fût l'issue – une indemnité de CHF 1'500.- lui étant dans tous les cas acquise –, puisque dans son arrêt du 9 juin 2020 (ACPR/390/2020), la Chambre de céans les avait laissés à la charge de l'État (interdiction de la reformatio in pejus).

S'agissant de l'indemnité due à A______ à titre de participation à ses frais d'avocat pour la procédure de recours cantonale, il appartiendrait à l'autorité cantonale de statuer sur le sort de celle-ci, en déterminant précisément pour chaque procédure de recours le montant de ladite indemnité, étant précisé qu'en raison de l'interdiction de la reformatio in pejus, cette indemnité ne pourrait être inférieure à CHF 1'500.- pour la procédure de recours ayant conduit à l'arrêt ACPR/390/2020 et que l'indemnité totale due pour l'ensemble de la procédure de recours cantonale ne pourrait être inférieure à la somme de CHF 5'086.- allouée dans l'arrêt ACPR/394/2021.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. A______, fondateur de C______ COMMODITIES SA, active notamment dans le ______, en a été administrateur président, avec signature collective à deux, de 2000 jusqu'au 2 juillet 2013, aux côtés notamment de D______ – qui a démissionné à cette date –, puis aux côtés de E______ jusqu'au 16 juillet 2014.

À partir de 2009, C______ COMMODITIES SA a rencontré des difficultés financières.

Dans le cadre de sa restructuration, une société holding destinée à détenir le capital-actions de C______ COMMODITIES SA, C______ GROUP SA, a été constituée en 2011, dont A______ a été administrateur président, avec signature collective à deux, jusqu'au 14 mars 2014, ceci notamment aux côtés d'un des investisseurs qu'il avait trouvé, B______, administrateur du 26 mars 2012 au 26 juin 2013, puis dès le 14 mai 2014.

b. Le 26 septembre 2014, B______ – qui avait investi dans C______ GROUP SA par le biais d'une société offshore F______, dont il était ayant droit économique avec A______, et estimait avoir été, dans ce cadre, induit en erreur sur différents points par son associé, lequel avait selon lui mésusé des fonds, inscrits dans les livres de la société sous le libellé "prêts" – a déposé plainte pénale, entre autres contre A______, pour gestion déloyale, escroquerie, abus de confiance et appropriation illégitime, voire, en cas de faillite, banqueroute frauduleuse, gestion fautive et avantages accordés à certains créanciers.

Deux complexes de fait étaient notamment dénoncés: le remboursement anticipé, en juin 2013, d'un prêt accordé à C______ COMMODITIES SA par la banque G______, en garantie duquel étaient nantis les avoirs personnels de A______ (n. 120ss de la plainte) et la mise à la charge de C______ COMMODITIES SA, par A______, de frais personnels ainsi que l'obtention de remboursements ou de paiements indus entre 2012 et 2014.

Le remboursement anticipé du prêt accordé par G______ à C______ COMMODITIES SA

c. Les faits à l'origine du remboursement anticipé du prêt accordé par G______ à C______ COMMODITIES SA ressortant de la plainte pénale de B______ et des pièces produites à l'appui de celle-ci (pces 71 à 75), pour l'essentiel confirmés par A______ dans un courrier de détermination du 30 janvier 2018 (PP 31'301ss), sont les suivants:

c.a. En 2009, C______ COMMODITIES SA a conclu un contrat de livraison de ______ avec une société H______. Le paiement des traites était garanti par l'assureur I______, le contrat avec celui-ci désignant certaines banques, dont G______, comme "loss payee" (i.e. bénéficiaire; cf. PP 31'301 et 31'316). H______ a fait faillite, mais I______ a refusé ses prestations, contraignant C______ COMMODITIES SA à une longue procédure judiciaire. En mai 2013, les tribunaux new-yorkais ont rendu un premier jugement favorable à C______ COMMODITIES SA, lui allouant une somme de USD 11,6 millions. I______ a toutefois interjeté appel, un dénouement étant alors attendu dans le courant de l'année 2014 (cf. PP 10'067).

Ce litige, entre autres, avait entraîné pour C______ COMMODITIES SA un manque de liquidités et des difficultés à obtenir des banques des lignes de crédit. Pour lui permettre de poursuivre ses activités, des négociations avaient été entamées avec G______, dans le cadre desquelles A______ avait accepté de fournir une garantie personnelle à hauteur de USD 3 millions (cf. PP 50'134).

c.b. Par convention signée avec G______ le 21 décembre 2011, C______ COMMODITIES SA a reconnu devoir à G______ USD 5'864'517.- en capital, qu'elle s'est engagée à rembourser par mensualités de USD 250'000.-, la dernière tranche de USD 114'517.- devant être versée le 30 novembre 2013 (PP 10'542).

c.c. Fin 2012, C______ COMMODITIES SA a rencontré un problème avec une livraison en Mauritanie. Son destinataire n'ayant pas payé l'intégralité de la marchandise, la cargaison a été revendue à C______ Sénégal pour un prix de l'ordre de EUR 2'618'990.- (cf. attestation de l'avocat de C______ COMMODITIES SA, PP 31'321).

c.d. Le conseil d'administration de C______ GROUP SA, alors composé de A______, J______ et B______, s'est réuni le 21 mai 2013. Assistaient également à la séance, entre autres, K______ – qui intégrera brièvement le conseil d'administration de la société du 18 juin au 2 juillet 2013 –, L______ – qui avait accepté de devenir membre du conseil d'administration, mais qui ne sera finalement jamais inscrit à ce titre au registre du commerce – et MQ______, avocat de C______ GROUP SA, en qualité de secrétaire hors conseil.

Lors de cette séance, B______ a rappelé que C______ COMMODITIES SA cessait son activité et a exprimé le désir de sauver ce qui pouvait l'être du fonds de commerce de la société pour préserver les intérêts des actionnaires. Il a été décidé de couper au maximum les frais – tout son personnel a été licencié, à l'exception d'un demi-poste de comptable et d'un demi-poste de secrétariat –, d'engager des discussions avec les créanciers aux fins d'obtenir des remises de dettes et de trouver les moyens de financer la continuation des procès en cours.

A______ a ensuite informé le conseil d'administration de C______ GROUP SA que lui-même et D______ – avec lequel il administrait seul C______ COMMODITIES SA depuis le 16 avril 2013 – avaient négocié pour faire en sorte que les paiements provenant de la vente de la cargaison à C______ Sénégal soient dévolus en priorité à G______. B______ a alors relevé qu'il convenait de conserver suffisamment d'argent pour les charges courantes, dont l'absence de paiement pourrait entraîner la faillite de C______ COMMODITIES SA. Après que l'état de la trésorerie de C______ COMMODITIES SA a été présenté, A______ a insisté pour que le conseil d'administration confirme formellement que l'accord pris avec G______ serait respecté. Lui-même, J______ et L______ ont indiqué qu'ils n'avaient pas d'objection à cela; K______, n'ayant pas de connaissance directe de cet accord, ne s'est pas prononcé; B______ s'y est opposé, estimant qu'il ne s'agissait pas d'une bonne idée (PP 10'564).

c.e. Le 14 juin 2013, le compte de C______ COMMODITIES SA auprès de G______ a été débité de USD 1'883'118,30, soldant ainsi la dette (PP 10'550).

c.f. Le 13 juillet 2013, A______ et E______ ont avisé le juge de l'état de surendettement de C______ COMMODITIES SA. Les litiges auxquels elle faisait face avaient en effet provoqué une crise de liquidités – sa trésorerie s'élevait alors à USD 450'000.-, même si elle s'attendait à recevoir USD 400'000.- à la fin de l'été –, ses passifs dépassant alors ses actifs de CHF 7'765'230.-.

c.g. En novembre 2013, I______ a finalement accepté de payer un montant total de USD 11'657'761.-. C______ COMMODITIES SA a reçu dans ce cadre USD 3'834'272.- (PP 31'331), une partie de la somme totale restant bloquée en raison d'autres litiges, étant précisé que la répartition a été faite directement par les avocats américains chargés du dossier (PP 50'139).

c.h. Après avoir fait porter l'instruction sur d'autres pans de la plainte – lesquels ne font pas l'objet du renvoi du Tribunal fédéral – le Ministère public a abordé la question du remboursement de ce prêt lors de l'audience du 15 avril 2016.

À l'occasion de celle-ci, D______ a expliqué que le remboursement anticipé du prêt avait suscité des tensions et des discussions au sein du conseil d'administration de C______ COMMODITIES SA, car il mettait en péril les liquidités de la société, favorisait un créancier au détriment des autres et n'était, à ses yeux, pas justifié. Sur les motifs de ce remboursement, il pensait que A______ craignait d'être appelé comme caution (PP 50'095).

À l'appui de ses déclarations, il a produit un courriel du 2 mai 2013 adressé au comptable de la société, dans lequel il exprimait son opposition à l'opération, estimant que verser les fonds directement sur un compte auprès de G______ ne permettait pas de garantir qu'ils resteraient librement utilisables, en particulier si la situation de C______ COMMODITIES SA s'aggravait davantage (PP 50'112).

c.i. La faillite de C______ COMMODITIES SA a été prononcée le 29 juin 2016.

c.j. Le 28 juillet 2017, le Ministère public a notifié aux parties un premier avis de prochaine clôture, estimant que les éléments collectés n'avaient pas permis d’avérer les reproches adressés à A______, et qu'en ce qui concernait particulièrement le remboursement de manière anticipée et indue du prêt accordé par G______, le reproche n’avait "pas plus pu être étayé" et semblait avoir été l’objet d’une décision du conseil d’administration.

c.k. Le 31 octobre 2017, l'administrateur de la faillite de C______ COMMODITIES SA a déposé plainte contre inconnu pour gestion déloyale, faux dans les titres, diminution effective de l'actif au préjudice des créanciers et avantages accordés à certains créanciers, en mettant à son tour en cause le remboursement anticipé du prêt à G______ (PP 31'117).

c.l. Dans ses déterminations écrites du 30 janvier 2018, A______ a réfuté, sur 11 pages, toute infraction en lien avec ce prêt, estimant qu'il n'avait causé aucun préjudice à C______ COMMODITIES SA ou à ses créanciers puisque, si les mensualités avaient cessé d'être acquittées après l'avis de surendettement, G______ aurait néanmoins, en novembre 2013, directement reçu de I______, en sa qualité de loss payee, l'intégralité des sommes qui lui étaient dues (PP 31'311).

Frais remboursés à A______

d. Dans sa plainte pénale, B______ a affirmé que certains frais de A______ assumés par C______ COMMODITIES SA entre 2012 et 2013 découlaient d'activités privées de l'intéressé, la société ne faisant alors plus rien que régler ses litiges (n. 57 à 64). Il en allait ainsi des dépenses de USD 52'013.55 effectuées entre le 25 juin 2010 et le 16 mai 2013, selon liste annexée à la plainte (pces 27 à 38), qui n'avaient pas été justifiées et que A______ s'était remboursées, alors qu'il était seul membre du conseil d'administration avec E______, en réduisant d'un même montant le compte 1______ "adv. to employee Mr A______" de C______ COMMODITIES SA, selon pièce également annexée à la plainte.

B______ a également reproché à A______ et E______ d'avoir prélevé, entre septembre 2013 et juillet 2014, alors que C______ COMMODITIES SA souffrait d'évidentes difficultés financières, des montants substantiels (CHF 128'786.24 et USD 147'588.-), cela en grande partie à l'insu du curateur qui avait été nommé en novembre 2013 par le juge, MM______, et alors que ces montants ne correspondaient en aucun cas à une activité qu'ils auraient réellement déployée (n. 65 à 71 et 73-74).

A______ avait par ailleurs annulé des dettes qu'il avait envers la société à hauteur de CHF 43'846.87 (n. 72) et dépensé des sommes importantes en frais de voyage et de carte de crédit (CHF 92'751.90, cf. n. 77).

Il avait enfin prélevé, entre janvier et juillet 2014, CHF 17'861.70 et USD 16'515.50 en faveur de son secrétaire et chauffeur (n. 79).

Il ressort notamment des pièces produites à l'appui de sa plainte les éléments suivants:

d.a. A______ était lié à C______ COMMODITIES SA par un contrat de travail.

Lors de la séance du conseil d'administration de C______ GROUP SA du 21 mai 2013, il a été décidé de résilier ce contrat pour fin août 2013. La possibilité que A______ agisse ultérieurement comme mandataire rémunéré à des conditions à définir pour l'exécution de missions spécifiques a néanmoins été évoquée. A______ l'a acceptée, précisant qu'il était disposé à accomplir les mandats qui lui seraient confiés par les conseils d'administration de C______ GROUP SA ou C______ COMMODITIES SA, sans rémunération et moyennant le seul remboursement de ses frais, à deux conditions qui ont été acceptées (PP 10'563 et 10'112).

d.b. Le 2 juillet 2013, A______ est devenu seul administrateur de C______ COMMODITIES SA avec E______.

d.c. Le 12 juillet 2013, veille de l'avis de surendettement au juge, A______ a fait virer, au débit du compte de C______ COMMODITIES SA, une somme de CHF 16'200.- en faveur de E______ au titre de "provison pour honoraires" (PP 10'299).

Par requête du 14 août 2013, C______ COMMODITIES SA a sollicité l'ajournement de sa faillite pour une durée de six mois, à fin février 2014. Elle escomptait en effet une issue favorable de son litige avec I______. Par ailleurs, une provision de USD 12 millions avait été inscrite à son bilan, en lien avec une somme qui lui était réclamée par la société étatique chinoise N______. Les parties étaient toutefois en pourparlers transactionnels en vue de solder leurs comptes par un versement de USD 4 millions de C______ COMMODITIES SA à N______. Le but de l'ajournement était de permettre à la société de mener à terme ses opérations de recouvrement envers certains débiteurs de manière à générer des liquidités, l'ampleur des sommes reçues devant déterminer la suite, le critère de base étant de savoir si le surendettement pourrait être éliminé intégralement ou uniquement partiellement (PP 10'069).

d.d. Le 25 février 2014, C______ COMMODITIES SA, appuyée par son curateur, a sollicité la prolongation de l'ajournement de la faillite jusqu'au 30 septembre 2014, requête à laquelle le Tribunal de première instance a fait droit par jugement du 24 juin 2014.

d.e. Entretemps, le 1er septembre 2013, A______ a conclu avec C______ COMMODITIES SA, représentée par E______, une convention de collaboration, d'une durée de six mois renouvelable, prévoyant une rémunération horaire de CHF 250.-, hors frais, CHF 20'000.- devant lui être payés d'avance (PP 10'248).

Sur la base de ce contrat, A______ a perçu de C______ COMMODITIES SA les sommes totales de CHF 128'786,24 et USD 147'588.- (PP 10'254, 10'257, 10'260 et 10'262), étant précisé que la plupart de ses factures ne sont pas détaillées (cf. 10'363-10'365).

Dans un courrier à Me M______ du 13 décembre 2013, Me Q______ a expliqué que A______, en tant qu'administrateur et principal répondant des interlocuteurs de la société, était actif dans le cadre du litige avec N______, qui avait nécessité et nécessiterait encore des déplacements en Chine, correspondant à des frais de CHF 20'000.- et EUR 5'000.- (PP 10'252).

Lors d'une séance du conseil d'administration de C______ GROUP SA du 10 février 2014, il a par ailleurs été décidé de nommer le secrétaire/chauffeur de A______ comme représentant ad hoc de C______ GROUP SA aux assemblées générales de C______ COMMODITIES SA, avec mandat et procuration d'approuver les comptes 2012 et donner décharge à son conseil d'administration pour sa gestion (PP 10'353-10'354).

d.f. En estimant le temps que l'intéressé passerait sur les dossiers, A______ a par ailleurs suggéré à E______, le 21 mai 2014, de se verser à l'avance son salaire de mai à décembre 2014, soit CHF 3'000.- par mois (PP 40'134), étant précisé que E______ a été licencié durant l'été 2014 et n'a jamais remboursé le trop perçu (PP 40'015ss).

d.g. Le 7 juillet 2014, Me M______ a écrit à Me Q______, qui lui avait communiqué divers documents au sujet de l'évolution de la situation de C______ COMMODITIES SA, en mettant en cause l'ampleur des dépenses consenties entre le 27 février et le 4 juillet 2014 (CHF  977'677.43) et sollicitant des explications détaillées à ce propos (pce 45).

d.h. Le 1er septembre 2014, C______ COMMODITIES SA a encaissé une somme de USD 2'397'412.- pour solde de tout compte, issue du paiement de I______ de 2013, dans le cadre des négociations menées "grâce à l'aide d'avocats [de] R______ [Royaume-Uni] et sous la férule de O______, arbitre P______, à l'époque mandaté comme consultant externe par la société" (PP 10'370).

Me Q______ a par ailleurs indiqué, dans la requête de sursis concordataire, subsidiairement d'ajournement de faillite, qu'il a déposée le 2 septembre 2014, que, par son intermédiaire, la négociation s'était poursuivie avec N______. Celle-ci avait néanmoins été retardée par le délai dans lequel le Tribunal de première instance s'était prononcé sur la demande de prolongation de l'ajournement, et N______ venait de refuser l'offre qui lui avait été faite, demandant à être informée de la suite de la procédure, notamment si un concordat devait être proposé (PP 10'370).

La société n'avait alors plus d'autre activité que celles visant à récupérer ses créances et apurer son passif (PP 10'382).

d.i. Entendu par le Ministère public le 15 avril 2016, D______ a confirmé les allégations de B______, selon lesquelles étaient apparues toutes sortes de dépenses en faveur de tiers ou d'organismes ne correspondant clairement pas à l'activité de l'entreprise (PP 50'094ss).

À l'appui de ses déclarations, il a produit un courriel adressé en mai 2013 au comptable de C______ COMMODITIES SA, dans lequel il s'interrogeait déjà sur l'ampleur et la justification de certains frais et démarches, et rappelait que A______, employé de C______ COMMODITIES SA, et pas de C______ GROUP SA, avait été averti à de très nombreuses reprises que ses "autres activités" ne concernaient pas C______ COMMODITIES SA, sauf s'il en avait expressément le mandat, et qu'il ne pouvait donc agir pour toutes autres sociétés/intérêts pendant ses heures/jours de travail (PP 50'112).

d.j. Entendu par la police le 15 décembre 2014, M______ a pour sa part indiqué avoir constaté, lorsqu'il avait repris ses fonctions de curateur à la suite de la prolongation de l'ajournement de la faillite, en juin 2014, que l'évolution des passifs durant la période durant laquelle son mandat avait pris fin et n'avait pas encore été renouvelé par le tribunal, soit entre le 28 février et le 24 juin 2014, avait été problématique. En effet, pendant que E______ et A______ étaient aux commandes de la société, ils avaient dépensé près de CHF 1 million sans rien encaisser (PP 50'004). Or, selon lui, les honoraires allégués par A______ n'étaient pas liés à des activités pour C______ COMMODITIES SA, l'intéressé ayant joué sur le poste dévolu aux frais de mandataire et d'arbitrage, pour lesquels il savait qu'il existait un budget, alors même que le principal acteur des encaissements était O______ (PP 40'015ss). Les pièces produites par A______ ne permettaient pas de contrôler la véracité des heures facturées, pas plus que la nature de l'activité déployée, et aucun résultat de celle-ci, notamment aucun encaissement, n'était constatable (PP 50'004). Il avait donc fini par rejeter toutes les factures émises durant la période en question, estimant que ces dépenses n'étaient pas justifiées, dès lors qu'il n'avait pas de précision sur la nature exacte de l'activité à rétribuer et que celle-ci n'avait donné aucun résultat (PP 50'006).

Finalement, il avait décidé de faire figurer dans les comptes, d'entente avec l'avocat de C______ COMMODITIES SA, une prétention en remboursement de
CHF 172'526.- à l'encontre de A______ pour des honoraires perçus à tort (PP 40'015ss), ainsi qu'une créance contre E______ (PP 50'005).

d.k. C______ COMMODITIES SA s'est à son tour constituée partie plaignante le 16 mai 2016 (PP 30'439).

Entendu le 15 juin 2016, O______, alors administrateur unique de C______ COMMODITIES SA, a expliqué que le 4 mai 2016, son actionnaire, C______ GROUP SA, représenté par B______, avait sollicité cette constitution, ce qui avait été jugé opportun, après discussion avec Mes Q______ et M______.

L'un des points litigieux était les notes d'honoraires de A______, pendant la période d'interim du curateur, de février à juin 2014 (PP 50'129).

Lui-même avait été mandaté par C______ COMMODITIES SA, entre septembre 2013 et juin 2014, pour suivre un certain nombre de dossiers. Il était donc sur place à 100% lorsqu'aurait été déployée l'activité justifiant les honoraires de A______. Ce qu'il pouvait dire à ce propos était qu'il rapportait son activité et ses résultats à ce dernier, qui prenait les décisions pour le compte de la société. A______ était également présent, sauf quand il était en voyage. En tant que mandataire, lui-même ne savait toutefois pas ce que le mis en cause faisait. Il ne pouvait donc pas se prononcer sur les notes d'honoraires que l'intéressé avait établies, faute de détenir les éléments nécessaires. De ce qu'il avait compris, le curateur ne soutenait pas que A______ n'avait pas déployé d'activité, ni que des honoraires n'étaient pas dus, mais il n'était pas d'accord avec leur montant, car les justificatifs manquaient ou étaient jugés insatisfaisants (PP 50'132).

Durant cette même période, E______ était passé environ toutes les deux semaines pour saisir des pièces de la comptabilité. Il restait une heure ou deux, voire la demi journée.

d.l. Dans son avis de prochaine clôture du 28 juillet 2017, le Ministère public a estimé, en ce qui concernait le grief d'appropriation d’actifs (reproches 3 et 6) et nonobstant les critiques du curateur, que nombre de décisions semblaient avoir été prises par le conseil d’administration. La contestation d’une compensation comptable trouvait des remèdes en droit des sociétés puis en procédure civile, mais n’avérait pas en soi le caractère pénalement répréhensible des écritures. L’activité déployée par A______ en faveur d’un règlement de la dette N______ avait par ailleurs été confirmée par plusieurs témoins, dont O______.

C. Dans son ordonnance de classement querellée, le Ministère public a considéré que A______ avait justifié de manière convaincante le remboursement anticipé du prêt G______ et que les actes d’instruction complémentaires réclamés ne permettraient très vraisemblablement pas d'étayer les accusations des plaignants.

Par ailleurs, s'agissant des autres griefs formulés par B______, rien de nouveau n’avait été découvert ou apporté à charge depuis l’avis de prochaine clôture du 28 juillet 2017, à l’argumentation duquel il y avait lieu de se référer.

Il convenait néanmoins de mettre les frais de la procédure à charge du prévenu et de rejeter sa demande d'indemnité. En effet, "en administrant et en conduisant les affaires du groupe C______ sans la rigueur organisationnelle et documentaire requise, [il avait] contrevenu à des normes de droit civil et commercial relatives notamment à la bonne administration et à la tenue de la comptabilité, et à des normes administratives relatives aux obligations de diligence des intermédiaires financiers et à la clarification et à la documentation de l’arrière-plan économique. De la sorte [il avait] fautivement créé une situation dangereuse, soit les conditions à l’ouverture d’une instruction par le Ministère public une fois celui-ci saisi des plaintes".

D. Le recours interjeté par B______ à l'encontre de cette décision a été déclaré irrecevable, concernant d'éventuels actes de gestion déloyale commis au préjudice de C______ COMMODITIES SA (soit notamment le remboursement anticipé du prêt accordé par G______ et les frais remboursés à A______), faute de qualité pour agir.

Il en a été de même en ce qui concerne les infractions commises dans la poursuite pour dettes et la faillite, la créance de B______ ayant a priori été écartée de l'état de collocation.

Le recours de C______ COMMODITIES SA n'a quant à lui pas porté sur les points précités.

 

 

EN DROIT :

1.             Un arrêt de renvoi du Tribunal fédéral lie l'autorité cantonale, laquelle voit sa cognition limitée par les motifs dudit arrêt, en ce sens qu'elle est liée par ce qui a déjà été définitivement tranché par le Tribunal fédéral (ATF 104 IV 276 consid. 3b et 103 IV 73 consid. 1) et par les constatations de fait qui n'ont pas été attaquées devant lui ou l'ont été sans succès (ATF 131 III 91 consid. 5.2).

Il n'est donc pas possible, dans la nouvelle décision, de se fonder sur des considérations que le Tribunal fédéral a expressément ou implicitement rejetées dans l'arrêt de renvoi. Inversement, la nouvelle décision judiciaire peut être justifiée par des considérations qui n'ont pas été mentionnées dans l'arrêt de renvoi ou sur lesquelles le Tribunal fédéral ne s'est pas encore prononcé. La nouvelle décision peut également se fonder sur un motif supplémentaire non invoqué dans la décision précédente de l'autorité cantonale (ATF 112 Ia 353 consid. 3c, bb; arrêt du Tribunal fédéral 5A_11/2013 du 28 mars 2013 consid. 3.1).

2.             2.1. Demeurent litigieuses à ce stade de la procédure la mise à charge de A______ des frais de la procédure en lien avec deux des complexes de faits classés, soit le remboursement, peu avant l'annonce du surendettement de C______ COMMODITIES SA au juge, d'un prêt qui n'était pas encore exigible, et la prise en charge, par cette société, d'un certain nombre de dépenses non clairement justifiés, tant dans leur nature que leur ampleur.

2.2. En l'espèce, à bien le comprendre, le Tribunal fédéral a, dans son arrêt du 19 mai 2020, demandé à la Chambre de céans de ne pas examiner si un observateur neutre pouvait considérer que le recourant avait commis des actes illicites dans la gestion de C______ COMMODITIES SA, mais si B______ avait des motifs suffisants de penser que l'intéressé s'était rendu coupable d'infractions pénales dans ce cadre (et avait présenté au Ministère public des éléments étayant ces accusations). Le Tribunal fédéral a lié cette injonction au fait que, dans son arrêt attaqué, la Chambre de céans avait retenu que B______ avait formulé des plaintes infondées.

Dans son arrêt du 20 janvier 2020, la Chambre de céans avait effectivement constaté que certaines des affirmations de B______ concernant les circonstances entourant l'acquisition des titres C______ (consid. 4) et les "prêts F______" (consid. 5) étaient contredites par des éléments mis en lumière dans le cadre des enquêtes. La question d'éventuelles infractions pénales commises en lien avec le remboursement anticipé du prêt accordé par G______ et les dépenses effectuées par le recourant n'avait en revanche pas été examinée. La qualité de partie plaignante et, partant, celle pour contester le classement de ces points, ayant été déniée à B______, la Chambre de céans ne s'est pas interrogée sur le bien-fondé de ses accusations sur ces points, lesquels n'étaient donc pas concernés par les développements figurant aux consid. 4 et 5.

Dans son arrêt du 16 novembre 2022, le Tribunal fédéral semble néanmoins lui en faire reproche.

Il y a dès lors lieu d'examiner si B______ avait, au moment où il a dénoncé les agissements de A______ en lien avec ces deux complexes de fait, des raisons suffisantes de soupçonner l'existence d'infractions pénales. Il convient également d'établir si le Ministère public avait, au vu des pièces qui lui étaient soumises, des raisons suffisantes d'ouvrir une instruction sur ces points.

2.2.1. B______ s'est entre autres référé, dans sa plainte, à l'art. 158 ch. 1 CP.

L'on peut dès lors considérer que, de son point de vue, l'affectation de la totalité de la somme due par C______ Sénégal à C______ COMMODITIES SA au remboursement d'un prêt non exigible, alors que la société manquait de liquidités pour faire face à ses autres obligations, ne servait pas les intérêts de celle-ci. Il s'y est d'ailleurs opposé lors du conseil d'administration de C______ GROUP SA du 21 mai 2013.

Cette opinion était partagée par D______, qui était seul administrateur de C______ COMMODITIES SA aux côtés de A______ au moment où cette opération a été effectuée, et il est vraisemblable que B______ ait eu connaissance, à tout le moins lorsqu'il a rejoint le conseil d'administration de C______ GROUP SA en mai 2014 – qu'il avait quitté en juin 2013 –, de ce que le premier cité s'était aussi opposé à ce remboursement (cf. supra B.c.h).

Le déroulement des faits tels qu'exposé dès le début, dans sa plainte, par B______, était étayé par des pièces. Il n'a au demeurant pas été fondamentalement remis en cause par A______ dans ses observations du 30 janvier 2018. L'intéressé a en effet uniquement estimé n'avoir causé aucun préjudice à C______ COMMODITIES SA ou à ses créanciers, puisque l'assureur avait finalement versé la somme due en novembre 2013.

Or, ce dernier élément est sans pertinence du point de vue de l'art. 158 CP, dans la mesure où un préjudice temporaire suffit (cf. ATF 121 IV 104 consid. 2c p. 107) et où, au moment où la décision de remboursement a été prise, il n'existait aucune certitude quant à la date d'un éventuel paiement de l'assureur I______.

Il s'ensuit qu'au moment du dépôt de sa plainte, en septembre 2014, B______ avait des motifs suffisants de soupçonner A______ de gestion déloyale.

Le Ministère public a quant à lui rappelé, dans son ordonnance querellée, qu'après avoir été saisi des plaintes, il disposait d'éléments suffisants pour ouvrir une instruction.

Partant, la mise à charge du prévenu des frais de la procédure préliminaire y relatifs ne souffre d'aucune critique et doit être confirmée.

2.2.2. B______ a, dans sa plainte, également critiqué le bien-fondé d'un certain nombre de dépenses mises à la charge de C______ COMMODITIES SA par A______.

Il a notamment produit à l'appui de ses accusations des extraits de la comptabilité de la société reflétant les dépenses alléguées, diverses factures prises en charges par C______ COMMODITIES SA, ainsi qu'un courrier de Me M______ critiquant la gestion opérée par les deux administrateurs de la société.

Au préalable, en mai 2013, B______ avait assisté à la séance du conseil d'administration de C______ GROUP SA, lors de laquelle la cessation d'activité de C______ COMMODITIES SA avait été constatée et où il avait été décidé de licencier la totalité de son personnel, à l'exception d'un demi-poste de secrétariat et d'un demi-poste de comptable, afin de préserver les finances de la société. Il était dès lors légitimé, lorsqu'il a à nouveau rejoint le conseil d'administration de C______ GROUP SA en mai 2014, après une absence de près d'une année, à s'interroger sur l'ampleur des dépenses effectuées dans l'intervalle par le conseil d'administration de C______ COMMODITIES SA, et sur leur affectation.

Certaines dépenses ou factures qu'il a produites ne peuvent, en effet, qu'interpeller, dans le contexte du surendettement de la société, telles celles liées à la prise en charge de frais de déménagement, en 2014, du chauffeur/secrétaire de A______ (cf. pce 35, p. 3), dont il n'apparaît pas qu'il aurait été employé de C______ COMMODITIES SA, ou des frais d'hôtel en Chine pour une période ininterrompue du 12 septembre au 12 décembre 2013 (pce 40).

D'autres sont contraires aux engagements pris par A______, lors de la séance du conseil d'administration de C______ GROUP SA à laquelle B______ a assisté, ou ne procèdent à l'évidence pas d'une saine gestion d'une société en surendettement (rémunération de E______ pour une activité indéterminée, alors que C______ COMMODITIES SA employait déjà un comptable, qui plus est décidée à la veille de l'avis de surendettement et versée d'avance, cf. supra B.d.c; conclusion d'un contrat de mandat onéreux alors que A______ avait renoncé à cette rémunération, cf. supra B.d.a, entre autres).

Il est également vraisemblable que B______ a eu, avant septembre 2014, des contacts tant avec D______, administrateur de C______ COMMODITIES SA jusqu'en juillet 2013, qu'avec le curateur de la société, Me M______. Or, le premier a confirmé, lors de son audition, qu'étaient apparues toutes sortes de dépenses en faveur de tiers ou d'organismes ne correspondant à l'évidence pas à l'activité de l'entreprise, et le second a qualifié l'évolution du passif de la société lorsque A______ et E______ étaient seuls à prendre les décisions de "problématique".

Au vu des circonstances et faute de documents fournis par A______ pour étayer et justifier de manière précise les paiements incriminés, il faut considérer que B______ était fondé à soupçonner qu'ils puissent être constitutifs d'actes de gestion déloyale.

Le Ministère public a au demeurant confirmé, sur ce point aussi, que l'ouverture d'une instruction pénale était justifiée.

Il s'ensuit que, sous cet aspect également, l'ordonnance mettant à la charge du prévenu les frais de la procédure préliminaire étaient justifiée.

3.             L'indemnisation éventuelle du prévenu, sur la base de l'art. 429 CPP, suivant celle des frais (ATF 144 IV 207 consid. 1.8.2 p. 211), c'est à bon droit que le Ministère public a rejeté les prétentions de A______ en lien avec ces deux complexes de fait (dont la proportion de 20% au regard de la totalité des frais de la procédure n'a pas été remise en cause par le Tribunal fédéral).

Le recours sera dès lors rejeté sur ce point également, seul le montant de CHF 77'400.85 tel que fixé dans l'ACPR/394/2021 devant être alloué à l'intéressé.

4.             Dans la mesure où le Tribunal fédéral a précisé, tant dans son arrêt du 24 novembre 2020 que dans celui du 16 novembre 2022, que des frais judiciaires liés au recours ne pourraient pas être mis à la charge de A______, ils seront laissés à la charge de l'État.

5.             Il s'ensuit qu'une indemnisation est due au recourant pour ses frais d'avocat nécessaires à la défense de ses intérêts dans le cadre des différentes procédures devant la Chambre de céans.

Le Tribunal fédéral a, à cet égard, enjoint la Chambre de céans de déterminer "précisément pour chaque procédure de recours le montant de ladite indemnité".

Il n'a pas remis en cause les calculs auxquels la Chambre de céans a procédé dans l'arrêt querellé (ACPR/394/2021), alors même que la question de la mise à charge des frais de la procédure de recours était tranchée. La Chambre de céans considère que l'on peut en inférer que le premier paragraphe du considérant 4.5., qui suit celui consacré à la mise à charge des frais de première instance (qui débute par les termes "vu ce qui précède et comme la question de l'indemnisation doit être traitée après celle des frais, il ne sera pas statué sur les griefs tirés d'une violation de l'art. 429 al. 1 let. a CPP"), se rapporte uniquement aux frais d'avocat relatifs à la procédure préliminaire, et non à ceux engendrés par la procédure de recours. Dans ces conditions, rien ne s'oppose à ce que les chiffres issus des raisonnements tenus dans l'ACPR/394/2021 soient repris.

L'indemnisation des frais d'avocat du recourant pour les différentes phases de la procédure devant la Chambre de céans sera dès lors répartie de la manière suivante:

1)      L'activité d'avocat justifiée par le recours du 2 juillet 2018 a été arrêtée à 10 heures et indemnisée au tarif horaire de CHF 450.-, soit CHF 4'500.-, majorée de la TVA à 8% (CHF 144.-). Ce montant comprend celui de CHF 1'500.- alloué au recourant dans l'arrêt du 9 juin 2020 pour ses honoraires d'avocat, l'ACPR/390/2020, cette phase n'ayant engendré aucune écriture de la part du recourant.

En outre, à la suite de la jonction de son recours avec ceux de B______, C______ COMMODITIES SA en liquidation et C______ GROUP SA, le recourant a formé un certain nombre d'écritures de recours, pour lesquelles une indemnité de CHF 4'050.- TTC lui a été allouée (consid. 6.2 de l'ACPR/294/2021).

2)      Aucune activité d'avocat n'a été déployée avant que l'ACPR/390/2020 soit rendu, de sorte qu'aucune indemnité ne saurait être allouée pour cette phase.

3)      L'activité justifiée dans le cadre de l'ACPR/394/2021 a été arrêtée à 4 heures pour les observations du 22 janvier 2021 et 2 heures pour les observations complémentaires du 29 janvier 2021, soit, au tarif horaire de CHF 450.-, un montant total de 2'700.-, hors TVA, A______ ayant déménagé à l'étranger en 2019.

4)      La rédaction du présent arrêt n'a pas justifié d'activité de la part de l'avocat du recourant, de sorte que celle-ci ne donne pas lieu à indemnisation.

Il s'ensuit qu'une indemnité totale de CHF 11'394.- TTC doit être allouée au recourant pour la globalité de la procédure de recours.

Cette somme sera compensée à due concurrence avec la part de 20% des frais de la procédure préliminaire qui doivent être mise à sa charge en vertu de l'art. 426 al. 2 CPP, en lien avec les deux complexes de fait traités dans le présent arrêt, soit CHF 876.80.

* * * * *

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Admet partiellement le recours.

Annule les chiffres 2 et 3 de l'ordonnance de classement du 19 juin 2018.

Alloue à A______, à la charge de l'État, à titre de participation à ses frais d'avocat pour la procédure préliminaire, une somme de CHF 77'400,85 TTC.

Alloue à A______, à la charge de l'État, à titre de participation à ses frais d'avocat pour la procédure de recours, CHF 11'394.- TTC.

Condamne A______ aux 20% des frais de la procédure préliminaire, soit CHF 876,80.

Laisse les frais de la procédure de recours à la charge de l'État.

Compense à due concurrence les frais mis à charge de A______ avec l'indemnité de défense accordée à celui-ci.

Notifie le présent arrêt, en copie, à A______, soit pour lui son conseil, et au Ministère public.

Siégeant :

Madame Corinne CHAPPUIS BUGNON, présidente; Monsieur Christian COQUOZ et Madame Alix FRANCOTTE CONUS, juges; Madame Olivia SOBRINO, greffière.

 

La greffière :

Olivia SOBRINO

 

La présidente :

Corinne CHAPPUIS BUGNON

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).