Aller au contenu principal

Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

1 resultats
A/236/2014

ATA/51/2015 du 13.01.2015 ( MARPU ) , ADMIS

Descripteurs : MARCHÉS PUBLICS ; PROCÉDURE D'ADJUDICATION ; SOUMISSIONNAIRE ; ÉGALITÉ DE TRAITEMENT ; PRINCIPE DE LA TRANSPARENCE(EN GÉNÉRAL) ; ADJUDICATION(MARCHÉS PUBLICS)
Normes : RMP.33.let3 ; RMP.24 ; RMP.47 ; LPA.69.al3
Parties : DESPRAZ SA / MINO SA, OFFICE DES BATIMENTS
Résumé : Appel d'offre portant sur les travaux de construction d'une installation de distribution d'eau surchauffée et de vapeur. Les exigences de certification formulées dans l'appel d'offres constituent des critères d'aptitude au sens de la législation sur les marchés publics. Fondés sur des critères objectifs, en rapport avec les certifications en usage au plan national et européen vérifiables et pertinents du fait de leurs liens avec des impératifs de sécurité, ces critères ne sont pas discriminatoires. L'autorité adjudicatrice ne pouvait plus en cours de procédure, décider de les évaluer selon les critères quantitatifs en les considérant comme appartenant aux critères d'appréciation des soumissions, sauf à violer les principes de transparence et d'égalité de traitement que le droit des marchés publics doit respecter. La décision du pouvoir adjudicateur d'adjuger les travaux à une entreprise ne disposant pas de la certification requise est ainsi contraire au droit. Elle est annulée et le recours est admis. Dans la mesure où l'entreprise recourante était la seule à remplir complètement les critères d'aptitude requis et qu'elle a été classée au deuxième rang suite à l'évaluation complète de son offre, la chambre administrative lui a adjugé le marché.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/236/2014-MARPU ATA/51/2015

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 13 janvier 2015

 

dans la cause

 

DESPRAZ SA
représentée par Me Alain Maunoir, avocat

contre

OFFICE DES BÂTIMENTS

et

MINO SA, appelée en cause
représentée par Me Michel Bussard, avocat

 



EN FAIT

1) Le 4 juin 2013, l’office des bâtiments (ci-après : OBA ou l’autorité adjudicatrice), rattaché à cette date au département de l’urbanisme mais, depuis le 10 décembre 2013, au département des finances, a lancé une procédure d’appel d’offress en procédure ouverte pour un marché public portant sur des travaux de construction d’une installation de distribution d’eau surchauffée et de vapeur dans le bâtiment du centre médical universitaire (ci-après : CMU) 6, avenue de Champel à Genève, projet de marché intitulé « centre médical universitaire-CMU étape 6 lot 243.10 - eau surchauffée et vapeur » (ci-après le marché CMU-6).

2) L’appel d’offres a été publié dans la Feuille d’avis officiel de la République et canton de Genève du 4 juin 2013. Il était soumis à l’accord GATT/OMC du 15 avril 1994 sur les marchés publics (AMP - RS 0.632.231.422) ainsi qu’aux traités internationaux, à l’accord intercantonal sur les marchés publics du 25 novembre 1994 (AIMP - L 6 05) et au règlement sur la passation des marchés publics du 17 décembre 2007 (RMP - L 6 05.01).

La direction des constructions, rattachée à l’OBA, était le service organisateur. Le bureau d’architectes de Planta & Portier architectes était mandataire (ci-après l’architecte mandataire spécialisé) en compagnie de la société K. Wintsch SA (ci-après : l’ingénieur mandataire spécialisé).

3) Le document K2 constituait le dossier d’appel d’offres. Il pouvait être téléchargé sur le site internet suisse des marchés publics www.simap.ch. Le cahier des charges de soumission était composé de dix-neuf documents à retourner à l’OBA dûment complétés d’ici au 15 juillet 2013. Il s’agissait :

-          du dossier d’appel d’offres K2 avec la page de garde datée et signée ;

-          des annexes liées aux éléments d’appréciation de l’offre, soit les annexes P2, P4, P6, Q4, Q8, R1, R6, R8, R9, R14 et R15, tirées du guide romand des marchés publics (ci-après : le guide romand) dûment remplies voir signées, accompagnées selon les documents des pièces ou attestations demandées ;

-          des conditions générales du contrat d’entreprise FMB-FAI-CTI 2006 ;

-          d’un engagement relatif au choix des matériaux de construction respectant l’environnement ;

-          du cahier de soumission « lot n° 243. 10 - Eau surchauffée et vapeur » ;

-          des conditions particulières de l’architecte ;

-          des conditions particulières « protection de l’environnement » ;

-          du cahier des charges « hygiène et sécurité » ;

-          des documents de certification ISO 3834-2:2005.

4) a. L’annexe P2 contenait une liste de documents à produire par le soumissionnaire, pour attester qu’il était à jour dans le paiement de ses obligations en matière de cotisations sociales, de paiement des impôts à la source et qu’il respectait les usages locaux en matière de droit du travail. L’annexe P2 énumérait les attestations à produire. Celles-ci devaient avoir été émises au maximum trois mois avant le dépôt de l’offre.

b. À teneur du chapitre du document K2 intitulé « aptitude / compétence requise - type de soumissionnaire », le soumissionnaire devait posséder la ou les compétences suivantes :

-          « exercer une activité en rapport avec celle dont relevait la soumission (posséder de l’expérience dans la réalisation d’installations d’eau surchauffée et vapeur) ;

-          être en possession des certificats nécessaires (en cours de validité) pour ce type de travaux ;

-          ( ) ».

Dans ce cadre, il pouvait proposer plusieurs entreprises (consortium) ou bureaux associés pour remplir les compétences requises, en vérifiant que celles-ci remplissent les conditions imposées en cas de sous-traitance dans le document K2.

c. Dans l’annexe R6, le soumissionnaire devait indiquer, en complétant un tableau intitulé « personnes clés », les moyens humains et, éventuellement matériels, mis en place pour exécuter le marché conformément aux exigences, objectifs et échéances principales. Il devait également fournir un planning d’intention dans lequel il ferait apparaître les phases importantes d’exécution du marché avec le nombre de personnes prévues par phases.

d. L’annexe R8 avaient pour objet la répartition des tâches et des responsabilités. Les soumissionnaires devaient fournir, sur un document annexé, l’organigramme opérationnel prévu pour l’exécution du marché. L’organigramme devait faire apparaître les noms des principaux intervenants (personnes clés), la répartition des tâches et des responsabilités ainsi que les liens hiérarchiques.

En retournant l’annexe R9, le soumissionnaire devait transmettre des informations relatives à la qualification des « personnes clés » mentionnées dans l’annexe R8. Dite annexe R9 était constituée d’un formulaire à compléter pour chacune des personnes clés mentionnées donnant des informations sur leur qualification, leur formation et leur expérience professionnelles.

À teneur du document K2, chaque formulaire R9 devait être accompagné des certificats nécessaires pour les soudeurs. La phrase formulant cette exigence figurait en rouge dans le dossier d’appel d’offres remis à chaque soumissionnaire. De même elle était soulignée.

e. Le « cahier de soumission lot n° 243.10 - Eau surchauffée et vapeur » qui devait être retourné avec l’offre complétée précisait au chapitre relatif aux « conditions spéciales de l’ingénieur » les normes, lois et règlements qui devaient être respectés dans l’exécution des travaux. L’exécution des travaux devait se faire dans le respect d’un certain nombre de normes SIA qu’il énonçait, des prescriptions de l’association des établissements d’assurance incendie, du droit fédéral, ainsi que de toutes les prescriptions de l’association suisse d’inspection technique (ci-après : ASIT), des ordonnances fédérales régissant les installations sous pression, avec référence au « RS 819.121 » en concordance avec « la Directive Européenne des Équipements sous Pression 97/23 CE ».

En outre, le soumissionnaire devait s’engager à respecter la « directive pour la réalisation des travaux CFH 243-343 eau surchauffée » établie par les Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : HUG). Une copie de celle-ci était intégrée au cahier de soumission précité avec la précision qu’elle avait été adaptée aux spécificités de la soumission relative aux travaux à effectuer au sixième étage du bâtiment du CMU.

Selon cette directive :

-          les travaux sur les conduites et soudures devaient être réalisés suivant certains codes de calcul techniques spécifiques suivant les prescriptions de l’ASIT ou les normes européennes en la matière. Sur la tuyauterie d’eau surchauffée, les soudures devaient être exécutées par des « soudeurs certifiés à l’année par la société suisse de soudure à Bâle ou une société équivalente, ceci pour les procédés employés ».

-          Les contrôles de qualification des soudeurs se feraient sur la base de la prescription ASIT 506.

-          La procédure de soudage devait être homologuée par le maître de l’ouvrage. À l’issue des travaux, 10 % des soudures (ou 100 % de celles-ci s’agissant des conduites de distribution passant dans les souterrains où du personnel et des patients circulaient) seraient radiographiées aux frais de l’adjudicataire. Au cas où deux soudures radiographiées par sondage se révélaient défectueuses, toutes les autres soudures seraient radiographiées et toutes les soudures refusées seraient refaites et à nouveau radiographiées à la charge de l’entreprise.

5) Les situations dans lesquelles le soumissionnaire pouvait être exclu du marché étaient mentionnées dans le document K2. Tel était le cas si l’offre n’était pas accompagnée des « attestations, preuve et documents demandés par l’adjudicateur, d’une durée de validité de maximum trois mois ».

6) Les critères d’adjudication étaient les suivants :

-          Prix (pondération : 40 %) ;

-          références et expérience dans la réalisation d’installations d’eau surchauffée et vapeur (ci-après : références ; pondération 30 %)

-          organisation pour l’exécution du marché et qualité technique de l’offre (ci-après : organisation ; pondération : 25 %) ;

-          formation professionnelle (ci-après : formation ; pondération : 5 %).

Les critères d’adjudication pouvaient être divisés en éléments d’appréciation. L’adjudicateur se réservait le droit de fixer autant d’éléments d’appréciation qu’il était nécessaire pour départager les soumissionnaires en respectant l’égalité de traitement et le principe de la transparence. Ces éléments d’appréciation devaient être en relation directe avec un des critères principaux.

7) Pour l’évaluation des offres au regard des critères d’adjudication (hormis pour la question du prix qui était évalué de manière spécifique), le barème des notes était de 0 à 5, soit celui préconisé et décrit dans l’annexe T1 du guide romand des marchés publics, soit :

 

0

 

candidat qui n’a pas fourni l’information ou le document non éliminatoire demandé par rapport à un critère fixé

1

Insuffisant

candidat qui a fourni l’information ou le document demandé par rapport à un critère fixé, mais dont le contenu ne répond pas aux attentes

2

Partiellement suffisant

candidat qui a fourni l’information ou le document demandé par rapport à un critère fixé, mais dont le contenu ne répond que partiellement aux attentes

3

Suffisant

candidat qui a fourni l’information ou le document demandé par rapport à un critère fixé et dont le contenu répond aux attentes minimales, mais qui ne présente aucun avantage particulier par rapport aux autres candidats

4

Bon et avantageux

candidat qui a fourni l’information ou le document demandé par rapport à un critère fixé, dont le contenu répond aux attentes et qui présente un minimum d’avantages particuliers par rapport aux autres candidats, ceci sans tomber dans la surqualité ou la surqualification

5

Très intéressant

candidat qui a fourni l’information ou le document demandé par rapport à un critère fixé, dont le contenu répond aux attentes avec beaucoup d’avantages particuliers par rapport aux autres candidats, ceci sans tomber dans la surqualité ou la surqualification

8) Despraz S.A. (ci-après : Despraz) est une société anonyme ayant son siège à Granges près Marnand dans le canton de Vaud.

Elle a déposé le 12 juillet 2013, une offre auprès de l’OBA, arrêtée à CHF 978’980.- TTC.

Selon son courrier de présentation du 12 juillet 2013, elle était active dans le domaine des techniques de l’industrie du bâtiment. Elle était capable d’entreprendre tous travaux d’études et d’installations techniques thermiques, spécialement dans le domaine de la vapeur et de l’eau surchauffée. Elle avait un atelier spécifiquement consacré au travail de l’acier inox. Elle réalisait tous les genres de tuyauterie, soit écoulement, vide, pression, gaz techniques et médicaux et elle était équipée de la machinerie qui lui permettait de réaliser ces travaux.

Elle était certifiée ISO 9001:2000 et ISO 3834-2:2005 et disposait de l’agrément de constructeur de l’ASIT.

Avec son offre, elle a renvoyé trois exemplaires du formulaire R9 décrivant le profil de son directeur et de deux collaborateurs. L’un d’entre eux était titulaire de deux certificats de soudeur, dont un délivré par l’Association suisse pour la technique du soudage (ci-après : ASS). Elle a également transmis un certificat similaire délivré à deux autres de ses employés destinés à intervenir sur le chantier, ainsi qu’indiqué dans l’annexe R6.

9) L’offre de l’intéressée a fait l’objet d’une évaluation ainsi que celle de trois autres entreprises, soit Mino SA (ci-après : Mino), société avec siège à Genève, CGC Energie SA et Caliqua AG.

10) L’offre de Mino, parvenue à l’OBA le 11 juillet 2013, était d’un montant de CHF 761’400.- TTC.

À teneur de l’annexe R6, Mino prévoyait l’intervention de cinq collaborateurs sur le chantier dont elle donnait le nom. Aucun d’entre eux n’avait la fonction de soudeur.

Elle a annexé un formulaire R9 à son offre, qui désignait l’un d’entre eux, soit un chargé d’affaire, comme personne clé. Aucun certificat de soudeur n’était transmis avec cette annexe.

La documentation transmise avec l’offre ne comportait aucune référence à une certification ISO notamment à la certification ISO 3834-2:2005 et ne fournissait aucune explication à ce sujet.

Elle n’a mentionné l’intervention d’aucun partenaire ou sous-traitant.

11) Les offres ont été ouvertes le 18 juillet 2013, selon le procès-verbal établi ce jour-là.

12) Le 12 septembre 2013, l’ingénieur mandataire spécialisé a écrit à Mino. Il désirait savoir si cette société détenait les documents de certification ISO 3834-2:2005 qui étaient demandés dans le dossier d’appel d’offres K2 et rappelés dans les conditions spéciales de l’ingénieur. Si tel était le cas, elle devait en envoyer une copie. Il en allait de même des certificats pour les soudeurs demandés dans le dossier d’appel d’offres et dans les conditions spéciales de l’ingénieur. Elle avait un délai au 13 septembre 2013 pour ce faire.

13) Mino a répondu par courriel du 13 septembre 2013 à l’ingénieur mandataire spécialisé. Elle était à cette date « en procédure de certification ISO 3834-2:2005 » et elle enverrait son certificat « prochainement » au mandataire spécialisé. Elle transmettait un « certificat de qualification d’un de ses monteurs », les autres étant en cours de qualification.

Elle a annexé à son courrier un certificat de qualification de soudeur émis par SGS Attest SA en faveur de l’un de ses soudeurs, Monsieur Jean-Louis LACOUR, délivré le 28 avril 2011 et valable jusqu’au 27 avril 2013.

14) Le rapport d’adjudication du marché CMU-6 a été établi le 4 décembre 2014. Bien qu’il mentionne à titre d’auteurs le nom de l’architecte et de l’ingénieur mandataire spécialisés, il n’était signé que du premier.

Le rapport revenait sur l’évaluation du critère relatif à la capacité et la disponibilité du personnel des entreprises soumissionnaires. Alors qu’il était spécifié dans le dossier d’appel d’offres et dans les conditions spéciales de l’ingénieur qui accompagnaient la soumission que chacune d’elle devait être certifiée « selon la norme EN ISO 3834-2:2005 : exigences de qualité pour le soudage par fusion de matériaux métalliques », Despraz avait fourni le certificat demandé, Mino, à l’instar des deux autres soumissionnaires dont l’offre avait été évaluée, avait indiqué être en cours de procédure de certification.

En rapport avec l’exigence faite aux soumissionnaires de produire des certificats de soudeurs, rappelée dans le dossier d’appel d’offres et dans les conditions spéciales de l’ingénieur, Despraz avait fourni quinze certificats valables et indiqué que onze soudeurs possédaient la qualification requise, Mino avait fourni un seul certificat « selon le mail du 13.09.2013 » et indiqué que d’autres monteurs étaient en cours de certification, CGC Energie SA avait fourni deux certificats dont un était à renouveler et indiqué que trois soudeurs possédaient la qualification, Caliqua AG avait fourni une liste détaillée de soudeurs sans préciser « selon norme EN 287 » et indiqué 25 soudeurs possédant la qualification.

15) a. Annexé au rapport, figuraient le tableau justificatif des notes attribuées. L’offre de Mino avait obtenu 349,99 points. Celle de Despraz, avec 316,04 points, était arrivée en 2ème position :

 

 

Prix

pond. 40 %

Organisation

pond. 25 %

Références

pond. 30 %

Formation

pond. 5 %

Total

points

 

note

pts

note

pts

note

pts

note

pts

 

Mino

761’400.-

5

200

1,56

38,89

2,67

80,1

5

25,00

343,99

CGC S.A.

864’000.-

3,42

136,88

2,44

61,11

2,50

75,0

5

25,00

297,99

Despraz

978’980.-

2,35

94,09

3,78

94,44

3,50

105,0

4,50

22,50

316,04

Caliqua S.A.

1’701’300.-

0,45

17,93

2,67

66,67

3,00

90,0

3,25

16,25

190,84

b. L’évaluation du critère « organisation », pondéré à 25 %, était divisé en six sous-critères dont les notes étaient prises en considération en fonction de coefficients différents pour lesquels Mino et Despraz avaient obtenu :

Critère : organisation pour l’exécution du marché et qualité technique de l’offre

pondération 25 %

Sous-critères/coefficient

MINO

DESPRAZ

Planification des moyens (1x)

2.00

3.50

Certification d’entreprise (2x)

2.00

(1.00 x 2)

4.00

Certification des soudeurs (3x)

3.00

(1.00 x 3)

4.00

Répartition des tâches et responsabilités (1x)

3.00

3.50

Qualification des personnes clés (1x)

1.00

4.00

Degré de compréhension du cahier des charges (1x)

3.00

3.00

Total

14.00

34.00

Note moyenne

1.56

3.78

Nombre de points

38.89

94.44

16) Le 10 janvier 2014, Mino a adressé à l’architecte mandataire spécialisé :

-          un certificat de qualification de soudeur délivré le 17 septembre 2013 par SGS Attest SA à Monsieur Sébastien VERDET valable jusqu’au 17 septembre 2015 ;

-          un certificat de qualification de soudeur délivré par un organisme français à M. Sylvain VIROT valable du 25 janvier 2013 au 24 janvier 2015 ;

-          un certificat de qualification de soudeur délivré à Monsieur Robin COLL le 17 décembre 2012 par Swiss TS Technical Services SA et valable jusqu’au 7 décembre 2014.

17) Le 14 janvier 2014, l’OBA a écrit à Mino. Son offre avait été retenue car elle remplissait pleinement les conditions qui lui permettaient d’être adjudicataire selon le RMP et elle avait été jugée économiquement la plus avantageuse. En vue d’établir le contrat et de régler les détails d’adjudication, elledevait fournir à l’architecte un certain nombre de documents parmi lesquels :

-          « pour chacun des soudeurs devant travailler pour cette affaire, la certification EN 287-1 dans le domaine de validité des tubes à souder, mais au minimum 3 soudeurs certifiés » ;

-          les documents permettant d’établir que Mino possédait « les qualifications du mode opératoire de soudage selon ISO 15 614-1 dans le domaine de validité des tubes à souder, à savoir qu’elle devait être certifiée selon un module de la directive 97/23/CEE au minimum A » ;

-          « la certification ISO 3834-2 demandée en soumission, afin d’éviter tout recours d’une autre entreprise soumissionnaire ».

Ces documents devaient être transmis au plus tard le 31 janvier 2014 (NB : date en gras dans le texte) afin de leur permettre de commencer les travaux dès le 1er mars prochain. À défaut, cette « décision sera caduque ».

Mention était faite qu’un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de Justice (ci-après : la chambre administrative) pouvait être interjeté contre ladite décision.

18) Le 14 janvier 2014, l’OBA a informé Despraz que le marché avait été adjugé à Mino pour un montant de CHF 761’400.- TTC, offre jugée économiquement la plus avantageuse.

À ce courrier était annexé le tableau d’analyse multicritères tiré du rapport d’évaluation du 4 décembre 2013.

19) À la demande de Despraz, l’OBA lui a communiqué le 23 janvier 2014 le rapport d’évaluation des offres du 4 décembre 2013 avec ses annexes.

20) Par acte posté le 27 janvier 2014, Despraz a recouru auprès de la chambre administrative contre la décision de l’autorité adjudicatrice du 14 janvier 2014, reçue le 15 janvier 2014. Elle a conclu à son annulation et à ce que le marché litigieux lui soit adjugé. Préalablement, elle a sollicité la restitution de l’effet suspensif. Elle a demandé à pouvoir compléter son recours après la production de son dossier par le pouvoir adjudicateur.

Sur le fond, la décision d’adjudication avait violé son droit d’être entendu par défaut de motivation. En effet, elle n’expliquait d’aucune façon les raisons pour lesquelles elle s’était vu attribuer des notes respectives de 3.78 et 3.50 pour les critères « organisation » et « références » et non la note maximale. En outre, l’appréciation de son offre était arbitraire s’agissant desdits critères. Dans un précédent marché portant sur l’attribution des travaux d’installation pour eau surchauffée et vapeur du 5ème étage du CMU, l’offre qu’elle avait formulée pour des travaux identiques s’était vu attribuer la note de 4.08 pour le critère « organisation ». Les éléments d’appréciation n’ayant pas évolué à la baisse depuis 2011, une notation de ce même critère à 3.78 en 2013 était illogique. La même remarque pouvait être faite pour le critère « références ». Dans le cadre de l’adjudication du marché précédent, elle avait reçu la note 4.5. Il était arbitraire que la note 3.5 lui soit attribuée en 2014. Aucune explication n’était donnée dans le rapport d’adjudication au sujet de la moins bonne note attribuée pour le critère « formation ».

21) Le 29 janvier 2014, le juge délégué a ordonné l’appel en cause de Mino.

22) Dans le cadre de l’instruction sur restitution de l’effet suspensif, l’OBA et l’appelée en cause se sont opposés à une telle mesure vu l’absence de chances de succès du recours et l’intérêt public à ce que le chantier puisse progresser.

23) Dans des répliques des 14 et 27 février 2014, la recourante est revenue sur la nécessité pour une entreprise construisant des installations sous pression de respecter les obligations de certification découlant de la loi. C’était la raison pour laquelle dans les conditions d’attribution du marché figurant dans le dossier d’appel d’offres, les prescriptions techniques relatives aux soudures imposaient que celles-ci soient exécutées par des soudeurs certifiés. De même, l’entreprise soumissionnaire devait être certifiée selon la norme ISO applicable en matière d’exigences de qualité pour le soudage par fusion de matériaux métalliques. Cela était imposé par l’ordonnance fédérale sur la sécurité des équipements sous pression du 20 février 2002 (ordonnance relative aux équipements sous pression - RS 819.121). L’appelée en cause, qui ne détenait pas la certification exigée n’aurait pas dû être admise à soumissionner.

24) De leur côté, l’adjudicataire et l’autorité intimée ont maintenu dans leurs écritures des 20 février et 24 février 2014 à l’appui de leurs conclusions que les certificats demandés concernant la formation des soudeurs et la documentation de certification ISO à présenter par le soumissionnaire ne constituaient pas des exigences devant être remplies sous peine d’exclusion de la procédure. Ces éléments étaient utiles à l’appréciation de la qualité technique de l’offre. Il s’agissait de critères d’adjudication qui devaient être pris en considération dans le processus d’évaluation de l’offre.

Selon l’autorité adjudicatrice, ces éléments avaient été correctement évalués puisque Mino avait reçu la note 1 pour chacun des deux sous-critères relatifs à ces éléments d’appréciation.

De son côté, Mino, a expliqué employer trois soudeurs qualifiés selon les normes de soudure française (EN-287-1) et plusieurs autres soudeurs en cours de certification. Elle avait fourni le 13 septembre 2013 un certificat suisse de l’un de ses soudeurs. Elle alléguait être en cours de certification ISO 3834-2:2005 sans produire aucun document à ce propos. Cette norme ISO ne s’appliquait qu’en relation avec une installation spécifique mais à compter du démarrage de l’installation. Le contrôle se faisait au long et surtout au terme des travaux. Dans la mesure où elle n’avait pas encore cette certification, le contrôle de l’installation conformément à cette norme serait fait par une entreprise tierce accréditée.

25) Dans une dernière réplique du 27 février 2014, la recourante a fait remarquer que le certificat de soudeur produit par l’appelée en cause était périmé depuis le 27 avril 2013 et n’était pas valable pour des travaux sur de l’acier inox.

26) Le 19 mars 2014, la chambre administrative a restitué l’effet suspensif au recours. À première vue, celui-ci n’était pas dénué de toute chance de succès. Au vu des objectifs poursuivis par la législation sur les marchés publics, l’appel d’offres formulait une série d’exigences concernant le niveau de qualification technique que l’entreprise et ses collaborateurs devaient atteindre pour être autorisés à mettre en place une installation d’eau chauffée sous pression pour éviter tout risque d’un accident futur. Or l’OBA avait attribué le marché à une entreprise qui ne disposait pas de la certification ISO requise et qui n’avait pas produit de certificats de soudeur qualifié en cours de validité. On pourrait donc considérer que les exigences en matière de qualification de l’entreprise constituaient un des critères d’aptitude qui devrait conduire à l’exclusion du soumissionnaire concerné. En outre, la pesée des intérêts conduisait à considérer que l’intérêt public au respect strict des normes de sécurité rappelé par les HUG eux-mêmes dans les documents de soumission prédominait sur tout autre intérêt public de l’État à la poursuite du chantier ou privé de l’entreprise adjudicataire à pouvoir mener les travaux.

27) Le 9 avril 2014, l’OBA s’est déterminé sur le fond du recours, concluant à son rejet. Il a persisté dans les explications qu’il avait déjà données au cours de l’instruction sur la restitution de l’effet suspensif. La production des certificats ne constituait pas un critère d’exclusion du marché public. Il avait procédé à l’évaluation des offres conformément aux critères annoncés, selon des calculs qu’elle avait détaillés.

L’absence de certification de l’appelée en cause avait été prise en considération dans le cadre de la notation du critère relatif à l’organisation en compagnie d’autres critères. Cette carence avait été sanctionnée par une note bien inférieure à celle accordée à la recourante. Les certificats de soudeur fournis par l’appelée en cause le 10 janvier 2014 n’avaient pas été pris en considération. En revanche, après la décision d’adjudication du 14 janvier 2014, l’appelée en cause lui avait fait parvenir trois nouveaux certificats de soudeur en cours de validité.

Les travaux qui avaient été adjugés à l’appelée en cause seraient exécutés de manière conformes aux exigences de la norme ISO requise. Le 31 janvier 2014, celle-ci avait adressé à l’architecte mandataire un courriel qu’il versait à la procédure, Dans celui-ci, l’appelée en cause lui avait expliqué que cette conformité serait assurée de concert entre elle-même et le laboratoire Quality Control MDT SA (ci-après : Quality Control) qui possédait les connaissances, les équipements et le personnel qualifié pour répondre en tout point de l’annexe A de l’ISO 3834-1 et aux critères d’aide au choix de l’ISO 3834-2. La certification de conformité pouvait être satisfaite à compter du démarrage des prestations liées à cette installation précise, critère essentiel à la mise en place d’une telle certification. L’État de Genève entendait pour chaque chantier qu’il menait s’assurer que les travaux soient effectués dans le respect des normes de sécurité.

28) Le 9 avril 2014, l’appelée en cause s’est également déterminée sur le fond du recours, concluant à son rejet et à titre préjudiciel à la reconsidération de la décision de restitution de l’effet suspensif.

Les exigences du cahier des charges relatives à la certification ISO 3834-2 : 2005 étaient formulées « au mode futur ».

Sur le plan juridique, les exigences de certification ne constituaient pas des critères d’aptitude mais d’adjudication. Elles ne pouvaient donc conduire à une exclusion du soumissionnaire.

L’exigence de certification ISO 3834-2 : 2005 n’avait pas à s’appliquer à la date de dépôt des offres mais devait être satisfaite en cours de travaux par des contrôle de soudure voire après la réalisation de ceux-ci, lors de la mise en service des installations.

S’il était exact que l’ordonnance relative aux équipements sous pression imposait un contrôle de la conformité de l’installation des équipements sous pression, celui-ci pouvait se faire par divers procédures d’évaluation, mais devait surtout être effectué au moment de la mise en circulation des équipements. Ce n’était pas parce que l’appelée en cause n’avait pas produit de certificats de soudeur en cours de validité lors du dépôt de l’offre qu’elle ne respectait pas les normes de sécurité prévues par la loi. Même si le certificat de soudeur qu’elle avait transmis le 13 septembre 2013 n’était plus valable, elle disposait de plusieurs autres employés qui avaient, depuis lors, obtenu un tel certificat et elle avait spontanément transmis au mandataire de l’OBA les certificats en question le 10 janvier 2014, avant la décision d’adjudication.

Une bonne partie des critiques que la recourante adressait à l’autorité adjudicatrice dans le cadre deson recours concernait des griefs qu’elle aurait dû invoquer dans le cadre d’un recours contre l’appel d’offres.

Le droit d’être entendu de la recourante n’avait aucunement été violé et la décision d’adjudication échappait à tout grief d’arbitraire, ce qu’elle offrait de prouver sur la base d’un examen détaillé de la notation effectuée.

29) Une audience de comparution personnelle des parties s’est déroulée le 28 avril 2014.

a. Selon Monsieur Jean-Daniel DESPRAZ qui représentait la recourante, la norme ISO 3834-2 : 2005 avait pour objectif de certifier la capacité de l’entreprise à réaliser l’ensemble des travaux de soudure, y compris le contrôle, conformément aux prescriptions de l’ordonnance relative aux équipements sous pression. La certification des soudeurs était une certification individuelle conforme à la norme européenne EN 287. L’entreprise adjudicataire ne réunissait pas les compétences pour mener, conformément aux exigences de ladite ordonnance, des travaux d’installation sous pression même si elle avait pu déjà en effectuer. Le certificat de soudeur produit par l’appelée en cause était périmé en septembre 2013. En outre, les certifications ISO ne pouvaient être délivrées en Suisse que par les entités SQS et par Swiss TS.

b. Selon Monsieur Pascal MINO, représentant l’appelée en cause, sa société avait engagé une procédure auprès de Quality Control depuis le mois de mai dernier en vue d’obtenir la qualification ISO. Il était aidé pour cela par SWISS TS. Il contestait que Quality Control ne soit pas compétente pour cette prestation. La procédure n’avait pas encore abouti et il espérait l’obtenir dans les deux à six mois. Le 10 juillet 2013, il disposait de soudeurs certifiés EN 287. Il ne pouvait fournir d’explications sur les raisons pour lesquelles Mino n’avait pas produit de certificats de soudeurs au moment où elle avait déposé son offre. Dans l’annexe R6, elle avait mentionné les personnes dont elle avait la certitude qu’elles suivraient le chantier et qu’elles étaient capables d’en être les responsables. S’il n’avait pas désigné de soudeur, c’est qu’il considérait que cela serait fait en fonction des disponibilités de l’entreprise au moment où le chantier serait exécuté. L’exigence d’une certification ISO n’interdisait pas d’effectuer les travaux moyennant un autocontrôle. Jusque-là, lorsque Mino avait effectué des travaux sur des installations d’eau chaude sous pression, elle avait recouru à un contrôle externe. Si elle n’avait pas produit de pièces relatives au processus d’agrégation ISO qu’elle avait engagé, c’est parce qu’elle ne savait pas si le marché considéré allait leur être attribué. M. LACOUR, dont ils avaient envoyé le certificat périmé le 13 septembre 2013 à l’ingénieur mandataire spécialisé, travaillait encore au sein de Mino mais ses responsables n’envisageaient pas de l’envoyer sur le chantier des HUG.

c. Selon les représentants de l’OBA, les exigences de certification constituaient des critères d’aptitude qui faisaient partie des critères d’adjudication. Ceux-ci étaient évalués en fonction de la situation prévalant à la date du dépôt des offres. D’une manière générale un soumissionnaire qui voulait obtenir une note maximale devait remplir les critères imposés à la date en question. Ce principe souffrait cependant quelques exceptions. En outre, il était rare que l’on accorde la note maximale. Les exigences de certification formuléespar le maître de l’ouvrage constituaient des exigences minimales pour pouvoir réaliser les travaux. La norme ISO garantissait au maître de l’ouvrage une confection selon certains standards d’ensemble et une exécution conforme. La référence, dans les conditions spéciales de l’ingénieur figurant dans le dossier de soumission, aux dispositions de l’ASIT, à celles de l’ordonnance fédérale relative aux équipements sous pression ainsi qu’aux directives pour la réalisation des travaux d’installation accordée sur le réseau d’eau surchauffée des HUG était en rapport avec les normes de sécurité que ces textes prévoyaient. Les personnes clés que les soumissionnaires devaient désigner à l’annexe R6 étaient les personnes qu’ils entendaient désigner responsables des travaux à effectuer avec leur taux de disponibilité. Il s’agissait des mêmes personnes que le soumissionnaire devait mentionner à l’annexe R9 avec des précisions sur leur formation. Celui-ci n’avait pas forcément à désigner des soudeurs parmi les personnes clés mais il lui fallait produire les certificats de soudeur. Si la décision d’adjuger les travaux à l’appelée en cause avait été soumise à la transmission de certificats de soudeur c’est parce que l’architecte n’avait pas informé l’OBA qu’il avait reçu le 10 janvier 2014 les documents de certification. Celui-là les leur avait fait parvenir le 31 janvier 2014. S’agissant des autres exigences de qualification liées à la norme ISO, l’OBA avait interpellé l’ingénieur mandataire pour savoir si celles-ci avaient été réalisées. L’architecte était leur mandataire général sur le chantier mais ce dernier avait rédigé le rapport d’évaluation avec l’ingénieur mandataire spécialisé.

30) Le 26 mai 2014, s’est tenue une seconde audience de comparution personnelle des parties en vue principalement d’entendre Monsieur Samuel OUDOT, le collaborateur de l’ingénieur mandataire spécialisé qui avait participé à l’évaluation et à l’établissement du rapport précité.

a, Selon M. OUDOT, il avait été chargé d’établir le cahier des charges de la totalité du marché ayant trait aux étages CMU 5 et 6 concernant notamment les installations de distribution de l’eau. Il avait participé à l’évaluation des offres. C’était l’ingénieur mandataire spécialisé qui avait décidé de demander au soumissionnaire de produire des documents de certification ISO 3834-2 : 2005. Cela permettait de prouver que l’entreprise était capable d’effectuer les travaux sur des installations d’eau surchauffée sous pression. Cette exigence découlait de la législation en la matière. S’il était possible qu’une entreprise ne possédant pas de certification fasse appel à une entreprise externe dont l’intervention pourrait suppléer à cette absence, l’ingénieur mandataire spécialisé avait décidé en rédigeant l’offre, de demander que l’entreprise soumissionnaire détienne la certification. Les personnes clés désignées dans les annexes R6 et R9 ne devaient pas forcément être des soudeurs mais avec l’annexe R9 devaient être produits des certificats de soudeur.

À réception des offres, le groupe d’évaluation avait constaté que l’appelée en cause n’avait pas de certification ISO et n’avait pas produit de certificat de soudeur. Une autre entreprise soumissionnaire se trouvait d’ailleurs dans la même situation concernant l’absence de certification ISO. Le maître de l’ouvrage avait accepté qu’une documentation complémentaire leur soit demandée, raison pour laquelle ils avaient adressé des courriels à ces deux entreprises pour qu’elles produisent les documents manquants. Les évaluateurs s’étaient basés sur la réponse de l’appelée en cause pour évaluer son offre.

À ce jour, l’appelée en cause n’avait pas fourni de certification ISO, mais après la décision d’adjudication conditionnelle, elle avait transmis des certificats de soudeur et indiqué qu’elle recourrait à un contrôle externe pour pallierson absence de certification ISO. Il était exact que le certificat de soudeur de M. LACOUR produit par l’appelée en cause le 13 septembre 2013 était périmé et qu’il devait être renouvelé. Dans son esprit, l’absence de production de la documentation technique certificative aurait dû conduire à l’élimination du candidat. Pour cette raison, la nécessité de produire des certificats de soudeur avait été mentionnée en rouge dans le dossier d’appel d’offres. Lorsqu’il avait été constaté à l’ouverture des offres que ces documents faisaient défaut, le collaborateur de l’OBA présent leur avait expliqué que l’élimination n’était pas possible sur cette seule base et qu’il fallait donc évaluer les offres en intégrant cette demande dans l’un des critères. C’est ce qui expliquait qu’ils aient inclus le traitement de cette exigence dans l’examen du critère relatif à l’organisation en la considérant comme faisant partie des critères d’appréciation.

En rapport avec le critère d’appréciation de la certification ISO, la note 1 avait été accordée à l’appelée en cause en raison de son annonce de certification et la note 4 à la recourante parce que la documentation produite correspondait à une telle note selon le barème des notes du guide romand. Pour l’évaluation du sous-critère lié au certificat de soudeur, la note 1 avait été attribuée à l’appelée en cause parce que le candidat avait fourni une information mais que son contenu ne répondait pas aux attentes.

En sa qualité de représentant du mandataire spécialisé, il avait indiqué à ses interlocuteurs de l’équipe d’évaluation que sa préférence allait à la recourante. Il n’avait pas voulu signer le rapport d’adjudication car celui-ci ne mentionnait pas les conditions qui avait été rajoutées dans la décision de l’adjudication et parce qu’il ne partageait pas l’avis de la majorité du comité d’évaluation au sujet de celle-ci. Pour le mandataire spécialisé, la certification ISO était un élément important compte tenu des risques liés à la mise en place d’une installation d’eau sous pression surchauffée. S’il avait mentionné dans le rapport d’évaluation que la production par l’appelée en cause d’un seul certificat de soudeur était insuffisante, c’est qu’il considérait que la production de deux certificats était nécessaire pour être certain d’avoir en tout temps une personne qualifiée sur le chantier. Il avait participé à la rédaction de la décision d’adjudication sans participer à la prise de décision.

b. Selon les représentants de l’OBA, le mandataire spécialisé avait été mandaté pour couvrir la totalité des travaux depuis le début des études jusqu’à la réception. En sus du mandataire spécialisé, le comité d’évaluation était composé de l’architecte et de deux collaborateurs de l’OBA, ils admettaient que le mandataire spécialisé leur avait fait part de sa préférence pour l’offre de la recourante. Il ne l’avait pas fait dans le rapport de l’adjudication mais dans un rapport interne antérieur qui n’avait pas été versé à la procédure. Toutefois, dans la mesure où l’appelée en cause arrivait en tête, il n’était pas possible de ne pas lui adjuger les travaux. Raison pour laquelle la décision d’adjudication avait été émise sous conditions. Il arrivait souvent que l’OBA rende une décision d’adjudication conditionnelle mais il s’agissait surtout de conditions liées au respect des obligations liées aux conditions de travail, paiement des charges sociales ou dettes fiscales. C’était l’architecte qui avait demandé à l’appelée en cause la production des certificats de soudeur. Si la condition de la certification ISO 3834 avaient été érigée en condition éliminatoire, il n’y aurait eu qu’une seule offre recevable. Or le droit des marchés publics imposait d’ouvrir les procédures d’adjudication à la concurrence, raison pour laquelle la question de la certification requise avait été traitée dans le cadre des critères d’appréciation de l’offre.

c. M. MINO s’est également exprimé. Contrairement à ce qu’il avait mentionné lors de l’audience du 28 avril 2014, le soudeur dont il avait produit le certificat le 13 septembre 2013 était susceptible d’intervenir sur le chantier du CMU. En janvier 2014, Mino avait également produit trois certificats de soudeur qui interviendraient sur le chantier. Il ne leur avait pas été demandé la production de certificats de soudeur se rapportant à un type de soudure particulier. Un certain flou régnait en matière d’exigences de certification dans ce domaine. Mino avait en effet déjà exécuté des chantiers pour lesquels il ne leur avait pas été demandé autant de certificats. À son avis, ce qui importait pour la production de la documentation certificative relative au mode opératoire de soudage était que l’entreprise soit capable de la produire au fur et à mesure des travaux. C’est ce à quoi Mino se serait attachée dès le début de la phase d’études, en collaboration avec Quality Control.

d. Selon M. DESPRAZ, sa société n’avait pas recouru contre l’appel d’offres car dans son esprit, il était clair que les travaux devaient respecter le contenu de l’ordonnance fédérale entrée en vigueur dix ans auparavant. Ainsi, il tombait sous le sens que celui qui n’avait pas la certification ISO ou les certificats de soudeur ne pouvait pas exécuter des travaux. Il s’agissait d’un critère éliminatoire. La décision d’adjudication notifiée à l’appelée en cause exigeait qu’elle fasse la preuve qu’elle possédait les qualifications exigées par le mode opératoire de soudage « selon la norme ISO 15 614-1 dans le domaine de validité des tubes à souder et selon le module de la directive 97/23/CE au minimum AS ». Il en voulait pour preuve l’exigence de produire une attestation de l’ASIT ou de l’Association suisse pour la technique du soudage (ASS). À ce stade, il ne savait pas si l’adjudicataire avait transmis une telle documentation. Cela impliquait la production de plusieurs documents de certification en raison de la nature variée des travaux qui nécessitaient l’obtention d’attestations différentes selon les matériaux et les diamètres des tuyaux. Quoi qu’il en soit, il n’était pas correct de produire la documentation requise dans un appel d’offres au cours des travaux. Il fallait justifier la détenir avant l’adjudication.

e M. OUDOT a versé à la procédure un courriel qu’il avait co-signé pour le compte de l’ingénieur mandataire spécialisé et adressé le 5 février 2014 tant à l’OBA qu’à l’architecte au sujet du contrôle de la conformité des documents reçus de Mino aux conditions posées dans la décision d’adjudication.

Dans ce document, l’ingénieur mandataire spécialisé confirmait que cette entreprise avait présenté des certificats valables pour trois soudeurs. Au moment de l’établissement de ces documents, l’un d’entre eux était employé par l’appelée en cause et les deux autres étaient employés par une autre société. Il ne pouvait dire si ces trois soudeurs étaient des employés ou des sous-traitants de celle-là. L’entreprise n’avait pas présenté la certification ISO 3834-2 ni une autre certification selon un module de la directive 97/23/CE, mais elle avait signalé dans son courriel du 31 janvier 2014 que la conformité aux normes précitées serait assurée par Quality Control qui possédait « les connaissances, les équipements et le personnel qualifié pour répondre en tout point de l’annexe A de l’ISO 3834-1, critère d’aide au choix de l’ISO 3834-2 ».

Quality Control assumant uniquement le contrôle de la qualité de soudage, il incomberait donc à l’appelée en cause d’assumer la partie technique du dossier des exécutions de la centrale et des réseaux. Il semblait dès lors opportun que l’appelée en cause indique lequel de ses collaborateurs assumerait cette partie en tant que chef du projet.

Quality Control n’avait pas été annoncé comme sous-traitant dans le dossier d’appel d’offres du 4 juin 2013 de l’appelée en cause. Il serait donc judicieux de vérifier sa solvabilité.

31) L’appelée en cause s’est déterminée le 4 août 2014. Il était établi qu’elle disposait, le 10 janvier 2014, de certificats de soudeurs valables. Ainsi que M. DESPRAZ l’avait lui-même admis lors de l’audience du 26 mai 2014, il n’était pas nécessaire de détenir ces certificats au moment du dépôt de l’offre, la documentation certificative devant être produite au fur et à mesure des travaux. La décision d’adjudication datant du 14 janvier 2014, et l’appelée en cause ayant fait parvenir les trois certificats de soudeurs le 10 janvier 2014, soit quatre jours avant l’adjudication, elle avait valablement produit les attestations demandées. Son exclusion de la procédure d’adjudication ne pouvait reposer sur ce motif. Elle aurait dû obtenir une note supérieure à 1 pour n’avoir produit qu’un seul certificat non valable. Les certificats qu’elle avait produits étaient valables pour le chantier en question et le grief formulé par la recourante était sans fondement. Concernant le certificat ISO 3834-2, il ne s’agissait pas d’un critère d’aptitude éliminatoire. Il entrait dans le pouvoir d’appréciation de l’OBA d’en faire un critère d’adjudication. Elle avait recouru au mandat de l’entreprise Quality Control, ce qui était autorisé, ainsi que M. OUDOT l’avait admis lors de son audition. En suivant le raisonnement de la recourante, seule cette dernière détenant le certificat ISO requis, toutes les autres entreprises soumissionnaires aurait dû être exclues. Cela aurait conduit, selon l’art. 47 RMP, à l’interruption de la procédure en raison du nombre insuffisant d’offres pour garantir une situation de concurrence efficace. Le pouvoir adjudicateur avait à juste titre alors décidé, ainsi que M. OUDOT l’avait relevé, d’intégrer la demande de certification dans l’un des critères. L’appelée en cause persistait dans ses conclusions du rejet du recours.

32) Le 11 août 2014, la recourante a exercé son droit de réplique. Elle a persisté dans ses conclusions. Elle contestait que les certificats pour soudeurs requis dans l’appel d’offres et exigés par la règlementation en vigueur puissent être valablement produits postérieurement à l’échéance du délai de remise des offres. Il ressortait indubitablement des conditions spéciales de l’ingénieur que l’annexe R 9 devait être accompagnée des certificats nécessaires pour les soudeurs. L’appelée en cause aurait dû être exclue de la procédure d’adjudication. M. OUDOT avait admis que la production d’un seul certificat de monteur était insuffisante pour l’exécution du chantier dans de bonnes conditions car le risque était trop important. En outre, le certificat à produire devait être valable. Concernant la certification ISO, M. OUDOT, contrairement à ce que soutenait l’appelée en cause en recourant à une citation tronquée de celui-ci, avait clairement indiqué que, pour le marché du CMU 6, il avait exigé dans l’appel d’offres que l’entreprise choisie détienne cette certification. Cette exigence était au demeurant fondée sur la loi fédérale du 12 juin 2009 sur la sécurité des produits (LSPro - RS 930.11) et sur l’ordonnance fédérale du 20 novembre 2002 sur la sécurité des équipements sous pression (Ordonnance relative à la sécurité des équipements sous pression – RS 919.821). La nécessité de la production des certificats figurait en rouge dans l’appel d’offres pour insister sur cette exigence. Un critère d’aptitude ne pouvait être valablement transformé en critère d’appréciation lorsque le nombre d’entreprises ayant répondu à l’appel d’offres était insuffisant. Cela conduirait à ne pas appliquer les exigences de sécurité telles que posées par la règlementation fédérale, ceci dans le seul but, du point de vue de l’adjudicatrice, d’obtenir davantage d’offres à un meilleur prix. Un tel raisonnement était inacceptable. Le mandataire spécialisé l’avait d’ailleurs bien compris puisqu’il avait refusé de signer le rapport d’adjudication pour ce motif.

33) Sur ce, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile par un soumissionnaire évincé contre un décision d’adjudication, et présenté devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 15 al. 1 AIMP ; 3 al. 1 AIMP ; art. 56 al. 1 RMP).

2) Tel qu’il est garanti par l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d’être entendu comprend notamment le droit pour l’intéressé d’offrir des preuves pertinentes, de prendre connaissance du dossier, d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l’administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s’exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre. Le droit de faire administrer des preuves n’empêche cependant pas le juge de renoncer à l’administration de certaines preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier s’il acquiert la certitude que celles-ci ne pourraient l’amener à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (arrêts du Tribunal fédéral 2P.200/2003 du 7 octobre 2003 consid. 3.1 ; 2P.77/2003 du 9 juillet 2003 consid. 2.1 et les arrêts cités ; ATA/172/2004 du 2 mars 2004 ; ATA/39/2004 du 13 janvier 2004 consid. 2). Le droit d’être entendu ne contient pas non plus d’obligation de discuter tous les griefs et moyens de preuve du recourant ; il suffit que le juge discute ceux qui lui paraissent pertinents (arrêts du Tribunal fédéral 1P.32/2004 du 12 février 2004 consid. 6 ; 1P.24/2001 du 30 janvier 2001 consid. 3a et les arrêts cités ; ATA/292/2004 du 6 avril 2004).

En l’occurrence, les mesures d’instruction ordonnées à ce jour ont permis d’établir les faits d’une manière suffisante pour permettre à la chambre administrative de statuer. Il ne sera donc pas donné suite aux requêtes formulées par l’appelée en cause dans ses dernières conclusions visant à procéder à l’audition d’autres personnes concernant les questions d’application de la réglementation sur les installations d’eau surchauffée sous pression.

3) Le droit est la base et la limite de l’activité de l’État (art. 5 al. 1 Cst.). Cette disposition consacre le principe de légalité qui gouverne toute activité étatique. En fait partie intégrante la garantie des droits fondamentaux, soit des droits ou des libertés garanties aux particuliers, avec tout ce que cela comporte comme obligations et comme engagements au plan à la fois institutionnel et normatif (Andreas AUER/Giorgio MALINVERNI/Michel HOTTELIER, Droit constitutionnel suisse, vol. 2, 3ème éd., 2013, n° 1005 et 1011, p. 468 et 470).

Ainsi, une collectivité ou une entité publique qui conduit une procédure de soumission publique est soumise au respect de telles conditions (ATA/321/2010 du 11 mai 2010 ; Pierre MOOR, Droit administratif, Vol. 3, 2ème éd., 1992, n° 4.1.1.2, p. 158). 4)

5) Le but de la législation en matière de marchés publics est de garantir le respect des principes énoncés à l’art. 1 AIMP. Il s’agit en particulier de garantir une concurrence efficace entre les soumissionnaires (art. 1 al. 3 let a AIMP et 17 RMP), l’égalité de traitement à l’ensemble de ceux-ci et l’impartialité de l’adjudication (art. 1 al. 3 let b AIMP et 16 RMP), la transparence des marchés publics (art. 1 al. 3 let c AIMP et 16 RMP) ainsi qu’une utilisation parcimonieuse des deniers publics (art. 1 al. 3 let d AIMP).

6) La garantie d’une concurrence efficace doit permettre aux soumissionnaires de formuler des offres attractives (Martin BEYELER, Ziele und instrumente des Vergaberechts, 2008, p. 30, n° 83). La mise en œuvre de la concurrence est rendue effective par le processus de soumission publique. Elle est assurée par l’interdiction d’arrangements et d’actes de concurrence déloyale (ibid., p. 31 n° 83). Elle implique l’ouverture du marché au plus large cercle d’offrants (ibid., p. 32 n° 86). Pour respecter ce principe, un appel d’offres doit être rédigé autant que possible de manière neutre et la description de la prestation à fournir ne doit pas être rédigée d’une façon qui exclut la majorité des soumissionnaires de la concurrence (ibid., p. 35 n° 95). Le pouvoir adjudicateur dispose d’un large pouvoir d’appréciation dans la formulation de son offre mais il est limité à l’interdiction de la formuler d’une manière qui conduise à une discrimination entre les concurrents potentiels.

7) Le respect de l’égalité de traitement entre soumissionnaires (art. 1 al. 2 let. b et 11 let. a AIMP  ; 16 RMP) oblige l’autorité adjudicatrice à traiter de manière égale les soumissionnaires tout au long du déroulement formel de la procédure (ATA/123/2011 du 1er mars 2011 ; ATA/626/2009 du 1er décembre 2009 ; ATA/884/2004 du 26 octobre 2004 ; Jean-Baptiste ZUFFEREY / Corinne MAILLARD / Nicolas MICHEL, Droit des marchés publics, 2002, p. 109  ; Benoît BOVAY, La non-discrimination en droit des marchés publics in RDAF 2004, p. 241  ). La juridiction de céans a déjà eu l’occasion de rappeler le caractère formaliste du droit des marchés publics qu’impose le respect de ce principe (ATA/150/2009 du 14 mars 2009 ; ATA/10/2009 du 13 janvier 2009).

En vertu de ce principe, une offre qui ne correspond pas aux exigences de l’appel d’offres doit être considérée comme incomplète et ne peut être prise en compte (arrêt du Tribunal fédéral du 12 avril 2002, résumé in BR/DC 2003 n° 49 p. 156 ; Jean-Baptiste ZUFFEREY/Corinne MAILLARD/Nicolas MICHEL, op. cit., p.110  ; Olivier RODONDI, La gestion de la procédure de soumission, in Jean-Baptiste ZUFFEREY/Hubert STOECKLI, Droit des marchés publics, 2008, p.185  ; no 63, p. 186).

8) Selon la jurisprudence, le principe de la transparence est le principe cardinal et incontournable des marchés publics. Il limite le large pouvoir d’appréciation dont dispose le pouvoir adjudicateur (RDAF 2001 I 403). Il permet d’assurer la mise en œuvre du principe de concurrence, lequel permet la comparaison des prestations et de choisir ainsi l’offre garantissant un rapport optimal entre le prix et la prestation (ATF 130 I 241 consid. 5.1 ; ATF 125 II 86 consid. 7c in RDAF 2002 I 543 ; ATA/952/2014 du 2 décembre 2014 consid. 5b). Il permet également le contrôle de l’impartialité de la procédure d’adjudication, autre principe qui doit être respecté (Étienne POLTIER, Droit des marchés publics, 2014, p. 163, n° 264).

Ce principe exige du pouvoir adjudicateur qu’il énumère par avance et dans l’ordre d’importance tous les critères d’adjudication qui seront pris en considération lors de l’évaluation des soumissions ; à tout le moins doit-il spécifier clairement l’importance relative qu’il entend accorder à chacun d’eux. Lorsqu’en sus de ces critères, le pouvoir adjudicateur établit des sous-critères, il n’est pas obligé de les communiquer lors de l’appel d’offres sauf s’il entend les privilégier, auquel cas il doit les communiquer par avance aux soumissionnaires, en indiquant leur pondération respective (ATF 130 I 241 consid. 5.1 p. 248). En tous les cas, le principe de la transparence interdit de modifier de manière essentielle, après le dépôt des offres, la présentation des critères ou de modifier les critères d’aptitude ou d’adjudication (ATF 125 II 86 consid. 7c p. 101 et les références citées ; ATA/952/2014 et jurisprudence citée ; Étienne POLTIER, ibid.).

9) Dans le canton de Genève, avant de pouvoir participer à l’évaluation un concurrent doit respecter les « conditions pour être admis à soumissionner » définies aux art. 31 à 33 composant le chapitre III du RMP. Il ne doit pas se trouver dans une situation d’incompatibilité énoncée à l’art. 31 RMP, établir qu’il remplit les conditions de participation en produisant les attestations de respect de la législation et des usages énoncés à l’art. 32 RMP et remplir les critères d’aptitude de l’art. 33 RMP. Ces derniers visent à évaluer les capacités financières, techniques et organisationnelles des soumissionnaires (arrêts du Tribunal fédéral 2P. 255/2005 du 27 avril 2006 consid 3.2).

Pour établir qu’il remplit les critères d’aptitude, le soumissionnaire doit produire des justificatifs attestant qu’il exerce une activité en rapport avec celle dont relève la soumission, par exemple sous forme d’un extrait du registre du commerce d’un registre professionnel (art. 33 let. a RMP) ; une déclaration indiquant l’effectif de la main-d’œuvre permanente et le nom d’un apprenti (art. 33 let. b RMP) ; un extrait du registre des poursuites et faillites (art. 33 let. c RMP); des pièces comptables (art. 33 let. d RMP); un certificat de qualité (art. 33 let. e RMP)

Selon l’art. 42 al. 1 let. b RMP, le candidat qui ne répond pas ou plus aux conditions pour être admis à soumissionner est exclu de la procédure.

10) Lorsqu’elle formule son appel d’offres, l’autorité adjudicatrice doit annoncer les critères sur la base desquels elle évaluera les offres. Il doit s’agir de critères objectifs, vérifiables et pertinents par rapport au marché qui doivent être énoncés clairement et par ordre d’importance au moment de l’appel d’offres (art. 24 RMP). Selon l’art. 12 RMP, les offres sont évaluées en fonction de critères d’aptitude au sens de l’art. 33 RMP et de critères d’appréciation.

11) L’installation et la mise en œuvre d’installations sous pression sont soumises aux dispositions de la LSPro et de sa réglementation d’exécution. La première prévoit qu’un produit mis sur le marché, soit « tout bien meuble prêt à l’emploi, même incorporé à un autre bien meuble ou immeuble » (art. 2 al. 1 LSPro) ne peut être mis en service sur le marché que s’il présente « un risque nul ou minimum pour la santé ou la sécurité des utilisateurs ou des tiers lorsqu’ils sont utilisés dans des conditions normales ou raisonnablement prévisibles » (art. 3 al. 1 LSPro). Cette règle s’applique aux installations sous pression (art.1 al. 2 ch.4 OSPro). Il incombe au Conseil fédéral de fixer les exigences essentielles en matière de santé et de sécurité, en tenant compte du droit international pertinent (art 4 al. 1 et 2 LSPro).

. À teneur des art. 1 al. 1 let. a à c et 2 al. 1 de l’ordonnance relative aux équipements sous pression, la mise en circulation d’équipements sous pression est soumise à surveillance. Celle-ci est exercée par l’ASIT suivant la let. d de l’annexe à l’ordonnance du 18 juin 2010 du département fédéral de l’économie, de la formation et de la recherche sur la surveillance du marché conformément à la section 5 de l’ordonnance sur la sécurité des produits (RS 930.111.5), sur délégation fondée sur les art. 9 LSPro et art. 20 al. 1 let. c de l’ordonnance du 13 mai 2010 sur la surveillance des produits OSPro – (RS 930.111). Ces exigences correspondent à celles découlant de la Directive n° 97/23/CE du 29 mai 1997 relative au rapprochement des législations des États membres concernant les équipements sous pression.

Cela signifie que les équipements sous pression qui font l’objet du marché public ne devront être mis en circulation, soit mis à disposition de l’utilisateur pour la première fois, au sens de l’art. 3 de l’ordonnance sur la sécurité des équipements sous pression, que s’ils ont été correctement installés de façon à ne pas mettre en danger la vie et la santé des personnes ou l’intégrité des biens (art. 5 al. 1 de l’ordonnance précitée) et qu’ils devront respecter les exigences essentielles de sécurité de l’annexe 1 à ladite ordonnance, s’agissant de leur conception. Cela signifie également que les équipements sous pression devront être soumis à une vérification finale (ch. 3.1 de l’annexe 1 à l’ordonnance sur la sécurité des équipements sous pression) et que la qualification ou l’approbation du personnel commis à l’assemblage permanent des pièces soit vérifiée par l’organisme d’évaluation de la conformité (ch 3.1.2 de l’annexe 1 à l’ordonnance sur la sécurité des équipements sous pression).

12) Dans le cas d’espèce, au vu de ces caractéristiques, il est patent que la mise en place de l’installation d’eau chaude sous pression qui fait l’objet du marché public litigieux est soumise aux normes de qualité et de sécurité énoncées dans la LSPro et dans sa réglementation d’application. Les parties ne le contestent pas, et notamment l’autorité intimée, dont plusieurs documents du dossier d’appel d’offres, se réfèrentaux normes suisses et européennes précitées ou font appel à la norme de certification d’entreprise de type ISO ainsi qu’à celles, en matière de qualification des soudeurs, de l’organisme suisse délégué à la surveillance.

13) Sous l’angle du droit des marchés publics, les exigences de certification précitée (certification d’entreprise ISO 3834-2 et production de certificats de soudeur fondés sur la prescription ASIT 506 laquelle renvoie à la norme européenne permettant d’établir le niveau de qualification professionnelle des soudeurs exigé par la Directive n° 97/23/CE précitée ) formulées dans l’appel d’offres, constituent des critères d’aptitude au sens de l’art. 33 let. 3 RMP. Fondés sur des critères objectifs, en rapport avec les certifications en usage au plan national et européen, vérifiables et surtout pertinents du fait de leurs liens avec des impératifs de sécurité desdites installations qui sont susceptibles de causer de graves dangers en cas de défectuosité, lesdits critères ne sont pas discriminatoires et sont conformes aux exigences de l’art. 24 RMP.

En l’occurrence, l’appelée en cause a déposé son offre le 11 juillet 2013 sans établir, par la production de pièces, qu’elle détenait la certification d’entreprise requise et sans produire aucun certificat de soudeur lié aux personnes clés dont elle avait donné le nom dans l’annexe P6 ou à d’autres soudeurs de son entreprise. Nonobstant cela, le pouvoir adjudicateur l’a autorisée à participer à l’évaluation des offres et lui a adjugé les travaux. La décision de celui-ci n’est cependant pas conforme au droit. En effet, conformément à l’art. 42 let. b RMP, il aurait dû constater l’absence de cette documentation et prononcer l’exclusion de l’appelée en cause de la procédure adjudication.

14) Au moment de l’ouverture des offres, l’intimé a estimé être en droit, le 13 septembre 2013, de s’adresser à deux des trois soumissionnaires en concurrence, dont l’appelée en cause, pour leur réclamer la certification qui faisait défaut. La question de la compatibilité d’une telle démarche avec les principes propres au droit des marchés publics découlant des art. 1 al. 3 AIMP ainsi que 16 et 17 RMP, peut être laissée ouverte. En effet, celle-ci n’a pas abouti à la transmission par l’appelée en cause d’une documentation correspondant aux exigences requises ou même démontrant que le processus de certification ISO requis de l’appelée en cause était en cours, ni à la production par celle-ci d’un certificat de soudeur en cours de validité à la date du dépôt de son offre. Or une telle réponse ne pouvait que confirmer au pouvoir adjudicateur la nécessité d’exclure l’entreprise soumissionnaire en défaut puisque cette réponse imparfaite confirmait qu’elle ne remplissait pas les conditions de participation au marché.

15) L’autorité intimée explique qu’elle était légitimée à considérer les exigences de certification non plus comme des critères d’aptitude, malgré ce qui pouvait être compris à la lecture de l’appel d’offres, mais comme appartenant aux critères d’appréciation des soumissions. Il s’agissait selon elle de rétablir un état de concurrence dès lors que seul un soumissionnaire remplissait les conditions de certification posées dans l’appel d’offres. Un tel procédé n’est pas admissible. Une telle modification des critères en cours de procédure est contraire aux principes de transparence et d’égalité de traitement que le droit des marchés publics doit respecter. Ainsi que le rappelle l’art. 43 RMP, l’évaluation des offres doit être effectuée en fonction des critères prédéfinis dans l’appel d’offres. La jurisprudence admet que dans certains cas la distinction entre critères aptitude et critères appréciation peut se révéler délicate. Tel n’est pas le cas en l’espèce, dès lors que les conditions de certification ressortissent clairement aux critères d’aptitude. Dans une telle situation, le pouvoir adjudicateur ne peut plus en cours de procédure décider de les évaluer selon des critères quantitatifs en les intégrant comme sous-critères de l’un des critères principaux, même moyennant une pondération importante. S’il voulait rétablir une situation de concurrence, ayant fait le constat que l’appel d’offres n’avait pas conduit à collecter suffisamment d’offres permettant d’effectuer des comparaisons, il lui incombait de passer par la procédure spéciale d’interruption de la procédure d’appel d’offres s’il considérait que les conditions de l’article 47 RMP, notamment celles de l’art. 47 al. 1 let. a RMP, étaient réalisées.

16) L’appelée en cause soutientque la décision de lui adjuger les travaux prise par le pouvoir adjudicateur était conforme au droit parce que les conditions relatives aux exigences de certification de l’entreprise et du personnel qui n’étaient pas remplies à la date du dépôt des offres, pouvaient être réalisées au moment où l’exécution du marché commencerait et au fur et à mesure du déroulement de celui-ci, conditions qu’elle remplissait au moment de la prise de décision.

L’interprétation du cahier des charges à laquelle se livre l’appelée en cause est cependant incompatible avec le libellé des exigences en matière de certification figurant dans le dossier d’appel d’offres, lesquelles doivent être interprétées selon le principe de la confiance (Peter GALLI/André MOSER/Elisabeth LANG/Marc STEINER, Praxis des öffentlichen Beschaffungsrecht, 3ème éd., 2013, p. 243, n° 567). En outre, l’égalité de traitement impose que les soumissions soient examinées en fonction de leur libellé et des pièces produites à la date fixée pour le dépôt des offres, la conformité des offres au cahier des charges devant être examinée à cette date (art. 39 al. 1 RMP) dans le cadre de la phase d’apurement des offres, qui seule permet de rendre possible leur comparaison objective. Après celle-ci, un soumissionnaire n’est pas autorisé à modifier son offre ou à produire des pièces manquantes (ibid, p. 289, n° 664 et p. 312, n° 710). L’autorité adjudicatrice n’est autorisée qu’à rectifier les erreurs évidentes (art. 39 al. 2 RMP) ou à demander des explications aux soumissionnaires relatives à leur aptitude et à leur offre (art. 40 al. 1 RMP).

En l’occurrence, le dossier d’appel d’offres faisait référence à plusieurs reprises à la législation sur les installations sous pression. De même, il mentionnait la nécessité pour les soumissionnaires d’établir que leur entreprise détenait une certification ISO et que les soudeurs qui intervenaient pouvaient justifier de certificats de qualification correspondant aux prescriptions de l’ASIT. Nulle part il n’est indiqué que cette certification pouvait être produite ultérieurement par le soumissionnaire. Cette argumentation ne peut être suivie.

17) Au vu des considérations qui précèdent, la décision d’adjuger le marché à l’appelée en cause n’est pas conforme au droit. Certes, l’offre de l’appelée en cause était la moins disante, et la décision de lui adjuger les travaux pouvait constituer une solution satisfaisante sous l’angle de l’utilisation des deniers publics. Il n’empêche que cette issue a conduit le pouvoir adjudicateur à se départir de ses propres critères vis-à-vis des autres soumissionnaires, puisqu’il avait annoncé dans son appel d’offres les critères de sécurité comme constituant une condition de leur participation à la procédure d’évaluation. En outre, elle l’a contraint à devoir prendre, le 14 janvier 2014, une décision d’adjudication problématique sous l’angle de la sécurité juridique. Le procédé consistant à soumettre l’adjudication des travaux à la condition de produire les certificats manquants est non seulement critiquable au regard des critères de l’art. 1 al. 3 let. a à c AIMP, mais elle crée une situation paradoxale et incertaine. À lire le courriel du mandataire spécialisé à l’OBA du 5 février 2014, il n’est en effet pas acquis que l’appelée en cause remplisse, les conditions requises dans l’appel d’offres après que les travaux lui ont été adjugés, ni que l’intervention de l’entreprise certifiée qu’il propose par défaut - sans que la nature des relations contractuelles qu’elles entretiennent soit connue du pouvoir adjudicateur - remédie à la non-conformité au droit de sa soumission.

18) Le recours sera admis et la décision d’adjuger le marché litigieux à l’appelée en cause sera annulée. Dans la mesure où la recourante est la seule soumissionnaire à remplir complètement les critères d’aptitude requis, liés aux exigences de certification précités, et qu’elle a été classée au deuxième rang suite à l’évaluation complète de son offre, la chambre administrative, faisant usage du pouvoir de réforme conféré par l’art. 69 al. 3 LPA, lui adjugera le marché. En effet, toute autre décision, notamment un renvoi à l’intimé se heurterait au principe d’économie de procédure ainsi qu’à celui de célérité, lesquels doivent être pris en compte en matière de marchés publics.

19) Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 1'000.- sera mis à la charge de l’appelée en cause, tandis qu’aucun émolument ne sera mis à la charge de l’OBA (art. 87 al. 1 LPA). En outre, une indemnité de procédure de CHF 3000.- sera allouée à la recourante, à concurrence de CHF 1'500.- à la charge de l’intimé et de CHF 1'500.- à celle de l’appelée en cause (art. 87 al. 2 LPA).

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 27 janvier 2014 par Despraz SA contre la décision d’adjudication de l’office des bâtiments du 14 janvier 2014 ;

au fond :

l’admet ;

annule la décision de l’office des bâtiments d’adjuger à Mino SA le marché public « centre médical universitaire-CMU étape 6 lot 243.10 - eau surchauffée et vapeur » ;

adjuge à Despraz SA le marché public « centre médical universitaire-CMU étape 6 lot 243.10 - eau surchauffée et vapeur » ;

met à la charge de Mino SA un émolument de CHF 1'000.- ;

dit qu’il n’est pas mis d’émolument à la charge de l’office des bâtiments;

alloue à Despraz SA une indemnité de procédure de CHF 3'000.-, soit CHF 1'500.- à la charge .- de Mino SA et CHF 1'500.- à la charge de l’État de Genève ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF-RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public :

si la valeur estimée du mandat à attribuer n’est pas inférieure aux seuils déterminants de la loi fédérale du 16 décembre 1994 sur les marchés publics ou de l’accord du 21 juin 1999 entre la Confédération suisse et la Communauté européenne sur certains aspects relatifs aux marchés publics ;

si il soulève une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi

communique le présent arrêt à Me Alain Maunoir, avocat de la recourante, à Me Michel Bussard, avocat de l’appelée en cause, ainsi qu’à l’office des bâtiments et à la Commission de la concurrence.

Siégeants : M. Verniory, président, M.Thélin, Mme Junod, M. Dumartheray, Mme Payot Zen-Ruffinen, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

le président siégeant :

 

 

J.-M. Verniory

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :