Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision
AARP/288/2025 du 07.08.2025 sur JTCO/113/2024 ( PENAL ) , PARTIELMNT ADMIS
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||
POUVOIR JUDICIAIRE P/20158/2022 AARP/288/2025 COUR DE JUSTICE Chambre pénale d'appel et de révision Arrêt du 7 août 2025 |
Entre
A______, partie plaignante, comparant par Me B______, avocat,
et
LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,
appelants,
contre le jugement JTCO/113/2024 rendu le 30 octobre 2024 par le Tribunal correctionnel,
et
C______, domicilié ______, comparant par Me D______, avocate,
intimé.
EN FAIT :
A. a. En temps utile, A______ et le Ministère public (MP) appellent du jugement JTCO/113/2024 du 30 octobre 2024, par lequel le Tribunal correctionnel (TCO) a acquitté C______ des faits mentionnés sous chiffre 1.2.1 de l'acte d'accusation, qualifiés d'infraction à l'art. 90 al. 3 et 4 de la loi sur la circulation routière (LCR), et sous chiffres 1.7.3 et 1.7.5, qualifiés d'infraction à l'art. 95 al. 1 let. a LCR, et l'a déclaré coupable d'entrave à la circulation publique (art. 237 al. 1 du Code pénal [CP], dans sa teneur en vigueur au moment des faits), de violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires (art. 285 aCP), de violations simples, grave et fondamentale des règles de la circulation routière (art. 90 al. 1, 2, 3 et 4 LCR), de tentative d'entrave aux mesures visant à constater l'incapacité de conduire (art. 91a al. 1 LCR cum 22 al. 1 CP), d'entrave aux mesures visant à constater l'incapacité de conduire (art. 91a al. 1 LCR), de conduite en état d'incapacité de conduire pour d'autres raisons que l'alcool (art. 91 al. 2 let. b LCR), de mises à disposition d'un véhicule à un conducteur ne disposant pas du permis de conduire requis (art. 95 al. 1 let. e LCR), de conduites sans autorisation (art. 95 al. 1. let a LCR), de violation des devoirs en cas d'accident (art. 92 al. 1 LCR cum 51 al. 1 et 3 LCR) et de consommation de stupéfiants (art. 19a LStup). Le TCO l'a condamné à une peine privative de liberté de 28 mois, sous déduction de la détention avant jugement (art. 40 CP), assortie du sursis partiel, la peine ferme étant fixée à dix mois et le solde assorti d'un délai d'épreuve de quatre ans et de règles de conduite faisant interdiction à C______ de conduire tout type de véhicule à moteur ou engin motorisé et l'astreignant à un suivi thérapeutique psychosocial, axé notamment sur la gestion des émotions et l'addictologie, ainsi qu'à une assistance de probation. Cette peine a été déclarée partiellement complémentaire à celle prononcée le 16 février 2023 par le Tribunal des mineurs (TMIN) du canton de Genève (art. 49 al. 2 CP). Une amende de CHF 500.- a également été prononcée. Les conclusions civiles de A______ ont été déclarées irrecevables (art. 126 et 331 du Code de procédure pénale suisse [CPP]).
A______ entreprend partiellement ce jugement, concluant à ce que les faits du 23 janvier 2023, qualifiés par les premiers juges d'entrave à la circulation publique et de violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires, soient qualifiés de tentative de meurtre, subsidiairement de mise en danger de la vie d'autrui, et à ce que C______ soit condamné à lui verser une indemnité pour tort moral de CHF 1'500.- avec intérêts à 5% dès le 23 janvier 2023.
Le MP a modifié ses conclusions aux débats d'appel et conclut, finalement, à un verdict de mise en danger de la vie d'autrui, subsidiairement de tentative de lésion corporelle grave en lien avec ces faits et au prononcé d'une peine privative de liberté de quatre ans, à la révocation du sursis accordé le 28 mai 2022 et au prononcé d'une amende de CHF 760.- assortie d'une peine privative de liberté de substitution de sept jours.
b. Selon l'acte d'accusation du 3 septembre 2024, il est encore reproché ce qui suit à C______ :
Le 23 janvier 2023, vers 20h50, il circulait avenue Louis-Casaï, en direction du chemin Terroux à Genève. À la hauteur du numéro ______, il est entré dans le dispositif du contrôle de circulation mis en place par la police. La configuration du contrôle de police était la suivante : un premier véhicule de police immobilisé sur la voie de gauche, avec les feux de danger et le pictogramme lumineux enclenchés, précédés de trois cônes surmontés de lampes clignotantes, puis 15 mètres plus loin, un deuxième véhicule de police dont les feux de danger étaient également enclenchés.
Alors que l'Appointé E______ lui a intimé plusieurs fois de s'arrêter en criant, C______ a continué de rouler en accélérant. Après que C______ avait passé le premier véhicule de police, A______, agent de police muni d'un gilet jaune, s'est placé sur la chaussée pour l'empêcher de circuler, étant précisé qu'il l'éclairait en faisant des mouvements avec sa lampe de poche pour signaler sa présence.
C______ a appuyé un court instant sur la pédale de freins puis a fortement accéléré, alors que A______ se trouvait sur sa trajectoire, à une distance estimée entre 20 ou 25 mètres, afin de forcer son passage. Ce n'est que grâce à la réactivité salvatrice de A______, qui s'est déporté de la voie en sautant sur le côté, qu'un choc frontal a pu être évité, étant précisé que le rétroviseur du véhicule conduit par C______ a heurté la lampe que tenait le policier ainsi que la poche arrière de sa ceinture de charge.
L'acte d'accusation décrit ensuite, alternativement, ces faits comme constitutifs de tentative de meurtre voire tentative de lésions corporelles graves (infra b.a.), ou de mise en danger de la vie d'autrui (infra b.b.).
b.a. Ce faisant, soit en fonçant délibérément en direction de A______ qui se trouvait sur sa trajectoire, à quelques mètres du véhicule, muni d'une lampe de torche pour signaler sa présence, C______ a envisagé et accepté pleinement le risque de tuer l'agent de police A______, ne pouvant ignorer sa présence sur sa voie ni le fait qu'il pouvait le tuer en accélérant à vive allure dans sa direction, subsidiairement qu'il pouvait lui causer de graves lésions, étant encore précisé qu'il faisait nuit, que C______ est myope, qu'il ne portait ni lentilles de contact ni lunettes ce soir-là et qu'il était sous l'emprise de stupéfiants, comme décrit ci-après.
b.b. En agissant de la sorte, soit en fonçant délibérément en direction de A______ qui se trouvait sur sa trajectoire à quelques mètres du véhicule, muni d'une lampe de torche pour signaler sa présence, C______ a adopté un comportement particulièrement dangereux et créé un danger de mort concret et imminent pour la vie de A______, en manquant de peu de le percuter de plein fouet.
Au vu des circonstances, en particulier du fait que C______ a accéléré de nuit malgré la présence d'un agent de police sur sa trajectoire, muni d'un gilet jaune et d'une présence lumineuse, qu'il est myope et ne portait ni lentilles de contact ni lunettes, et qu'il était sous l'emprise de stupéfiants, ainsi que de ses mobiles dès lors qu'il a agi essentiellement dans le but futile d'échapper à un contrôle de police, C______ a commis ces faits avec une absence totale de scrupules et d'égards face à l'existence de tiers, et sans considération aucune pour l'agent de police.
C______ a agi intentionnellement, avec conscience et volonté dès lors qu'il savait qu'en accélérant fortement alors que A______ se trouvait sur son chemin, à quelques mètres de lui, celui-ci encourait un risque de danger de mort imminent.
c. Les premiers juges ont également retenu pour établis les faits suivants, commis à Genève, tels que décrits dans cet acte d'accusation :
Lors des faits du 23 janvier 2023, C______ a omis de respecter le signal de prescription "Interdiction d'obliquer à gauche". Dans sa fuite, il a franchi une ligne de marquage au sol, circulant en sens inverse sur l'avenue de Pailly à vive allure et conduit entre l'avenue de Pailly et le chemin des Fossés à vive allure. Il a enfin effectué une marche arrière sans précaution au chemin des Fossés, heurtant avec l'arrière droit de son véhicule le flanc gauche d'un fourgon de la police municipale qui l'avait suivi afin de procéder à son interpellation, mettant ainsi concrètement en danger les autres usagers de la route, faits constitutifs de violation grave des règles de la circulation routière (art. 90 al. 2 LCR). Il a ainsi tenté de se soustraire à un contrôle de police et, partant, aux mesures visant à constater son incapacité de conduire (art. 22 CP et 91a LCR) et a circulé alors qu'il était sous l'emprise de stupéfiants, étant précisé que l'analyse toxicologique a mis en évidence une concentration de THC de 3.6 µg/l dans son sang au moment de l'événement (art. 91 al. 2 let. b LCR). C______ a aussi violé ses devoirs en cas d'accident avec dégâts matériels, en quittant les lieux et prenant la fuite (art. 92 al. 2 LCR cum 51 al. 1 et 3 LCR).
Le 23 mars 2024, au quai de Cologny 5, alors qu'il circulait au volant d'un véhicule automobile, C______ a été arrêté par un agent de police qui se trouvait à un dispositif de contrôle. Lorsque le policier lui a demandé de se garer sur le côté afin d'approfondir les contrôles, il a fortement accéléré afin de se soustraire à ceux-ci. Ce faisant, à 01h21, à la hauteur du quai Gustave-Ador à proximité du parc des Eaux-Vives, C______ a circulé à une vitesse de 109 km/h, alors que la vitesse maximale autorisée à cet endroit était de 50 km/h, d'où un dépassement de 53 km/h (marge de sécurité de 6 km/h déduite), faits constitutifs de violation grave et fondamentale des règles de la circulation routière (art. 90 al. 3 et 4 LCR). Arrivé à un deuxième dispositif de contrôle, il a continué de circuler malgré les injonctions de s'arrêter émises par un agent de police, roulant sur le "stop-stick" et a finalement pris la fuite à pied, abandonnant son véhicule et se soustrayant ainsi à un contrôle de police et, partant, aux mesures visant à constater son incapacité de conduire (art. 91a LCR).
À quatre reprises à des dates indéterminées en 2022, C______ a mis son motocycle [de marque] F______ à disposition de G______ alors que celui-ci n'était pas titulaire du permis de conduire requis, ce que le prévenu savait ou aurait dû savoir s'il avait prêté l'attention commandée par les circonstances (art. 95 al. 1 let. e LCR).
C______ a circulé à réitérées reprises au guidon de motocycles ou au volant de voitures, alors qu'il n'était pas titulaire du permis de conduire requis (art. 95 al. 1 let. a LCR), soit en particulier le 5 juin 2022, à trois reprises entre les 20 et 21 juillet 2022, le 20 novembre 2022 (à Lausanne), du 20 janvier au 23 janvier 2023 et le 23 mars 2024.
Le 5 juin 2022, vers 16h30, à la hauteur de l'avenue Louis-Casaï, C______ a circulé au guidon de son motocycle F______ en manipulant son téléphone portable tout en maintenant la poignée des gaz avec sa main, ne vouant pas entièrement son attention à la route, puis a slalomé, à une vitesse inadaptée, entre les voitures qui circulaient dans la même direction contrevenant par-là aux art. 26 LCR (devoir de prudence), 31 LCR (maîtrise du véhicule) et 35 LCR (croisement et dépassement).
Le 20 novembre 2022, au parking H______ sis rue 1______ no. ______, à Lausanne, aux alentours de 4h00, C______, a perdu la maitrise du véhicule qu'il conduisait provoquant un heurt avec la porte d'entrée du I______, l'endommageant de la sorte et contrevenant par-là aux art. 26 LCR (devoir de prudence), 27 LCR (signaux, marques et ordres à observer) et 31 LCR (maîtrise du véhicule).
Entre le 29 mai 2022, lendemain de sa dernière condamnation, et le 23 janvier 2023, à Genève, quotidiennement consommé de la marijuana, étant précisé que la police a trouvé, le 23 janvier 2023, 1.5 grammes de marijuana sur lui et 2 grammes de marijuana à son domicile, drogue destinée à sa consommation personnelle.
Les parties ne remettent pas en cause ces verdicts de culpabilité et les faits correspondent à la description qui en est faite dans l'acte d'accusation. Il est dès lors renvoyé, pour le détail, au jugement de première instance (art. 82 al. 4 CPP).
B. Les faits encore pertinents suivants ressortent de la procédure :
a. Le 23 janvier 2023 vers 20h50 C______, au volant d'un véhicule automobile loué, a forcé le passage à l'occasion d'un contrôle de police dans le quartier de Balexert.
Une chicane avait été formée au moyen de deux véhicules sérigraphiés ; le premier se trouvait sur la voie de gauche – feux oranges et pictogrammes lumineux enclenchés – et le second, environ 15 mètres plus loin, sur la voie de droite – feux oranges enclenchés. Des cônes lumineux surmontés de lampes clignotantes complétaient le dispositif.
C______ est arrivé au volant d'un véhicule depuis l'avenue de Joli-Mont. Il a été sommé de s'arrêter une première fois par un signe de la main de l'Appointé E______, mais a continué à avancer ; le précité lui a intimé à forte et intelligible voix de s'arrêter. Suite à cette injonction, A______, policier en formation, s'est porté sur la chaussée en aval du véhicule de C______, après le deuxième véhicule de patrouille utilisé pour former la chicane. Dans un premier temps, C______ a freiné, avant d'accélérer fortement dans la direction de A______, afin de forcer le passage. Ce dernier s'est déporté sur la droite, mais la lampe qu'il tenait dans sa main, ainsi qu'une poche se trouvant à l'arrière de sa sacoche ont été touchées par la voiture.
Le véhicule conduit par C______ n'a ensuite pas observé le signal de prescription "Interdiction d'obliquer à gauche" (2.43), a franchi le marquage au sol en sens inverse et circulé sur l'avenue de Pailly en contre-sens et à vive-allure. Peu après, il a été suivi, de loin et discrètement, par une patrouille municipale. Arrivé au numéro ______ du chemin des Fossés et alors qu'il manœuvrait sans précaution pour stationner son véhicule, il a heurté le flanc gauche du fourgon de la police municipale qui venait de s'immobiliser derrière lui. C______ a alors été interpellé sans opposer de résistance ; il s'est excusé pour le heurt avec le véhicule municipal.
b. Selon C______, à l'arrivée sur le contrôle, il avait vu les lumières oranges ainsi que les cônes sur la route, raison pour laquelle il avait ralenti. Il était myope et ne voyait ainsi pas très bien de loin. Il avait aperçu un des policiers à la hauteur de sa portière. Il avait descendu sa vitre, mais le policier ne lui avait rien dit. C______ avait alors continué à avancer. C'est à ce moment que le policier avait crié : "Arrêtez-vous !". Il avait pensé à sa copine ainsi qu'au fait qu'il ne disposait d'aucun permis de conduire et avait accéléré en dépit du fait qu'un agent de police lui ordonnait de s'arrêter pour procéder à son contrôle préliminaire. Après son accélération, il avait vu un autre policier se pousser sur la droite de sa voiture.
Tout était devenu flou dans sa tête, mais il se souvenait avoir tourné à gauche en direction de Vernier. Il n'avait touché personne en quittant le contrôle de police. C'était au contraire le policier qui s'était poussé sur la droite de la chaussée qui avait donné un coup dans le rétroviseur de son véhicule en le traitant de "connard". Il avait entendu un choc entre son véhicule et l'agent de police. S'il ne s'était pas arrêté c'était de crainte de se faire "embarquer", du fait qu'il n'avait pas de permis de conduire. Il a en outre déclaré n'avoir jamais voulu "shooter" le policier, ni le toucher avec sa voiture, tout en reconnaissant avoir mis en danger "les usagers de la route" en conduisant vite et notamment "la vie d'un policier" (C-49, C-81, C-127).
Il pensait avoir circulé à 25 ou 30 km/h (C-126) au moment du choc avec le plaignant, et avoir accéléré jusqu'à 80 ou 90 km/h (C-49, C-80) par la suite.
Il a admis d'emblée l'essentiel des infractions à la LCR commises dans sa fuite.
c. A______ se trouvait derrière la deuxième voiture de police au niveau de la portière côté conducteur, dans le couloir de sécurité, soit sur la voie du bus. Il en est sorti pour se porter sur la chaussée lorsqu'il a entendu E______ crier. Il avait vu la voiture de C______ accélérer, puis freiner, avant d'accélérer à nouveau dans sa direction. Il se trouvait alors face au côté passager du véhicule, sans être à même de donner des indications précises sur la durée de la scène ou les distances. Pensant que le conducteur n'avait pas compris qu'il s'agissait d'un contrôle, il avait fait des mouvements avec sa lampe, sans croiser le regard de C______ qui avait accéléré en s'approchant de lui. Il avait alors compris que le véhicule ne s'arrêterait pas et s'était donc jeté dans le couloir de sécurité. À cet endroit, le véhicule de C______ avait touché sa lampe de poche - qu'il tenait dans sa main droite -, et son arme. A______ n'est pas parvenu à décrire plus précisément le heurt, si ce n'est qu'il n'était pas tombé. Sa lampe présentait quelques traces liées au choc ; il n'avait pas donné un coup à la voiture avec. Selon lui, s'il était resté dans la même position, le véhicule l'aurait percuté de manière plus importante.
d. C______ a présenté des excuses à A______, soulignant n'avoir jamais souhaité lui faire peur, ni mettre sa vie en danger.
C. a. La CPAR a mandaté la police afin d'établir un dossier photographique et un croquis à l'échelle des lieux où sont survenus les faits du 23 janvier 2023, comportant la position des différents véhicules ainsi que celles des policiers impliqués, notamment A______, en reconstituant si possible la chicane mise en place le soir des faits, dans des conditions atmosphériques, de circulation et de luminosité semblables, et de photographier les lieux ainsi que la disposition des véhicules. La police a également été chargée de déterminer, le cas échéant sur la base des données constructeurs, la vitesse d'accélération du véhicule conduit par C______, et, si celui-ci pouvait être localisé, de l'examiner afin de déterminer si un test de la vitesse d'accélération de ce véhicule était encore possible, le cas échéant indiquer à quelles conditions et auprès de qui, et de faire toute suggestion utile.
b. Selon le rapport du Groupe audio-visuel accident de la police routière (GAVA) du 22 [recte : 30] janvier 2025, une reconstitution a été effectuée sur place le 23 janvier 2025, soit deux ans exactement après les faits, dans les mêmes conditions de temps et d'heure ; de nombreuses photographies de cette reconstitution sont jointes au rapport. Sur cette base, et selon les informations des autres participants au contrôle, le GAVA retient que le véhicule de C______ a parcouru une distance de 14,30 mètres jusqu’au contact avec le plaignant. En l’absence de caméra ou d’autre élément factuel, il n’est pas possible de déterminer une vitesse de circulation lors du choc entre le véhicule et le matériel de dotation de A______.
Sur la base des traces relevées sur le véhicule (une trace de frottement sur la coque de rétroviseur droit et une trace d’impact puis de griffure sur les montants de portière côté droit), le GAVA conclut que lors du choc entre le véhicule et le plaignant, la position la plus vraisemblable de l’agent de police est de face, ce qui permet un frottement de l’étui de spray au poivre contre le rétroviseur. Concernant l’impact sur le montant de portière, ce dernier nécessite une tenue ferme de la lampe de poche. Il n’est toutefois pas possible de déterminer s’il s’agit d’un coup porté volontairement tel qu’évoqué dans le procès-verbal de C______.
Le GAVA souligne que le véhicule en cause peut théoriquement, lors d’une accélération optimale et maximale, passer de 0 km/h à 40 km/h en 2,1 secondes et parcourir une distance de 11,67 mètres ; seule une analyse dynamique sur banc de puissance permettrait de déterminer les capacités réelles d’accélération de la voiture. Le GAVA relève toutefois que lors de l’impact, la lampe de poche et par conséquent la main qui la tient, reçoit une partie de l’énergie de la voiture ; de ce fait, en l’absence de lésions et la lampe étant restée dans la main de A______, il semble peu probable que la voiture se trouvait à haute vitesse (40 – 60 km/h). La trajectoire suivie par celle-ci après le choc est également incompatible avec une telle vitesse.
c. Aux débats d'appel, C______ a acquiescé aux conclusions civiles de A______, qui a retiré son appel sur ce point après avoir été informé qu'il serait pris acte de cet acquiescement dans l'arrêt à venir.
Pour le surplus, il a confirmé qu'il ne contestait pas le déroulement des faits mais toute intention de mettre en danger la vie de A______.
d. Le MP persiste dans ses conclusions, telles que précisées ci-dessus.
e. Par la voix de son conseil, A______ persiste dans ses conclusions, telles que précisées ci-dessus et conclut à l'indemnisation de ses frais d'avocat à hauteur de CHF 3'051.15.
f. Par la voix de son conseil, C______ conclut à l'acquittement s'agissant de l'infraction à l'art. 285 CP, invite la CPAR à apprécier les conclusions en indemnisation au sens de l'art. 433 CPP et persiste pour le surplus dans ses conclusions en rejet des appels.
Les arguments plaidés seront discutés, dans la mesure de leur pertinence, au fil des considérants qui suivent.
D. a. C______ est né le ______ 2003, à Genève, dont il est originaire. Il est célibataire, sans enfant et vit chez sa mère avec son petit frère ; ses parents subviennent en partie à ses besoins. Il est sorti de détention au prononcé du jugement de première instance et a trouvé un emploi à temps partiel (15 heures par semaine) auprès d'une entreprise de location de voitures exploitée par un ami. Il a affirmé aux débats d'appel qu'il n'était pas amené à conduire des véhicules dans ce travail. Son salaire mensuel s'élève à CHF 812.30 (inférieur au salaire horaire minimum en vigueur à Genève).
S'il avait le projet de reprendre les études à sa sortie de prison, il n'en a toutefois pas les moyens et explique devoir travailler pour gagner sa vie.
Il est en couple avec sa petite amie depuis huit ans et il s'agit d'une relation sérieuse.
b. Selon son casier judiciaire suisse, C______ a été condamné à trois reprises :
- Le 28 mai 2022, par le Ministère public du canton de Genève, à une peine pécuniaire de 100 jours-amende de CHF 30.-, avec sursis, assorti d'un délai d'épreuve de trois ans ainsi qu'à deux amendes de respectivement CHF 300.- et CHF 600.- pour contravention à la LStup (art. 19a LStup), pour avoir laissé conduire un véhicule sans assurance responsabilité civile (art. 96 al. 2 1ère phr. et al. 3 LCR), pour avoir conduit un véhicule automobile sans le permis de conduire requis (art. 95 al. 1 let. a LCR), pour obtention frauduleuse d'un permis ou d'une autorisation pour la circulation routière (art. 97 al. 1 let. d LCR) et pour avoir circulé sans assurance responsabilité civile (art. 96 al. 2 1ère phr. LCR).
- Le 16 février 2023 par le TMIN à une peine privative de liberté de 218 jours pour vol d'usage d'un véhicule automobile (art. 94 al. 1 let. a LCR), conduite d'un véhicule automobile en état d'incapacité (art. 91 al. 2 let. b LCR), conduite d'un véhicule automobile soustrait (art. 94 al. 1 let. b LCR), conduite d'un véhicule automobile sans le permis de conduire requis (art. 95 al. 1 let. a LCR – commission répétée), délit contre la loi sur les armes (art. 33 al. 1 let. a LArm), tentative d'extorsion et de chantage par brigandage (art. 156 ch. 3 CP cum art. 22 al. 1 CP), tentative inachevée répétée de brigandage (art. 140 ch. 1 al. 1 CP cum art. 22 al. 1 CP), brigandage avec arme dangereuse (art. 140 ch. 1 al. 1 et ch. 2 CP – commission répétée), brigandage (art. 140 ch.1 al. 1 CP – commission répétée), dommage considérable à la propriété (art. 144 al. 3 CP – commission répétée) ; violation de domicile (art. 186 CP – commission répétée) ; vol par métier et en bande organisée (art. 139 ch. 2 et ch. 3, al. 2 CP – commission répétée) ; dommage à la propriété (art. 144 al. 1 CP), vol simple (art. 139 ch. 1 CP – commission répétée).
- Le 3 décembre 2023 par le Ministère public du canton de Genève, à une peine pécuniaire de 30 jours-amende à CHF 30.- le jour ainsi qu'à une amende de CHF 100.- pour violation de domicile (art. 186 CP) et consommation de stupéfiants (art. 19a ch. 1 LStup).
E. Me D______, défenseure d'office de C______, dépose un état de frais pour la procédure d'appel, facturant, sous des libellés divers, neuf heures d'activité de cheffe d'étude hors débats d'appel, lesquels ont duré 2h10.
En première instance, elle a été indemnisée pour plus de 40 heures d'activité.
EN DROIT :
1. Les appels sont recevables pour avoir été interjetés et motivés selon la forme et dans les délais prescrits (art. 398 et 399 CPP).
La Chambre n'examine que les points attaqués du jugement de première instance (art. 404 al. 1 CPP), sauf en cas de décisions illégales ou inéquitables (art. 404 al. 2 CPP), sans être liée par les motifs invoqués par les parties ni par leurs conclusions, à moins qu'elle ne statue sur une action civile (art. 391 al. 1 CPP).
À cet égard, la conclusion en acquittement formée par l'intimé aux débats d'appel apparaît a priori irrecevable, faute pour lui d'avoir formé un appel ou un appel joint. La CPAR examinera dès lors uniquement si sa condamnation pour violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires est illégale ou inéquitable au sens de l'art. 404 al. 2 CPP.
2. 2.1. Le principe in dubio pro reo, qui découle de la présomption d'innocence, garantie par l'art. 6 ch. 2 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CEDH) et, sur le plan interne, par les art. 32 al. 1 de la Constitution fédérale (Cst.) et 10 al. 3 CPP, concerne tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves au sens large (ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.1 ; ATF 127 I 28 consid. 2a).
En tant que règle sur le fardeau de la preuve, la présomption d'innocence signifie, au stade du jugement, que ce fardeau incombe à l'accusation et que le doute doit profiter au prévenu. La présomption d'innocence est violée lorsque le juge rend un verdict de culpabilité au seul motif que le prévenu n'a pas prouvé son innocence (ATF 127 I 38 consid. 2a p. 40) ou encore lorsque le juge condamne le prévenu au seul motif que sa culpabilité est plus vraisemblable que son innocence. En revanche, l'absence de doute à l'issue de l'appréciation des preuves exclut la violation de la présomption d'innocence en tant que règle sur le fardeau de la preuve (ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.3).
2.2. L'art. 111 CP réprime le comportement de celui qui tue intentionnellement une personne. Sur le plan subjectif, l'auteur doit avoir l'intention de causer par son comportement la mort d'autrui.
Il y a tentative lorsque l'auteur a réalisé tous les éléments subjectifs de l'infraction et manifesté sa décision de la commettre, alors que les éléments objectifs font, en tout ou en partie, défaut (ATF 140 IV 150 consid. 3.4 p. 152). Il y a donc tentative de meurtre, lorsque l'auteur, agissant intentionnellement, commence l'exécution de cette infraction, manifestant ainsi sa décision de la commettre, sans que le résultat ne se produise. L'équivalence des deux formes de dol – direct et éventuel – s'applique à la tentative de meurtre (ATF 122 IV 246 consid. 3a ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1177/2018 du 9 janvier 2019 consid. 1.1.3). Il n'est ainsi pas nécessaire que l'auteur ait souhaité la mort de la victime, ni que la vie de celle-ci ait été concrètement mise en danger, ni même qu'elle ait été blessée pour qu'une tentative d'homicide soit retenue dans la mesure où la condition subjective de l'infraction est remplie (arrêt du Tribunal fédéral 6B_246/2012 du 10 juillet 2012 consid. 1.2 et 1.3).
La nature de la lésion subie par la victime et sa qualification d'un point de vue objectif est sans pertinence pour juger si l'auteur s'est rendu coupable de tentative de meurtre (ATF 137 IV 113 consid. 1.4.2 p. 115 s. ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_86/2019 du 8 février 2019 consid. 2.1 ; 6B_924/2017 du 14 mars 2018 consid. 1.4.5).
2.3. Conformément à l'art. 122 CP, dans sa teneur en vigueur au moment des faits, celui qui, intentionnellement, aura blessé une personne de façon à mettre sa vie en danger (let. a), mutilé le corps d'une personne, un de ses membres ou un de ses organes importants ou causé à une personne une incapacité de travail, une infirmité ou une maladie mentale permanentes, ou défiguré une personne d’une façon grave et permanente (let. b), ou encore fait subir à une personne toute autre atteinte grave à l'intégrité corporelle ou à la santé physique ou mentale (let. c), est passible d'une peine privative de liberté de six mois à dix ans.
Les lésions corporelles graves, prévues et punies par l'art. 122 CP, constituent une infraction de résultat supposant une lésion du bien juridiquement protégé, et non une simple mise en danger. Il faut donc tout d'abord déterminer quelle est la lésion voulue (même sous la forme du dol éventuel) et obtenue (sous réserve de la tentative).
2.4.1. Aux termes de l'art. 129 CP, quiconque, sans scrupules, met autrui en danger de mort imminent est puni d'une peine privative de liberté de cinq ans au plus ou d'une peine pécuniaire.
Le danger au sens de l'art. 129 CP suppose un risque concret de lésion, c'est-à-dire un état de fait dans lequel existe, d'après le cours ordinaire des choses, la probabilité ou un certain degré de possibilité que le bien juridique soit lésé, sans toutefois qu'un degré supérieur à 50% soit exigé. Il doit en outre s'agir d'un danger de mort, et non pas seulement d'un danger pour la santé ou l'intégrité corporelle. Enfin, il faut que le danger soit imminent. La notion d'imminence n'est pas aisée à définir. Elle implique en tout cas, outre la probabilité sérieuse de la réalisation du danger concret, une composante d'immédiateté qui se caractérise moins par l'enchaînement chronologique des circonstances que par le lien de connexité direct unissant le danger et le comportement de l'auteur. L'immédiateté disparaît ou s'atténue lorsque s'interposent ou surviennent des actes ou d'autres éléments extérieurs (ATF 121 IV 67 consid. 2b/aa ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_144/2019 du 17 mai 2019 consid. 3.1).
Un acte est commis sans scrupule au sens de l'art. 129 CP lorsque, compte tenu des moyens utilisés, des mobiles de l'auteur et des autres circonstances, parmi lesquelles figure l'état de l'auteur, il apparaît comme contraire aux principes généralement admis des bonnes mœurs et de la morale. La mise en danger doit léser gravement le sentiment moral. Il faut en quelque sorte qu'elle atteigne un degré qualifié de réprobation (ATF 114 IV 103 consid. 2a ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_144/2019 du 17 mai 2019 consid. 3.1). L'absence de scrupules doit être admise dans tous les cas où la mise en danger de mort intervient pour un motif futile ou apparaît clairement disproportionnée, de sorte qu'elle dénote un profond mépris de la vie d'autrui (arrêts du Tribunal fédéral 6B_418/2021 du 7 avril 2022 consid. 5.1 ; 6B_698/2017 du 13 octobre 2017 consid. 4.2). Plus le danger connu de l'auteur est grand et moins ses mobiles méritent attention, plus l'absence de scrupules apparaît comme évidente (ATF 107 IV 163).
L'auteur doit avoir agi intentionnellement. Il doit avoir conscience du danger de mort imminent pour autrui et adopter volontairement un comportement qui le crée. En revanche, il ne veut pas, même à titre éventuel, la réalisation du risque, sans quoi il s'agirait d'une tentative d'homicide. Le dol éventuel ne suffit pas (ATF 107 IV 163 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_144/2019 du 17 mai 2019 consid. 3.1).
Cette infraction se distingue du délit manqué de meurtre par dol éventuel par le contenu de l'intention de l'auteur. L'acceptation, même par dol éventuel, de la réalisation de l'issue fatale conduit à admettre un homicide intentionnel ou une tentative d'homicide intentionnel. En revanche, il conviendra d'appliquer l'art. 129 CP si l'auteur adopte volontairement un comportement qui crée un danger de mort imminent pour autrui, mais refuse, même à titre éventuel, l'issue fatale. Tel sera notamment le cas lorsque l'auteur peut compter que la réalisation du danger ne se produira pas en raison d'un comportement adéquat de sa part, d'une réaction appropriée de la victime ou de l'intervention d'un tiers (ATF 107 IV 163 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_144/2019 du 17 mai 2019 consid. 3.1).
2.4.2. Le Tribunal fédéral a notamment retenu que les conditions de l'art. 129 CP étaient remplies dans le cas d'un automobiliste qui, voyant un contrôle de police, ne s'est pas arrêté, mais pour éviter dit contrôle a délibérément accepté de foncer sur deux gendarmes, de nuit, forçant le premier agent à bouger, passant tout à côté et à vive allure du second, prenant ainsi le risque de les tuer (cf. arrêt du Tribunal fédéral 6B_835/2018 du 8 novembre 2018 consid. 1). La mise en danger de la vie d'autrui a également été retenue dans le cas d'une course-poursuite lors de laquelle le conducteur a violemment percuté un véhicule de police qui s'était mis en travers de la chaussée de manière à lui bloquer le passage, avant de prendre la fuite (cf. arrêt du Tribunal fédéral 6B_876/2015 du 2 mai 2016 consid. 2 non publié aux ATF 142 IV 245). L'art. 129 CP a également été retenu s'agissant d'un automobiliste qui avait lancé à l'improviste, de nuit, sa voiture à 40/60 km/h contre un piéton marchant au bord de la route, lequel avait dû sauter dans le fossé pour éviter l'impact (cf. arrêt 6S_320/1992 du 6 juillet 1992 consid. 2).
Le Tribunal fédéral a encore retenu une mise en danger de la vie d'autrui au sens de l'art. 129 CP pour un automobiliste qui, en voyant un contrôle de gendarmerie, n'a pas obtempéré au signe d'arrêt, mais pour éviter dit contrôle a accéléré à une vitesse de 40 km/h en voiture en direction d'un policier, à quelque 15 à 20 mètres de distance, de nuit, ce qui avait obligé ce dernier à se déplacer très rapidement sur le côté afin de ne pas être heurté par le véhicule (cf. arrêt du Tribunal fédéral 6B_386/2022 du 20 décembre 2022 consid. 2.4). Enfin, il a retenu une mise en danger dans le cas d'un automobiliste qui avait délibérément visé un garde-frontière pour assurer sa fuite, en se mettant sur la même voie que lui et en changeant de voie en même temps que l'agent, pour lui foncer dessus. L'agent avait dû faire un bond de côté afin de ne pas être percuté par le véhicule qui n'avait jamais ralenti et était passé très près de lui, soit à un mètre environ, à une vitesse qui ne lui aurait pas permis de s'arrêter si le garde-frontière ne s'était pas écarté de sa route (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1326/2022 du 29 novembre 2023, dont il ne ressort aucune autre indication sur la vitesse du véhicule concerné).
2.5. Selon l'art. 237 ch. 1 al. 1 CP, dans sa teneur en vigueur en janvier 2023, celui qui, intentionnellement, aura empêché, troublé ou mis en danger la circulation publique, notamment la circulation sur la voie publique, par eau ou dans les airs, et aura par là sciemment mis en danger la vie ou l’intégrité corporelle des personnes sera puni d’une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d’une peine pécuniaire.
L'art. 237 CP tend à protéger la vie et l'intégrité corporelle des personnes qui prennent part à la circulation publique et protège, accessoirement, ladite circulation (ATF 134 IV 255 consid. 4.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_403/2016 du 28 novembre 2017 consid. 1.3.1). Le comportement punissable consiste à empêcher, troubler ou mettre en danger la circulation publique. Est ainsi visée toute action humaine qui met en danger la vie ou l'intégrité corporelle des participants à la circulation publique, de sorte que le comportement punissable est déterminé par ses effets, non par une manière caractéristique de se comporter. Il suffit que l'acte ait mis en danger la vie ou l'intégrité corporelle d'une seule personne ; il n'est pas nécessaire que la mise en danger ait un caractère collectif. En revanche, la mise en danger doit être concrète, c'est-à-dire qu'une lésion doit avoir été sérieusement vraisemblable (ATF 134 IV 255 consid. 4.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1132/2017 du 3 octobre 2018 consid. 1.3).
Toute mise en danger des occupants d'un moyen de transport – public ou privé –, indépendamment de la relation avec l'auteur de l'infraction, suffit à faire partie des éléments constitutifs de l'art. 237 CP (ATF 149 IV 116 consid. 5.2.2). La victime au sens de l'art. 237 CP ne peut cependant être que l'usager qui est mis fortuitement en danger par l'auteur et qui représente ainsi par rapport à ce dernier l'ensemble des usagers, à l'exclusion de celui qui a choisi d'entrer en rapport avec l'auteur, par exemple en se confiant comme passager à un conducteur particulier (ATF 149 IV 116 consid. 5.2.4).
2.6. À teneur de l'art. 285 ch. 1 1ère phrase CP, celui qui, en usant de violence ou de menace, aura empêché une autorité, un membre d'une autorité ou un fonctionnaire de faire un acte entrant dans ses fonctions, les aura contraints à faire un tel acte ou se sera livré à des voies de fait sur eux pendant qu'ils y procédaient, sera puni d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire.
L’art. 285 CP réprime deux infractions différentes: la contrainte contre les autorités ou les fonctionnaires et les voies de fait contre ceux-ci (arrêts du Tribunal fédéral 6B_366/2021 du 26 janvier 2022 consid. 3.1 ; 6B_1191/2019 du 4 décembre 2019 consid. 3.1 ; 6B_863/2015 du 15 mars 2016 consid. 1.1).
Selon la première variante de l'art. 285 ch. 1 CP, l'auteur empêche, par la violence ou la menace, l'autorité ou le fonctionnaire de faire un acte entrant dans ses fonctions. Il n'est pas nécessaire que l'acte soit rendu totalement impossible : il suffit qu'il soit entravé de telle manière qu'il ne puisse être accompli comme prévu ou qu'il soit rendu plus difficile (ATF 133 IV 97 consid. 4.2 p. 100 et consid 5.2 p. 102 ad art. 286 CP ; 120 IV 136 consid. 2a p. 139 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_1009/2014 du 2 avril 2015 consid. 5.1.1 et 6B_659/2013 du 4 novembre 2013 consid. 1.1). Cette infraction se distingue de l'opposition aux actes de l'autorité de l'art. 286 CP par le fait que l'auteur recourt à l'usage de la menace ou de la violence pour se soustraire à de tels actes.
2.7. En l'espèce, il ressort des faits et du rapport du GAVA que, de nuit et alors qu'il est myope, le prévenu a forcé le passage lors d'un contrôle de police, accélérant en direction du policier à une vitesse qui n'a pas pu être déterminée mais n'a pas atteint 40 km/h. Dans cette manœuvre, il a légèrement touché le policier, qui s'était écarté précipitamment pour éviter le véhicule. Sans cette manœuvre d'évitement, et au vu des déclarations des participants, du choc qui a néanmoins eu lieu et de la position des différents véhicules, l'intimé aurait certainement touché et renversé le policier.
Quand bien même la vitesse de son véhicule n'a pas pu être établie avec certitude, la Cour retient qu'elle se situait aux alentours de 30 km/h, vitesse compatible tant avec les constatations du GAVA qu'avec les propres déclarations du prévenu.
Une telle vitesse est considérée comme moins dangereuse pour les piétons, essentiellement en raison du fait que la distance de freinage est beaucoup plus courte lorsqu'un véhicule circule à 30 km/h plutôt qu'à 50 km/h (cf. arrêt du Tribunal fédéral 1C_11/2017 du 2 mars 2018 consid. 4.4.1) et que le conducteur est donc à même d'éviter plus facilement une collision ; à cela s'ajoute que si une collision survient, la vitesse moindre diminuera le choc. En revanche, quelle que soit la vitesse à laquelle il roule, il tombe sous le sens que la masse d'un véhicule, rapportée à celle d'un piéton, demeure très importante et représente un danger très élevé en cas de collision.
Or, en l'espèce, il est établi que le prévenu n'a pas freiné, mais était au contraire en train d'accélérer à l'approche du plaignant. Un choc avec celui-ci aurait donc pu avoir des conséquences très graves : à défaut d'avoir freiné avant le choc, et même si le choc avait finalement amené le conducteur à freiner, le véhicule aurait roulé sur le piéton après la collision, avec des conséquences vraisemblablement fatales pour celui-ci. Ce n'est qu'en raison du réflexe rapide du policier, qui s'est selon ses propres termes "jeté" en arrière pour éviter le choc, que celui-ci n'a finalement été que très léger : sans ce geste salvateur, la collision serait arrivée.
Le fait qu'un choc soit néanmoins survenu – certes avec la ceinture de charge et la torche du plaignant – démontre par ailleurs que l'intimé a bien roulé directement en direction de l'agent de police. S'il ne peut, sur la base des éléments objectifs du dossier et en vertu du principe in dubio pro reo, être exclu que le choc avec la torche soit intervenu en raison d'un geste du policier, en revanche, le fait que la torche touche le véhicule, et surtout le frottement sur la ceinture de charge de l'agent démontre bien que le véhicule a frôlé le piéton et que la collision, avec les conséquences fatales évoquées ci-dessus, n'a donc été évitée que d'extrême justesse.
Le comportement de l'intimé était totalement disproportionné. Pour se soustraire à un contrôle alors qu'il se savait circuler sous défaut de permis de conduire (et sous l'emprise de stupéfiants), il n'a pas hésité à accélérer en direction du plaignant, pour prendre la fuite. Il admet avoir vu le plaignant, qui était d'ailleurs équipé de façon à être clairement visible et reconnaissable, et avoir compris qu'il avait affaire à des policiers. Il a néanmoins accéléré son véhicule en direction de l'agent se trouvant devant lui, ne l'évitant de justesse que grâce à une manœuvre précipitée de celui-ci. Le prévenu a d'ailleurs admis avoir, par son comportement, mis en danger les autres usagers et notamment le plaignant, sans avoir voulu porter atteinte à l'intégrité de celui-ci. Il s'agit typiquement d'un comportement qui remplit les conditions objectives et subjectives de l'art. 129 CP. L'art. 237 CP, retenu par les premiers juges, ne trouve en particulier pas application dans la mesure où c'est une personne spécifique – le plaignant, agent de police – qui a été victime, en cette qualité, du comportement de l'intimé, et non comme représentant fortuit de l'ensemble des usagers.
L'appel du MP doit par conséquent être admis. En revanche, rien ne permet de retenir que le prévenu a envisagé et accepté le risque mortel qu'il a fait courir au plaignant, de sorte que seules les conclusions subsidiaires de celui-ci seront admises.
Il n'y a enfin pas matière à rectification du jugement entrepris en lien avec la condamnation de l'intimé pour infraction à l'art. 285 CP. En effet, par ses actes il a violemment empêché les policiers de procéder à un contrôle entrant dans leurs fonctions. L'art. 129 CP ne protégeant pas l'autorité publique, les deux infractions entrent en concours idéal (A. MACALUSO / L. MOREILLON / N. QUELOZ (éds), Commentaire romand, Code pénal II, Partie spéciale : art. 111-392 CP, Bâle 2017, n. 33 ad art. 129 CP).
3. 3.1. Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).
Le juge doit d'abord déterminer le genre de la peine devant sanctionner une infraction, puis en fixer la quotité. Pour déterminer le genre de la peine, il doit tenir compte, à côté de la culpabilité de l'auteur, de l'adéquation de la peine, de ses effets sur l'auteur et sur sa situation sociale ainsi que de son efficacité du point de vue de la prévention (ATF 147 IV 241 consid. 3.2 p. 244 ss).
La culpabilité de l'auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution. Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur. À ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même, à savoir les antécédents (judiciaires et non judiciaires), la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (ATF 142 IV 137 consid. 9.1 ; 141 IV 61 consid. 6.1.1). L'art. 47 CP confère un large pouvoir d'appréciation au juge (ATF 144 IV 313 consid. 1.2).
3.2.1. Aux termes de l'art. 49 al. 1 CP, si, en raison d'un ou de plusieurs actes, l'auteur remplit les conditions de plusieurs peines de même genre, le juge le condamne à la peine de l'infraction la plus grave et l'augmente dans une juste proportion. Il ne peut toutefois excéder de plus de la moitié le maximum de la peine prévue pour cette infraction. Il est en outre lié par le maximum légal de chaque genre de peine.
Lorsque les peines envisagées concrètement sont de même genre, l'art. 49 al. 1 CP impose au juge, dans un premier temps, de fixer la peine pour l'infraction abstraitement – d'après le cadre légal fixé pour chaque infraction à sanctionner – la plus grave, en tenant compte de tous les éléments pertinents, parmi lesquels les circonstances aggravantes ou atténuantes. Dans un second temps, il augmentera cette peine pour sanctionner chacune des autres infractions, en tenant là aussi compte de toutes les circonstances y relatives (ATF 144 IV 313 consid. 1.1.2).
Une peine d'ensemble en application du principe de l'aggravation suppose que le tribunal ait fixé (au moins de manière théorique) les peines (hypothétiques) de tous les délits (ATF 144 IV 217 consid. 3.5.3).
Si, dans sa jurisprudence publiée, le Tribunal fédéral a édicté la règle selon laquelle cette disposition ne prévoit aucune exception et que le prononcé d'une peine unique dans le sens d'un examen global de tous les délits à juger n'est pas possible (ATF 145 IV 1 consid. 1.4 ; 144 IV 313 consid. 1.1.2), il est revenu sur cette interprétation stricte dans plusieurs arrêts non publiés ultérieurs. Ainsi, lorsque plusieurs infractions sont étroitement liées entre elles, tant sur le plan temporel que matériel, et qu'une peine pécuniaire n'est envisageable pour aucune de ces infractions, notamment pour des motifs de prévention spéciale, une peine privative de liberté d'ensemble globale (Gesamtfreiheitsstrafe) peut être prononcée (arrêts du Tribunal fédéral 6B_1135/2023 du 19 février 2025 consid. 3.3.2 ; 6B_246/2024 du 27 février 2025 consid. 2.5.4 ; 6B_432/2020 du 30 septembre 2021 consid. 1.4 ; 6B_141/2021 du 23 juin 2021 consid. 1.3.2).
3.2.2. À teneur de l'art. 49 al. 2 CP, si le juge doit prononcer une condamnation pour une infraction que l'auteur a commise avant d'avoir été condamné pour une autre infraction, il fixe la peine complémentaire de sorte que l'auteur ne soit pas puni plus sévèrement que si les diverses infractions avaient fait l'objet d'un seul jugement.
Pour fixer la peine complémentaire, le juge doit estimer la peine globale de l'auteur, comme s'il devait apprécier en même temps l'ensemble des faits, soit ceux du premier jugement et ceux du jugement actuel. Bien que le deuxième tribunal doive fixer la peine globale, il ne peut pas revoir la peine de base, à savoir celle du premier jugement, même s'il estime que les premiers faits justifiaient une peine plus sévère ou moins sévère. Dans le cas contraire, il enfreindrait l'autorité de chose jugée de la première décision (ATF 142 IV 265 consid. 2.3 et 2.4 = JdT 2017 IV 129 ; AARP/467/2016 du 18 novembre 2016 consid. 3.3.2 ; AARP/450/2016 du 9 novembre 2016 consid. 2.2.5 ; J. FRANCEY, Le concours rétrospectif (art. 49 al. 2 CP), in LawInside, 31 août 2016, http://www.lawinside.ch/304/ [31.01.17]).
Si la peine de base contient l'infraction la plus grave, il faut alors l'augmenter au regard des faits nouveaux. Pour obtenir la peine complémentaire, le juge doit ainsi déduire la peine de base de la peine globale. Si au contraire les faits nouveaux contiennent l'infraction la plus grave, il faut l'augmenter dans une juste mesure en fonction de la peine de base. La réduction de la peine de base, intervenue suite au principe d'aggravation, doit être soustraite de la peine des faits nouveaux pour donner la peine complémentaire. Si la peine de base et la peine à prononcer pour les nouvelles infractions constituent de leur côté des peines d'ensemble, le juge peut, pour fixer la peine complémentaire, tenir compte de façon modérée de l'effet déjà produit de l'application du principe de l'aggravation lors de la fixation de ces peines d'ensemble (ATF 145 IV 146 consid. 2.4).
3.2.3. Lorsque, parmi plusieurs infractions à juger, l'une au moins a été commise avant d'autres jugées précédemment (concours rétrospectif partiel), les nouvelles infractions – soit celles commises après l'entrée en force d'un précédent jugement – doivent faire l'objet d'une peine indépendante. Ainsi, il convient d'opérer une séparation entre les infractions commises avant le premier jugement et celles perpétrées postérieurement à celui-ci. Le juge doit tout d'abord s'attacher aux infractions commises avant ledit jugement, en examinant si, eu égard au genre de peine envisagé, une application de l'art. 49 al. 2 CP entre en ligne de compte. Ensuite, il doit considérer les infractions commises postérieurement au jugement précédent, en fixant pour celles-ci une peine indépendante, le cas échéant en faisant application de l'art. 49 al. 1 CP. Enfin, le juge additionne la peine complémentaire retenue pour sanctionner la ou les infractions commises antérieurement au jugement précédent à celle retenue pour sanctionner les infractions commises postérieurement à cette décision (ATF 145 IV 1 consid. 1).
3.2.4. L'art. 49 al. 3 CP prévoit que si l'auteur a commis une ou plusieurs infractions avant l'âge de 18 ans, le juge fixe la peine d'ensemble en application des al. 1 et 2 de sorte qu'il ne soit pas plus sévèrement puni que si les diverses infractions avaient fait l'objet de jugements distincts.
Cette disposition a été introduite au moment de la modification de la partie générale du Code pénal en 2007. Elle n'a pas fait l'objet d'un commentaire dans le message du Conseil fédéral (FF 1999 1787 ss), mais bien dans le Rapport de l'Office fédéral de la justice concernant la révision de la Partie générale et du Troisième livre du Code pénal et concernant une Loi fédérale régissant la condition pénale des mineurs[1]. Il en ressort que la disposition s'applique aux actes que l'auteur a commis avant d'avoir atteint l'âge de 18 ans révolus et tient compte lors du calcul de la peine d'ensemble qu'ils ne doivent pas entraîner une aggravation de la peine supérieure à la peine qui aurait été prononcée si ces actes avaient été jugés seuls. La doctrine et la jurisprudence au sujet de cette disposition sont rares voire inexistantes. La CPAR en retire toutefois que le fait que le TMIN ait attendu plus d'un an après la majorité du prévenu pour statuer sur les infractions commises alors qu'il était mineur ne doit pas lui porter préjudice et conduire à une peine plus sévère que si la condamnation était intervenue pendant sa minorité.
3.3. À teneur de l'art. 43 al. 1 CP, le juge peut suspendre partiellement l'exécution d'une peine privative de liberté d'un an au moins et de trois ans au plus afin de tenir compte de façon appropriée de la faute de l'auteur.
Un sursis partiel au sens de cette disposition n'entre en ligne de compte que si et dans la mesure où les conditions posées à l'art. 42 al. 2 CP pour le prononcé d'un sursis sont réalisées. Les conditions subjectives auxquelles l'art. 42 CP soumet l'octroi du sursis intégral s'appliquent également à l'octroi du sursis partiel (ATF 139 IV 270 consid. 3.3 p. 277 ; ATF 134 IV 1 consid. 5.3.1 p. 10). Pour formuler un pronostic sur l'amendement de l'auteur, le juge doit se livrer à une appréciation d'ensemble, tenant compte des circonstances de l'infraction, des antécédents de l'auteur, de sa réputation et de sa situation personnelle au moment du jugement, notamment de l'état d'esprit qu'il manifeste.
Par conditions subjectives, il faut entendre notamment la condition posée à l'art. 42 al. 2 CP (ATF 134 IV 1 consid. 4.2 et 4.2.3 p. 5 ss). Il s'ensuit que l'octroi du sursis partiel est exclu si, durant les cinq ans qui précèdent l'infraction, l'auteur a été condamné à une peine privative de liberté ferme ou avec sursis de plus de six mois ou à une peine pécuniaire de plus de cent quatre-vingts jours-amende, sauf s'il justifie de circonstances particulièrement favorables (cf. arrêt du Tribunal fédéral 6B_869/2016 du 1er juin 2017 consid. 4.2).
Pour l'application de cette condition, il ne faut toutefois pas tenir compte des condamnations de la justice des mineurs. En effet, les sanctions prévues par le droit pénal des mineurs n'ont pas de finalité rétributive. Elles ne constituent dès lors pas un motif objectif d'exclusion du sursis et ne sauraient, d'un point de vue objectif, fonder un pronostic défavorable (L. MOREILLON / A. MACALUSO / N. QUELOZ / N. DONGOIS (éds), Commentaire romand, Code pénal I, art. 1-110 CP, 2ème éd., Bâle 2021, n. 20 ad art. 42 CP ; M. NIGGLI / H. WIPRÄCHTIGER, Basler Kommentar Strafrecht I : Art. 1-136 StGB, 4ème éd., Bâle 2019, n. 92 ad art. 42 CP ; Forumpoenale 2016 p. 88 n. 15).
3.4. La faute de l'intimé est lourde. En l'espace d'un peu plus de deux ans, il a commis de nombreuses infractions en matière de circulation routière, persistant à circuler au guidon ou au volant de véhicules à moteur sans être titulaire du permis idoine. Il a multiplié les excès de vitesse, parfois très graves, et s'est soustrait à deux reprises à des contrôles de police, prenant le risque, la première fois, de tuer l'un des agents. Une première détention – consécutive aux faits du 23 janvier 2023 – ne semble pas avoir suffi à le détourner de son comportement puisqu'il a récidivé le 23 mars 2024.
La situation personnelle de l'intimé n'explique ni ne justifie son comportement. Il est bien intégré à Genève, à l'aube de sa vie professionnelle et entouré par sa famille ; les difficultés relationnelles avec son père ne sauraient en particulier expliquer son attitude. Il explique ses actes par son goût immodéré des véhicules automobiles, explication qui fait craindre, notamment au vu de l'emploi qu'il exerce depuis sa mise en liberté, qu'il ne soit tenté de récidiver ou à tout le moins exposé à des situations pouvant induire la tentation de prendre le volant ou le guidon.
Il présente trois inscriptions à son casier judiciaire, dont l'une prononcée par le TMIN. Ces antécédents sont en partie spécifiques. Le prononcé d'une peine pécuniaire avec sursis du 28 mai 2022 n'a manifestement pas suffi à le dissuader de récidiver, pas plus que la lourde peine privative de liberté fixée par le juge des mineurs.
À raison, il ne conteste pas le prononcé d'une peine privative de liberté pour l'ensemble des infractions passibles d'une telle peine, seule susceptible, au vu des nombreuses récidives, de le dissuader enfin de récidiver. Dans cette mesure, il n'y a pas de concours rétrospectif avec les condamnations prononcées par le MP, qui portent sur des peines d'un genre différent.
En revanche, une grande partie des faits faisant l'objet de la procédure est antérieure à la condamnation du TMIN du 16 février 2023, tandis que les faits du 23 mars 2024 sont intervenus postérieurement. On se trouve donc dans une situation de concours rétrospectif partiel, et la CPAR doit procéder en deux temps pour fixer la peine.
3.4.1. En ce qui concerne les faits antérieurs à la condamnation du TMIN, ils doivent faire l'objet d'une peine d'ensemble avec celle-ci. L'infraction objectivement la plus grave est la mise en danger d'autrui. Au vu du lien étroit entre toutes les infractions commises le 23 janvier 2023 (art. 129 CP, art. 90 al. 2, 95 al. 1. let a et 91 al. 2 let. b LCR, art 22 CP et 91a LCR), il apparaît justifié de retenir, pour ces faits, une peine privative de liberté globale de deux ans. Cette peine doit être aggravée à chaque fois de 20 jours (peines théoriques d'un mois) pour les cinq autres occurrences de conduites sans autorisation (art. 95 al. 1 let. a LCR) ainsi que pour les quatre occurrences de mises à disposition d'un véhicule à un conducteur ne disposant pas du permis de conduire requis (art. 95 al. 1 let. e LCR), pour une peine totale de trente mois. L'aggravation à effectuer en raison de la condamnation à une peine privative de liberté de 218 jours du TMIN (laquelle est déjà une peine d'ensemble, ce qui conduit à une application modérée du principe d'aggravation) porte cette peine à trois ans.
Compte tenu de la peine de 218 jours déjà prononcée par le TMIN, la peine complémentaire pour sanctionner les faits antérieurs à ce jugement doit être arrêtée à deux ans et 147 jours (365 – 218).
3.4.2. En ce qui concerne les faits du 23 mars 2024, la CPAR doit fixer une peine indépendante. À cet égard, le prévenu peut se prévaloir de l'art 90 al. 3ter LCR, ses antécédents ne portant pas sur un crime ou un délit routier ayant gravement mis en danger la sécurité de tiers ou ayant entraîné des blessures ou la mort de tiers (ATF 151 IV 188). Au vu de la connexité des faits, la CPAR retient qu'une peine d'ensemble de neuf mois est adéquate pour sanctionner la violation fondamentale des règles de la circulation routière, la conduite sans autorisation et l'entrave aux mesures visant à constater l'incapacité de conduire (art. 90 al. 3 et 4, 95 al. 1. let a et 91a LCR).
La peine encourue par le prévenu s'élève ainsi à quelques trois ans et 57 jours. Cela étant, lorsque la peine entrant en considération excède de peu la limite au-delà de laquelle le sursis ou le sursis partiel ne peut plus être octroyé, le juge doit examiner, sous l'angle de la prévention spéciale, si une peine encore compatible avec le sursis n’est pas néanmoins suffisante pour détourner l'intéressé de commettre de nouvelles infractions (ATF 118 IV 337 consid. 2c p. 339-340).
En l'espèce, le prévenu remplit la condition objective du sursis partiel (art. 42 al. 2 CP), dans la mesure où il ne doit pas être tenu compte de la condamnation du TMIN (supra consid. 3.3 ; la même conclusion doit être tirée de l'art. 49 al. 3 CP). Sur le plan subjectif, et bien qu'il s'agisse d'un cas limite au vu de la répétition des infractions, la CPAR veut croire que les détentions subies avant jugement, et notamment jusqu'au prononcé des premiers juges, sont de nature à le détourner de commettre de nouvelles infractions. Dans ces conditions, il se justifie de ramener la peine d'ensemble à trois ans et le prévenu sera donc mis au bénéfice du sursis partiel, assorti des règles de conduite et de l'assistance de probation ordonnées par le TCO, qu'il n'a pas contestées et qui paraissent aptes à prévenir toute récidive.
Le délai d'épreuve, fixé à quatre ans par les premiers juges, sera porté au maximum légal de cinq ans. En effet, une telle durée apparaît nécessaire pour convaincre le prévenu de rester dans le droit chemin et poursuivre ses efforts de réinsertion.
3.5. Le MP n'a pas développé d'argument pour exposer en quoi l'amende de CHF 500.- prononcée par les premiers juges pour les contraventions commises par l'intimé serait insuffisante. La situation personnelle et financière de celui-ci n'est pas particulièrement favorable. À cela s'ajoute qu'il devra supporter d'importants frais de justice ainsi que l'indemnité qu'il reconnaît devoir à la partie plaignante. Dans ces circonstances, le montant de CHF 500.- pour sanctionner quatre contraventions (deux violations simples des règles de la circulation, art. 90 al. 1 LCR ; la violation des devoirs en cas d'accident, art. 92 al. 2 LCR, et la consommation de stupéfiants, art. 19a LStup), apparaît proportionné et adéquat. Il sera confirmé.
3.6. Le MP conclut à la révocation du sursis dont a bénéficié le prévenu le 28 mai 2022. La commission d'un crime ou d'un délit durant le délai d'épreuve n'entraîne pas nécessairement une révocation du sursis. Celle-ci ne se justifie qu'en cas de pronostic défavorable, à savoir lorsque la nouvelle infraction laisse entrevoir une réduction sensible des perspectives de succès de la mise à l'épreuve. En l'espèce, l'intimé est mis au bénéfice d'un sursis partiel au motif qu'un pronostic favorable reste possible ; il doit dès lors être renoncé à la révocation de ce sursis. Un avertissement sera toutefois prononcé et le délai d'épreuve prolongé de la moitié soit 18 mois.
4. Les appels ayant été partiellement admis, la moitié des frais de la procédure d'appel sera mise à la charge de l'intimé et le solde laissé à la charge de l'État. Il n'y a en particulier pas lieu de mettre une partie des frais de la procédure d'appel à charge de la partie plaignante, le retrait partiel de son appel étant consécutif à l'admission de ses conclusions civiles par l'intimé.
5. Le TCO n'a pas statué sur le sort des pièces à conviction figurant à l'inventaire n° 45205820240323 (pièce Z-10), soit trois plaquettes de shit et une bonbonne d'hélium. Les parties ne se sont pas déterminées à ce sujet. Vu la nature de ces objets, leur confiscation et destruction seront d'office ordonnées (art. 69 CP et 19 LStup).
6. Considéré globalement, l'état de frais produit par Me D______, défenseure d'office de C______, satisfait les exigences légales et jurisprudentielles régissant l'assistance judiciaire gratuite en matière pénale. Il convient cependant de le compléter de la durée de l'audience et d'une vacation.
La rémunération de Me D______ sera partant arrêtée à CHF 2'655.65 correspondant à 11h10 d'activité au tarif de CHF 200.-/heure plus la majoration forfaitaire de 10% et l'équivalent de la TVA au taux de 8.1% en CHF 199.-.
7. 7.1. L'art. 433 al. 1 CPP permet à la partie plaignante de demander au prévenu une juste indemnité pour les dépenses obligatoires occasionnées par la procédure lorsqu'elle obtient gain de cause (let. a) ou lorsque le prévenu est astreint au paiement des frais conformément à l'art. 426 al. 2 CPP (let. b).
La partie plaignante obtient gain de cause au sens de l'art. 433 al. 1 CPP lorsque le prévenu est condamné et/ou si les prétentions civiles sont admises (M. NIGGLI / M. HEER / H. WIPRÄCHTIGER [éds], Schweizerische Strafprozessordnung / Schweizerische Jugendstrafprozessordnung, Basler Kommentar StPO/JStPO, 3e éd., Bâle 2023, n. 10 ad art. 433 ; D. JOSITSCH / N. SCHMID, Schweizerische Strafprozessordnung : Praxiskommentar, 4e éd., Zurich 2023, n. 6 ad art. 433).
7.2. En l'occurrence la partie plaignante ne supportant aucun frais et ayant obtenu gain de cause, il n'y a pas matière à réduction de l'indemnité. L'intimé n'a pas contesté la note d'honoraires présentée, qui apparaît adéquate au vu de l'ampleur de l'activité nécessaire. Le montant requis, au taux horaire facturé de CHF 300.-, sera dès lors accordé, la durée des débats d'appel devant toutefois être ajustée à leur durée effective.
En conclusion, l'indemnité due à la partie plaignante sera arrêtée à CHF 3'199.75 correspondant à 9h52 d'activité au tarif de CHF 300.-/heure et l'équivalent de la TVA au taux de 8.1% en CHF 239.75.
* * * * *
PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
Reçoit les appels formés par A______ et le Ministère public contre le jugement JTCO/113/2024 rendu le 30 octobre 2024 par le Tribunal correctionnel dans la procédure P/20158/2022.
Les admet partiellement.
Annule ce jugement.
Et statuant à nouveau :
Acquitte C______ des faits mentionnés sous chiffre 1.2.1 de l'acte d'accusation, qualifiés d'infraction à l'art. 90 al. 3 et 4 LCR, et sous chiffres 1.7.3 et 1.7.5, qualifiés d'infraction à l'art. 95 al. 1 let. a LCR.
Déclare C______ coupable de mise en danger de la vie d'autrui (art. 129 al. 1 aCP), de violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires (art. 285 aCP), de violations simples, grave et fondamentale des règles de la circulation routière (art. 90 al. 1, 2, 3 et 4 LCR), de tentative d'entrave aux mesures visant à constater l'incapacité de conduire (art. 91a al. 1 LCR cum 22 al. 1 CP), d'entrave aux mesures visant à constater l'incapacité de conduire (art. 91a al. 1 LCR), de conduite en état d'incapacité de conduire pour d'autres raisons que l'alcool (art. 91 al. 2 let. b LCR), de mises à disposition d'un véhicule à un conducteur ne disposant pas du permis de conduire requis (art. 95 al. 1 let. e LCR), de conduites sans autorisation (art. 95 al. 1. let. a LCR), de violation des devoirs en cas d'accident (art. 92 al. 1 LCR cum 51 al. 1 et 3 LCR) et de consommation de stupéfiants (art. 19a LStup).
Condamne C______ à une peine privative de liberté de trois ans, sous déduction de 306 jours de détention avant jugement (art. 40 CP).
Dit que la peine est prononcée sans sursis à raison de dix mois.
Met pour le surplus C______ au bénéfice du sursis partiel et fixe la durée du délai d'épreuve à cinq ans (art. 43 et 44 CP).
Dit que cette peine est partiellement complémentaire à celle prononcée par le Tribunal des mineurs de Genève le 16 février 2023.
Ordonne à C______, pendant la durée du délai d'épreuve, les règles de conduite suivantes (art. 44 al. 2 et 94 CP) :
- une interdiction de conduire tout type de véhicule à moteur ou engin motorisé ;
- un suivi thérapeutique psychosocial, axé notamment sur la gestion des émotions et l'addictologie.
Ordonne une assistance de probation pendant la durée du délai d'épreuve (art. 44 al. 2 et 93 al. 1 CP).
Avertit C______ que s'il devait commettre de nouvelles infractions ou ne pas respecter les règles de conduite et l'assistance de probation, pendant la durée du délai d'épreuve, le sursis pourrait être révoqué et la peine suspendue exécutée, cela sans préjudice d'une nouvelle peine (art. 44 al. 3 et 95 al. 5 CP).
Condamne C______ à une amende de CHF 500.- (art. 106 CP).
Prononce une peine privative de liberté de substitution de cinq jours.
Dit que la peine privative de liberté de substitution sera mise à exécution si, de manière fautive, l'amende n'est pas payée.
Renonce à révoquer le sursis octroyé le 28 mai 2022 par le Ministère public du canton de Genève (art. 46 al. 2 CP) mais adresse un avertissement formel à C______ et prolonge le délai d'épreuve de 18 mois.
Constate que C______ reconnaît devoir à A______, à titre de tort moral, CHF 1'500.- avec intérêts à 5% dès le 23 janvier 2023 et lui en donne acte.
Condamne C______ à verser à A______ CHF 2'246.35, à titre de juste indemnité pour les dépenses obligatoires occasionnées par la procédure de première instance et d'appel, et CHF 3'199.75 pour la procédure d'appel (art. 433 al. 1 CPP).
Ordonne la confiscation et la destruction du sachet minigrip et du grinder figurant sous chiffres 1 et 2 de l'inventaire n° 39382220230124 (art. 69 CP).
Ordonne la confiscation et la destruction de la balance, de la drogue et de la bonbonne figurant sous chiffres 1 et 2 de l'inventaire n° 39441620230124 et sous chiffres 1 et 2 de l'inventaire n° 45205820240323 (art. 69 CP).
Ordonne la restitution à C______ du téléphone portable [de marque] J______ endommagé figurant sous chiffre 3 de l'inventaire n° 39441620230124, du téléphone [portable de marque] J______ figurant sous chiffre 3 de l'inventaire n° 39382220230124 et du training avec inscription K______ [marque] figurant sous chiffre 1 de l'inventaire n° 45715920240612 (art. 267 al. 1 et 3 CPP).
Ordonne la restitution à leur ayant-droit lorsqu'ils seront connus des téléphones portables J______ et L______ endommagés figurant sous chiffres 4 et 5 de l'inventaire n° 39441620230124 (art. 267 al. 1 et 3 CPP).
Condamne C______ aux frais de la procédure préliminaire et de première instance, arrêtés à CHF 7'000.- (art. 426 al. 1 CPP).
Prend acte de ce que le Tribunal correctionnel a fixé à CHF 10'991.25 l'indemnité de procédure due à Me D______, défenseure d'office de C______ (art. 135 CPP), et arrête à CHF 2'655.65 celle qui lui est due pour la procédure d'appel.
Arrête les frais de la procédure d'appel à CHF 1'815.-, comprenant un émolument de jugement de CHF 1'500.-.
Met la moitié de ces frais, soit CHF 907.50, à la charge de C______ et laisse le solde de ces frais à la charge de l'État.
Notifie le présent arrêt aux parties.
Le communique, pour information, au Tribunal correctionnel, au Service de la réinsertion et du suivi pénal et au Service cantonal des véhicules.
La greffière : Ana RIESEN |
| La présidente : Gaëlle VAN HOVE |
Indication des voies de recours :
Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète
(art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale.
| ETAT DE FRAIS |
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| COUR DE JUSTICE |
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Selon les art. 4 et 14 du règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais et dépens en matière pénale (E 4 10.03).
Total des frais de procédure du Tribunal correctionnel : | CHF | 7'000.00 |
Bordereau de frais de la Chambre pénale d'appel et de révision |
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Délivrance de copies et photocopies (let. a, b et c) | CHF | 00.00 |
Mandats de comparution, avis d'audience et divers (let. i) | CHF | 160.00 |
Procès-verbal (let. f) | CHF | 80.00 |
Etat de frais | CHF | 75.00 |
Emolument de décision | CHF | 1'500.00 |
Total des frais de la procédure d'appel : | CHF | 1'815.00 |
Total général (première instance + appel) : | CHF | 8'815.00 |
[1] https://www.bj.admin.ch/dam/bj/fr/data/sicherheit/gesetzgebung/archiv/stgb-at/vn-ber-f.pdf.download.pdf/vn-ber-f.pdf, p. 70-71