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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/752/2020

ATA/826/2021 du 10.08.2021 sur JTAPI/1171/2020 ( LCI ) , REJETE

Descripteurs : AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE ET DROIT PUBLIC DES CONSTRUCTIONS;CONSTRUCTION ET INSTALLATION;PERMIS DE CONSTRUIRE;AUTORISATION DÉROGATOIRE(PERMIS DE CONSTRUIRE)
Normes : LCI.59.al4.leta
Parties : BOETSCH Arnaud, BOETSCH Gabrielle ET AUTRES, GARDIOL Jean-Pierre, GRILLON Pierre-Alban, GRILLON Daniela, WALDER GOUSSET Catherine / DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE-OAC, TOUBATI SÀRL, JUNOD Adeline ET TOUBATI Sàrl, JUNOD Jean-Marc
Résumé : Rejet d’un recours déposé par des voisins contre l’autorisation de construire un bâtiment de quatre logement de très haute performance énergétique, avec un indice d’utilisation du sol de 48 %, de type R + 1 en zone 5. Examen du projet en lien avec le plan directeur cantonal et le plan directeur communal ainsi que la question de sa compatibilité avec le caractère, l’harmonie et l’aménagement du quartier.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/752/2020-LCI ATA/826/2021

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 10 août 2021

3ème section

 

dans la cause

 

Madame Gabrielle et Monsieur Arnaud BOETSCH
Monsieur Jean-Pierre GARDIOL
Madame Daniela et Monsieur Pierre-Alban GRILLON
Madame Catherine WALDER GOUSSET

représentés par Me Guerric Canonica, avocat

contre

Madame Adeline JUNOD
TOUBATI Sàrl
représentées par Me Cécile Berger Meyer, avocate
et
DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE-OAC
_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 23 décembre 2020 (JTAPI/1171/2020)


EN FAIT

1) Monsieur Jean-Marc JUNOD est propriétaire de la parcelle no 2'624, feuille 45 de la commune de Vandoeuvres (ci-après : la commune), située en 5ème zone de construction à l’adresse 10, chemin de la Troupe.

Sur cette parcelle sont construits une habitation à un logement d’une surface au sol de 114 m2 ainsi qu’un autre bâtiment de 11 m2.

2) Le 9 mai 2019, Toubati Sàrl (ci-après : Toubati) dont M. JUNOD est associé gérant unique et pour laquelle Madame Adeline JUNOD, fille de M. JUNOD, dispose d’une procuration individuelle, a déposé auprès du département du territoire (ci-après : le département) une demande d’autorisation de construire (DD 112'628) portant sur un habitat groupé de très haute performance énergétique (ci-après : THPE) avec un indice d'utilisation du sol de 48 %, avec sondes géothermiques et abattage d’arbres.

Le projet prévoyait un bâtiment de quatre logements R + 1, huit places de stationnement en surface, un couvert pour quatre vélos et une moto ainsi qu’un parking souterrain avec système d’ascenseur pour deux véhicules.

3) Lors de l’instruction de la demande par le département, tous les préavis recueillis ont été finalement favorables, notamment, celui de la direction des autorisations de construire (ci-après : DAC) du 21 mai 2019, portant sur la dérogation selon l’art. 59 al. 4 de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05). Dans un second préavis favorable, sous conditions, le calcul du rapport de surfaces avait été modifié s'agissant du calcul des surfaces de constructions de peu d'importance (ci-après : CDPI) : 14,3 + 14,3 + 9,5 + 9,2 = 47,3 m; 47,3/923,8 = 5,1 %.

Le 7 juin 2019, l’office cantonal des transports (ci-après : OCT) a demandé la réorganisation de l’accès aux places de stationnement, afin qu’il n’y ait qu’un seul débouché sur le domaine public ainsi que la mise en place de plans coupés de 1,5 m afin d’offrir des conditions de visibilité satisfaisantes. Une nouvelle modification a été demandée le 3 octobre 2019. Le 3 décembre 2019, l’OCT a requis que la largeur libre de l’allée de circulation des véhicules soit de 4 m au minimum à la hauteur de l’ascenseur à voitures afin qu’il ne gêne pas la circulation. Il a demandé que la haie le long du chemin de la Troupe soit régulièrement taillée afin de garantir une distance de recul de 4 m au moins pour les véhicules en stationnement. Il a encore souhaité le recul de 25 cm de l’escalier débouchant entre les places de stationnement.

Le 11 juin 2019, la commission d’architecture (ci-après : CA) a demandé que le bâtiment soit rapproché de la rue afin de diminuer la surface de desserte et augmenter la surface végétale. Les claustras, qui augmentaient le volume apparent, donnaient l’impression d’une trop importante volumétrie sur cette petite parcelle. Le 1er octobre 2019, la CA a émis un préavis favorable avec dérogation selon l’art. 59 al. 4 LCI. Bien que le volume projeté s’étirait sur la longueur de la parcelle, la solution d’un seul étage permettait de préserver les caractéristiques du contexte bâti environnant constitué de villas. Le choix d’implanter les villas et le parking en front de rue était par ailleurs cohérent dans le contexte, permettant de réduire fortement la desserte carrossable sur la parcelle. Le langage architectural, de qualité, était appréciable.

Le 24 juin 2019, la commune a émis un préavis défavorable au motif que le projet avait un impact très négatif sur le caractère et l’harmonie du quartier. Toutefois, le 9 octobre 2019, après modification du projet, le préavis était favorable sous conditions d’épaissir de manière substantielle la largeur de la haie le long du chemin de la Troupe et de rapprocher les chênes de la limite avec ce chemin.

Le 19 juillet 2019, la direction de la planification directrice cantonale et régionale (ci-après : SPI) a demandé une modification du projet pour répondre aux objectifs de la stratégie communale et présenter des qualités urbanistiques et paysagères justifiant la demande de dérogation. Le 16 octobre 2019, son second préavis était sans observation remarquant que l’ensemble des points faisant l’objet de demandes de modifications avait été traité, le projet étant compatible avec la stratégie en zone 5 de la commune.

4) Le 29 janvier 2020, le département a délivré l’autorisation de construire. La décision précisait que les préavis devaient être strictement respectés et faisaient partie intégrante de la décision. La décision a été publiée dans la Feuille d'avis officielle de la République et canton de Genève du même jour.

5) Par acte du 27 février 2020, Madame Gabrielle et Monsieur Arnaud BOETSCH, Monsieur Jean-Pierre GARDIOL, Madame Daniela et Monsieur Pierre-Alban GRILLON ainsi que Madame Catherine WALDER GOUSSET (ci-après : les consorts), propriétaires des parcelles nos 1'971, 2'490, 2'593 et 2'623 jouxtant le terrain litigieux, ont interjeté recours auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le TAPI) contre l’autorisation de construire, concluant à son annulation. Préalablement, ils concluaient à l’audition de l’attaché de direction auprès du département, à un transport sur place et à l’établissement d’un rapport de circulation sur le chemin de la Troupe.

Le projet dépassait l’emprise au sol autorisable et entraînait une densification excessive de la zone villa, en contrariété avec la volonté du législateur, le plan directeur cantonal (ci-après : PDCant 2030), le guide de juin 2017 pour une densification de qualité de la zone 5 sans modification de zone à Genève (ci-après : le guide) et était contraire à la stratégie communale.

Le projet n’était pas celui d’une villa à toit à deux pans et ne pouvait être jugé compatible avec le caractère, l’harmonie et l’aménagement du quartier, un secteur largement arborisé et modestement construit principalement de villas individuelles.

Le projet violait les art. 59 al. 9 et 10 LCI et les CDPI ne pouvaient excéder 24 % de la surface de la parcelle. Il fallait non seulement que le dépassement de la surface en sous-sol permette d’éviter la réalisation de garages en surface, mais également que la construction de ces garages en tant que CDPI eut été possible.

L’art. 14 LCI était violé, le chemin de la Troupe présentant une largeur de moins de 6 m, ce qui rendait particulièrement difficile le croisement de deux véhicules de tourisme.

Le projet violait l’art. 15 al. 1 LCI en nuisant par ses dimensions et son aspect extérieur au caractère et à l’intérêt du quartier.

6) Le 14 mai 2020, Toubati et Mme JUNOD ont conclu au rejet des actes d’instruction sollicités et principalement au rejet du recours, répondant point par point aux griefs soulevés.

7) Le 9 juin 2020, le département a conclu au rejet tant des mesures d’instruction sollicitées que du recours, répondant aux griefs des consorts.

8) Le 23 décembre 2020, après avoir ordonné un second échange d'écritures, le TAPI a rejeté le recours.

Les conclusions préalables étaient rejetées, le dossier contenant les éléments suffisants et nécessaires à l'examen des griefs et arguments mis en avant par les parties.

Le projet s'inscrivait parfaitement dans la définition de l'habitat groupé et la densification était possible à teneur du PDCant 2030 et du plan directeur communal (ci-après : PDCom).

Ayant suivi les préavis favorables, on ne saurait conclure que le département avait excédé ou abusé de son pouvoir d'appréciation.

Un garage aurait pu être construit en surface et était remplacé par un garage en sous-sol, la dérogation de l'art. 59 al. 10 LCI était donc justifiée.

Le chemin de la Troupe était un axe droit de 900 m de long sur lequel la vitesse avait été limitée à 30 km/h. Il était sans issue à l'ouest et ne desservait qu'une quinzaine de villas. C'était de manière conforme au droit que le département avait considéré que le terrain litigieux était équipé, notamment avec une voie d'accès suffisante et que le projet n'engendrerait pas d'inconvénients graves au sens de l'art. 14 LCI.

9) Par deux actes datés du 11 février 2021, le premier reçu le 12 février et le second le 15 février 2021, par la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative), les consorts ont interjeté recours contre le jugement du TAPI en concluant à l'annulation de l'autorisation de construire DD 112'628 et préalablement à ce qu'un transport sur place soit ordonné, dans le premier acte et à l'annulation du jugement du TAPI dans le second acte.

Seul un transport sur place permettrait de constater la réalité des griefs soulevés, en particulier l'impact du projet litigieux sur la sécurité des usagers du chemin de la Troupe et l'esthétique du quartier. La construction devait en réalité être considérée comme un R + 2, aussi « intrusif qu'inédit » dans le quartier. La CA ne s'était jamais prononcée sur la compatibilité de ce nouveau mode de construction avec les villas individuelles traditionnelles qui l'entoureraient de toutes parts.

L'autorisation contestée permettait une densification excessive en violation du PDCant 2030 et du PDCom. Le TAPI avait retenu que la densification n'était pas encouragée dans le secteur concerné, mais qu'elle y demeurait possible. Le PDCant 2030 préconisait l'élaboration de stratégies communales pour la zone villa, identifiant les secteurs à densifier ou à protéger. Il ne se justifiait pas de densifier la zone villa en dehors des secteurs expressément identifiés à cet effet.

Le PDCom en vigueur, datant de 2007, n'identifiait pas le secteur comme étant à densifier compte tenu notamment de son infrastructure limitée, notamment une desserte peu favorable en transports collectifs.

Le projet était incompatible avec le caractère, l'harmonie et l'aménagement du quartier. La dérogation avait été délivrée en violation tant des art. 15 que 59 al. 4 let. a LCI. Les terrasses aménagées en toiture correspondaient en réalité à l'impact d'une construction R + 2, ce dont la CA n'avait pas tenu compte.

À teneur du guide de densification en 5ème zone, le département devait notamment se fonder sur l'analyse du bâti à l'échelle du territoire communal, afin de repérer les caractéristiques des structures foncières dominantes ainsi que des entités patrimoniales à préserver. Dans ce contexte, la construction d'un volumineux immeuble rectangulaire à toiture plate d'une largeur en façade de 25,5 m et d'une hauteur de 7,33 m, barrière des terrasses aménagées en toiture comprises, avec construction d'un parking en surface en front du chemin de la Troupe avec couvert à vélos, couvert à motos et couvert à poubelles, sans oublier l'abattage de nombreux arbres, n'était pas compatible avec le caractère, l'harmonie et l'aménagement du quartier composé majoritairement de villas individuelles et traditionnelles.

10) Le 17 février 2021, le TAPI a transmis son dossier, renonçant à formuler des observations.

11) Le 16 mars 2021, le département a déposé des observations, concluant au rejet du recours.

Un transport sur place ne serait d'aucune utilité, le projet de construction dont l'impact faisait débat n'ayant pas encore été réalisé.

Le gabarit était largement inférieur aux 10 m préconisés par l'art. 69 LCI puisqu'il était de 6,23 m, ce qui aurait pu permettre l'aménagement d'un étage supplémentaire, ce que la terrasse prévue sur le toit n'était pas.

Le projet n'était pas contraire au PDCant 2030 et au PDCom, lequel n'était même pas adopté lors de la délivrance de l'autorisation.

12) Le 17 mars 2021, Toubati et Mme JUNOD ont déposé des observations, concluant au rejet du recours, de la demande de transport sur place ainsi qu'au versement d'une indemnité de procédure.

Il n'était pas acquis que le second acte ait été mis à la poste le 11 février 2021 et, cas échéant, la conclusion nouvelle serait irrecevable.

Si le projet ne se trouvait pas dans un périmètre où la densification était encouragée selon le PDCant 2030 ou le PDCom 2007, il n'avait cependant pas non plus été identifié comme secteur à protéger. Le bâtiment prévu ne se trouvait pas à proximité d'un patrimoine bâti ancien de la commune, ne faisait pas l'objet d'un classement et ne se situait pas non plus dans une zone où de nombreux espaces verts naturels nécessiteraient une protection accrue. La parcelle se trouvait à 162 m d'un arrêt des Transports publics genevois et à 64 m du chemin de la Seymaz. Le secteur de la Seymaz comportait déjà de nombreux bâtiments à toit plat.

La terrasse sur le toit n'était pas susceptible de générer des nuisances sonores particulières. Il ne s'agissait pas d'un restaurant, d'un bar ou d'un dancing.

Le projet avait été modifié à la demande de la CA et de la commune. Les constructions environnantes étaient toutes plus élevées que leur projet.

Celui-ci prévoyait l'abattage d'un seul arbre, la plantation de quatre supplémentaires et l'élargissement de la haie. L'aménagement paysager serait ainsi nettement amélioré.

13) Le 12 avril 2021, les consorts ont répliqué, déposant la preuve de l'envoi des deux actes de recours le 11 février 2021.

La construction de terrasses en toitures de quatre logements contigus avec quatre familles exposerait le quartier à des nuisances sonores bien plus élevées qu'une maison avec un toit à deux pans et une seule famille.

Aucune des maisons à toit plat du quartier ne possédait de terrasse en toiture et le département aurait dû relever le caractère non compatible de ces aménagements avec le caractère faiblement urbanisé du quartier.

14) Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Les recourants demandent qu'un transport sur place soit ordonné afin de constater l'impact du projet litigieux, lequel devrait en réalité être considéré comme un R + 2 et non un R + 1, « aussi intrusif qu'inédit » dans le quartier. Ledit impact ne pouvait être constaté que sur place.

Tel qu’il est garanti par l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) le droit d’être entendu comprend notamment le droit pour l’intéressé d’offrir des preuves pertinentes, de prendre connaissance du dossier, d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l’administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s’exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 142 III 48 consid. 4.1.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 1B_539/2019 du 19 mars 2020 consid. 3.1). Le droit de faire administrer des preuves n’empêche cependant pas le juge de renoncer à l’administration de certaines preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier s’il acquiert la certitude que celles-ci ne l’amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 145 I 167 consid. 4.1. ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_41/2020 du 24 juin 2020 consid. 5.1.1). Le droit d'être entendu ne contient pas non plus d’obligation de discuter tous les griefs et moyens de preuve du recourant ; il suffit que le juge discute ceux qui sont pertinents pour l'issue du litige (ATF 141 III 28 consid. 3.2.4 ; arrêts du Tribunal fédéral 9C_245/2020 du 12 juin 2020 consid. 3.2.).

En l'espèce, le quartier contient déjà des bâtiments plus hauts que ceux projetés, même s'ils ne possèdent pas de terrasses sur le toit. Ainsi, notamment, les constructions existantes sur les parcelles des recourants qui entourent immédiatement la parcelle litigieuse sont toutes plus élevées que le projet, aux dires des intimés qui ne sont pas contredits sur ce point par les recourants. Les constructions vont de 7,39 m sur la parcelle no 1'690 à 10,34 m sur la parcelle no 1'971.

Rien ne permet de retenir que le transport sur place permettrait d'établir des faits, s'agissant de l'impact d'un bâtiment qui n'est pas construit, qui ne ressortent pas déjà des pièces figurant au dossier, tels que les plans du projet ou qui sont des faits notoires.

À l’instar du TAPI, la chambre de céans considère que le dossier est complet et en état d’être jugé. Il ne sera ainsi pas donné suite à la demande de transport sur place.

En conséquence, le grief sera écarté et la requête de mesures d’instruction refusée.

3) Le recours peut être formé pour violation du droit y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation (art. 61 al. 1 let. a LPA) ainsi que pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (art. 61 al. 1 let. b LPA). Les juridictions administratives n'ont pas compétence pour apprécier l'opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA).

4) Les recourants estiment que le projet est contraire au PDCant 2030 ainsi qu'au PDCom, lesquels ne prévoyaient pas de densification dans la zone concernée.

Le PDCant 2030, adopté le 20 septembre 2013 et approuvé par le Conseil fédéral le 28 janvier 2015, prévoit pour la zone 5, une densification différenciée en excluant les secteurs relevant de la protection du patrimoine et des sites, où une faible densité devait être maintenue (fiche A04).

La carte du schéma directeur cantonal fait apparaître la parcelle dans un secteur concerné par la stratégie de densification. En outre, le 16 octobre 2019, la SPI, a retenu que le projet était compatible avec la stratégie adoptée en zone 5.

Finalement, sur ce point, la zone 5 concernée ne bénéficie d'aucune protection patrimoniale spéciale limitant sa densification qui aurait été omise par le département dans l'examen du projet.

Quant au PDCom, sa nouvelle version n'a été approuvée par le Conseil d'État que le 25 mai 2020, après la délivrance de l'autorisation litigieuse. En outre, ce nouveau plan ne s'oppose d'ailleurs pas une densification du secteur puisqu'il indique que le secteur de la Seymaz, dans lequel la parcelle concernée est située, malgré ce que les recourants laissent entendre, puisqu'elle est sise entre le chemin de la Troupe et le chemin de la Seymaz, possède encore un important potentiel de densification. La commune ne s'est d'ailleurs pas opposée au projet qu'elle a finalement préavisé favorablement sous des conditions ne portant pas sur la densité du projet.

En conséquence, le grief sera écarté.

5) a. Pour une demande de construction sur une parcelle sise en cinquième zone, déposée, comme en l'espèce, avant le 28 novembre 2019, date de l'entrée en vigueur du gel des dérogations pour les projets de densification en zone villas (ATA/1075/2020 du 27 octobre 2020 consid. 5) et avant l'entrée en vigueur de la nouvelle teneur de l'art. 59 LCI, le 28 octobre 2020, laquelle ne s'applique qu'aux demandes déposées après le 28 novembre 2020 (ATA/439/2021 du 20 avril 2021 consid. 5), l'art. 59 LCI applicable est celui adopté le 26 janvier 2013 qui prévoit que la surface de la construction, exprimée en m2 de plancher, ne doit pas excéder 25 % de la surface de la parcelle. Cette surface peut être portée à 27,5 % lorsque la construction est conforme à un standard de haute performance énergétique
(ci-après : HPE), respectivement à 30 % si elle respecte le standard THPE - art. 59 al. 1 LCI).

Lorsque les circonstances le justifient et que cette mesure est compatible avec le caractère, l'harmonie et l'aménagement du quartier, le département peut autoriser, après consultation de la commune et de la CA, un projet de construction en ordre contigu ou sous forme d'habitat groupé dont la surface de plancher habitable n'excède pas 40 % de la surface du terrain, 44 % respectivement 48 % lorsque la construction est conforme à un standard de HPE ou de THPE (art. 59 al. 4 let. a LCI).

b. Avant d'autoriser un projet de construction en cinquième zone, dont la densité correspond à celle prévue par l'art. 59 al. 4 let. a LCI, le département doit ainsi recueillir les préavis de la CA, respectivement celui de la commune du lieu de situation (art. 59 al. 4 let. a LCI).

c. Dans le système de la LCI, les avis ou préavis des communes, des départements et organismes intéressés ne lient pas les autorités (art. 3 al. 3 LCI). Ils n'ont qu'un caractère consultatif, sauf dispositions contraires et expresses de la loi ; l'autorité reste ainsi libre de s'en écarter pour des motifs pertinents et en raison d'un intérêt public supérieur (ATA/1157/2018 du 30 octobre 2018 et les références citées). Toutefois, lorsqu'un préavis est obligatoire, il convient de ne pas le minimiser (ATA/873/2018 du 28 août 2018 et les références citées). Dans le système prévu par l'art. 59 al. 4 let. a LCI, tant le préavis de la commune que celui de la CA ont cette caractéristique (ATA/873/2018 précité). La délivrance de telles autorisations de construire demeure toutefois de la compétence exclusive du département, à qui il appartient de statuer en tenant compte de tous les intérêts en présence (ATA/1273/2017 du 12 septembre 2017 consid. 11c et les références citées).

d. Selon une jurisprudence bien établie, la chambre de céans observe une certaine retenue pour éviter de substituer sa propre appréciation à celle des commissions de préavis pour autant que l'autorité inférieure suive l'avis de
celles-ci. Les autorités de recours se limitent à examiner si le département ne s'écarte pas sans motif prépondérant et dûment établi du préavis de l'autorité technique consultative, composée de spécialistes capables d'émettre un jugement dépourvu de subjectivisme et de considérations étrangères aux buts de protection fixés par la loi. De même, s'agissant des jugements rendus par le TAPI, la chambre administrative exerce son pouvoir d'examen avec retenue car celui-ci se compose pour partie de personnes possédant des compétences techniques spécifiques (ATA/166/2018 consid. 7b du 20 février 2018 et les références citées).

6) a. Comme le Tribunal fédéral a déjà eu l'occasion de le préciser, la première condition imposée par l'art. 59 al. 4 let. a LCI, soit le caractère justifié des circonstances, relève de l'opportunité, que la chambre de céans ne peut pas contrôler, alors que la seconde relative à la compatibilité du projet pose des critères relatifs à l'esthétique et à l'aménagement du territoire conférant un large pouvoir d'appréciation à l'autorité qui doit s'exercer dans le cadre légal. Cette deuxième condition relève non pas de l'opportunité, mais de l'exercice d'un pouvoir d'appréciation, dont la chambre administrative est habilitée, selon l'art. 61 al. 1 let. a LPA, à sanctionner l'excès ou l'abus (ATA/1485/2017 du 14 novembre 2017 consid. 8a et les références citées).

La compatibilité du projet avec le caractère, l'harmonie et l'aménagement du quartier, exigée par l'art. 59 al. 4 LCI, est une clause d'esthétique, analogue à celle contenue à l'art. 15 LCI. Une telle clause fait appel à des notions juridiques imprécises ou indéterminées, dont le contenu varie selon les conceptions subjectives de celui qui les interprète et selon les circonstances de chaque cas d'espèce ; ces notions laissent à l'autorité une certaine latitude de jugement. Lorsqu'elle estime que l'autorité inférieure est mieux en mesure d'attribuer à une notion juridique indéterminée un sens approprié au cas à juger, l'autorité de recours s'impose alors une certaine retenue. Il en va ainsi lorsque l'interprétation de la norme juridique indéterminée fait appel à des connaissances spécialisées ou particulières en matière de comportement, de technique, en matière économique, de subventions et d'utilisation du sol, notamment en ce qui concerne l'esthétique des constructions (ATA/1274/2017 du 12 septembre 2017 et la jurisprudence citée).

b. L'autorité administrative jouit d'un large pouvoir d'appréciation dans l'octroi de dérogations. Cependant, celles-ci ne peuvent être accordées ni refusées d'une manière arbitraire. Tel est le cas lorsque la décision repose sur une appréciation insoutenable des circonstances et inconciliable avec les règles du droit et de l'équité et se fonde sur des éléments dépourvus de pertinence ou néglige des facteurs décisifs. Quant aux autorités de recours, elles doivent examiner avec retenue les décisions par lesquelles l'administration accorde ou refuse une dérogation. L'intervention des autorités de recours n'est admissible que dans les cas où le département s'est laissé guider par des considérations non fondées objectivement, étrangères au but prévu par la loi ou en contradiction avec elle. Les autorités de recours sont toutefois tenues de contrôler si une situation exceptionnelle justifie l'octroi de ladite dérogation, notamment si celle-ci répond aux buts généraux poursuivis par la loi, qu'elle est commandée par l'intérêt public ou d'autres intérêts privés prépondérants ou encore lorsqu'elle est exigée par le principe de l'égalité de traitement, sans être contraire à un intérêt public (ATA/514/2018 du 29 mai 2018 consid. 4b).

7) En l'espèce, même si les recourants font grand cas d'une incompatibilité qui existerait entre le projet et le caractère, l'harmonie et l'aménagement du quartier, il faut constater qu'à moins de 100 m de la parcelle litigieuse, il existe des projets de construction, à différents stades d'avancement, comportant des densités proches de celle du projet concerné : sur la parcelle no 1'816, la construction prévue d'un habitat groupé avec une densité de 47,2 % ; sur les parcelles nos 3'234 à 3'239 la construction déjà réalisée de cinq villas contiguës, 43,8 % et sur la parcelle no 1'973, celle en cours d'un habitat groupé, 44 % (indications fournies par le site d'information du territoire à Genève - SITG consulté le 13 juillet 2021).

S'agissant des constructions existantes dans les environs, les recourants eux-mêmes reconnaissent l'existence de toitures plates, mais critiquent principalement les terrasses prévues sur le toit. À cet égard, il faut rappeler que les bâtiments prévus ne comportent qu'un étage sur rez et qu'ainsi leurs terrasses se trouveront plus bas que le dernier étage des bâtiments des parcelles avoisinantes, en tout cas de celles des recourants. Quant aux nuisances sonores qu'induiraient ces terrasses, rien ne permet de retenir, comme l'affirment les recourants, qu'elles seront différentes, voire plus élevées que celles émanent des terrasses ou des jardins situés au rez-de-chaussée. Finalement, les recourants n'expliquent pas de façon claire en quoi la présence des terrasses ne serait pas compatible avec le caractère faiblement urbanisé du quartier, lequel est largement sous-estimé comme vu ci-dessus à propos des constructions réalisées et en projet, dans les environs des parcelles des recourants.

Finalement, l'appréciation de la compatibilité du projet avec le caractère, l'harmonie et l'aménagement du quartier est notamment fondée sur le préavis favorable de la commune ainsi que celui de la CA, laquelle a procédé à un examen minutieux puisqu'elle a approuvé le projet après avoir demandé des modifications. Il en va de même de celui de la commune qui a finalement approuvé le projet.

Par leurs considérations esthétiques s'opposant à la densification, les recourants entendent surtout substituer leur propre appréciation à celle faite par le département. Or, rien ne permet de retenir que ce dernier aurait excédé ou abusé de son pouvoir d'appréciation en estimant que le projet était compatible avec le caractère, l'harmonie et l'aménagement du quartier.

En conséquence, le grief sera écarté.

8) En tous points infondé, le recours sera rejeté.

Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 1'000.- sera mis à la charge conjointe des recourants (art. 87 al. 1 LPA) et une indemnité de procédure de CHF 1'000.- sera allouée à Mme JUNOD et Toubati, à la charge conjointe des recourants (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 11 février 2021 par Madame Gabrielle et Monsieur Arnaud BOETSCH, Monsieur Jean-Pierre GARDIOL, Madame Daniela et Monsieur Pierre-Alban GRILLON, Madame Catherine WALDER GOUSSET contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 23 décembre 2020 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 1'000.- à la charge conjointe de Madame Gabrielle et Monsieur Arnaud BOETSCH, Monsieur Jean-Pierre GARDIOL, Madame Daniela et Monsieur Pierre-Alban GRILLON, Madame Catherine WALDER GOUSSET ;

alloue une indemnité de CHF 1'000.- à Madame Adeline JUNOD et Toubati Sàrl, pris solidairement, à la charge conjointe de Madame Gabrielle et Monsieur Arnaud BOETSCH, Monsieur Jean-Pierre GARDIOL, Madame Daniela et Monsieur Pierre-Alban GRILLON, Madame Catherine WALDER GOUSSET ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Guerric Canonica, avocat des recourants, à Me Cécile Berger Meyer, avocate de Madame Adeline JUNOD et de Toubati Sàrl, au département du territoire-oac ainsi qu'au Tribunal administratif de première instance,

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, Mmes Krauskopf et Rapp, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :