Aller au contenu principal

Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

1 resultats
A/3783/2015

ATAS/663/2016 du 25.08.2016 ( CHOMAG ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/3783/2015 ATAS/663/2016

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 25 août 2016

5ème Chambre

 

En la cause

Madame A______, domiciliée c/o M. B______, à GENÈVE, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Elodie SKOULIKAS

recourante

 

contre

 

OFFICE CANTONAL DE L'EMPLOI, sis rue des Gares 16, GENÈVE

 

 

intimé

 


EN FAIT

1.        Madame A______ a travaillé pour le restaurant C______ à Genève en qualité de serveuse du 1er mars au 31 décembre 2013.

2.        Dès le 13 septembre 2013, l’intéressée a été totalement incapable de travailler en raison notamment d’un trouble dépressif récurrent sévère sans symptômes psychotiques (F33.2). Cette décompensation psychique était liée à un conflit conjugal avec séparation, suivi d’un conflit professionnel et d’un important isolement affectif et social, dans un contexte de trouble de la personnalité borderline (voir notamment les rapports des 28 janvier et 25 avril 2014 du docteur D______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie et médecin traitant).

3.        L’intéressée a été hospitalisée à la Clinique genevoise de Montana du 9 au 30 avril 2014 en raison du trouble dépressif récurrent sévère précité, les médecins de la clinique ayant toutefois constaté des symptômes psychotiques (F33.3). Selon le rapport de sortie du 24 juin 2014, en deuxième partie du séjour, une amélioration de la symptomatologie dépressive et hallucinatoire avait été constatée.

4.        Suite au suicide de son compagnon en mai 2014, l’intéressée a fait une rechute symptomatique, le diagnostic alors retenu par le Dr D______ étant également celui d’épisode dépressif récurrent, avec symptômes psychotiques (voir rapport du Dr D______ du 26 juin 2014).

5.        Le 2 juillet 2014, l’assurée a déposé une demande de prestations auprès de l’office de l’assurance-invalidité de Genève (ci-après : OAI) en raison d’une dépression existant, selon elle, depuis le 1er novembre 2013.

6.        Dans le cadre de l’instruction de la demande, l’OAI a notamment récolté les avis suivants :

-        Selon le docteur E______, médecin généraliste FMH et médecin traitant de l'assurée, cette dernière souffrait, suite au suicide de son compagnon, d’un épisode dépressif sévère avec hallucinations auditives depuis septembre 2013, associé à une personnalité instable (rapport du 8 septembre 2014).

-        Pour le Dr D______, le diagnostic était celui d’épisode dépressif récurrent sévère avec symptômes psychotiques congruents à l’humeur (F33.3) accompagné d’un trouble de la personnalité émotionnellement labile, actuellement non décompensé (F60.31). Il s’agissait de la quatrième décompensation dépressive sévère, la première avec des hallucinations auditives suite au suicide réussi de son compagnon, dans le contexte de violences conjugales chroniques. Le pronostic était favorable vu l’amélioration clinique mais un risque de rechute subsistait (rapports du 3 septembre 2014).

7.        Le 11 décembre 2014, l’intéressée s’est inscrite à l’office cantonal de l’emploi (OCE) et un délai-cadre d’indemnisation a été ouvert en sa faveur dès le 1er janvier 2015.

8.        Selon le Dr D______, l’état de santé de l’assurée s’est amélioré entre le 1er janvier et le 14 mai 2015, avec une capacité de travail totale pendant cette période. Suite à une rechute le 15 mai 2015, l’assurée était toutefois à nouveau totalement incapable de travailler, le diagnostic retenu étant identique à ceux précédemment posés, à savoir celui d’épisode dépressif récurrent sévère avec symptômes psychotiques avec délires de persécution et hallucinations auditives (F33.3), lesquels comprenaient désormais, outre les hallucinations auditives, un délire de persécution (rapport du Dr D______ du 21/26 mai 2015).

9.        Jusqu’au 13 juin 2015, l’assurée a bénéficié d’indemnités journalières fédérales en cas de maladie.

10.    Dans son avis médical du 2 juillet 2015, la doctoresse F______ du service médical régional pour la Suisse romande de l'assurance-invalidité (SMR) a constaté que l'assurée présentait un trouble dépressif récurrent, épisode actuel sévère avec symptômes psychotiques (hallucinations auditives), et un trouble de la personnalité de type borderline, soit des pathologies psychiatriques sévères.

11.    Son dossier a ensuite été transmis au service des prestations cantonales en cas de maladie (ci-après : les PCM) de l’OCE, lequel a, par décision du 7 juillet 2015, nié son droit auxdites prestations cantonales dès le 15 juin 2015 et pour toute la durée de l’incapacité de travail actuelle au motif que les causes de celle-ci étaient intervenues avant son affiliation à son assurance. En effet, le service précité avait constaté que l’assurée avait été en incapacité de travail du 13 septembre 2013 au 31 décembre 2014.

12.    Par acte du 7 août 2015, l’assurée, par l’intermédiaire de son conseil, a formé opposition à cette décision en concluant à son annulation et à l’octroi des prestations cantonales. Se fondant sur un rapport du 24 juillet 2015 de son psychiatre traitant, elle a fait valoir que sa capacité de travail avait été totale au moment de son inscription au chômage et ceci durant cinq mois. Sa rechute dépressive était par ailleurs réactionnelle à des événements de vie récents et non en lien avec des causes préexistantes. En effet, sa première incapacité de travail était due à des problèmes avec son ex-employeur, alors que ses troubles dépressifs actuels étaient liés à de grandes inquiétudes par rapport à l’état de santé de son fils et de sa mère qui vivaient au Portugal. Son fils avait commencé à perdre ses cheveux depuis le mois de mai de manière très accélérée et les médecins ne savaient pas à quoi cette chute de cheveux était liée. Quant à sa mère, elle souffrait de graves problèmes intestinaux nécessitant des opérations. Ces éléments avaient créé un état anxio-dépressif. A l'appui de ses dires, l'assurée a produit le rapport précité du Dr D______, dont il ressort notamment que l’assurée souffrait d’épisodes dépressifs récurrents, mais présentait une capacité de travail totale au moment de son inscription au chômage et ce pendant cinq mois avant une rechute dépressive réactionnelle à des éléments de vie récents. Cette reprise n’était pas en lien avec des causes préexistantes. Quand bien même la récurrence des épisodes dépressifs augmentait le risque de rechute, cela ne devait pas entraîner un refus de prestations pour les personnes souffrant d'épisodes dépressifs, en rémission totale pendant cinq mois.

13.    Selon le préavis du 4 juin 2015 du docteur G______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie et médecin-conseil auprès de l’OCE, l’assurée travaillait comme serveuse depuis 1994 et avait donné son congé pour des raisons médicales le 1er décembre 2014 pour le même jour. Elle avait été en arrêt de travail depuis le 12 septembre 2013 jusqu’au 31 décembre 2014. Dès le 1er janvier 2015, elle avait retrouvé une capacité de travail à 100 %. En juillet 2014, elle avait déposé une demande de prestations de l’assurance-invalidité. Selon le médecin-conseil, l’incapacité de travail était temporaire, mais partiellement en relation avec la dernière activité exercée avant l’inscription au chômage. Etant donné qu’il s’agissait d’une récidive, le médecin-conseil a estimé que l’assurée n’était pas « encore sortie d’affaire ».

14.    Par décision du 25 septembre 2015, l’OCE a rejeté l’opposition de l’assurée au motif que l’incapacité de travail actuelle était une récidive d’autres épisodes dépressifs. Les explications de l’assurée ne pouvaient être retenues, dès lors que le caractère récurrent des épisodes dépressifs était pertinent, mais non pas les éléments de vie les déclenchant. Ainsi, la survenance du risque assuré était antérieure à l’affiliation à l’assurance-chômage.

15.    Par acte du 28 octobre 2015, l’assurée, par l’intermédiaire de son conseil, a formé recours contre la décision sur opposition du 25 septembre 2015, concluant, sous suite de dépens, préalablement à l’audition du Dr D______ et, principalement à l’annulation de la décision querellée et à l’octroi de PCM. A l’appui de ses conclusions, elle a notamment invoqué des soucis familiaux, inexistants en 2014, lesquels l’avaient plongée dans un état de dépression important, à savoir les problèmes de santé de son fils et de sa mère. Au demeurant, le médecin-conseil de l’intimé lui-même avait considéré que sa maladie actuelle était passagère et seulement partiellement en lien avec sa dernière activité déployée avant son inscription au chômage. Subsidiairement, la recourante s’est prévalue d’un cas de rigueur, expressément réservé par la loi, en soulignant ses grandes difficultés financières.

16.    Par écriture du 4 novembre 2015, la recourante a porté à la connaissance de la chambre de céans un rapport établi par le Dr D______ et Madame H______, psychologue, daté du 30 octobre 2015, faisant état d’une incapacité de travail du 15 mai au 31 août 2015. Lors de son inscription au chômage, la recourante était totalement capable de travailler. « Cette capacité de travail a pu rester entière durant six mois environ et la patiente a pu chercher adéquatement du travail jusqu’au 15 mai 2015. Nous retenons donc une rémission totale d’environ six mois », rémission ayant été suivie par une rechute dépressive en lien avec des problèmes de santé de son fils et de sa mère apparus en mai 2015, non prévisibles au moment de l’inscription au chômage. Ces causes n’avaient aucun lien avec l’état dépressif antérieur. Le fait que le nouvel épisode dépressif avait été de courte durée montrait qu’il s’agissait d’un trouble dépressif différent du premier, au demeurant imprévisible, s’agissant d’une rechute réactionnelle à des événements de vie négatifs nouveaux.

17.    Dans sa réponse du 24 novembre 2015, l’intimé a conclu au rejet du recours, en se référant à sa décision sur opposition quant aux motifs. Il a en outre relevé qu’en cas de divergence entre le médecin-conseil et le médecin traitant, la loi prévoyait que l’avis du premier prévalait. L’intimé n’était toutefois pas opposé à l’audition du Dr D______ mais sollicitait, dans ce cas, également l’audition du Dr G______. Enfin, le caractère récurrent des épisodes dépressifs ne pouvait être considéré comme un cas de rigueur au sens de la loi.

18.    Par réplique du 14 janvier 2016, la recourante a persisté dans ses conclusions. Compte tenu du principe de la libre appréciation des preuves, elle a en particulier contesté que l’avis du médecin-conseil de l’intimé, lequel était des plus lapidaires et ne répondait pas aux réquisits jurisprudentiels pour lui reconnaître une valeur probante, avait une valeur probante accrue par rapport à celui du médecin traitant. La recourante se rapportait à justice s’agissant de l’audition de ce médecin-conseil, tout en considérant que celui-ci ne pourrait vraisemblablement apporter aucune précision supplémentaire, vu la brièveté de son préavis médical. Quant au cas de rigueur réservé par la loi, celui-ci ne devait pas uniquement être appréhendé sous l’angle de la maladie, mais également de sa situation financière et des conséquences du refus de prestations. En effet, elle n’avait bénéficié de plus aucun revenu durant deux (recte trois) mois et demi et avait dû emprunter de l’argent à ses proches pour subvenir à ses besoins, ce qui avait été source d’une angoisse supplémentaire.

19.    A la demande de la chambre de céans, l’OAI a transmis le dossier de la recourante.

20.    Par courrier du 22 février 2016, la recourante s’est prononcée sur les pièces transmises par l’OAI et a repris pour l'essentiel son ancienne argumentation.

21.    Quant à l’intimé, il a considéré, par écriture du 22 février 2016 également, qu’il ressortait du dossier transmis par l’OAI que la recourante souffrait d’un trouble dépressif récurrent ainsi que d’un trouble de la personnalité de type borderline. Depuis le suicide de son compagnon, en mai 2014, la symptomatologie dépressive de la recourante s’était aggravée. Il s’agissait par ailleurs de la quatrième décompensation dépressive sévère. Enfin, selon le Dr D______ et Madame H______, l’atteinte dépressive de la recourante comportait un risque de rechute (rapport du Dr D______ du 3 septembre et attestation du 30 octobre 2015).

22.    Le 2 mai 2016, le Dr D______ a répondu à une demande de renseignements de la chambre de céans. Il a précisé que la capacité de travail entière qui avait duré du 1er janvier au 15 mai 2015, aurait très probablement perduré en cas d’absence de problèmes de santé du fils et de la mère de la recourante, dès lors que celle-ci présentait un épisode dépressif réactionnel à ces événements et très bref (trois mois et demi), par rapport au dernier épisode dépressif qui n’avait pas été réactionnel et qui avait duré plus d’une année. Le caractère récurrent des épisodes dépressifs augmentait clairement le risque de rechute dépressive, malgré un suivi adéquat après la rémission totale. Toutefois, le fait d’avoir présenté un ou plusieurs épisodes dépressifs récurrents n’était pas un critère d’exclusion pour une inscription au chômage « à [la] connaissance [de l’expert], juste en raison du fait que ces personnes garderont toute leur vie un risque de rechute dépressive accru ». Quant à la question de savoir à partir de quand on peut admettre une rémission totale d’un épisode dépressif, ce praticien a répondu qu’à partir d’un mois de guérison complète sans limitations fonctionnelles, on pouvait considérer qu’il s’agissait d’un autre épisode dépressif et non pas du même épisode. Dans le cas de la recourante, plus de quatre mois avaient séparé les deux épisodes dépressifs, de sorte qu’il ne s’agissait pas du même épisode. De surcroît, le caractère réactionnel et transitoire du nouvel épisode (sans hospitalisation) par rapport à l’ancien (non réactionnel et persistant plus d’une année, ayant nécessité une hospitalisation) prouvait clairement qu’il s’agissait d’un autre épisode dépressif, quantitativement, qualitativement et temporairement. Le Dr D______ a enfin mis en exergue que la recourante n’avait pas bénéficié d’une expertise psychiatrique de la part de l’intimé, mais uniquement d’un bref entretien de vingt minutes environ, ce qui n’avait pas donné naissance à un rapport circonstancié.

23.    Le 20 juin 2016, le Dr G______ s’est déterminé sur le dernier rapport du Dr D______. Il a relevé que la recourante souffrait d’un trouble dépressif majeur récurrent, avec symptômes psychotiques, d’un trouble limite de la personnalité et d’un trouble somatoforme douloureux au moins depuis 2013. Son évolution avait montré des améliorations, mais aussi des rechutes importantes et prolongées, justifiant des démarches auprès de l’assurance-invalidité. En 2015, elle souffrait toujours de la même affection de base, de sorte qu’elle ne pouvait prétendre aux prestations PCM.

24.    Par écriture du 19 juillet 2016, la recourante a allégué que l’affirmation du Dr G______, selon laquelle elle souffrait toujours de la même affection de base, constituait une simple affirmation non étayée sur le plan médical et ne pouvait de ce fait se voir reconnaître une pleine force probante. Partant, elle a persisté dans ses conclusions.

25.    Sur ce, la cause a été gardée à juger.

 

EN DROIT

1.        Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 8 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05) en vigueur dès le 1er janvier 2011, la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité, du 25 juin 1982 (loi sur l’assurance-chômage, LACI - RS 837.0) ainsi que des contestations prévues à l’art. 49 al. 3 de la loi en matière de chômage du 11 novembre 1983 (LMC – RS J 2 20), en matière de prestations complémentaires cantonales.

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.        La LMC ne contenant aucune norme de renvoi, la LPGA n’est pas applicable s’agissant des prestations complémentaires cantonales (cf. art. 1er et 2 LPGA).

3.        Interjeté dans les délai et forme prescrits par la loi, le recours est recevable
(art. 49 al. 3 LMC et art. 89Ass de la loi de procédure administrative du
12 septembre 1985, LPA – E 5 10).

4.        Le litige porte sur le droit de la recourante au versement de prestations complémentaires cantonales en cas de maladie, et plus particulièrement sur la question de savoir si les causes de son incapacité de travail sont antérieures à son inscription au chômage, subsidiairement si elle peut bénéficier de le clause de rigueur.

5.        Au niveau fédéral, le droit à l'indemnité de chômage en cas d'incapacité de travail passagère est réglé à l'art. 28 LACI (ATF 126 V 127 consid. 3b). A teneur de l’alinéa 1er de cette disposition, les assurés qui, passagèrement, ne sont aptes ni à travailler, ni à être placés ou ne le sont que partiellement en raison d’une maladie (art. 3 LPGA), d’un accident (art. 4 LPGA) ou d’une grossesse et qui, de ce fait, ne peuvent satisfaire aux prescriptions de contrôle, ont droit à la pleine indemnité journalière fédérale s’ils remplissent les autres conditions dont dépend le droit à l’indemnité. Leur droit persiste au plus jusqu’au 30ème jour suivant le début de l’incapacité totale ou partielle de travail et se limite à 44 indemnités journalières durant le délai-cadre. L'art. 21 LACI prévoit que cinq indemnités journalières sont payées par semaine.

6.        S’ils ne sont pas assurés à titre individuel auprès d’une assurance perte de gain privée, les chômeurs ayant épuisé leurs droits selon l’art. 28 LACI peuvent se retrouver privés d’une compensation de leur perte de gain. C’est pourquoi, certains cantons ont institué une assurance sociale perte de gain en faveur des chômeurs, appelée à compléter les prestations servies par l’assurance-chômage (Boris RUBIN, Commentaire de la loi sur l’assurance-chômage, 2014, n° 27 et 28 ad Art. 28, p. 287). Tel est le cas de Genève.

L’art. 8 LMC prescrit que peuvent bénéficier des prestations cantonales en cas d’incapacité passagère de travail, totale ou partielle, les chômeurs qui ont épuisé leur droit aux indemnités journalières fédérales pour maladie ou accident, conformément à l’art. 28 LACI.

Les prestations pour cause d’incapacité passagère de travail, totale ou partielle, ne peuvent être versées que si elles correspondent à une inaptitude au placement au sens de l’art. 28 LACI (art. 12 al. 1 LMC). Les prestations sont servies au bénéficiaire dès la fin du droit aux indemnités au sens de l’art. 28 LACI jusqu’à concurrence de 270 indemnités journalières cumulées dans le délai-cadre d’indemnisation fédéral (art. 15 al. 1 LMC). Elles ne peuvent en outre dépasser le nombre des indemnités de chômage auquel le bénéficiaire peut prétendre en vertu de l’art. 27 LACI (art. 15 al. 2 LMC). Un délai d'attente de cinq jours ouvrables est applicable lors de chaque demande de prestations.

Il s'agit de prestations cantonales complémentaires à celles prévues par l'assurance-chômage fédérale (voir art. 1 let. d LMC) qui relèvent du droit cantonal autonome et non pas du droit fédéral ou du droit cantonal d'exécution du droit fédéral (arrêt 8C_864/2012 du 26 février 2013 consid. 3).

7.        Le versement de prestations est exclu dans le cas où il peut être déterminé par l’autorité compétente que les causes de l’incapacité de travail sont intervenues avant l’affiliation à l’assurance, pour autant qu’elles aient été connues de l’assuré. Les cas de rigueur demeurent réservés (art. 13 LMC). A noter que l'affiliation à l'assurance doit être interprétée comme le moment à partir duquel l'assuré est couvert par les PCM, soit depuis la date de l'ouverture du délai-cadre d'indemnisation (ATAS/81/2013 du 21 janvier 2013).

Jusqu’au 31 janvier 2002, l’art. 13 LMC prévoyait que les affections chroniques et récidivantes d’origine psycho-névrotique ou dépressivo-anxieuse, dûment constatées par le médecin-conseil de l’autorité compétente, entraînaient un refus du droit aux prestations. La raison d'être de cette disposition était qu’il n’appartenait pas à l’assurance-chômage de prendre en charge des affections à caractère chronique, dont l’origine était antérieure à la période de chômage (Commentaires : article par article - annexe au projet de loi en matière de chômage, Mémorial du Grand Conseil, 1983/III p. 3545). En d’autres termes, l’assurance-chômage n’avait pas à prendre en charge les conséquences pécuniaires d’une maladie chronique, préexistant à l’inscription au chômage, devenue incapacitante seulement après l’affiliation

Lors de l’adoption de la teneur actuelle de l’art. 13 LMC en 2002, le législateur a précisé, d’une part, que le nouvel art. 13 ne devait pas être compris comme une modification de la disposition en vigueur jusqu’au 31 janvier 2002 et, d’autre part, que les autres assurances n’acceptaient pas les personnes déjà malades et que les PCM couvraient les affections passagères et non durables (p. 12 du rapport de la Commission de l’économie chargée d’étudier le projet de loi du Conseil d’Etat modifiant la loi en matière de chômage (J 2 20), Mémorial du Grand Conseil 2001-2002 IV, Annexes p. 718 ss ; cité ci-après : rapport de la Commission de l’économie).

8.        a. Sur le plan fédéral, l’art. 28 al. 5 LACI prévoit que le chômeur doit apporter la preuve de son incapacité ou de sa capacité de travail en produisant un certificat médical. L'autorité cantonale ou la caisse peut toujours ordonner, aux frais de l'assurance, un examen médical par un médecin-conseil.

Par certificat médical, il faut entendre toute constatation écrite relevant de la science médicale et se rapportant à l’état de santé d’une personne, singulièrement à sa capacité de travail (arrêt du Tribunal fédéral 4C.156/2005 consid. 3.5.2). Si la force probante d'un tel document n’est pas absolue, la mise en doute de sa véracité suppose, néanmoins, des raisons sérieuses. Ainsi, en cas de doute sur la réalité de l'incapacité de travail du recourant, l'administration doit procéder à des investigations complémentaires, conformément au principe inquisitoire (arrêts du Tribunal fédéral 8C_841/2009 du 22 décembre 2009, consid. 5.1, C 220/03 du 29 juin 2004 consid. 3.3 et C 322/01 du 12 avril 2002), par exemple en demandant au requérant de fournir une attestation médicale détaillée et dûment motivée ou sous la forme d'une audition du médecin (arrêt du Tribunal fédéral C 322/01 du 12 avril 2002).

b. Sur le plan cantonal, l’art. 14A LMC prescrit que l’assuré doit apporter la preuve de son incapacité de travail en produisant, chaque mois, un certificat médical original à l’autorité compétente au plus tard le 5 du mois suivant ou le premier jour ouvrable qui suit cette date (al. 3). Il est également tenu d’autoriser dans des cas particuliers toutes les personnes ou institutions, notamment les employeurs, les médecins, les assurances et organes officiels, à fournir des renseignements, pour autant que ceux-ci soient nécessaires pour établir le droit aux prestations. Les renseignements de nature médicale ne peuvent être transmis qu’aux médecins conseil (al. 2). Par ailleurs, selon l’art. 16 du règlement d'exécution de la loi en matière de chômage du 23 janvier 2008 (RMC - J 2 20.01), l’autorité compétente peut ordonner un examen médical du requérant par un médecin-conseil. Dans la règle, un examen est ordonné après trois mois de versement de prestations cantonales (art. 16 al. 1 RMC). En cas de divergence entre les médecins traitants et le médecin-conseil de l'office, l'avis de ce dernier prévaut (al. 4).

9.        a. Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3 ; ATF 126 V 353 consid. 5b ;
ATF 125 V 193 consid. 2 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a).

b. Si l’administration ou le juge, se fondant sur une appréciation consciencieuse des preuves fournies par les investigations auxquelles ils doivent procéder d’office, sont convaincus que certains faits présentent un degré de vraisemblance prépondérante et que d’autres mesures probatoires ne pourraient plus modifier cette appréciation, il est superflu d’administrer d’autres preuves (appréciation anticipée des preuves ; ATF 122 II 464 consid. 4a, ATF 122 III 219 consid. 3c). Une telle manière de procéder ne viole pas le droit d’être entendu selon l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (RS 101 - Cst; SVR 2001 IV n. 10 p. 28 consid. 4b), la jurisprudence rendue sous l’empire de l’art. 4 aCst. étant toujours valable (ATF 124 V 90 consid. 4b ; ATF 122 V 157 consid. 1d).

10.    En l’espèce, il ressort des pièces produites que la recourante souffre d’un trouble dépressif récurrent à compter du 13 septembre 2013. En septembre 2014, elle en était à sa quatrième décompensation. Suite à une amélioration de son état psychique avec toutefois un risque de rechute, elle a été apte à travailler à 100% du 1er janvier au 14 mai 2015 selon les rapports des 3 septembre 2014, 21 et 26 mai 2015 du Dr D______, ainsi que les dires de la recourante, soit pendant 4,5 mois. Pour le psychiatre traitant, la période de capacité totale de travailler correspond à une période de rémission totale (voir rapports des 24 juillet 2015, 30 octobre 2015 et 31 mai 2016).

Toutefois, en juillet 2014, la recourante a requis des prestations de l'assurance-invalidité en raison de son trouble dépressif récurrent précisément. Elle a donc considéré elle-même qu'elle présentait une maladie durable. A cela s'ajoute qu'elle ne souffre pas seulement d'un trouble dépressif, mais également d'un trouble de la personnalité émotionnellement labile. Le trouble dépressif est enfin accompagné de troubles psychotiques dans les phases de décompensation.

Par ailleurs, même si les facteurs déclencheurs de l'épisode dépressif en mai 2015 ne sont pas identiques à ceux des précédents épisodes, il n'en demeure pas moins que la recourante présente un trouble dépressif récurrent préexistant à son inscription au chômage et que les adversités de la vie, même de peu d'importance, sont susceptibles de provoquer une nouvelle décompensation. Au demeurant, le Dr D______ admet, dans son rapport du 31 mai 2016, que le caractère récurrent augmente clairement le risque de rechute dépressive. A la question de savoir à partir de combien de mois on peut admettre qu'il y a une rémission totale d'un épisode dépressif, il répond qu'à partir d'un mois de guérison complète sans limitations fonctionnelles, il peut être considéré qu'il s'agit d'un autre épisode dépressif et non pas du même épisode. Cela ne correspond cependant pas aux critères diagnostiques du trouble dépressif majeur récurrent (F33) de la Classification internationale des maladies de la dixième révision (CIM-10), selon laquelle il faut la présence d'au moins un épisode dépressif ayant persisté au moins deux semaines et séparé de l'épisode actuel par une période d'au moins deux mois sans perturbation significative de l'humeur (p. 79). En tout état de cause, la réponse du Dr D______ est évasive, dès lors qu'il ne précise pas à partir de combien de mois une personne peut être considérée comme guérie, sans qu'une prochaine rechute ne soit à craindre, après un épisode dépressif précédent. Il n'est pas contesté que l'épisode dépressif de la recourante en 2015 constitue un épisode indépendant et différent du précédent. Il n'en demeure pas moins que plusieurs épisodes dépressifs qui se succèdent forment une entité diagnostique à part, à savoir précisément le diagnostic de trouble dépressif récurrent, F33. De surcroît, en l'espèce, le Dr D______ a émis en 2015 exactement le même diagnostic que pour les précédents épisodes dépressifs. Enfin, il est à relever qu'une partie de la doctrine médicale du moins considère un patient comme guéri seulement après une période de six à neuf mois de rémission complète suivant l'état dépressif précédent (cf. Dr Guido BONDOLFI, Dépression récurrente et prévention de la rechute, in Revue médicale Suisse, 2002, n° 2406 ; voir dans le même sens Dr Adeline GAILLARD, Dépression et récurrences, in Livre blanc de la dépression, édité par Jean-Pierre OLIE, 2015, téléchargeable via le site du Centre hospitalier universitaire (CHU) de Clermont Ferrand à l’adresse chuclermontferrand.centredoc.fr/opac/index.php?lvl= notice_display&id=90106), ce qui n'est pas le cas en l'espèce.

De surcroît, la maladie de la recourante correspond précisément aux "affections chroniques et récidivantes d’origine psycho-névrotique ou dépressivo-anxieuse" mentionnées dans la première version de l'art. 13 LMC et que le législateur a voulu exclure de la couverture d'assurance. Même si la formulation de l'art. 13 LMC dans sa teneur dès le 1er février 2002 ne reprend plus ces termes, il résulte des travaux préparatoires que la volonté du législateur n'était pas de modifier le sens de cette disposition, comme exposé ci-dessus.

Par conséquent, les causes à l’origine de la période d’incapacité de travail du 15 mai au 31 août 2015 sont antérieures à l’affiliation à l’assurance perte de gain, le 1er janvier 2015, ce qui exclut le versement de PCM.

Au vu de ce qui précède, il s'avère inutile, par appréciation anticipée des preuves, de procéder à l’audition des Drs G______ et D______.

11.    Subsidiairement, la recourante invoque un cas de rigueur.

a. Lors de l'adoption de l'art. 13 LMC, le législateur n'a pas précisé les cas de rigueur (p. 12 du rapport de la Commission de l'économie, op.cit.). Comme la chambre de céans l’a relevé ci-dessus et dans son ATAS/1142/2014 du 5 novembre 2014, selon les travaux préparatoires et le texte même de la loi, le législateur voulait d'instaurer une véritable assurance de perte de gain obligatoire et non pas donner automatiquement à la personne au chômage un droit aux prestations en cas d'incapacité de travail. Selon la pratique de l'OCE, confirmée par la chambre de céans, les cas de rigueur sont reconnus aux femmes enceintes ou aux assurés se trouvant dans des situations très exceptionnelles, par exemple lorsqu'un assuré n'avait pas conscience de son incapacité de travail antérieure. Un cas de rigueur ne peut en particulier être admis pour tenir compte des difficultés financières d'un assuré en incapacité de travail (ATAS/1142/2014 du 5 novembre 2014 et ATAS/902/2014 du 19 août 2014. En effet, dans le cas contraire, un cas de rigueur devrait être admis presque systématiquement (ATAS/1142/2014 du 5 novembre 2014).

b. En l’espèce, il n'y a pas lieu de s'écarter de l'interprétation restrictive des cas de rigueur par l'OCE et par la chambre de céans, celle-ci correspondant à l'esprit de la loi et à la conception d'une assurance perte de gain. Ainsi, conformément à la pratique et à la jurisprudence précitées, un cas de rigueur ne peut pas être admis en raison des difficultés financières de la recourante ou du caractère récurrent des épisodes dépressifs. C’est le lieu de préciser, contrairement à ce que prétend la recourante dans son recours du 28 octobre 2015, que les PCM ne sont pas niées de manière définitive dans son cas, mais seulement en ce qui concerne sa rechute du 15 mai 2015, dès lors que celle-ci correspond en réalité à la réactivation de l’épisode dépressif en cours en 2014. La présente décision ne tranche en revanche pas la question de son droit aux PCM en cas de récidive ou, en d’autres termes, en cas de nouvel épisode dépressif, distinct de celui en cours en 2014-2015.

12.    Il résulte de ce qui précède que la recourante ne remplit pas les conditions légales pour bénéficier des prestations cantonales en cas de maladie pour la période du 15 mai au 31 août 2015.

13.    Le recours sera donc rejeté.

14.    La procédure est gratuite.


15.     

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Dit que la procédure est gratuite.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Diana ZIERI

 

La présidente

 

 

 

 

Maya CRAMER

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’au Secrétariat d'Etat à l'économie par le greffe le