Aller au contenu principal

Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

1 resultats
A/1916/2008

ATA/132/2009 du 17.03.2009 ( FIN ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1916/2008-FIN ATA/132/2009

ARRÊT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

du 17 mars 2009

 

dans la cause

 

Monsieur S______
représenté par la Fiduciaire Patrick Tritten, mandataire

contre

COMMISSION CANTONALE DE RECOURS EN MATIÈRE ADMINISTRATIVE

et

ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE

et

ADMINISTRATION FÉDÉRALE DES CONTRIBUTIONS


EN FAIT

1. Monsieur S______ exerce le métier de garagiste indépendant. Il exploite le G______et la C______.

2. Dans sa déclaration fiscale 2004 concernant l'impôt fédéral direct (ci-après : IFD), M. S______ a mentionné un revenu imposable de CHF 110'762.-.

3. Le 22 juillet 2005, faisant suite à une demande de l'administration fiscale cantonale (ci-après : AFC-GE) relative au poste "résultats exceptionnels et extraordinaires net" pour un montant de CHF 36'710,28, le contribuable, par la voix de son comptable, a exposé ce qui suit :

"Le poste de CHF 36'710,28 se décompose de la manière suivante :

1. Provision pour dépréciation d'anciens débiteurs,

pour lesquels le recouvrement est désormais plus

qu'aléatoire CHF 21'758,37

2. Dissolution de la provision pour dépréciation

courante de 5 % sur débiteurs ordinaires. Il convient

de préciser que cette provision se calcule après prise

en considération des éléments du point 1. (CHF 2'111,78)

3. Variation nette de la provision sur stocks (CHF 772,45)

4. Pertes définitives sur clients 1999/2000 CHF 9'934,98

5. Pertes définitives sur clients 2001/2003 CHF 7'901,16

Total CHF 36'710,28

4. Selon l'extrait du grand livre, les pertes définitives sur clients étaient détaillées comme suit :

Pertes définitives sur clients 1999/2000

0F1392/C - perte O_____ CHF 1'030,15

9F507/G - perte A______ CHF 790,30

9F409/G - perte L______ CHF 1'387,45

0F1022/G - perte D______ CHF 426,43

0F426/C - perte Du______ CHF 832,75

0F1559/G - M______ perte CHF 929,50

0F867/G - M______ perte CHF 274,25

0F867/G - M______ perte CHF 332,10

0F1543/G - P_____ perte CHF 1'466,95

OF882/G - Ri______ perte CHF 604,65

0F347/C - Si______ perte CHF 1'860,45

-------------------

Solde débiteur CHF 9'934,98

Pertes définitives sur clients 2001/2003

2F1060/C - perte O______ CHF 444,83

1F954/C - perte Ob______ CHF 929,36

2F1391/G - perte C______ CHF 300,10

2F572/G - perte Ch______ CHF 227,70

Perte Ca______ faillite CHF 1'712,70

1F739/G - perte Do______ CHF 737,60

2F740/C - M______ perte CHF 1'046,95

2F758/C - M______ perte CHF 313,35

3F229/G - Ma______ perte CHF 342,55

2F267/C - Od_____ perte CHF 185,88

2F629/G - Pe______ Perte CHF 641,00

1F905/C - Pr______ perte CHF 929,34

3F935/Pr_______ perte CHF 89,80

-----------------

Solde débiteur CHF 7'901,16

 

5. Le 4 octobre 2005, l'AFC-GE a invité le contribuable à lui remettre les actes de défaut de biens concernant les pertes définitives précitées et à lui indiquer la raison pour laquelle il avait créé une provision pour un montant de CHF 21'758,75.

6. Le 31 octobre 2005, le contribuable a exposé qu'il ne disposait pas d'actes de défaut de biens. La pratique de son entreprise consistait à enregistrer une provision pour dépréciation (qui n'était pas un amortissement définitif) pour toutes les créances d'exploitation datant de plus d'une année, jugées difficilement récupérables, voire irrécupérables. Une dépréciation de 5 % était en outre calculée sur les autres créances commerciales. La variation annuelle calculée des provisions pour dépréciation tenait compte des éventuels remboursements de clients.

Seule la variation, permettant d'ajuster les provisions pour dépréciation enregistrées au bilan (écart par rapport à 2003), avait été comptabilisée dans le compte de résultats. Ainsi, il y avait eu une augmentation des vieux risques et diminution du risque à 5 %. Cette pratique perdurait depuis des années.

La provision d'un montant de CHF 21'758,75, correspondait à la variation annuelle.

7. Le 25 novembre 2005, l'AFC-GE a notifié au contribuable un bordereau de taxation pour l'IFD 2004 établi sur la base d'un revenu imposable de CHF 131'500.-, fixant l'impôt dû à CHF 6'574,90.-. L'AFC-GE avait ajouté au bénéfice net du contribuable le montant de CHF 20'836.- composé de CHF 17'836.- de pertes sur débiteurs et de CHF 3'000.- de consommation personnelle pour garagiste, non admis en déduction.

8. Le 20 décembre 2005, M. S______ a formé réclamation contre le bordereau précité. L'AFC-GE avait commis une erreur en considérant que la provision individuelle prélevée sur débiteurs constituait la perte définitive sur débiteurs.

Il ne s'agissait pas encore d'une perte sèche sur débiteurs douteux, mais d'une provision calculée conformément au principe de l'étanchéité des exercices ; partant, cette provision devait être admise.

Le contribuable a contesté également le redressement de CHF 3'000.- au titre de "part privée garagiste" ainsi que des charges AVS.

9. Le 31 mars 2006, l’AFC-GE a partiellement admis la réclamation précitée concernant la question relative aux charges AVS et remis au contribuable un bordereau rectificatif maintenant la reprise de CHF 20'836.-.

L'AFC-GE n'admettait pas les postes «pertes définitives sur clients» 1999/2000 et 2001/2003 respectivement de CHF 9'934,98 et CHF 7'901,16, composant la somme de CHF 17'836.-. En effet, le contribuable n'avait effectué aucune démarche pour recouvrer ses créances alors que selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, une perte n'était effective qu'au moment où l'insolvabilité était constatée par un acte de défaut de biens. Quant à la reprise de CHF 3'000.-, elle correspondait à un prélèvement de marchandises sans comptabilisation au compte privé.

10. Le 5 avril 2006, le contribuable a contesté cette décision auprès de la commission cantonale de recours de l'impôt fédéral direct devenue depuis lors la commission cantonale de recours en matière administrative (ci-après : la commission). Les diverses factures impayées étaient pour la plupart d'un montant inférieur aux frais de procédures de recouvrement, raison pour laquelle il avait abandonné ces créances.

11. Le 7 février 2007, l'AFC-GE a accepté d'annuler la reprise de CHF 3'000.- et a conclu au rejet du recours concernant la perte sur débiteurs.

12. Dans sa réplique du 20 février 2007, le recourant a reproché à l'AFC-GE d'appliquer la jurisprudence de façon uniforme, sans opérer de distinctions entre les grandes sociétés et les petits artisans. Ces derniers n'avaient pas les moyens financiers et pratiques d'entamer systématiquement des procédures de recouvrement de leurs créances impayées. Après avoir tenté de récupérer le paiement de ses factures par des "rappels et menaces téléphoniques", il avait dû se résoudre à renoncer à leur encaissement. En outre, ces factures ayant été comptabilisées dans le poste débiteurs - clients, elles avaient été imposées lors de bouclements antérieurs. Refuser la déduction de cette perte conduisait à imposer les contribuables qui tenaient des comptes réguliers et selon le principe de l'encaissement, sur un chiffre d'affaire non encaissé.

13. Le 5 mars 2007, l'AFC-GE a persisté dans ses conclusions.

14. Le 23 avril 2008, la commission a rejeté le recours. Conformément à sa jurisprudence, elle distinguait les créances dont les montants étaient inférieurs à CHF 100.- voire CHF 250.- de celles d'un montant supérieur. Ainsi, pour les premières, il suffisait que le créancier puisse démontrer avoir envoyé des rappels restés sans suite pour admettre qu'il avait entrepris les démarches nécessaires à leur recouvrement. En revanche, concernant les créances d'un montant supérieur à CHF 250.-, l'insolvabilité devait être constatée par un acte de défaut de biens.

Il ressortait du détail des deux comptes de pertes concernés, dont les soldes au 31 décembre 2004 s'élevaient respectivement à CHF 9'934,98 et CHF 7'901,16, que les montants impayés étaient supérieurs à CHF 250.- à l'exception de trois factures de CHF 227,70, CHF 185,88 et CHF 89,80. En outre, parmi ces créances en souffrance, six se situaient entre CHF 1'000.- et CHF 2'000.-, huit entre CHF 600.- et CHF 999.- et sept entre CHF 250.- et CHF 599.-. Le recourant n'avait ni démontré avoir entrepris des démarches concrètes afin d'obtenir l'encaissement de ces factures ni prouvé leur caractère définitivement irrécouvrable.

Par ailleurs, les créances les plus anciennes remontaient aux exercices comptables 1999 et 2000. Or, le recourant n'avait pas fourni de renseignements afin de déterminer si la prescription de cinq ans prévue par l'article 128 chiffre 3 de la loi fédérale complétant le Code civil suisse du 30 mars 1911 Livre cinquième : Droit des obligations (CO - RS 220) était acquise pour certaines d'entre elles durant l'année fiscale en cause. Enfin, le recourant avait régulièrement constitué une provision de 5% pour débiteurs douteux pour chaque exercice concerné, de sorte qu'il n'y avait pas lieu d'admettre une éventuelle déduction pour ce motif également.

Au surplus, la commission donnait acte à l'AFC-GE de ce qu'elle annulait la reprise de CHF 3'000.- au titre de prélèvement de marchandises.

15. Le 29 mai 2008, M. S______ a recouru contre la décision précitée auprès du Tribunal administratif et conclu à ce que le montant de ses créances perdues ne soit pas imposé.

Il employait cinq personnes pour le garage et la carrosserie, dont l'une était chargée du secrétariat et de la comptabilité. Tant la commission que l'AFC-GE faisaient un amalgame entre provision et amortissement sur créances. Il convenait de distinguer l'amortissement de CHF 17'835.- relatif aux créances perdues constituant l'objet du présent litige, de la perte sur débiteurs individualisés d'un total de CHF 65'249.-, portant sur des créances douteuses et la provision généralisée à 5 % de CHF 14'295.-, comptabilisée sur toutes les autres factures selon les tolérances fiscales, soit une variation de moins de CHF 2'112.-. La jurisprudence sur laquelle se fondait la commission ne devait pas être appliquée de la même manière aux PME, telle que la sienne, qui ne possédaient pas la même structure administrative que les grandes entreprises. Il était faux de prétendre qu'il n'avait pas entrepris de démarches pour l'encaissement de ses factures comme le démontraient les exemples de correspondance et les recherches effectuées auprès de l'office cantonal de la population (ci-après : OCP). Enfin, il fallait tenir compte du fait que certains clients ne payaient pas leurs factures et qu'il était difficile d'évaluer les risques imputables au recouvrement.

A l'appui de son recours, le recourant a produit une série de réquisitions de poursuite et/ou de lettres de rappel concernant quinze clients.

Aucun d'entre eux ne correspond aux débiteurs figurant sur la liste des pertes dont la déduction était sollicitée.

16. Le 17 juin 2008, l'AFC-GE s'est opposée au recours. Elle s'est référée à son argumentation développée devant la commission tout en précisant que l'entreprise du recourant, dont le chiffre d'affaires durant l'année litigieuse ascendait à CHF 1'901'907.-, ne pouvait être assimilée à une "petite PME" à laquelle il ne conviendrait pas d'appliquer la jurisprudence constante rendue en matière de pertes sur créances.

17. Le 25 juin 2008, l'administration fédérale des contributions
(ci-après : AFC - CH) a conclu au rejet du recours et à la confirmation de la décision querellée.

Le recourant exploitait un garage et une carrosserie employant cinq personnes, dont l'une s'occupait du secrétariat et de la comptabilité. Compte tenu de la structure de son entreprise, le contribuable aurait été à même d'engager des procédures de recouvrement selon les voies officielles pour les factures supérieures à CHF 250.-.

Des vingt factures impayées, seules trois d'entre elles étaient inférieures à CHF 250.-. Leur montant total s'élevait à CHF 17'836.-, soit plus de 15 % du bénéfice du contribuable. Pour cette raison également, l'AFC-CH était en droit d'attendre du recourant qu'il investisse davantage de temps et d'argent dans l'encaissement de ses factures. En outre, s'il n'était pas contesté que certains clients étaient de mauvais payeurs, il s'imposait a fortiori d'exiger soit le paiement direct pour toute réparation soit un contrôle rigoureux du recouvrement des créances.

18. Le 16 juin 2008, la commission a déclaré persister dans les considérants et le dispositif de sa décision.

19. Sur requête du juge délégué, le contribuable lui a adressé, le
23 septembre 2008, le détail du compte sur lequel étaient comptabilisées les provisions constituées pour les « clients considérés comme perdus », pour un montant s'élevant, en 2003 à CHF 43'490,86 et en 2004 à CHF 65'249,23.

20. En date du 10 octobre 2008, le juge délégué a entendu les parties lors d'une audience de comparution personnelle. Le mandataire du recourant était accompagné de son expert-comptable M. M______.

a. Le recourant exploitait un petit garage, qui employait six personnes dont cinq garagistes. Une secrétaire à mi-temps était chargée de l'administration, de la comptabilité et du contentieux. Monsieur M______, expert-comptable, établissait les comptes.

Il arrivait que certains clients reprennent leur voiture sans payer leur facture. Sa secrétaire procédait alors aux rappels, par lettre ou par téléphone, opérations qui demeuraient parfois sans effet. Il ne voulait pas investir des sommes trop importantes pour le recouvrement de petites factures dont les frais dépassaient le montant. Pour les factures supérieures à CHF 1'000.-, le contentieux était confié à une agence de recouvrement. La dernière facture qu'il avait donnée à recouvrer s'élevait à CHF 6'000.- et avait entraîné CHF 7'000.- de frais d'avocat.

b. M. M______ a expliqué que le poste clients figurant au bilan du
31 décembre 2004, pour un montant de CHF 271'616.-, correspondait à l'inventaire des créances ouvertes à cette date contre des clients, après déduction des provisions. Le montant total des créances se chiffrait à CHF 351'161.-.

Le total des sommes provisionnées en 2004 s'élevait à CHF 79'544.-. Il s'agissait de la totalité des créances-clients non payées après une année, provision déterminée ligne par ligne et une provision globale de 5 % sur le solde résiduel des créances. Cette provision de 5 % était admise par
l'AFC-GE pour les créances suisses.

Lorsqu'un client dont la dette avait été provisionnée à 100 % s'acquittait de son montant, la provision était dissoute. Ceci expliquait pourquoi le montant de ce type de provisions variait selon les exercices.

Le document qui donnait le détail du poste provisions de CHF 65'249.- était composé de deux types d'enregistrements. Une première série de débiteurs, pour lesquels il y avait un doute certain d'irrécouvrabilité, avait été comptabilisée dans un compte collectif, pour un montant total de CHF 35'293.-. La deuxième série de débiteurs visait ceux pour lesquels la créance avait été comptabilisée dans un compte individualisé.

C'était de manière délibérée que certaines créances, a priori prescrites, restaient comptabilisées dans un compte de provisions et n'étaient pas passées par pertes. En effet, il pouvait arriver que des clients se présentent à nouveau au garage. Il était alors possible de leur rappeler leur dette. Cela n'avait toutefois pas d'influence sur le compte de résultats.

La décision de provisionner ou de passer par perte tel débiteur était prise en fonction des possibilités de recouvrement. Il n'y avait en aucun cas de "gestion " fiscale du poste provision.

c. L'AFC-GE a insisté sur le fait que le contribuable devait fournir les preuves des démarches entreprises en vue du recouvrement de ses créances.

d. Le recourant a indiqué qu'il effectuerait des recherches afin de prouver les démarches effectuées.

21. Le 5 novembre 2008 , le contribuable a versé à la procédure une série de factures accompagnées de rappels écrits ainsi que des copies de réquisitions auprès de l'office des poursuites et faillites concernant plusieurs clients dont aucun ne correspondait aux débiteurs figurant sur la liste des pertes demandées en déduction.

22. Le 9 décembre 2008, l'AFC-GE a déposé ses observations reprenant pour l'essentiel ses explications précédemment exposées. Après l'échec d'un deuxième ou troisième rappel, le contribuable pouvait provisionner un risque de perte, laquelle, au terme du délai de prescription de cinq ans, devenait effective et pouvait être comptabilisée comme telle dans ses livres.

S'agissant des factures ayant fait l'objet de rappels, sans réquisition de poursuite, elles étaient supérieures à la limite des CHF 250.- fixée par la commission. En l'absence de poursuites, l'amortissement de ces créances n'était pas admissible. Pour les créances ayant fait l'objet de réquisitions de poursuite, l'insolvabilité d'aucun des débiteurs n'avait été constatée par un acte de défaut de biens.

23. En date du 21 janvier 2009, l'AFC-CH s'est déterminée. Le recourant n'apportait pas les preuves nécessaires permettant de conclure que ses pertes étaient effectives.

24. Le 26 janvier 2009, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. a. Le 18 septembre 2008, le Grand Conseil de la République et canton de Genève a modifié la loi d'organisation judiciaire du 22 novembre 1941 (LOJ - E 2 05), notamment en créant une commission de recours en matière administrative compétente (art. 56X LOJ) pour connaître, en première instance, des décisions sur réclamation prises par l'administration fiscale cantonale, en application de l'article 7 de la loi de procédure fiscale du 4 octobre 2001 (LPFisc - D 3 17). Ces dispositions sont entrées en vigueur le 1er janvier 2009. Toutefois, selon la disposition transitoire adoptée par le législateur (art. 162 al. 4 LOJ), le Tribunal administratif reste compétent pour trancher les recours dont il a été saisi contre les décisions rendues par la commission cantonale de recours en matière d'impôts avant le 1er janvier 2009.

b. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 53 al. 1 LPFisc ; art. 63 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2. L'objet du litige consiste à examiner si la déduction au titre de pertes, de créances impayées à hauteur de CHF 17'836.-. est admissible. Partant, le grief du recourant selon lequel les intimées auraient fait un amalgame entre les notions de provision et d'amortissement sur créances est irrelevant en l'espèce.

3. Selon un principe généralement admis en matière fiscale, si l'administration supporte le fardeau de la preuve de l'existence d'éléments imposables, il incombe à celui qui prétend à l’existence d’un fait de nature à éteindre ou à diminuer sa dette fiscale d’en apporter la preuve et de supporter les conséquences de l’échec de cette preuve (RDAF 1998 II p. 25 et les références citées ; Arrêt du Tribunal fédéral 2C_288/2008 du 1er octobre 2008).

4. a. L'article 25 de la loi fédérale sur l’impôt fédéral direct du 14 décembre 1990 (LIFD - RS 642.11) prévoit que le revenu net se calcule en défalquant du total des revenus imposables les déductions générales et les frais mentionnés aux articles 26 à 33a.

b. A teneur de l'article 27 alinéa 1 LIFD, les contribuables exerçant une activité lucrative indépendante peuvent déduire les frais qui sont justifiés par l’usage commercial ou professionnel. Font notamment partie de ces frais : les amortissements et les provisions au sens des articles 28 et 29 (al. 2 let. a).

c. L'article 28 alinéa 1 LIFD précise que les amortissements des actifs, justifiés par l’usage commercial, sont autorisés, à condition que ceux-ci soient comptabilisés ou, à défaut de comptabilité tenue selon l’usage commercial, qu’ils apparaissent dans un plan spécial d’amortissements.

5. Conformément à la jurisprudence constante, le caractère d'exception à l'impôt doit entraîner une interprétation restrictive de la nature et de l'étendue des déductions autorisées (ATA/380/2005 du 24 avril 2005 ; ATA/10/1998 du
13 janvier 1998).

6. Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, les pertes sur créances deviennent effectives au moment où l'insolvabilité est constatée officiellement par un acte de défaut de biens (Archives 14, p. 498 ; ATA B. du 9 avril 1986).

7. a. S'agissant de l'incertitude de l'exécution d'une créance, le Tribunal administratif a jugé que le contribuable avait considéré à tort comme une perte, sa créance à l'encontre d'une personne qui était incarcérée et était dans une situation financière particulièrement critique, dès lors que celle-ci pouvait reprendre une activité économique et revenir à meilleure fortune. Ce n'est qu'en cas d'insuccès définitif d'une procédure de recouvrement que le créancier pouvait déduire sa créance comme une perte commerciale (ATA B. précité).

b. En matière de droits des successions, le tribunal de céans a jugé que des créances étaient partiellement ou totalement perdues et partant, exonérées d'impôt, si les justificatifs présentés établissaient de manière certaine l'insolvabilité absolue des débiteurs (ATA/325/2008 du 17 juin 2008 ; ATA/217/1998 du 21 avril 1998 ; ATA F. du 8 décembre 1992).

8. Concernant les pertes commerciales, la doctrine considère que "la perte est définitive lorsque, à vue humaine, il n'apparaît pas possible d'attendre le retour à l'état antérieur, ni de compter sur une appréciation réelle de la valeur du bien en cause" (R. OBERSON, Les pertes commerciales fiscalement déductibles, in Archives 48 p. 109). On doit notamment admettre que la perte est certaine lorsque le contribuable démontre qu'il a mis en œuvre les procédures et démarches que l'on peut raisonnablement attendre d'un créancier ou d'un porteur de droit à l'égard de son bien ; à ce titre, on ne saurait exiger de l'intéressé qu'il engage une coûteuse procédure ni qu'il aille jusqu'au bout des actions judiciaires quand sa créance est d'importance relative ou qu'il apparaît manifestement qu'une telle procédure n'entraînera que des frais supplémentaires (R. OBERSON, op.cit., p. 108).

9. A l'évidence, les critères posés par la jurisprudence pour juger de la difficulté de recouvrer une créance sont restrictifs : il faut que le débiteur apparaisse comme définitivement insolvable pour que la créance ne soit pas imposable (ATA/440/2005 du 21 juin 2005 ; ATA/147/2003 du 18 mars 2003).

10. Le recourant soutient qu'il est disproportionné d'exiger d'une PME qu'elle procède au recouvrement systématique de ses créances par voie de poursuite. Son entreprise ne dispose pas des structures administratives idoines et les frais liés aux procédures de recouvrement sont souvent supérieurs aux montants des factures. Par ailleurs, il a établi en produisant diverses lettres de rappels et des recherches que les démarches tendant au paiement de ses factures sont demeurées infructueuses.

11. Conformément au principe rappelé plus haut, il appartenait au recourant d'établir l'insolvabilité de ses débiteurs en démontrant que ses démarches en vue du recouvrement de ses créances étaient demeurées infructueuses pour que ses pertes alléguées puissent être déduites de son revenu. Or, contrairement à ce que tente de soutenir celui-ci, force est de constater qu'il n'a fourni aucun élément probant à cet égard. En effet, s'il a versé aux débats une série de lettres de rappels et des réquisitions de poursuite, aucune d'entre elles ne concernent les pertes litigieuses.

Il y a lieu de considérer que le recourant n'a pas établi à satisfaction de droit l'insolvabilité de ses débiteurs au sens de la jurisprudence précitée lui permettant de porter ses pertes en déduction de son bénéfice imposable.

Dans ces conditions, le grief du recourant selon lequel la jurisprudence ne saurait être appliquée de la même manière à une PME qu'à une grande entreprise est irrelevant. En outre, la question de savoir si les critères retenus par la commission qui distingue les créances inférieures à CHF 250.-, pour lesquelles il suffit que le créancier puisse démontrer avoir envoyé des rappels restés sans suite pour considérer qu'il a entrepris les démarches nécessaires à leur recouvrement, des créances supérieures à CHF 250.- pour lesquelles l'insolvabilité doit être constatée par un acte de défaut de biens afin de permettre la déduction fiscale de la perte doivent être appliqués, peut souffrir de rester ouverte.

12. Pour toutes ces raisons, le recours sera rejeté.

Un émolument de CHF 1'500.- sera mis à la charge du recourant (art. 87 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 29 mai 2008 par Monsieur S______ contre la décision de la commission cantonale de recours de l'impôt fédéral direct du 23 avril 2008 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge du recourant un émolument de CHF 1'500.- ;

dit que, conformément aux articles 82 et suivants de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’article 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à la Fiduciaire Patrick Tritten, mandataire du recourant ainsi qu'à la commission cantonale de recours en matière administrative, à l'administration fiscale cantonale et à l'administration fédérale des contributions.

Siégeants : Mme Bovy, présidente, M. Thélin, Mme Hurni, M. Dumartheray, juges, M. Torello, juge suppléant.

Au nom du Tribunal administratif :

la greffière-juriste adj.

 

 

M. Tonossi

 

la présidente :

 

 

L. Bovy

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :