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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/238/2011

ATA/221/2011 du 05.04.2011 ( MARPU ) , REJETE

Parties : ASCENSEURS SCHINDLER SA / DEPARTEMENT DES CONSTRUCTIONS ET DES TECHNOLOGIES DE L'INFORMATION
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/238/2011-MARPU ATA/221/2011

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 5 avril 2011

 

dans la cause

 

ASCENSEURS SCHINDLER S.A.

contre

DÉPARTEMENT DES CONSTRUCTIONS ET DES TECHNOLOGIES DE L'INFORMATION

 



EN FAIT

1. Le 20 septembre 2010 l’office des bâtiments (ci-après : l’office) du département des constructions et des technologies de l’information (ci-après : le département) a publié dans la Feuille d’Avis Officielle de la République et canton de Genève (ci-après : FAO) un appel d’offres en procédure ouverte, pour l’adjudication d’un marché de construction portant sur l’assainissement et la modernisation du parc d’ascenseurs et de monte-charges de l’Etat de Genève, en particulier pour les bâtiments de Sciences II (lot n° 1) du boulevard D’Yvoy n° 2 (lot n° 2) et du boulevard D’Yvoy n° 20 (lot n° 3). Le délai pour la remise des offres était fixé au 18 octobre 2010.

Le marché en question était soumis à l’accord du 15 avril 1994 sur les marchés publics, entré en vigueur pour la Suisse le 1er janvier 1996 (accord GATT/OMC - RS 0.632.231.422), à l’accord intercantonal sur les marchés publics du 25 novembre 1994 entré en vigueur pour Genève le 9 décembre 1997 (AIMP - L 6 05), au règlement cantonal sur la passation des marchés publics du 17 décembre 2007 (RMP - L 6 05.01) ainsi qu’à la loi fédérale sur le marché intérieur du 6 octobre 1995 (LMI - RS 943.02).

Dite publication indiquait la voie et le délai de recours au Tribunal administratif.

2. L’autorité adjudicatrice a établi un dossier d’appel d’offres précisant les aptitudes/compétences requises - type de soumissionnaire, les informations générales, les conditions de participation, les exigences administratives de la procédure et les engagements du soumissionnaire.

Les critères d’adjudication étaient, dans l’ordre d’importance décroissant, les suivants :

Montant de l’offre en rapport avec le cahier

des charges - pondération 40 %.

Montant de l’offre en matière de maintenance et

d’entretien dès l’exécution du marché achevé - pondération 30 %.

Organisation pour l’exécution du marché - pondération 20 %.

Formation professionnelle - pondération 5 %.

Référence et expérience - pondération 5 %.

L’organisateur de la procédure était le Pool « Avec ou Sans » (ci-après : le Pool).

Enfin, les soumissionnaires disposaient d’un délai au 5 octobre 2010 pour des questions éventuelles.

3. Le 15 octobre 2010, Ascenseurs Schindler S.A. (ci-après : Schindler S.A.) succursale de siège à Perly-Certoux/Genève d’une entreprise suisse, a déposé une offre portant sur les trois lots composés d’une offre pour la transformation des installation d’une part et d’une offre pour la maintenance d’autre part, aux montants respectifs de :

transformation :

Lot n° 1 - Sciences II CHF 929'340.-

Lot n° 2 - Bd D’Yvoy n° 2 CHF 39'312.-

Lot n° 3 - Bd D’Yvoy n° 20 CHF 41'040.-

maintenance :

Lot n° 1 - Sciences II CHF 176'580.-

Lot n° 2 - Bd D’Yvoy n° 2 CHF 34'560.-

Lot n° 3 - Bd D’Yvoy n° 20 CHF 11'880.-

4. Selon le procès-verbal d’ouverture des offres du 25 octobre 2010, quatre autres entreprises ont soumissionné, au nombre desquelles Otis S.A. (ci-après : Otis) L’offre de cette dernière se décomposait comme suit :

transformation :

Lot n° 1 - Sciences II CHF 1'001'433,20

Lot n° 2 - Bd D’Yvoy n° 2 CHF 41'167,76

Lot n° 3 - Bd D’Yvoy n° 20 CHF 52'401,20

maintenance :

Lot n° 1 - Sciences II CHF 125'122,66

Lot n° 2 - Bd D’Yvoy n° 2 CHF 27'438,20

Lot n° 3 - Bd D’Yvoy n° 20 CHF 13'288,60

 

5. Le Pool a établi un rapport d’adjudication daté du 23 novembre 2010.

i) Dit rapport comprend le contrôle arithmétique des offres, la comparaison avec le devis général, l’examen de la capacité et disponibilité du personnel, l’énumération des critères utilisés pour l’évaluation de l’adjudication du poste organisation, les références et aptitudes générales, les propositions d’adjudication.

ii) Pour le lot n° 1, le tableau récapitulatif de l’analyse multicritères se présente comme suit :

1) installation 

 

Nom du candidat
(idem dossier)

 

AS Ascenseurs

OTIS

KONE (Suisse) S.A.

Thyssenkrupp

Ascenseurs Schindler S.A.

 

Montant de l'offre après vérification (TTC)

 

974'710.80

1'005'156.00

939'429.00

1'042'480.80

929'340.00

Critère 1

Note attribuée (0 à 5)

 

4.33

3.95

4.84

3.54

5.00

Pondération du critère

 

40

40

40

40

40

Nombre de points (note x pondération)

 

173.35

158.07

193.63

141.69

200.00

Critère 2

Note attribuée (0 à 5)

 

1.72

5.00

0.98

1.78

1.80

Pondération du critère

 

30

30

30

30

30

Nombre de points (note x pondération)

 

51.60

150.00

29.40

53.40

54.00

Critère 3

Note attribuée (0 à 5)

 

4.60

4.00

4.30

4.30

4.80

Pondération du critère

 

20

20

20

20

20

Nombre de points (note x pondération)

 

92.00

80.00

86.00

86.00

96.00

Critère 4

Note attribuée (0 à 5)

 

5.00

4.25

1.00

1.75

3.75

Pondération du critère

 

5

5

5

5

5

Nombre de points (note x pondération)

 

25.00

21.25

5.00

8.75

18.75

Critère 5

Note attribuée (0 à 5)

 

5.00

4.00

4.00

5.00

5.00

Pondération du critère

 

5

5

5

5

5

Nombre de points (note x pondération)

 

25.00

20.00

20.00

25.00

25.00

 

Total des points

 

366.95

429.32

334.03

314.84

393.75

 

Classement

 

3

1

4

5

2

2) maintenance :

AS Ascenseurs prix CHF 179'118.-

Otis prix CHF 125'588.-

KONE (Suisse) S.A. prix CHF 216'805.-

Thyssenkrupp prix CHF 177'050.-

Ascenseurs Schindler S.A. prix CHF 176'580.-

Au vu de l’importance des différences de prix de l’offre « maintenance », le Pool a déclaré avoir rencontré Otis pour vérifier la prestation proposée. Cette entreprise a confirmé que ses prix avaient bien été établis en connaissance des directives.

iii) Le Pool proposait d’adjuger les travaux au premier de chaque lot, soit :

Lot 1 à Otis,

Lot 2 à Kone (Suisse) S.A.,

Lot 3 à Ascenseurs Schindler S.A.

6. Le 24 janvier 2011, l’office a informé Schindler S.A. que le marché du lot 1 était attribué à Otis au montant de CHF 1'005'156.- TTC, sans le contrat de maintenance.

Après évaluation des dossiers et suite à l’analyse de la soumission par rapport aux critères d’adjudication, la proposition de Schindler S.A. avait été classée au deuxième rang sur cinq candidats ayant présenté une offre recevable.

L’entreprise ayant présenté l’offre retenue remplissait pleinement les conditions pour être admise comme adjudicataire selon le RMP. De plus, elle avait présenté l’offre économiquement la plus avantageuse par rapport aux critères d’adjudication énoncés dans l’appel d’offres.

Dite décision indiquait la voie et le délai de recours au Tribunal administratif.

7. Par acte du 25 janvier 2011 adressé au Tribunal administratif, rue Ami-Lullin 4 à Genève, Schindler S.A. a recouru contre la décision précitée.

Elle demandait audience afin de faire valoir ses arguments relatifs aux critères 2 et 4.

La sélection sous critère 2 ne permettait qu’un classement strict en pure fonction du niveau de prix de l’activité de maintenance, ce qu’elle ne contestait pas, mais elle se trouvait par-là péjorée face aux autres acteurs car nombre de ses activités à haute valeur ajoutée étaient comprises dans son prix.

La sélection opérée sous critère 4 avait été sujette à plusieurs malentendus. Cette question avait d’ailleurs été éclaircie le 13 janvier lors d’une séance avec la représentante de l’office. A cette occasion, elle avait déposé des documents et elle constatait que ceux-ci n’étaient pas reflétés dans l’adjudication.

Dit acte a été transmis le 27 janvier 2011 à la chambre administrative de la section administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) pour raison de compétence.

8. Le 28 janvier 2011, le greffe de la chambre administrative a imparti à Schindler S.A. un délai au 4 février 2011 pour présenter un recours conforme à l’art. 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10), notamment en prenant des conclusions et en désignant expressément la décision attaquée.

9. Le 2 février 2011, Schindler S.A. a complété son recours.

L’application du critère de sélection n° 2 n’était faite que sur le niveau du prix de la prestation de maintenance, cette dernière étant très succinctement décrite dans le cahier des charges. Aussi ladite prestation, en sus des opérations de maintenance basique, comprenait par défaut pour Schindler S.A. les activités suivantes :

Test annuel des systèmes de freinage ainsi que mesures de distances de freinages réelles.

Essais réels sous charge des parachutes avec essai de déclenchement et contrôle de fonctionnement dûment protocolé.

Test du limiteur de vitesse avec essais réels et mesure de la vitesse de déclenchement observée.

Vérification des arbres reposant sur trois paliers par un spécialiste agréé.

Etant donné que les activités susmentionnées étaient toutes incluses par défaut dans le prix de maintenance cité sous critère n° 2, la position de Schindler S.A. s’en trouvait péjorée par rapport à celle d’un autre acteur n’offrant que le strict minimum et n’en faisant pas état, ce point n’étant d’ailleurs pas stipulé dans le cahier des charges du département concernant l’entretien des ascenseurs, sous chiffre 4.

Schindler S.A. procédait à un nouveau calcul du montant des offres en ajoutant le prix de la modernisation à celui de la maintenance et obtenait pour Otis un montant de CHF 1'130'743,80 et pour elle-même un montant de CHF 1'105'920.-.

Suite à la séance du 13 janvier 2011, elle avait fait parvenir à l’office un document complémentaire portant sur la correction du critère n° 4 en se référant à l’analyse multicritères établie par le pouvoir adjudicateur. Ce document corrigé modifiait la note précédemment obtenue dans le cadre de l’adjudication.

La décision d’adjudication ne semblait pas cohérente, certains paramètres dans le cadre de la soumission n’ayant pas été pris en compte à leur juste valeur.

En conclusion, elle sollicite un nouveau classement qui diffère de celui précédemment établi en date du 24 janvier 2011.

10. Dans sa réponse du 21 février 2011, l’office s’est opposé au recours.

S’agissant de l’analyse des critères d’adjudication, l’office relevait ce qui suit :

Pour le critère n° 1, Schindler S.A. ayant offert le prix le plus bas, elle avait obtenu la note maximale de 5.

Le critère n° 2 concernait le montant de l’offre en matière de maintenance et d’entretien. Les soumissionnaires disposaient pour ce faire d’un cahier des charges joint au dossier d’appel d’offres décrivant les prestations de maintenance et d’entretien à exécuter. Il ne s’agissait pas d’une description succincte.

L’offre de Schindler S.A. s’élevait à CHF 176'580.- montant qu’elle justifiait par le fait qu’elle offrait des prestations supplémentaires par rapport au cahier des charges. Pour les seules prestations demandées, son prix aurait été de CHF 145'110.- TTC. Or, le candidat n’avait pas le droit de modifier son prix a posteriori, après avoir eu connaissance de celui des concurrents.

En application de la méthode T3, Schindler S.A. avait obtenu la note de 1.80. Cette notation, purement mathématique, n’était pas arbitraire et ne souffrait d’aucune critique.

Schindler S.A. ne remettait pas en cause la note obtenue pour le critère n° 3.

Concernant le critère n° 4, Schindler S.A. avait fourni la liste complète des apprentis formés dans son entreprise depuis 2005, soit huit personnes. Au regard de l’effectif total de la société, elle avait reçu la note de 3.75, appréciation qui ne souffrait pas d’être remise en cause.

Schindler S.A. avait tenté de compléter son offre en produisant un tableau comprenant également les apprentis de sa succursale lausannoise. Cette pièce était totalement irrecevable.

En définitive, le recours de Schindler S.A. consistait à cumuler à son avantage le prix du critère 1 et celui du critère 2, ce qui n’était pas conforme aux règles annoncées, à diminuer le prix offert au critère 2 et à compléter la liste de ses apprentis.

Le recours était totalement infondé et devait être rejeté avec suite de frais et dépens.

11. Répondant à une demande de la chambre administrative, l’office a confirmé par courrier du 14 mars 2011 que le contrat entre l’Etat de Genève et Otis était en cours de signature.

Le 30 mars 2011, l’office a transmis à la chambre administrative un exemplaire du contrat signé le 28 février 2011.

12. Par mémo du 22 mars 2011, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. Depuis le 1er janvier 2011, suite à l'entrée en vigueur de la nouvelle loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), l'ensemble des compétences jusqu'alors dévolues au Tribunal administratif a échu à la chambre administrative, qui devient autorité supérieure ordinaire de recours en matière administrative (art. 131 et 132 LOJ).

2. Le marché offert est soumis notamment à l'AIMP, au RMP et à la loi autorisant le Conseil d’Etat à adhérer à l’accord intercantonal sur les marchés publics du 12 juin 1997 (L-AIMP-L 6 05.0).

Selon les art. 15 al. 1 et 2 AIMP, 3 al. 1 L-AIMP et 56 RMP, le recours est adressé à la chambre administrative dans les dix jours dès la notification de la décision.

Interjeté en temps utile et transmis à la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 al. 2 - LOJ - E 2 05 ;art. 17 al. 5 et art. 62 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10 LPA).

3. a. La qualité pour recourir appartient à toute personne touchée directement par une décision et ayant un intérêt personnel digne de protection à ce qu'elle soit annulée ou modifiée (art. 60 let. b LPA). Tel est le cas de celle à laquelle la décision attaquée apporte des inconvénients qui pourraient être évités grâce au succès du recours, qu'il s'agisse d'intérêts juridiques ou de simples intérêts de fait (ATA/123/2011 du 1er mars 2011 et les réf. citées).

En l'espèce, le contrat ayant été conclu avec l’adjudicataire (art. 46 RMP), il convient de se demander si la recourante conserve un intérêt digne de protection au maintien du recours.

b. Selon l'art. 18 al. 2 AIMP, lorsque le contrat est déjà conclu, l'autorité qui admet le recours ne peut que constater le caractère illicite de la décision. Si cette illicéité est prononcée, le recourant peut demander la réparation de son dommage, limité aux dépenses qu'il a subies en relation avec les procédures de soumission et de recours (art. 3 al. 3 L-AIMP). Par ailleurs, selon l'arrêt du Tribunal fédéral 2P.307/2005 du 24 mai 2006, le recourant qui conteste une décision d'adjudication et qui déclare vouloir maintenir son recours après la conclusion du contrat conclut, au moins implicitement, à la constatation de l’illicéité de l’adjudication, que des dommages-intérêts soient réclamés ou non.

En tant que soumissionnaire évincée et, bien que le contrat ait été déjà conclu, la recourante conserve un intérêt actuel à recourir contre la décision d’adjudication au sens de l’art. 60 let. b LPA, son recours étant à même d’ouvrir ses droits à une indemnisation (ATF 125 II 86, consid. 5 b p. 96). Elle dispose donc de la qualité pour recourir (ATA/124/2011 du 1er mars 2011 et les réf. citées).

4. Selon l’art. 65 al. 1 LPA, l’acte de recours contient sous peine d’irrecevabilité, la désignation de la décision attaquée et les conclusions du recourant. En outre, il doit contenir l’exposé des motifs ainsi que l’indication des moyens de preuve. Les pièces dont dispose le recourant doivent être jointes. A défaut, un bref délai pour satisfaire à ces exigences est fixé au recourant, sous peine d’irrecevabilité (art. 65 al. 2 LPA).

Compte tenu du caractère peu formaliste de cette disposition, il convient de ne pas se montrer trop strict sur la manière dont sont formulées les conclusions du recourant. Le fait que ces dernières ne ressortent pas expressément de l’acte de recours n’est pas en soi un motif d’irrecevabilité, pourvu que le tribunal et la partie adverse puissent comprendre avec certitude les fins du recourant (ATA/478/2008 du 16 septembre 2008). Une requête en annulation d’une décision doit par exemple être déclarée recevable dans la mesure où le recourant a de manière suffisante manifesté son désaccord avec la décision, ainsi que sa volonté qu’elle ne développe pas d’effets juridiques (P. MOOR, Droit administratif, Vol. II, Berne 2002, 2ème éd., p. 674 n. 5.7.1.4). Des conclusions conditionnelles sont en revanche irrecevables (ATA/478/2008 précité).

L’absence de conclusions au sens de ce qui précède ne peut être réparée que dans le délai de recours (ATA/19/2006 du 17 janvier 2006). Hors ce délai, le fait d’être autorisé à compléter une écriture de recours ne permet pas de suppléer au défaut de conclusions (art. 65 al. 3 LPA ; ATA/118/2006 du 7 mars 2006).

Quant à l’exigence de motivation de l’art. 65 al. 2 LPA, elle a pour but de permettre à la juridiction administrative de déterminer l’objet du litige qui lui est soumis et de donner l’occasion à la partie intimée de répondre aux griefs formulés à son encontre (ATA/1/2007 du 9 janvier 2007 ; ATA/775/2005 du 15 novembre 2005 ; ATA/179/2001 du 13 mars 2001 ; Société T. du 13 avril 1988 ; P. MOOR, op. cit. pp. 672-674 n. 5.7.1.3). Elle signifie que le recourant doit expliquer en quoi et pourquoi il s’en prend à la décision litigieuse (ATA/23/2006 du 17 janvier 2006 ; cf. ég. ATF 130 I 312 rendu à propos de l’ancien art. 108 al. 2 OJ). Il ne suffit par exemple pas d’affirmer qu’une amende administrative est injustifiée sans expliquer la raison de ce grief, ou de reprocher simplement à une décision de constituer un excès du pouvoir d’appréciation de l’autorité qui l’a rendue (ATA précités). La motivation doit être en relation avec l’objet du litige et le recourant se référer à des motifs qui entrent dans le pouvoir d’examen de l’autorité de recours (B. BOVAY, Procédure administrative, 2000, p. 387). Le Tribunal fédéral a pour sa part confirmé qu’il faut pouvoir déduire de l’acte de recours sur quels points et pour quelles raisons la décision entreprise est contestée, ce que le recourant demande, et sur quels faits il entend se fonder. Une brève motivation est suffisante à condition toutefois que les motifs avancés se rapportent à l’objet de la contestation (Arrêt du Tribunal fédéral 2A.143/2005 du 21 avril 2005). Encore faut-il que cette motivation soit topique, à savoir qu’il appartient au recourant de prendre position par rapport au jugement (ou à la décision) attaqué et d’expliquer en quoi et pourquoi il s’en prend à ceux-ci (ATF 131 II 470, consid. 1.3 p. 475 [ég. rendu à propos de l’ancienne LOJ] ; Arrêt du Tribunal fédéral I 134/03 du 24 février 2004 ; ACOM/6/2006 du 15 février 2006). Enfin, la simple allégation que la décision attaquée serait erronée est insuffisante, la motivation devant être en relation avec l’objet du litige. Ce n’est que si les conclusions ou la motivation existent, sans avoir la clarté nécessaire, que l’autorité doit impartir un délai de correction au recourant (B. BOVAY, op. cit. p. 388).

En l’espèce, la recourante agit en personne. Elle a complété son acte de recours, mais sans prendre de conclusions formelles. Ce nonobstant, on comprend qu’elle s’oppose à l’adjudication du marché public litigieux à une autre entreprise que la sienne parce qu’elle considère que son offre a été mal appréciée au regard des critères d’adjudication annoncés.

Le recours est ainsi recevable à tous points de vue.

5. a. Aux termes de son art. 1er, la LMI garantit à toute personne ayant son siège ou son établissement en Suisse, l’accès libre et non discriminatoire aux marchés afin qu’elle puisse exercer une activité lucrative sur tout le territoire suisse. La LMI ne constitue qu’une loi-cadre orientée vers la protection des soumissionnaires externes et l’unification du marché suisse. Elle ne vise pas à s’immiscer dans les réglementations cantonales, mais se borne à exiger que ces dernières ne constituent pas une entrave au libre-échange des services et des marchandises ainsi qu’à la liberté des personnes de s’établir et de circuler (Message du Conseil fédéral du 23 novembre 1994 concernant la LMI, FF 1995 I p. 1248-1249).

b. Selon l’art. 5 al. 1 LMI, les marchés publics des cantons, des communes et des autres organes assumant des tâches cantonales ou communales sont régis par le droit cantonal ou intercantonal ; ces dispositions, ainsi que les décisions fondées sur elles, ne doivent pas discriminer les personnes ayant leur siège ou leur établissement en Suisse de manière contraire à l'art. 3 LMI qui fixe les conditions auxquelles des restrictions à la liberté d’accès au marché de soumissionnaires externes peuvent être prévues.

c. La LMI comporte ainsi certaines garanties visant principalement à protéger les offreurs externes. Elle fixe un nombre limité de principes fondamentaux dont la Confédération, les cantons et les communes doivent tenir compte tant dans la pratique que dans leur activité législative (Message du Conseil fédéral du 23 novembre 1994 concernant la LMI, FF 1995 I p. 1231).

d. Les cantons, les communes et les autres organes assumant des tâches cantonales et communales veillent à ce que les projets de marchés publics de grande importance portant sur des fournitures, des services ou des travaux, de même que les critères de participation et d’attribution du marché, soient publiés dans un organe officiel. Ils tiennent compte à cet égard des engagements internationaux pris par la Confédération (art. 5 al. 2 LMI). Cette disposition institue une obligation de transparence consistant à garantir un degré de publicité adéquat permettant une ouverture du marché à la concurrence, ainsi que le contrôle de l’impartialité des procédures d’adjudication. Lorsqu’un marché doit faire l’objet d’un appel d’offres selon l’art. 5 al. 2 LMI, le pouvoir adjudicateur est tenu d’énumérer par avance tous les critères d’aptitude et d’adjudication qui seront pris en considération (E. CLERC, Commentaire de l’art. 5 LMI, in Droit de la concurrence : commentaire romand, nos 144-146 pp. 1368-1369 ss.). Il doit aussi spécifier clairement d’emblée l’ordre de priorité des critères, de telle sorte que la manière dont l’évaluation a été effectuée par le pouvoir adjudicateur puisse être retracée par l’autorité de recours (RDAF 2000 p. 181, consid. 4c et 5a).

En l’espèce, l’autorité adjudicatrice a respecté les principes et les règles de la LMI, ce que la recourante ne discute pas.

6. Selon l'art. 16 al. 1 et 2 AIMP, le recours contre une décision d'adjudication peut être formé pour violation du droit, y compris l'excès ou l'abus de pouvoir d'appréciation, et pour constatation inexacte ou incomplète de faits pertinents. Le grief d'inopportunité ne peut pas être invoqué.

7. Le droit des marchés publics a pour but d’assurer une concurrence efficace entre les soumissionnaires et de garantir l’égalité de traitement et l’impartialité de l’adjudication à l’ensemble de ceux-ci (art. 1 al. 3 let. a et b AIMP). Ces principes sont répétés à l’art. 16 RMP, qui précise que la discrimination des soumissionnaires est interdite par la fixation de délais ou de spécifications techniques non conformes à l’art. 28, par l’imposition abusive de produits à utiliser ou par le choix de critères étrangers à la soumission. De même, le principe d’égalité de traitement doit être garanti à tous les candidats et soumissionnaires dans toutes les phases de la procédure (art. 16 al. 1 et 2 RMP).

8. En procédure ouverte, les offres sont évaluées en fonction des critères d’aptitude et des critères d’adjudication (art. 12 RMP) qui doivent être objectifs, vérifiables et pertinents (art. 24 RMP) et qui doivent figurer dans les documents d’appel d’offres (art. 27 let. f RMP). Pour les critères d’aptitude, l’autorité adjudicatrice peut exiger des soumissionnaires des justificatifs attestant leurs capacités sur les plans financiers, économiques, techniques et organisationnels (art. 33 RMP).

9. En application de l’art. 43 RMP, l’évaluation est faite selon les critères prédéfinis, conformément à l’art. 24 RMP et énumérés dans l’appel d’offres et/ou les documents d’appel d’offres (al. 1). Le résultat de l’évaluation des offres fait l’objet d’un tableau comparatif (al. 2).

10. Au demeurant, l’autorité adjudicatrice est libre de choisir la méthode qu’elle entend utiliser pour noter les offres qui lui sont soumises. La loi ne lui impose aucune méthode de notation particulière. Le choix de la méthode de notation relève ainsi du pouvoir d’appréciation de l’autorité adjudicatrice, sous réserve d’abus ou d’excès du pouvoir d’appréciation (Arrêt du Tribunal fédéral 2P/172/2002 du 10 mars 2003 consid. 3.2 ; ATA/201/2001 du 24 avril 2001 consid. 9 ; D. ESSEIVA, note ad S12 in DC 2/2003, p. 62). L’opportunité du choix de la méthode de notation ne peut être revue par l’autorité de recours (cf. art. 16 al. 2 AIMP). De surcroît, aucune norme n’impose à l’autorité adjudicatrice de faire connaître à l’avance la méthode de notation qu’elle utilisera (Arrêt du Tribunal fédéral 2P/172/2002 du 10 mars 2003 consid. 2.3 ; Arrêt du Tribunal administratif vaudois du 26 janvier 2000 in DC 2/2001, p. 67 et note de D. ESSEIVA/O. RODONDI, Les critères d’aptitude et les critères d’adjudication dans les procédures de marchés publics, RDAF 2001, I p. 406).

En l’espèce, l’autorité adjudicatrice a fixé les critères d’adjudication et indiqué la pondération de chacun d’entre eux. Les critères choisis et le poids qui leur est donné sont pertinents et ne prêtent pas le flanc à la critique. La lecture du rapport d’adjudication du 23 novembre 2010 établit que les paramètres et les éléments d’appréciation retenus sont conformes aux critères annoncés. Il s’ensuit que la procédure de l’art. 43 al. 1 et 2 RMP a été parfaitement respectée par l’autorité adjudicatrice.

11. Schindler S.A. critique la notation des critères d’adjudication 2 (maintenance) et 4 (formation professionnelle).

12. S’agissant du critère 2, la recourante affirme que la prestation de maintenance était très succinctement décrite dans les cahiers des charges du département.

L'art. 27 let. a RMP mentionne que les documents d'appel d'offres doivent contenir tous les renseignements nécessaires à l'établissement de l'offre, notamment, l'objet et l'importance du marché avec un descriptif détaillé des prestations attendues et/ou des spécifications techniques (cahier des charges). En l’espèce, il résulte des pièces du dossier en possession de la chambre administrative que le dossier d’appel d’offres contenait une annexe n° 4 intitulée « cahier des charges du DCTI concernant l’entretien des ascenseurs ». Ce document précise le rythme des visites, la répartition du nombre de celles-ci, le carnet d’entretien qui doit être tenu à jour et définit de manière précise les prestations des divers travaux de maintenance et contrôles périodiques ainsi que les prestations complémentaires faisant partie intégrante du contrat. La recourante a signé ce document le 15 octobre 2010. Au demeurant, elle n’a pas demandé un complément d’information, dans le délai imparti pour ce faire par l’autorité adjudicatrice. Elle n’a pas davantage recouru contre l’appel d’offres lequel, conformément à la jurisprudence, ne saurait être remis en cause dans le cadre de l’examen de la décision d’adjudication (ATA/486/2009 du 29 septembre 2009 et les réf. citées).

Ce nonobstant, l’argumentation de la recourante revient en réalité à présenter une nouvelle offre qui prend en compte un poste de « modernisation », exorbitant à l’appel d’offres. Un tel mode de faire est totalement proscrit par la législation des marchés publics : une fois échu le délai pour introduire les offres, il est en principe interdit d’y apporter des corrections (Arrêt du Tribunal fédéral 2P.339/2001 du 12 avril 2002 in BR/DC/4/2003 p. 156 [S49]).

Partant, dans la mesure où il est recevable, ce grief est infondé.

13. En ce qui concerne le critère « formation professionnelle », la recourante explique que postérieurement à l’ouverture des offres, elle a eu un entretien avec un représentant de l’office auquel elle a remis des documents complémentaires dont il n’a pas été tenu compte.

En application du principe de l’égalité de traitement entre soumissionnaires sus-rappelé, c’est à juste titre que l’autorité adjudicatrice n’a pas pris en considération le complément d’information déposé par la recourante postérieurement à l’ouverture des offres.

Dans son offre, la recourante a indiqué qu’elle disposait de 154 postes de travail (administratif et technique) et que le nombre d’apprentis formés dans les cinq dernières années sur le site de Genève était de 2, chiffre porté à 8 si l’on prenait en considérations le site d’Ebikon.

Otis pour sa part a annoncé 539.5 postes de travail et la formation de 10 apprentis au cours des cinq dernières années.

Le calcul mathématique effectué sur la base du système de notation T3 attribue la note de 3,75 à la recourante et celle de 4,25 à Otis, chiffres qui en eux-mêmes ne souffrent pas de discussion.

Il s’ensuit que ce grief ne résiste pas à l’analyse.

14. Entièrement mal fondé, le recours sera rejeté. Un émolument de CHF 2'000.- sera mis à la charge de la recourante qui succombe (art. 87 al. 1 LPA). Il ne sera pas alloué d’indemnité de procédure vu la qualité de l’autorité intimée.

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 26 janvier 2011 par Ascenseurs Schindler S.A. contre la décision du 24 janvier 2011 du département des constructions et des technologies de l'information ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge d’Ascenseurs Schindler S.A. un émolument de CHF 2'000.- ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public :

si la valeur estimée du mandat à attribuer n’est pas inférieure aux seuils déterminants de la loi fédérale du 16 décembre 1994 sur les marchés publics ou de l’accord du 21 juin 1999 entre la Confédération suisse et la Communauté européenne sur certains aspects relatifs aux marchés publics ;

s’il soulève une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Ascenseurs Schindler S.A. ainsi qu'au département des constructions et des technologies de l'information.

Siégeants : M. Thélin, président, Mmes Bovy, Hurni et Junod, M. Dumartheray, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

le président siégeant :

 

 

Ph. Thélin

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

la greffière :