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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/541/2017

ATA/1057/2018 du 09.10.2018 sur JTAPI/105/2018 ( PE ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/541/2017-PE ATA/1057/2018

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 9 octobre 2018

1ère section

 

dans la cause

 

Madame A______
représentée par Me Maurice Utz, avocat

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 2 février 2018 (JTAPI/105/2018)


EN FAIT

1. Madame A______, ressortissante bolivienne, née en 1977, a épousé à l’ambassade de Bolivie de B______, en Allemagne, le ______ 2010, Monsieur C______, ressortissant portugais. Ce dernier a été domicilié à Genève entre le 19 novembre 2002 et le 3 janvier 2016, en étant au bénéfice d’un permis d’établissement depuis le 10 novembre 2007.

2. Le 30 avril 2012, M. C______ a sollicité de l’office cantonal de la population, devenu depuis lors l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM), un permis de séjour pour son épouse, dans le cadre d’un regroupement familial.

Il avait connu Mme A______ en 2005 à Grenade (Espagne) et ils étaient tombés amoureux. Il lui avait demandé de venir à Genève afin de l’épouser, ce qu’ils avaient fait à l’ambassade bolivienne de B______. Il désirait légaliser la présence de son épouse en Suisse.

Parmi les documents annexés à cette requête, figurait la confirmation de la réservation d’une place entre l’aéroport de Lima (Pérou) et celui de Genève au nom de Mme A______ pour le 31 juillet 2012.

3. Le 30 juillet 2012, l’OCPM a délivré à l’intéressée une autorisation de séjour B, valable jusqu’au 29 juillet 2017.

4. Le 15 octobre 2012, Mme A______ a sollicité de l’OCPM l’autorisation de faire venir à Genève ses enfants, nés respectivement en 1997 et en 2002. Elle a toutefois retiré cette demande le 1er juillet 2013.

5. Le 3 décembre 2015, M. C______ a annoncé à l’OCPM son départ de la Suisse à destination du Portugal. Cette annonce ne concernait pas son épouse.

6. a. Le 22 mars 2016, l’OCPM a interpellé Mme A______ afin de connaître les suites qu’elle entendait donner à la séparation intervenue dans son couple et lui demander de fournir des justificatifs de ses ressources financières.

b. Par courrier non daté, mais reçu à l’OCPM le 20 avril 2016, Mme A______ a indiqué que, bien que son époux ait quitté la Suisse, ils étaient toujours mariés et elle a produit ses fiches de salaire, précisant rechercher des emplois mieux rémunérés.

7. Selon les informations obtenues par l’OCPM, Mme A______ n’a pas reçu d’aide financière de l’Hospice général entre 2012 et 2016. Elle n’a pas non plus fait l’objet de condamnations pénales.

8. Le 11 novembre 2016, Mme A______ a précisé que son époux était reparti au Portugal à la suite de difficultés dans leur couple mais qu’aucune procédure de séparation formelle n’avait été entreprise. Elle n’entendait pas le suivre au Portugal, car elle résidait à Genève et y travaillait régulièrement. Elle espérait que son époux revienne vivre avec elle.

9. Le 29 novembre 2016, M. C______ a adressé un courrier à l’OCPM. Il avait vécu avec son épouse jusqu’au début du mois de novembre 2014, puis ils s’étaient séparés définitivement. Il avait quitté la Suisse au mois de janvier 2016 pour des questions de santé et financières. Il désirait divorcer, mais Mme A______ ne le voulait pas avant d’avoir obtenu un permis C.

10. Le 12 décembre 2016, l’OCPM a indiqué à Mme A______ qu’il envisageait de révoquer son autorisation de séjour et de prononcer son renvoi de Suisse, un délai lui étant accordé pour se déterminer à ce sujet, ce que l’intéressée a fait le 13 janvier 2017.

11. Agissant pas la plume d’un mandataire, Mme A______ s’est déterminée par courrier daté du 13 janvier 2016 (sic ; recte : 2017). On pouvait considérer que la séparation datait du mois de novembre 2014. La vie commune avait duré plus de quatre ans, soit du mois de décembre 2010 au mois de décembre 2014.

12. Le 17 janvier 2017, l’OCPM a révoqué l’autorisation de séjour de l’intéressée, et lui a imparti un délai, échéant au 17 mars 2017, pour quitter la Suisse.

Dès lors que l’intéressée ne faisait plus ménage commun avec son conjoint, et que l’union en Suisse avait duré moins de trois ans, elle n’avait plus le droit à une autorisation de séjour, et aucune raison personnelle majeure ne s’opposait à son renvoi.

13. Saisi par Mme A______ le 15 février 2017, et au terme d’une instruction écrite, le Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) a rejeté le recours et confirmé la décision initiale par jugement du 2 février 2018 (JTAPI/105/2018).

La question de savoir si l’intéressée avait vécu à Genève avec son époux entre son mariage et la demande de permis de séjour pouvait rester ouverte. Le délai de trois ans prévu par l’art. 50 al. 1 let. a de la loi fédérale sur les étrangers du 16 décembre 2005 (LEtr - RS 142.20) ne commençait à courir que lors de la demande en 2012 car il n’était pas possible aux autorités de vérifier a posteriori si les conditions d’un regroupement familial étaient réunies antérieurement. Dès lors que l’union conjugale avait duré moins de trois ans, l’examen de la réussite et de l’intégration en Suisse n’avait pas à être réalisé. Au surplus, rien n’indiquait dans le dossier que l’exécution du renvoi ne serait pas licite, admissible ou raisonnablement exigible.

14. Par acte mis à la poste le 7 mars 2018 et reçu à la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : chambre administrative) le lendemain, Mme A______ a recouru contre le jugement précité.

Elle demandait à être entendue par la chambre administrative.

Elle avait vécu en Suisse avec son époux du mois de décembre 2010 au mois de novembre 2014 et il était insoutenable de ne pas admettre cela. Il devait même être retenu qu’elle était arrivée en Suisse en 2008, au plus tard au mois de juin. En conséquence, l’art. 50 al. 1 let. a LEtr était violé. Au surplus, un examen rétroactif des conditions nécessaires à un regroupement familial était parfaitement possible.

De plus, elle répondait aux conditions de l’opération dite « Papyrus ».

15. Le 16 avril 2018, l’OCPM a conclu au rejet du recours, se référant au jugement du TAPI. La durée du séjour en Suisse n’était au surplus pas démontrée du point de vue du projet « Papyrus ».

Le 18 mai 2018, Mme A______ a transmis des éléments de preuves supplémentaires, en particulier des documents démontrant qu’elle était à Genève au mois de décembre 2009, lesquels ont été soumis à l’OCPM.

Ce dernier, le 5 juin 2018, a maintenu ses conclusions antérieures. Les pièces produites démontraient que Mme A______ était en Suisse au mois de décembre 2009 et non le reste de l’année.

16. Dans le cadre de l’exercice de son droit à la réplique, Mme A______ a maintenu ses conclusions antérieures le 19 juillet 2018. Elle ne se prévalait des conditions de l’opération dite « Papyrus » qu’à titre subsidiaire.

17. Sur quoi, la cause a été gardée à juger, ce dont les parties ont été informées.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2. L’intéressée sollicite préalablement son audition.

a. Tel qu’il est garanti par l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d’être entendu comprend le droit pour les parties de faire valoir leur point de vue avant qu’une décision ne soit prise, de fournir des preuves quant aux faits de nature à influer sur la décision, d’avoir accès au dossier, de participer à l’administration des preuves, d’en prendre connaissance et de se déterminer à leur propos (ATF 142 II 218 consid. 2.3; arrêt du Tribunal fédéral 2C_656/2016 du 9 février 2017 consid. 3.2 et les références citées).

Le droit d’être entendu n’implique pas une audition personnelle de l’intéressé, celui-ci devant simplement disposer d’une occasion de se déterminer sur les éléments propres à influer sur l’issue de la cause (art. 41 LPA ; ATF 140 I 68 consid. 9.6 ; 134 I 140 consid. 5.3).

b. En l’espèce, la chambre administrative est en possession d’un dossier complet qui lui permet de trancher les griefs soulevés en toute connaissance de cause. L’audition de l’intéressée n’est pas nécessaire et ne sera pas ordonnée.

3. Le recours devant la chambre administrative peut être formé pour violation du droit y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, ainsi que pour constatation inexacte des faits (art. 61 al. 1 LPA). En revanche, celle-ci ne connaît pas de l’opportunité des décisions prises en matière de police des étrangers, dès lors qu’il ne s’agit pas d’une mesure de contrainte (art. 61 al. 2 LPA ; art. 10 al. 2 de la loi d’application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10, a contrario ; ATA/1097/2015 du 13 octobre 2015).

Il y a abus du pouvoir d’appréciation lorsque l’autorité, tout en restant dans les limites du pouvoir d’appréciation qui est le sien, se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou viole des principes généraux du droit tels que le principe de la proportionnalité (ATF 137 V 71 consid. 5.1 ; 123 V 150 consid. 2 et les références citées ; ATA/114/2015 du 27 janvier 2015 consid. 5c).

4. a. La LEtr et ses ordonnances d'exécution, en particulier l’ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201), règlent l’entrée, le séjour et la sortie des étrangers dont le statut juridique n’est pas réglé par d’autres dispositions du droit fédéral ou par des traités internationaux conclus par la Suisse (art. 1 et 2 LEtr), notamment par l’Accord du 21 juin 1999 entre la Confédération suisse d'une part, et la Communauté européenne et ses États membres, d'autre part, sur la libre circulation des personnes (ALCP - RS 0.142.112.681).

 

Le conjoint d’un ressortissant de la Communauté européenne ayant un droit de séjour en Suisse dispose, en vertu des art. 7 let. d ALCP et 3 par. 1 et 2 annexe I ALCP, d’un droit à une autorisation de séjour en Suisse pendant la durée formelle de son mariage et ce quelle que soit sa nationalité.

Le droit de séjour du conjoint d’un ressortissant de l’UE/AELE prévu dans l’ALCP n’est subordonné qu’à la condition de l’existence juridique du mariage. Les ressortissants d’un État tiers, membres de la famille de ressortissants d’un État de l’UE ou de l’AELE, n’ont pas besoin de justifier d’un séjour préalable sur le territoire d’un État membre de l’UE ou de l’AELE. Ils peuvent faire valoir un droit au regroupement familial au sens de l’art. 3 annexe 1 ALCP quels que soient le lieu ou le moment à partir duquel le lien familial s’est créé (Directives et commentaires concernant l’introduction progressive de la libre circulation des personnes, version de juillet 2018, ch. 9.1.4 [ci-après : Directives OLCP]).

b. En l’espèce, la séparation définitive entre l’intéressée et M. C______, ressortissant portugais au bénéfice d’une autorisation d’établissement, a eu lieu au mois de novembre 2014, selon ses propres dires. L’intéressée ne peut plus, depuis cette date et pour l’avenir, se prévaloir des dispositions de l’ALCP pour bénéficier d’une autorisation de séjour au titre du regroupement familial « pendant la durée formelle de son mariage ».

5. a. La poursuite du séjour du conjoint ressortissant d’États non-membres de l’UE ou de l’AELE (ressortissants d’États tiers), après dissolution du mariage, est régie par les dispositions de la LEtr et ses ordonnances d’exécution (arrêts du Tribunal fédéral 2C_822/2013 du 25 janvier 2014 consid. 1.2 ; 2C_875/2012 du 22 février 2013 consid. 2.2 ; Directives OLCP ch. 9.4.3).

b. Selon l’art. 43 LEtr, le conjoint étranger du titulaire d’une autorisation d’établissement a droit à l’octroi d’une autorisation de séjour et à la prolongation de sa durée de validité, à condition de vivre en ménage commun avec lui (al. 1) ; après un séjour légal ininterrompu de cinq ans, le conjoint a droit à l’octroi d’une autorisation d’établissement (al. 2).

c. Aux termes de l’art. 50 al. 1 LEtr, après dissolution de la famille, le droit du conjoint à l’octroi d’une autorisation de séjour et à la prolongation de sa durée de validité en vertu notamment de l’art. 43 LEtr subsiste dans les cas suivants :

- l’union conjugale a duré au moins trois ans et l’intégration est réussie (let. a).

La période minimale de trois ans de l'union conjugale commence à courir dès le début de la cohabitation effective des époux en Suisse et s'achève au moment où ceux-ci cessent de faire ménage commun (ATF 138 II 229 consid. 2 ; 136 II 113 consid. 3.3.3). Seules les années de mariage et non de concubinage sont pertinentes (ATF 140 II 345 consid. 4.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_178/2014 du 20 mars 2014 consid. 5.2).

Il n’est pas nécessaire d’examiner la condition de la réussite de l’intégration lorsque l’union conjugale a duré moins de trois ans, les deux conditions étant cumulatives (arrêts du Tribunal fédéral 2C_352/2014 du 18 mars 2015 consid. 4 ; ATA/1183/2015 du 3 novembre 2015).

- la poursuite du séjour en Suisse s’impose pour des raisons personnelles majeures (let. b).

L'art. 50 al. 1 let. b et al. 2 LEtr vise à régler les situations qui échappent aux dispositions de l'art. 50 al. 1 let. a LEtr, soit parce que le séjour en Suisse durant le mariage n'a pas duré trois ans ou parce que l'intégration n'est pas suffisamment accomplie ou encore parce que ces deux aspects font défaut mais que - eu égard à l'ensemble des circonstances - l'étranger se trouve dans un cas de rigueur après la dissolution de la famille (ATF 138 II 393 consid. 3.1 et les références citées).

6. La première question qu’il appartient à la chambre administrative de trancher est celle de la prise en compte de la période entre le mariage de l’intéressée et son éventuelle arrivée en Suisse et la date où cette dernière a annoncé son arrivée en Suisse, soit entre le 18 décembre 2010 et le 31 juillet 2012.

La jurisprudence récente de la chambre administrative (ATA/719/2018 du 17 juillet 2018) tranche cette question.

L’ALCP permet à la Suisse d’imposer aux ressortissants d’une autre partie contractante une obligation d’annoncer leur arrivée en Suisse. L’intéressée, ressortissante d’un pays tiers, a épousé un ressortissant portugais et elle avait l’obligation d’annoncer son séjour sur le territoire helvétique dès le début de ce dernier.

En conséquence, pendant cette période, le séjour de l’intéressée ne pouvait être pris en compte dans le cadre de l’art. 50 al. 1 let. a LEtr (cf. ATA précité)

L’intéressée ayant établi la réalité de son séjour en Suisse dès le 31 juillet 2012, cette date doit être retenue comme dies a quo des trois ans requis par l’art. 50 al. 1 let. a LEtr.

7. Il ressort de ce qui précède que l’union conjugale liant la recourante à M. C______ en Suisse a duré moins de trois ans, soit depuis le 31 juillet 2012 jusqu’au mois de décembre 2014.

En conséquence, l’une des conditions de l’art. 50 al. 1 let. a LEtr n’étant pas remplie, la réussite de l’intégration de la recourante en Suisse n’a pas à être examinée.

8. a. Les raisons personnelles majeures visées à l'art. 50 al. 1 let. b LEtr sont notamment données lorsque le conjoint est victime de violence conjugale, que le mariage a été conclu en violation de la libre volonté d'un des époux ou que la réintégration sociale dans le pays de provenance semble fortement compromise (art. 50 al. 2 LEtr).

L'énumération des cas de l’art. 50 al. 2 LEtr n'est pas exhaustive et laisse aux autorités une certaine liberté d'appréciation fondée sur des motifs humanitaires (ATF 136 II 1 consid. 5.3). Un cas de rigueur survenant après la rupture de la communauté conjugale doit toutefois s'apprécier au vu de l'ensemble des circonstances particulières et présenter une intensité significative quant aux conséquences qu'un renvoi pourrait engendrer sur la vie privée et familiale de l'étranger (arrêts du Tribunal fédéral 2C_275/2013 du 1er août 2013 consid 3.1 ; 2C_781/2010 du 16 février 2011 consid. 2.2).

b. L’art. 50 al. 1 let. b et al. 2 LEtr vise à régler les situations qui échappent aux dispositions de l’art. 50 al. 1 let. a LEtr, soit parce que le séjour en Suisse durant le mariage n’a pas duré trois ans ou parce que l’intégration n’est pas suffisamment accomplie ou encore parce que ces deux aspects font défaut mais que – eu égard à l’ensemble des circonstances – l’étranger se trouve dans un cas de rigueur après la dissolution de la famille (ATF 138 II 393 consid. 3.1 ; 137 II 345 consid. 3.2.1 ; 137 II 1 consid. 4.1). À cet égard, c’est la situation personnelle de l’intéressé qui est décisive et non l’intérêt public que revêt une politique migratoire restrictive. Il s’agit par conséquent uniquement de décider du contenu de la notion juridique indéterminée « raisons personnelles majeures » et de l’appliquer au cas d’espèce, en gardant à l’esprit que l’art. 50 al. 1 let. b LEtr confère un droit à la poursuite du séjour en Suisse, contrairement à l’art. 30 al. 1 let. b LEtr (ATF 138 II 393 consid. 3.1 ; 137 II 345 consid. 3.2.1 ; 137 II 1 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_220/2014 du 4 juillet 2014 consid. 2.3).

c. Lors de l'examen des raisons personnelles majeures au sens de l'art. 50 al. 1 let. b LEtr, les critères énumérés à l'art. 31 al. 1 OASA peuvent entrer en ligne de compte, même si, considérés individuellement, ils ne sauraient fonder un cas individuel d'une extrême gravité (ATF 137 II 345 consid. 3.2.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_822/2013 du 25 janvier 2014 consid. 5.2).

À teneur de l’art. 31 al. 1 OASA, une autorisation de séjour peut être octroyée dans les cas individuels d’extrême gravité. Lors de l’appréciation, il convient de tenir compte notamment de l’intégration du requérant (let. a), du respect de l’ordre juridique suisse par le requérant (let. b), de la situation familiale, particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité des enfants (let. c), de la situation financière ainsi que de la volonté de prendre part à la vie économique et d’acquérir une formation (let. d), de la durée de la présence en Suisse (let. e), de l’état de santé (let. f) et des possibilités de réintégration dans l’État de provenance (let. g).

Concernant la durée du séjour en Suisse, bien que celle-ci constitue un critère important lors de l’examen d’un cas d’extrême gravité, elle doit néanmoins être examinée à la lumière de l’ensemble des circonstances du cas particulier et être relativisée lorsque l’étranger a séjourné en Suisse de manière illégale, sous peine de récompenser l’obstination à violer la loi (ATF 130 II 39 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2D_13/2016 du 11 mars 2016 consid. 3.2 ; ATA/203/2018 du 6 mars 2018 consid. 6d).

S'agissant de la réintégration sociale dans le pays d'origine, l'art. 50 al. 2 LEtr exige qu'elle semble fortement compromise. La question n'est donc pas de savoir s'il est plus facile pour la personne concernée de vivre en Suisse, mais uniquement d'examiner si, en cas de retour dans le pays d'origine, les conditions de sa réintégration sociale, au regard de sa situation personnelle, professionnelle et familiale, seraient gravement compromises (arrêts du Tribunal fédéral 2C_621/2015 du 11 décembre 2015 consid. 5.2.1 ; 2C_369/2010 du 4 novembre 2010 consid. 4.1).

d. En l’espèce, la recourante a passé l’essentiel de son existence en Bolivie et la durée de son séjour en Suisse, au mieux d’un peu moins de dix ans si l’on retient toutes les pièces qu’elle a produites, doit être relativisée en raison du caractère illicite des premières années. Ses enfants sont restés dans ce pays. Son intégration dans le pays est bonne, sans toutefois être exceptionnelle ou remarquable.

D’autre part, l’intéressée n’indique pas que son retour dans son pays d’origine présenterait des difficultés particulières.

Rien ne permet de considérer que Mme A______ se trouve dans une situation d’extrême gravité.

Au vu de ce qui précède, le TAPI a retenu à bon droit, que la décision de l’OCPM de ne pas renouveler l’autorisation de séjour de la recourante, était justifiée.

9. La recourante fonde d’autre part son recours sur l’art. 30 al. 1 let. b LEtr et le dispositif appelé « Papyrus ».

Toutefois, dès lors que l’une des conditions principales exigées pour être mise au bénéfice du dispositif, soit un séjour continu à Genève de dix ans pour les personnes n’ayant pas d’enfants scolarisés, n’est pas remplie, ce grief peut être écarté sans plus d’analyse.

10. Selon l’art. 64 al. 1 let. c LEtr, l’éloignement est prononcé par le biais d’une décision de renvoi à l’encontre d’un étranger auquel une autorisation est refusée, ou dont l’autorisation, bien que requise, est révoquée ou n’est pas prolongée après un séjour autorisé.

Le renvoi est la conséquence logique et obligatoire du rejet d’une demande d’autorisation de séjour. Il n’apparaît pas, à rigueur de dossier, que l’exécution du renvoi de la recourante dans son pays d’origine serait impossible, illicite ou inexigible.

11. Mal fondé, le recours sera rejeté.

Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge de la recourante et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 1 et 2 LPA).

* * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 7 mars 2018 par Madame A______  contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 2 février 2018 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge de la recourante un émolument de CHF 400.- ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Maurice Utz, avocat de la recourante, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance, ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, MM. Thélin et Pagan, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

Genève, le 

 

 

la greffière :



Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l’entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l’admission provisoire,

4. l’expulsion fondée sur l’art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d’admission,

6. la prolongation d’une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d’emploi du titulaire d’une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d’asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l’objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l’acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

______________________________________________

Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l’objet d’aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

___________________________________________

 

Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.