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Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision

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P/13921/2022

AARP/158/2025 du 09.05.2025 sur JTDP/1127/2024 ( PENAL ) , REJETE

Descripteurs : DOMMAGES À LA PROPRIÉTÉ(DROIT PÉNAL)
Normes : CP.144
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

P/13921/2022 AARP/158/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale d'appel et de révision

Arrêt du 9 mai 2025

 

Entre

A______, domiciliée ______[GE], comparant par Me B______, avocat,
C______ et D______, parties plaignantes, comparant par Me E______, avocat,

appelants,

 

contre le jugement JTDP/1127/2024 rendu le 19 septembre 2024 par le Tribunal de police,

 

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A. a. En temps utile, A______, C______ et D______ appellent du jugement du 19 septembre 2024, par lequel le Tribunal de police (TP) a acquitté A______ de tentative de vol (art. 22 al. 1 cum 139 ch. 1 du code pénal [CP]) mais l'a reconnue coupable de dommages à la propriété (art. 144 al. 1 CP) et l'a condamnée à une peine pécuniaire de 30 jours-amende à CHF 30.- l'unité, peine assortie du sursis et d'un délai d'épreuve de trois ans. Ses conclusions en indemnisation ont été rejetées et elle a été condamnée à payer l'intégralité des frais de la procédure ainsi qu'une indemnité de CHF 5'749.10 à D______ et C______, au titre de juste indemnité pour les dépenses obligatoires occasionnées par la procédure.

A______ entreprend partiellement ce jugement, concluant à son acquittement complet avec suite de frais et indemnité. Subsidiairement, elle conclut à l'octroi d'une indemnité de CHF 4'777.45, correspondant à 80% des frais engagés pour l'exercice raisonnable de ses droits de procédure en première instance, et à ce qu'elle ne supporte qu'au maximum 20% des frais de la cause.

C______ et D______, parties plaignantes, ont retiré leur appel à l'ouverture des débats et conclu au rejet de celui de A______.

b. Selon l'ordonnance pénale du 21 avril 2023, il est encore reproché ce qui suit à A______ :

À Genève, à une date indéterminée entre le 5 mars 2020 et le 29 avril 2022, elle a procédé unilatéralement à l'ouverture du coffre-fort situé dans la villa sise no. ______ chemin 1______ à F______ [GE], alors que le contenu dudit coffre appartient à la succession de feu G______, soit à C______ et D______, fils du défunt, et à elle-même, sa veuve.

Cette ordonnance pénale lui reprochait également d'avoir, dans ces circonstances, tenté de dérober le contenu du coffre-fort, afin de s'enrichir indûment de sa valeur, faits dont elle a été acquittée.

B. Les faits de la cause ne sont pas contestés par l’appelante et peuvent être résumés comme suit, étant pour le surplus renvoyé au jugement de première instance (art. 82 al. 4 du code de procédure pénale suisse [CPP]) :

a. G______ est décédé le ______ 2020. La communauté héréditaire est composée de son épouse, A______, et de ses fils C______ et D______. À la période des faits, l'exécuteur testamentaire était Me H______.

b. A______ était domiciliée dans une villa propriété de la Société Immobilière I______ SA, dont feu G______ était l'unique actionnaire, qui faisait donc partie de la succession. Le 5 mars 2020, un inventaire incomplet des actifs de la succession a été réalisé, un coffre-fort situé dans la villa n'ayant pas pu être ouvert pour des raisons techniques. Il a été convenu avec l'exécuteur testamentaire qu'un serrurier interviendrait pour procéder à l'ouverture dudit coffre, en présence de tous les intéressés.

c. En avril 2022, A______ a informé l'exécuteur testamentaire qu'elle avait déjà fait procéder, à une date indéterminée, à l'ouverture du coffre par un serrurier, sans en informer quiconque. Elle n'a jamais indiqué les coordonnées du serrurier, affirmant les avoir égarées ou ne pas s'en souvenir, ni fourni de liste du contenu du coffre.

d. Les parties divergent sur le contenu du coffre. Il ressort de la procédure que la liquidation de la succession de feu G______ donne lieu à un important contentieux entre elles.

C. a. Aux débats d'appel, les parties ont persisté dans leurs déclarations. A______ a expliqué avoir ouvert le coffre-fort pour y prendre des bijoux personnels qu'elle a ensuite déposés dans un coffre bancaire en France.

b. Par la voix de leurs conseils, A______, C______ et D______ persistent dans leurs conclusions. Toutes les parties ont formé des conclusions en indemnisation de leurs frais d'avocat.

c. Les arguments plaidés seront discutés, dans la mesure de leur pertinence, au fil des considérants qui suivent.

D. A______ est née le ______ 1964 en Turquie et est d'origine suisse. Elle est titulaire d'une formation de secrétaire administrative et a été en recherche d'emploi pendant plus d'une année avant de se mettre à son compte comme secrétaire administrative, activité qui lui rapporte mensuellement environ CHF 2'000.-. Elle a été mariée une première fois et s'est occupée de ses quatre enfants, puis a vécu de petits emplois entre ses 35 et 40 ans. Elle a ensuite épousé G______, dont elle est veuve depuis le ______ 2020. Elle partage son loyer avec sa fille et l'un de ses fils. Elle perçoit une rente de veuve mensuelle de CHF 1'738.-.

À teneur de l'extrait de son casier judiciaire suisse, elle n'a aucun antécédent.


 

EN DROIT :

1. Les appels sont recevables pour avoir été interjetés et motivés selon la forme et dans les délais prescrits (art. 398 et 399 CPP). Il sera pris acte du retrait de l'appel formé par les parties plaignantes (art. 386 al. 2 let. a CPP).

La Chambre n'examine que les points attaqués du jugement de première instance (art. 404 al. 1 CPP), sauf en cas de décisions illégales ou inéquitables (art. 404 al. 2 CPP), sans être liée par les motifs invoqués par les parties ni par leurs conclusions, à moins qu'elle ne statue sur une action civile (art. 391 al. 1 CPP).

2. 2.1. À teneur de l'art. 144 al. 1 CP, quiconque, sans droit, endommage, détruit ou met hors d'usage une chose appartenant à autrui ou frappée d'un droit d'usage ou d'usufruit au bénéfice d'autrui, est, sur plainte, puni d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire.

2.2. La notion "[d']appartenance à autrui" se rapporte à la conception de la propriété au sens du droit privé. L'art. 144 CP protège toutefois également les droits d'usage que d'autres personnes pourraient avoir sur une chose. Dès lors, le droit de déposer plainte n'appartient pas seulement au propriétaire, mais également à tout ayant droit privé de l'usage de la chose. La notion de "droit d'usage" contenue à l'art. 144 CP, qu'il s'agisse d'un usufruit - expressément mentionné à l'art. 144 al. 1 CP - ou d'un autre droit (servitude, droit de passage, droit d'habitation, bail à loyer, bail à ferme, prêt à usage, leasing, autre droit d'usage contractuellement conféré), doit également s'examiner en fonction des règles du droit privé (arrêt du Tribunal fédéral 7B_74/2023 du 30 septembre 2024 consid. 2.2.3).

2.3. L'objet de l'infraction est une chose, à savoir un objet corporel, mobilier ou immobilier (arrêt du Tribunal fédéral 6B_74/2023 du 30 septembre 2024 consid. 2.2.2).

L'atteinte peut consister à détruire ou à altérer la chose, mais aussi à la modifier d'une manière propre à en supprimer ou en réduire l'usage, les propriétés, les fonctions ou l'agrément (arrêt du Tribunal fédéral 6B_978/2014 du 23 juin 2015 consid. 3.3.1 non publié aux ATF 141 IV 305). L'auteur se rend coupable de dommages à la propriété dès qu'il cause un changement de l'état de la chose qui n'est pas immédiatement réversible sans frais ni effort et qui porte atteinte à un intérêt légitime, par exemple, en apposant sur le pare-brise d'une voiture une affiche qui ne peut être que difficilement ôtée, en dégonflant les pneus d'une voiture, en vidant un extincteur qui doit être rechargé pour être de nouveau prêt à fonctionner ou encore en salissant l'uniforme d'un fonctionnaire (ATF 128 IV 250 consid. 2 p. 252 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_77/2017 du 16 janvier 2018 consid. 2.1 et les références ; 6B_348/2012 du 24 octobre 2012 consid. 2.2).

La protection pénale est donnée même aux choses objectivement sans valeur économique ou esthétique. Seul l'intérêt légitime du lésé est toutefois protégé. Il faut ainsi réserver la faculté de déclarer la plainte abusive si elle est déposée par pure chicane, la modification étant insignifiante ou ne présentant manifestement que des avantages (ACPR/509/2016 du 16 août 2016 ; B. CORBOZ, Les Infractions en droit suisse, Berne 2010, vol. I., n. 20-21 ad art. 144 et les références citées).

2.4. L'art. 9 CPP consacre la maxime d'accusation, laquelle découle également des art. 29 al. 2 de la constitution fédérale (Cst.; droit d'être entendu), 32 al. 2 Cst. (droit d'être informé, dans les plus brefs délais et de manière détaillée, des accusations portées contre soi) et 6 par. 3 let. a de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (CEDH ; droit d'être informé de la nature et de la cause de l'accusation).

Selon ce principe, l'acte d'accusation définit l'objet du procès (fonction de délimitation). Une infraction ne peut faire l'objet d'un jugement que si le ministère public a déposé auprès du tribunal compétent un acte d'accusation dirigé contre une personne déterminée sur la base de faits précisément décrits. Il doit décrire les infractions qui sont imputées au prévenu de façon suffisamment précise pour lui permettre d'apprécier, sur les plans subjectif et objectif, les reproches qui lui sont faits (cf. art. 325 CPP). En effet, le prévenu doit connaître exactement les faits qui lui sont imputés et quelles sont les peines et mesures auxquelles il est exposé, afin qu'il puisse s'expliquer et préparer efficacement sa défense (fonction de délimitation et d'information ; ATF 143 IV 63 consid. 2.2 p. 65 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_834/2018 du 5 février 2019 consid. 1.1).

La description des faits reprochés dans l'acte d'accusation doit être la plus brève possible (art. 325 al. 1 let. f CPP).

2.5.1. En l'espèce, la prévenue a fait appel à un serrurier pour ouvrir un coffre-fort dont elle était propriétaire en main commune (art. 560 du code civil [CC]) avec les parties plaignantes, hors la présence de celles-ci, l'endommageant de la sorte. Ces faits sont précisément décrits dans l'acte d'accusation et elle a parfaitement compris ce qui lui était reproché : c'est en vain qu'elle se prévaut d'une violation de la maxime d'accusation.

Reste à déterminer si ces faits sont constitutifs de dommages à la propriété.

2.5.2. Les parties s'accordent sur le fait que le coffre-fort, en tant qu'objet, n'avait qu'une valeur résiduelle, ce d'autant qu'il était difficile à ouvrir et nécessitait l'intervention d'un spécialiste. Il ressort toutefois clairement de leurs déclarations que la principale fonction de ce meuble était sa capacité à conserver son contenu et à le protéger de tout accès indu. La valeur de ce coffre-fort résidait ainsi dans sa fonction de conservation des biens appartenant à la succession, en l'état et sans que l'un ou l'autre des héritiers ne puisse y accéder sans l'acquiescement des autres.

Indépendamment de la valeur de son contenu, ce coffre-fort avait ainsi une valeur d'usage fondamentale pour les héritiers, consistant dans la protection de l'accès à ces objets. En faisant procéder, seule et hors la présence de ses cohéritiers, à l'ouverture du coffre-fort, la prévenue a ainsi porté atteinte à la valeur essentielle du coffre-fort. Peu importe qu'elle ait, ce faisant, endommagé (ou non) le meuble lui-même, puisqu'en agissant de la sorte, elle a porté atteinte au principal usage du coffre-fort, usage pour lequel un tel objet est d'ailleurs conçu, soit la conservation des biens qu'il contient.

Le verdict de culpabilité de dommages à la propriété doit ainsi être confirmé.

3. 3.1. Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).

Le juge doit d'abord déterminer le genre de la peine devant sanctionner une infraction, puis en fixer la quotité. Pour déterminer le genre de la peine, il doit tenir compte, à côté de la culpabilité de l'auteur, de l'adéquation de la peine, de ses effets sur l'auteur et sur sa situation sociale ainsi que de son efficacité du point de vue de la prévention (ATF 147 IV 241 consid. 3.2 p. 244 ss).

La culpabilité de l'auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution (objektive Tatkomponente). Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur (subjektive Tatkomponente). À ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même (Täterkomponente), à savoir les antécédents (judiciaires et non judiciaires), la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (ATF 142 IV 137 consid. 9.1 ; 141 IV 61 consid. 6.1.1). L'art. 47 CP confère un large pouvoir d'appréciation au juge (ATF 144 IV 313 consid. 1.2).

3.2. En l'espèce, l'appelante expose avoir agi pour accéder à des bijoux personnels dont elle affirme qu'ils se trouvaient dans le coffre-fort endommagé, qu'elle a ensuite déplacés sans jamais permettre à ses cohéritiers de connaître le contenu de celui-ci. Elle a manifestement agi dans le but de se soustraire à toute éventuelle contestation dans le cadre de la liquidation de la succession ; indépendamment du bien-fondé de son droit sur ces bijoux – question dont la CPAR n'est pas saisie – elle a agi pour se procurer un avantage, consistant à tout le moins à s'économiser toute contestation des autres membres de l'hoirie et récupérer des objets qu'elle affirmait lui appartenir sans permettre à ses cohéritiers de contester cette revendication. Elle a sans doute aussi agi par mesquinerie, pour frustrer ses cohéritiers dans leur souhait d'accéder au contenu de ce coffre-fort. Quoi qu'il en soit, son mobile est égoïste.

La situation personnelle de l'appelante n'explique ni ne justifie ses actes. Les difficultés rencontrées dans le cadre de la liquidation de la succession de son époux ne sauraient justifier qu'elle s'affranchisse de la sorte des règles légales, justement conçues pour résoudre de telles situations.

L'appelante ne discute ni de la quotité de la sanction, ni du montant du jour-amende. Compte tenu du caractère relativement bénin de la faute commise, de la motivation égoïste, du caractère isolé de son comportement, mais aussi de sa collaboration médiocre, l'appelante n'ayant par exemple jamais fourni le moindre élément sur l'identité du serrurier à qui elle a fait appel, la peine de 30 jours-amende prononcée par le premier juge apparaît en tous points adéquate.

Compte tenu de la situation financière peu favorable de l'appelante, le montant du
jour-amende, qui correspond au minimum légal, sera également confirmé.

Le bénéfice du sursis lui est acquis.

L'appel doit ainsi être intégralement rejeté.

4. 4.1. Selon l'art. 426 al. 1 CPP, le prévenu supporte les frais de procédure s'il est condamné. L'alinéa 2 dispose que lorsque la procédure fait l'objet d'une ordonnance de classement ou que le prévenu est acquitté, tout ou partie des frais de procédure peuvent être mis à sa charge s'il a, de manière illicite et fautive, provoqué l'ouverture de la procédure ou rendu plus difficile la conduite de celle-ci.

La répartition des frais de procédure de première instance repose sur le principe selon lequel celui qui a causé les frais doit les supporter. Ainsi, le prévenu doit supporter les frais en cas de condamnation, car il a occasionné, par son comportement, l'ouverture et la mise en œuvre de l'enquête pénale (ATF 138 IV 248 consid. 4.4.1 p. 254). Lorsque la condamnation n'est que partielle, les frais ne doivent être mis à sa charge que de manière proportionnelle, en considération des frais liés à l'instruction des infractions pour lesquelles un verdict de culpabilité a été prononcé. Toutefois, si les faits reprochés à l'accusé sont étroitement et directement liés et que tous les actes d'instruction relatifs à chaque chef d'accusation étaient nécessaires, il peut être condamné à payer l'intégralité des frais de la procédure d'instruction et de la procédure en première instance (arrêt du Tribunal fédéral 6B_460/2020 du 10 mars 2021 consid. 10.3.1). Il s'agit de réduire les frais, sous peine de porter atteinte à la présomption d'innocence, si le point sur lequel le prévenu a été acquitté a donné lieu à des frais supplémentaires et si le prévenu n'a pas, de manière illicite et fautive, provoqué l'ouverture de la procédure ou rendu plus difficile la conduite de celle-ci. Comme il est difficile de déterminer avec exactitude les frais qui relèvent de chaque fait imputable ou non au condamné, une certaine marge d'appréciation doit être laissée au juge (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1240/2018 du 14 mars 2019 consid. 1.1.1).

4.2. Selon l'art. 428 al. 1, première phrase, CPP, les frais de la procédure de recours sont mis à la charge des parties dans la mesure où elles ont obtenu gain de cause ou succombé. L'art. 428 al. 2 CPP régit les cas dans lesquels les frais de la procédure peuvent être mis à la charge de la partie recourante qui obtient une décision qui lui est plus favorable. Selon l'al. 3, si l'autorité de recours rend elle-même une nouvelle décision, elle se prononce également sur les frais fixés par l'autorité inférieure. Pour déterminer si une partie succombe ou obtient gain de cause, il faut examiner dans quelle mesure ses conclusions sont admises en deuxième instance (arrêt du Tribunal fédéral 6B_369/2018 du 7 février 2019 consid. 4.1 non publié aux ATF 145 IV 90).

4.3. L'appelante conteste la mise à sa charge complète des frais de la procédure préliminaire et de première instance, au motif qu'elle a bénéficié d'un acquittement pour une partie des faits reprochés. Il ressort toutefois clairement de la procédure, et même de l'ordonnance pénale valant acte d'accusation, que les faits dont elle a été acquittée sont étroitement liés à ceux pour lesquels elle est condamnée, et n'ont en particulier pas donné lieu à des actes d'instruction séparés. De plus, l'appelante, en ouvrant le coffre-fort sans l'aval de ses cohéritiers, a occasionné l'ouverture de la procédure pénale et le soupçon de tentative de vol du contenu de celui-ci (art. 426 al. 2 CPP). Sa condamnation à l'intégralité des frais de la procédure préliminaire et de première instance sera donc confirmée.

4.4. L'appelante, qui succombe, supportera 80% des frais de la procédure d'appel envers l'État (art. 428 CPP). Le solde sera mis à la charge des parties plaignantes, dont l'appel a été retiré aux débats (art. 428 al. 1 dernière phrase CPP).

5. 5.1. L'indemnisation du prévenu est régie par les art. 429 à 432 CPP, dispositions aussi applicables à la procédure de recours par renvoi de l'art. 436 al. 1 CPP.

Aux termes de l'art. 429 al. 1 CPP, le prévenu a un droit à une indemnisation et à la réparation de son tort moral s'il est acquitté totalement ou en partie ou s'il bénéficie d'une ordonnance de classement.

Le droit à l'indemnisation est ouvert dès que des charges pesant sur le prévenu ont été abandonnées. L'abandon des charges pesant sur le prévenu peut être total ou partiel. Dans ce dernier cas, les autorités pénales doivent avoir renoncé à poursuivre le prévenu ou à le condamner pour une partie des infractions envisagées ou des faits retenus dans l'acte d'accusation et ces infractions ou ces faits doivent être à l'origine des dépenses et des dommages subis par le prévenu. L'indemnité sera due si les infractions abandonnées par le tribunal revêtent, globalement considérées, une certaine importance et que les autorités de poursuite pénale ont ordonné des actes de procédure en relation avec les accusations correspondantes. En cas d'acte à "double utilité", il y a lieu de procéder à une répartition équitable (arrêt du Tribunal fédéral 6B_80/2016 du 7 mars 2017 consid. 2.1 et les références ; 6B_187/2015 du 28 avril 2015 consid. 6.1.2).

5.2. La question de l'indemnisation du prévenu (art. 429 CPP) doit être traitée en relation avec celle des frais (art. 426 CPP). Si le prévenu supporte les frais en application de l'art. 426 al. 1 ou 2 CPP, une indemnité est en règle générale exclue (ATF 137 IV 352 consid. 2.4.2 p. 357 ; arrêt 6B_187/2015 du 28 avril 2015 consid.  6.1.2).

5.3. Conformément à l'art. 432 al. 2 CPP, lorsque le prévenu obtient gain de cause sur la question de sa culpabilité et que l'infraction est poursuivie sur plainte, la partie plaignante ou le plaignant qui, ayant agi de manière téméraire ou par négligence grave, a entravé le bon déroulement de la procédure ou a rendu celle-ci plus difficile peut être tenu d'indemniser le prévenu pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits de procédure.

Lorsque la partie plaignante ou le plaignant supporte les frais en application de l'art. 427 al. 2 CPP, une éventuelle indemnité allouée au prévenu peut en principe être mise à sa charge en vertu de l'art. 432 al. 2 CPP (arrêt du Tribunal fédéral 6B_108/2018 du 12 juin 2018 consid. 4.1). Par le renvoi de l'art. 436 al. 1 CPP, cette disposition s'applique également à la deuxième instance (arrêts du Tribunal fédéral 6B_1180/2017 du 25 avril 2018 consid. 5.2 ; 6B_438/2013 du 18 juillet 2013 consid. 3.1).

Par ailleurs, selon la jurisprudence, les frais de défense du prévenu devant l'instance d'appel doivent être assumés par la partie plaignante dans le cas où seule celle-ci fait appel contre un acquittement prononcé à l'issue d'une procédure complète devant des tribunaux au sens de l'art. 13 CPP (ATF 139 IV 45 consid. 1 p. 47 s. ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_108/2018 du 12 juin 2018 consid. 4.1).

5.4. En l'espèce, l'appelante est condamnée à supporter l'intégralité des frais de la procédure préliminaire et de première instance ; elle sera par conséquent déboutée de ses conclusions en indemnisation pour cette étape de la procédure.

L'appelante succombe intégralement dans son appel. Elle obtient toutefois gain de cause en lien avec l'appel formé et retiré par les parties plaignantes (art. 428 al. 1 2ème phrase). Conformément à la répartition des frais de procédure, les parties plaignantes seront dès lors condamnées à lui rembourser 20% des dépenses nécessaires occasionnées par la procédure d'appel, à l'exclusion toutefois de la durée des débats d'appel, l'appel des parties plaignantes ayant été retiré à l'ouverture de ceux-ci.

L'appelante a fait valoir des conclusions en indemnisation pour la procédure d'appel à hauteur de cinq heures et 45 minutes d'activité de son conseil, chef d'étude, hors débats d'appel. Une indemnité correspondant à 20% de cette activité, soit une heure et neuf minutes d'activité à CHF 450.- de l'heure, lui sera allouée, soit CHF 559.40 TTC.

Conformément à l'art. 432 CP, cette indemnité sera mise à la charge des parties plaignantes.

6. 6.1. L'art. 433 al. 1 CPP permet à la partie plaignante de demander au prévenu une juste indemnité pour les dépenses obligatoires occasionnées par la procédure lorsqu'elle obtient gain de cause (let. a) ou lorsque le prévenu est astreint au paiement des frais conformément à l'art. 426 al. 2 CPP (let. b).

6.2. La partie plaignante obtient gain de cause au sens de l'art. 433 al. 1 CPP lorsque le prévenu est condamné et/ou si ses prétentions civiles sont admises. La juste indemnité, notion qui laisse un large pouvoir d'appréciation au juge, ne vise pas à réparer un dommage mais à couvrir les dépenses et les frais nécessaires pour faire valoir le point de vue de la partie plaignante dans la procédure pénale. Il s'agit en premier lieu des frais d'avocat (ATF 143 IV 495 consid. 2.2.4; 139 IV 102 consid. 4.1 et consid. 4.5 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_938/2023 consid. 4.1 non publié aux ATF 150 IV 273).

6.3. En l'espèce, les parties plaignantes ont obtenu gain de cause en première instance ; l'appelante ne critique pas le montant de l'indemnité allouée par le premier juge à ce titre, au-delà de l'acquittement plaidé. Cette indemnité sera dès lors confirmée.

Pour la procédure d'appel, les parties plaignantes sollicitent une indemnité correspondant à une heure et demie d'activité de leur conseil, hors débats d'appel (lesquels ont duré une heure et demie). Les parties plaignantes ayant obtenu gain de cause, l'appelante sera condamnée à les indemniser, dans la même proportion que pour les frais. La durée de l'audience d'appel sera toutefois prise intégralement en compte pour l'indemnisation, celle-ci n'ayant porté que sur les conclusions de l'appelante.

C'est ainsi une indemnité de CHF 1'313.40 ([80% de 1h30 + 1h30] x CHF 450.- plus TVA à 8.1%) qui sera allouée aux parties plaignantes et mise à la charge de l'appelante.

* * * * *

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

Reçoit les appels formés par A______ et par D______ et C______ contre le jugement JTDP/1127/2024 rendu le 19 septembre 2024 par le Tribunal de police dans la procédure P/13921/2022.

Prend acte du retrait de l'appel formé par D______ et C______.

Rejette l'appel formé par A______.

Condamne D______ et C______ à verser à A______ CHF 559.40 à titre de juste indemnité pour les dépenses obligatoires occasionnées par la procédure d'appel (art. 432 al. 1 et 436 CPP).

Rejette pour le surplus les conclusions en indemnisation de A______ (art. 429 et 436 CPP).

Condamne A______ à verser à D______ et C______ CHF 1'313.40 à titre de juste indemnité pour les dépenses obligatoires occasionnées par la procédure d'appel (art. 433 al. 1 et 436 CPP).

Arrête les frais de la procédure d'appel à CHF 1'855.-, comprenant un émolument de CHF 1'500.-.

Met 80% de ces frais, soit CHF 1'484.-, à la charge de A______.

Met 20% de ces frais, soit CHF 371.-, à la charge de D______ et C______.

Confirme le jugement entrepris, dont le dispositif est le suivant :

"Acquitte A______ de tentative de vol (art. 22 al. 1 CP cum 139 ch. 1 aCP).

Déclare A______ coupable de dommages à la propriété (art. 144 al. 1 CP).

Condamne A______ à une peine pécuniaire de 30 jours-amende (art. 34 CP).

Fixe le montant du jour-amende à CHF 30.-.

Met A______ au bénéfice du sursis et fixe la durée du délai d'épreuve à 3 ans (art. 42 et 44 CP).

Avertit A______ que si elle devait commettre de nouvelles infractions durant le délai d'épreuve, le sursis pourrait être révoqué et la peine suspendue exécutée, cela sans préjudice d'une nouvelle peine (art. 44 al. 3 CP).

Rejette les conclusions en indemnisation de A______ (art. 429 CPP).

Condamne A______ à verser à D______ et C______ CHF 5'749.10 à titre de juste indemnité pour les dépenses obligatoires occasionnées par la procédure (art. 433 al. 1 CPP).

Condamne A______ aux frais de la procédure, qui s'élèvent à CHF 977.-, y compris un émolument de jugement de CHF 300.- (art. 426 al. 1 CPP).

(…)

Fixe l'émolument complémentaire de jugement à CHF 600.-.

Condamne A______ à payer à l'État de Genève l'émolument complémentaire fixé à CHF  600.-. "

Notifie le présent arrêt aux parties.

Le communique, pour information, au Tribunal de police.

La greffière :

Linda TAGHARIST

 

La présidente :

Gaëlle VAN HOVE

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale.


 

 

ETAT DE FRAIS

 

 

 

COUR DE JUSTICE

 

 

Selon les art. 4 et 14 du règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais et dépens en matière pénale (E 4 10.03).

 

 

Total des frais de procédure du Tribunal de police:

CHF

1'577.00

Bordereau de frais de la Chambre pénale d'appel et de révision

 

 

Délivrance de copies et photocopies (let. a, b et c)

CHF

00.00

Mandats de comparution, avis d'audience et divers (let. i)

CHF

180.00

Procès-verbal (let. f)

CHF

100.00

Etat de frais

CHF

75.00

Emolument de décision

CHF

1'500.00

Total des frais de la procédure d'appel :

CHF

1'855.00

Total général (première instance + appel) :

CHF

3'432.00