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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2867/2020

ATA/325/2021 du 16.03.2021 ( FPUBL ) , ADMIS

Descripteurs : LICENCIEMENT ADMINISTRATIF;RAPPORTS DE SERVICE DE DROIT PUBLIC
Normes : Statut TPG.69; Statut TPG.71; Cst.36.al3; Statut TPG.72.al1
Résumé : Admission du recours d’une employée d’une entreprise publique genevoise contre son licenciement en raison de la fragilité de son état de santé, alors que les raisons médicales n’étaient pas dûment établies par le médecin traitant et le médecin-conseil, qui tous deux attestaient de sa capacité de travail avec des limitations fonctionnelles. Pas de motif dûment établi au sens de l’art. 69 du statut. L’employeur ne peut pas recourir à l’art. 71 du statut autorisant le licenciement pour motif dûment justifié, pour pallier la non-réalisation des conditions de l’art. 69 du statut sous peine de contourner la protection des employés contre les licenciements en cas de maladie, prévue par le statut de cette entreprise. Violation grave du droit d’être entendue de la recourante lors de la procédure de reclassement dont elle n’a pas été informée et à laquelle elle n’a pas été associée. Violation de la condition du reclassement prévu par l’art. 69 al. 1 du statut, le procédé suivi in casu par l’employeur rendant d’emblée vain le reclassement. Refus de l’employeur de réintégrer la recourante. Fixation de l’indemnité à six mois du dernier salaire brut, vu l’ensemble des circonstances dont le comportement de la recourante et celui de l’employeur au moment du retour en emploi de cette dernière après une longue absence pour raison de maladie.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2867/2020-FPUBL ATA/325/2021

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 16 mars 2021

 

dans la cause

 

Madame A______
représentée par Me Sandro Vecchio, avocat

contre

TRANSPORTS PUBLICS GENEVOIS
représentés par Me Anne Meier, avocate

 



EN FAIT

1) Madame A______, dénommée auparavant B______, née en 1973 et domiciliée depuis 2010 en France, a été engagée par les Transports publics genevois (ci-après : TPG) le 14 avril 2008 en qualité de secrétaire de direction au sein du service " P______ ".

Son contrat de travail a été signé par Monsieur C______, directeur du service « Développement & Ingénierie » et directeur ad intérim, en 2008, du service " P______ ", et par Monsieur D______, directeur ad intérim puis directeur des Ressources humaines (ci-après : RH).

a. À son arrivée, elle a partagé le bureau avec Madame E______. En octobre 2008, M. C______ a procédé à une répartition des tâches et les a séparées après une altercation en août 2008 au retour de vacances de Mme E______. Mme A______ a été déplacée dans un autre bureau. Il leur a rappelé l'exigence de leur « interopérabilité » au sein du secrétariat, notamment le remplacement et l'échange d'informations lors de leurs absences et la concertation pour la prise des vacances.

b. Mme E______ travaillait aux TPG depuis 1988. Elle a été l'assistante de direction d'un ancien directeur dont le service avait, lors de son départ, fusionné avec un autre service disposant déjà d'une assistante de direction. Faute de pouvoir s'intégrer au sein du secrétariat de ce nouveau service, Mme E______ a occupé un poste de « gestionnaire des métiers de transports » avec une rétrogradation de deux classes de salaire. Elle a, dès 2006, rejoint le secrétariat du service " P______ ", qui disposait alors d'une assistante de direction. À la suite du départ à la retraite de cette dernière, Mme A______ a été engagée comme secrétaire de direction.

c. Monsieur F______ a pris la direction du service " P______ " le 1er janvier 2009. Il a réuni, dans le même bureau, Mme A______, secrétaire de direction, et Mme E______ dont la dénomination de poste, restée « gestionnaire des métiers des transports », a été modifiée en 2009 en « assistante de direction », chacune travaillant à plein temps. Il a fixé les tâches de ses deux collaboratrices et décidé que chacune serait chargée de remplacer l'autre en cas d'absence. Elles ont également signé, pour approbation, un document intitulé « les 10 règles du jeu du secrétariat E » explicitant les attentes de la direction à leur égard et des règles élémentaires de comportement.

2) Après avoir constaté une importante détérioration dans la relation de travail entre Mmes A______ et E______, qui perturbait le bon fonctionnement du secrétariat, et les avoir entendues, M. F______ leur a adressé, le 8 juin 2009, un courrier leur rappelant leur obligation de respecter les « 10 règles du jeu » susévoquées et leur demandant de modifier leur comportement de manière significative. Il leur laissait jusqu'à fin juin 2009 pour améliorer la situation et, à défaut d'une amélioration notable de leurs relations, il prendrait les mesures « idoines » à la résolution de ce conflit, précisant qu'il privilégiait le bon fonctionnement d'un groupe aux compétences professionnelles d'un individu.

Elles ont continué à travailler sans amélioration ni péjoration de l'ambiance jusqu'à un nouvel incident survenu début juillet 2012 à la suite des vacances de Mme E______. Lors d'un entretien avec M. F______, Mme A______ a déclaré que Mme E______ ne lui avait pas donné les informations nécessaires pour effectuer le travail pendant son absence, tandis que Mme E______ a affirmé le contraire. Vu l'augmentation des tensions au sein de son secrétariat, M. F______ a alors mandaté une entité externe pour déterminer s'il était possible d'organiser une médiation entre ses deux collaboratrices.

3) Après un constat d'échec en juillet 2012 quant à la conduite d'une médiation entre Mmes E______ et A______ par un centre genevois de compétence en matière de harcèlement au travail, M. F______ a demandé, en septembre 2012, au Groupe Impact du canton de Vaud (ci-après : le Groupe Impact) de mener une investigation au sein de son secrétariat au sujet des allégations de harcèlement psychologique émises par Mme A______ à l'encontre de sa collègue.

a. Mme A______ s'était plainte à lui, dans un courriel du 24 août 2012, d'être quotidiennement la cible d'un comportement hostile de la part de Mme E______ depuis son entrée en fonction en avril 2008.

b. Le Groupe Impact a identifié le contexte organisationnel susmentionné, examiné les pièces du dossier et entendu les deux intéressées ainsi que plusieurs de leurs collègues et responsables, notamment M. D______.

c. À l'issue de son investigation, le Groupe Impact a conclu, le
15 novembre 2012, que les éléments constitutifs du harcèlement psychologique étaient réunis, Mme E______ en étant l'auteure et Mme A______ la victime.

Dès le départ, Mme E______ avait fixé, unilatéralement, des règles de communication biaisées, fondées sur un refus de contact, une rétention d'information, des signes non verbaux dénigrants puis sur un comportement non verbal agressif, ce qui avait déstabilisé Mme A______. Celle-ci avait fini par adopter un mode de communication défensif ou revendicateur puis cessé de communiquer avec sa collègue. Ces agissements hostiles s'étaient produits de manière répétée depuis avril 2008.

Le Groupe Impact a recommandé au minimum que les deux collaboratrices restent séparées et que les mesures appropriées soient prises pour éviter toute autre atteinte à la personnalité.

4) Le 6 février 2013, MM. F______ et D______ ont informé Mme A______ que, vu le bien-fondé de sa dénonciation pour mobbing, la direction avait pris une sanction disciplinaire à l'encontre de sa collègue. Ils étaient sincèrement navrés de la situation vécue qui avait eu des répercussions négatives sur sa santé et son travail au sein de l'entreprise.

Toutes les mesures nécessaires pour rétablir une situation sereine avaient été prises dès sa dénonciation, notamment la définition des fonctions des deux collaboratrices, une délimitation claire de leurs tâches respectives et la suppression des remplacements mutuels. Sa séparation avec Mme E______ devenait une mesure définitive au sein du service " P______ ". Ils espéraient qu'elle puisse retrouver toute la sérénité et la santé nécessaire pour assurer ses fonctions à la satisfaction de l'entreprise comme jusqu'alors.

5) Début mars 2014, les attentes de Mme A______ et de son employeur ont été clarifiées.

La première souhaitait retrouver sa place de travail et de la stabilité, exercer une activité avec des responsabilités et tâches définies et construire une relation professionnelle avec sa nouvelle collègue. Tenant compte de sa situation personnelle et du bon fonctionnement du service, les TPG ont renoncé à déplacer le secrétariat du service " P______ " sur un autre site et décidé de sensibiliser ses collègues à son état de santé alors fragile. Ils attendaient de la part de l'intéressée un état d'esprit positif et constructif, l'application stricte d'un « timesheet », un effort conséquent sur la tenue des délais, une présence à la place de travail renforcée, un respect strict des horaires administratifs et de la disponibilité pour des besoins ponctuels. Le rôle et les responsabilités au sein du secrétariat seraient organisés avec sa nouvelle collègue.

6) Entre son arrivée le 14 avril 2008 et le 29 mai 2016, Mme A______ a été absente pour maladie à plusieurs reprises, pendant des périodes variables allant de quelques jours à deux voire trois semaines, ou plusieurs mois de suite. Ces incapacités de travail étaient, hormis deux fois, complètes. Sous réserve de la grande majorité des absences d'un ou deux jours, elles étaient attestées par certificat médical.

Ainsi, jusqu'à fin 2011, l'intéressée a essentiellement eu des absences de courte durée. Elle a en outre été absente, à quatre reprises, pour une durée d'une semaine environ et, à deux reprises, pendant deux semaines. Entre les 2 mars et 17 mai 2009, elle a cumulé septante-sept jours de maladie, soit environ 2,5 mois.

De 2012 à avril 2013, elle a eu huit absences de courte durée et une absence de dix jours. Elle a également cumulé, entre les 29 février et 9 avril 2012,
trente-deux jours d'absence pour maladie avec une interruption de dix jours, fin mars 2012, où elle a travaillé.

Du 21 mai 2013 jusqu'à fin mai 2016, elle a eu six périodes d'absence d'environ dix jours, voire un peu plus, en sus d'autres absences de plus courte durée. Elle n'a pas non plus pu travailler de début septembre à fin décembre 2014 pendant environ quatre mois (117 jours). Sous réserve de quatre jours début octobre 2015, elle a été, entre les 21 septembre 2015 et 29 mai 2016, absente pour motif de maladie pendant 249 jours, soit huit mois.

7) Entre septembre 2014 et mars 2016, Mme A______ a eu plusieurs entretiens avec le médecin conseil des TPG, le Docteur G______, attestés par quatre rapports adressés aux TPG en octobre 2014, mars et décembre 2015 et avril 2016. Son état de santé s'est détérioré pendant l'été 2015, ce qui a conduit les TPG à intervenir début octobre 2015 vu l'impact de ses absences sur le fonctionnement du service.

a. La situation d'absentéisme existant à la fin de l'été 2014 avait été investiguée par le Dr G______. Elle était liée à la situation de harcèlement dont Mme A______ avait été victime et qui avait conduit au départ de la personne responsable. La patiente ne considérait pas la situation réglée car d'autres protagonistes, dont son supérieur direct, avaient été impliqués dans la procédure et que leur comportement à son égard était toujours ressenti comme défavorable. Elle avait réalisé, lors de leur premier entretien mi-septembre 2014, que cette situation professionnelle, très difficile à supporter pour elle, générait une atteinte secondaire affectant de façon marquée son état de santé, rendant ses performances professionnelles et son assiduité aléatoires. Ceci justifiait ses absences itératives. Ils avaient convenu qu'un soutien thérapeutique était absolument nécessaire. Mme A______ avait alors organisé une prise en charge thérapeutique et indiqué au Dr G______, lors de leur deuxième entretien fin octobre 2014, avoir déjà eu plusieurs séances qu'elle qualifiait de très positives.

Ainsi, le Dr G______ concluait, dans son rapport du 30 octobre 2014, que Mme A______ était au bénéfice d'un traitement avec incapacité de travail pour lui permettre de se soigner et de récupérer. Le retour à son poste de travail devrait se préparer en relation avec son circuit thérapeutique et en tenant compte de l'affaire préalable de harcèlement qui n'avait pas été clôturée avec elle. Sa prise en charge était donc « active » et son médecin traitant d'alors, le Docteur H______, recevait copie du rapport afin d'améliorer la relation avec sa hiérarchie dès son retour au travail.

b. Le 2 mars 2015, lors de l'organisation du retour de Mme A______ à son poste de travail, le Dr G______ a confirmé aux TPG qu'elle était dans un état qui permettait cette reprise mais que celle-ci devait être bien organisée à l'interne « vu les aléas précédents ». Son médecin traitant, le Dr H______, était aussi favorable à cette reprise. La procédure de reprise et l'organisation des contacts à rétablir seraient abordées en accord avec Mme A______. Ceci « prendra[it] le temps qu'il faudra[it] » et il assurerait la couverture en arrêt maladie de cette période de temps entre le certificat établi par son médecin traitant et son retour effectif « organisé en toute sérénité ».

c. Le 6 octobre 2015, les TPG, sous notamment la plume du nouveau directeur du service " P______ ", Monsieur I______, ont formalisé leur entretien du jour précédent avec Mme A______ et indiqué qu'une visite chez leur médecin-conseil allait être organisée afin de les aider dans leur réflexion.

Ils avaient constaté une recrudescence d'absences entre juin et septembre 2015, qui avait des conséquences sur la bonne marche du service. Son poste de secrétaire de direction nécessitait une grande transversalité et impliquait une collaboration étroite avec de multiples intervenants. À chacune de ses absences, ils étaient contraints de redistribuer les tâches qui lui étaient attribuées à des collaborateurs d'autres services qui devaient les assurer en plus de leur travail. Ils souhaitaient donc rechercher avec elle des solutions permettant de gérer au mieux sa contribution au service tout en tenant compte d'un risque d'absence plus élevé que chez les autres collaborateurs. Ils lui proposaient de lui affecter des tâches « moins critiques » pour le fonctionnement du service. Ainsi, dans l'immédiat, ils l'avaient informée de son affectation temporaire au sein de l'unité « Q______».

d. Le Dr G______ avait rencontré Mme A______ le 19 novembre 2015 et adressé aux TPG son rapport du 16 décembre 2015.

La reprise de travail s'était correctement passée au début 2015, mais la patiente avait présenté, plus tard, une atteinte à sa santé indépendante de la situation antérieure qui avait conduit à une nouvelle incapacité de travail. Cette situation avait induit la mise en place d'un circuit de remplacement qu'elle avait très mal supporté et qu'elle avait superposé aux événements antérieurs lui faisant revivre le passé. Ceci était aussi aggravé car le circuit thérapeutique dont elle avait bénéficié auparavant n'était plus possible à la suite de son choix de renoncer à toute couverture de soins en Suisse. Elle n'était donc pas suivie médicalement, en tout cas pas dans un circuit permettant une gestion correcte de cette situation « de crise ». Une mise au point avec son supérieur direct, M. I______, était nécessaire tout en sachant qu'en l'absence d'un traitement stabilisant de fond, elle perdait une bonne partie de son objectivité ce qui ne ferait que compliquer la gestion de la situation. Il restait à disposition pour aider à démêler « cet écheveau complexe ».

e. Le Dr G______ avait rencontré Mme A______ le 16 mars 2016, objet de son rapport du 6 avril 2016 transmis aux TPG.

À son avis, Mme A______ « devrait pouvoir » reprendre des activités administratives car elle en avait les capacités et ne présentait pas de maladie pouvant être un obstacle majeur au travail de bureau. Toutefois, ses antécédents conflictuels avaient provoqué et motivé ses diverses incapacités de travail préalables. Le problème restait le même car elle n'avait pas encore pu dépasser ces conflits. Elle lui avait dit que les propositions reçues ne lui convenaient pas. À cela s'ajoutaient des facteurs personnels qui intervenaient aussi sur sa santé, ce qui ne simplifiait pas la situation mais l'aggravait. En outre, son circuit thérapeutique avait changé du fait de son déménagement. Il concluait qu' « [u]ne fois de plus, rien n'[était] un obstacle fondamental à la reprise de son travail une fois sa situation médicale stabilisée ».

8) D'après les évaluations portant sur la période de 2008 à 2013, produites par les TPG et dont seule une était signée par les parties, les prestations professionnelles de Mme A______ étaient partiellement satisfaisantes.

9) Le 30 mai 2016, M. C______, directeur alors du service « R______  », et le responsable « S______» ont confirmé à Mme A______ sa nouvelle activité temporaire, en tant que secrétaire, au sein du service précité dès cette date.

Les modalités de cette collaboration étaient précisées dans le courrier, notamment quant aux objectifs professionnels et personnels et aux dates des bilans à effectuer. Cette activité temporaire serait pérennisée en cas de satisfaction mutuelle à fin novembre 2016. À défaut, un retour au sein du service " P______ " dans l'équipe du « T______ » serait prévu, un éventuel accompagnement pour un reclassement externe pouvant être envisagé d'un commun accord.

10) Le 1er juin 2016, Mme A______ a pris sa nouvelle fonction consistant en l'exécution de tâches administratives liées au projet de construction du nouveau dépôt des TPG « En Chardon », dans le service « U______ » dirigé par Monsieur J______, chef de projets « V______» devenu responsable « U______ ». Son transfert dans ce poste d'assistante de projets est devenu définitif au 1er janvier 2017 sans changement salarial.

11) Bien que portant formellement sur la période de juillet 2013 à décembre 2016, l'évaluation, non signée, effectuée début 2017 a concerné les prestations fournies par Mme A______ à son nouveau poste de travail depuis juin 2016. Elles donnaient entière satisfaction à sa hiérarchie, notamment en termes de fiabilité dans l'exécution du travail et de respect des délais.

L'intéressée déclarait se sentir « épanouie » dans son travail depuis son changement d'affectation, ce que son responsable percevait dans le travail et l'investissement de cette collaboratrice. Celui-ci allait « même au-delà des exigences pour le poste » selon ledit responsable. La charge de travail était alors déjà importante, ce qui rendait la réalisation des objectifs professionnels fixés à l'intéressée particulièrement contraignante.

L'évaluation, non signée, des prestations professionnelles de Mme A______ pour l'année 2017 a confirmé, début 2018, qu'elle donnait pleine satisfaction à sa hiérarchie dans sa nouvelle fonction, tant s'agissant de la qualité de son travail que de son investissement et de sa motivation, et ce malgré l'augmentation de la charge de travail et les conditions peu propices à la concentration liées à l'openspace. Son responsable estimait qu'elle avait « toutes les qualités » pour poursuivre son activité sur le projet en cours et au sein du nouveau service.

12) Le 20 décembre 2017, les TPG, sous la plume de MM. C______ et J______, ont accepté la demande de Mme A______ concernant le télétravail à partir du 1er janvier 2018. À partir de cette date, elle pourrait pratiquer le télétravail selon l'arrangement convenu avec sa hiérarchie. Comme convenu, un suivi de réalisation serait effectué par son responsable direct qui planifierait également avec elle les jours de travail à domicile.

13) Depuis son retour au travail le 30 mai 2016, Mme A______ a eu, entre le 19 septembre 2016 et le 5 juillet 2018, quatorze périodes d'absence de courte durée, dont trois d'une durée d'une semaine, et deux absences d'une dizaine de jours, toutes pour maladie.

Dès le 6 juillet 2018 et hormis les 16 et 17 juillet 2018, elle a été dans l'incapacité complète de travailler pour maladie jusqu'au 13 octobre 2019, soit 15 mois environ (463 jours). Un cancer des poumons a été diagnostiqué en juillet 2018. Elle a été opérée en septembre 2018 avec une période post-opératoire difficile et un traitement de chimio- et radiothérapie en 2019. Cette atteinte à la santé de longue durée pour problème oncologique a été confirmée en février 2019 aux TPG par la Dre K______, médecin du travail et agissant dans cette affaire comme médecin-conseil des TPG.

14) Pendant l'année 2019, des entretiens ont eu lieu entre Mme A______ et les TPG, principalement représentés par Madame L______, conseillère « retour au travail », au sujet de l'évolution de son état de santé.

En janvier 2019, cette dernière a vivement recommandé à l'intéressée d'entreprendre les démarches auprès de l'assurance-invalidité (ci-après : AI).

Début octobre 2019, M. J______ a confirmé que les tâches de l'intéressée seraient adaptées à ses jours de présence et aux limitations fonctionnelles mentionnées par cette dernière, à savoir l'impossibilité d'écrire trop longtemps, les baisses de vue et d'ouïe.

15) Après une reprise d'activité à 40 % pendant quatre jours, elle n'a plus pu travailler pour cause de maladie du 18 octobre 2019 au 5 janvier 2020.

Le 21 octobre 2019, elle a informé son employeur qu'elle avait une grave pneumonie avec une toux lui causant de fortes douleurs dorsales et une grande fatigue. Selon son pneumologue, le « problème de pneumonie » serait présent tout au long de sa vie. Deux jours après, son état de santé ne s'était pas amélioré.

16) Le 24 octobre 2019, Madame M______, conseillère
RH-Technique des TPG, a demandé le changement de fonction de Mme A______ en « assistante administrative ».

17) Mi-novembre 2019, la Dre K______ a adressé un courriel à Mme L______ à la suite de son entretien du même jour avec Mme A______.

Son médecin l'avait remise en arrêt complet jusqu'à fin novembre en raison de la fracture de côte sur sa toux exacerbée au moment de sa reprise. Il n'avait pas encore rempli les questionnaires de l'AI ce qui posait problème. L'intéressée n'avait pas imaginé qu'émotionnellement, la reprise serait si dure. Les « propos de ses collègues, son directeur un peu bougon, [avaient] été très pénibles pour elle ». Face au souhait de reprendre à 50 % en décembre, elle lui avait conseillé de travailler les matins et d'être en repos les après-midis, ce qui était généralement plus favorable au suivi des travaux.

18) Fin novembre 2019, Mme L______ a appris de Mme A______ que sa santé n'était pas encore stabilisée et qu'elle avait plusieurs limitations fonctionnelles telles que douleurs, toux et fatigue. Elle voulait reprendre son travail mais ne savait pas quand et indiquait que sa reprise ne s'était pas très bien passée vu l'accueil reçu. Elle avait vu la Dre K______ qui lui avait conseillé de reprendre une activité en étant présente un peu tous les jours, par exemple les matins, de manière à améliorer son intégration dans l'équipe. Mme L______ a alors contacté l'AI.

19) Entre les 18 et 19 décembre 2019, un échange de courriels a eu lieu entre Mme M______, M. C______ et Monsieur N______, responsable du service « Infrastructures », au sujet de la reprise de travail à 50 % de Mme A______ dès le 6 janvier 2020.

a. Dans un premier courriel, Mme M______ a informé MM. J______ et C______ de la reprise d'activité ainsi que de sa discussion entre Mmes A______ et L______. Il ressortait de cette conversation qu'il « serait préférable que cette reprise se fasse hors projet En chardon et [que le] 50 % [de Mme A______] serait des demi-journées afin qu'elle puisse se reposer ». Il était envisageable pour Mme A______ de travailler au sein du service « Infrastructures » dirigé par
M. N______.

b. M. C______, ayant pour habitude de décider lui-même de l'affectation de ses collaborateurs mais « conscient de la dimension sociale de ce dossier », a accepté que Mme A______ travaille pour M. N______, qui lui transmettrait la liste des tâches à réaliser par Mme A______.

c. M. N______ a indiqué à Mme M______ la liste suivante des tâches pouvant être confiées à Mme A______ : l'établissement des demandes d'achat, la préparation des réponses aux autorisations de construire ; la prise de procès-verbaux de séances et l'établissement de comptes-rendus ; l'organisation de rendez-vous ; la réponse aux demandes de consultations des entreprises ; l'établissement des demandes de fouille ; le suivi administratif et le bilan des interventions de leurs prestataires ; le classement des dossiers.

20) Le 6 janvier 2020, Mme A______ a repris le travail dans un poste à 50 %, puis à 60 % entre les 20 janvier et 4 février 2020. Le poste a été adapté à ses limitations fonctionnelles et des tâches administratives, telles que la tenue de procès-verbaux de séances et la réalisation de copies de contrats contenant des centaines de pages, lui ont été confiées au sein du service « Infrastructures ».

Elle a d'abord travaillé deux jours entiers et une demi-journée d'affilée par semaine. Le 21 janvier 2020, elle a annoncé travailler les lundi et mardi toute la journée et les mercredi et jeudi uniquement le matin, sauf besoin de service.

21) Elle s'est retrouvée en incapacité complète de travail pour cause de maladie, attestée par certificat médical, du 5 au 9 février 2020.

22) Selon le rapport médical du 24 février 2020, la Dre K______ a estimé que Mme A______ pouvait effectuer son cahier des charges à un taux de 60 %, mais que pour des raisons de santé, une « fatiguabilité importante » pouvait survenir. À titre de limitations fonctionnelles, elle a signalé des adaptations auditives et ergonomiques ainsi que le besoin d'un siège bien adapté. Elle envisageait probable une reprise à 80 % dès le 15 mars 2020 puis, « selon tolérance », à 100 % dès fin avril 2020.

23) En mars 2020, Mme A______ a produit deux certificats médicaux établis le 11 mars 2020 par son médecin traitant, le Docteur O______. Ils attestaient que l'état de santé de Mme A______ avait nécessité un arrêt de travail pour deux périodes distinctes, à savoir du 10 au 23 février 2020 puis du 2 au
31 mars 2020. Le second certificat réservait l'évolution de la situation épidémiologique, termes suivis de l'indication suivante entre parenthèse « patiente à haut risque pour COVID 19 ».

24) L'intéressée a précisé, par courriel du 16 mars 2020 adressé à Mme M______, être entièrement disposée à faire du télétravail « si [elle] en [avait] la possibilité ». Cette dernière lui a alors indiqué que, selon le décompte des 720 jours, la fin de ses prestations pour maladie interviendrait fin juin 2020.

25) Le 18 mars 2020, Mme M______ a informé Mme A______ que M. N______ n'avait pas de travail à lui faire faire en télétravail pour le moment et que M. C______ n'avait pas de mission à lui confier. Elles restaient en contact.

26) Fin avril 2020, Mme M______ a invité Mme A______ à prendre impérativement et directement contact avec l'AI pour obtenir toutes les informations concernant l'instruction de son dossier. Début mai 2020, elle l'a à nouveau sollicitée à ce sujet afin de savoir si son médecin traitant avait fait le nécessaire auprès de l'AI car son dossier était bloqué par manque d'informations médicales.

27) Le 8 mai 2020, les TPG ont informé l'intéressée n'avoir reçu aucun certificat médical pour l'incapacité totale de travailler en avril 2020.

28) À cette même date, Mme M______ a envoyé un courriel intitulé « Postes ouverts ou prochainement ouverts » à quatre collègues afin de savoir s'il y avait des possibilités pour un reclassement dans un poste ouvert ou prochainement ouvert dans le domaine « Administratif ou Exploitation » à 100 % pour Mme A______, dont les limitations fonctionnelles, attestées par la Dre K______, étaient des limitations auditives, un risque de fatigue importante et le besoin d'un siège ergonomique adapté.

29) Le 11 mai 2020, Mme M______ a été informée que les TPG recherchaient un conseiller de vente en agence, ce qui impliquait de travailler dans un espace ouvert avec du bruit et peu compatible avec des états de fatigue, ainsi qu'un gestionnaire de sinistres pour le service juridique pour lequel était indispensable une expérience dans le domaine des assurances. Il n'y avait en outre pas de poste dans le service " P______ " correspondant au profil de Mme A______ tenant compte de ses limitations fonctionnelles.

30) Le 15 mai 2020, les TPG, sous la plume de M. C______ et de la directrice RH, ont notifié à Mme A______, avec copie à M. J______, leur intention de résilier ses rapports de travail en application de l'art. 71 du statut du personnel des TPG (ci-après : statut), moyennant le respect du délai de congé de trois mois.

Son état de santé non stabilisé, les arrêts de maladie récurrents consécutifs et les traitements médicaux étaient incompatibles avec une activité professionnelle à plein temps. Or, sa fonction exigeait une présence à temps plein dans l'entreprise, compte tenu notamment de l'importance stratégique du projet auquel elle avait participé et des tâches qui lui étaient demandées, telles que celles liées au classement des dossiers et à la prise de procès-verbaux. Elle avait été remplacée par une personne à 100 % à l'annonce de son incapacité de travail en 2018, d'abord de manière temporaire puis en contrat à durée déterminée, renouvelé vu la persistance de son absence. Dans ces circonstances, la poursuite des rapports de service n'apparaissait objectivement plus dans l'intérêt du bon fonctionnement de l'entreprise. La précarité de sa situation de santé, sans la rendre inapte dans sa fonction, portait considérablement atteinte aux modalités selon lesquelles elle pouvait l'exercer. L'instabilité du processus de convalescence ne permettait pas une projection claire et fiable quant à sa capacité de travail. Cette situation ne permettait plus de répondre aux besoins de l'entreprise compte tenu de sa fonction. Par ailleurs, son droit au salaire prendrait fin le 1er août 2020.

Un délai de dix jours lui était octroyé afin d'exercer son droit d'être entendue par écrit. Étaient aussi précisés dans ce courrier que les TPG avaient déposé une demande de détection précoce le 12 mars 2019 et que l'intéressée avait déposé une demande à l'AI le 11 juin 2019, démarche soutenue par l'employeur. Celui-ci l'avait encouragée, vu les complications rencontrées dans le traitement de son dossier auprès de l'AI, à sensibiliser son médecin traitant à l'importance de son rôle dans le succès de ses démarches auprès de cette assurance.

31) Les 22 et 25 mai 2020, Mmes A______ et M______ ont eu des échanges sur l'absence de certificats médicaux concernant les mois d'avril et mai 2020. Mme A______ ne comprenait pas ce qu'elle devait transmettre en plus du certificat spécifiant le « COVID 19 » du fait qu'elle était une personne à « haut risque », alors que d'autres collègues n'avaient pas à le fournir tous les mois.

Mme M______ lui a répondu avoir besoin, à la suite des « changements du 11 mai », que son médecin atteste qu'elle faisait partie du groupe de personnes vulnérables conformément à « l'ordonnance 2 », annexée à son message, depuis le 11 mai 2020. Le certificat remis début mars concernait la période du 2 mars au
10 mai 2020.

32) Le 27 mai 2020, le Dr O______ a attesté, par certificat médical, que l'état de santé de Mme A______ ne lui permettait pas de « se déplacer pour travailler pendant une durée imprévisible (durée liée à la situation sanitaire actuelle - pandémie COVID 19), mais [que] le télétravail [était] possible (travail à domicile) ».

33) Après que sa précédente mandataire, représentante d'un syndicat, et son avocat ont consulté son dossier fin mai et début juin 2020, Mme A______ a exercé son droit d'être entendue le 10 juin 2020 et formé opposition à son congé.

Faisant partie des personnes à risque en raison de son état de santé, elle ne pouvait pas se rendre sur son lieu de travail mais était entièrement disposée à faire du travail à domicile. Son incapacité de travail était uniquement due aux mesures prises pendant la crise sanitaire. Elle n'avait pas été entendue au sujet des démarches de reclassement entreprises par son employeur début mai 2020 et aucune procédure formelle de reclassement n'avait été ouverte. Les TPG n'avaient ainsi pas épuisé les « possibilités appropriées et raisonnables » en vue de son reclassement. Elle disposait d'un certificat médical attestant de sa capacité à travailler à distance. L'intention de licenciement était fondée sur l'art. 71 du statut, alors que des raisons médicales étaient invoquées, lesquelles exigeaient une procédure de reclassement. Il n'existait donc aucun motif dûment justifié pour mettre fin à ses rapports de service, étant rappelé qu'elle était apte à effectuer du télétravail, droit dont elle bénéficiait depuis le 1er janvier 2018. Elle était empêchée de valoriser « d'autres compétences et qualités » que celles que son atteinte à la santé ne lui permettait plus d'exploiter.

34) Le 3 juillet 2020, les TPG ont complété leur position exprimée dans leur courrier du 15 mai 2020 et octroyé un nouveau délai de dix jours à Mme A______ pour exercer son droit d'être entendue.

Depuis le 6 juillet 2018, elle était incapable de travailler durablement à 100 % malgré une « amorce éphémère de reprise à temps partiel en janvier et février 2020 », alors que son poste exigeait une occupation à plein temps. L'adaptation thérapeutique de son poste dès janvier 2020 faisait suite à sa longue incapacité de travail survenue le 6 juillet 2018. Elle visait avant tout à protéger sa santé. Elle était par définition temporaire et construite en coopération avec le médecin du travail. Elle ne correspondait pas à un changement de fonction à l'échelle de l'organisation de l'entreprise et n'entraînait aucune garantie d'embauche dans l'activité réalisée. Elle était évolutive et réalisée en fonction des réactions et des besoins de l'employé, des adaptations (tâches, horaires, modalités de travail) pouvant survenir pendant la reprise d'activité selon la situation médicale et les possibilités de l'entreprise. À cela s'ajoutait que l'entreprise avait fait preuve de patience et de souplesse quant à sa situation par l'adoption de plusieurs mesures, telles que son remplacement en 2018 afin que son poste soit occupé à temps plein, l'adaptation de son activité à ses limitations fonctionnelles depuis janvier 2020 et la libération de ses tâches pour la part résiduelle de sa capacité de travail conformément à l'ordonnance fédérale régissant la protection des mesures vulnérables en lien avec l'épidémie du Covid-19.

Quant à sa proposition de travailler à domicile, l'entreprise n'avait pas de tâches à lui proposer dans le contexte sanitaire existant. La modalité du télétravail, validée fin 2017, concernait sa fonction d'engagement et ne signifiait pas qu'il existait en toutes hypothèses du travail à fournir selon ce mode d'organisation. Sa proposition intervenait après une incapacité de travail de dix-huit mois, qui avait conduit l'entreprise à adapter son organisation afin de pallier son absence et à lui proposer un poste adapté à ses limitations fonctionnelles. Le contexte de travail de décembre 2017 n'était pas le même que celui de mars 2020.

Entre janvier et juillet 2018, elle n'avait fait du télétravail qu'à une seule reprise, le 7 mai 2018. Cette rareté traduisait la difficulté à organiser le travail selon ce mode d'organisation ainsi que l'absence de processus structuré en place avant son incapacité de travail. En outre, le poste adapté à ses limitations fonctionnelles en janvier 2020 se prêtait beaucoup moins à la réalisation de tâches effectuées à distance puisqu'il impliquait notamment la prise de procès-verbaux et l'archivage de dossiers. Ce type de poste avait pour vocation de maintenir l'employabilité et le lien professionnel avec le collaborateur davantage dans son intérêt que dans celui de l'entreprise, mais ne devait pas aboutir à porter préjudice au fonctionnement de l'entreprise. Dans son cas, l'adaptation requise pour transformer le poste aménagé en janvier 2020 en un poste de télétravail tombait particulièrement mal, à un moment où l'organisation de l'entreprise avait déjà été pensée sans savoir qu'il fallait tenir compte de sa disponibilité à distance.

Des négligences liées à son devoir d'information, dans l'envoi de certificats médicaux, lui étaient reprochées. En mars 2020, ses absences pour le mois de février 2020, période antérieure à l'épidémie du Covid-19, n'avaient pas été régularisées. Le 14 mai 2020, la définition des personnes vulnérables avait évolué de sorte que l'entreprise s'était, pour toutes les personnes annoncées comme telles, assurée que l'isolement préventif était toujours justifié et qu'elle lui avait demandé de régulariser sa situation, ce à quoi elle avait répondu en s'offusquant. Elle avait envoyé son justificatif établi le 27 mai 2020 en annexe de son courrier du 10 juin 2020. Depuis le 22 juin 2020, les mesures spéciales prises pour isoler de manière préventive les personnes vulnérables avaient été abrogées. Elle était ainsi censée être revenue sur site, au plus tard, depuis cette date. Une communication ad hoc avait été diffusée sur intranet et par communiqué spécial envoyé sur les messageries de tout le personnel. Or, tel n'était pas son cas en date du 2 juillet 2020. Elle transférait les informations pertinentes, notamment celle relative au changement de son nom de famille, à son employeur avec légèreté, ce qui n'était pas nouveau.

L'offre de ses services était en contradiction avec les certificats médicaux présentés. L'entreprise s'interrogeait sur la compatibilité des éléments successifs suivants. Le 5 février 2020, elle avait informé une collègue de son incapacité de travail pour quinze jours, mais annonçait le même jour son retour au travail pour cinq jours plus tard, soit le 10 février 2020. Or, d'une part, le certificat d'incapacité de travail daté du 5 février 2020 et portant sur la période du
5 au 9 février 2020 avait été transmis le 16 mars 2020 seulement. D'autre part, elle n'avait pas repris le travail le 10 février comme annoncé, mais le 24 février 2020. Cette absence avait été justifiée par un certificat médical daté du
11 mars 2020 et remis, après une relance, le 16 mars 2020.

Bien que le licenciement fût fondé sur l'art. 71 du statut, l'entreprise avait, conformément au principe de proportionnalité, cherché une alternative à un licenciement. Il n'existait pas de poste compatible avec l'incertitude de sa situation médicale et de son évolution. L'entreprise n'avait renoncé à aucun aménagement pour favoriser le maintien de son emploi en son sein, et ce malgré le fait que l'intensité de son obligation de reclassement était aussi fonction de l'investissement et du comportement de Mme A______, aspects « loin[s] d'être irréprochables ».

35) Le 10 juillet 2020, Mme A______ a contesté les arguments de son employeur les qualifiant de « purement chicaniers » et persisté dans sa position.

En particulier, ses limitations fonctionnelles n'avaient pas été prises en compte. Elle devait prendre les procès-verbaux des séances alors qu'elle était dans l'incapacité d'écrire plusieurs minutes d'affilée. Elle devait faire les copies de contrats de plusieurs centaines de pages, alors qu'elle ne pouvait pas se permettre de manipuler de telles charges. Les tâches confiées, notamment l'archivage de dossiers, étaient des « missions physiques » incompatibles avec ses limitations fonctionnelles. Après acceptation du poste, elle avait dû adapter ses horaires aux séances. L'adaptation de son poste aurait pu « largement » être organisée en mars 2020 sans porter préjudice au fonctionnement de l'entreprise vu la période de pandémie liée au Covid-19 et le nombre d'employés des TPG en télétravail alors. En février 2020, elle avait souffert d'une tendinite de l'épaule et du coude due aux « multiples » tenues de procès-verbaux et aux ports de classeurs. Elle avait été traitée « sans égards et en violation des droits de sa personnalité ». Elle alléguait avoir été informée en octobre 2019 par des collègues que le directeur « ne lui rendrait pas sa place de travail » et qu'il existait des bruits au sujet d'un « éventuel licenciement à venir » la concernant.

36) Par décision du 17 juillet 2020, déclarée exécutoire nonobstant recours, les TPG ont mis un terme aux relations de travail avec Mme A______ pour
le 31 octobre 2020 en application de l'art. 71 du statut, pour les raisons exposées dans les précédents courriers, la poursuite des rapports de travail ne s'inscrivant plus dans l'intérêt de l'entreprise.

Ses limitations fonctionnelles persistantes portaient atteinte durablement et significativement à sa capacité de travail, l'empêchant de réaliser son activité d'engagement à plein temps comme l'exigeaient les besoins du service. Ses propos confirmaient que le pronostic espéré par la Dre K______ dans son rapport du 24 février 2020 ne s'était pas réalisé. Cette dernière y signalait que les activités propres à son cahier des charges étaient envisageables à un taux réduit et moyennant des adaptations principalement auditives et ergonomiques. Parmi ces activités figuraient notamment la prise de procès-verbaux et le classement de dossiers. La question d'une aggravation de ses difficultés se posait vu ses allégations quant à son incapacité à écrire plusieurs minutes d'affilée et à manipuler des classeurs. Dans ces circonstances, elle ne pouvait pas assumer les fonctions de conseillère de vente en agence ou de gestionnaire de sinistres pour le service juridique. Le télétravail apparaissait aussi en contradiction avec la description de son état de santé dont ils n'avaient connaissance que dans la mesure nécessaire au traitement de sa situation professionnelle en raison de la protection des données et du respect du secret médical.

Les règles concernant l'envoi des certificats médicaux lui étaient rappelées, de même que la fin au 1er août 2020 de son droit au salaire en cas de maladie. Elle était invitée à clarifier rapidement sa situation car ils n'avaient pas de certificat médical attestant de son incapacité de travail après celui daté du 27 mai 2020, la durée maximale d'un certificat médical étant d'un mois.

37) Le 23 juillet 2020, le médecin traitant de Mme A______ a prolongé l'arrêt de travail établi le 26 mai 2020 en certifiant que son état de santé ne lui permettait pas de se déplacer pour travailler pendant une durée imprévisible, liée à la situation sanitaire relative à la pandémie Covid-19, mais que le travail à domicile (télétravail) était possible. Il n'y avait pas d'autre indication.

38) Le 2 septembre 2020, Mme A______ a demandé des explications quant à sa fiche de salaire du mois d'août 2020 indiquant un taux d'occupation de 0 % et un salaire mensuel de CHF 270.85. Son salaire mensuel brut était de CHF 8'396.60, somme qu'elle avait perçue jusqu'à fin juillet 2020.

39) Par acte expédié le 14 septembre 2020, Mme A______ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : chambre administrative) contre la décision de licenciement en concluant principalement à sa nullité, subsidiairement à son annulation et à sa réintégration, plus subsidiairement au versement d'une indemnité correspondant à huit mois du dernier traitement brut annuel avec intérêts à 5 % par an dès le 1er novembre 2020. À titre de mesures provisionnelles, elle a conclu à la restitution de l'effet suspensif au recours et au paiement de son salaire pour les mois d'août à octobre 2020.

Elle réclamait son plein salaire, à tout le moins jusqu'à la fin de ses rapports de travail, dans la mesure où l'arrêt de travail en raison de son cancer avait duré 227 jours, que celui du 14 octobre 2019 résultait d'une maladie différente, de même que celui du 5 février 2020 causé par une tendinite de l'épaule. Il y avait ainsi eu une « interruption d'absence » à ces trois dates. Par ailleurs, son statut de personne « à haut risque [en cas] de contamination du virus COVID-19 » avait été attesté par certificat médical et l'empêchait de se déplacer pour travailler mais lui permettait d'effectuer du télétravail. Elle n'était plus en arrêt depuis le
27 mai 2020, date à partir de laquelle elle avait offert ses services sans que son employeur ne lui fournisse des tâches.

Elle invoquait une violation de son droit d'être entendue, faute d'avoir été « auditionnée » sur la question de la fin des rapports de travail et de ne pas avoir pu s'exprimer sur la démarche et les opportunités de reclassement au sein des TPG.

Le licenciement ne reposait sur aucun motif justifié. Elle reprochait aux TPG de se fonder sur l'art. 71 du statut alors qu'ils invoquaient des motifs liés à son état de santé, hypothèse couverte par l'art. 69 du statut, ce qui les obligeait à faire « tout ce qui pouvait être raisonnablement exigé d'[eux, soit les TPG] pour reclasser la recourante ». Ils avaient manqué à cette obligation, faute de lui avoir proposé des mesures telles qu'un stage d'évaluation, des conseils en orientation, des mesures de formation et d'évolution professionnelles ou un accompagnement personnalisé. Ils ne l'avaient pas interpellée sur les postes mentionnés dans les échanges de courriels de début mai 2020, qu'elle qualifiait « d'une soi-disant et au demeurant mince tentative de reclassement ». Violant l'art. 69 du statut, le licenciement était contraire au droit. Il devait aussi être annulé dans l'hypothèse de l'art. 71 du statut pour les trois motifs suivants. Les TPG auraient pu prendre une mesure moins incisive, de sorte que le licenciement violait le principe de proportionnalité. Il n'était pas fondé sur un motif au sens de l'art. 71 al. 2 du statut et était abusif au sens de l'art. 71 al. 3 du statut.

Elle estimait que son congé était fondé sur sa maladie qui avait été causée par les TPG et ce tant s'agissant de l'épisode de mobbing susévoqué que lors de son retour en octobre 2019 où elle avait été très mal reçue par son employeur et des collègues lui avaient rapporté qu'elle serait licenciée. Son arrêt de travail de février 2020 dû à une tendinite de l'épaule et du coude résultait des multiples tenues de procès-verbaux et du port de classeurs sur son lieu de travail, alors qu'elle avait des limitations fonctionnelles liées aux opérations subies, notamment une limitation de la motricité de son bras droit qui l'empêchait de porter des choses lourdes. La réorganisation intervenue dès le 1er juin 2016 avait grandement contribué à sa mise à l'écart et à de nombreuses dépressions. Les TPG avaient d'emblée refusé sa proposition de faire du télétravail. Ils ne pouvaient pas se prévaloir de leurs propres « dysfonctionnements » pour avancer un motif objectif justifiant son licenciement. Depuis le 27 mai 2020, elle était apte « à travailler en télétravail » ce dont elle avait le droit dès le 1er janvier 2018. Les TPG n'avaient pris aucune mesure pour lui permettre de conserver son emploi, alors que l'adaptation de son poste ne portait pas préjudice au fonctionnement de l'entreprise, vu la période de pandémie et le recours alors étendu au télétravail. Ils n'avaient pas veillé au respect de sa personnalité.

40) Le 19 octobre 2020, la présidence de la chambre administrative a rejeté la requête de restitution de l'effet suspensif et de mesures provisionnelles tendant au versement des salaires d'août à octobre 2020.

41) Les TPG ont conclu au rejet du recours, en s'opposant à la réintégration de la recourante.

42) Par décisions du 6 novembre 2020, l'office de l'assurance-invalidité pour les assurés résidant à l'étranger (ci-après : OAIE) a mis Mme A______ au bénéfice d'une rente entière d'invalidité du 1er décembre 2019 au 31 janvier 2020, puis d'un quart de rente d'invalidité dès le 1er février 2020.

Vu son emploi à plein temps et sa totale incapacité de travail dès le 18 juillet 2018, elle avait le droit à une rente entière dès le 18 juillet 2019. Celle-ci ne pouvait être versée qu'à partir de décembre 2019, sa demande datant du
11 juin 2019. Comme son état de santé s'était amélioré depuis le 20 janvier 2020, son incapacité de travail était de 40 %, de même que son taux d'invalidité qui se confondait avec son taux d'incapacité de travail.

43) La recourante a persisté dans ses conclusions en demandant le versement de son salaire jusqu'à octobre 2020. Cette conclusion au fond, prise au stade de la réplique, a été considérée irrecevable par les TPG qui ont maintenu leur position.

44) Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 89 al. 1 du statut, les compétences de l'ancien Tribunal administratif ayant été reprises par la chambre administrative ; art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a et art. 63 al. 1 let. b de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Indépendamment de son caractère tardif, la conclusion en paiement du salaire est irrecevable, car elle est exorbitante au présent litige circonscrit par la décision querellée et limité au bien-fondé du licenciement litigieux.

3) Le présent litige porte sur la question de savoir si le licenciement litigieux est conforme au droit, en particulier au statut, texte légal principalement applicable in casu (art. 2 du statut). En effet, la fin des rapports de travail n'est traitée ni dans le règlement d'application du statut du personnel du 1er janvier 1999, ni dans les règlements particuliers des TPG, étant précisé que l'art. 6 al. 2 du règlement de l'analyse des prestations et objectifs professionnels (APOP - R 13) prévoit qu'en cas de prestations insuffisantes et insatisfaisantes (hypothèse non réalisée in casu), la priorité est donnée à l'identification et à la mise en oeuvre des actions d'amélioration nécessaires pour permettre aux employés d'améliorer leurs prestations dans un délai réaliste.

Le principal reproche avancé par la recourante à l'encontre de la décision litigieuse est l'absence de motif justifiant son licenciement. En outre, elle se plaint d'une mauvaise application des dispositions statutaires. L'argumentation de son employeur portant sur son état de santé, seul l'art. 69 du statut entrerait en ligne de compte, à l'exclusion de l'art. 71 du statut, ce qui l'obligerait à la reclasser en son sein. Par ailleurs, elle estime son employeur responsable des maladies ayant entraîné ses différentes incapacités de travail liées au mobbing subi de la part de son ancienne collègue et constaté fin 2012, à l'échec de sa reprise d'activité en octobre 2019 après son cancer et à son problème de santé de début février 2020 (tendinite du coude et de l'épaule) qui serait dû au non-respect de ses limitations fonctionnelles par son employeur.

a. Selon l'art. 69 du statut, si, pour des raisons médicales, un employé ne peut plus exercer sa fonction et qu'il s'est avéré impossible de le reclasser dans l'entreprise, l'autorité d'engagement peut mettre fin aux rapports de travail (al. 1). Les raisons médicales doivent être dûment établies par le médecin traitant de l'employé, en collaboration avec le médecin-conseil désigné par la direction (al. 2). L'art. 68 al. 2 let. d du statut prévoit un délai de congé de trois mois pour la fin d'un mois dès la dixième année.

L'art. 71 du statut régit la fin des rapports de travail pour un motif justifié. Selon le premier alinéa de cette disposition, la direction peut mettre fin aux rapports de service pour des « motifs dûment justifiés » en respectant les délais de congé. Est considéré comme « dûment justifié », tout motif démontrant que la poursuite des rapports de service n'est pas, objectivement, dans l'intérêt du bon fonctionnement de l'entreprise (art. 71 al. 2 du statut). Aucun motif abusif, au sens de l'art. 336 du code des obligations, ne peut être considéré comme justifié (art. 71 al. 3 du statut).

Est notamment abusif au sens de l'art. 336 de la loi fédérale du
30 mars 1911, complétant le Code civil suisse (CO, Code des obligations - RS 220), un congé donné par une partie : pour une raison inhérente à la personnalité de l'autre partie, à moins que cette raison n'ait un lien avec le rapport de travail ou ne porte sur un point essentiel un préjudice grave au travail de l'entreprise (al. 1 let. a) ; en raison de l'exercice par l'autre partie d'un droit constitutionnel, à moins que l'exercice de ce droit ne viole une obligation résultant du contrat de travail ou ne porte sur un point essentiel un préjudice grave au travail dans l'entreprise (al. 1 let. b) ; seulement afin d'empêcher la naissance de prétentions juridiques de l'autre partie, résultant du contrat de travail (al. 1 let. c) ; parce que l'autre partie fait valoir de bonne foi des prétentions résultant du contrat de travail (al. 1 let. d).

b. Selon la jurisprudence de la chambre de céans, l'art. 71 du statut équivaut au licenciement pour motif fondé prévu par les art. 21 al. 3 et 22 de la loi générale relative au personnel de l'administration cantonale, du pouvoir judiciaire et des établissements publics médicaux du 4 décembre 1997 (LPAC - B 5 05). Comme pour les fonctionnaires de l'administration cantonale, il n'est pas imposé aux TPG de démontrer que la poursuite des rapports de service est rendue impossible, mais uniquement qu'elle n'est plus compatible avec le bon fonctionnement de l'entreprise. L'intérêt public au bon fonctionnement des TPG sert en effet de base à la notion de motif dûment justifié qui doit exister pour justifier un licenciement en application de l'art. 71 du statut (ATA/1839/2019 du 20 décembre 2019 consid. 7c et les arrêts cités).

c. En vertu de l'art. 72 du statut, intitulé « Effets du licenciement ordinaire injustifié », s'il retient que le licenciement ne repose pas sur un motif justifié, le juge peut proposer à l'entreprise la réintégration du salarié. Si l'entreprise s'y oppose ou s'il renonce à une telle proposition, le juge fixera une indemnité dont le montant ne peut être inférieur à un ni supérieur à huit salaires mensuels (al. 1). L'employé qui entend demander l'indemnité prévue à l'alinéa précédent doit faire opposition au congé par écrit auprès de l'autre partie au plus tard jusqu'à la fin du délai de congé. Si l'opposition est valable et que les parties ne s'entendent pas pour maintenir les rapports de service, l'employé doit agir par voie d'action en justice dans les 180 jours à compter de la fin du contrat, sous peine de péremption (al. 2).

d. En matière de rapports de service, l'employeur public dispose d'un large pouvoir d'appréciation, de sorte que la chambre administrative ne peut intervenir qu'en cas de violation du droit, y compris d'abus ou d'excès du pouvoir d'appréciation, ou de constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (art. 61 al. 1 let. a et b LPA).

e. Les rapports de service étant soumis au droit public, leur résiliation doit respecter les principes constitutionnels généraux, notamment les principes de la légalité, de l'égalité, de la proportionnalité, de la bonne foi, de l'interdiction de l'arbitraire, lors de la fin des rapports de travail des employés (ATA/1839/2019 du 20 décembre 2019 consid. 7d et les références citées).

f. Le principe du reclassement est l'une des expressions du principe de la proportionnalité. Il impose à l'État de s'assurer, avant qu'un licenciement ne soit prononcé, qu'aucune mesure moins préjudiciable pour l'administré ne puisse être prise (art. 36 al. 3 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du
18 avril 1999 - Cst. - RS 101 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_309/2008 du
28 janvier 2009 consid. 2.2 ; ATA/78/2020 du 28 janvier 2020 consid. 4a ; ATA/909/2015 du 8 septembre 2015 consid. 9d).

Il s'agit tout d'abord de proposer des mesures dont l'objectif est d'aider l'employé à retrouver ou maintenir son « employabilité », soit sa capacité à conserver ou obtenir un emploi, dans sa fonction ou dans une autre fonction, à son niveau hiérarchique ou à un autre niveau. Avant qu'une résiliation ne puisse intervenir, différentes mesures peuvent être envisagées et prendre de multiples formes. À titre d'exemples, on pense au certificat de travail intermédiaire, au bilan de compétence, à un stage d'évaluation, aux conseils en orientation, aux mesures de formation et d'évolution professionnelles, à l'accompagnement personnalisé, voire à « l'outplacement ». Il s'agit ensuite de rechercher si une solution alternative de reclassement au sein de la fonction publique cantonale peut être trouvée. En contrepartie, la garantie du niveau salarial atteint en cas de changement d'affectation a été abrogée (MGC 2005-2006/XI A 10420 ; ATA/78/2020 du 28 janvier 2020 consid. 4a ; ATA/1067/2016 du 20 décembre 2016 consid. 7).

Selon la jurisprudence, lorsque la loi prescrit à l'État de ne pas licencier une personne qu'il est possible de reclasser ailleurs, elle ne lui impose pas une obligation de résultat, mais celle de mettre en oeuvre tout ce qui peut être raisonnablement exigé de lui. En outre, l'obligation de l'État de rechercher un autre emploi correspondant aux capacités du membre du personnel dont le poste est supprimé se double, corrélativement, d'une obligation de l'employé, non seulement de ne pas faire obstacle aux démarches entreprises par l'administration, mais de participer activement à son reclassement (ATA/1839/2019 du 20 décembre 2019 consid. 11a ; ATA/298/2016 du 12 avril 2016 consid. 5b).

Dans un cas où un employé n'était plus apte à exercer sa fonction de conducteur de bus, il a été admis qu'en application de l'art. 69 al. 1 du statut, les TPG avaient l'obligation de mettre en oeuvre tout ce qui pouvait être raisonnablement exigé d'eux pour le reclasser (ATA/679/2017 du 20 juin 2017 consid. 7, non remis en cause sur ce point par l'ATA/112/2019 du 5 février 2019 à la suite de l'arrêt du Tribunal fédéral 8C_541/2017 du 14 mai 2018).

4) Il convient d'abord de cerner les faits pertinents pour l'issue du litige, vu les arguments des parties faisant largement référence à l'état de santé de la recourante.

Certes, cette dernière a subi une grave atteinte à sa santé lors de ses premières années au sein des TPG, du fait du mobbing dont elle a fait l'objet de la part de son ancienne collègue. Toutefois, outre le fait que cet épisode a été clarifié fin 2012, les TPG ont depuis prêté une attention particulière et bienveillante à la situation de l'intéressée, comme le révèlent les quatre constats médicaux susmentionnés du Dr G______ établis entre septembre 2014 et mars 2016. À ce sujet, ce médecin soulignait, dans son dernier rapport, qu'en dépit du temps écoulé, l'intéressée n'avait pas pu dépasser les conflits du passé, qu'elle ne présentait pas de maladie empêchant le travail de bureau, son retour au travail dépendant d'une situation médicale stabilisée et qu'elle ne bénéficiait plus du même circuit thérapeutique du fait de son déménagement en France. Les TPG ont suivi les conseils de leur médecin conseil, notamment en veillant début 2015 à bien organiser « à l'interne » la reprise de travail de l'intéressée. Or, dans son rapport de décembre 2015, ledit médecin a relevé qu'à la suite d'une maladie indépendante du mobbing subi, survenue en septembre 2015, la recourante avait mal supporté le circuit de remplacement qu'elle avait superposé aux événements passés. Ainsi, début 2016, l'employée était toujours très marquée par le harcèlement psychologique vécu entre 2008 et 2012, mais sa prise en charge thérapeutique, décisive pour lui permettre de garder son objectivité, avait changé pour des motifs d'ordre privé.

Après cette longue période douloureuse, l'intéressée a été, avec son accord, transférée au poste d'assistante de projet lié à la construction du nouveau dépôt des TPG, terminé en été 2020. Elle a ainsi changé de service le 1er juin 2016 et a eu un nouveau responsable direct, M. J______. Ce changement d'affectation lui a donné un nouvel élan professionnel couronné de succès, comme le démontrent ses évaluations effectuées début 2017 et début 2018. Ainsi, il peut être admis qu'à tout le moins dès le 1er juin 2016, les intimés ont su prendre les mesures idoines à la suite du mobbing. Cet événement passé, s'il ne fait pas de doute qu'il a profondément marqué l'intéressée, a connu un dénouement positif. Il ne s'agit ainsi pas d'un fait pertinent dans le cadre du présent litige.

5) Il y a ensuite lieu de distinguer quatre contextes postérieurs à la découverte du cancer de la recourante en juillet 2018. Tout d'abord, pendant l'absence liée à cette maladie, aucun reproche n'est fait aux TPG. Ces derniers ont notamment attiré son attention, dès janvier 2019, sur les démarches à entreprendre auprès de l'AI. En revanche, trois difficultés apparaissent à partir d'octobre 2019, moment de la première reprise d'activité après cette maladie.

a. Mi-octobre 2019, la recourante a tenté de reprendre son activité professionnelle, après que M. J______ avait accepté d'adapter ses tâches aux limitations fonctionnelles qu'elle avait mentionnées début octobre 2019, notamment l'impossibilité d'écrire trop longtemps, lors d'un entretien réunissant ces derniers ainsi que Mmes M______ et L______, comme cela ressort de la note d'entretien produite sous pièce 41 de l'autorité intimée. Or, quatre jours après sa reprise, l'employée s'est retrouvée en incapacité de travail pour cause de maladie. La Dre K______ a informé Mme L______ que cette incapacité était due à une fracture de côte sur sa toux exacerbée et que la reprise avait été émotionnellement dure pour la recourante, confrontée à des propos « pénibles » de ses collègues et à un « directeur un peu bougon ». Dans ces circonstances et contrairement à l'avis de la recourante, l'échec de cette reprise professionnelle ne peut être imputé aux TPG.

b. À la suite de cette première tentative, Mme L______ a appris de la recourante, lors de l'entretien téléphonique de fin novembre 2019, que celle-ci avait plusieurs limitations fonctionnelles à savoir « douleurs, toux, fatigue etc. », mentionnées dans la note y relative, produite sous pièce 44 de l'autorité intimée, et que sa reprise ne s'était pas très bien passée vu l'accueil reçu, non détaillé dans ladite note. Pour sa deuxième reprise, les TPG ont proposé à l'intéressée, dès
le 6 janvier 2020 et d'entente avec elle, de reprendre progressivement le travail dans un autre poste impliquant des tâches administratives au sein d'un autre service auprès d'un nouveau chef, M. N______. Ces tâches, détaillées dans un courriel de M. N______ de décembre 2019, étaient adaptées aux limitations fonctionnelles qu'elle avait annoncées fin novembre 2019 (douleurs, toux, fatigue). Parmi ces tâches figuraient entre autres la prise de procès-verbaux de séances, l'établissement de comptes-rendus et le classement de dossiers. La recourante s'est toutefois retrouvée, le 5 février 2020, en incapacité complète de travail pour maladie, attestée par un certificat médical couvrant la période
du 5 au 9 février 2020. Son absence du 10 au 23 février 2020 a été justifiée après coup, par un certificat médical établi le 11 mars 2020 par son médecin traitant.

Malgré ces deux incapacités de travail survenues lors de ses reprises en octobre 2019 et en février 2020, la Dre K______ a estimé, dans son rapport médical du 24 février 2020, que la recourante, assistante de projets, pouvait remplir son cahier des charges « actuel » à 60 %, soit un taux inférieur à son taux contractuel fixé à 100 %, mais qu'une « fatiguabilité importante » pouvait survenir pour des raisons de santé. À titre de limitations fonctionnelles, elle mentionnait des adaptations auditives et ergonomiques, en particulier la nécessité d'avoir un siège adapté, à l'exclusion d'une incapacité d'écrire plusieurs minutes d'affilée et de celle de porter de lourdes charges.

Ces deux dernières limitations sont invoquées par la recourante dans son écriture du 10 juillet 2020, après avoir été informée de l'intention de son employeur de la licencier. Ce n'est qu'alors que la recourante a indiqué à son employeur, sans certificat médical à l'appui, que lesdites tâches étaient incompatibles avec ses limitations fonctionnelles. Or, en dépit des limitations fonctionnelles qu'elle invoque, le médecin traitant de la recourante n'a mentionné dans aucun des certificats médicaux établis en mars, mai et juillet 2020 de
contre-indication à son activité de nature administrative, hormis le risque préjudiciable du Covid-19 sur sa santé. Par conséquent, la critique de la recourante concernant le non-respect de ses limitations fonctionnelles qui seraient à l'origine de sa maladie de février 2020, doit être écartée.

c. Après cette deuxième reprise professionnelle peu fructueuse, les parties ont été confrontées à une troisième difficulté indépendante de leur volonté, due au contexte sanitaire lié à la pandémie du Covid-19 et au semi-confinement intervenu en Suisse de mi-mars à juin 2020.

Bien que la recourante ait annoncé, le 16 mars 2020, à son employeur qu'elle pouvait faire du télétravail, une collaboratrice RH lui avait répondu que ni M. N______ ni M. C______ n'avaient du travail à lui confier à domicile, sans autre indication ni explication. Elle n'a pas reçu plus d'information à ce sujet jusqu'au courrier du 15 mai 2020, où elle a appris l'intention de son employeur de la licencier au motif que la fragilité de son état de santé était incompatible avec sa « fonction [qui] exige une présence à temps plein dans l'entreprise » vu l'importance stratégique du projet auquel elle participait et les tâches qui lui étaient demandées « notamment en lien avec le classement des dossiers et la prise de procès-verbaux ». Ce courrier était signé de M. C______ et la directrice RH. Par ailleurs, même si son retour en emploi a subi l'interférence de la première vague liée à l'épidémie du Covid-19, la recourante ne conteste pas avoir pu bénéficier des mesures de protection des personnes vulnérables ordonnées par les autorités suisses.

C'est à la lumière de l'ensemble de ces circonstances que doit être examinée la conformité au droit du licenciement litigieux, étant précisé qu'aucune partie ne conteste le fait que la recourante revête le statut de personne vulnérable au
Covid-19 après avoir souffert d'un cancer des poumons découvert en été 2018 et subi un long traitement en 2019.

6) La principale question à trancher a trait à l'identification du motif à l'origine du licenciement.

Quelle que soit la nuance que tentent de faire les TPG entre « la précarité de [la] situation de santé » de la recourante et l'absence de son « [inapt]itude [à exercer sa] fonction », il n'en demeure pas moins qu'il s'agit de motifs se rapportant à l'état de santé de la recourante. Certes, son comportement dénote certaines incohérences, telles que le fait d'avoir attendu juillet 2020 pour se plaindre de l'inadéquation des tâches qui lui avaient été confiées dès janvier 2020 et celui de ne produire un certificat médical pour son incapacité de travail survenue du 10 au 24 février 2020 que le 11 mars 2020, en même temps qu'un second certificat médical daté du même jour mais rétroagissant au 2 mars, et ce pour tout le mois de mars 2020, avec la réserve de « l'évolution de la situation épidémiologique (patiente à haut risque pour COVID 19) ». Toutefois, le besoin de protection de la recourante dû à sa vulnérabilité au Covid-19 n'est ni contestable, ni d'ailleurs contesté. Si des absences pour cause de maladie, qu'elles soient de longue durée ou de plus courte durée mais répétées, peuvent confronter l'employeur à des difficultés organisationnelles, celui-ci reste tenu de veiller au respect de la santé de sa collaboratrice. Ce n'est qu'aux conditions de l'art. 69 du statut, disposition visant spécialement les problèmes médicaux, que l'état de santé de l'employée est susceptible de conduire à un licenciement. Or, l'art. 69 al. 2 du statut exige que les raisons médicales soient « dûment établies par le médecin traitant de l'employé, en collaboration avec le médecin-conseil désigné par la direction ».

Après les deux incapacités de travail survenues lors des reprises d'activité en octobre 2019 et en février 2020, la Dre K______ a considéré, le 24 février 2020, la recourante apte à travailler, mais à un taux inférieur à son taux contractuel et avec les limitations fonctionnelles susévoquées, sans aucune référence au risque du Covid-19. Le 11 mars 2020, le médecin traitant de la recourante a préconisé un arrêt de travail, de manière rétroactive au 2 mars 2020, pour tout le mois de mars 2020, en raison de la situation sanitaire du Covid-19, sans mentionner la possibilité du télétravail. Or, même si le rapport médical du 24 février 2020 de la Dre K______ peut sembler être en contradiction avec celui du médecin traitant du 11 mars 2020, la recourante a annoncé, le 16 mars 2020, à son employeur être prête à travailler à domicile. Cette offre a été refusée par sa hiérarchie par l'intermédiaire de la collaboratrice RH. À la demande de l'employeur, le médecin traitant a confirmé, par les certificats des 27 mai et 23 juillet 2020, que pour des raisons médicales l'intéressée ne pouvait se rendre sur son lieu de travail, mais pouvait travailler. Dans ces circonstances, survenues dans le contexte exceptionnel des confinements imposés à la population française et suisse, il y a lieu de retenir que l'avis de la Dre K______ et celui du médecin traitant concordent en ce sens qu'ils reconnaissent tous deux à l'intéressée la capacité d'exercer une activité administrative sous réserve des limitations fonctionnelles susmentionnées. La prescription médicale de ne pas se déplacer à son lieu de travail doit, dans la présente affaire se déroulant lors de la première vague de la pandémie du Covid-19, être considérée comme une limitation d'ordre fonctionnel dans la mesure où elle a affecté les modalités de l'accomplissement de son travail et non sa capacité de travailler. Cette limitation a été certifiée par le médecin traitant de la recourante et les TPG ne l'ont jamais remise en cause.

Ainsi, les avis médicaux précités, concordants sur une période allant de fin février à juillet 2020, attestent de la capacité de travail de la recourante, sous réserve de certaines limitations fonctionnelles. Par conséquent, les TPG ne pouvaient pas recourir à l'art. 69 du statut pour licencier la recourante pour des motifs liés à son état de santé. En la licenciant pour ce motif alors que son inaptitude à travailler n'était pas médicalement établie conformément à l'art. 69 al. 2 du statut, les TPG ont violé l'art. 69 du statut. Dans la mesure où l'incompatibilité invoquée par les TPG à leur bon fonctionnement résulte de la « précarité » de l'état de santé de la recourante, ils ne pouvaient pas recourir à l'art. 71 du statut pour pallier la non-réalisation des conditions posées par l'art. 69 al. 1 et 2 du statut. Cela reviendrait à contourner la protection des employés contre les licenciements en cas de maladie, prévue par le statut des TPG. Dès lors, le licenciement litigieux ne repose pas sur un motif dûment établi, de sorte que le recours doit être admis sur ce point.

7) Il apparaît, par ailleurs, que la procédure de reclassement, deuxième condition de l'application de l'art. 69 al. 1 du statut et manifestation reconnue du principe de la proportionnalité imposant une alternative préalable au licenciement, n'a pas été correctement effectuée.

Le reclassement a pris la forme d'un envoi, le 8 mai 2020, d'un courriel par Mme M______ à quatre collègues pour savoir s'il existait un poste dans le domaine « Administratif ou Exploitation » à 100 % pour Mme A______, compatible avec les limitations fonctionnelles mentionnées le 24 février 2020 par la Dre K______. Aucune autre démarche n'a été entreprise par les TPG. En outre, la procédure de reclassement a été entreprise sans y associer l'intéressée, qui n'en a même pas été informée.

Cette manière de faire comporte, d'une part, une violation grave du droit d'être entendue de la recourante. Le fait qu'elle ne pouvait pas se déplacer sur site n'empêchait pas les TPG de la contacter par téléphone, courriel ou autre moyen technique et de discuter avec elle de la situation. D'autre part, le procédé des TPG conduit à rendre d'emblée vain le reclassement, alors qu'il s'agit d'une condition préalable au licenciement et expressément posée par l'art. 69 al. 1 du statut. En effet, il empêche toute création d'un espace de dialogue entre les parties, condition élémentaire du succès d'un reclassement. Un tel dialogue aurait in casu permis d'examiner les éventuels aménagements au sein de l'entreprise, envisageables par l'employeur et compatibles avec la nécessaire protection de la santé de l'employée dans le contexte sanitaire du Covid-19, en sollicitant le cas échéant l'avis du médecin traitant de la recourante et celui du médecin-conseil des TPG, afin de permettre à cette dernière de poursuivre une activité professionnelle aux TPG dans des conditions adéquates pour les deux parties. L'employeur aurait à tout le moins pu soutenir les démarches de son employée pour d'autres postes, que ce soit à l'interne ou auprès d'autres employeurs, à travers un accompagnement personnalisé pendant une durée appropriée, notamment en lui proposant un bilan de compétences ou un certificat de travail intermédiaire.

Le résultat de la démarche entreprise le 8 mai 2020 par les TPG n'y change rien. Cette démarche n'était pas particulièrement ciblée puisqu'elle a débouché sur deux propositions de postes auxquels le profil professionnel de la recourante ne répondait pas. En effet, le poste de gestionnaire de sinistres au sein du service juridique exigeait une expérience dans le domaine des assurances, expérience qui, à teneur du dossier, faisait défaut à la recourante. Le poste de conseiller de vente en agence requérait une présence sur site, ce qui était incompatible avec le besoin de protection de santé de la recourante au printemps 2020.

Par conséquent, les TPG ont non seulement violé le droit d'être entendue de la recourante, mais aussi enfreint l'art. 69 al. 1 du statut s'agissant du reclassement. Le recours doit donc aussi être admis sur ce point.

8) La décision litigieuse ne repose ainsi pas sur un motif justifié, étant précisé qu'aucun élément du dossier ne permet, pour le surplus, de conclure à un motif abusif au sens de l'art. 71 al. 3 du statut. La conclusion en nullité du congé sera donc rejetée.

9) Comme les TPG ont annoncé ne pas vouloir réintégrer la recourante, il convient, conformément à l'art. 72 al. 1 du statut, de fixer le montant de l'indemnité dont la fourchette se situe entre un et huit salaires mensuels.

a. Le statut ne prévoit pas les critères applicables à la fixation de cette indemnité. Dans sa jurisprudence en matière de fixation d'une indemnité en cas de licenciement d'agents publics, la chambre de céans tient compte de l'ensemble des circonstances et les apprécie sans donner une portée automatiquement prépondérante à certains aspects (ATA/112/2019 du 5 février 2019 consid. 4f ; ATA/587/2018 du 12 juin 2018 consid. 6a). Cette jurisprudence a été confirmée par le Tribunal fédéral (arrêts du Tribunal fédéral 8C_472/2014 du 3 septembre 2015 consid. 11.2 ; 8C_421/2014 du 17 août 2015 consid. 3.4.2 ; 8C_436/2014 du 16 juillet 2015 consid. 9.2).

b. Dans sa casuistique, la chambre administrative a octroyé à l'employé d'un établissement public autonome une indemnité de deux mois de traitement dans une situation où le licenciement, intervenu en période probatoire après deux ans et trois mois de service, était contraire au droit en raison d'une violation du droit d'être entendu, mais où l'intéressé avait pu s'exprimer plusieurs fois. Pour le surplus, il n'avait pas les compétences pour continuer à travailler à son poste, et la résiliation de ses rapports de service n'était pas critiquable sur le fond (ATA/590/2016 du 12 juillet 2016). Dans une autre espèce, les TPG n'avaient pas respecté le droit d'être entendu de l'intéressé avant son licenciement. L'employé avait plus de onze ans de service à son acquis. Les TPG avaient respecté la procédure du reclassement. L'indemnité avait été fixée à trois mois (ATA/112/2019 du 5 février 2019).

L'indemnité maximale de huit mois a été octroyée à une employée dont le licenciement n'était pas fondé, les critiques de son travail résultant de sa position hiérarchique floue et de l'absence de consultation en temps voulu au sujet d'un rapport d'audit. La restructuration de son poste avait impliqué une perte de responsabilités et, finalement, de son emploi. L'intéressée était âgée de 56 ans au moment du licenciement et n'avait pas eu accès à l'entier de son dossier, au demeurant particulièrement mal tenu. Elle avait travaillé au sein des TPG pendant sept ans et ceux-ci avaient, par deux fois, tenté de trouver une solution, en ayant soumis des offres à l'intéressée (ATA/109/2018 du 6 février 2018).

Dans une affaire plus récente, l'indemnité maximale de huit mois a également été accordée (ATA/929/2020 du 22 septembre 2020 consid. 2). L'intéressé, employé des TPG pendant onze ans et âgé de 40 ans au moment de son licenciement, n'avait, sous réserve d'un emploi temporaire de trois mois, pas retrouvé de travail. Les certificats de travail intermédiaires étaient élogieux et ses deux évaluations positives. L'ensemble des motifs invoqués à l'appui du licenciement a été considéré par la chambre de céans comme étant infondé (ATA/480/2020 du 19 mai 2020). Si les problèmes de santé de l'employé et les absences en résultant ont pu induire, pour l'employeur, des mesures de réorganisation et des inquiétudes relatives au bon fonctionnement du service auquel le travailleur était affecté, il n'en demeure pas moins que la chambre de céans a retenu que ce motif de licenciement n'existait plus au moment de celui-ci. Celle-ci a aussi relevé que l'employeur n'avait pas suivi la procédure relative à la fin des rapports de travail pour raisons médicales. Le refus de réintégration a été, partiellement, motivé par la perte de confiance de l'employeur due aux problèmes de santé du travailleur, soit l'un des motifs invoqués à la base du licenciement précisément écarté par la chambre de céans.

c. En l'espèce, la recourante, âgée de 47 ans au moment du licenciement, était alors au service des TPG depuis douze ans. Après l'épisode lié au mobbing qu'elle a subi de sa collègue pendant quatre ans et des conséquences y relatives, elle a pu et su rebondir, dès juin 2016, en donnant pleinement satisfaction à sa hiérarchie dans le poste d'assistante de projet, malgré la charge importante de travail y relative. Elle se retrouve dans la présente situation à la suite de deux événements malheureux indépendants de la volonté des parties, à savoir l'absence de longue durée due au cancer des poumons diagnostiqué en 2018 et l'empêchement de travailler sur site en raison du risque du Covid-19 pour sa santé. Dans ces circonstances particulières, il est particulièrement choquant d'avoir procédé au licenciement de la recourante en raison de la fragilité de son état de santé, sans s'assurer de manière fiable et certaine, au moyen d'avis médicaux, que sa santé l'empêchait de travailler. À cela s'ajoute la grave violation de son droit d'être entendue, qui a en outre conduit à un reclassement d'emblée dépourvu de chance de succès, en raison de la mise à l'écart de l'intéressée par les TPG et de l'inadéquation de la démarche de recherches de postes.

En outre, il y a aussi lieu de tenir compte du comportement de la recourante, qui a parfois manqué de rigueur et de cohérence, ce qui a entamé la relation de confiance de son employeur à son égard. Elle a ainsi invoqué tardivement ses problèmes à écrire en continu pendant une certaine durée ou à porter des charges lourdes ainsi que remis avec retard un certificat médical, plus de quatre semaines après le début de l'incapacité de travail survenue du 10 au 24 février 2020. Il convient aussi de relever que les TPG ont veillé à lui offrir des conditions de travail appropriées visant à favoriser son retour en emploi tant en octobre 2019 qu'en janvier 2020. De plus, la remise tardive de ce certificat médical était couplée à la remise d'un deuxième certificat médical couvrant, de manière partiellement rétroactive, tout le mois de mars 2020 sans aucun aménagement de travail possible, alors que, cinq jours après l'établissement de ce document, la recourante a, spontanément et sans aucun justificatif médical à l'appui, déclaré à son employeur être prête à faire du télétravail.

Au vu de l'ensemble de ces circonstances, l'indemnité sera fixée à six mois du dernier salaire brut de l'employée, calculé sur le traitement annuel, à l'exclusion de tout autre élément de rémunération, étant relevé que ni le contrat de travail ni le chapitre IV A du statut, relatif au traitement, ne prévoient de treizième salaire. L'indemnité n'est pas soumise à la déduction des cotisations sociales (ATA/112/2019 du 5 février 2019 consid. 4h ; ATA/55/2018 du 23 janvier 2018 consid. 10c et les arrêts cités). La créance portera intérêts dès le
1er novembre 2020 au vu des conclusions prises sur ce point (art. 69 al. 1 LPA ; ATA/744/2014 du 23 septembre 2014).

10) Compte tenu de l'issue de la présente procédure, aucun émolument ne sera perçu (art. 87 al. 1 LPA). Une indemnité de procédure de CHF 1'500.- sera allouée à la recourante, à la charge des TPG (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 14 septembre 2020 par Madame  A______ contre la décision des Transports publics genevois du 17 juillet 2020 ;

au fond :

l'admet ;

constate que la décision du 17 juillet 2020 des Transports publics genevois ne repose pas sur un motif justifié ;

fixe l'indemnité due par les Transports publics genevois à Madame A______ pour refus de réintégration à six mois du dernier salaire brut avec intérêts à 5 % dès le 1er novembre 2020 ;

condamne en tant que de besoin les Transports publics genevois au paiement de ce montant ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument ;

alloue une indemnité de CHF 1'500.- à Madame A______ à la charge des Transports publics genevois ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public, s'il porte sur les rapports de travail entre les parties et que la valeur litigieuse n'est pas inférieure à CHF 15'000.- ;

- par la voie du recours en matière de droit public, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- et que la contestation porte sur une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les
art. 113 ss LTF, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Sandro Vecchio, avocat de la recourante, ainsi qu'à Me Anne Meier, avocate des intimés.

Siégeant : M. Mascotto, président, Mme Krauskopf, M. Verniory,
Mmes Payot Zen-Ruffinen et Lauber, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

 

le président siégeant :

 

 

C. Mascotto

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :