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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/86/2005

ATA/380/2005 du 24.05.2005 ( FIN ) , REJETE

Descripteurs : AMORTISSEMENT; REVENU; ACTIVITE LUCRATIVE INDEPENDANTE; PERTE COMMERCIALE; SOCIETE SIMPLE; DEDUCTION DU REVENU; CALCUL DE L'IMPOT
Normes : LCP.21 ch.1
Résumé : Perte commerciale, rappel de jurisprudence. En l'espèce, la perte de liquidation apparue à l'occasion de la liquidation de la société simple n'est pas déductible.
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/86/2005-FIN ATA/380/2005

ARRÊT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

du 24 mai 2005

dans la cause

 

Monsieur S.__________
représenté par Prateo Conseil société fiduciaire, mandataire

contre

COMMISSION CANTONALE DE RECOURS EN MATIERE D'IMPOTS

et

ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE


 


1. Monsieur S.__________ (ci-après : le contribuable), né en 1961, exerce la profession de chiropraticien.

2. Aux termes d’un contrat signé le 8 mai 1994, le contribuable a constitué, avec trois autres chiropraticiens, une société simple dans le but d’exploiter un centre de chiropractie. Ce contrat prévoyait, à son article 32, que la société prendrait fin par anticipation, notamment par la volonté unanime des associés ou par une dénonciation pour justes motifs, si l’un ou plusieurs associés avaient gravement manqué à leurs devoirs. L’article 33 prévoyait qu’en cas de dissolution de la société, la liquidation serait effectuée par les associés restants, avec effet rétroactif au jour de la dissolution. Une nouvelle société serait automatiquement constituée entre les associés restants, simultanément à la dissolution. L’article 34 stipulait que les parts d’un associé sortant lui seraient rachetées par les autres associés dans un délai de six mois, les modalités du rachat étant précisées. M. S.__________ était titulaire de 135 parts.

3. Le contribuable a quitté la société simple le 1er juillet 1998. Il n’a toutefois pas touché les sommes prévues à l’article 34 du contrat, soit CHF 154'536.-, car la société simple avait été dissoute.

4. Dans la déclaration pour l’impôt cantonal et communal 1998, le contribuable a annoncé, dans la rubrique « charges » du compte d’exploitation 1997, des amortissements en CHF 164'982,85, dont CHF 154'536.- représentaient l’amortissement des 135 parts qu’il possédait dans la société simple.

5. Le 18 décembre 1998, l’administration fiscale cantonale (ci-après : l’AFC) a fait parvenir au contribuable une taxation provisoire basée sur l’ensemble des informations figurant dans la déclaration fiscale.

Le 9 avril 1999, la même administration a transmis au contribuable un bordereau rectificatif, dont il ressort qu’elle refusait de tenir compte de l’amortissement en CHF 154'536.-.

6. Le 21 avril 1999, le contribuable a élevé réclamation. Il n’avait pas interrompu, ni provisoirement ni définitivement, son activité et la somme de CHF 154'536.- ne constituait pas le résultat de la liquidation d’une entreprise. Ce montant n’avait pas pu être amorti au cours des années précédentes et un tel amortissement n’aurait vraisemblablement pas été admis.

A la demande de l’AFC, le contribuable a produit, le 28 juillet 1999, le « contrat d’association » signé le 8 mai 1994, de même qu’une lettre manuscrite résumant les faits et un courrier de l’avocat de ses anciens associés. Celui-ci avait constaté la dissolution de la société simple le 19 février 1998, tous les signataires du contrat du 8 mai 1994 ayant manifesté la volonté de ne plus unir leurs efforts en vue d’atteindre le but commun de l’entreprise. Depuis lors, les opérations de liquidation s’étaient déroulées à l’amiable. Les dispositions contractuelles relatives au rachat des parts d’un associé ne trouvaient plus d’application et elles ne donnaient pas droit à un bénéfice de liquidation. Leur valeur devait être amortie au bilan de chacun des ex-associés.

7. Le 26 juin 2003, l’AFC a maintenu la taxation rectificative. Les amortissements ne pouvaient être admis qu’à concurrence de la dépréciation intervenue durant la période considérée. Le fait que le contribuable n’y ait pas procédé dans les années précédentes ne lui permettait pas de les rattraper en une seule fois. Les dispositions concernant l’impôt spécial sur le bénéfice d’aliénation, de remise ou de liquidation de certaines entreprises, applicables au cas d’espèce, ne permettaient pas non plus un tel amortissement.

8. a. Le 23 juillet 2003, le contribuable a saisi la commission cantonale de recours en matière d’impôts (ci-après : la commission) de l’affaire, reprenant et développant son argumentation antérieure.

b. L’AFC a, de son côté, maintenu sa position le 28 mai 2004.

9. Par décision du 13 décembre 2004, la commission a rejeté le recours. La somme litigieuse constituait une perte de liquidation, qui devait être traitée sous l’angle de l’article 88 alinéa 1a de la de la loi générale sur les contributions publiques du 9 novembre l887 (LCP - D 3 05). L’éventuel bénéfice de liquidation devait être imposé selon le taux fixé à l’article 90 LCP, alors qu’en cas de perte, seule la fortune du contribuable était affectée. La somme litigieuse ne pouvait être qualifiée de perte d’exploitation.

10. Le 12 janvier 2004, le contribuable a saisi le Tribunal administratif d’un recours. Il n’avait jamais cessé son activité lucrative indépendante, mais l’avait exercée en tant qu’associé dans une société simple dans un premier temps, puis seul par la suite. Aucun bénéfice en capital n’avait été réalisé suite à la dissolution de la société simple, mais une perte sur l’investissement initial. Il ne s’agissait pas de la liquidation d’une entreprise, puisque l’activité indépendante du contribuable n’avait jamais été interrompue. La somme en question n’avait pas à être amortie les années précédentes, puisqu’elle représentait la juste valeur d’exploitation des investissements consentis. Ce n’était qu’à la suite du litige qui avait opposé les associés de la société simple, litige qui avait entraîné la dissolution de cette dernière, que le contribuable avait perdu tout droit au remboursement de son investissement.

11. Le 2 février 2005, l’AFC s’est opposée au recours, se référant aux écritures qu’elle avait produites devant la commission.

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 56A de la loi sur l'organisation judiciaire du 22 novembre 1941 - LOJ - E 2 05; art. 63 al. 1 litt. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2. De nouvelles normes fiscales sont entrées en vigueur le 1er janvier 2001, en application de la loi fédérale sur l’harmonisation des impôts directs des cantons et des communes, du 14 décembre 1990 (LHID ; RS 642.14). Elles ont abrogé, à partir de cette date, la plupart des dispositions de la LCP. Ces dispositions demeurent cependant applicables, notamment en ce qui concerne l’imposition des personnes physiques, pour les périodes fiscales antérieures à l’année 2001. L’adaptation de la législation fiscale genevoise aux exigences de la LHID est en effet dépourvue d’effet rétroactif, comme l’a relevé le Tribunal administratif selon une jurisprudence constante (ATA/373/2004 du 11 mai 2004 et références citées).

Le présent litige est donc soumis à la LCP dans sa teneur antérieure au 1er janvier 2001 (ci-après : aLCP) pour ce qui concerne les dispositions légales abrogées dès cette date.

3. La seule question qui se pose dans la présente affaire est de savoir si la perte subie par le contribuable lorsqu’il a quitté le centre de physiothérapie peut être déduite de ses revenus dans le calcul de l’impôt 1998.

a. L’article 21 lettre l aLCP autorise de contribuable à déduire de l’ensemble de ses revenus bruts les pertes commerciales comptabilisées de l’exercice déterminant.

Selon une jurisprudence constante, l’article 21 aLCP contient les exceptions à l’impôt sur l’ensemble des revenus et ce caractère d’exception doit entraîner une interprétation restrictive de la nature et de l’étendue des déductions autorisées (ATA/10/1998 du 13 janvier 1998). Par « perte commerciale comptabilisée », il faut entendre la perte qui résulte du fait que, pour l’année fiscale précédente et en ce qui concerne l’activité commerciale envisagée, les dépenses professionnelles ont dépassé les revenus y relatifs, le contribuable subissant une perte se répercutant sur l’exercice comptable ultérieur (ATA/627/1999 du 26 octobre 1999).

b. En l’espèce, la perte de CHF 154'536.- annoncée par le contribuable ne répond pas aux exigences précitées. Contrairement à ce qu’il soutient, la dépense en question ne peut être qualifiée de dépense professionnelle réalisée pendant l’année concernée par la taxation.

c. En revanche, la perte en question répond à la définition de perte de liquidation. Elle est en effet apparue à l’occasion de la liquidation de la société simple dans laquelle le recourant déployait son activité indépendante, sans que la poursuite de celle-ci dans un autre cadre ne puisse modifier cette appréciation. Ainsi que l’a relevé l’autorité inférieure, de telles pertes diminuent la fortune du recourant, mais ne peuvent être déduites du revenu.

4. Au vu de ce qui précède, le recours sera rejeté. Un émolument de CHF 1'000.- sera mis à la charge du recourant (art. 87 LPA).

PAR CES MOTIFS
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 12 janvier 2005 par Monsieur S.__________ contre la décision de la commission cantonale de recours en matière d'impôts du 13 décembre 2004 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge du recourant un émolument de CHF 1’000.- ;

communique le présent arrêt à Prateo Conseil Société fiduciaire, mandataire du recourant, ainsi qu'à la commission cantonale de recours en matière d'impôts et à l'administration fiscale cantonale.

Siégeants : Mme Bovy, présidente M. Paychère, Mme Hurni, M. Thélin, Mme Junod, juges.

Au nom du Tribunal administratif :

la greffière-juriste :

 

 

C. Del Gaudio-Siegrist

 

la vice-présidente :

 

 

L. Bovy

 


Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :