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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/67/2008

ATA/205/2009 du 28.04.2009 ( DES ) , REJETE

Descripteurs : ; MÉDECIN ; DENTISTE ; PATIENT
Normes : LRMPSP.10 ; LPS.108 ; LPS.110
Résumé : Blâme et amende de CHF 3'000.- confirmés à l'encontre d'un dentiste. Divers agissements professionnels ont été retenu contre ce praticien. En particulier il n'a pas recueilli le consentement de sa patiente avant de procéder au traitement et n'a pas donné suite à la demande d'accès au dossier médical.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/67/2008-DES ATA/205/2009

ARRÊT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

du 28 avril 2009

 

dans la cause

 

 

Docteur X______
représenté par Me Philippe Amsler, avocat

contre

 

DÉPARTEMENT DE L'éCONOMIE ET DE LA SANTÉ


 


EN FAIT

1. Le Docteur X______ exerce la profession de médecin-dentiste à Genève.

2. a. Le 2 décembre 2002, Madame B______ a dénoncé l'attitude du Dr X______ auprès de la commission de surveillance des professions de la santé (ci-après : la commission). A la suite d'un long traitement dentaire, estimé à CHF 10'000.-, elle avait ressenti des douleurs à la gencive et aux dents, du côté gauche. Le Dr X______ avait pris une radiographie et lui avait dit qu'il fallait attendre avant de pouvoir déterminer la suite à donner. Il avait ajouté que, pour continuer à être suivie chez lui, elle devait lui amener deux clientes. Comme la douleur augmentait, elle s’était rendue à la policlinique dentaire des hôpitaux universitaires de Genève où une infection avait été détectée. Elle était retournée voir le Dr X______ qui lui avait répondu qu'il ne pouvait faire ce travail gratuitement et devait établir un devis, mais qu'elle pouvait poursuivre ce traitement à l'hôpital car c’était moins cher.

b. Le 11 décembre 2002, la commission a informé Mme B______ qu'elle ne pouvait pas entrer en matière sur la demande de celle-ci car elle n’avait la compétence ni pour modifier ou annuler des notes d’honoraires de praticien, ni pour allouer des dommages et intérêts, ni encore pour statuer sur un quelconque litige financier.

3. a. Le 10 mars 2004, Mme B______ s'est plainte auprès de la commission de la qualité des soins prodigués par le Dr X______. Elle avait eu successivement deux infections sur les dents traitées par ce praticien. Elle s’était adressée à l’école de médecine dentaire où le médecin consulté lui avait expliqué que les six dents traitées devaient être extraites.

b. Le 12 mars 2004, la commission s'est saisie de la plainte de Mme B______ (cause n° 6/04/C). Son examen portait uniquement sur l'existence d'un éventuel agissement professionnel incorrect de la part du Dr X______.

4. Invité, les 12 mars et 29 avril 2004, à se déterminer sur les allégués de Mme B______, le Dr X______ a fait part de ses observations le 17 mai 2004.

Cette patiente l'avait consulté le 27 mars 2001 pour la première fois pour un problème fonctionnel et esthétique des dents antérieures supérieures. Après avoir effectué un détartrage et un diagnostic complets, il avait procédé à des modèles d’étude de ses mâchoires et avait constaté et mesuré une béance de cinq millimètres entre les deux incisives, avec un léger mouvement de celles-ci. Mme B______ avait également subi des traitements orthodontiques du 24 novembre 2001 au 4 mars 2002, suivis d’une période de consolidation avec une contention. Par la suite, un petit pont provisoire avait été réalisé par son technicien sur les dents antérieures. Le pont définitif avait été posé en juin 2002. Il avait revu Mme B______ pour un contrôle le 2 juillet puis le 4 septembre et le 19 novembre 2002. Lors de ce dernier rendez-vous, il avait informé Mme B______ que des travaux étaient encore nécessaires au vu de la sensibilité dont elle se plaignait. Comme elle s'était rendue à l’école de médecine dentaire, il lui avait vivement conseillé de poursuivre le traitement dans cet établissement.

5. Les 11 août, 21 décembre 2004 puis 16 février 2005, la commission a sollicité du Dr X______ la production du dossier médical complet de Mme B______, sans succès.

6. La sous-commission C, chargée de la surveillance des médecins-dentistes, a procédé à la comparution personnelle du Dr X______ le 23 juin 2005. A cette occasion, le Dr X______ a remis le dossier médical de Mme B______. Il était au courant du fait que Mme B______ bénéficiait de prestations de l’office cantonal des personnes âgées (ci-après : OCPA).

La radiographie panoramique prise initialement, comme les autres radiographies, était en possession de la patiente. Il n'avait pas pris de radiographie apicale pour les traitements de racines des incisives supérieures. La patiente s’était présentée à son cabinet pour un contrôle général, souffrant toutefois de dents en éventail. Il avait enlevé une dent de sagesse puis avait procédé à un détartrage et fait des empreintes. Par la suite, il avait entrepris un traitement orthodontique, endodontique, parodontal et prothétique sur les dents nos 13, 12, 11, 21, 22, 23. Le pont final avait été posé le 26 janvier (recte : juin) 2002.

Mme B______ avait indiqué souffrir d’une sensibilité au niveau de la canine n° 23. Il avait alors fait une radiographie apicale. Fin 2002, la patiente était allée à l’école de médecine dentaire et était revenue en lui disant qu’il fallait tout démonter. Il lui avait répondu ne pas pouvoir travailler gratuitement et lui avait fait un devis. Il lui avait encore indiqué que si elle ne pouvait pas s’acquitter d’un montant supplémentaire d’environ CHF 800.-, elle devrait être prise en charge par l’école de médecine dentaire.

Il avait contrôlé le traitement de racines qu’il avait effectué par une radiographie panoramique le 4 octobre 2002 et par deux radiographies apicales sur les dents nos 13 et 23 le 9 octobre 2002. Le laps de temps après lequel il était possible de procéder à une restauration définitive suite à un traitement de racine pouvait varier. En l’occurrence, il l’avait exécuté trois mois plus tard car il avait procédé au préalable à la confection de couronnes provisoires.

7. Interpellé par la commission sur les examens radiologiques à entreprendre avant un traitement de racine, le professeur K______ de l’école de médecine dentaire a répondu, le 30 août 2005, que deux possibilités pouvaient être envisagées, soit un orthopantomogramme, puis des radiographies apicales sur les dents concernées, soit deux BW (bite wing) droite et gauche, puis une radiographie apicale sur les dents concernées. Le contrôle d’un traitement de racine se faisait avec une radiographie apicale.

8. Le 22 février 2006, sur requête de la commission, le professeur S______ a expliqué que Mme B______ avait été reçue à l'école de médecine dentaire en urgence le 12 novembre 2002 pour des douleurs dues à une infection sur l’incisive latérale supérieure gauche et la canine supérieure gauche. Après avoir réalisé un traitement conservateur, une valvulopathie aortique avait été découverte chez cette patiente. Au vu du risque d’endocardite lié à cette affection, la conservation des dents de façon prolongée n'était dès lors pas envisageable. Mme B______ ne pouvait se résoudre à accepter les extractions proposées car elle venait de faire réaliser par le Dr X______ un bridge supérieur allant de la canine droite à la canine gauche.

Le Pr S______ a émis des doutes sur la nécessité de la pose de ce bridge et a critiqué sa réalisation, en particulier en raison de son aspect inesthétique, du contour gingival non respecté, du dépassement sur tous les traitements de racine. En conclusion, même en l'absence de ce risque d’endocardite, il était peu probable qu’un contrôle des foyers périapicaux et parodontaux secondaires à un traitement bâclé ait pu être effectué.

9. Le 19 avril 2006, le Dr X______ a été informé que la cause serait soumise à la commission plénière. Un délai au 10 mai 2006 lui a été donné pour formuler des observations complémentaires et faire valoir un éventuel motif de récusation à l'encontre des membres de la commission.

10. a. Le Dr X______ a également fait l’objet d’une plainte déposée le 15 avril 2005 par Madame M______.

Cette patiente s’était adressée en urgence au Dr X______, le 18 juin 2004, afin de reconstituer l’angle d’une dent de devant, brisée par un verre quelques jours auparavant. Au lieu de procéder au traitement sollicité, le Dr X______ avait scié les quatre dents du devant de sa mâchoire supérieure ainsi que cinq dents du devant de sa mâchoire inférieure sans s’assurer de son consentement. Par ailleurs, malgré ses demandes le Dr X______ ne lui avait pas remis son dossier médical.

b. La plainte de Mme M______ a été instruite par la sous-commission C (cause n° 16/05/C).

11. a. Dans un premier préavis du 23 août 2007 rendu dans la cause 6/04/C, la commission a proposé au département de l’économie et de la santé (ci-après : le département) de constater que le Dr X______ avait commis un manquement à ses obligations professionnelles constitutif d’un agissement professionnel incorrect, justifiant le prononcé d’une sanction administrative. Elle a réservé la question de la sanction à proposer à examiner dans un préavis séparé.

b. Dans un second préavis daté du même jour, la commission a constaté que les droits de patiente de Mme M______ avaient été violés (cause n° 16/05/C).

c. Enfin, dans un troisième préavis toujours du 23 août 2007, la commission a proposé de joindre les deux causes susmentionnées et de prononcer comme sanction d'ensemble un blâme et une amende de CHF 3'000.-.

12. a. Par décision du 20 novembre 2007 le département a constaté que les droits de la patiente de Mme M______ avaient été violés.

Le Dr X______ n’avait apporté aucun élément de preuve permettant de penser que la patiente avait accepté le meulage de ses dents. En particulier, le dossier médical de ce dentiste ne contenait aucune mention d’une quelconque information donnée à la patiente et, en conséquence, du consentement qu’elle aurait pu donner. Or, le traitement entrepris nécessitait que la patiente y consente expressément. Par ailleurs, le Dr X______ n’avait produit le dossier médical que lors de la comparution personnelle du 2 novembre 2005, alors que l’accès à celui-ci avait été sollicité à plusieurs reprises, en vain. Un délai de huit mois pour produire un dossier médical était trop long et violait les droits des patients. Compte tenu des griefs formulés par la patiente et de la situation actuelle, une injonction n’était pas à même de rétablir une situation conforme aux droits de Mme M______. Dès lors, la seule satisfaction qui pouvait lui être accordée était la constatation que ses droits de patiente avaient été violés.

b. Le Dr X______ a interjeté recours contre cette décision auprès du Tribunal administratif le 21 décembre 2007 (cause A/5098/2007).

13. Parallèlement, Mme M______ a déposé par-devant le Tribunal de première instance une demande en paiement où elle réclamait au Dr X______ le versement de CHF 90'000.-, plus les intérêts à 5 % dès le 19 juin 2007.

Par jugement du 24 avril 2008, le Tribunal de première instance, a condamné le Dr X______ à payer à Mme M______ la somme de CHF 4'877,40 avec intérêts à 5 % dès le 5 août 2005. Les enquêtes et les pièces produites ne permettaient pas d’établir une quelconque violation des règles de l’art lors du traitement prodigué par le Dr X______. En revanche, il y avait eu lieu d’admettre que la preuve d’un consentement éclairé de la patiente à l’intervention n’avait pas pu être apportée.

Ce jugement a été confirmé par arrêt de la Cour de justice du 2 février 2009.

14. Par décision du 12 décembre 2007, le département a infligé au Dr X______ un blâme et une amende de CHF 3'000.-.

La commission avait retenu divers agissements professionnels incorrects à l’encontre du Dr X______. Concernant Mme B______, ce médecin-dentiste avait effectué un traitement de racines sur la base d’une seule radiographie panoramique. Or, une telle radiographie ne révélait pas d’éventuelles lésions apicales ou parodontales. De l’avis de la commission et comme l’avait indiqué le Pr K______, il aurait été nécessaire de procéder à un examen radiologique apical des dents concernées. La commission avait également relevé que le Dr X______ avait couronné les dents de la plaignante dans un laps de temps trop court après avoir effectué le traitement de racines, sans s’assurer que les dents traitées ne présentaient pas de lésions apicales par la réalisation d’une radiographie apicale. Cet examen constituait pourtant la mesure de contrôle préconisée lors d’un traitement de racine.

Quant au cas de Mme M______, le département avait exposé, dans sa décision du 20 novembre 2007, les motifs qui l’avaient conduit à conclure que les droits de cette patiente avaient été violés. Ces violations constituaient bien un agissement professionnel incorrect. Compte tenu du fait que les deux dossiers consacraient plusieurs agissements professionnels incorrects, il paraissait adéquat et proportionné de cumuler un blâme et une amende d’un montant modeste de CHF 3'000.-.

15. Le Dr X______ a interjeté recours contre cette décision auprès du Tribunal administratif le 11 janvier 2008. Il conclut à l'annulation de celle-ci et, préalablement, à la suspension de la procédure jusqu’à droit jugé sur le recours interjeté contre la décision constatatoire du département du 20 novembre 2007.

Les griefs en relation avec le cas de Mme B______ étaient sans fondement. En effet, pour des incisives et canines supérieures, une radiographie panoramique était tout-à-fait suffisante pour entreprendre, puis contrôler, le traitement des racines. Le grand pouvoir de résolution de l’instrument de radiographie panoramique était suffisamment élevé pour cette intervention et la morphologie rectiligne des racines concernées se prêtait à cet examen. De plus, il avait effectué ce traitement avec un odontomètre, instrument électronique assisté par ordinateur qui calculait et indiquait au praticien la longueur exacte des racines. Quant au délai de deux mois et sept jours écoulé entre le dernier traitement de racine et la pose du pont définitif, il était approprié dans le cas d’espèce car la patiente avait reçu un traitement orthodontique et ne présentait plus de symptomatologie. En effet, il convenait d’éviter que la mâchoire ne bouge à nouveau, ce que seule la pose du pont définitif était à même d’empêcher. D’ailleurs, le département n’exposait nullement quel était le laps de temps à respecter avant la pose du pont définitif. La commission avait estimé nécessaire de demander un avis au Pr K______, ce qui démontrait que ses membres n’étaient eux-mêmes pas certains qu’en l’état actuel du développement de la science, le recours à une radiographie panoramique était constitutif d’un agissement professionnel incorrect. A cet égard, la réponse du Pr K______ était toute générale et ce dernier n’avait pas affirmé que le recours à un examen radiologique panoramique en relation avec un traitement de racine des incisives et canines supérieures serait contraire aux règles de l’art. Par ailleurs, les radiographies ne figuraient pas dans le dossier de la commission. Elles avaient été réclamées à Mme B______, apparemment en vain. Enfin, il contestait catégoriquement le jugement parfaitement subjectif émis par le Pr S______ sur la prothèse dentaire qu’il avait posée.

Il contestait également les reproches en relation avec le cas de Mme M______.

16. Le 13 février 2008, le département s’est opposé à la demande de suspension de la procédure.

17. Le juge délégué a tenu une audience de comparution personnelle des parties le 28 avril 2008.

Le Dr X______ a expliqué ne pas avoir fait, dans le cadre du dossier de Mme B______, de radiographie apicale mais une radiographie panoramique. Il considérait que la radiographie panoramique suffisait. La technique panoramique était plus moderne que la technique apicale. Tous les dentistes ne disposaient pas d’une installation panoramique ; en revanche, ils étaient pratiquement tous équipés pour procéder à des radiographies apicales. Il constatait que Mme B______ n’avait jamais comparu devant la commission. Cette patiente s’était déjà plainte en décembre 2002 sans que la commission ne donne suite à son courrier.

Le Dr X______ a encore indiqué que Mme B______ avait des dents dites en éventail. Il avait fait de l’orthodontie puis un traitement sur les gencives. Le traitement de racines était lié au travail de parodontie et non pas à une infection. La patiente était contente de son traitement. Par la suite, elle avait présenté une sensibilité sur une dent. Comme elle ne pouvait pas payer les coûts d'un montant de CHF 800.-, il lui avait suggéré d’aller à l’institut universitaire de médecine dentaire. Là, elle avait vu beaucoup de personnes qui lui avaient dit que le traitement avait été mal fait et qu’il fallait lui enlever six dents.

18. Le 23 mai 2008, le département a répondu au recours. Il conclut au rejet de celui-ci.

Une radiographie panoramique ne révélait pas d’éventuelles lésions apicales ou parodontales. Au contraire, une radiographie apicale permettait de mesurer la longueur de la racine dentaire et ainsi d’effectuer un traitement de racine sans dépassement radiculaire. Il était également reproché au Dr X______ d’avoir couronné les dents de Mme B______ dans un laps de temps trop court après avoir effectué le traitement de racine, sans s’assurer que les dents traitées ne présentaient pas de lésion apicale. Le médecin-dentiste n’avait pas une obligation de résultat mais de moyens. Or, de tels moyens n’avaient pas été suffisamment mis en œuvre dans le cas d’espèce par le Dr X______, ce qui du reste avait été constaté par le Pr S______. Le Dr X______ avait donc commis des agissements professionnels incorrects dans le cadre de la prise en charge de Mme B______.

La commission avait décidé de ne pas donner suite à la plainte de Mme B______ du 2 décembre 2002, compte tenu des éléments strictement financiers développés à cette époque. La plaignante avait saisi une nouvelle fois la commission en 2004, critiquant cette fois clairement la prise en charge médicale du Dr X______. Enfin, la jonction des causes de Mmes B______ et M______ avait été prononcée, non dans le but de sanctionner plus sévèrement le Dr X______, mais pour se conformer à la jurisprudence du Tribunal administratif.

19. Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

20. Par arrêt de ce jour (ATA/204/2009), le tribunal de céans a rejeté le recours du Dr X______ et confirmé la décision du département du 20 novembre 2007.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 56A de la loi sur l’organisation judiciaire du 22 novembre 1941 - LOJ - E 2 05 ; art. 63 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2. a. Le 1er septembre 2006 sont entrés en vigueur la loi sur la santé du 7 avril 2006 (LSanté - K 1 03) ainsi que son règlement d'application (K 3 02.01), lesquels abrogent notamment la loi concernant les rapports entre membres des professions de la santé et patients du 6 décembre 1987 (LRMPSP - K 1 80) et la loi sur l'exercice des professions de la santé, les établissements médicaux et diverses entreprises du domaine médical du 11 mai 2001 (LPS - K 3 05).

b. D'une manière générale, s'appliquent aux faits dont les conséquences juridiques sont en cause, les normes en vigueur au moment où ces faits se produisent (P. MOOR, Droit administratif, 2ème éd., Berne 1994, Vol. 1, p. 170, n. 2.5.2.3). En matière de sanction disciplinaire, on applique toutefois le principe de la lex mitior lorsqu'il appert que le nouveau droit est plus favorable à la personne incriminée (ATA/197/2007 du 24 avril 2007 ; ATA/182/2007 du 17 avril 2007 ; P. MOOR, op. cit., p. 171). La jurisprudence admet que ce principe s'applique également à la procédure de constatation d'une violation des droits de patients, car de celle-ci peut découler le prononcé d'une sanction (ATA/283/2007 du 5 juin 2007).

En l'espèce, les faits s'étant déroulés avant le 1er septembre 2006, la présente espèce doit être jugée selon les dispositions de l’ancien droit.

S'agissant des sanctions administratives prévues par l'ancien ou le nouveau droit, elles sont similaires. Selon la jurisprudence constante applicable au moment des faits reprochés, la prescription relative à la poursuite disciplinaire pour les infractions commises par les professionnels de la santé est de cinq ans et la prescription absolue de sept ans et demi (ATA/283/2007 du 5 juin 2007 et les réf. cit. ; ATA/287/2006 du 23 mai 2006). La question de l'application au cas d'espèce du nouveau délai de prescription de 7 ans prévu par le code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0) révisé pour les infractions qui ne sont pas passibles d'une peine privative de liberté de plus de trois ans (art. 97 al. 1 CP) peut rester ouverte. En effet, conformément au principe énoncé à l'article 98 CP, lorsque les agissements coupables ont eu une certaine durée, la prescription court dès le jour où ceux-ci ont cessé. En l'occurrence, pour le cas de Mme B______, la dernière consultation chez le recourant remontant au 19 novembre 2002, la prescription ne serait pas atteinte. Il sera ainsi également fait application de l'ancien droit pour l'examen du prononcé de la sanction, le nouveau droit n'apparaissant pas plus favorable au recourant.

3. En cas de comportement professionnel incorrect dûment constaté, les dispositions relatives aux sanctions prévues aux articles 127 et 128 LPS sont réservées (art. 10 al. 5 LRMPSP).

b. Par agissement professionnel incorrect, il faut entendre l'inobservation d'obligations faites à tout praticien d'une profession de la santé, formé et autorisé à pratiquer conformément au droit en vigueur, d'adopter un comportement professionnel consciencieux, en l'état du développement actuel de la science. Cet agissement professionnel incorrect peut notamment résulter d'une infraction aux règles de l'art, de nature exclusivement technique, par commission, par omission ou par une violation de l'obligation générale d'entretenir des relations adéquates avec les patients (ATA/318/2006 du 13 juin 2006).

c. L'agissement professionnel incorrect, au sens de l'article 108 alinéa 2 lettre b LPS, constitue une notion juridique imprécise dont l'interprétation peut être revue librement par la juridiction de recours, lorsque celle-ci s'estime apte à trancher en connaissance de cause. Cependant, si ces notions font appel à des connaissances spécifiques, que l'autorité administrative est mieux à même d'apprécier qu'un tribunal, les tribunaux administratifs et le Tribunal fédéral s'imposent une certaine retenue lorsqu'ils estiment que l'autorité inférieure est manifestement mieux à même d'attribuer à une telle notion un sens approprié au cas à juger. Ils ne s'écartent en principe pas des décisions prises dans ces domaines par des personnes compétentes, dans le cadre de la loi et sur la base des faits établis de façon complète et exacte (ATF 109 IV 211 ; 109 Ib 219 ; ATA/159/2006 du 21 mars 2006 ; A. GRISEL, Traité de droit administratif, Vol. I., Neuchâtel, 1984, p. 336 et 337).

4. Dans le cas d'espèce, le département a retenu divers agissements professionnels incorrects à l'encontre du recourant lors des soins prodigués à deux patientes. Tout d'abord, il lui reproche d'avoir effectué un traitement de racine à Mme B______ sur la base d'une seule radiographie panoramique et d'avoir couronné les dents de celle-ci dans un laps de temps trop court suite à ce traitement, sans s'assurer que les dents traitées ne présentaient pas de lésions apicales.

Le recourant a eu l'occasion de s'exprimer sur les faits allégués. La commission s'est également adressée au Pr K______ pour connaître les examens radiologiques à entreprendre avant et après un traitement de racine. Même si ce praticien ne s'est pas déterminé sur la prise en charge du cas concret, il a mentionné dans les deux options envisageables la nécessité de radiographies apicales des dents concernées. Enfin, le Pr S______ a transmis les constatations qu'il avait pu effectuer lors de la prise en charge subséquente de Mme B______. Le préavis de la commission, sur lequel s'est fondé le département, repose ainsi sur les pièces du dossier. Compte tenu du fait que la commission est composée de spécialistes, mieux à même d'apprécier les questions d'ordre technique, le Tribunal administratif s'impose une certaine retenue et considère qu'en reprochant des agissements professionnels incorrects au recourant lors du traitement prodigué à Mme B______, le département a correctement appliqué la loi.

Le département a également considéré, dans une décision du 20 novembre 2007, que les droits de patiente de Mme M______ avaient été violés d'une part, parce que le recourant n'avait pas recueilli le consentement de sa patiente avant de procéder au traitement et d'autre part, parce qu'il n'avait pas donné accès à cette dernière à son dossier médical. Cette décision ayant été confirmée par le tribunal de céans dans un arrêt de ce jour, il y a lieu d'admettre également l'existence d'agissements professionnels incorrects de la part du Dr X______ lors de la prise en charge de Mme M______.

Au vu des manquements retenus, le département était fondé à prononcer une sanction.

5. Les sanctions administratives visent les infractions aux dispositions de la loi ou de ses règlements ainsi que l'agissement professionnel incorrect dûment constaté et qualifié comme tel par la commission (art. 108 al. 2 let. a et b LPS).

Lorsque la loi n'en dispose pas autrement, les sanctions sont infligées par le département, sur préavis de la commission (art. 110 al. 1 LPS). Le département est compétent pour prononcer notamment l'avertissement, le blâme et l'amende jusqu'à CHF 50'000.-, celle-ci pouvant être cumulée avec les deux premières sanctions (art. 110 al. 2 let. a à c et al. 3 LPS). Dans les cas graves, le Conseil d'Etat est compétent pour sanctionner le contrevenant, en prononçant, soit la radiation temporaire ou définitive, soit encore la fermeture temporaire ou définitive d'un établissement (art. 111 LPS).

6. a. Les sanctions disciplinaires doivent être fixées en tenant compte des principes généraux régissant le droit pénal (ATA/123/1997 du 18 février 1997). En vertu de l'article 1 alinéa 2 de la loi pénale genevoise du 20 septembre 1941 (LPG - E 4 05), les dispositions générales contenues dans le Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0) sont applicables.

b. L’autorité qui inflige une sanction disciplinaire doit respecter le principe de la proportionnalité (V. MONTANI, C. BARDE, La jurisprudence du Tribunal administratif relative au droit disciplinaire, RDAF 1996, p. 347), une telle sanction n’étant pas destinée à punir la personne en cause pour la faute commise, mais à assurer, par une mesure de coercition administrative, le bon fonctionnement du corps social auquel elle appartient, c’est à cet objectif que doit être adaptée la sanction. Le choix de la nature et de la quotité de la sanction doit être approprié au genre et à la gravité de la violation des devoirs professionnels et ne pas aller au-delà de ce qui est nécessaire pour assurer les buts d'intérêt public recherchés. A cet égard, l'autorité doit tenir compte en premier lieu d'éléments objectifs, à savoir des conséquences que la faute a entraînées pour le bon fonctionnement de la profession en cause et de facteurs subjectifs, tels que la gravité de la faute, ainsi que les mobiles et les antécédents de l'intéressé (ATF 108 Ia 230 consid. 2b p. 232 ; ATF 106 Ia 100 consid. 13c p. 121 ; ATF 98 Ib 301 consid. 2b p. 306 ; ATF 97 I 831 consid. 2a p. 835 ; RDAF 2001 II 9 35 consid. 3c/bb ; SJ 1993 221 consid. 4 et les références doctrinales citées ; Arrêt du Tribunal fédéral 2P.133/2003 du 28 juillet 2003 ; ATA/140/2006 du 14 mars 2006 ; ATA/648/2004 du 24 août 2004).

c. En matière de sanctions disciplinaires où l’autorité dispose d’un large pouvoir d’appréciation, le pouvoir d’examen du tribunal de céans se limite à l’excès ou l’abus du pouvoir d’appréciation (art. 61 al. 2 LPA ; ATA/395/2004 du 18 mai 2004 ; ATA/102/2002 du 19 février 2002). Alors même que l'autorité resterait dans le cadre de ses pouvoirs, quelques principes juridiques les restreignent, dont la violation constitue un abus de pouvoir : elle doit exercer sa liberté conformément au droit. Elle doit respecter le but dans lequel un tel pouvoir lui a été conféré, procéder à un examen complet de toutes les circonstances pertinentes, user de critères transparents et objectifs, ne pas commettre d'inégalité de traitement et appliquer le principe de proportionnalité (P. MOOR, op. cit., p. 376 ss. et les références citées).

d. Le Tribunal administratif a retenu, dans une espèce concernant un dentiste, qui avait procédé – sans le consentement de sa patiente – au limage des dents de celle-ci, que, dans la mesure où le recourant n’était pas parvenu à établir à satisfaction de droit le consentement de sa patiente, il se justifiait de sanctionner le praticien par un avertissement (ATA/461/1998 du 28 juillet 1998). Il a confirmé le blâme, doublé d’une amende de CHF 10'000.-, notifiés à un médecin chevronné qui n’avait pas fourni les informations appropriées à sa patiente et qui n’avait de surcroît pas tenu de dossier médical d’une manière suffisamment détaillée (ATA/648/2004 du 24 août 2004). Le blâme a également été confirmé dans le cas de la transmission tardive, par un médecin, du dossier médical de son patient, afin de stigmatiser ce genre de comportement pour le bon fonctionnement du corps social auquel le praticien concerné appartient, l’absence d’antécédents de l’intéressé ayant par ailleurs été soulignée (ATA/318/2006 du 13 juin 2006, confirmé par l’arrêt 2P.202/2006 du Tribunal fédéral du 22 novembre 2006). Dans ce dernier cas, le Tribunal fédéral a relevé que l'accès au dossier médical conditionnait l'exercice par le patient de prérogatives tout-à-fait fondamentales et que la violation de ce droit pouvait être sanctionnée sévèrement.

7. Dans le cas d'espèce, le département a infligé au recourant un blâme et une amende de CHF 3'000.-. Le montant de celle-ci est modeste au vu du maximum de CHF 50'000.- prévu par la loi et des divers manquements retenus. L'obligation de requérir le consentement du patient et celle de permettre l'accès au dossier médical sont essentielles et les praticiens doivent les respecter scrupuleusement. Les sanctions prononcées, soit le blâme et l'amende d'un montant de CHF 3'000.- tiennent compte de l'ensemble des actes reprochés et sont conformes à la jurisprudence. Le département n'a ainsi pas mésusé de son pouvoir d'appréciation

8. Mal fondé, le recours sera rejeté et la décision du département du 12 décembre 2007 confirmée. Un émolument de CHF 1'000.- sera mis à la charge du recourant qui succombe. Aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 LPA).

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 11 janvier 2008 par le Docteur X______ contre la décision du 12 décembre 2007 du département de l'économie et de la santé ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge du Dr X______ un émolument de CHF 1'000.- ;

dit qu’il n’est pas alloué d'indemnité ;

dit que, conformément aux articles 82 et suivants LTF, le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’article 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Philippe Amsler, avocat du recourant ainsi qu'au département de l'économie et de la santé.

Siégeants : M. Thélin, président, Mmes Bovy, Hurni et Junod, M. Dumartheray, juges.

Au nom du Tribunal administratif :

la greffière-juriste :

 

 

C. Del Gaudio-Siegrist

 

le vice-président :

 

 

Ph. Thélin

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :