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Décisions | Assistance juridique

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AC/654/2021

DAAJ/159/2021 du 07.12.2021 sur AJC/4332/2021 ( AJC ) , REJETE

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

AC/654/2021 DAAJ/159/2021

COUR DE JUSTICE

Assistance judiciaire

DÉCISION DU MARDI 7 DECEMBRE 2021

 

 

Statuant sur le recours déposé par :

 

Madame A______, domiciliée ______ [GE],

représentée par Me B______, avocat,

 

contre la décision du 16 août 2021 de la vice-présidente du Tribunal de première instance.

 

 

 


EN FAIT

A.           a. Par décision du 7 avril 2021, la vice-Présidente du Tribunal de première instance a octroyé l'assistance juridique à A______ (ci-après : la recourante) pour recourir à l'encontre d'une décision rendue par l'Office cantonal de la population et des migrations (OCPM) le 12 février 2021, ledit octroi étant limité à la première instance et à douze heures d'activité d'avocat, hors audiences et forfait courriers/téléphones. Me C______, avocate, a été désignée pour défendre les intérêts de l'intéressée.

Cette décision n'a pas été contestée.

b. Le 17 juin 2021, la recourante a sollicité une extension du nombre d'heures accordées, faisant valoir que les entretiens avec son avocate et la rédaction du recours devant le Tribunal administratif de première instance avaient requis dix heures de travail, auxquelles s'était ajouté le dépôt d'une réplique ayant nécessité huit heures supplémentaires, étant précisé que les faits litigieux s'étendaient sur plus de treize années et que le dossier comportait plus de soixante pages à analyser.

Le relevé d'activité intermédiaire produit faisait état, au jour de la demande d'extension, d'un total de 17h40 de travail, hors téléphones.

c. Par décision du 21 juin 2021, l'octroi susvisé a été étendu à quatre heures d'activité d'avocat supplémentaires, sous réserve de l'appréciation des heures nécessaires au moment de la taxation de l'état de frais, en vertu de l'art. 16 al. 2 RAJ.

Cette décision n'a pas non plus fait l'objet d'un recours.

d. Par courrier du 13 août 2021, la recourante a sollicité une nouvelle extension de l'assistance juridique, exposant que le quota de seize heures octroyé avait d'ores et déjà été épuisé, son avocate ayant effectué, au jour du dépôt de sa nouvelle demande d'extension, un total de 27h30 d'activité.

Elle a produit à cet égard les derniers échanges d'écritures intervenus dans le dossier au fond.

e. Par décision non motivée du 16 août 2021, la vice-présidente du Tribunal de première instance a alloué une nouvelle extension de six heures d'activité d'avocat supplémentaires, avec la même réserve que ci-dessus.

f. Par pli du 18 août 2021, la recourante a sollicité la motivation de la décision précitée, tout en demandant s'il existait une directive interne et/ou une instruction écrite ou orale relative à la réduction de l'indemnisation des avocats, ainsi qu'une base légale permettant de limiter le nombre d'heures d'activité d'avocat accordées. La recourante priait également l'autorité de première instance de lui indiquer pour quels motifs le forfait avait été limité à 22 heures, alors même qu'elle avait annoncé que son avocate avait déjà accompli plus de 27 heures pour la défense de ses intérêts.

B.            Par décision motivée à nouveau datée du 16 août 2021, expédiée en vue de notification le 27 août 2021, la vice-présidente du Tribunal de première instance, se référant aux art. 29 Cst. féd., 119 al. 4 CPC ainsi que 3 et 5 RAJ, a exposé qu'il apparaissait vraisemblable, au vu des écritures produites, que l'avocate de la recourante avait épuisé les quatre heures octroyées par décision du 21 juin 2021. En conséquence et compte tenu du fait que la procédure n'était pas encore terminée, il convenait de lui accorder une extension de l'assistance juridique pour six heures d'activité supplémentaires, hors audiences et forfait courriers/téléphones. Il était précisé que l'assistance juridique n'était pas octroyée avec effet rétroactif, le conseil de la recourante n'ayant pas allégué avoir procédé dans l'urgence, de sorte que les 27h30 qu'elle aurait effectuées jusqu'alors ne sauraient être intégralement couvertes, mais seulement à raison des seize heures d'ores et déjà octroyées, hors forfait courriers et téléphones. En conséquence, une extension de l'assistance juridique était admise, mais limitée à six heures d'activité d'avocat supplémentaires, ce qui représentait un total de vingt-deux heures pour la procédure de recours, hors forfait courriers et téléphones.

C.           a. Recours est formé contre cette décision, par acte expédié le 6 septembre 2021 à la Présidence de la Cour de justice. La recourante conclut, avec suite de dépens, à l'annulation de la décision entreprise et à ce que sa requête d'extension de l'aide étatique soit admise sans limitation du nombre d'heures. Subsidiairement, elle sollicite le renvoi de la cause à l'autorité de première instance pour nouvelle décision.

b. Dans ses observations du 16 septembre 2021, la vice-présidente du Tribunal de première instance a conclu au rejet du recours.

EN DROIT

1.             1.1. La décision entreprise est sujette à recours auprès de la présidente de la Cour de justice en tant qu'elle refuse partiellement l'extension de l'assistance juridique sollicitée (art. 10 al. 3 LPA). Le recours, écrit et motivé, est introduit auprès de l'instance de recours dans un délai de 30 jours (art. 10 al. 3 LPA, 130, 131 et 321 al. 1 CPC, applicables par renvoi des art. 10 al. 4 LPA et 8 al. 3 RAJ; arrêt du Tribunal fédéral 1B_171/2011 du 15 juin 2011 consid. 2.2).

1.2. En l'espèce, le recours est recevable pour avoir été interjeté dans le délai utile et en la forme écrite prescrite par la loi.

1.3. Lorsque la Cour est saisie d'un recours (art. 10 al. 3 LPA), son pouvoir d'examen est limité à la violation du droit et à la constatation manifestement inexacte des faits (art. 320 CPC, applicable par renvoi de l'art. 8 al. 3 RAJ; arrêt du Tribunal fédéral 1B_171/2011 précité). Il appartient en particulier au recourant de motiver en droit son recours et de démontrer l'arbitraire des faits retenus par l'instance inférieure (Hohl, Procédure civile, tome II, 2ème éd., n. 2513-2515).

1.4. Il n'y a pas lieu d'entendre la recourante, celle-ci ne le sollicitant pas et le dossier contenant suffisamment d'éléments pour statuer (art. 10 al. 3 LPA; arrêt du Tribunal fédéral 2D_73/2015 du 30 juin 2016 consid. 4.2).

2.             La recourante reproche à la vice-présidente du Tribunal de première instance d'avoir violé son droit d'être entendu, puisqu'elle a omis de statuer sur certaines questions posées par pli du 18 août 2021, en particulier sur l'existence de directives ou d'instructions relatives à la réduction de l'indemnisation des avocats, ainsi que d'une base légale permettant de limiter le nombre d'heures d'activité d'avocat accordées.

2.1. Le droit d'être entendu, garanti notamment par l'art. 29 al. 2 Cst., implique pour l'autorité l'obligation de motiver sa décision, afin que le destinataire puisse la comprendre, l'attaquer utilement s'il y a lieu et que l'autorité de recours puisse exercer son contrôle (ATF 143 IV 40 consid. 3.4.3; arrêt du Tribunal fédéral 1C_361/2020 du 18 janvier 2021 consid. 3.1). Pour satisfaire à cette exigence, il suffit que l'autorité mentionne, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidée et sur lesquels elle a fondé sa décision, de manière à ce que l'intéressé puisse se rendre compte de la portée de celle-ci et l'attaquer en connaissance de cause (ATF 145 IV 99 consid. 3.1; 143 III 65 consid. 5.2). L'autorité n'a pas l'obligation d'exposer et de discuter tous les faits, moyens de preuve et griefs invoqués par les parties, mais elle peut au contraire se limiter à ceux qui lui paraissent pertinents (ATF 142 II 154 consid. 4.2; 139 IV 179 consid. 2.2). La motivation peut être implicite et résulter des différents considérants de la décision (ATF 141 V 557 consid. 3.2.1).

Dès lors que l'on peut discerner les motifs qui ont guidé la décision de l'autorité, le droit à une décision motivée est respecté même si la motivation présentée est erronée. La motivation peut d'ailleurs être implicite et résulter des différents considérants de la décision (ATF 141 V 557 consid. 3.2.1).

2.2. En l'espèce, la décision querellée mentionne les bases légales et réglementaires sur lesquelles l'autorité de première instance s'est fondée pour statuer sur l'extension sollicitée de l'aide étatique. Cette motivation, quand bien même elle ne répondrait pas exhaustivement à toutes les interrogations formulées par la recourante, apparaît suffisante, puisque l'intéressée a été parfaitement en mesure de la comprendre et d'attaquer le raisonnement de ladite autorité, étant du reste relevé que la pratique de cette dernière en matière d'octrois partiels de l'assistance judiciaire est admise par l'autorité de céans, tel que cela résulte de décisions accessibles au public sur le site internet du Pouvoir judiciaire et auxquelles la recourante se réfère d'ailleurs dans son acte de recours.

Le grief tiré d'une prétendue violation du droit d'être entendu doit ainsi être rejeté.

3.             3.1.1. A teneur de l'art. 118 al. 2 CPC, l'assistance juridique peut être accordée totalement ou partiellement, ce qui signifie qu'elle doit être accordée, conformément au principe de proportionnalité, à la mesure de sa véritable nécessité (Message du Conseil fédéral relatif au Code de procédure civile, FF 2006, p. 6912, ad art. 116 du projet CPC; Huber, in Kommentar zur Schweizerischen Zivilprozessordnung [ZPO], Brunner/ Gasser/Schwander, 2ème éd., 2016, n. 17 ad art. 118 CPC). L'octroi partiel peut ainsi prendre diverses formes, selon les prestations accordées, l'étendue de celles-ci ou encore la phase de procès concernée (Tappy, Commentaire romand CPC, 2ème éd., 2019, n. 24 ad art. 118 CPC).

En application du principe de proportionnalité, l'art. 3 al. 1 première phrase RAJ, prévoit que l'assistance juridique peut être limitée à certains actes de procédure ou démarches déterminées, ainsi que dans la quotité des heures nécessaires à l'activité couverte. La limitation de l'activité de l'avocat désigné à un certain nombre d'heures d'activité est ainsi conforme tant à l'art. 3 al. 1 RAJ précité qu'au principe de proportionnalité consacré à l'art. 118 al. 2 CPC (DAAJ/110/2020 du 15 décembre 2020 consid. 3.1.2; DAAJ/33/2020 du 22 avril 2020 consid. 3.1.2).

Le bénéficiaire de l'assistance juridique est en droit, sur la base de l'art. 3 al. 1 seconde phrase RAJ, de solliciter une extension de la quotité des heures d'activité d'avocat allouées, en fonction des actes de procédure encore à accomplir. Il lui appartient toutefois de justifier que l'activité de son conseil a atteint le quota d'heures autorisées et que le travail accompli par celui-ci était utile et nécessaire à sa défense (art. 3 al. 2 et 16 al. 2 RAJ; DAAJ/110/2020 du 15 décembre 2020 consid. 3.1.2; DAAJ/64/2015 du 14 septembre 2015 consid. 3.2).

3.1.2. Au terme de l'art. 5 al. 1 RAJ, l'assistance juridique est en règle générale accordée avec effet au jour du dépôt de la requête. Elle est exceptionnellement accordée avec effet rétroactif (art. 119 al. 4 CPC et 8 al. 3 RAJ).

Si les conditions d'octroi de l'assistance juridique et d'un défenseur d'office sont réunies, l'Etat doit prendre les coûts en charge à partir du moment du dépôt de la requête. L'assistance d'un défenseur d'office s'étend néanmoins déjà aux prestations fournies par l'avocat pour un mémoire déposé en même temps que la requête d'assistance juridique et aux travaux préparatoires nécessaires, c'est-à-dire aux prestations effectuées par l'avocat en vue du mémoire à l'occasion duquel la requête a été déposée. Dès lors l'assistance juridique ne peut pas être refusée au motif que l'assistance d'un avocat ne se justifierait plus, car il a déjà effectué son travail, même si des opérations ultérieures ne sont plus nécessaires. Un effet rétroactif au-delà de celui susmentionné n'est en revanche que tout à fait exceptionnel, lorsqu'il n'a pas été possible, en raison de l'urgence d'une opération de procédure impérativement requise, de déposer en même temps une requête d'assistance juridique et de désignation d'un défenseur d'office. L'art. 29 al. 3 Cst. n'oblige pas à protéger l'indigent de son ignorance ou de sa négligence, ou d'un manque de conseil de son avocat, s'il procède sur crédit de tiers ou de son avocat alors qu'il aurait pu requérir l'assistance juridique et l'octroi d'un défenseur d'office (ATF 122 I 203 consid. 2 c-g, in JdT 1997 I 604; arrêts du Tribunal fédéral 5A_849/2014 du 30 mars 2015 consid. 4.5 et 5A_181/2012 du 27 juin 2012 consid. 2.3.3).

Toute demande d'assistance juridique, même une extension du nombre d'heures d'activité d'avocat allouées, est soumise au principe de non-rétroactivité (arrêt du Tribunal fédéral 4A_523/2019 du 16 avril 2020 consid. 7; DAAJ/106/2019 du 12 septembre 2019 consid. 2.3).

3.2. En l'espèce, la recourante n'a pas attaqué les décisions des 7 avril et 17 juin 2021, de sorte qu'elle a implicitement acquiescé, pour la procédure de recours contre la décision de l'OCPM, au principe d'une assistance judiciaire quantitativement circonscrite à un certain nombre d'heures d'activité d'avocat d'office (soit douze heures, ensuite étendues à seize). Ces décisions ont dès lors acquis autorité de chose jugée sur ce point, avec pour conséquence que les nombreux griefs invoqués par la recourante en lien avec la légalité et la constitutionnalité de l'octroi de l'assistance judiciaire limité à une certaine quotité d'heures de travail d'avocat et sur les conséquences d'un tel octroi sur la gestion du dossier par cet avocat ne seront pas examinés par l'autorité de céans.

Seule demeure donc litigieuse la question du nombre d'heures accordé dans la décision d'extension de l'aide étatique du 16 août 2021, la recourante reprochant notamment à l'autorité de première instance de ne pas avoir tenu compte de l'intégralité des heures qu'elle a annoncé avoir effectuées.

Il résulte des développements qui précèdent qu'une demande d'extension de la quotité des heures d'activité d'avocat allouées est, à l'instar de la demande d'assistance juridique, soumise au principe de non-rétroactivité, l'art. 119 al. 4 CPC ne permettant pas d'obtenir la couverture de frais d'avocat déjà engagés au moment du dépôt de la requête d'aide étatique. Certes, il demeure possible, à titre exceptionnel, d'accorder l'assistance judiciaire avec effet rétroactif. Le justiciable souhaitant en bénéficier est toutefois tenu de fournir les éléments pertinents permettant au juge d'estimer le bien-fondé d'une telle dérogation.

Or, la recourante, pourtant assistée d'un avocat, a requis l'extension de l'assistance judiciaire en août 2021, au moment où l'activité déployée excédait déjà de près de six heures la durée allouée en dernier lieu, sans expliquer les motifs qui l'ont conduite à déposer sa demande de manière tardive. Elle ne prétend pas avoir été objectivement empêchée, notamment en raison d'une situation d'urgence, de requérir une augmentation du nombre d'heures d'avocat avant l'épuisement, ou à tout le moins peu après l'épuisement des quatre heures allouées par décision du 21 juin 2021.

C'est dès lors à bon droit que l'autorité de première instance a retenu qu'aucun motif ne permettait de déroger au principe de non-rétroactivité susmentionné et qu'elle a uniquement examiné si une augmentation du nombre d'heures d'activité d'avocat se justifiait pour la période postérieure au dépôt de la seconde demande d'extension.

La décision contestée a fixé à six heures le nombre d'heures nécessaire pour couvrir l'activité devant encore être accomplie pour la suite de la procédure. La recourante n'ayant pas critiqué spécifiquement cet aspect de la décision, il n'y a pas lieu de revenir sur la quotité ainsi arrêtée.

Compte tenu de ce qui précède, le recours, infondé, sera rejeté.

Il sera toutefois rappelé à la recourante qu'elle demeure autorisée à demander – en temps utile – une augmentation de la durée allouée dans l'hypothèse où le nombre d'heures accordé devrait par la suite s'avérer insuffisant.

4.             Sauf exceptions non réalisées en l'espèce, il n'est pas perçu de frais judiciaires pour la procédure d'assistance juridique (art. 119 al. 6 CPC). Compte tenu de l'issue du litige, il n'y a pas lieu à l'octroi de dépens.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
LA PRÉSIDENTE DE LA COUR :


A la forme
:

Déclare recevable le recours formé par A______ contre la décision rendue le 16 août 2021 par la vice-présidente du Tribunal de première instance dans la cause AC/654/2021.

Au fond :

Le rejette.

Déboute A______ de toutes autres conclusions.

Dit qu'il n'est pas perçu de frais judiciaires pour le recours, ni alloué de dépens.

Notifie une copie de la présente décision à A______ en l'Etude de Me B______ (art. 137 CPC).

Siégeant :

Madame Sylvie DROIN, présidente; Madame Maïté VALENTE, greffière.

 

La présidente :

Sylvie DROIN

 

La greffière :

Maïté VALENTE

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), la présente décision incidente peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière de droit public.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.