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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2871/2017

ATAS/668/2018 du 27.07.2018 ( CHOMAG ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/2871/2017 ATAS/668/2018

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 27 juillet 2018

2ème Chambre

 

En la cause

Monsieur A______, domicilié au PETIT-LANCY, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Agrippino RENDA

 

 

recourant

 

contre

OFFICE CANTONAL DE L'EMPLOI, Service juridique, sis Rue des Gares 16, GENEVE

 

 

intimé

 


EN FAIT

1.        Monsieur A______ (ci-après : l’assuré ou le recourant), né le ______ 1979, ressortissant portugais, domicilié dans le canton de Genève, célibataire, employé dans le domaine du nettoyage, a eu, en 2010, en jouant au football, un accident lui ayant fracturé l’orteil gauche et ayant nécessité par la suite des opérations. Il a développé dans ce contexte un état dépressif. Il s’est trouvé en incapacité de travail durablement, notamment dès le 1er mai 2014. Son contrat de travail a été résilié le 12 novembre 2015 pour le 29 février 2016.

2.        L’assuré s’est inscrit au chômage le 26 février 2016, se déclarant à la recherche d’un emploi de nettoyeur de locaux à plein temps dès le 1er mars 2016. D’après le formulaire de pré-inscription qu’il a rempli ce jour-là, l’assuré était sous certificat médical pour cause de maladie à 100 %, depuis le 1er mai 2014, avec reprise le 1er mars 2016. Le 29 février 2016, le docteur B______, spécialiste FMH en médecine interne, a attesté que l’assuré ne présentait plus d’incapacité de travail à partir du 1er mars 2016, en précisant que la reprise de son métier de nettoyeur n’était pas envisageable et qu’une reconversion professionnelle était souhaitable ; selon un précédent certificat médical dudit médecin, du 26 janvier 2016, l’assuré était en totale incapacité de travail du 1er au 29 février 2016 pour cause de maladie. Un délai-cadre d’indemnisation a été ouvert en faveur de l’assuré du 1er mars 2016 au 28 février 2018. L’assuré a demandé le versement des indemnités de chômage à la caisse de chômage Syndicat interprofessionnel des travailleuses et travailleurs (ci-après : caisse SIT).

3.        D’après un courrier de l’office régional de placement (ci-après : ORP) du 3 mars 2016 répondant à une demande de l’office cantonal de l’assurance-invalidité (ci-après : AOI), un délai-cadre d’indemnisation avait déjà été ouvert en faveur de l’assuré du 1er août 2014 au 31 juillet 2016, sans que celui-ci n’ait eu droit aux indemnités de chômage, et s’agissant du nouveau délai d’indemnisation ouvert, du 1er mars 2016 au 28 février 2018, le cas était « non éclairci – Droit à l’étude » ; au regard de la question du droit aux indemnités de chômage figurait la mention « En attente d’une décision caisse – En étude de droit ».

4.        À teneur d’un plan d’actions qu’il a signé le 11 mars 2016 avec sa conseillère en personnel, l’assuré devait faire au minimum huit recherches personnelles d’emploi par mois (nombre porté à dix selon un nouveau plan d’actions du 18 avril 2016). L’assuré les a effectuées régulièrement, pour des postes d’employé d’entretien.

5.        Par courriel du 25 mai 2016, la conseillère en personnel de l’assuré auprès de l’ORP a demandé à la Fondation IPT de convoquer l’assuré pour un entretien dans le cadre de la collaboration entre l’assurance-invalidité (ci-après : AI), auprès de laquelle une demande de prestations avait été déposée en octobre 2014 suite à des problématiques de santé, et l’assurance-chômage, dans la perspective de pouvoir l’accompagner dans l’élaboration d’un nouveau projet professionnel adapté à sa situation. Référence était faite à l’attestation précitée du Dr B______ du 29 février 2016, ainsi qu’au fait que l’AI n’avait pas relevé d’incapacité de travail liée à la santé physique de l’assuré ; ce dernier avait fait part à sa conseillère en personnel de difficultés psychologiques pour lesquelles il était suivi ; ses problèmes de santé s’étaient répercutés sur son moral. À teneur d’un courriel du 28 juin 2016, le médecin traitant de l’assuré était le Dr B______ et son psychiatre le docteur C______.

6.        Le 30 juin 2016, l’ORP a informé l’assuré que celui-ci allait être soumis à une expertise auprès du médecin-conseil de l’office cantonal de l’emploi (ci-après : OCE), la docteure D______, le 11 juillet 2016.

7.        Le 3 août 2016, la Fondation IPT a convoqué l’assuré pour un premier entretien fixé au 31 août 2016 avec Madame E______.

8.        Le 1er septembre 2016, l’ORP a confirmé l’inscription de l’assuré à un cours « IPT Retour Emploi », du 31 août au 30 novembre 2016, à titre de mesure du marché du travail (ci-après : MMT).

9.        Le 12 septembre 2016, l’ORP, indiquant avoir égaré son rapport médical en juillet 2016, a demandé à la Dre D______ de remplir à nouveau le document « préavis médical » résultant de sa consultation du 11 juillet 2016.

10.    À teneur du procès-verbal de l’entretien de conseil du 29 septembre 2016 ayant porté sur le retour du médecin-conseil, le préavis médical de ce dernier était accepté. L’assuré ne pouvait plus exercer dans son domaine d’activité (soit comme boulanger ou nettoyeur) ; sa reprise de travail à 100 % à partir du 1er mars 2016 était confirmée dans une activité adaptée à ses limitations (pas de station debout prolongée ni marche prolongée) ; son état psychique n’était pas entièrement stabilisé. Dans le cadre de l’assurance-chômage, il était possible d’octroyer le cours de cafetier seulement s’il y avait une promesse d’engagement à la clé. Le suivi chez IPT était adapté à la situation actuelle de l’assuré, afin d’établir une cible professionnelle réaliste et réalisable.

11.    Le vendredi 30 septembre 2016 à 18h00, l’assuré s’est tordu le pied en descendant du tram, se fracturant le métatarse (sans les orteils) du pied droit. Le lundi 3 octobre 2016, la docteure F______, médecin interne au service des urgences des Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : HUG), a certifié que l’assuré était en arrêt de travail (incapacité de travail de 100 %) du 3 au 16 octobre 2016 pour cause d’accident.

12.    Le 4 octobre 2016, l’ORP a adressé une « déclaration de sinistre LAA pour les chômeurs » à la SUVA concernant cet accident.

13.    Le 6 octobre 2016, le docteur G______, médecin chef de clinique auprès du service de médecine de premier recours des HUG, a certifié que l’arrêt de travail de l’assuré pour cause d’accident s’étendait jusqu’au 13 novembre 2016.

14.    Le 13 octobre 2016, l’ORP a dispensé l’assuré d’effectuer des recherches d’emploi et de participer aux entretiens de conseil, et lui a indiqué notamment que son dossier serait annulé au plus tard après un mois d’incapacité de travail et qu’en cas de reprise il lui faudrait se réinscrire au chômage. Parallèlement, le 12 octobre 2016, la fondation IPT a fermé la MMT que suivait l’assuré, en accord avec la conseillère en personnel de ce dernier, en précisant qu’elle pourrait la rouvrir dès que son état de santé le permettrait.

15.    Le 10 novembre 2016, le Dr G______ a prolongé l’arrêt de travail de l’assuré jusqu’au 30 novembre 2016.

16.    Le 29 novembre 2016, le Dr B______ a certifié que l’assuré présentait une incapacité de travail de 100 % du 1er au 31 décembre 2016 pour cause d’accident.

17.    Le 13 décembre 2016, l’ORP a annulé le dossier de l’assuré en qualité de demandeur d’emploi avec effet au 30 novembre 2016 pour cause de maladie supérieure à un mois.

18.    Le 23 décembre 2016, le Dr B______ a certifié que l’assuré présentait une incapacité de travail de 100 % du 1er au 19 janvier 2017 pour cause d’accident.

19.    Le 19 janvier 2017, le Dr G______ a prolongé l’arrêt de travail de l’assuré pour cause d’accident jusqu’au 22 janvier 2017.

20.    Par certificat médical du 23 janvier 2017, le Dr C______ a attesté que la capacité de travail de l’assuré était nulle depuis le 23 janvier 2017, certificat qu’il renouvellera les 22 février, 22 mars, 21 avril, 19 mai et 17 juin 2017.

21.    Dans l’intervalle, à une date ne ressortant pas du dossier, l’assuré a demandé au service des prestations cantonales en cas de maladie de l’OCE (ci-après : service des PCM) de lui octroyer des prestations en cas d’incapacité passagère de travail (ci-après : PCM).

22.    En mars 2017, remplissant un formulaire médical que le service des PCM lui a fait parvenir, le Dr C______ a indiqué au médecin-conseil psychiatre de l’OCE, le docteur H______, que l’assuré n’avait pas eu de problème de santé avant un accident de football du 11 décembre 2010, qui lui avait causé une fracture du pied gauche ayant connu une mauvaise évolution, soit une impotence progressive de la jambe gauche, des douleurs sur tout le membre inférieur gauche, et une atteinte de son humeur. L’assuré le consultait depuis le 2 mars 2016 pour cette pathologie-ci, qui avait entraîné une nouvelle période d’incapacité dès le 23 janvier 2017. L’accident considéré avait « littéralement perturbé sa vie ».

23.    L’assuré a été convoqué pour une visite médicale chez le Dr H______ fixée au 4 avril 2017.

24.    Dans un avis médical du 4 avril 2017, le Dr H______ a indiqué que l’assuré s’était présenté à l’expertise et que le médecin traitant lui avait transmis des renseignements. Il répondait « oui » à la question de savoir si la période d’incapacité de travail ayant débuté le 23 janvier 2017 était en lien, du point de vue de la pathologie, avec la longue période d’incapacité précédente du 1er mai 2014 au 28 février 2016. Il s’agissait d’une rechute. L’assuré avait des limitations dans sa capacité de déplacement pouvant affecter sa capacité de travail.

25.    Par décision du 5 avril 2017, déclarée exécutoire nonobstant opposition, le service des PCM a nié le droit de l’assuré aux prestations cantonales en cas d’incapacité passagère de travail dès le 22 février 2017, pour toute la durée de son incapacité de travail actuelle, pour le motif que les causes de son incapacité de travail dès le 23 janvier 2017 étaient antérieures à son inscription au chômage.

26.    Par recommandé du 2 mai 2017, l’assuré a formé opposition à l’encontre de cette décision. Il avait eu par le passé une incapacité de travail prolongée, pour laquelle des prestations de l’AI avaient été demandées, puis il s’était inscrit au chômage le 26 février 2016, avait eu le 30 septembre 2016 un accident l’ayant mis en arrêt de travail jusqu’au 23 janvier 2017. Étant donné sa situation personnelle, se trouvant sans emploi et accidenté, il avait chuté moralement, et son psychiatre estimait qu’il ne remplissait pas les conditions nécessaires pour travailler ; son dernier certificat médical se terminerait le 21 mai 2017.

27.    Le 15 mai 2017, en réponse à une demande du service juridique de l’OCE, le service des PCM a indiqué avoir fondé sa décision sur les renseignements médicaux recueillis par le Dr H______, en particulier sur le rapport précité de ce dernier du 4 avril 2017, dont il ressortait que les causes de l’incapacité de travail de l’assuré dès le 23 janvier 2017 étaient connues de ce dernier avant même son inscription au chômage le 26 février 2016. L’assuré n’apportait, dans son opposition, aucun élément probant susceptible de modifier cette appréciation, sinon le fait qu’il avait subi un accident le 30 septembre 2016 dont l’incapacité subséquente avait été prise en charge par la SUVA jusqu’au 2 janvier 2017. La pathologie dont l’assuré souffrait d’un point de vue psychologique, occasionnant le nouvel épisode d’incapacité dès le 23 janvier 2017, n’était pas en lien direct avec cet accident (auquel cas cette nouvelle incapacité aurait dû être prise en charge par la SUVA) ; elle était antérieure à l’inscription au chômage. Le service des PCM maintenait sa décision.

28.    Par décision sur opposition du 31 mai 2017, l’OCE a rejeté l’opposition de l’assuré et confirmé sa décision initiale précitée du 5 avril 2017. En cas de divergence entre l’avis d’un médecin traitant et celui du médecin-conseil de l’OCE, l’avis de ce dernier prévalait, et l’OCE ne pouvait s’en écarter. L’assuré n’apportait par ailleurs aucun élément permettant de revoir la décision litigieuse.

29.    Par acte du 3 juillet 2017, l’assuré a recouru contre cette décision sur opposition par-devant la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : CJCAS), en concluant préalablement à l’accomplissement d’actes d’instruction (dont l’audition des Drs B______ et C______) et, principalement, à l’annulation de la décision attaquée et à la reconnaissance de l’intégralité de son droit aux PCM avec effet rétroactif au 23 janvier 2017. Il était pleinement capable de travailler dès le premier jour de son délai-cadre d’indemnisation ouvert suite à son inscription au chômage le 26 février 2016. Il avait eu un accident le 30 septembre 2016, suite auquel sa santé s’était dégradée, en particulier sur le plan psychologique ; il s’était trouvé en incapacité totale de travailler pour cause de maladie dès le 23 janvier 2017, ainsi que le Dr C______ l’avait attesté par certificats des 23 janvier, 22 février, 22 mars, 21 avril, 19 mai et 17 juin 2017. L’assuré invoquait une violation du principe de l’interdiction de l’arbitraire, de son droit d’être entendu et de la loi en matière de chômage du 11 novembre 1983 (LMC - J 2 20), en particulier de l’art. 13 de cette dernière.

30.    Le 25 juillet 2017, l’OCE a transmis à la CJCAS les pièces ayant fondé la décision attaquée, dans les termes de laquelle il persistait, l’assuré n’apportant aucun élément nouveau permettant de la revoir.

31.    Invité à présenter des observations, l’assuré a requis et obtenu à réitérées reprises une prolongation de délai à cette fin, en produisant deux certificats d’incapacité totale de travailler établis les 22 septembre et 22 novembre 2017. Après que la CJCAS l’eut informé qu’elle gardait la cause à juger, le 24 novembre 2017, l’assuré a requis et obtenu une ultime prolongation de délai pour présenter des observations, et, le 5 janvier 2018, un avocat s’étant constitué pour la défense de ses intérêts a fait de même, pour finalement – après renouvellement d’une telle demande, motivée par le fait que l’assuré, fortement affaibli ces derniers mois sur le plan psychologique, n’avait pas pu lui communiquer les dernières pièces utiles et que le Dr C______ était difficilement joignable – reprendre, dans une écriture du 15 mars 2018, les conclusions du recours déposé le 3 juillet 2017 par l’assuré, puis faire de même, les 23 mars et 4 avril 2018, tout en produisant, à cette date-ci, une attestation médicale du Dr C______ du 23 mars 2018.

Dans cette attestation, le Dr C______ se déclarait en désaccord avec les conclusions figurant dans le rapport lacunaire et hâtif du Dr H______ du 4 avril 2017. L’assuré était apte à travailler à 100 % « avant le 23.1.2017 comme le témoign[ait] le rapport du Dr B______, son généraliste, fait le 29.2.16 ». Il n’y avait « aucun lien entre son incapacité de travail précédente soit du 1.5.14 au 28.2.16 ». Sur « le plan psychiatrique, sa capacité de travail était aussi optimale le 28.2.16 ».

32.    Le 25 mai 2018, la CJCAS a procédé à l’audition comme témoins du Dr H______ puis, en confrontation avec ce dernier, du Dr C______.

a.       Le Dr H______ a indiqué que – sur la base des informations que le Dr C______ lui avait communiquées en vue de la visite médicale du 4 avril 2017 par le biais de réponses à un formulaire de l’OCE (dont il a produit une copie, de même que de ses notes personnelles) et de celles qu’il avait recueillies de l’assuré lors de cette visite médicale (ayant dû durer, selon lui, un peu plus des 5 à 7 minutes indiquées par le recourant) – il avait estimé que l’incapacité de travail attestée dès le 23 janvier 2017 par le psychiatre C______ était motivée par les mêmes raisons que l’arrêt de travail du 1er mai 2014 au 29 février 2016. Faisant référence non à un accident du 30 septembre 2016 (que l’assuré n’avait pas invoqué devant lui ou le cas échéant sans que cela n’ait eu d’importance), mais à un accident de football survenu le 10 décembre 2010 et aux conséquences que celui-ci avaient eues (en particulier une impotence progressive de la jambe gauche et des douleurs dans ce membre) et à l’arrêt de travail en étant résulté (en particulier un statut de chômeur constitutif d’un élément de stress majeur), le Dr H______ a déclaré que les problèmes somatiques de l’assuré avaient eu un impact important sur l’état thymique de l’assuré, d’autant plus dans son cas d’homme vivant « seul à Genève, pas marié [et ayant] deux amis seulement ». Le témoin n’avait pas disposé – ni sollicité de l’OCE (qui, normalement, les fournissait) – d’autres éléments sur l’incapacité de travail antérieure considérée que les réponses écrites du Dr C______, ayant eu l’assuré en consultation la première fois le 2 mars 2016, et il ignorait de quel(s) médecin(s) (y compris leur éventuelle spécialité) avaient émané le cas échéant des certificats d’incapacité de travail touchant la période du 1er mai 2014 au 29 février 2016.

b.      Le Dr C______ a déclaré que le 2 mars 2016, lors de sa première consultation à son cabinet, l’assuré présentait un état dépressif en relation avec le traumatisme du pied gauche qu’il avait subi en jouant au football en décembre 2010 et de ses conséquences (une incapacité durable de travail, une opération subie des années auparavant et vécue comme un échec, des douleurs), état dépressif remontant déjà à plusieurs mois au moins lors de cette première consultation. Il l’avait alors mis en arrêt de travail dès le 1er mars 2016 pour cause de dépression (pour une durée que le témoin n’a pu préciser). La totale incapacité de travail qu’il avait attestée le 23 janvier 2017 l’était pour une rechute de la dépression qu’avait l’assuré depuis plusieurs mois avant le 2 mars 2016. Avant le 23 janvier 2017, l’assuré était déjà en arrêt de travail sur certificat de son généraliste, le Dr B______, probablement pour la conjonction de ses problèmes somatiques et psychiques. Le Dr C______ a déclaré revenir sur l’attestation qu’il avait établie le 23 mars 2018 à l’adresse de l’avocat de l’assuré, en tant qu’il y avait indiqué que ce dernier avait été apte à travailler à 100 % avant le 23 janvier 2016, qu’il n’y avait aucun lien entre la nouvelle incpacité de travail attestée dès le 23 janvier 2017 et celle antérieure du 1er mai 2014 au 28 février 2016, et que le rapport du Dr H______ du 4 avril 2017 était lacunaire et hâtif. L’assuré lui avait parlé d’un accident qu’il avait eu le 30 septembre 2016 en sortant d’un tram.

33.    Le 5 juin 2018, la CJCAS a procédé à l’audition comme témoin du Dr B______, spécialiste FMH en médecine interne et médecin traitant de l’assuré depuis le 14 juin 2013.

Aux conséquences physiques de l’accident de football qu’avait eu l’assuré en 2010 s’était ajoutée une diminution psychique, soit un sentiment de dévalorisation qui s’était développé sous la forme d’un état dépressif, d’une sinistrose, ayant pris le pas sur les problèmes somatiques, avec des hauts et des bas. Le problème psychique avait contribué, nettement, à justifier l’incapacité de travail de l’assuré, de façon prépondérante et très précocement. Même s’il allait mieux, l’assuré n’était pas guéri de son problème psychique au 1er mars 2016, date à partir de laquelle le Dr B______ lui avait reconnu une pleine capacité de travail dans un emploi adapté, compte tenu du fait que son ancien contrat de travail avait pris fin le 29 février 2016 et dans l’idée de l’aider à rebondir et à retrouver une stature lui permettant de fonctionner normalement. Ceci ne s’était toutefois pas produit ; s’il avait estimé, le 12 avril 2016, que l’assuré allait bien au niveau psychologique, le Dr B______ avait noté, le 15 septembre 2016, qu’il était toujours engoncé dans son problème psychologique. L’assuré avait eu une entorse du pied en 2016. Le Dr B______ l’avait mis en arrêt de travail, à fin 2016-début 2017, en raison d’un calcul rénal. Le 24 janvier 2017, il l’avait vu pour une affection des voies aériennes supérieures, sans qu’un problème psychique ne soit évoqué. Le Dr B______ s’est déclaré nullement surpris que l’assuré ait pu être reconnu par son psychiatre en totale incapacité de travail dès le 23 janvier 2017, dans la continuité de ses problèmes psychiques présents entre 2014 et 2016 ; ledit médecin n’évoquait pas une rechute, mais la suite d’un même processus, dans la mesure où l’assuré n’était pas remis de la cassure psychologique que lui avait causé l’accident de 2010. Le Dr B______ a estimé que l’attestation médicale du Dr C______ du 23 mars 2018, qui lui a été montrée en audience, n’était pas correcte.

34.    Le 14 juin 2018, l’OCE a persisté dans les termes de sa décision sur opposition du 31 mai 2017. Il ressortait des explications que les Drs H______, C______ et B______ avaient données à la CJCAS lors de leurs auditions des 25 mai et 5 juin 2018 que les causes de l’incapacité de travail de l’assuré ayant débuté le 23 janvier 2017 étaient survenues avant son inscription à l’assurance-chômage.

35.    Par mémoire après enquêtes du 12 juillet 2018, l’assuré a persisté dans ses conclusions et demandé à ce qu’une expertise médicale pluridisciplinaire neutre soit ordonnée préalablement à toute décision sur le fond, compte tenu des éléments médicaux contradictoires figurant au dossier après que les Drs B______ et C______ avaient renié, de façon incompréhensible, leurs certificats médicaux respectifs des 1er et 23 mars 2018 et que, de son côté, le Dr H______ avait reconnu avoir établi son avis médical du 4 avril 2017 sans disposer ni avoir requis d’éléments médicaux sérieux relatifs à ses incapacités de travail précédentes. Lesdits médecins avaient affirmé tout et son contraire, au point que la décision attaquée était fondamentalement arbitraire sur le plan tant juridique que médical.

36.    Les écritures de l’OCE du 14 juin 2018 et de l’assuré du 12 juillet 2018 ont été transmises respectivement à l’assuré et à l’OCE par courrier du 16 juillet 2018.

EN DROIT

1.        a. Conformément à l'art. 134 al.  3 let. b de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la CJCAS est compétente pour connaître des contestations prévues à l’art. 49 al. 3 de la loi en matière de chômage, du 11 novembre 1983 (LMC - J 2 20), dont celles rendues en matière de PCM. Elle l’est donc pour statuer sur le présent recours, dès lors que celui-ci est dirigé contre une décision sur opposition niant dès le 22 février 2017 le droit du recourant à des PCM.

b. La procédure est régie par la loi sur la procédure administrative, du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10), et, le cas échéant, par les dispositions de procédure figurant dans la LMC elle-même, étant précisé que les PCM sont des prestations cantonales complémentaires à celles prévues par la loi fédérale sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité du 25 juin 1982 (LACI - RS 837.0 ; cf. art. 1 let. d LMC), qu’elles relèvent du droit cantonal autonome et non du droit fédéral ou du droit cantonal d'exécution du droit fédéral (arrêt 8C_864/2012 du 26 février 2013 consid. 3), et que la LMC ne comporte pas de renvoi à la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1), qui ne trouve donc pas application à leur égard, même à titre de droit cantonal supplétif.

Le recours a été interjeté en temps utile (art. 49 al. 3 LMC ; art. 17 al. 3 et 62 al. 1 let. a LPA), dans le respect des exigences de forme et de contenu prévues par la loi (art. 64 s. LPA), par une personne ayant qualité pour recourir dès los qu’elle est touchée par elle et a un intérêt digne de protection à son annulation ou sa modification (art. 60 al. 1 let. a et b LPA).

c. Le recours est recevable.

2.        Le litige porte sur le droit du recourant au versement de prestations complémentaires cantonales en cas de maladie, et plus particulièrement sur la question de savoir si les causes de son incapacité de travail sont antérieures à son inscription au chômage, sujet à propos duquel la chambre de céans a déjà rendu plusieurs arrêts (cf. not. ATAS/1092/2017 du 4 décembre 2017 ; ATAS/1083/2017 du 23 novembre 2017 ; ATAS/1017/2017 du 2 novembre 2017 ; ATAS/605/2017 du 30 juin 2017 ; ATAS/439/2017 du 30 mai 2017 ; ATAS/360/2017 du 8 mai 2017 ; ATAS/263/2017 du 4 avril 2017 ; ATAS/663/2016 du 25 août 2016 ; ATAS/979/2015 du 18 décembre 2015).

3.        a. Selon l’art. 28 al. 1 LACI, les assurés qui, passagèrement, ne sont aptes ni à travailler ni à être placés ou ne le sont que partiellement en raison d’une maladie, d’un accident ou d’une grossesse et qui, de ce fait, ne peuvent satisfaire aux prescriptions de contrôle, ont droit à la pleine indemnité journalière s’ils remplissent les autres conditions dont dépend le droit à l’indemnité ; leur droit persiste au plus jusqu’au 30ème jour suivant le début de l’incapacité totale ou partielle de travail et se limite à 44 indemnités journalières durant le délai-cadre. D’après l’al. 5 de cette disposition, le chômeur doit apporter la preuve de son incapacité ou de sa capacité de travail en produisant un certificat médical ; l’autorité cantonale ou la caisse peut toujours ordonner, aux frais de l’assurance, un examen médical par un médecin-conseil.

L'art. 28 LACI déroge au principe de l'assurance-chômage voulant que les prestations ne soient allouées que si l'assuré est apte au placement. Le but de cette exception est d'éviter des cas de rigueur, de combler des lacunes de couverture dans le domaine de l'assurance-maladie et accidents, mais surtout d'assurer une meilleure protection sociale des chômeurs en cas de maladie, d'accident ou de maternité, qui peuvent, grâce à cette disposition, bénéficier des indemnités journalières pendant une période limitée (ATF 117 V 244 consid. 3c).

b. S’ils ne sont pas assurés à titre individuel auprès d’une assurance perte de gain privée, les chômeurs ayant épuisé leurs droits selon l’art. 28 LACI peuvent se retrouver privés d’une compensation de leur perte de gain. C’est pourquoi certains cantons ont institué une assurance sociale perte de gain en faveur des chômeurs, appelée à compléter les prestations servies par l’assurance-chômage (Boris RUBIN, Commentaire de la loi sur l’assurance-chômage, 2014, n. 27 s. ad art. 28, p. 287). Tel est le cas dans le canton de Genève.

Au nombre des prestations complémentaires cantonales en matière de chômage que le législateur genevois a adoptées, l’art. 7 let. a LMC prévoit en effet les PCM, dont peuvent bénéficier les chômeurs qui ont épuisé leur droit aux indemnités journalières pour maladie ou accident, conformément à l’art. 28 LACI (art. 8 LMC).

Ainsi, selon l’art. 9 al. 1 LMC, sont assurés à titre obligatoire contre le risque de perte de gain en cas de maladie ou d'accident, les chômeurs qui sont indemnisés par une caisse de chômage en vertu de la LACI et qui sont domiciliés dans le canton de Genève. Les PCM ne peuvent être versées que si elles correspondent à une inaptitude au placement au sens de l’art. 28 LACI (art. 12 al. 1 LMC). Elles sont servies au bénéficiaire dès la fin du droit aux indemnités au sens de l’art. 28 LACI jusqu’à concurrence de 270 indemnités journalières cumulées dans le délai-cadre d’indemnisation fédérale, et elles ne peuvent en outre dépasser le nombre des indemnités de chômage auquel le bénéficiaire peut prétendre en vertu de l’art. 27 LACI (art. 15 LMC). Un délai d'attente, de 2 jours ouvrables, est applicable lors de chaque demande de PCM (art. 14 al. 5 LMC ; art. 14A du règlement d'exécution de la loi en matière de chômage, du 23 janvier 2008 - RMC - J 2 20.01).

4.        a. Selon l’art. 13 LMC, le versement de prestations est exclu dans le cas où il peut être déterminé par l’autorité compétente que les causes de l’incapacité de travail sont intervenues avant l’affiliation à l’assurance, pour autant qu’elles aient été connues de l’assuré. Les cas de rigueur demeurent réservés.

L'affiliation à l'assurance doit être interprétée comme le moment à partir duquel l'assuré est couvert par les PCM, soit depuis la date de l'ouverture du délai-cadre d'indemnisation (ATAS/663/2016 du 25 août 2016 consid. 7).

b. Jusqu’au 31 janvier 2002, l’art. 13 LMC prévoyait que les affections chroniques et récidivantes d’origine psycho-névrotique ou dépressivo-anxieuse, dûment constatées par le médecin-conseil de l’autorité compétente, entraînaient un refus du droit aux prestations. La raison d'être de cette disposition était qu’il n’appartenait pas à l’assurance-chômage de prendre en charge des affections à caractère chronique, dont l’origine était antérieure à la période de chômage (MGC 1983/III 3545). En d’autres termes, l’assurance-chômage n’avait pas à prendre en charge les conséquences pécuniaires d’une maladie chronique, préexistant à l’inscription au chômage, devenue incapacitante seulement après l’affiliation. Lors de l’adoption de la teneur actuelle de l’art. 13 LMC en 2002, le législateur a précisé, d’une part, que le nouvel art. 13 ne devait pas être compris comme une modification de la disposition en vigueur jusqu’au 31 janvier 2002 et, d’autre part, que les autres assurances n’acceptaient pas les personnes déjà malades et que les PCM couvraient les affections passagères et non durables (p. 12 du rapport de la Commission de l’économie chargée d’étudier le projet de loi du Conseil d’Etat modifiant la loi en matière de chômage [J 2 20], MGC 2001-2002 IV, Annexes p. 718 ss).

c. Selon l’art. 14A LMC, l’assuré qui fait valoir son droit aux prestations est tenu de fournir gratuitement tous les renseignements nécessaires pour établir ce droit et déterminer les prestations dues (al. 1). Il est notamment tenu d’autoriser dans des cas particuliers toutes les personnes ou institutions, notamment les employeurs, les médecins, les assurances et organes officiels, à fournir des renseignements, pour autant que ceux-ci soient nécessaires pour établir le droit aux prestations ; les renseignements de nature médicale ne peuvent être transmis qu’aux médecins conseil (al. 2). L’assuré doit apporter la preuve de son incapacité de travail en produisant, chaque mois, un certificat médical original à l’autorité compétente au plus tard le 5 du mois suivant ou le premier jour ouvrable qui suit cette date (al. 3). La production tardive, et sans motif valable, du certificat médical entraîne la perte du droit aux prestations pour la période considérée (al. 4). Si l’assuré refuse de collaborer dans la mesure prévue aux al. 1 et 2, l’autorité compétente peut se prononcer en l’état du dossier ; au préalable, elle doit avoir adressé à l’assuré une mise en demeure écrite l’avertissant des conséquences (al. 5).

d. L'autorité compétente – soit l’OCE (art. 3 al. 1 RMC) – dispose de la collaboration des médecins-conseils de l'OCE, ainsi que d'un visiteur de malades (art. 15 RMC). Elle peut ordonner un examen médical du requérant par un médecin-conseil (art. 16 al. 1 phr. 1 RMC) ; dans les deux jours qui suivent l'examen médical, le médecin-conseil rend ses conclusions sur la capacité de travail ou avise le cas échéant l'autorité compétente du défaut de l'assuré (art. 16 al. 2 RMC) ; en cas de divergence entre les médecins traitants et le médecin-conseil de l'OCE, l'avis de ce dernier prévaut (art. 16 al. 4 RMC).

Selon la jurisprudence (ATAS/979/2015 du 18 décembre 2015 consid. 10), l’art. 16 al. 4 RMC ne saurait trouver application si le médecin-conseil de l’intimé n’a pas procédé à un examen médical de l’assuré ; de surcroît, il ne peut être attribué de valeur probante au rapport du médecin-conseil s’il ne satisfait pas aux réquisits jurisprudentiel prévalant en la matière, à savoir s’il ne comporte pas une étude circonstanciée des points litigieux, ne se fonde pas sur des examens complets, ne prend pas en considération les plaintes exprimées par la personne examinée, n’a pas été établi en pleine connaissance de l’anamnèse, ne décrit pas clairement le contexte médical et les éventuelles interférences, et enfin ne contient pas des conclusions bien motivées (ATF 134 V 231 consid. 5.1; 133 V 450 consid. 11.1.3; 125 V 351 consid. 3).

En conséquence, conformément au demeurant à la jurisprudence de l’ancienne Commission cantonale de recours en matière d’assurance-chômage, compétente jusqu’au 31 juillet 2003, le principe posé par l’art. 16 al. 4 RMC n’a pas une portée absolue et les autorités peuvent et doivent même s’en écarter lorsque des faits sérieux et concrets amènent à une autre conclusion que celle du médecin-conseil (ATAS/439/2017 du 30 mai 2017 consid. 7 ; ATAS/230/2004 du 6 avril 2004 consid. 3).

5.        Pour les PCM comme de façon générale dans le domaine des assurances sociales, les autorités et, sur recours, la chambre de céans établissent les faits d’office, sans être limitées par les allégués et les offres de preuve des parties, réunissent les renseignements et procèdent aux enquêtes nécessaires pour fonder leur décision (art. 19, 20 al. 1 phr. 1, 76 et 89A LPA). Il leur est loisible, sur la base d’une appréciation anticipée des preuves déjà disponibles, de refuser l’administration d’une preuve supplémentaire au motif qu’elles la tiennent pour impropre à modifier leur conviction (ATF 131 III 222 consid. 4.3 ; ATF 129 III 18 consid. 2.6 ; arrêt du Tribunal fédéral 4A_5/2011 du 24 mars 2011 consid. 3.1). Elles apprécient les moyens de preuve des parties (art. 20 al. 1 phr. 2 LPA).

Ces dispositions cantonales expriment les mêmes principes que ceux qui, consacrés par la LPGA, régissent la procédure en matière d’assurances sociales, à savoir, en particulier, la maxime inquisitoire, ainsi que les règles sur l’appréciation des preuves et le degré de la preuve.

Il sied de noter, à ce dernier égard, qu’une preuve absolue n’est pas requise en matière d’assurances sociales. L’administration et le juge fondent leur décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3 ; 126 V 353 consid. 5b ; 125 V 193 consid. 2 et les références).

6.        a. En l’espèce, la question est de savoir si, ainsi que l’a retenu l’intimé, les causes de l’incapacité de travail du recourant dès le 23 janvier 2017 étaient déjà intervenues, au su de ce dernier, le 1er mars 2016 lors de l’ouverture de son délai-cadre d’indemnisation.

b. Force est de relever que les certificats médicaux qui ont été émis dans cette affaire avant que la chambre de céans ne procède à l’audition des médecins les ayant établis ont été particulièrement sommaires et insatisfaisants, au point qu’au moins l’un d’entre eux (à savoir l’attestation que le Dr C______ a adressée le 23 mars 2018 à l’avocat du recourant) pourrait apparaître avoir constitué un certificat de complaisance si, au niveau de l’intention, ledit médecin ne s’était, selon ses explications, trouvé dans une situation personnelle perturbée lorsqu’il l’a rédigé.

Les auditions des trois médecins considérés auxquelles a procédé la chambre de céans ont cependant clarifié la situation médicale du recourant sur la question pertinente en l’espèce. Aussi n’y a-t-il pas lieu d’ordonner une expertise médicale, par appréciation anticipée d’une telle preuve.

c. Ainsi que l’a expliqué le Dr B______ devant la chambre de céans, le recourant a eu en 2010, en jouant au football, un accident dont les conséquences psychiques, à savoir le développement d’un état dépressif, ont pris le pas sur ses conséquences physiques. L’opération qu’il avait subie en 2011 pour la fracture de la deuxième phalange de son gros orteil occasionnée par ledit accident n’avait pas été à la hauteur des espérances du recourant, ni l’ablation ultérieure du matériel de synthèse ; sans doute le recourant s’en était-il trouvé diminué dans ses capacités physiques, une arthrodèse du gros orteil présentant un certain handicap pour la marche. Il avait été gagné par un sentiment de dévalorisation et une crainte pour son avenir, qui l’avaient rendu dépressif pour plusieurs années, avec des hauts et des bas expliquant qu’il ait pu, par moments, recouvrer une capacité de travail partielle, mais comprenant aussi et surtout le constat cyclique de ne pas recouvrer une pleine capacité de travail et, partant, une sensation durable de préjudice, caractéristique d’une sinistrose. Le problème psychique avait contribué nettement à justifier les incapacités de travail du recourant, de façon prépondérante et très précocement.

Le Dr B______ a affirmé que le recourant n’était pas guéri de son problème psychique le 1er mars 2016, jour de l’ouverture de son délai-cadre d’indemnisation. Ledit médecin avait certes indiqué, le 29 février 2016, qu’il ne présentait plus d’incapacité de travail depuis le 1er mars 2016, non sans relever qu’une reprise de son métier (de nettoyeur) n’était pas envisageable et qu’il était souhaitable de le rediriger vers une reconversion professionnelle. Comme il l’a lui-même déclaré devant la chambre de céans, il avait attesté de cette reprise de capacité professionnelle en misant sur le fait que le recourant avait une perspective de rebondir et retrouver une stature dès lors que – événement ressenti positivement par ledit médecin – son ancien contrat de travail avait pris fin le 29 février, mais ce pari ne s’est pas réalisé.

La Dre D______, médecin-conseil de l’intimé, avait d’ailleurs relevé, en juillet et septembre 2016, que l’état psychique du recourant au 1er mars 2016 n’était pas entièrement stabilisé.

De son côté, le Dr C______, psychiatre traitant du recourant dès le 2 mars 2016, a mis ce dernier en arrêt de travail dès le 1er mars 2016, en raison d’une dépression préexistante, remontant alors – ainsi qu’il l’a admis devant la chambre de céans – au moins à plusieurs mois et s’expliquant par les conséquences de l’accident de football de 2010 et le « cortège de problèmes » qui s’en était suivi.

Il importe ici de souligner que l’application de l’art. 13 LMC ne suppose pas que l’assuré soit en incapacité de travail lors de l’affiliation à l’assurance, c’est-à-dire lors de l’ouverture du délai-cadre d’indemnisation, mais qu’il ait présenté à ce moment-là les causes d’une incapacité de travail survenue ultérieurement au cours dudit délai-cadre et que ces causes lui étaient connues.

En l’espèce, il doit être tenu pour établi, à tout le moins au degré de la vraisemblance prépondérante, qu’au 1er mars 2016, date pertinente, le recourant souffrait de dépression, d’une part, et qu’il le savait (notamment lorsqu’il s’est inscrit au chômage, le 26 février 2016), d’autre part.

d. Il n’est pas déterminant que le dossier médical ne renseigne pas clairement sur les périodes durant lesquelles le recourant a le cas échéant été capable de travailler et à quel(s) pourcentage(s) de mars à fin septembre 2016, à savoir jusqu’à ce qu’il se trouve en totale incapacité de travail (possiblement désormais aussi) à la suite de l’accident qu’il a eu le soir du 30 septembre 2016, lorsqu’il s’est fracturé le métatarse du pied droit. L’intimé ne lui nie le droit à des PCM que depuis le 22 février 2017 en considération de la maladie pour laquelle le psychiatre du recourant a mis ce dernier en arrêt de travail dès le 23 janvier 2017, soit à l’expiration de son droit aux indemnités de chômage fondées sur l’art. 28 al. 1 LACI.

La question est de savoir si l’incapacité de travail du recourant dès le 23 janvier 2017 (ou le 22 février 2017) s’explique par une cause, en l’occurrence une maladie déjà présente lors de l’affiliation à l’assurance, soit en l’occurrence le 1er mars 2016.

Or, il résulte des preuves administrées que tel est le cas. En effet, selon le Dr C______, le recourant s’est à nouveau trouvé, dès le 23 janvier 2017 (et y compris le 22 février 2017), dans une dépression en lien – pour lui à titre de rechute – avec celle qu’il avait déjà depuis des mois en mars 2016. D’une façon emportant la conviction nonobstant l’utilisation du mot « accident » sur les certificats d’incapacité de travail par ailleurs nullement motivés portant sur les mois d’au moins décembre 2016 à janvier 2017 établis par les Drs B______ et G______, le Dr C______ a déclaré que le recourant se trouvait déjà en arrêt de travail avant le 23 janvier 2017 « probablement pour la conjonction de ses problèmes somatiques et psychiques ». De son côté, le Dr B______ avait vu le recourant à sa consultation dans le courant de l’année 2016, et, le 15 septembre 2016, il l’avait trouvé « toujours engoncé dans son problème psychologique ». Lors de son audition par la chambre de céans, il s’est dit nullement surpris que le recourant se soit trouvé en totale incapacité de travail pour un motif psychique, et ce pour des mois, à compter du 23 janvier 2017, très certainement en lien avec son état psychique antérieur, soit dans la continuité de ses problèmes psychologiques de 2014 à 2016 (plutôt qu’à titre de rechute, le recourant n’ayant jamais retrouvé, dans l’intervalle de ces périodes, une stature et un travail lui ayant permis de fonctionner normalement).

Force est d’ajouter qu’en dépit des carences affectant l’avis médical et le témoignage du Dr H______, intervenu comme médecin-conseil de l’intimé (dans des conditions qui ne devraient pas laisser ce dernier indifférent), ledit médecin avait attesté, le 4 avril 2017, que la période d’incapacité de travail ayant débuté le 23 janvier 2017 était en lien, du point de vue de la pathologie, avec la longue période d’incapacité de travail précédente du 1er mai 2014 au 28 (recte : 29) février 2016. Dans la mesure où il a indiqué s’être fondé aussi sur les renseignements que le Dr C______ lui avait alors donnés, cela tend à donner du crédit à la déclaration de ce dernier devant la chambre de céans.

7.        a. En conclusion, c’est à bon droit – quoiqu’au travers d’une procédure ayant comporté des carences – que l’intimé a nié le droit du recourant à des PCM dès le 22 février 2017 sur la base de l’art. 13 phr. 1 LMC.

b. L’intimé n’a pas rendu de décision sur le point de savoir si le recourant se trouve dans un cas de rigueur qui justifierait de lui reconnaître dérogatoirement le droit à des PCM (sur cette question, cf. not. ATAS/663/2016 du 25 août 2016 consid. 11a, où la chambre de céans a jugé – référence étant faite aux travaux préparatoires et à la jurisprudence [ATAS/1142/2014 du 5 novembre 2014 et ATAS/902/2014 du 19 août 2014] – que le législateur voulait d'instaurer une véritable assurance de perte de gain obligatoire et non pas donner automatiquement à la personne au chômage un droit aux prestations en cas d'incapacité de travail, et que les cas de rigueur sont reconnus aux femmes enceintes ou aux assurés se trouvant dans des situations très exceptionnelles, par exemple lorsqu'un assuré n'avait pas conscience de son incapacité de travail antérieure, un cas de rigueur ne pouvant être admis pour tenir compte des difficultés financières d'un assuré en incapacité de travail).

Libre au recourant de requérir, s’il s’y estime fondé, une décision, puis le cas échéant une décision sur opposition, sur cette question.

c.       Le recours doit être rejeté.

8.        La procédure est gratuite (art. 89H al. 1 LPA).

Vu l’issue donnée au recours, le recourant n’a pas droit à une indemnité de procédure (art. 89H al. 3 LPA).

* * * * * *

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Dit que la procédure est gratuite.

4.        Dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure.

5.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Marie NIERMARECHAL

 

Le président

 

 

 

 

Raphaël MARTIN

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’au Secrétariat d'État à l'économie par le greffe le