Aller au contenu principal

Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

1 resultats
A/3866/2011

ATA/596/2013 du 10.09.2013 sur JTAPI/1273/2012 ( PE ) , REJETE

Recours TF déposé le 28.10.2013, rendu le 31.10.2013, IRRECEVABLE, 2D_52/2013
Descripteurs : ; DROIT DES ÉTRANGERS ; RESSORTISSANT ÉTRANGER ; AUTORISATION DE SÉJOUR ; CAS DE RIGUEUR ; SÉJOUR ILLÉGAL ; DURÉE ; INTÉGRATION SOCIALE ; RENVOI(DROIT DES ÉTRANGERS) ; ADMISSION PROVISOIRE ; INTÉRÊT DE L'ENFANT
Normes : LEtr.30.al1.letb ; LEtr.64.al1.letc ; LEtr.64d.al1 ; LEtr.83 ; OASA.31.al1 ; Cst.19 ; CDE.28 ; CDE.29 ; LAsi.3.al1 ; CEDH.3 ; CEDH.8 ; CAT.3
Résumé : Confirmation d'une décision de l'Office cantonal de la population (OCP) refusant d'octroyer des permis de séjour pour cas de rigueur à une famille originaire de Bolivie. Le père, la mère et un des enfants avaient vécu illégalement en Suisse pendant cinq ans de 2005 à 2010. Le couple avait donné naissance à une fille à Genève en 2010. Leur intégration socioprofessionnelle, nonobstant leur investissement auprès de la communauté chrétienne hispanophone (Eglise évangélique apostolique de Genève), ne revêtait pas un caractère exceptionnel et le renvoi de la famille était possible, licite et exigible y compris s'agissant des enfants, en particulier du fils adolescent.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3866/2011-PE ATA/596/2013

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 10 septembre 2013

en section

 

dans la cause

 

Madame Y______ C______ et Monsieur R______ C______ agissant pour eux-mêmes et en qualité de représentants de leurs enfants mineurs L______ C______ et A______ C______

représentés par Me Yves Rausis, avocat

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 16 octobre 2012 (JTAPI/1273/2012)


EN FAIT

1) Monsieur R______ C______, né le ______ 1969, son épouse Y______ C______, née le ______ 1969, et leur fils L______ C______, né le ______ 1998, sont ressortissants de Bolivie.

2. M. R______ C______ est arrivé à Genève, en mars 2005, avec son épouse et leur fils, en provenance de Bolivie.

3. Le 27 avril 2010, il a été contrôlé par les gardes-frontière, dans la région de Presinge, alors qu'il séjournait et travaillait sans autorisation en Suisse.

4. Le même jour, il a fait l'objet de deux rapports de renseignements de police pour infraction à la loi fédérale sur les étrangers (LEtr - RS 142.20) et à la loi fédérale sur la circulation routière du 19 décembre 1958 (LCR - 741.01) (conduite en état d'ébriété).

5. Le ______ 2010, Mme Y______ C______ a donné naissance à A______ C______, à Genève.

6. Le 8 septembre 2010, la famille C______ a déposé une demande d'autorisation de séjour à titre humanitaire.

A l'appui de celle-ci, les époux C______ ont déposé diverses attestations certifiant leur qualité de pasteur et leur travail social auprès de la « communidad inmigrante » (courriers du Ministerios Cristianos Internacionales, du 15 décembre 2007 ; du Centro Cristianos Renacer, du 25 août 2010 ; de l'Iglesia Evangelica Christina Arbol de Vida du 24 août 2010 ; de l'Eglise évangélique apostolique de Genève du 2 août 2010). Monsieur R______ C______ a également produit une offre de travail de l'Eglise X______ à Genève pour des services dans le cadre de ses activités pastorales.

7. L'office cantonal de la population (ci-après : OCP) a entendu les époux C______ et leur fils le 3 février 2011.

En Bolivie, M. R______ C______ avait travaillé dans le domaine de la construction et de l'ébénisterie, après avoir effectué deux années d'université en ingénierie civile. Depuis son arrivée en Suisse, il poursuivait ces activités auprès de deux employeurs. Il comptait travailler à plein temps pour son église en qualité de pasteur. Sa mère et ses sept frères et soeurs vivaient à Santa Cruz. Sa mère percevait une rente et ses frères et soeurs travaillaient. Ils avaient leur propre famille et étaient tous en bonne santé. Madame Y______ C______ avait une formation d'aide-soignante. En Bolivie, elle avait travaillé dans le domaine médical. A Genève, elle avait travaillé dans l'économie domestique et comptait reprendre cette activité. Sa mère et quatre de ses frères et soeurs vivaient à Santa Cruz. Sa mère percevait une rente de veuve et vivait avec deux de ses fils et leurs familles. Ils étaient en bonne santé et assumaient leur entretien. Elle avait également une soeur en Suisse qui allait s'installer en Espagne, et un autre frère qui vivait en Espagne. Les époux C______ et leur fils entretenaient des contacts téléphoniques avec leur famille. En Suisse, ils ne faisaient l'objet d'aucune poursuite et n'avaient jamais émargé à l'assistance publique. Leurs revenus étaient d'environ CHF 3'500.- par mois et leurs charges d'environ CHF 2'220.-. Seuls leurs enfants bénéficiaient d'une assurance-maladie. A la question de savoir pourquoi il était venu en Suisse, M. R______ C______ a répondu : « car je suis un pasteur missionnaire chrétien ». Les époux C______ étaient restés à Genève pour des raisons économiques, en raison de leur implication au sein de l'église et pour apporter une meilleure éducation, un avenir professionnel et une sécurité à leurs enfants. Ils avaient une nouvelle vie à Genève et n'arriveraient pas à s'intégrer professionnellement et socialement en cas de retour en Bolivie. Cela serait très difficile pour leur fils L______ C______ d'y suivre l'école. A Genève, ils avaient des amis et travaillaient bénévolement au sein de l'église, en prodiguant des conseils familiaux et un soutien psychologique (drogue et suicide) aux fidèles. L______ C______ avait parfois des problèmes pour parler et écrire l'espagnol. Il s'était habitué à parler le français, même avec ses parents. Il souhaitait rester en Suisse et projetait d'étudier les sciences à l'université. Il se sentait intégré à Genève, où il avait tous ses amis et avait passé la moitié de sa vie. Il suivait des cours de guitare, de flûte à bec et de batterie et jouait au football.

A l'issue de cet entretien, l'examinateur a relevé que M. R______ C______ parlait et comprenait assez bien le français, son épouse le parlait et le comprenait peu, et L______ C______ le parlait et le comprenait parfaitement.

8. Par décision du 11 octobre 2011, l'OCP a refusé de préaviser favorablement le dossier de la famille C______ auprès de l'office fédéral des migrations (ci-après : ODM), selon les art. 30 LEtr et 31 de l'ordonnance relative à l'admission, au séjour et l'exercice d'une activité lucrative (OASA - 142.201). Il a prononcé le renvoi des intéressés en application de l'art. 64 al. 1 let. c LEtr et leur a imparti un délai au 15 janvier 2012 pour quitter la Suisse.

La famille C______ ne se trouvait pas dans une situation représentant un cas d'extrême gravité. Les époux C______ étaient arrivés en Suisse en 2005 alors qu'ils étaient déjà âgés de plus de 35 ans. La durée de leur séjour était relativement courte et devait être relativisée par rapport aux années passées dans leur pays d'origine. Ils ne pouvaient pas se prévaloir d'une intégration socioprofessionnelle particulièrement marquée et n'avaient pas créé avec la Suisse des attaches à ce point profondes et durables pour qu'un retour en Bolivie ne pût être raisonnablement exigé. Ils n'avaient pas non plus acquis des connaissances professionnelles ou des qualifications spécifiques telles qu'ils ne pourraient plus les mettre en pratique dans leur pays d'origine. Ils étaient venus en Suisse dans le cadre de leurs activités pastorales. Ils avaient conservé des attaches importantes dans leur patrie, où résidait une grande partie de leur famille proche. L______ C______, âgé de 13 ans, entrait certes dans l'adolescence, mais il rencontrait de grosses difficultés scolaires et n'avait été admis au cycle d'orientation que par dérogation. Un retour en Bolivie entraînerait quelques difficultés, mais son intégration en Suisse n'était pas à ce point poussée qu'il lui serait impossible de se réadapter à sa patrie et à un nouveau régime scolaire. Il pouvait à cet égard compter sur l'aide ses parents et du reste de sa famille. Il n'apparaissait pas non plus que l'exécution du renvoi des intéressés ne serait pas possible, pas licite ou non raisonnablement exigible.

9. Le 11 novembre 2011, les époux C______ et leurs enfants ont recouru contre cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI), concluant à son annulation et à l'octroi de l'autorisation de séjour sollicitée. Concernant les constats d'infractions à la LEtr et à la LCR dressés le 17 avril 2010, il s'agissait « d'un simple contrôle habituel » et aucune procédure judiciaire n'avait été engagée à ce jour. Ils avaient déposé leur demande de régularisation suite à ce contrôle. Leurs attaches en Bolivie devaient être relativisées, dès lors qu'ils n'y étaient pas retournés depuis 2005. Ils avaient perdu tout contact avec leurs proches. En Suisse, ils avaient développé un réseau de connaissances et pouvaient compter sur l'aide et le soutien de leurs employeurs. Les difficultés scolaires de L______ C______ ne suffisaient pas pour admettre un échec scolaire et il convenait de tenir compte de ses efforts d'intégration. Sa préoccupation principale était de pouvoir compter avec une « sécurité administrative » et pouvoir ainsi envisager une réorientation de sa formation. Il maîtrisait le français et ne parlait pas espagnol. Un retour en Bolivie lui causerait un traumatisme irréversible, car il ne pourrait alors pas continuer une formation en espagnol. Née en Suisse, A______ C______ ne connaissait pas son pays d'origine. Les époux C______ ne disposaient pas des conditions matérielles suffisantes pour assurer le développement psychologique et éducatif de leurs enfants et leur permettre de poursuivre une scolarité adéquate en Bolivie. Leur santé s'en trouverait compromise. Leur renvoi contrevenait à la Convention relative aux droits de l'enfant du 20 novembre 1989 (CDE - RS 0.107), ainsi qu'aux art. 8 et 14 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101).

A l'appui de leur recours, ils ont en particulier produit les documents suivants :

- un courrier du Centre international réformé du 24 juin 2011 attestant que les pasteurs C______ étaient connus depuis six ans dans les milieux évangéliques et pentecôtistes de langue espagnole à Genève. La bonne collaboration entre les Eglises locales et celles issues de la migration leur tenait à coeur. Ils étaient à la tête d'une nombreuse communauté chrétienne hispanophone et contribuaient au climat oecuménique agréable ;

- une lettre de Madame B______, institutrice de L______ C______ en 2009/2010, du 26 juin 2010, attestant que cet élève était parfaitement intégré dans la vie sociale genevoise et avait établi de solides relations d'amitié avec ses camarades. S'il éprouvait quelques difficultés scolaires, les conditions précaires de logement dans lesquelles il évoluait (il ne disposait pas d'un endroit tranquille pour travailler) ne lui avaient pas facilité la tâche ;

- un courrier de la maîtresse principale de L______ C______ du 15 octobre 2012 attestant qu'il était un élève agréable et qu'il avait des résultats satisfaisants dans les langues. Des efforts supplémentaires en mathématiques et dans les sciences pourraient lui permettre de changer de regroupement et d'envisager la 9ème R2.

10. Dans sa réponse du 12 janvier 2012, l'OCP a conclu au rejet du recours. Certes, L______ C______ paraissait socialement bien intégré et était un élève régulier au Cycle d'orientation (niveau RG1). Il ne s'était toutefois pas constitué des attaches à ce point étroites et profondes avec la Suisse, ni n'avait atteint un niveau de formation scolaire tel, qu'on ne pouvait exiger de lui qu'il s'adaptât à son pays d'origine, où il avait passé les six premières années de sa vie. L'OCP était conscient qu'un retour en Bolivie ne se ferait pas sans difficultés pour lui. Toutefois, compte tenu de son jeune âge, et de la capacité d'adaptation reconnue des enfants de cet âge, un éventuel départ de Suisse ne pouvait entraîner, en l'état actuel des choses, des difficultés d'adaptation impossibles à surmonter dans le pays qui l'avait vu naître et grandir. A______ C______ n'avait pas encore entamé sa scolarité obligatoire et restait encore très attachée à la culture et aux coutumes de la Bolivie par l'influence de ses parents. La demande d'autorisation de séjour était motivée principalement pas des considérations économiques. L'art. 31 al. 1 OASA n'avait toutefois pas pour but de soustraire les requérants aux conditions de vie de leur pays d'origine.

11. Le TAPI a entendu les parties le 16 octobre 2012.

Le recourant travaillait à 50 % en qualité de pasteur auprès de l'Eglise X______ et à 50 % au centre médico-chirurgical, où il était chef-manutentionnaire. Avec son épouse, ils avaient entrepris une formation de français par ordinateur. Le développement scolaire de L______ C______ était favorable. Il progressait beaucoup et allait être promu dans le degré supérieur. Un retour en Bolivie où il n'avait jamais été scolarisé serait catastrophique pour son développement, ce d'autant qu'il semblait désormais mieux maîtriser le français que l'espagnol. A la maison, la famille parlait à moitié en français et à moitié en espagnol.

12. Par jugement du 16 octobre 2012 (envoyé aux parties le 24 octobre), le TAPI a rejeté le recours, estimant que les recourants ne satisfaisaient pas aux conditions strictes requises pour la reconnaissance d'un cas de rigueur. La durée de leur séjour n'était pas déterminante, dès lors que celui-ci était illégal. Ils ne pouvaient pas non plus se prévaloir d'une intégration socioprofessionnelle remarquable et leur comportement n'avait pas été irréprochable. Le recourant ne parlait que très moyennement le français et la recourante avait beaucoup de peine à le comprendre et n'en parlait que quelques mots. Ils entretenaient des contacts réguliers avec leur famille en Bolivie. Arrivé à l'âge de sept ans en Suisse, L______ C______ avait passé ses premières années et une partie de son enfance en Bolivie. Il était fort probable qu'il parlait encore l'espagnol, compte tenu du niveau de français de ses parents. Il n'avait pas atteint un degré de scolarité particulièrement élevé, mais principalement acquis des connaissances d'ordre général qu'il pourrait mettre à profit ailleurs qu'en Suisse. La CDE ne conférait aucun droit à l'octroi d'une autorisation de séjour et l'art. 8 CEDH n'ouvrait un tel droit que si l'étranger pouvait justifier de liens sociaux et professionnels spécialement intenses avec la Suisse, ce qui n'était pas le cas des intéressés.

13. Le 22 novembre 2012, les époux C______ et leurs enfants ont recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative), en concluant à l'annulation de la « décision » du 16 octobre 2012 en tant qu'elle leur refusait l'octroi d'une autorisation de séjour et « prononçait leur renvoi de Suisse ».

Leur situation relevait du cas de rigueur. Hormis l'infraction à la LEtr, qu'il convenait de relativiser conformément à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, leur comportement en Suisse avait été irréprochable, comme en attestaient leurs extraits de casier judiciaire, datés du 5 août 2010. Ils étaient extrêmement actifs au sein des communautés protestantes de Genève et de Lausanne. Ils contribuaient à l'intégration de leurs fidèles dans la vie ecclésiale et sociale de Genève, « dite intégration étant nécessaire à une compréhension limpide des spécificités culturelles respectives ». De par leur rôle pastoral, ils constituaient un réel soutien aux membres de leur communauté et étaient reconnus comme une composante charnière de la vie religieuse genevoise. A ce titre, ils avaient créé en Suisse des liens tant professionnels que sociaux particulièrement ténus (recte : intenses), au sens où l'entendait l'art. 8 CEDH. Dans le cadre de l'appréciation du parcours scolaire de leur fils L______ C______, l'expérience quelque peu traumatisante de la clandestinité ne devrait pas être négligée. Son niveau scolaire s'était nettement amélioré. Il ne lisait et n'écrivait que le français, qu'il fallait considérer comme sa langue maternelle. Il communiquait en espagnol avec sa famille, mais parlait mal cette langue, contrairement à ce qu'avait retenu le TAPI. Un renvoi en Bolivie le condamnerait à l'analphabétisme. Il était désormais trop âgé pour y bénéficier de l'enseignement primaire et se verrait clairement marginalisé. La nécessité de suivre des cours d'appui intensifs palliant sept ans de scolarisation hors de Bolivie plaidait en faveur d'un cas d'une extrême gravité pour intégration poussée à Genève, où il avait passé la moitié de sa vie. Ainsi, leur cas pouvait être assimilé à celui ayant donné lieu à l'arrêt E______ c/ la Suisse du 22 mai 2008, dans lequel la Cour européenne des droits de l'homme avait retenu que le requérant avait effectué toute sa scolarité et vécu la plus grande partie de sa vie en Suisse, si bien que les liens avec son pays d'accueil étaient importants. L______ C______ avait acquis en Suisse les bases de l'enseignement obligatoire. A contrario, il ne disposait d'aucune base dans la langue de son pays d'origine. Souffrir d'analphabétisme à l'âge des débuts de formation était un réel handicap. Ce n'était ainsi pas avec seulement quelques difficultés, mais avec un clair désavantage qu'il serait renvoyé en Bolivie. Même si la CDE n'octroyait pas de droit directement justiciable par devant les tribunaux suisses, l'art. 3 al. 1 CDE leur imposait de prendre en considération de façon primordiale l'intérêt supérieur de l'enfant dans toutes les décisions les concernant. Selon les art. 28 et 29 CDE et 19 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), il appartenait à l'Etat de garantir à chaque enfant l'accès à l'enseignement de base (lire, écrire et compter), afin de lui octroyer les outils lui permettant de garantir son indépendance. L'intérêt personnel de L______ C______ à ne pas se voir privé des connaissances fondamentales dispensées par l'enseignement de base, ni d'être empêché d'user plus avant de ces outils en vue de l'acquisition d'une formation primait l'intérêt contraire de l'autorité à l'exécution du renvoi. L'ingérence à son droit fondamental à l'éducation de base était ainsi disproportionnée par rapport au but visés par la législation dans le domaine de la migration et devait, partant, être tenue pour illicite.

A l'appui de leur recours, les époux C______ ont déposé diverses lettres de soutien et de recommandation émanant notamment de membres de l'association Eglise X______, ainsi que le programme de celle-ci, intitulé « aides et conseils, guerre contre la dépression et le suicide, peur de l'échec ».

14. Dans sa réponse du 30 janvier 2013, l'OCP a conclu au rejet du recours, en reprenant son argumentation précédente. Si l'intégration de M. R______ C______ pouvait être qualifiée de réussie, elle n'avait cependant rien d'exceptionnel au sens de la jurisprudence fédérale permettant de reconnaître l'existence d'un cas de rigueur. Mme Y______ C______ n'exerçait aucune activité lucrative en Suisse. En revanche, elle avait travaillé dans le domaine des soins et dans des laboratoires dans son pays d'origine. L______ C______, âgé de 14 ans et demi, était arrivé en Suisse à presque l'âge de 7 ans, si bien qu'un renvoi n'irait pas sans difficultés. Sa situation n'était toutefois pas similaire à l'affaire E______, car si ce dernier était arrivé en Suisse à l'âge de 6 ans, son expulsion était intervenue alors qu'il était âgé de 23 ans. Son renvoi ne contredisait aucunement la CDE, dans la mesure où durant sa présence en Suisse, il avait bénéficié de toutes les infrastructures au même titre que les enfants de son âge en situation régulière. Il n'était pas établi que les difficultés que les recourants pourraient rencontrer dans leur pays seraient plus graves pour eux que pour n'importe lequel de leurs concitoyens qui se trouverait dans leur situation, appelé à quitter la Suisse au terme de son séjour. Le fait qu'ils exerçaient une activité ecclésiastique ne permettait pas de conclure à l'existence de liens sociaux et professionnels spécialement intenses avec la Suisse.

15. Dans le délai imparti, les recourants n'ont formulé aucune observation.

16. Le 29 août 2013, les recourants ont versé à la procédure un relevé scolaire actualisé concernant L______ C______ , inscrit en 9ème du cycle d'orientation, du 4 juin 2013 (moyenne générale : 4.3), une attestation d'inscription en 10ème au CO de la Seymaz du 29 août 2013, diverses attestations de participations à des rassemblements spirituels et religieux liés à l'engagement de M. R______ C______, ainsi que des attestations de fréquentation et inscription au cours de français délivrées par l'UOG en faveur de Mme Y______ C______ pour l'année 2013/2014.

17. Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ; 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Le recours porte sur le refus d'autorisation de séjour pour cas d'extrême gravité et le renvoi de Suisse des recourants.

3) Le recours devant la chambre administrative peut être formé pour violation du droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation, ainsi que pour constatation inexacte des faits (art. 61 al. 1 LPA). En revanche, celle-ci ne connaît pas de l'opportunité d'une décision prise en matière de police des étrangers, dès lors qu'il ne s'agit pas d'une mesure de contrainte (art. 61 al. 2 LPA ; art. 10 al. 2 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10, a contrario ; ATA/479/2012 du 31 juillet 2012 ; ATA/367/2012 du 12 juin 2012).

4. Selon l'art. 30 al. 1 let. b LEtr, il est possible de déroger aux conditions d'admission d'un étranger en Suisse pour tenir compte d'un cas individuel d'extrême gravité.

5. A teneur de l'art. 31 al. 1 OASA, lors de l'appréciation d'un cas d'extrême gravité, il convient de tenir compte notamment :

a) de l'intégration du requérant ;

b) du respect de l'ordre juridique suisse par le requérant ;

c) de la situation familiale, particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité des enfants ;

d) de la situation financière ainsi que de la volonté de prendre part à la vie économique et d'acquérir une formation ;

e) de la durée de la présence en Suisse ;

f) de l'état de santé ;

g) des possibilités de réintégration dans l'Etat de provenance.

6. La jurisprudence développée au sujet des cas de rigueur selon le droit en vigueur jusqu'au 31 décembre 2007 (art. 13 let. f de l'ancienne ordonnance limitant le nombre des étrangers du 6 octobre 1986 - aOLE - RS 142.20) est toujours d'actualité pour les cas d'extrême gravité qui leur ont succédé. Les dispositions dérogatoires des art. 30 LEtr et 31 OASA présentent un caractère exceptionnel et les conditions pour la reconnaissance d'une telle situation doivent être appréciées de manière restrictive (ATF 128 II 200 ; ATA/479/2012 précité ; ATA/750/2011 du 6 décembre 2011).

7. L'existence d'un cas d'extrême gravité implique que l'étranger concerné se trouve dans une situation de détresse personnelle. Cela signifie que ses conditions de vie et d'existence, comparées à celles applicables à la moyenne des étrangers, doivent être mises en cause de manière accrue, c'est-à-dire que le refus de soustraire l'intéressé à la réglementation ordinaire d'admission comporte pour lui de graves conséquences. Le fait que l'étranger ait séjourné en Suisse pendant une assez longue période, qu'il y soit bien intégré socialement et professionnellement et que son comportement n'ait pas fait l'objet de plaintes ne suffit pas, à lui seul, à constituer un cas d'extrême gravité ; il faut encore que sa relation avec la Suisse soit si étroite qu'on ne puisse exiger qu'il aille vivre dans un autre pays, notamment dans son pays d'origine. A cet égard, les relations de travail, d'amitié ou de voisinage que l'intéressé a pu nouer pendant son séjour ne constituent normalement pas des liens si étroits avec la Suisse qu'ils justifieraient une exception (ATF 124 II 110 consid. 3 ; Arrêt du Tribunal fédéral 2A.429/2003 du 26 novembre 2003 consid. 3 ; ATAF 2009/40 consid. 6.2 ; ATA/750/2011 précité ; ATA/648/2009 du 8 décembre 2009 ; A. WURZBURGER, La jurisprudence récente du Tribunal fédéral en matière de police des étrangers, in RDAF I 1997 pp. 267 ss). Son intégration professionnelle doit en outre être exceptionnelle : le requérant possède des connaissances professionnelles si spécifiques qu'il ne pourrait les utiliser dans son pays d'origine ; ou alors son ascension professionnelle est si remarquable qu'elle justifierait une exception aux mesures de limitation (Arrêt du Tribunal fédéral 2A.573/2005 du 6 février 2006 consid. 3.2 ; ATA/479/2012 précité ; ATA/774/2010 du 9 novembre 2010).

8. En règle générale, la durée du séjour illégal en Suisse ne peut être prise en considération dans l'examen d'un cas de rigueur car, si tel était le cas, l'obstination à violer la législation en vigueur serait en quelque sorte récompensée (Arrêts du Tribunal administratif fédéral C_6051/2008 consid. 6.4 et C_6098/2008 du 9 juillet 2010 consid. 6.4 ; ATA/720/2011 du 22 novembre 2011). Autrement dit, la longue durée d'un séjour en Suisse n'est pas, à elle seule, un élément constitutif d'un cas personnel d'extrême gravité dans la mesure où ce séjour est illégal. Il appartient dès lors à l'autorité compétente d'examiner si l'intéressé se trouve pour d'autres raisons dans un état de détresse justifiant de l'exempter des mesures de limitation du nombre des étrangers. Pour cela, il y a lieu de se fonder sur les relations familiales de l'intéressé en Suisse et dans sa patrie, sur son état de santé, sur sa situation professionnelle, sur son intégration sociale, etc. (Arrêt du Tribunal fédéral 2A.586/2006 consid. 2.1 ; ATF 130 II 39 consid. 3).

9. Lorsqu'une famille ou une partie d'une famille demande à pouvoir être exemptée des mesures de limitation au sens de l'art. 13 let. f aOLE, la situation de chacun de ses membres ne doit pas être considérée isolément mais en relation avec le contexte familial global. En effet, le sort de la famille formera en général un tout il serait difficile d'admettre le cas d'extrême gravité, par exemple, uniquement pour les ou l'un des parents ou pour les enfants. Ainsi, le problème des enfants est un aspect, certes important, de la situation de la famille, mais ce n'est pas le seul critère. Il y a donc lieu de porter une appréciation d'ensemble, tenant compte de tous les membres de la famille (durée du séjour, intégration professionnelle pour les parents et scolaire pour les enfants, notamment) (ATF 123 II 125 consid. 4a). Quand un enfant a passé les premières années de sa vie en Suisse ou lorsqu'il y a juste commencé sa scolarité, il reste encore dans une large mesure rattaché à son pays d'origine par le biais de ses parents. Son intégration au milieu socioculturel suisse n'est alors pas si profonde et irréversible qu'un retour au pays d'origine constitue un déracinement complet. Un retour au pays d'origine peut en revanche représenter une rigueur excessive pour des adolescents ayant suivi l'école durant plusieurs années et achevé leur scolarité avec de bons résultats. L'adolescence est en effet une période essentielle du développement personnel, scolaire et professionnel, entraînant une intégration accrue dans un milieu déterminé Comme pour les adultes, il y a lieu de tenir compte des effets qu'entraînerait pour eux un retour forcé dans leur pays d'origine; mais, à leur égard, il faut prendre en considération qu'un tel renvoi pourrait selon les circonstances équivaloir à un véritable déracinement, constitutif à son tour d'un cas personnel d'extrême gravité. Pour déterminer si tel serait ou non le cas, il faut examiner notamment l'âge de l'enfant lors de son arrivée en Suisse et au moment où se pose la question du retour, la durée et le degré de réussite de sa scolarisation, l'avancement de sa formation professionnelle, la possibilité de poursuivre, dans le pays d'origine, la scolarisation ou la formation professionnelle commencée en Suisse, ainsi que les perspectives d'exploitation, le moment venu, de ces acquis (ATF 123 II 125 consid. 4a ; Arrêt du Tribunal fédéral 2A.679/2006 du 9 février 2007 consid. 3 ; Arrêt du Tribunal administratif fédéral C-298/2006 du 31 janvier 2008 consid. 8.1 ; A. WURZBURGER, op. cit., p. 297/298).

10. A l'appui de leur recours, les époux C______ ont mis en exergue la durée de leur séjour et leur intégration socioprofessionnelle en Suisse.

a. Le simple fait pour un étranger de séjourner en Suisse pendant de longues années, y compris à titre légal, ne permet toutefois pas d'admettre un cas personnel d'extrême gravité, sans que n'existent d'autres circonstances tout à fait exceptionnelles à même de justifier l'existence d'un cas de rigueur (ATF 130 II 39 consid. 3 précité ; ATAF 2007/16 consid. 7 ; Arrêt du Tribunal administratif fédéral C-3811/2007 du 6 janvier 2010, s'agissant d'un séjour en Suisse de près de 13 ans et demi). La durée d'un séjour illégal ne revêt pas, en tant que telle, un poids déterminant dans la pesée des intérêts en présence (Arrêt du Tribunal fédéral 2C_270/2013, consid. 3.3). Dans ces conditions, les recourants ne sauraient tirer parti de la seule durée de leur présence en Suisse pour y bénéficier d'une autorisation de séjour en application de l'art. 30 al. 1 let. b LEtr. Encore faut-il que le refus d'admettre l'existence d'un cas de rigueur comporte pour les recourants de graves conséquences. Autrement dit, il est nécessaire, comme relevé plus haut, que leurs conditions de vie et d'existence, comparées à celles applicables à la moyenne des étrangers, soient mises en cause de manière accrue (ATAF 2009/40 précité, consid. 6.2). Il convient dès lors d'examiner si l'existence d'un cas de rigueur grave peut être admise à la lumière des autres critères d'évaluation pertinents en la matière, en particulier au regard de l'intégration de l'étranger concerné au plan professionnel et social, du respect par ce dernier de l'ordre juridique suisse, de sa situation familiale, de sa situation financière, de sa volonté de prendre part à la vie économique et d'acquérir une formation, de son état de santé et de ses possibilités de réintégration dans son Etat de provenance (art. 31 al. 1 OASA), l'autorité devant procéder à une pondération de tous ces éléments (Arrêt du Tribunal administratif fédéral C-5302/2010 du 10 décembre 2010, consid. 7).

b. S'agissant de l'intégration socioprofessionnelle des époux C______, force est de constater que, comparée à celle de la moyenne des étrangers présents en Suisse depuis de nombreuses années, celle-ci ne revêt aucun caractère exceptionnel. En outre, les recourants n'ont pas acquis des connaissances ou des qualifications spécifiques que seule la poursuite de leur séjour en Suisse pourrait leur permettre de mettre en oeuvre. Au contraire, ils se sont consacrés dans notre pays à leurs activités pastorales auprès de la communauté chrétienne hispanophone. A noter également que le comportement des époux C______ n'a pas été irréprochable. Ces derniers ont en effet séjourné pendant plusieurs années en Suisse sans autorisation et cette situation illégale se serait vraisemblablement prolongée sans le contrôle inopiné des gardes-frontière du 27 avril 2010 (Arrêt du Tribunal administratif fédéral C-2646/2010 du 27 juillet 2011 consid. 7.2). Monsieur R______ C______ a, en outre, fait l'objet d'un rapport d'infraction à la LCR le 27 avril 2010, dont il n'a pas contesté le contenu. Peu importe dès lors que cette infraction n'ait apparemment donné lieu à aucune condamnation à son encontre à ce jour.

c. Sur un autre plan, il ne ressort pas du dossier que, durant leur séjour en Suisse, les intéressés se seraient spécialement investis dans la vie associative et culturelle de leur canton ou de leur commune de résidence, en participant activement à des sociétés locales par exemple. Ils ne jouissent donc pas d'une intégration particulièrement marquée au niveau social et culturel. Leur investissement auprès de la communauté chrétienne hispanophone et, corollairement, leur contribution au « climat oecuménique » de Genève ne sont pas déterminants à cet égard.

d. Le séjour de M. R______ C______ et Mme Y______ C______ en Suisse ne les a pas rendus totalement étrangers à leur patrie. En effet, ils ont passé la majeure partie de leur existence en Bolivie, en particulier leurs années d'adolescence, décisives pour la formation de la personnalité et, partant, pour l'intégration sociale et culturelle (ATF 123 II 125 consid. 5b/aa). Les années passées en Suisse paraissent comparativement brèves à cet égard. On ne saurait ainsi considérer que leur pays d'origine leur soit devenu à ce point étranger qu'ils ne seraient plus en mesure, après une période de réadaptation, d'y retrouver leurs repères, ce d'autant que les membres de leurs familles y vivent. Leur réintégration professionnelle dans leur patrie, où ils ont régulièrement travaillé jusqu'à leur départ, devrait encore être favorisée par leur connaissance du français et par leur expérience professionnelle acquises en Suisse. Les recourants se trouveront sans doute en Bolivie dans une situation matérielle sensiblement moins favorable que celle dont ils bénéficient en Suisse. Il n'y a pas lieu cependant de considérer que cette situation serait sans commune mesure avec celle que connaissent leurs compatriotes. En effet, de jurisprudence constante (ATF 123 II 125 consid. 5b/dd), une autorisation de séjour fondée sur une situation d'extrême gravité n'a pas pour but de soustraire des étrangers aux conditions de vie de leur pays d'origine, mais implique que ceux-ci se trouvent personnellement dans une situation si rigoureuse qu'on ne saurait exiger d'eux qu'ils tentent de se réadapter à leur existence passée. On ne saurait tenir compte des circonstances générales (économiques, sociales, sanitaires) affectant l'ensemble de la population restée sur place, auxquelles la personne concernée sera également exposée à son retour, sauf si celle-ci allègue d'importantes difficultés concrètes propres à son cas particulier, ce qui n'est pas le cas en l'espèce, comme exposé plus haut.

e. Agé de 15 ans, L______ C______ est entré dans l'adolescence. Il n'est pas contesté qu'il parle bien le français, qu'il s'est bien adapté au milieu scolaire et social genevois, si bien qu'un retour dans son pays d'origine entraînerait assurément certaines difficultés. Il n'a toutefois pas encore atteint un degré scolaire particulièrement élevé en Suisse. Quant au bagage scolaire qu'il a acquis sur le territoire helvétique, il s'agit avant tout de connaissances d'ordre général qui pourraient également être mises à profit ailleurs qu'en Suisse. En particulier, ces connaissances devraient lui faciliter l'apprentissage de la lecture et de l'écriture en espagnol, - ce d'autant qu'il est en mesure de communiquer dans cette langue avec sa famille - ce qui permet d'écarter un prétendu risque d'analphabétisme en cas de retour en Bolivie, susceptible de compromettre, le cas échéant, la poursuite de sa scolarisation, respectivement ses possibilités d'acquérir une formation professionnelle dans son pays d'origine. Sa situation ne saurait donc être assimilée à celle d'un adolescent ayant achevé sa scolarité obligatoire avec succès et entrepris une formation professionnelle nécessitant l'acquisition de qualifications et de connaissances spécifiques. Le processus d'intégration entamé par L______ C______ , s'il est certes avancé, n'est pas encore à ce point profond et irréversible qu'un retour dans son pays d'origine ne puisse plus être envisagé (Arrêt 2A.718/2006 du 21 mars 2007, consid. 4.2, dans lequel le Tribunal fédéral a jugé admissible le renvoi en Equateur d'un enfant de 14 ans, arrivé en Suisse à l'âge de 5 ans ; Arrêt du Tribunal administratif fédéral C-2636/2010 du 27 juillet 2011, consid. 7.3 concernant un enfant âgé de 13 ans, né en Suisse, où il avait effectué toute sa scolarité ; Arrêt du Tribunal administratif fédéral C-222/2006 du 22 février 2008, consid. 7.4, concernant une adolescente de quinze arrivée en Suisse à l'âge de presque neuf ans). Si le risque de devoir quitter un pays dans lequel les recourants aspiraient à de meilleures conditions d'existence peut représenter pour L______ C______ un poids psychologique, cette situation n'est pas pertinente à fonder l'octroi d'une dérogation aux conditions d'admission au sens de l'art. 30 LEtr. (Arrêt du Tribunal administratif fédéral C-298/2006 du 31 janvier 2008, consid. 8.2).

f. Quant à A______ C______, âgée de trois ans, elle est née en Suisse. Même si elle ne connaît pas la Bolivie, elle n'a pas encore commencé sa scolarité obligatoire et en raison de son jeune âge, elle demeure fortement liée à ses parents qui l'imprègnent de leur mode de vie et de leur culture. Son intégration au milieu socioculturel suisse n'est par conséquent pas si profonde qu'elle ne pourrait s'adapter à la patrie de ses parents (ATAF 2007/16 consid. 5.3).

11. Les recourants n'ont ainsi pas atteint en Suisse un degré d'intégration particulièrement poussé au sens de l'art. 30 al. 1 let. b LEtr et c'est à bon droit que le TAPI, respectivement l'OCP, ont refusé de préaviser l'octroi d'une autorisation de séjour en leur faveur.

12. Aux termes de l'art. 64 al. 1 let. c LEtr, tout étranger dont l'autorisation est refusée, révoquée ou qui n'est pas prolongée après un séjour autorisé est renvoyé. La décision de renvoi est assortie d'un délai de départ raisonnable (art. 64d al. 1 LEtr).

13. Le renvoi d'un étranger ne peut toutefois être ordonné que si l'exécution de celui-ci est possible, licite ou peut être raisonnablement exigée. A défaut, l'ODM doit admettre provisoirement l'étranger en Suisse (art. 83 al. 1 LEtr). La portée de cette disposition étant similaire à celle de l'ancien art. 14a de la loi fédérale sur le séjour et l'établissement des étrangers du 26 mars 1931 (aLSEE - RS 142.20), la jurisprudence rendue et la doctrine en rapport avec cette disposition légale restent donc applicables (ATA/244/2012 du 24 avril 2012 ; ATA/750/2011 précité ; ATA/848/2010 du 30 novembre 2010).

14. Le renvoi n'est pas possible lorsque l'étranger ne peut quitter la Suisse pour son Etat d'origine, son Etat de provenance ou un Etat tiers, ni être renvoyé dans un de ces Etats (art. 83 al. 2 LEtr). Il n'est pas licite lorsqu'il serait contraire aux engagements internationaux de la Suisse (art. 83 al. 3 LEtr). Il n'est pas raisonnablement exigible s'il met concrètement en danger l'étranger, par exemple en cas de guerre, de guerre civile, de violence généralisée ou de nécessité médicale (art. 83 al. 4 LEtr).

15. En l'espèce, les requérants ne bénéficient d'aucune autorisation de séjour. Partant, c'est à juste titre que l'OCP a ordonné leur renvoi en application de l'art. 64 al. 1 let. c LEtr.

16. Les recourants font implicitement valoir que l'exécution du renvoi de leur fils serait illicite selon l'art. 83 al. 3 LEtr. En tant qu'elle priverait L______ des connaissances fondamentales dispensées par l'enseignement de base, ou l'empêcherait d'user plus avant de ces outils en vue de l'acquisition d'une formation, cette mesure serait en particulier contraire aux art. 28 (droit de l'enfant à un niveau de vie suffisant pour permettre son développement physique, mental, spirituel, moral et social) et 29 CDE (droit à la formation), respectivement art. 19 Cst. (droit à un enseignement de base), motif pris que « l'ingérence à son droit fondamental à l'éducation de base était ainsi disproportionnée par rapport au but visés par la législation dans le domaine de la migration ».

17. Devant le TAPI, les recourants n'ont pas allégué que l'exécution du renvoi de contreviendrait à l'art. 83 LEtr. Ce grief reste néanmoins recevable devant la chambre de céans, dans la mesure où le renvoi des intéressés n'est pas encore entré en force. En effet, ce n'est qu'une fois la décision de renvoi rendue que l'autorité doit, en principe, se poser la question de son exécution, respectivement de l'admission provisoire de l'étranger lorsque la décision de renvoi du territoire helvétique ne peut être exécutée (M. NGUYEN, Les renvois et leur exécution en droit suisse, in C.AMARELLE/M.NGUYEN, Les renvois et leur exécution, 2011, p. 153).

18. Il est douteux que les art. 28 et 29 CDE puissent relever de l'art. 83 al. 3 LEtr. En effet, l'obstacle à l'illicéité du renvoi au sens de cette disposition vise avant tout à empêcher le renvoi d'un étranger dans un pays où sa vie, son intégrité corporelle ou sa liberté serait menacée, selon les art. 3 al. 1 de la loi fédérale du 26 juin 1998 sur l'asile, par analogie (LAsi - RS 142.31), 3 CEDH ou encore 3 de la Convention de l'ONU du 10 décembre 1984 contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (CAT - RS 0.105) (Arrêt du Tribunal administratif fédéral E-668_2012 du 22 août 2013, consid. 5.1 : M. NGUYEN, op. cit. p. 154), même si, à la suite des arrêts Gezginci c. Suisse, du 9 décembre 2010, et E______ c. Suisse du 22 mai 2008, l'illicéité du renvoi peut résulter également de la violation d'une obligation de droit international public découlant de l'art. 8 CEDH, particulièrement dans sa dimension vie privée (M. NGUYEN, op. cit. p. 155).

19. L'art. 3 al. 1 CDE, selon lequel l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale dans toutes les décisions concernant les enfants, ne saurait fonder une prétention directe à l'obtention ni d'une autorisation de séjour (ATF 136 I 285 consid. 5.2), ni d'une admission provisoire (Arrêt du Tribunal fédéral administratif E-1511/2013 du 27 juillet 2013, consid. 4.4). Cette disposition doit néanmoins être prise en considération dans la pesée des intérêts découlant de l'art. 83 al. 4 LEtr (ATAF 2009/51 consid. 5.6 ; JICRA 2006 n° 13 consid. 3.5). D'éventuelles difficultés de réintégration dans le pays d'origine dues à une intégration avancée en Suisse peuvent ainsi constituer un facteur parmi d'autres à prendre en considération dans le cadre de la balance des intérêts lors de l'examen de l'exigibilité du renvoi (JICRA 2006 n° 13 consid. 3.5). De telles difficultés ont été notamment reconnues pour des enfants scolarisés et des adolescents ayant passé la plupart de leur vie en Suisse. Il n'en demeure pas moins que le bien de l'enfant revêt une importance décisive dans l'appréciation du caractère raisonnablement exigible de l'exécution d'un renvoi. Sont ainsi déterminants dans l'appréciation globale de la situation des enfants les critères suivants : l'âge, la maturité, les liens de dépendance, les relations, les qualités des personnes de référence, en particulier l'engagement et la capacité de ces personnes à les soutenir, l'état et les perspectives de leur développement et de leur formation, le degré de réussite de leur intégration après un séjour plus ou moins long en Suisse. Ce dernier critère, à savoir la durée du séjour en Suisse, est un facteur important à prendre en compte lors de l'examen des indices favorables comme des obstacles à la réintégration de l'enfant dans le pays de renvoi, car les enfants ne doivent pas être déracinés sans motif valable de leur environnement familier. A cet égard, il ne faut pas seulement prendre en considération la proche famille de l'enfant, mais aussi ses autres relations sociales. Une forte assimilation en Suisse peut avoir comme conséquence un déracinement dans le pays d'origine de nature, selon les circonstances, à rendre inexigible le renvoi (Arrêt du Tribunal administratif fédéral E-6668/2012 du 22 août 2013, consid. 6.4 ; JICRA 2005 n° 6 consid. 6.2).

20. En l'occurrence, la pesée des intérêts effectuée dans le cadre des art. 30 al. 1 let. LEtr et 31 al. 1 OASA, en particulier let. g, s'applique mutatis mutandis dans le cadre de l'art 83 al 4 LEtr, si bien que le renvoi de L______ C______ doit être considéré comme raisonnablement exigible selon cette disposition.

21. L______ C______ se prévaut de l'art. 8 al. 1 CEDH (droit au respect de la vie privée), singulièrement de l'arrêt E______ c/ la Suisse du 22 mai 2008.

Selon la jurisprudence, pour qu'on puisse déduire un droit à une autorisation de séjour de l'art. 8 CEDH, des conditions strictes doivent être remplies. Il faut ainsi qu'il existe des liens spécialement intenses dépassant notablement ceux qui résultent d'une intégration ordinaire et ce, dans le domaine professionnel ou social. Le Tribunal fédéral n'adopte pas une approche schématique qui consisterait à présumer, à partir d'une certaine durée de séjour en Suisse, que l'intéressé y est enraciné et dispose de ce fait d'un droit de présence dans notre pays. Selon la jurisprudence, il y a lieu de procéder à une pesée des intérêts en présence, en considérant la durée du séjour en Suisse comme un élément parmi d'autres (ATF 130 II 281 consid. 3.2.1 ; Arrêts du Tribunal fédéral 2C_163/2013 du 1er mai 2013 consid. 3.1 ; 2C_266/2009 du 2 février 2010 consid. 3.1).

La situation du recourant n'est pas comparable à celle d' E______, parce qu'il n'a pas passé la totalité de son adolescence et ses premières années de vie d'adulte en Suisse et qu'il ne connaît pas non plus problèmes de santé susceptibles de rendre plus difficile son retour dans son pays d'origine.

22. Les recourants ne démontrent pas l'existence d'autres obstacles à leur retour et le dossier ne fait pas non plus apparaître que l'exécution de leur renvoi serait inexigible ou impossible au sens de l'art. 83 al. 2 et 4 LEtr.

23. Au vu de ce qui précède, tant l'OCP que le TAPI ont fait une correcte application des art. 30 al. 1 LEtr et 31 al. 1 OASA, en ne reconnaissant pas l'existence d'un cas d'extrême gravité en l'espèce et en prononçant le renvoi des prénommés, conformément aux art. 64 al. 1 let. c et 83 LEtr.

24. Mal fondé, le recours sera rejeté. Un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge des recourants, qui succombent (art. 87 al. 1 LPA). Vu l'issue du litige, aucune indemnité de procédure ne leur sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 22 novembre 2012 par Madame Y______ C______ et Monsieur R______ C______, agissant pour eux-mêmes et en qualité de représentants de leurs enfants mineurs L______ C______ et A______ C______, contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 16 octobre 2012 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge des recourants un émolument de CHF 400.- ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que, les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Yves Rausis, avocat des recourants, au Tribunal administratif de première instance, à l'office cantonal de la population, ainsi qu'à l'office fédéral des migrations.

Siégeants : M. Thélin, président, M. Verniory, juge et M. Berardi, juge suppléant.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

le président siégeant :

 

 

Ph. Thélin

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

...

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

...

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l'entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l'admission provisoire,

4. l'expulsion fondée sur l'art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d'admission,

6. la prolongation d'une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d'emploi du titulaire d'une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d'asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l'objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

...

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l'autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l'acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

...

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l'expédition complète.

______________________________________________

Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l'objet d'aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l'autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l'annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l'expédition complète.

___________________________________________

 

Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.