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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/874/2015

ATA/993/2016 du 22.11.2016 sur JTAPI/835/2015 ( PE ) , REJETE

Recours TF déposé le 09.01.2017, rendu le 21.09.2017, REJETE, 2C_19/2017
Descripteurs : DROIT D'ÊTRE ENTENDU ; AUTORISATION D'ÉTABLISSEMENT ; AUTORISATION DE SÉJOUR ; AUTORISATION D'ÉTABLISSEMENT; FIN ; SÉJOUR À L'ÉTRANGER ; DISSIMULATION(CHOSES, FAITS) ; DISSIMULATION(CHOSES, FAITS) ; PROPORTIONNALITÉ ; FORMALISME EXCESSIF
Normes : Cst.5.al2; Cst.29.al1; Cst.29.al2; LEtr.61.al2; OASA.79.al.1; OASA.79.al2
Résumé : Caducité des permis d'établissement des membres d'une famille prononcé par l'OCPM et confirmé par le TAPI au motif qu'ils ont séjourné plus de six mois en France voisine. Il ressort des enquêtes que les recourants ont effectivement vécu durant plus de sept mois en France voisine, où leurs enfants en âge d'aller à l'école étaient scolarisés. Leur domicile genevois, sous-loué, était fictif. Les recourants n'ayant formé aucune demande en vue du maintien de leurs autorisations d'établissement, celles-ci ont pris fin après six mois. Pas de violation du principe de la proportionnalité, vu l'absence de marge de manoeuvre de l'autorité : celle-ci ne peut que constater que les recourants ont vécu plus de six mois à l'étranger. Pas de violation du principe de l'interdiction du formalisme excessif, la règle en question n'étant pas d'ordre procédural. Recours rejeté.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/874/2015-PE ATA/993/2016

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 22 novembre 2016

2ème section

 

dans la cause

 

Madame et Monsieur A______, agissant en leur nom personnel et en qualité de représentants de leurs enfants mineurs B______, C______, D______ et E______A______

représentés par Me Michel LELLOUCH, avocat,

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 10 juillet 2015 (JTAPI/835/2015)


EN FAIT

1) Madame A______, née le ______ 1984, son époux Monsieur A______, né le ______ 1978, et leurs enfants B______ A______, né le ______ 2005, C______ A______, né le ______ 2007, D______A______, né le ______ 2013 et E______A______, née le ______ 2014, sont ressortissants de Turquie.

2) M. A______ est arrivé en Suisse le 31 mars 2002 pour rejoindre sa première épouse, Madame F______, ressortissante portugaise, avec laquelle il s'était marié le 23 mars 1999.

3) Le 13 mai 2002, il a été mis au bénéfice par l'office cantonal de la population, devenu entre-temps l'office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM), d'une autorisation de séjour (permis B) à titre de regroupement familial.

4) En date du 10 août 2008, M. A______ s'est vu délivrer une autorisation d'établissement (permis C).

5) Le 16 septembre 2009, il a divorcé de Mme F______.

6) Depuis le mois de novembre 2009, il exploite à Genève un café-restaurant de spécialités turques.

7) En date du 11 mars 2010, M. A______ a épousé, en Turquie, Madame A______, mère de ses enfants.

8) Le 9 février 2011, Mme A______ est venue rejoindre son époux à Genève, accompagnée de leurs enfants B______ et C______ A______. Elle a été mise au bénéfice d'une autorisation de séjour à titre de regroupement familial (permis B) le 17 février 2011.

9) Les quatre enfants du couple ont été mis au bénéfice d'autorisations d'établissement (permis C).

10) Le 2 mars 2013, M. A______ a été auditionné par la police dans le cadre d'une enquête pour recel impliquant son cousin, Monsieur G______.

À cette occasion, il a reconnu avoir occasionnellement employé son cousin dans son établissement de restauration, alors que ce dernier ne bénéficiait pas des autorisations nécessaires pour travailler en Suisse.

Durant son audition, la police a procédé à la perquisition de son domicile officiel et a été mise en présence d'une famille de ressortissants boliviens démunis de papiers et d'autorisation de séjour. M. A______ a alors déclaré sous-louer son appartement sis à la place H______ à I______ à une femme s'étant présentée à lui comme brésilienne, pour un loyer mensuel de CHF 900.-. Ce montant correspondait au montant du loyer prévu dans le bail conclu avec la régie J______ Sàrl à Genève. Il encaissait le loyer chaque mois de la main à la main quand la sous-locataire venait dans son restaurant. Il payait ensuite le loyer à la régie au moyen d'un bulletin de versement.

Pour sa part, il vivait en fait avec sa famille à l'avenue K______, à L______(France) depuis le mois de juillet 2012, car il avait besoin d'un appartement plus grand, celui de la place H______ n'étant que de deux pièces. Il avait sous-loué son appartement genevois car il ne voulait pas payer deux loyers. Il reviendrait à Genève quand il aurait trouvé un appartement plus grand. Ses enfants étaient scolarisés en Suisse.

Il n'avait pas annoncé son départ à l'OCPM.

Le procès-verbal d'audition, signé par M. A______, indiquait l'adresse de L______ comme étant son adresse principale.

11) Le même jour, les ressortissants boliviens retrouvés au domicile de
M. A______ ont été auditionnés par la police.

Madame M______ et Monsieur N______ ont déclaré sous-louer l'appartement de M. A______ sis place H______ , à I______, pour un montant mensuel de CHF 1'500.- payés de la main à la main, sans quittance. Mme M______ a remis à la police un document signé et imprimé par M. A______ attestant du versement d'un acompte de CHF 2'000.- pour la location de son appartement dès le 1er août 2012, et stipulant qu'un contrat de sous-location serait établi ultérieurement.

12) Par courrier du 12 mars 2013, M. A______ a informé le bureau du corps de police qu'après vérification, il avait vécu en France à partir du 1er octobre 2012. Par ailleurs, il était désormais de retour en Suisse.

13) Par ordonnance pénale du 15 juillet 2013, notifiée à l'intéressé à l'avenue K______, à L______(France), M. A______ a été reconnu coupable d'avoir employé un étranger ne disposant pas d'autorisation de travail en Suisse, et d'avoir facilité le séjour illégal en Suisse d'un étranger. Il a été condamné à une peine pécuniaire de soixante jours-amende à CHF 50.- le jour, avec sursis et délai d'épreuve de trois ans, ainsi qu'à une amende de CHF 750.-, la peine privative de liberté de substitution étant de douze jours.

Ladite ordonnance mentionnait qu'il était notamment reproché au prévenu d'avoir sous-loué, du 1er août 2012 au 2 mars 2013, un appartement dans un immeuble sis place H______ à I______ à M. N______ et aux membres de sa famille, ressortissants boliviens démunis d'autorisation de séjour, facilitant ainsi leur séjour sur le territoire helvétique.

14) Par courrier du 23 juillet 2013, M. A______ a écrit au Ministère public.

Il ne contestait pas l'ordonnance pénale du 15 juillet 2013 ; toutefois, il souhaitait préciser qu'il n'était pas domicilié en France mais en Suisse, place H______ à I______, depuis son retour en mars 2013, comme annoncé à la police par courrier du 12 mars 2013, annexé à sa lettre.

15) Par pli recommandé du 25 novembre 2014, envoyé à l'avenue K______, à L______(France), l'OCPM a informé M. A______ qu'il ressortait des enquêtes effectuées sur place et auprès du voisinage que son adresse genevoise annoncée auprès de son office était fictive.

L'OCPM attirait l'attention de l'intéressé sur le fait que conformément aux dispositions légales applicables, une autorisation d'établissement prenait fin lorsque son titulaire annonçait son départ de Suisse ou séjournait effectivement pendant plus de six mois l'étranger. Un délai de trente jours lui était imparti pour exercer par écrit son droit d'être entendu.

16) Ce courrier n'ayant pas été réclamé à la poste par l'intéressé, l'OCPM l'a renvoyé par pli simple le 12 janvier 2015 à son adresse de L______, avec un nouveau délai de quinze jours pour répondre.

17) Par décision datée du 2 février 2015 mais envoyée le 5 février 2015, l'OCPM a prononcé la caducité des autorisations d'établissement de M. A______ et de ses quatre enfants, ainsi que de l'autorisation de séjour de Mme A______, les intéressés ayant séjourné effectivement pendant plus de six mois à l'étranger. En effet, selon les renseignements en possession de l'OCPM, M. A______ vivait avec les membres de sa famille en France à tout le moins depuis le 31 juillet 2012. Leur départ de Suisse était enregistré au 31 janvier 2013.

Ladite décision, envoyée par pli recommandé à M. A______ à l'avenue K______, à L______, a été délivrée contre signature le 10 février 2015.

18) Le 3 février 2015, M. A______ s'est adressé à l'OCPM par courrier recommandé.

Il n'avait pas reçu la lettre du 25 novembre 2014 car il n'habitait pas à l'adresse en France où elle avait été envoyée, mais à I______. Concernant la lettre du 12 janvier 2015 envoyée par pli simple à L______, il en avait pris connaissance « par miracle » le 29 janvier 2015 car il passait la plupart du temps à Genève. Il contestait que son domicile genevois ait été une adresse fictive. Il avait son centre de vie à Genève où il travaillait (il était propriétaire du restaurant O______ au boulevard P______), payait ses impôts et avait des amis. Avant qu'une décision ne soit prise à son encontre, il souhaitait savoir sur quels éléments l'OCPM s'était basé pour conclure que son domicile à Genève était fictif. Il sollicitait également le droit de consulter son dossier auprès de l'OCPM.

19) L'OCPM a répondu à M. A______ par pli du 12 février 2015.

Le courrier recommandé du 25 novembre 2014 - adressé au domicile de M. A______ en France et non réclamé - était réputé avoir été valablement communiqué dans la mesure où il mentionnait « pli visé non réclamé ». Son droit d'être entendu avait dès lors été respecté.

De plus, selon le relevé des envois postaux français, la décision de l'OCPM renvoyée par pli simple le 2 février 2015 avait été valablement notifiée le 10 février 2015. Un recours contre la décision en question était donc ouvert auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) jusqu'au 12 mars 2015.

20) Par acte du 11 mars 2015, sous la plume de leur conseil, Mme et M. A______ ont recouru auprès du TAPI contre la décision de l'OCPM du 2 février 2015, concluant préalablement à l'audition de onze témoins, et principalement à l'annulation de ladite décision, puis à ce qu'il soit dit que les autorisations d'établissement de leurs quatre enfants ainsi que leurs propres titres d'établissement et de séjour n'étaient pas caduques, ainsi qu'à l'octroi d'une indemnité de procédure.

Leur droit d'être entendu avait été violé, dans la mesure où ils avaient eu connaissance tardivement des courriers de l'OCPM du 25 novembre 2014 et du 12 janvier 2015, ces derniers ayant été envoyés à leur ancienne adresse à L______. Les motifs avancés dans leur courrier du 3 février 2015 n'avaient ainsi pas été pris en compte par l'OCPM ni discutés dans sa décision datée du 2 février 2015 mais envoyée le 5 février 2015.

Ils avaient vécu en France moins de six mois, soit du 1er octobre 2012 au 12 mars 2013. Le recourant avait précisé ces dates dans deux courriers adressés au bureau du corps de police et au Ministère public. Ces courriers avaient été rédigés spontanément, bien avant la prise de position de l'OCPM et avaient donc force probante. Si l'OCPM avait eu connaissance de ces deux courriers, il paraissait vraisemblable qu'il aurait rendu une décision différente. Il existait également d'autres preuves du domicile genevois de la famille : neuf témoins avaient établi des attestations écrites confirmant leur domicile à Genève ; les enfants du couple étaient toujours scolarisés à Genève, et le recourant travaillait comme restaurateur indépendant ; la famille était fiscalement imposée dans le canton de Genève et couverte par des assurances-maladie suisses ; sa vie sociale se trouvait à Genève. Les recourants et leurs enfants ayant séjourné moins de six mois à l'étranger, la caducité des autorisations d'établissement n'aurait pas dû être prononcée.

Enfin, la mesure était disproportionnée. Même s'il devait être retenu que la famille avait quitté la Suisse pendant plus de six mois, il convenait de prendre une décision moins incisive en maintenant les autorisations de la famille, dans la mesure où, sur demande, l'autorisation d'établissement pouvait être maintenue pendant quatre ans.

21) Dans ses observations du 28 avril 2015, l'OCPM a conclu au rejet du recours.

Tout d'abord, le fait que les recourants n'aient pris connaissance de son courrier du 24 novembre 2014 que le 29 janvier 2015 n'était pas imputable à l'OCPM. En tout état de cause, ils avaient pu adresser leurs remarques par courrier du 3 février 2015, lequel avait été reçu par l'OCPM le 5 février 2015. Partant, leur droit d'être entendu n'avait pas été violé.

Sur le fond, il ressortait clairement du dossier que les recourants avaient vécu à L______ en tout cas depuis le mois de juillet 2012 et jusqu'au 12 mars 2013, période durant laquelle ils avaient sous-loué leur appartement, situé à la place H______ à I______. Ces faits, reconnus par le recourant lors de son audition par la police le 2 mars 2013, avaient été confirmés par ses sous-locataires et par la perquisition menée le même jour par la police à I______, puis retenus par le Ministère public dans son ordonnance pénale du 15 juillet 2013. Le fait d'avoir continué à payer leur assurance-maladie en Suisse et d'y être toujours fiscalement domicilié ne constituait pas une preuve de leur résidence effective à Genève entre le 1er août 2012 et le 12 mars 2013. De même, le fait que les enfants aient poursuivi leur scolarité dans le canton de Genève n'était pas déterminant pour le maintien du permis C, pas plus que les déplacements professionnels du recourant. Dans ces conditions, les autorités n'avaient pas de marge d'appréciation et ne pouvaient que constater que les autorisations d'établissement et de séjour des intéressés avaient pris fin.

22) Les recourants ont répliqué aux observations de l'OCPM par courrier du 28 mai 2015, persistant dans leurs conclusions.

L'OCPM avait omis de discuter d'éléments importants mis en évidence par les recourants, comme les courriers envoyés spontanément par le recourant les 12 mars 2013 et 23 juillet 2013, confirmant que son absence de Suisse n'avait pas duré six mois. L'OCPM n'avait pas non plus discuté des déclarations des neuf témoins produites par les recourants, ni des autres éléments qu'ils avaient apportés et qui démontraient que la durée de leur séjour en France n'avait pas excédé six mois.

23) Le 4 juin 2015, les recourants, assistés d'un interprète, ont été entendus par le TAPI à une audience de comparution personnelle.

M. A______ ne s'était pas opposé à l'ordonnance pénale du 15 juillet 2013, mais il avait adressé un courrier au Ministère public après avoir reçu notification de cette ordonnance.

L'appartement de I______ comptait deux pièces, soit une chambre et une cuisine. Après leur retour sur Genève, ils avaient entrepris des démarches pour trouver un appartement plus grand, mais sans succès. Ils habitaient donc encore à six personnes dans cet appartement. Leurs enfants avaient toujours fréquenté l'école R______. Lorsque la famille avait habité en France, ils avaient cependant été scolarisés à L______, d'octobre 2012 à mars 2013.

Le recourant ne pouvait donner la date exacte à laquelle il avait demandé aux occupants de son domicile à I______ de quitter l'appartement ni à quelle date ils l'avaient quitté. En fait, tout cela s'était passé entre le 2 et le 12 mars 2013.

Ils avaient dû payer deux loyers en même temps car ils étaient partis du logement français très rapidement. Le contrat de bail signé en France était de durée indéterminée.

Au terme de l'audience, un délai au 25 juin 2015 a été imparti aux recourants pour produire une copie du contrat de bail de l'appartement en France, une copie de la résiliation de ce bail et des attestations de l'école en France ainsi que de l'école R______ pour l'année scolaire 2012-2013.

24) Par pli du 23 juin 2015, communiqué à l'OCPM, les recourants ont fait parvenir au TAPI un chargé de pièces complémentaires, à savoir un contrat de bail daté du 3 septembre 2012, portant sur un appartement de 4 pièces de 100 m2, sis avenue K______ à L______, pour la période allant du 1er octobre 2012 au 1er avril 2012 (sic) (bail d'une durée six mois, reconductible, pour une habitation principale), un courrier de la société Q______ accusant réception d'une résiliation de ce même bail effectuée par M. A______ le 4 mars 2013 et la déclarant effective à partir du 30 avril 2013, des attestations de scolarité des enfants B______ et C______ auprès de l'école R______ pour l'année 2011-2012, et des attestations de scolarité des mêmes enfants auprès de l'école primaire S______ à L______pour l'année scolaire 2012-2013.

25) Par jugement du 10 juillet 2015, le TAPI a rejeté le recours.

La question de savoir si le courrier de l'OCPM du 25 novembre 2014 avait été valablement envoyé aux recourants pouvait rester ouverte, dans la mesure où le TAPI était à même d'examiner l'ensemble des griefs formulés, que l'autorité intimée n'avait pas statué en opportunité, et que les recourants avaient produit devant le TAPI tous les documents qu'ils souhaitaient pouvoir remettre en son temps à l'OCPM. Ainsi, une éventuelle violation du droit d'être entendu avait pu être réparée dans le cadre de cette procédure.

Quant aux actes d'instruction demandés par les recourants, ils ne s'avéraient pas nécessaires pour trancher le litige, le dossier contenant les éléments suffisants et nécessaires à l'examen des griefs et arguments des recourants, permettant de statuer immédiatement sur le litige.

La version des faits des recourants sur la durée de leur séjour en France était contredite par les pièces du dossier, dont l'ordonnance pénale, entrée en force, et le procès-verbal d'audition du recourant par la police du 2 mars 2013. Les déclarations des sous-locataires de l'appartement de I______ et le document attestant du versement d'un acompte de loyer par ces derniers démontraient également que les recourants avaient quitté leur domicile genevois à la fin juillet 2012 au plus tard. Par ailleurs, selon les attestations produites, les deux enfants aînés des recourants avaient été scolarisés à L______ durant toute l'année scolaire 2012-2013, et pas seulement d'octobre 2012 à mars 2013. Quant au contrat de bail produit, il ne pouvait être retenu comme probant dans la mesure où il mentionnait une durée de location aux dates incohérentes (soit d'octobre 2012 à mars 2012), ainsi qu'une durée contractuelle de six mois, renouvelable, alors que le recourant avait indiqué au TAPI avoir signé un contrat de bail de durée indéterminée. Il convenait de retenir que les recourants avaient résidé en France voisine du 31 juillet 2012 (au plus tard) au 12 mars 2013 (au plus tôt), soit durant plus de six mois. Durant cette période, leur domicile genevois, sous-loué, était donc fictif, les recourants se retrouvant, mangeant et dormant tous ensemble dans leur appartement à L______, où deux de leurs enfants étaient scolarisés. Du fait de l'absence de demande formée auprès de l'OCPM en vue du maintien de leurs autorisations d'établissement et de séjour pour une durée comprise entre six mois et quatre ans, ils n'étaient pas fondés, sans l'autorisation de l'autorité intimée, à se mettre de facto au bénéfice d'une situation de frontaliers.

L'OCPM avait donc à juste titre considéré que les recourants et leurs enfants avaient déplacé le centre de leurs intérêts en France voisine pendant plus de six mois, de sorte que leurs autorisations d'établissement et de séjour avaient pris fin automatiquement.

26) Par acte du 11 septembre 2015, Mme et M. A______ ont formé recours à l'encontre du jugement précité auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative), concluant préalablement à l'audition des parties et de neuf témoins, et principalement à l'annulation dudit jugement, à l'annulation de la décision de l'OCPM du 2 février 2015, à ce qu'il soit dit que les autorisations d'établissement et de séjour des recourants n'étaient pas caduques et étaient par conséquent toujours valables, et à l'octroi d'une indemnité de procédure.

Ils reprenaient en substance les arguments développés dans leur précédent recours, soutenant que leur séjour en France avait duré moins de six mois.

Leur droit d'être entendu avait été violé, dans la mesure où le TAPI n'avait pas entendu les neuf témoins dont ils avaient sollicité l'audition.

À titre subsidiaire, la mesure était disproportionnée, compte tenu du nombre d'années qu'ils avaient vécu en Suisse et de leurs solides attaches avec ce pays. Elle consacrait enfin une violation du formalisme excessif, étant donné la possibilité pour l'OCPM de maintenir le permis pour une durée de quatre ans si les recourants l'avaient demandé.

27) Le 15 octobre 2015, l'OCPM a conclu au rejet du recours, maintenant les termes de sa décision.

S'agissant de l'audition des témoins sollicitée par les recourants, le TAPI n'était pas tenu de faire droit à cette offre de preuve, les pièces figurant au dossier permettant de déterminer l'état de fait à satisfaction de droit.

28) Le 2 décembre 2015, une audience de comparution personnelle des parties a eu lieu.

M. A______ a indiqué vivre avec sa famille dans un appartement de deux pièces alors qu'ils étaient six. Il avait fait des démarches pour obtenir un appartement plus grand, mais sans succès. Il avait donc conclu un bail pour six mois reconductible à L______(France). Le bail avait couru du 1er octobre 2012 au 1er avril 2013. Ils étaient revenus dans l'appartement de I______ le 10 mars 2013. Sachant que cela pouvait leur poser problème de rester six mois ou plus en dehors de Suisse, M. A______ avait résilié le bail pour le terme de six mois. Il avait fait connaissance avec la famille de sous-locataires dans son restaurant. Ils étaient d'accord de sous-louer son appartement pour cinq ou six mois au plus, et étaient partis le 10 mars 2013. Le recourant avait continué à travailler dans son commerce, en principe tous les jours. Les enfants avaient été scolarisés à Genève pendant l'année scolaire 2011-2012, puis à L______ en 2012-2013. Entre mars et juin 2013, Mme A______ avait donc fait les allers-retours en France pour que ses enfants puissent finir l'année scolaire là où ils l'avaient commencée. Les recourants n'avaient pas de titre de séjour en France. Le cousin de M. A______ qui s'était fait arrêter par la police avait raconté plusieurs choses erronées. Il n'était venu que très occasionnellement donner un coup de main dans son restaurant. En échange, comme il était sans le sou, le recourant lui donnait à manger. M. A______ était un peu paniqué lorsqu'il s'était fait interroger par la police, et avait dit des choses inexactes, comme par exemple le fait qu'il avait habité en France depuis le mois de juillet 2012. Il n'avait en fait pas compris la question. Il avait effectivement signé, au mois de juillet 2012, un reçu pour la somme de CHF 2'000.- pour la sous-location de son appartement. Les sous-locataires n'avaient toutefois emménagé qu'en octobre 2012. La date d'emménagement n'était pas marquée sur le reçu, qu'il n'avait pas lui-même rédigé.

Les recourants maintenaient la demande d'audition de quatre témoins, renonçant aux cinq autres.

29) Le 13 janvier 2016 a eu lieu une audience d'enquêtes.

a. M. N______ a confirmé avoir sous-loué avec sa famille l'appartement de I______ de M. A______ pendant un certain temps. C'est sa femme qui l'avait rencontré, mais il ne savait pas comment. Il ne se souvenait plus de la date à laquelle ils avaient emménagé et du temps qu'ils étaient restés, mais il l'avait indiqué à la police de l'aéroport lors de son audition. Le contrat de sous-location avait été rédigé par M. A______, et signé par sa femme.

Sur question de l'OCPM, il a précisé avoir reçu la clef le jour où il avait effectué le premier versement. Ils avaient quitté l'appartement à la fin du mois lors duquel la police était passée. Ils payaient CHF 1'500.- alors que le loyer était de CHF 900.- d'après ce que leur avait indiqué la police. Il ne se souvenait plus du contenu exact du contrat. Ils avaient payé le premier loyer et un ou deux mois de garantie, et alors ils avaient reçu la clé de l'appartement.

b. Monsieur T______, cousin germain du recourant, a indiqué avoir aidé la famille A______ à déménager d'abord de leur appartement de I______ à celui de L______, puis dans l'autre sens, la première fois dans la première semaine d'octobre 2012 et la seconde en mars 2013. En octobre 2012, il n'y avait personne d'autre que M. A______ et sa famille dans l'appartement. Ils avaient emprunté un fourgon à un ami, et avaient passé la douane sans procéder à une déclaration formelle. L'appartement de I______ était ensuite vide. Il ne savait pas ce que son cousin avait l'intention d'en faire, ni combien de temps il entendait rester à L______. À sa connaissance, ils avaient quitté I______ pour L______ pour avoir un logement plus grand, mais pas à titre définitif. Ils étaient revenus à Genève car ils n'avaient pas le droit de rester en France. Ils avaient cherché un logement plus grand à Genève sans avoir jamais de réponse. Leur appartement de I______ n'était qu'un petit « studio ». Ses deux aînés étaient toujours restés à l'école de I______, ce depuis qu'ils étaient venus de Turquie.

Lors de l'audition de son cousin, M. A______ a précisé avoir postulé pour un appartement plus grand à l'avenue U______, mais ne pas l'avoir obtenu car son permis n'était pas valable.

c. Monsieur V_______, parent éloigné du recourant, avait fait la connaissance de la famille A______ il y a dix ou quinze ans. Il voyait assez souvent le recourant dans son restaurant. Il savait qu'il habitait actuellement à Genève sans connaître l'adresse exacte, et qu'il avait vécu, furtivement, à L______. En mars 2013, le recourant lui avait confié les clés de la boîte aux lettres de l'appartement qu'il occupait à L______. Il avait l'air de devoir déménager avec précipitation et il n'avait pas le temps de s'occuper de son courrier. Habitant à l'époque à L______, ce n'était pas compliqué pour lui de passer pour le courrier. Il n'avait pas aidé au déménagement et ne savait pas à quelle date exactement il avait emménagé à L______, probablement en fin d'année 2012. Il ne lui avait toutefois rien indiqué à l'époque. Il ne savait pas où étaient scolarisés les enfants.

d. Monsieur W______, ami de M. A______, n'était jamais allé chez lui mais connaissait son logement à I______. Il savait qu'il avait passé quelques temps à L______ vers 2013, mais ne pouvait pas dire exactement combien de temps, peut-être cinq ou six mois ou peut-être dix. Il avait aidé au déménagement de I______ à L______, mais ne se souvenait pas de la date. Le second déménagement avait eu lieu en mars. M. A______ ne lui avait pas parlé de ce qu'il devait advenir de l'appartement de I______. Il avait appris le jour du déménagement que le recourant avait pris un appartement à L______ car il ne trouvait pas un appartement plus grand à Genève. À sa connaissance, ses enfants étaient scolarisés à I______.

Monsieur X______, ami de M. A______, le voyait de temps en temps lors de fêtes communautaires ou à son restaurant. Il n'était jamais allé chez lui. Il avait appris qu'il avait résidé en France lorsque M. A______ lui avait demandé de le remplacer quelques heures à son restaurant car il déménageait. C'était au début du mois de mars 2013.

À l'issue de l'audience, le juge délégué a accordé aux parties un délai au 12 février 2016 pour lui faire part de leurs observations finales.

30) Par courrier du 9 février 2016, l'OCPM a persisté à conclure au rejet du recours.

Les pièces figurant au dossier contredisaient les affirmations des recourants selon lesquelles ils seraient restés moins de six mois en France. Il en était de même des auditions des témoins. De surcroît, deux des témoins avaient indiqué que les intéressés s'étaient installés à L______ car ils ne trouvaient pas d'appartement suffisamment grand à Genève. Or, il ne paraissait pas très sensé de procéder à deux déménagements et de scolariser les enfants dans une nouvelle école pour se trouver moins de six mois dans un logement plus spacieux.

31) Le 12 février 2016, les recourants ont persisté dans leurs conclusions.

Les auditions des parties et des témoins avaient permis de démontrer qu'ils avaient vécu moins de six mois à L______. La caducité de leurs autorisations d'établissement et de séjour n'auraient dès lors pas dû être prononcée.

32) Sur ce, la cause a été gardée à juger.

33) Par courrier du 14 septembre 2016, les recourants, sous la plume de leur conseil, ont informé la chambre administrative qu'ils avaient conclu, à compter du 16 août 2015, un nouveau contrat de bail portant sur un appartement de cinq pièces se trouvant dans un immeuble sis au Passage Y______ à Genève.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Les recourants invoquent une violation de leur droit d'être entendus, le TAPI ayant refusé de procéder à l'audition des témoins qu'ils avaient sollicitée.

a. Tel que garanti par les art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) et 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101), qui n'a pas de portée différente dans ce contexte, le droit d'être entendu comprend notamment le droit pour l'intéressé de produire des preuves pertinentes, d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l'administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s'exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATA/241/2015 du 3 mars 2015 consid. 2 et les références citées).

b. Une décision entreprise pour violation du droit d'être entendu n'est en principe pas nulle, mais annulable (ATF 133 III 235 consid. 5.3 p. 250 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_104/2010 du 29 septembre 2010 consid. 3.2 ; ATA/737/2016 du 30 août 2016 consid. 3b et les arrêts cités).

c. La violation du droit d'être entendu est réparable devant l'instance de recours si celle-ci jouit du même pouvoir d'examen des questions litigieuses que l'autorité intimée, et si l'examen de ces questions ne relève pas de l'opportunité, car l'autorité de recours ne peut alors substituer son pouvoir d'examen à celui de l'autorité de première instance (ATF 138 I 97 consid. 4.1.6.1 p. 103 ; 137 I 195 consid. 2.3.2 p. 197 ; arrêt du Tribunal fédéral 2P.30/2003 du 2 juin 2003 consid. 2.4 ; ATA/241/2015 précité consid. 2c et les références citées).

d. En l'espèce, la chambre administrative - qui dispose du même pouvoir d'appréciation que le TAPI - a entendu le recourant et les quatre témoins dont il avait maintenu la demande d'audition. Dans ces circonstances, l'éventuelle violation du droit d'être entendu des recourants a été réparée dans le cadre de la procédure de recours.

Ce grief sera dès lors écarté.

3) Les recourants contestent le bien-fondé du jugement du TAPI qui confirme la caducité de leurs autorisations d'établissement et de séjour, et la caducité des autorisations d'établissement des enfants mineurs, au motif qu'ils auraient séjourné plus de six mois hors de Suisse.

a. Selon l'art. 61 al. 2 de la loi fédérale sur les étrangers du 16 décembre 2005 (LEtr - RS 142.20), l'autorisation d'établissement ou de séjour d'un étranger quittant la Suisse sans déclarer son départ prend automatiquement fin après six mois. Sur demande, l'autorisation d'établissement peut être maintenue pendant quatre ans.

Les délais prévus à l'art. 61 al. 2 LEtr ne sont pas interrompus en cas de séjour temporaire en Suisse à des fins de visite, de tourisme ou d'affaires (art. 79 al. 1 de l'ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative - OASA - RS 142.201). La demande de maintien de l'autorisation d'établissement doit être déposée avant l'échéance du délai de six mois prévu par l'art. 61 al. 2 LEtr (art. 79 al. 2 OASA).

b. Selon la jurisprudence (arrêt du Tribunal fédéral 2C_853/2010 du 22 mars 2011), confirmant celle, constante, rendue à propos de l'art. 9 al. 3 let. c de l'ancienne loi fédérale sur le séjour et l'établissement des étrangers du 26 mars 1931 (aLSEE - RS 142.20) abrogé par la loi sur les étrangers mais qui reste applicable au regard de l'art. 61 al. 2 LEtr (arrêt du Tribunal fédéral 2C_408/2010 du 15 décembre 2010 consid. 3.3), l'autorisation d'établissement prend fin lorsque l'étranger séjourne à l'étranger de manière ininterrompue pendant six mois consécutifs, quels que soient les causes de cet éloignement et les motifs de l'intéressé (ATF 120 Ib 369 consid. 2c et d p. 372 s. ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_513/2015 du 13 décembre 2015 consid. 4.1).

c. En l'espèce, et contrairement à ce que soutiennent les recourants, la procédure et les enquêtes n'ont pas permis de démontrer que leur séjour en France aurait duré moins de six mois. Il en ressort au contraire qu'ils y ont vécu depuis le début du mois d'août 2012 au plus tard, au 10 mars 2013 au plus tôt, soit durant plus de sept mois.

Tout d'abord, le ressortissant bolivien qui avait sous-loué l'appartement de I______ des recourants a confirmé qu'il avait obtenu les clefs de l'appartement lorsqu'il avait payé le premier loyer et versé la garantie, soit, selon la quittance établie par le recourant, le 26 juillet 2012, pour une sous-location prévue à compter du 1er août 2012. Toujours selon les déclarations de ce témoin, la famille de sous-locataires a quitté l'appartement à la fin du mois de mars 2013. De tous les témoins entendus, le seul ayant indiqué que les recourants auraient déménagé à L______ en octobre 2012 est M. T______, cousin germain du recourant. Cependant, étant donné son lien de parenté avec les recourants et la contradiction entre ses propos et d'autres éléments du dossier, comme le témoignage du sous-locataire des recourants et les déclarations du recourant lui-même à la police en mars 2012, il convient de considérer son témoignage avec circonspection. De surcroît, ce témoin a émis des affirmations inexactes, comme par exemple que les enfants des recourants auraient toujours été scolarisés à I______.

Ensuite, il ressort de l'attestation produite par les recourants que leurs enfants aînés ont été scolarisés à L______ durant toute l'année scolaire 2012-2013. Lors de son audition, M. A______ a d'ailleurs indiqué que suite à leur retour en Suisse, sa femme avait fait des allers-retours entre Genève et L______ pour que ses enfants puissent terminer l'année scolaire là où ils l'avaient commencée. Il ne semble dès lors pas vraisemblable que la famille n'ait déménagé en France qu'en octobre 2012. Quant au contrat de bail produit, comme l'a retenu le TAPI, il ne peut être considéré comme probant, dans la mesure où il mentionne une durée de location aux dates incohérentes (soit d'octobre 2012 à mars 2012) et que ces dates ne correspondent ni à la déposition de M. A______ devant la police, ni aux déclarations du sous-locataire des recourants. En tout état de cause, et comme l'a à juste titre relevé l'OCPM dans ses observations finales, il ne paraît pas sensé de procéder à deux déménagements et de scolariser ses enfants dans une nouvelle école pour se trouver moins de six mois dans un logement plus spacieux.

Enfin, il ne paraît pas vraisemblable que le recourant ait confondu les dates en raison du stress lors de son audition par la police. Ces dates ont de plus été retenues dans l'ordonnance de condamnation du recourant, qu'il n'a pas contestée.

Au vu de ce qui précède, la chambre administrative considère comme établi que dans le meilleur des cas, les recourants ont vécu du 1er août 2012 au 10 mars 2013 à L______, soit durant plus de sept mois. Tout mène d'ailleurs à penser que les recourants avaient l'intention de séjourner plus longtemps en France, mais qu'ils ont dû rentrer précipitamment en Suisse parce que les autorités ont été mises au courant de leur départ suite à l'audition du recourant par la police en mars 2013. Il ressort d'ailleurs de son audition à la police qu'ils avaient initialement l'intention de ne rentrer en Suisse que lorsqu'ils trouveraient un appartement plus grand. Leur départ précipité de France a du reste été confirmé par M. V_______, l'un des témoins.

Durant ces sept mois, le domicile genevois des recourants, sous-loué, était donc fictif, la famille se retrouvant, mangeant et dormant tous ensemble dans leur appartement à L______, où deux de leurs enfants étaient scolarisés. Il ne fait donc aucun doute qu'ils ont séjourné en France au sens de la loi durant cette période.

Les recourants ayant quitté la Suisse pour plus de six mois et n'ayant à aucun moment formé une demande en vue du maintien de leurs autorisations d'établissement conformément à l'art. 61 al. 2 LEtr, ils n'étaient pas fondés, sans l'autorisation de l'OCPM, à se mettre de facto au bénéfice d'une situation de frontaliers. Partant, leurs autorisations d'établissement, respectivement de séjour, ont pris fin au 31 janvier 2013, soit avant leur retour en mars 2013.

d. Au vu de ce qui précède, c'est à juste titre que l'OCPM, puis le TAPI, ont admis que leurs autorisations d'établissement, respectivement de séjour, avaient pris fin.

4) À titre subsidiaire, les recourants invoquent une violation du principe de la proportionnalité : l'art. 61 al. 2 LEtr disposant que l'autorisation d'établissement peut être maintenue pendant quatre ans sur demande, il conviendrait selon eux de prendre une mesure moins incisive que celle prononcée le 2 février 2015.

a. Le principe de la proportionnalité, garanti par l'art. 5 al. 2 Cst., exige qu'une mesure restrictive soit apte à produire les résultats escomptés et que ceux-ci ne puissent être atteints par une mesure moins incisive. En outre, il interdit toute limitation allant au-delà du but visé et exige un rapport raisonnable entre celui-ci et les intérêts publics ou privés compromis (ATF 126 I 219 consid. 2c p. 222 et les références citées).

b. Il se compose des règles d'aptitude - qui exige que le moyen choisi soit propre à atteindre le but fixé -, de nécessité - qui impose qu'entre plusieurs moyens adaptés, l'on choisisse celui qui porte l'atteinte la moins grave aux intérêts privés - et de proportionnalité au sens étroit - qui met en balance les effets de la mesure choisie sur la situation de l'administré et le résultat escompté du point de vue de l'intérêt public (ATF 125 I 474 consid. 3 p. 482 ; arrêt du Tribunal fédéral 1P.269/2001 du 7 juin 2001 consid. 2c ; ATA/19/2015 du 6 janvier 2015 consid. 8 ; ATA/735/2013 du 5 novembre 2013 consid. 11).

c. Dans un cas de caducité d'un permis d'établissement suite à un séjour prolongé à l'étranger, le Tribunal fédéral a retenu qu'il n'y avait aucune place pour la pondération d'intérêts, la seule question déterminante étant celle de savoir si l'étranger a effectivement séjourné à l'étranger plus de six mois (arrêt du Tribunal fédéral 2C_454/2012 du 29 mai 2012 consid. 2.4).

d. En l'espèce, et comme l'a retenu le Tribunal fédéral dans l'arrêt susmentionné, l'autorité n'a aucune marge de manoeuvre : même si le séjour des recourants à l'étranger n'a duré qu'un peu plus de sept mois, il a dépassé les six mois prévus par l'art. 61 al. 2 LEtr. En l'absence de demande formée conformément à cette disposition, l'OCPM ne pouvait que constater la caducité des permis d'établissement et de séjour des recourants. Même si la décision litigieuse était contraire au principe de la proportionnalité, elle ne pourrait être invalidée dans la mesure où elle se fonde directement sur une loi fédérale (art. 190 Cst.).

5) Les recourants font enfin valoir une violation du formalisme excessif, au motif que l'OCPM aurait maintenu les permis pour une durée de quatre ans s'ils l'avaient formellement demandé.

a. Le formalisme excessif, prohibé par l'art. 29 al. 1 Cst., est réalisé lorsque la stricte application des règles de procédure ne se justifie par aucun intérêt digne de protection, devient une fin en soi, complique de manière insoutenable la réalisation du droit matériel ou entrave de manière inadmissible l'accès aux tribunaux (ATF 135 I 6 consid. 2.1 p. 9 ; 134 II 244 consid. 2.4.2 p. 247 s ; 130 V 177 consid. 5.4.1 p. 183 s ; 128 II 139 consid. 2a p. 142 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_734/2012 du 25 mars 2013 consid. 3.1 ; 2C_133/2009 du 24 juillet 2009 consid. 2.1 ; ATA/836/2014 du 28 octobre 2014 consid. 7a). L'excès de formalisme peut résider soit dans la règle de comportement imposée au justiciable, soit dans la sanction qui lui est attachée (ATF 132 I 249 consid. 5 p. 253 ; 130 V 177 consid. 5.4.1 p. 183 ; 128 II 139 consid. 2a p. 142 et les arrêts cités). Ainsi en va-t-il lorsque la violation d'une règle de forme de peu d'importance entraîne une sanction grave ou disproportionnée, telle par exemple une décision d'irrecevabilité (ATA/473/2004 du 25 mai 2004 consid. 3 ; ATA/561/2003 du 23 juillet 2003 consid. 6 ; Pierre MOOR, Droit administratif, vol. 2, 2ème éd., 2002, p. 230 ss n. 2.2.4.6 et les références citées).

b. L'interdiction du formalisme excessif concerne ainsi la souplesse dont doit faire preuve une autorité ou une juridiction administrative dans l'application des règles de procédure (Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2011, pp. 502-503 nos 1505 et 1509) et non la façon dont elle applique le droit de fond (ATA/228/2012 du 17 avril 2012 consid. 9).

c. Selon l'art. 79 al. 2 OASA, la demande de maintien de l'autorisation d'établissement doit être déposée avant l'échéance du délai de six mois. Elle doit être adressée, dûment motivée, à l'autorité cantonale compétente en matière d'étrangers, qui statue librement dans les limites de sa compétence (arrêt du Tribunal fédéral 2A.357/2000 du 22 janvier 2001 consid. 3).

d. En l'espèce, les recourants se plaignent de formalisme excessif en lien avec une règle qui n'est pas d'ordre procédural. Ils critiquent la façon dont l'autorité applique l'art. 79 OASA, et non pas la manière dont la procédure a été menée. Ce grief ne peut dès lors qu'être écarté.

En tout état de cause, il sied de préciser que même si la demande lui avait été faite conformément à l'art. 79 al. 2 OASA, l'OCPM aurait statué librement. Les recourants n'auraient dès lors pas automatiquement obtenu le maintien de leur autorisation pour une période allant de six mois à quatre ans.

6) Au vu de ce qui précède, c'est à juste titre que l'OCPM, puis le TAPI, ont admis que les autorisations d'établissement, respectivement de séjour des recourants, avaient pris fin au 31 janvier 2013.

Mal fondé, le recours sera rejeté.

7) Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge conjointe et solidaire des recourants, qui succombent (art. 87 LPA), et il ne sera pas alloué d'indemnité de procédure (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 11 septembre 2015 par Madame et Monsieur A______, agissant en leur nom personnel et en qualité de représentants de leurs enfants mineurs B______, C______, D______ et E______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 10 juillet 2015 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 400.- à la charge de Madame et Monsieur A______, pris conjointement et solidairement ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Michel Lellouch, avocat des recourants, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance, ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.

Siégeants : M. Verniory, président, MM. Thélin et Dumartheray, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

 

le président siégeant :

 

 

J.-M. Verniory

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :

 

 

 

 

 


 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

...

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

...

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l'entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l'admission provisoire,

4. l'expulsion fondée sur l'art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d'admission,

6. la prolongation d'une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d'emploi du titulaire d'une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d'asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l'objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

...

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l'autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l'acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

...

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l'expédition complète.

______________________________________________

Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l'objet d'aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l'autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l'annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l'expédition complète.

___________________________________________

 

Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.