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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/584/2017

ATA/1545/2017 du 28.11.2017 ( AIDSO ) , REJETE

Descripteurs : DROIT À DES CONDITIONS MINIMALES D'EXISTENCE ; ASSISTANCE PUBLIQUE ; BÉNÉFICIAIRE DE PRESTATIONS D'ASSISTANCE ; PRESTATION D'ASSISTANCE ; SUBSIDIARITÉ ; FORTUNE IMMOBILIÈRE ; IMMEUBLE ; DEMEURE ; OBLIGATION D'ANNONCER(EN GÉNÉRAL) ; DEVOIR DE COLLABORER ; MAXIME INQUISITOIRE ; SUPPRESSION(EN GÉNÉRAL)
Normes : LPA.61.al1 ; Cst.12 ; LIASI.1.al1 ; LIASI.1.al2 ; LIASI.2 ; LIASI.8 ; LIASI.9.al1 ; LIASI.9.al2 ; LIASI.11.al1 ; LIASI.21.al1 ; LIASI.23.al1 ; LIASI.23.al5 ; LRDU.6.a.leta ; RIASI.1.al1 ; RIASI.1.al2 ; LIASI.12 ; LIASI.39 ; LIASI.32 ; LIASI.33.al1 ; LIASI.35.al2.leta
Résumé : À teneur claire de la loi, il n'existe aucun droit à une assistance financière pour une personne propriétaire d'un bien immobilier qui ne lui sert pas de demeure permanente. L'hospice général a fait preuve de bienveillance et a accordé des prestations d'aide financière à bien plaire et en dérogation à la loi à la recourante, en contrepartie du fait que cette dernière entreprenne des démarches concrètes afin d'aliéner son bien. Cette dernière n'ayant pas agi dans ce sens, son recours est rejeté.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/584/2017-AIDSO ATA/1545/2017

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 28 novembre 2017

2ème section

 

dans la cause

 

Madame A______
représentée par Me Aude Longet-Cornuz, avocate

contre

HOSPICE GÉNÉRAL

 



EN FAIT

1) Madame A______, née en 1972, de nationalité portugaise, réside à Genève et est titulaire d'un permis d'établissement. Elle est la mère de B______, née en 1999 et de C______, né en 2009.

2) Elle a bénéficié de prestations d'aide financière de l'Hospice général (ci-après : l'hospice) du 1er juillet 2003 au 28 juin 2006, et à nouveau depuis le 1er décembre 2010.

3) Elle a signé à plusieurs reprises, soit les 8 décembre 2010, 21 novembre 2011, 8 mai 2013 et 4 juin 2015, le document intitulé « Mon engagement en demandant une aide financière à l'Hospice général », à teneur duquel, notamment, elle prenait acte que les prestations d'aide financière étaient subsidiaires à toutes autres ressources provenant du travail, de la famille, de la fortune ou d'une prestation sociale.

4) Le 29 septembre 2015, lors d'un entretien avec le service des enquêtes de l'hospice, elle a mentionné, pour la première fois, être propriétaire d'un bien immobilier au Portugal.

5) Mme A______ a alors, sur demande de l'hospice, produit divers documents relatifs à ce bien.

Il en ressortait qu'elle était propriétaire, en indivision avec son frère et suite aux décès successifs de leurs parents, d'un immeuble sis à D______ (Portugal), leur ville de naissance, ce depuis 2008 ; ce bien se composait d'une maison de 83 m2 et d'une partie externe de 97 m2 et avait une valeur fiscale, en 2015, de EUR 28'958.-. Le 12 janvier 2010, Mme A______ avait conclu avec son frère une convention sous seing privé, aux termes de laquelle elle lui accordait un droit d'habitation sur sa part moyennant paiement de tous les frais afférents à la maison ainsi que de la jouissance du logement lors des ses séjours au Portugal. Selon les déclarations de l'intéressée, la maison était en très mauvais état, l'entretien en étant minimal.

6) Par décision du 18 mai 2016, l'hospice a mis Mme A______ au bénéfice d'une aide financière exceptionnelle pour une période de trois mois, soit du 1er juin au 31 août 2016, afin de lui permettre de vendre son bien immobilier.

La décision était déclarée exécutoire nonobstant recours.

7) Le 23 juin 2016, Mme A______ a formé opposition contre cette décision.

La valeur vénale de la maison était de EUR 14'900.-, selon évaluation d'une agence immobilière. Elle n'était propriétaire que de la moitié du bien, et il fallait encore déduire de cette demi-valeur celle du droit d'habitation accordé à son frère. La maison était de surcroît invendable.

8) Le 22 septembre 2016, le centre d'action sociale E______de l'hospice (ci-après : CAS) a reconsidéré sa décision, étendant à six mois la durée de l'aide exceptionnelle, à la condition que l'intéressée présente les justificatifs des démarches en vue de la vente de sa part du bien immobilier.

Cette décision n'était pas déclarée exécutoire nonobstant recours.

9) Le 21 octobre 2016, l'hospice a précisé à Mme A______ que l'aide financière en question serait versée du 1er novembre 2016 au 30 avril 2017 et qu'elle était conditionnée à l'initiation de démarches de vente, le produit ainsi obtenu devant être restitué à l'hospice, dès réception. Au cas où l'intéressée serait encore copropriétaire de son bien au 30 avril 2017, sa situation serait réévaluée en fonction des démarches entreprises.

10) Le 26 octobre 2016, Mme A______ a formé opposition à l'encontre de la décision du 22 septembre 2016.

La vente du bien immobilier n'était pas réalisable en l'état du marché immobilier portugais et elle équivaudrait de surcroît à ce que son frère, qui avait une famille à charge et ne disposait pas de fonds suffisants pour racheter sa part, fût expulsé de son logement ; la vente du bien supposerait en outre que soit initiée une coûteuse action en partage. L'intéressée proposait d'accorder à l'hospice un droit de gage.

11) Par décision sur opposition du 16 janvier 2017, l'hospice a rejeté l'opposition.

Mme A______ était propriétaire d'un logement ne lui servant pas de résidence principale, ce qui entraînait l'absence de droit à des prestations d'aide financière.

Il n'était pas prouvé que le bien fût réellement invendable, ni que sa vente déboucherait sur une perte. Bien qu'il fût compréhensible que Mme A______ ne voulût pas mettre son frère en difficulté, le principe de subsidiarité impliquait que l'administré mît tout en œuvre pour éviter de recourir à l'aide sociale, et donc qu'il utilisât toutes ses ressources disponibles même si cela devait se faire au détriment de tiers.

Cette décision sur opposition n'était pas déclarée exécutoire nonobstant recours.

12) Par acte posté le 16 février 2016, Mme A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre la décision sur opposition précitée, concluant préalablement à l'octroi de mesures provisionnelles consistant à « prolonger l'aide financière de l'hospice en faveur de Mme A______ jusqu'à droit jugé », et principalement à l'annulation de la décision attaquée et à la prolongation de l'aide financière de l'hospice, sous réserve d'un changement de situation relatif au bien immobilier qu'elle détenait.

L'hospice ne tenait pas compte de l'impossibilité financière et matérielle, pour l'intéressée, de procéder à la vente du bien en question, ce qui avait pour conséquence de la priver de son droit à un niveau de vie suffisant ; le seul moyen de subsistance pour elle et ses enfants était constitué de l'aide octroyée par l'hospice.

Mme A______ avait apporté la preuve du fait que la vente du bien immobilier aurait été déficitaire compte tenu des importants coûts relatifs au partage de la succession ainsi que de l'impôt qui devraient atteindre plus de la moitié du produit de vente.

Elle invoquait une violation de l'art. 35 de la loi sur l'insertion et l'aide sociale individuelle du 22 mars 2007 (LIASI - J 4 04) en rapport avec le principe de proportionnalité dès lors qu'elle avait produit différents documents afin de démontrer que la vente du bien n'était concrètement pas réalisable et que, malgré sa volonté de trouver une solution, elle se trouvait dans l'impossibilité de répondre à la requête de l'hospice, étant précisé que sa part du bien ne saurait dépasser EUR 7'000.-, soit CHF 7'500.-.

13) Le 31 mars 2017, l'hospice a conclu au rejet du recours.

Il était clairement établi que Mme A______ était propriétaire d'un bien immobilier qui ne lui servait pas de demeure permanente. Elle n'avait donc, en raison de ce statut, pas droit à des prestations d'aide financière. Néanmoins, compte tenu notamment de la situation familiale de la recourante, l'hospice lui avait accordé, à titre exceptionnel et à bien plaire, des prestations d'aide financière remboursables, ce pour autant qu'elle entreprenne dans les meilleurs délais les démarches en vue de liquider sa part d'immeuble.

La décision de refus d'octroi de l'aide financière était fondée uniquement sur l'art. 12 LIASI, soit l'exclusion de par la loi de l'octroi d'une aide financière aux propriétaires de biens immobiliers ne servant pas de demeure permanente. Le dépassement de la limite de fortune admise par les barèmes, en l'occurrence CHF 8'000.-, était un motif supplémentaire et non cumulatif pour un tel refus.

L'hospice avait basé sa décision sur l'art. 12 LIASI et non pas sur l'art. 35 LIASI. Le grief d'une application disproportionnée de ce dernier devait ainsi être écarté.

14) Par décision du 24 avril 2017, la présidence de la chambre administrative a déclaré irrecevable la demande de mesures provisionnelles de Mme A______. Il devait être constaté que le recours avait effet suspensif s'agissant des prestations ordinaires d'aide financière et que, par conséquent, le droit de l'intéressée auxdites prestations perdurait pour la période allant du 1er mai 2017 au prononcé du jugement au fond de la chambre administrative.

15) Le 5 mai 2017, le jugé délégué a tenu une audience de comparution personnelle des parties.

Mme A______ a indiqué avoir toujours considéré que l'hospice ne se serait pas accommodé d'un prix inférieur à EUR 14'000.-, en cas de vente de sa part de copropriété à son frère. Elle prenait note du fait que le plus important était de ne plus être propriétaire du bien et de ce que le prix de vente pouvait être inférieur au montant précité, étant toutefois précisé qu'un prix trop bas pourrait être considéré comme un dessaisissement volontaire et avoir des conséquences négatives sur l'aide financière qui lui serait accordée.

16) Le 19 mai 2017, l'hospice a persisté dans ses conclusions et produit copie d'un contrat de promesse de vente, rédigé en langue portugaise, que l'intéressée avait transmis à son assistant social.

17) Le même jour, Mme A______ a confirmé avoir entrepris les démarches en vue de la négociation de la vente de sa part du bien immobilier à son frère, selon le projet transmis par l'hospice.

18) Sur ce, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10 ; art. 52 LIASI).

2) Le litige porte sur le refus de l'intimé de continuer à verser des prestations d'aide financière à la recourante en raison de la propriété d'un bien immobilier au Portugal.

3) Le recours peut être formé pour violation du droit y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (art. 61 al. 1 LPA).

4) Aux termes de l’art. 12 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), quiconque est dans une situation de détresse et n’est pas en mesure de subvenir à son entretien a le droit d’être aidé et assisté et de recevoir les moyens indispensables pour mener une existence conforme à la dignité humaine.

Ce droit à des conditions minimales d’existence fonde une prétention des justiciables à des prestations positives de l’État. Il ne garantit toutefois pas un revenu minimum, mais uniquement la couverture des besoins élémentaires pour survivre d’une manière conforme aux exigences de la dignité humaine, tels que la nourriture, le logement, l’habillement et les soins médicaux de base. L’art. 12 Cst. se limite, autrement dit, à ce qui est nécessaire pour assurer une survie décente afin de ne pas être abandonné à la rue et réduit à la mendicité (ATF 142 I 1 consid. 7.2.1 ; 136 I 254 consid. 4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2D_9/2013 du 16 mai 2013 consid. 5.1 ; ATA/1010/2016 du 29 novembre 2016 consid. 2 ; ATA/878/2016 du 18 octobre 2016 consid. 2).

5) a. En droit genevois, la LIASI et le règlement d’exécution de la LIASI du 25 juillet 2007 (RIASI - J 4 04.01) concrétisent l’art. 12 Cst. (ATA 1010/2016 précité consid. 3a ; ATA/878/2016 précité consid. 3a), tout en allant plus loin que ce dernier.

b. La LIASI a pour but de prévenir l’exclusion sociale et d’aider les personnes qui en souffrent à se réinsérer dans un environnement social et professionnel (art. 1 al. 1 LIASI). Elle a également pour objectif plus vaste de garantir à ceux qui se trouvent dans la détresse matérielle et morale des conditions d’existence conformes à la dignité humaine (art. 1 al. 2 LIASI). Ses prestations sont fournies sous forme d’accompagnement social, de prestations financières et d’insertion professionnelle (art. 2 LIASI).

6) a. Aux termes de l’art. 8 LIASI, ont droit à des prestations d’aide financière les personnes majeures qui ne sont pas en mesure de subvenir à leur entretien ou à celui des membres de la famille dont ils ont la charge (al. 1). Ces prestations ne sont pas remboursables, sous réserve des art. 12 al. 2 et 36 à 41 LIASI (al. 2).

b. L’aide sociale est soumise au principe de subsidiarité, conformément à l’art. 12 Cst. Les prestations d’aide financière versées sont subsidiaires à toute autre source de revenu (art. 9 al. 1 LIASI). Le bénéficiaire doit faire valoir sans délai ses droits auxquels l’aide financière est subsidiaire et doit mettre tout en œuvre pour améliorer sa situation sociale et financière (art. 9 al. 2 LIASI).

La personne dans le besoin doit avoir épuisé les possibilités d’auto-prise en charge, les engagements de tiers et les prestations volontaires de tiers (ATA/1010/2016 précité consid. 4b ; ATA/878/2016 précité consid. 3d). L’aide est subsidiaire, de manière absolue, à toute autre ressource, mais elle est aussi subsidiaire à tout revenu que le bénéficiaire pourrait acquérir par son insertion sociale ou professionnelle (MGC 2005-2006/I A p. 259 ; ATA/1010/2016 précité consid 4b ; ATA/4/2015 du 6 janvier 2015 consid. 3).

7) a. L’art. 11 al. 1 LIASI décrit le cercle des bénéficiaires des prestations d’aide financière en prévoyant qu’y ont droit les personnes qui ont leur domicile et leur résidence effective sur le territoire genevois, ne sont pas en mesure de subvenir à leur entretien et répondent aux autres conditions de la loi, soit celles des art. 21 à 28 LIASI, ces conditions étant cumulatives.

Selon l’art. 21 al. 1 LIASI, ont droit aux prestations d’aide financière les personnes dont le revenu mensuel déterminant n’atteint pas le montant destiné à la couverture des besoins de base et dont la fortune ne dépasse pas les limites fixées par règlement du Conseil d’État. L’art. 23 al. 1 LIASI prévoit que sont prises en compte la fortune et les déductions sur la fortune prévues aux art. 6 et 7 de la loi sur le revenu déterminant unifié du 19 mai 2005 (LRDU - J 4 06), les limites de fortune permettant de bénéficier des prestations d’aides financière étant fixées par règlement du Conseil d’État (art. 23 al. 5 LIASI).

Le revenu déterminant le droit aux prestations sociales comprend notamment, au titre de la fortune prise en compte, notamment tous les immeubles situés dans et hors du canton (art. 6 let. a LRDU).

L’art. 1 al. 1 RIASI prévoit que les limites de fortune permettant de bénéficier des prestations d’aide financière sont de CHF 4'000.- pour une personne seule majeure (let. a), CHF 8'000.- pour un couple (let. b) et CHF 2'000.-pour chaque enfant à charge (let. c). Le total de la fortune ne peut en aucun cas dépasser CHF 10'000.- pour l'ensemble du groupe familial (art. 1 al. 2 RIASI).

b. Parmi les dispositions traitant des bénéficiaires de l’aide sociale, l’art. 12 LIASI est consacré aux cas exceptionnels. L’art. 12 al. 2 LIASI prévoit ainsi qu’exceptionnellement une aide financière peut être accordée à une personne propriétaire d’un bien immobilier, si ce bien lui sert de demeure permanente. Dans ce cas, l’aide financière accordée est remboursable, l’immeuble pouvant être grevé d’une hypothèque au profit de l’hospice. Les prestations d’aide financière accordées au propriétaire d’un bien immobilier en vertu de l’art. 12 al. 2 LIASI sont remboursables (art. 39 al. 1 LIASI) et exigibles dès que le bénéficiaire ne remplit plus les conditions du besoin (art. 39 al. 2 LIASI).

Il résulte de l’exposé des motifs relatifs à la LIASI, en particulier des débats ayant porté sur l’art. 12 al. 2 LIASI, que le législateur estimait nécessaire que l’hospice puisse aider une personne propriétaire de son logement pour éviter que celle-ci soit obligée de réaliser son bien et se retrouve sans toit. Un amendement prévoyant que les prestations ainsi accordées soient remboursables a été proposé, l’hospice pouvant par ailleurs obtenir une hypothèque légale à titre de garantie sur l’immeuble, en contrepartie de prestations financières (MGC 2006-2007/V, D/25 1895-1911). La ratio legis de la loi est donc bien que l’hospice puisse venir en aide à une personne propriétaire de son logement, dans lequel elle demeure, pour éviter que celle-ci ne se retrouve à la rue en cas de vente de l’immeuble. Ainsi, l’exception prévue à l’art. 12 al. 2 LIASI est celle du cas où le bien immobilier constitue la demeure permanente de la personne qui requiert l’aide de l’hospice (ATA/1010/2016 précité consid. 5b ; ATA/802/2016 du 27 septembre 2016 consid. 5). Le droit à des prestations n’est dès lors pas ouvert au requérant propriétaire d’un bien immobilier qui n’est pas utilisé comme résidence permanente, l’exception voulue par le législateur n’étant pas réalisée dans ce cas (ATA/1010/2016 précité consid. 5b ; ATA/802/2016 précité consid. 5).

8) a. Selon l’art. 32 LIASI, le bénéficiaire est tenu de fournir tous les renseignements nécessaires pour établir son droit et fixer le montant des prestations d’aide financière. Il doit autoriser l’hospice à prendre des informations à son sujet qui sont nécessaires pour déterminer son droit.

De même, il doit immédiatement déclarer à l’hospice tout fait nouveau de nature à entraîner une modification du montant des prestations d’aide financière qui lui sont allouées ou leur suppression (art. 33 al. 1 LIASI). Le document intitulé « mon engagement en demandant une aide financière à l’Hospice général » concrétise cette obligation de collaborer en exigeant du demandeur qu’il donne immédiatement et spontanément à l’hospice tout renseignement et toute pièce nécessaires à l’établissement de sa situation personnelle, familiale et économique (ATA/878/2016 précité consid. 3f ; ATA/802/2016 précité consid. 4a).

b. La maxime inquisitoire, applicable à la procédure en matière d’aide sociale, ne dispense pas le requérant de l’obligation d’exposer les circonstances déterminantes pour fonder son droit. Son devoir de collaborer ne libère pas l’autorité compétente de son devoir d’établir les faits mais limite son obligation d’instruire, ce qui conduit à un déplacement partiel du fardeau de la preuve du côté des requérants d’aide sociale. Ceux-ci supportent le fardeau objectif de la preuve qu’ils sont en partie ou entièrement tributaires d’une telle aide en raison d’un manque de moyens propres. Le devoir de collaborer ne peut toutefois être soumis à des exigences trop grandes. C’est pourquoi on ne peut exiger des intéressés qu’ils fournissent des documents qu’ils n’ont pas ou qu’ils ne peuvent se procurer sans complication notable. La preuve exigible doit porter sur l’état de besoin. Dès lors, comme c’est le manque de moyens suffisants qui doit être démontré, l’intéressé doit pour ainsi dire prouver un fait négatif. La preuve appropriée consiste donc à démontrer un fait positif dont on peut déduire un fait négatif. Il appartient à l’autorité compétente en matière d’aide sociale d’établir, sur la base de faits positifs (comme la résiliation des rapports de travail, l’évolution de la fortune sur un compte d’épargne, l’état de santé, les obligations familiales), s’il existe un état de nécessité. De son côté, le requérant est tenu de collaborer en ce sens qu’il donne les informations nécessaires et verse les documents requis au dossier. Comme il est naturellement plus aisé de prouver l’avoir que l’absence d’avoir, il y a lieu de poser une limite raisonnable à l’obligation légale d’apporter la preuve, ainsi qu’à l’exigence relative à la présentation d’un dossier complet (arrêts du Tribunal fédéral 8C_702/2015 du 15 juin 2016 consid. 6.2.1 ; 8C_50/2015 du 17 juin 2015 consid. 3.2.1).

c. Les prestations d’aide financière peuvent être réduites, suspendues, refusées ou supprimées lorsque le bénéficiaire ne répond pas ou cesse de répondre aux conditions de la loi (art. 35 al. 2 let. a LIASI).

d. Selon la jurisprudence, la suppression ou la réduction des prestations d'assistance doit au surplus être conforme au principe de la proportionnalité, imposant une pesée de l'ensemble des circonstances. Il faut alors prendre en considération la personnalité et la conduite du bénéficiaire des prestations, la gravité des fautes qui lui sont reprochées, les circonstances de la suppression des prestations ainsi que l'ensemble de la situation de la personne concernée (ATF 122 II 193 ; ATA/357/2017 du 28 mars 2017 consid. 7c).

9) a. En l'espèce, il ressort du dossier que la recourante est propriétaire, en indivision avec son frère, d'un bien immobilier au Portugal, qui ne lui sert pas de demeure permanente.

À teneur claire de la loi, il n'existe pour la recourante aucun droit à une assistance financière.

b. L'intimé lui a tout de même octroyé des prestations d'aide financière à partir du 1er juin 2016 afin de lui permettre de vendre sa part de la maison ; cette aide a été ensuite prolongée, ce sous condition que l'intéressée entreprenne les démarches nécessaires à la vente en question. La recourante a produit, en mai 2017, un projet d'engagement dans ce sens, soit plus précisément en vue de l'achat de sa part de copropriété par son frère. Depuis lors, aucun autre élément n'a été transmis à la chambre de céans démontrant une quelconque concrétisation de cette « promesse de vente ». Force est de constater que, à défaut d'autres pièces probantes fournies par le recourante, il n'apparaît pas qu'elle ait entrepris de démarches concrètes en vue de l'aliénation de sa part du bien.

La recourante perd de vue que l’hospice a fait preuve de bienveillance et lui a accordé des prestations d'aide financière à bien plaire et en dérogation à la loi, alors qu'il lui incombait, en contrepartie, de tout mettre en œuvre afin d'aliéner son bien. Nonobstant ce traitement de faveur de la part de l'hospice, il n'apparaît pas qu'elle ait accompli une quelconque démarche, durant ce laps de temps, pour régulariser sa situation, comme elle s'y était pourtant engagée et l’avait requis l’établissement intimé. Dans ce cadre, la recourante ne saurait alléguer que la copropriété indivise à parts égales qu’elle formerait encore ne lui permettrait pas de procéder à l’aliénation du bien en faveur de son frère.

Dans ces circonstances, le refus de l’autorité intimée de continuer à verser à la recourante une aide financière, que cela soit à titre ordinaire ou exceptionnel, ne prête pas le flanc à la critique.

c. La décision entreprise est dès lors conforme à la loi et sera confirmée. Elle n’apparaît au demeurant pas choquante ni disproportionnée, la situation du bien immobilier de la recourante devant être réglée tant par respect de la loi, que par égalité de traitement avec les autres justiciables.

10) Il s’ensuit que le recours sera rejeté.

11) Vu la nature du litige, il ne sera pas perçu d’émolument (art. 87 al. 1 LPA et 11 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03). Vu son issue, il ne sera pas alloué d’indemnité de procédure (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 16 février 2017 par Madame A______ contre la décision de l'Hospice général du 16 janvier 2017 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument, ni alloué d'indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Aude Longet-Cornuz, avocate de la recourante, ainsi qu'à l'Hospice général.

Siégeant : Mme Junod, présidente, M. Verniory, Mme Payot Zen-Ruffinen, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

J. Balzli

 

la présidente siégeant :

 

 

Ch. Junod

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :