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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/779/2021

ATA/142/2022 du 08.02.2022 sur JTAPI/882/2021 ( LCI ) , REJETE

Descripteurs : AMENDE;TRAVAUX DE CONSTRUCTION
Normes : RChant.1; RChant.3.al1; RChant.92; RChant.99; RChant.112; OTConst.15; LCI.137
Résumé : Recours contre une amende administrative pour un échafaudage non conforme. Conditions de travail dangereuses. Le principe et le montant de l'amende respectent le principe de la proportionnalité au vu des manquements importants. Rejet du recours.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/779/2021-LCI ATA/142/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 8 février 2022

3ème section

 

dans la cause

 

A______
représentée par Me Stéphane Piletta-Zanin, avocat

contre

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE-OAC

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 2 septembre 2021 (JTAPI/882/2021)


EN FAIT

1) Monsieur B______, avocat, est propriétaire des parcelles nos 302, 303, 1'311 et 1'312 de la commune de ______.

2) Il a obtenu une autorisation de construire DD 1______ portant sur la construction de deux maisons villageoises contiguës avec couvert - mise en place d’une pompe à chaleur et de sondes géothermiques le 26 mars 2018.

3) A______ (ci-après : la société) est une société anonyme de droit suisse ayant son siège à Genève. Elle a pour but l'étude, la promotion et la recherche de marchés dans le domaine des investissements, ainsi que l’importation et exportation de produits et articles de toute nature.

4) La société est active dans le domaine de la construction et a réalisé des travaux sur les parcelles précitées dans le cadre de l'autorisation de construire DD 1______.

5) Le 24 septembre 2020, un inspecteur de l’office des autorisations de construire (ci-après : OAC) du département du territoire (ci-après : le département) a procédé à un contrôle sur le chantier et a constaté diverses infractions au règlement sur les chantiers du 30 juillet 1958 (RChant - L 5 05.03.), soit notamment la violation des art. 4 al. 3, 99, 112 RChant et 9 let. a et 49 al. 1 de l'ordonnance sur la sécurité et la protection de la santé des travailleurs dans les travaux de construction du 29 juin 2005 (ordonnance sur les travaux de construction, aOTConst -
RS 832.311.141).

Un arrêt de chantier a été prononcé.

6) Par courrier du 29 septembre 2020, le département a fait part à la société des constatations faites sur le chantier le 24 septembre 2020, soit des travaux de crépissage de la façade sur un échafaudage qui n’était pas conforme. L’échafaudage n’avait pas été contrôlé, la distance entre ses plateaux et la façade était supérieure aux 30 cm autorisés. L’échafaudage avait été partiellement démonté ou était incomplet. Il l'a invitée à faire valoir ses observations dans un délai de dix jours. Le droit de sanctionner les infractions commises était réservé.

La société n’a pas donné suite à ce courrier.

7) Par décision du 27 janvier 2021, le département a infligé à la société, au titre d'entreprise employant des travailleurs exécutant des travaux se rapportant à l'activité du bâtiment ou du génie civil au sens de l'art. 1 al. 2 RChant, une amende de CHF 5'000.-, en application de l'art. 137 de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05).

Ce montant tenait compte de la gravité objective et subjective des infractions constatées le 24 septembre 2020.

8) Par acte expédié le 4 octobre 2021, la société a interjeté recours auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) contre la décision du département concluant à son annulation et à ce qu'un avertissement soit prononcé.

Elle avait effectivement installé l’échafaudage sur le mur pignon du bâtiment, non visible depuis la route, d’une longueur de 6 m : il était solidement ancré et positionné. Le mur était particulièrement ancien et comprenait de très nombreux « désordres » tant sur le plan vertical qu’horizontal. À certains endroits, la maçonnerie opérait même un surplomb « relativement à ce qui devrait être la verticalité du plan ». Il était pratiquement impossible d’installer un échafaudage qui suivait parfaitement la ligne de ces « désordres » : ainsi, seuls quelques rares centimètres d’écart, relativement à la norme – espace non supérieur à 30 cm – n’avaient malheureusement pas pu être comblés. Ces dépassements étaient ponctuels et minimes et ne présentaient guère de danger.

De plus, tous les travaux de maçonnerie (sauf les travaux dalles et sous-sol) avaient été réalisés en suivant précisément les instructions du département, à savoir en utilisant de la chaux et non du ciment Portland et en respectant les proportions exactes de la « recette » fournie par l’expert présenté par le département.

Par ailleurs, l’employé en cause n’était plus en mesure de savoir pour quelle raison le garde-corps aurait été provisoirement déposé, mais confirmait que les ouvriers travaillaient toujours dans la plus grande sécurité.

Un certain nombre de litiges avaient existé entre le propriétaire et le département, raison pour laquelle la société se permettait d’indiquer que le contrôle inopiné pouvait bien être le fait d’une dénonciation.

L’amende était inacceptable et un simple avertissement aurait suffi. Par ailleurs, le montant de CHF 5'000.- était exagéré et déséquilibrerait encore plus l’entreprise qui ne comptait que deux employés.

9) Dans ses observations du 3 mai 2021, le département a conclu au rejet du recours. Il a notamment produit son rapport d'enquête du 25 septembre 2020, comportant plusieurs photos du chantier et de l’échafaudage litigieux.

Il était apparu, comme cela ressortait très clairement de ces photographies, que lors du contrôle, l’échafaudage était partiellement démonté, voire incomplet et que les plateaux utilisés étaient situés à une distance supérieure aux 30 cm admis par la loi, ce qui représentait un fort risque de chute pour les ouvriers présents sur le chantier qui travaillaient à une hauteur de plus de 3 m. L’installation n’était, par ailleurs, pas munie des garde-corps réglementaires. Enfin, l’échafaudage n’avait pas fait l’objet des contrôles et vérifications usuels.

La société, dont les ouvriers avaient eux-mêmes procédé au montage de l’échafaudage, avait accepté que ces derniers soient actifs sur le chantier, alors que les mesures de sécurité imposées par les dispositions légales applicables n’étaient pas toutes mises en œuvre. D’autres mesures auraient pu être envisagées afin de proposer une sécurité maximale aux ouvriers.

La faute de la société était d’autant plus importante qu’elle ne bénéficiait ni des compétences ni de la formation nécessaires à l’installation d’échafaudages. Elle n'avait, à aucun moment, informé le département afin qu’il puisse procéder au contrôle de l’installation.

Au vu des manquements constatés, étayés par les pièces figurant au dossier, la société, en ne faisant pas appel à une entreprise spécialisée dans le montage d’échafaudages, en ne demandant pas à l’autorité intimée qu’elle procède aux vérifications d’usage et en laissant ses ouvriers utiliser l’installation défectueuse, avait accepté que ces derniers s’exposent à des risques pouvant potentiellement être graves, voire fatals.

Le montant de l’amende se situait dans le bas de la fourchette des sanctions pouvant être infligées et la société ne démontrait pas les conséquences que cette amende pourrait avoir sur sa situation financière.

10) La société a répliqué le 24 juin 2021, persistant dans ses conclusions.

Vu les surplombs et les fortes altérations du mur, il n’aurait pas été possible d’installer des garde-corps ; seule une sorte de marche aurait pu être posée, mais cela aurait créé un obstacle supplémentaire.

N’étant pas du métier, elle ignorait qu’il existait des échafaudages en caoutchouc « susceptibles de suivre en tout point la réalité de désordre effectif ».

Elle maintenait que l’amende était excessive et imaginait même que cette affaire était intervenue sur dénonciation, peut-être d’un voisin mécontent.

11) Le département a dupliqué le 19 juillet 2021. Il a produit un document édité par la SUVA et intitulé « Questions et réponses pour Echafaudages en façades » (ci-après : document SUVA).

Selon ce document SUVA, si la distance de 30 cm ne pouvait pas être respectée, il était possible d’y remédier par la pose d’une console supplémentaire, voire d’un tube permettant d’atténuer cet espace qui pouvait occasionner un grave risque de chute pour les ouvriers. L’échafaudage aurait également pu être déplacé afin qu’au niveau de son point le plus péjorant, il n’y ait pas une distance de plus de 30 cm.

Il était convaincu que l’échafaudage était incomplet et que c’était pour cette raison que la distance avec la façade n’avait pas été respectée.

12) Par jugement du 1er septembre 2021, le TAPI a rejeté le recours.

La société, qui reconnaissait ne pas être une entreprise spécialisée dans l'installation d'échafaudages, avait commis une faute en utilisant un échafaudage qu'elle avait elle-même installé et qui ne respectait pas les prescriptions légales en la matière. Elle n'avait ni fait appel à une entreprise professionnelle, ni demandé à l'autorité intimée qu'elle procède aux vérifications légales.

Si, certes, le mur était celui d'une demeure ancienne, et qu'il n'était pas complètement lisse, il n'en demeurait pas moins qu'elle était tenue de respecter les prescriptions légales en la matière afin d'assurer la sécurité des ouvriers qui y travaillaient. Si elle estimait qu'elle ne pouvait respecter ces prescriptions, elle se devait, à tout le moins, de faire contrôler l'installation par le département avant de l'utiliser, ce qu'elle avait omis de faire.

Les manquements reprochés se rapportaient à des règles essentielles visant à assurer la sécurité d'un chantier aux fins de prévenir les risques d'accidents potentiellement très graves pour les ouvriers y travaillant. La société avait agi en connaissance de cause, de sorte que le montant de l'amende était justifié.

Pour le surplus, elle ne démontrait pas l’existence de difficultés pécuniaires l'empêchant de s'acquitter du montant de l'amende de CHF 5'000.-.

13) Par acte du 4 octobre 2021, la société a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre le jugement précité. Elle a conclu à son annulation et au prononcé d'un avertissement à son encontre. Préalablement, elle a conclu à ce qu'un transport sur place soit ordonné.

Elle ne contestait pas la réalité de l'infraction ayant abouti au prononcé de l'amende, mais sa prétendue gravité et le montant de l'amende, manifestement disproportionné vu les circonstances du cas d'espèce, n'étant pour le surplus pas une entreprise récidiviste. Le montant ne correspondait nullement aux exemples jurisprudentiels mentionnés par le TAPI.

14) Le département a répondu au recours le 4 novembre 2021, concluant à son rejet.

15) La recourante a répliqué en date du 19 novembre 2021, persistant dans l'ensemble de ses conclusions.

16) Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

La recourante sollicite préalablement un transport sur place.

2. a. Le droit d'être entendu, garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), comprend notamment le droit pour les parties de produire des preuves pertinentes, d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l'administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s'exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 142 II 218 consid. 2.3 ; 140 I 285 consid. 6.3.1). Ce droit ne s'étend toutefois qu'aux éléments pertinents pour décider de l'issue du litige et le droit de faire administrer des preuves n'empêche pas le juge de renoncer à l'administration de certaines preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier s'il acquiert la certitude que celles-ci ne l'amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 138 III 374 consid. 4.3.2 ; 131 I 153 consid. 3).

Ces principes s'appliquent en particulier à la tenue d'une inspection locale, en l'absence d'une disposition cantonale qui imposerait une telle mesure d'instruction, étant précisé qu'une telle disposition n'existe pas en droit genevois (ATF 120 Ib 224 consid. 2b ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_243/2013 du 27 septembre 2013 consid. 3.2.1 ; ATA/720/2012 du 30 octobre 2012 consid. 3).

b. En l'espèce, la chambre de céans, à l'instar du TAPI, estime que le dossier contient les éléments suffisants et nécessaires à l'examen des griefs et arguments mis en avant par la recourante, notamment plusieurs photos du mur et des échafaudages litigieux dans leur état au moment de l'inspection du département. La demande s'avère en outre dénuée d'objet, dans la mesure où la recourante reconnaît les infractions dans son recours, contestant désormais uniquement le principe de l'amende administrative ainsi que son montant.

Partant, cette requête sera rejetée.

3. A l'appui de son recours, la recourante invoque une violation du principe de la proportionnalité ainsi que l'interdiction de l'arbitraire.

a. Selon l'art. 151 let. d LCI, le Conseil d'État fixe par règlements les dispositions relatives à la sécurité et à la prévention des accidents sur les chantiers.

Sur cette base, le Conseil d'État a adopté le RChant.

b. Selon l'art. 1 al. 1 RChant, la prévention des accidents sur les chantiers et les mesures à prendre pour assurer la sécurité et la protection de la santé des travailleurs, ainsi que la sécurité du public, des ouvrages et de leurs abords sont réglées par les dispositions du RChant.

Sont tenus de s'y conformer tous les participants à l'acte de construire, démolir, transformer, entretenir, c'est-à-dire toutes les personnes exécutant des travaux se rapportant à l'activité du bâtiment ou du génie civil ainsi que les personnes physiques ou morales employant des travailleurs à cet effet. Il en est de même des personnes chargées de la surveillance des travaux, notamment pour le compte des bureaux d'ingénieurs, d'architectes, des entreprises générales et des coordonnateurs de sécurité et de santé (art. 1 al. 2 RChant).

L'art. 3 al. 1 RChant prévoit que le travail doit s'exécuter en prenant, en plus des mesures ordonnées par le présent règlement, toutes les précautions commandées par les circonstances et par les usages de la profession.

Selon l'art. 4 al. 1 RChant, afin d'en permettre le contrôle, aucun chantier ne peut être ouvert et aucun échafaudage ne peut être dressé avant d'avoir été annoncé à la direction de l'inspectorat de la construction sur une formule ad hoc fournie par l'administration.

Aux termes de l'art. 4 al. 3 RChant, il est interdit d’utiliser un échafaudage ou tout autre système de protection qui n’a pas, au préalable, été déclaré conforme aux exigences du [présent] règlement par une personne qualifiée de l’entreprise qui l’a monté et par la direction de l’inspectorat de la construction.

Tout échafaudage ou installation de protection utilisé par une entreprise autre que celle qui l’a construit ne doit recevoir aucune modification et doit être régulièrement contrôlé par le constructeur (art. 98 al. 1 RChant). Les modifications nécessaires ne peuvent être entreprises qu’avec l’accord et sous le contrôle du constructeur (al. 2). L’échafaudage doit être contrôlé visuellement chaque jour par son utilisateur. S’il présente des défauts, il ne doit pas être utilisé (al. 3).

D'après l'art. 92 RChant, des échafaudages, conformes aux prescriptions de l’ordonnance sur les travaux de construction, sont prescrits pour tout travail de construction de bâtiments exécuté à une hauteur de chute supérieure à 3 m. Le garde-corps supérieur de l’échafaudage doit, pendant toute la durée des travaux de construction, dépasser de 1 m au moins le bord de la zone la plus élevée présentant un risque de chutes.

Cette prescription figure également à l'art. 18 de l’ordonnance sur la sécurité et la protection de la santé des travailleurs dans les travaux de construction du 29 juin 2005 (Ordonnance sur les travaux de construction, OTConst -
RS 832.311.141).

Selon l'art. 99 RChant, tout poste de travail doit être muni de garde-corps réglementaires sur toutes les faces exposées au vide dès qu’il atteint 2 m de hauteur (al. 1). Ces garde-corps doivent rester en place jusqu’à l’achèvement de tous les travaux (al. 2).

La distance entre les ponts d’un échafaudage et la façade ne peut excéder 30 cm sans qu’un garde-corps réglementaire soit installé (art. 112 RChant).

4. a. Selon l'art. 333 RChant, tout contrevenant aux dispositions du RChant est passible des peines prévues par la LCI (ATA/559/2021 du 25 mai 2021 consid. 7a).

b. Aux termes de l'art. 137 LCI, est passible d'une amende administrative de CHF 100.- à CHF 150'000.- tout contrevenant à la LCI, aux règlements et aux arrêtés édictés en vertu de ladite loi, ainsi qu'aux ordres donnés par le département dans les limites de ladite loi et des règlements et arrêtés édictés en vertu de celle-ci (al. 1). Le montant maximum de l'amende est de CHF 20'000.- lorsqu'une construction, une installation ou tout autre ouvrage a été entrepris sans autorisation mais que les travaux sont conformes aux prescriptions légales (al. 2). Il est tenu compte, dans la fixation du montant de l'amende, du degré de gravité de l'infraction. Constituent notamment des circonstances aggravantes la violation des prescriptions susmentionnées par cupidité, les cas de récidive et l'établissement, par le mandataire professionnellement qualifié ou le requérant, d'une attestation, au sens de l'art. 7, non conforme à la réalité (al. 3). La poursuite et la sanction administrative se prescrivent par sept ans (al. 5).

c. Les amendes administratives prévues par les législations cantonales sont de nature pénale, car aucun critère ne permet de les distinguer clairement des contraventions pour lesquelles la compétence administrative de première instance peut au demeurant aussi exister. C’est dire que la quotité de la sanction administrative doit être fixée en tenant compte des principes généraux régissant le droit pénal (ATA/508/2020 du 26 mai 2020 consid. 4b ; Pierre MOOR/Étienne POLTIER, Droit administratif, vol. 2, 3ème éd., 2011, p. 160 n. 1.4.5.5 ; plus nuancé : Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2ème éd., 2018, p. 413 n. 1211).

d. En vertu de l'art. 1 al. 1 let. a de la loi pénale genevoise du 17 novembre 2006 (LPG - E 4 05), les dispositions de la partie générale du code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0) s'appliquent à titre de droit cantonal supplétif. On doit cependant réserver celles qui concernent exclusivement les juridictions pénales (notamment les art. 34 ss, 42 ss, 56 ss, 74 ss et 106 al. 1 et 2 CP ; ATA/422/2020 du 30 avril 2020 consid. 18c ; ATA/1370/2019 du 10 septembre 2019 consid. 3c).

Il est ainsi nécessaire que la personne contrevenante ait commis une faute, fût-ce sous la forme d’une simple négligence (ATA/407/2020 du 30 avril 2020 consid. 7c ; Ulrich HÄFELIN/Georg MÜLLER/Felix UHLMANN, Allgemeines Verwaltungsrecht, 8ème éd., 2020, p. 343 n. 1493).

e. Selon la jurisprudence constante, l’administration doit faire preuve de sévérité afin d’assurer le respect de la loi et jouit d’un large pouvoir d’appréciation pour infliger une amende. La chambre administrative ne la censure qu’en cas d’excès ou d'abus (ATA/526/2020 du 26 mai 2020 consid. 10b).

f. L'autorité prend en considération la nature, la gravité et la fréquence des infractions commises, dans le respect du principe de la proportionnalité (art. 36
al. 3 Cst. ; ATA/326/2020 du 7 avril 2020 consid. 8b ; ATA/1365/2017 du 9 octobre 2017 consid. 9e).

g. L’autorité qui prononce une mesure administrative ayant le caractère d’une sanction doit également faire application des règles contenues aux art. 47 ss CP (principes applicables à la fixation de la peine), soit tenir compte de la culpabilité de l’autrice ou auteur et prendre en considération, notamment, les antécédents et la situation personnelle de cette dernière ou ce dernier (art. 47 al. 1 CP). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l’acte, par les motivations et les buts de l’autrice ou auteur et par la mesure dans laquelle celle-ci ou celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (art. 47 al. 2 CP ; ATA/280/2020 du 10 mars 2020 consid. 6b).

h. Enfin, selon l'art. 49 al. 1 CP, lorsque par un ou plusieurs actes, la même personne encourt plusieurs sanctions, la juridiction la condamne à la peine de l’infraction la plus grave et l’augmente dans une juste proportion (arrêt du Tribunal fédéral 6B_776/2019 du 20 novembre 2019 consid. 4.1). De plus, lorsqu’une personne est sanctionnée pour des faits commis avant d’avoir été condamnée pour une autre infraction, la juridiction doit fixer la sanction de manière à ce que la personne contrevenante ne soit pas punie plus sévèrement que si un seul jugement avait été prononcé (art. 49 al. 2 CP ; ATA/1504/2017 du 21 novembre 2017 consid. 4d).

i. En l'espèce, lors d'un contrôle effectué sur le site le 24 septembre 2020 par l'autorité intimée, il a été constaté que les ouvriers de la recourante travaillaient dans des conditions dangereuses dans la mesure où : 1) ils effectuaient des travaux de crépissage de la façade sur un échafaudage qui n'était pas conforme et qui n'avait pas été contrôlé au préalable par l'OAC ; 2) la distance entre les plateaux étaient supérieure aux 30 cm autorisés ; 3) l'échafaudage avait partiellement été démonté ou était incomplet.

Les infractions reprochées à la recourante dans la décision querellée, soit la violation des art 4 al. 3, 31, 99, 112 RChant et des art. 9 let. a et 49 al. 1 aOTConst, sont objectivement réalisées et au demeurant plus contestées. L'amende querellée est ainsi fondée dans son principe.

Face aux prétendues difficultés dont se prévaut la recourante, relativement à une irrégularité du mur rendant matériellement impossible le respect de 30 cm entre le mur et le pont de l'échafaudage sur toute la longueur du mur, elle aurait pu, comme le relève à juste titre le département, faire appel à une entreprise spécialisée pour la mise en place de l'échafaudage ou solliciter le département en vertu de l'art. 4 al. 3 RChant pour qu'il puisse contrôler la conformité de l'installation, ce qu'elle a omis de faire.

Comme retenu à juste titre par le département et le TAPI, la faute de la recourante, qui ne pouvait ignorer les dispositions applicables du fait de son domaine d'activités, est importante, le comportement passif de cette dernière revêtant à tout le moins la forme de la négligence. Son comportement aurait pu avoir de très graves conséquences, les travaux en cause pouvant faire craindre la chute des ouvriers présents sur le chantier, lesquels travaillaient à une hauteur de plus de 3 m avec pour risque un grave traumatisme, voire la mort. Or, les dispositions pour y pallier n'étaient en particulier pour une telle entreprise, nullement difficiles à prendre.

Ainsi, le montant de l'amende est apte à atteindre le but d'intérêt public poursuivi quant au respect des règles de sécurité établies en matière d'aménagement du territoire et des constructions et surtout de protection de la santé et de la vie des employés. Il est également nécessaire, car il n'y a pas de mesure moins incisive qui permettrait d'atteindre le même but, la recourante persistant par ailleurs à en nier la gravité et étant rappelé que l'avertissement ne figure pas dans la liste des sanctions de l'art. 137 al. 1 LCI et que le montant de CHF 5'000.- se situe dans la tranche inférieure de ceux pouvant être exigés.

Ce montant, que la chambre de céans ne revoit que de manière restreinte, sera confirmé, en tant qu'il tient compte des circonstances du cas d'espèce et de la gravité de l'infraction. Il n'apparaît pas disproportionné eu égard du montant maximum qui aurait pu être prononcé. Pour le surplus, la recourante n'apporte aucun élément de preuve permettant d'étayer les difficultés financières dont elle se prévaut.

Mal fondé, le recours sera rejeté.

5. Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 1'000.- sera mis à la charge de la recourante (art. 87 al. 1 LPA). Il ne sera pas alloué d'indemnité de procédure (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 4 octobre 2021 par A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 2 septembre 2021 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 1’000.- à la charge de A______ ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me B______, avocat de la recourante, au département du territoire-oac ainsi qu'au Tribunal administratif de première instance.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, Mmes Krauskopf et Lauber, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 


 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :