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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/371/2020

ATA/1171/2020 du 23.11.2020 sur JTAPI/835/2020 ( PE ) , REFUSE

RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/371/2020-PE ATA/1171/2020

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Décision du 23 novembre 2020

sur mesures provisionnelles

dans la cause

 

M. A______
représenté par Me Stéphane Rey, avocat

contre

OFFICE CANTONAL DE L'INSPECTION ET DES RELATIONS DU TRAVAIL

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 1er octobre 2020 (JTAPI/835/2020)


Attendu que :

M. A______, né le ______ 1982, ressortissant du B______, séjourne à Genève depuis le 19 août 2013, a bénéficié d'un permis de séjour de type B du 26 août 2013 au
30 septembre 2014 et du 6 octobre 2014 au 30 septembre 2016, puis d'un permis de séjour de courte durée avec activité de type L du 19 juin 2018 au 23 mai 2019 ;

qu'il a obtenu un doctorat en sciences politiques et en relations internationales au terme des études suivies entre septembre 2013 et décembre 2018 auprès de l'C______ (ci-après : C______), et oeuvré en qualité de stagiaire de mars à juin 2014 auprès de l'office du haut-commissaire aux droits humains de l'ONU à Genève, puis du 2 juillet 2014 à octobre 2020 en qualité de conseiller académique au sein de l'C______ ;

qu'il est de langue maternelle anglaise, parle couramment le B______ et possède un niveau A2 en français ;

que le 10 septembre 2019, l'C______ a requis de l'office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) la délivrance d'un titre de séjour avec activité lucrative en faveur de M. A______, afin de pouvoir l'engager en qualité de conseiller académique senior, pour une durée indéterminée, à compter du 1er janvier 2020, moyennant un salaire mensuel brut de CHF 9'000.-, étant précisé que son dossier de candidature était « sorti du lot », vu sa parfaite maîtrise de l'anglais, ses qualifications académiques de haut niveau, sa connaissance des enjeux et défis du poste, son expérience pédagogique dans la formation pour adultes et sa compétence dans les relations interpersonnelles et interculturelles, autant de qualités requises pour le poste, que les autres candidatures retenues et reçues en entretien n'avaient pu rassembler ;

qu'à l'appui du refus opposé le 11 décembre 2019, l'office cantonal de l'inspection et des relations du travail (ci-après : OCIRT) a indiqué que la requête ne présentait pas un intérêt économique ou scientifique prépondérant et que l'ordre de priorité n'avait pas été respecté ;

que dans son jugement du 1er octobre 2020 rejetant le recours contre le refus du
11 décembre 2019, le Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) a constaté que le recourant avait obtenu son doctorat en décembre 2018, soit plus de six mois avant que la demande d'autorisation ne soit déposée en septembre 2019, de sorte que
l'art. 21 al. 3 de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI -RS 142.20) permettant de déroger à l'ordre de priorité prescrit par l'al. 1 de la même disposition ne trouvait pas application ; pour le surplus, le délai de postulation consécutif à la publication de l'annonce à l'office cantonal de l'emploi, du 20 au 26 février 2019, apparaissait trop bref pour permettre à un maximum de candidats compétents de postuler, d'autant plus s'agissant d'un poste requérant de nombreuses qualifications ; enfin, d'autres bons dossiers de candidature avaient été reçus sans que l'C______ ne démontre en quoi celui du recourant convenait mieux ; ainsi celui-ci n'avait-il pas démontré à satisfaction de droit l'existence de recherches nécessaires et suffisantes pour retenir que la condition de l'ordre de priorité était remplie ; aucun élément du dossier ne permettait par ailleurs de considérer que l'activité du recourant au sein de l'C______ pourrait représenter un intérêt économique pour la Suisse, que ce soit en termes de création de places de travail, d'investissement ou de diversification de l'économie régionale ; le recourant ne pouvait enfin se prévaloir d'une violation de son droit à la liberté économique ;

que dans son recours du 2 novembre 2020 auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative), M. A______ a conclu à ce que le jugement du TAPI et la décision de l'OCIRT soient annulés et qu'une autorisation de séjour à l'année de type B avec activité lucrative lui soit octroyée ; préalablement il devait être dit et constaté qu'il était « autorisé à rester en Suisse pendant la durée de la procédure » ; malgré l'ampleur de l'appel aux candidatures et un processus qui avait duré neuf mois, l'C______ n'avait pu retenir que trois profils, dont le sien, celui d'une citoyenne dont l'activité représentait un intérêt prépondérant pour l'économie et la communauté scientifique de la Suisse ainsi que du canton de Genève et celui d'une ressortissante européenne ; il était le seul à remplir les conditions requises, soit un minimum de trois ans d'expérience en ingénierie pédagogique, conception de programmes de formation et de coordination de programmes pour les clients institutionnels ; un minimum de trois ans d'expérience en soutien et conseils aux étudiants ou aux participants adultes dans un environnement académique ; une expérience et des compétences avérées avec un public d'adultes dans le cadre du soutien des participants dans leur transition de carrière ; une excellente maîtrise des logiciels informatiques ; une très bonne connaissance du marché de la formation continue avec cinq ans d'expérience ; d'excellentes capacités interpersonnelles ; un fort engagement envers le succès des participants et de très bonnes capacités culturelles ; une disponibilité immédiate ; le directeur de l'institut, le professeur en charge de la formation continue et la directrice des ressources humaines avaient attesté que son dossier sortait très clairement du lot ; ces personnes soutenaient son recours ; le jugement violait l'art. 21 LEI par le biais d'un abus du pouvoir d'appréciation ; il violait également sa garantie constitutionnelle de la liberté économique ; son activité représentait un intérêt prépondérant pour l'économie et la communauté scientifique de la Suisse et du canton ; il avait commencé à travailler le 1er janvier 2020 ;

que le 16 novembre 2020, l'OCIRT s'est opposée à l'octroi de mesures provisionnelles au recours ; la signature du contrat de travail ne conférait aucun droit à l'autorisation ; le recourant n'expliquait pas en quoi son départ créerait un dommage difficilement réparable ; il lui fallait attendre à l'étranger la décision de l'autorité intimée ; lui permettre de l'attendre en Suisse reviendrait à lui accorder un droit auquel il ne pouvait prétendre ;

que le 19 novembre 2020, le recourant a répliqué sur mesures provisionnelles ; l'OCPM lui avait notifié le 12 novembre 2020 une décision de renvoi avec délai au
12 décembre 2020 ; il lui avait demandé d'annuler cette décision ; la demande du recourant de pouvoir rester en Suisse pendant la durée de la procédure n'anticipait nullement la décision au fond ; il ne pouvait être exigé de lui qu'il retourne au B______, où il n'avait vécu que dix mois, et qui lui était un pays totalement étranger ; la situation sanitaire découlant de la pandémie empêcherait par ailleurs son renvoi ;

que la cause a été gardée à juger sur mesures provisionnelles le 20 novembre 2020 ;

Considérant, en droit, l'art. 9 al. 1 du règlement interne de la chambre administrative dans sa teneur au 26 mai 2020, à teneur duquel les décisions sur effet suspensif sont prises par la présidente de ladite chambre, respectivement par le vice-président, ou en cas d'empêchement de ceux-ci, par un juge ;

qu'aux termes de l'art. 66 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10), sauf disposition légale contraire, le recours a effet suspensif à moins que l'autorité qui a pris la décision attaquée n'ait ordonné l'exécution nonobstant recours (al. 1) ; que toutefois, lorsque aucun intérêt public ou privé prépondérant ne s'y oppose, la juridiction de recours peut, sur la demande de la partie dont les intérêts sont gravement menacés, retirer ou restituer l'effet suspensif (al. 3) ;

que, par ailleurs, l'art. 21 al 1 LPA permet le prononcé de mesures provisionnelles ;

que selon la jurisprudence constante de la chambre de céans, des mesures provisionnelles - au nombre desquelles compte la restitution de l'effet suspensif - ne sont légitimes que si elles s'avèrent indispensables au maintien d'un état de fait ou à la sauvegarde d'intérêts compromis (ATF 119 V 503 consid. 3 ; ATA/746/2018 du 16 juillet 2018 ; ATA/503/2018 du 23 mai 2018) ;

qu'elles ne sauraient, en principe, anticiper le jugement définitif (Isabelle HÄNER, Vorsorgliche Massnahmen in Verwaltungsverfahren und Verwaltungsprozess in RDS 1997 II 253-420, 265) ;

que, par ailleurs, l'octroi de mesures provisionnelles présuppose l'urgence, à savoir que le refus de les ordonner crée pour l'intéressé la menace d'un dommage difficile à réparer (ATF 130 II 149 consid. 2.2 ; 127 II 132 consid. 3) ;

que la restitution de l'effet suspensif est subordonnée à l'existence de justes motifs, qui résident dans un intérêt public ou privé prépondérant à l'absence d'exécution immédiate de la décision (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1161/2013 du 27 février 2014 consid. 5.5.1) ;

que pour effectuer la pesée des intérêts en présence qu'un tel examen implique, l'autorité de recours n'est pas tenue de procéder à des investigations supplémentaires, mais peut statuer sur la base des pièces en sa possession (ATF 117 V 185 consid. 2b ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_435/2008 du 6 février 2009 consid. 2.3 et les arrêts cités) ;

que la chambre de céans dispose dans l'octroi de mesures provisionnelles d'un large pouvoir d'appréciation (ibidem) ;

qu'en l'espèce, le recours est dirigé contre la décision de l'OCIRT refusant à
M. A______ l'autorisation demandée par l'C______ de lui octroyer une autorisation de séjour à l'année avec activité lucrative (permis B) ;

que la qualité pour recourir de l'intéressé contre une décision de l'OCIRT souffrira en l'état de rester indécise (arrêt du Tribunal fédéral 2D_16/2018 du 10 août 2018
consid. 5.2) ;

qu'il y a lieu de procéder à une pesée des intérêts, soit ceux du recourant à obtenir un permis de travail et l'intérêt public au respect de la loi ;

que ce dernier doit prévaloir à ce stade ;

qu'en l'espèce, les mesures provisionnelles ne peuvent être accordées car cela reviendrait à permettre au recourant d'être mis au bénéfice d'un régime juridique dont il n'a pas bénéficié jusqu'ici (ATF 126 V 407 ; 116 Ib 344 ; Fritz GYGI, L'effet suspensif et les mesures provisionnelles en procédure administrative, in RDAF 1976 p. 217, 221 et 223) ;

que, partant, la demande de mesures provisionnelles sera rejetée ;

qu'il sera statué sur les frais de la présente décision avec l'arrêt au fond ;

 

LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

rejette la demande de mesures provisionnelles ;

réserve le sort des frais de la procédure jusqu'à droit jugé au fond ;

dit que les éventuelles voies de recours contre la présente décision, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. La présente décision et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être jointes à l'envoi ;

communique la présente décision à Me Stéphane Rey, avocat du recourant, à l'office cantonal de l'inspection et des relations du travail, ainsi qu'au Tribunal administratif de première instance.

 

 

 

 

La présidente :

 

 

 

F. Payot Zen Ruffinen

 

 

 

 

Copie conforme de cette décision a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

la greffière :