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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3459/2017

ATA/1049/2018 du 09.10.2018 ( AMENAG ) , REJETE

Parties : MIRIGAY Ghislaine / MEYER HARBARTH Marianne, CONSEIL D'ETAT
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3459/2017-AMENAG ATA/1049/2018

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 9 octobre 2018

 

dans la cause

 

Madame Ghislaine MIRIGAY
représentée par Me Anaïs Loeffel, avocate

contre

CONSEIL D'ÉTAT

et

Madame Marianne MEYER HARBARTH, appelée en cause
représentée par Me François Bellanger, avocat

 



EN FAIT

1. Madame Ghislaine MIRIGAY est propriétaire de la parcelle n° 2'415 de la commune de Bardonnex, sise 43, Route du Prieur, Landecy à
La-Croix-de-Rozon.

La parcelle est sise en zone 4B protégée.

2. Le village de Landecy est un site construit d'importance nationale dans l'Inventaire des sites construits à protéger en Suisse (ci-après : ISOS). Selon la fiche descriptive liée au village, celui-ci est caractérisé par le mélange de caractères ruraux et résidentiels. Les qualités paysagères du site résultent de la présence d'une couronne complète de terrains agricoles, se transformant par deux fois, à l'est et à l'ouest du projet, en parcs richement arborisés à proximité des constructions, avec pour effet des silhouettes extérieures de valeur. Le site a conservé, dans une très large mesure, sa substance d’origine et présente un très bon état de conservation.

Le village fait aussi l’objet d’un recensement architectural du canton, validé par la commission des monuments, de la nature et des sites (ci-après : CMNS).

3. Un premier projet de plan de site PS n° 29'448-505 de Landecy sud, mis à l'enquête publique du 2 septembre au 3 octobre 2005, a été abandonné.

4. Un second projet de plan de site PS n° 29'962-505 a été établi par le service des monuments et des sites (ci-après : SMS) en août 2014. Le plan de site a été modifié en octobre 2014, mars et mai 2016 et février 2017.

Le périmètre du projet de plan de site s’étend au sud de la route du Prieur, entre le chemin du Granger à l'ouest et le noyau villageois à l'est, et est situé en zone 4B protégée et en zone agricole.

5. Le 27 avril 2016, la CMNS a préavisé favorablement le projet de plan de site n° 29'962-505.

6. L'enquête publique n° 1'875 relative au projet de plan de site n° 29'962-505, ouverte du 14 juin au 13 juillet 2016, a suscité neuf observations.

À l'issue de cette phase de la procédure, le Conseil municipal de la commune de Bardonnex a émis un préavis favorable sans observation le 20 décembre 2016.

7. La procédure d’opposition a été ouverte du 20 février au 22 mars 2017.

Mme MIRIGAY a formé opposition au plan précité. Sa parcelle était située hors du périmètre du plan, mais était attenante à l’est de celui-ci.

8. Par arrêté du 21 juin 2017 (ACE 3'040-2017), le Conseil d’État a rejeté, dans la mesure où elle était recevable, l’opposition susmentionnée. Par arrêté distinct du même jour, il a adopté le plan de site.

9. Par acte du 23 août 2017, Mme MIRIGAY a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre l’arrêté du Conseil d’État rejetant son opposition. Elle a conclu à l’annulation de celui-là.

Préalablement, elle sollicitait un transport sur place, la production par l’autorité intimée de l’entier de son dossier et l’audition des parties.

Le projet de plan de site prévoyait, notamment, l’implantation de deux bâtiments sur les parcelles nos 3'184 et 3'330, soit à l’est du plan de site. Ces parcelles étaient voisines de sa parcelle. Les bâtiments envisagés consistaient en un rez + combles (ci-après : R + C) de 19 m de long et un rez + un étage + combles (ci-après : R + 1 + C) de 22 m de long, chacun ayant 11 m de largeur, d’une hauteur inconnue et à une limite de propriété de 6 m de sa parcelle. L’implantation totale serait de 46 m x 21 m, soit 966 m2 environ.

Le projet prévoyait également la création d’un parking souterrain en limite de propriété avec sa parcelle, l’entrée du parking souterrain se situant précisément devant chez elle. Enfin, le projet de plan impliquait l’abattage de nombreux arbres, bien que n’étant pas sur sa parcelle. La préservation de la faune et la flore représentait un intérêt légitime pour tout le village.

Le Conseil d’État avait violé l’art. 35 al. 1 de la loi sur la protection des monuments, de la nature et des sites du 4 juin 1976 (LPMNS - L 4 05) et l’art. 15 de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988
(LCI - L 5 05). Les projets d’immeubles ne pouvaient en l’état satisfaire aux exigences de la LPMNS, que ce soit au niveau du gabarit ou de l’esthétisme des bâtiments prévus, ceux-ci ne pouvant pas s’intégrer dans le village rural de Landecy, zone 4B protégée et inscrite à l’ISOS. Au vu de l’importance cantonale et nationale du site de Landecy, c’était l’ensemble du village qui aurait dû être inclus dans le plan de site : le périmètre dudit plan ne correspondait pas à la réalité du village tant historique, architecturale que sociale. Tous les habitants auraient dû être impliqués. Le droit de vues sur les maisons historiques, soit en l’occurrence celle de la recourante, aurait également dû être protégé.

L’arrêté violait l’art. 19 de la loi fédérale sur l’aménagement du territoire du 22 juin 1979 (LAT - RS 700). Selon son al. 1, un terrain était réputé équipé lorsqu’il était desservi d’une manière adaptée à l’utilisation prévue par les voies d’accès notamment. Pour déterminer si l’accès était suffisant d’un point de vue technique, il convenait notamment d’apprécier la praticabilité de l’accès. Celui-ci devait présenter des garanties de résistance et de sécurité au passage des différents véhicules. La sécurité des automobilistes comme celle des autres utilisateurs, en particulier les piétons, devait être garantie. Le revêtement devait être adéquat en fonction du type de véhicules qui allaient l’emprunter. La visibilité et les possibilités de croisement devaient être suffisantes. L’accès des services de secours et de voirie devait être assuré. Un bien-fonds ne pouvait pas être considéré comme équipé si, une fois construit, conformément aux règles du plan d’affectation, son utilisation entraînait un accroissement du trafic qui ne pouvait pas être absorbé sans danger par le réseau routier existant. Or, l’accès aux deux immeubles prévus sur le projet de plan de site se trouvait être sur les parcelles nos 3'184 et 3'330, soit en plein virage, avec une visibilité nulle en raison des murs existants. Le trafic dans le village de Landecy était abondant, en raison notamment des pendulaires. La route du Prieur était une voie de passage, saturée à l’heure de pointe. Elle n’était plus en mesure d’absorber une aggravation de trafic. Cette unique route d’accès était sinueuse et limitée à une circulation à 30 km/h. Elle desservait les maisons villageoises protégées et ne permettait pas de croisement aisé des véhicules automobiles. De surcroît, elle ne comportait pas de trottoir. Une pétition avait été déposée le 18 février 2014 à la mairie de Bardonnex, signée par deux cent seize personnes, qui demandait que la zone soit limitée à 20 km/h.

L’arrêté violait l’art. 106 LCI. Les constructions envisagées ne respectaient pas le cadre légal au vu des gabarits, pour certains inconnus, et de la hauteur, inconnue. Il était manifeste, au regard des plans disponibles au dossier, que le projet boucherait la vue de la recourante depuis sa parcelle sur la campagne de Landecy. Sa vue serait d’autant plus obstruée que l’abattage des arbres devant sa parcelle était également prévu, lui enlevant toute intimité.

Enfin, le plan de site ferait perdre de la valeur à sa propriété en raison notamment de la perte de vue et d’intimité, de la présence du parking souterrain en limite de propriété et de l’augmentation drastique du trafic à la route du Prieur.

10. Le Conseil d’État a conclu au rejet du recours. Ses arguments seront repris en tant que de besoin dans la partie en droit de l’arrêt.

11. Le 12 septembre 2017, Madame Marianne MEYER HARBARTH, propriétaire de la parcelle no 3'211, sise dans le périmètre du plan de site querellé, a sollicité d’être appelée en cause, requête à laquelle la chambre administrative a donné suite par décision du 13 octobre 2017.

Après consultation du dossier, elle a conclu au rejet du recours.

12. Dans sa réplique du 20 février 2018, la recourante a persisté dans ses conclusions.

13. Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable de ces points de vue (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

La qualité pour recourir de la recourante peut souffrir de rester indécise compte tenu de ce qui suit.

2. La recourante sollicite diverses mesures d'instruction, telles que la production par le département de l’aménagement, du logement et de l’énergie, devenu depuis le département du territoire (ci-après : le département ou le DT) de l’entier du dossier, un transport sur place et son audition.

a. Tel qu’il est garanti par l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d'être entendu comprend en particulier le droit pour le justiciable de fournir des preuves quant aux faits de nature à influer sur le sort de la décision (ATF 142 II 218 consid. 2.3 ; 142 III 48 consid. 4.1.1) et de participer à l'administration des preuves (arrêt du Tribunal fédéral 1C_279/2016 du 27 février 2017 consid. 6.1). Toutefois, le droit d'être entendu ne peut être exercé que sur les éléments qui sont déterminants pour décider de l'issue du litige (ATF 135 I 279 consid. 2.3 p. 282 ; 132 V 368 consid. 3.1). L'autorité de décision peut donc se livrer à une appréciation anticipée de la pertinence du fait à prouver et de l'utilité du moyen de preuve offert et, sur cette base, refuser de l'administrer. Ce refus ne viole le droit d'être entendu que si l'appréciation à laquelle elle a ainsi procédé est entachée d'arbitraire (art. 9 Cst. ; ATF 138 III 374 consid. 4.3.2 ; 136 I 229 consid. 5.3). La garantie constitutionnelle précitée n'empêche pas non plus l'autorité de mettre un terme à l'instruction lorsque les preuves administrées lui ont permis de forger sa conviction et que, procédant d'une manière non arbitraire à une appréciation anticipée des preuves qui lui sont encore proposées, elle a la certitude qu'elles ne pourraient l'amener à modifier son opinion (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 p. 299 ; ATA/659/2017 du 13 juin 2017 consid. 2a).

L’art. 29 al. 2 Cst n’implique pas une audition personnelle de l’intéressé, celui-ci devant simplement disposer d’une occasion de se déterminer sur les éléments propres à influer sur l’issue de la cause (art. 41 LPA ; ATF 140 I 68 consid. 9.6 ; 134 I 140 consid. 5.3).

b. En l'espèce, l’autorité intimée a produit son dossier, lequel comprend les échanges d'écritures, les plans du projet, ainsi que les préavis des entités qui se sont déterminées sur celui-ci. Par ailleurs, des photos ont été versées à la procédure. Enfin, la recourante n’a pas de droit à une audition orale, ayant pu s’exprimer tant dans le cadre de son recours que dans une réplique.

Par conséquent, il ne sera pas donné suite aux mesures d'instruction sollicitées par la recourante, les pièces pertinentes ayant été versées à la procédure et la chambre administrative disposant d’un dossier complet lui permettant de se prononcer sur les griefs soulevés et trancher le litige en toute connaissance de cause.

3. Selon l’art. 61 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (al. 1 let. a). Les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (al. 2).

Selon une jurisprudence bien établie, la chambre administrative observe une certaine retenue pour éviter de substituer sa propre appréciation à celle des commissions de préavis pour autant que l'autorité suive l'avis de celles-ci. Les autorités de recours se limitent à examiner si le département ne s'écarte pas sans motif prépondérant et dûment établi du préavis de l'autorité technique consultative, composée de spécialistes capables d’émettre un jugement dépourvu de subjectivisme et de considérations étrangères aux buts de protection fixés par la loi (ATA/281/2016 du 5 avril 2016 et les arrêts cités).

4. Dans un premier grief, la recourante se plaint d’une violation de l’art. 35 al. 1 LPMNS et 15 LCI. Les immeubles projetés ne respecteraient pas, par leurs gabarits et leur esthétisme, les dispositions précitées.

a. Sont protégés conformément à la présente loi les sites et paysages, espèces végétales et minéraux qui présentent un intérêt biologique, scientifique, historique, esthétique ou éducatif (art. 35 al. 1 LPMNS).

Le département peut interdire ou n’autoriser que sous réserve de modification toute construction qui, par ses dimensions, sa situation ou son aspect extérieur nuirait au caractère ou à l’intérêt d’un quartier, d’une rue ou d’un chemin, d’un site naturel ou de points de vue accessibles au public (art. 15
al. 1 LCI). La décision du département se fonde notamment sur le préavis de la commission d’architecture ou, pour les objets qui sont de son ressort, sur celui de la commission des monuments, de la nature et des sites. Elle tient compte également, le cas échéant, de ceux émis par la commune ou les services compétents du département (art. 15 al. 2 LCI).

À teneur de l'art. 5 al. 2 let. l du règlement général d’exécution de la loi sur la protection des monuments, de la nature et des sites du 29 novembre 1976 (RPMNS - L 4 05.01), la CMNS donne son préavis sur les projets de plans de site établis par le département.

b. En l’espèce, la CMNS avait préavisé défavorablement le précédent projet n24'448. Le second projet a été établi par le SMS, conformément à la demande de la CMNS. Dans son préavis du 3 novembre 2014, la CMNS émettait de nouvelles réserves sur l’emplacement des aires d’implantation des constructions nouvelles. Elle a toutefois émis un préavis favorable sous réserve le 27 avril 2016. Certes, à l’instar de la recourante, elle indique qu’elle aurait souhaité idéalement que l’ensemble du village soit protégé par un plan de site. Elle approuvait toutefois la volonté du service de concentrer ses efforts sur le périmètre comprenant le sud du village de Landecy jusqu’au chemin de Crête bordant les vignes des côtes de Landecy. La CMNS a précisé qu’en raison d’importantes surfaces de parcs et jardins libres, situées en zone 4B protégée, il existait potentiellement des possibilités à bâtir conséquentes dans le périmètre du plan de site. La préservation des vues sur le paysage et la limitation du potentiel à bâtir en zone 4B protégée à un indice de 0,3 maximum, selon le tableau figurant sur le plan, permettait la conservation des qualités paysagères du lieu, de l’arborisation majeure des vergers, des qualités architecturales des bâtiments ainsi que des espaces intermédiaires et des éléments construits tels que murs, portails et pavage. La recourante ne conteste d’ailleurs pas que cet indice est en conformité avec les volumes bâtis existants du site et le caractère villageois.

De même, l’office des autorisations de construire (ci-après : OAC) a émis un premier préavis demandant un projet modifié, le 10 mai 2016. Il concernait notamment les bâtiments projetés sur la parcelle no 3'086. Lors de son second préavis du 24 mai 2016, l’OAC a émis une seule réserve non pertinente dans le présent litige.

De surcroît, contrairement à ce que soutient la recourante, les gabarits des constructions nouvelles prévues par le plan de site sur les parcelles nos 3'330 et 3'184 sont vérifiables. S’agissant de la hauteur, elles ne peuvent dépasser 10 m de haut, en application de l’art. 32 al. 3 LCI. Le plan de site ne prévoit pas de dérogation à celle-ci. Enfin, les détails du projet seront examinés par les spécialistes, notamment de la CMNS une fois le projet déposé.

S’agissant de l’esthétisme des constructions futures, le grief de la recourante est prématuré. Il sera analysé au moment de l’examen des demandes d’autorisations de construire.

S’agissant de l’abattage des arbres sur les parcelles nos 3'330 et 3'184, la direction générale de la nature et des paysages, devenue depuis la direction générale de l’agriculture et de la nature (ci-après : DGAN) a émis un préavis favorable sans réserve. Cet abattage est pour le surplus nécessaire pour réaliser le parking souterrain. À ce propos, la CMNS avait indiqué dans son préavis du 27 avril 2016, « approuv[er] également le contrôle de l’impact du stationnement et son intégration par la construction des futurs parkings souterrains sous le bâti ». Enfin, l’art. 9 du règlement du plan de site précise que les éléments paysagers et naturels caractéristiques du site doivent être préservés. En tant que de besoin, la recourante pourra, si elle s’y estime fondée, prendre les dispositions nécessaires aux fins de vérifier les conditions de mises à l’abattage des arbres concernés.

S’agissant de la faune, la recourante ne détaille pas le grief. Pour le surplus, la DGAN n’a pas émis de réserves sur ce point dans son préavis.

S’agissant « des vues aux points de vue », au sens des art. 35 al. 2 et 38
al. 2 LPMNS, le plan de site fait état de plusieurs de celles-ci, les orientant respectivement sur l’espace agricole environnant depuis le village, en particulier depuis les espaces intermédiaires notamment entre les bâtiments classés, et d’autre part sur la silhouette du village depuis les champs. Les articles précités ne protègent pas les perspectives visuelles de la recourante qui ne peut se prévaloir d’un droit de vue ni depuis sa maison ni sur celle-ci.

Enfin, le plan querellé s’inscrit dans le cadre des fiches A06 du schéma directeur cantonal, imposant le respect du caractère architectural des anciens bâtiments, l’échelle du village et le site environnant. Il respecte par ailleurs la fiche A15, prônant l’élaboration de plans de site aux fins de protéger le patrimoine, composante majeure de l’aménagement du territoire. La carte n° 5, annexée à cette dernière, identifie le secteur querellé.

L’autorité intimée a suivi les préavis des instances spécialisées, tous favorables, lesquelles ont procédé à une étude approfondie du projet, sollicitant parfois des modifications qui ont été intégrées dans le plan de site querellé.

Le grief de violation des art. 35 al. 1 LPMNS et 15 LCI est infondé.

5. Dans un deuxième grief, la recourante se plaint d’une violation de
l’art. 19 LAT. L’accès au parking souterrain ne serait pas praticable.

a. Un terrain est réputé équipé lorsqu'il est desservi d'une manière adaptée à l'utilisation prévue par des voies d'accès et par des conduites auxquelles il est possible de se raccorder sans frais disproportionnés pour l'alimentation en eau et en énergie, ainsi que pour l'évacuation des eaux usées (art. 19 al. 1 LAT).

Une voie d'accès est adaptée à l'utilisation prévue lorsqu'elle est suffisante d'un point de vue technique et juridique pour accueillir tout le trafic de la zone qu'elle dessert. Il faut également que la sécurité des usagers soit garantie sur toute sa longueur, que la visibilité et les possibilités de croisement soient suffisantes et que l'accès des services de secours et de voirie soit assuré (ATF 121 I 65 consid. 3a et les références citées ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_225/2017 du 16 janvier 2018 consid. 4.1 et les références citées). La loi n'impose pas des voies d'accès idéales ; il faut et il suffit que, par sa construction et son aménagement, une voie de desserte soit praticable pour le trafic lié à l'utilisation du bien-fonds et n'expose pas ses usagers ni ceux des voies publiques auxquelles elle se raccorderait à des dangers excessifs (ATF 121 I 65 consid. 3a ; arrêt 1P.319/2002 du 25 novembre 2002 consid. 3 in RDAT 2003 I n° 59 p. 211). Les autorités communales et cantonales disposent en ce domaine d'un important pouvoir d'appréciation (ATF 121 I 65 consid. 3a in fine ; 96 I 369 consid. 4).

b. En l’espèce, le parking souterrain a été expressément approuvé par la CMNS dans son préavis du 27 avril 2016. L’OAC n’a pas non plus émis de doute sur l’accessibilité du parking, à l’instar de la direction générale des transports
(ci-après : la DGT) qui s’est déclarée favorable sans réserve dans son préavis du 3 mai 2016. Cette dernière a précisé que la réponse apportée à la problématique de l’intégration des places de stationnement requises dans les nouveaux projets de bâtiments répond aux attentes de la DGT.

Enfin, le service de l’air, du bruit et des rayonnements non-ionisants (ci-après : SABRA) s’est prononcé favorablement sous réserve le 18 mai 2016. Dans un préavis détaillé, notamment sous l’angle du bruit, il a relevé que le cadastre du bruit routier montrait que les valeurs limite d’immission du degré de sensibilité II étaient respectées tant de jour que de nuit. Une attention particulière devrait toutefois être portée au trafic généré par l’exploitation de nouveaux bâtiments et des nouveaux équipements générateurs de bruit (installations techniques, parkings, …).

Aucun préavis n’est en conséquence défavorable. Un soin particulier a été mis à l’analyse de cette problématique par les différentes instances concernées. Le règlement du plan de site mentionne pour sa part aussi que les rampes d’accès aux parkings souterrains devront faire l’objet d’une attention particulière, de manière à les intégrer soigneusement.

En l’espèce, le département ne s’est pas écarté des préavis des différents services composés de spécialistes qu’il avait consultés. Conformément à la jurisprudence de la chambre de céans, celle-ci s’impose une certaine retenue pour ne pas substituer sa propre appréciation à celles des commissions de préavis. Pour le surplus, si aucun élément du dossier ne permet de conclure en l’état que les accès aux parkings seraient insuffisants, ceux-ci seront étudiés avec soin, conformément aux préavis et au règlement précité au moment du dépôt et de l’instruction des autorisations de construire. S’agissant de la problématique des piétons, la DGT n’a pas émis de réserve et s’est dite favorable au plan de site querellé. Le grief de violation de l’art. 19 al. 1 LAT sera écarté.

6. Dans un troisième grief, la recourante se plaint d’une violation de l’art. 106 LCI. Les nouvelles constructions lui boucheraient la vue. Elle perdrait en intimité.

a. Aux termes de l’art. 106 al. 1 1ère phr. LCI, dans les zones 4B protégées, le département, sur préavis de la commune et de la CMNS, fixe dans chaque cas particulier l’implantation, le gabarit, le volume et le style des constructions à édifier, de manière à sauvegarder le caractère architectural et l’échelle de ces agglomérations ainsi que le site environnant. Le département peut en conséquence, à titre exceptionnel, déroger aux dispositions régissant les distances entre bâtiments, les distances aux limites de propriétés et les vues droites (art. 106 al. 1 LCI).

Cette disposition est spécialement applicable aux villages protégés et confère un large pouvoir d’appréciation au département compétent. Celui-ci peut fixer lui-même les règles applicables aux constructions dans le but de sauvegarder le caractère d’un village et le site environnant, et déroger aux dispositions ordinaires (arrêts du Tribunal fédéral 1C_579/2015 du 4 juillet 2016 consid. 3.2 ; 1C_123/2010 du 25 mai 2010 consid. 3.3 ; ATA/537/2017 du 9 mai 2017 consid. 4b).

b. Les arguments relatifs à l’art. 106 LCI sont prématurés et pourront faire l’objet d’une analyse au moment du dépôt d’une autorisation de construire. En l’état, le plan de site respecte la LCI, notamment dans les gabarits qu’il adopte
(R + C & R + 1 + C). Ceux-ci ont d’ailleurs été validés tant par l’OAC que la CMNS.

Par ailleurs, conformément à la jurisprudence, les constructions qui respectent les différentes prescriptions légales ne peuvent être source d’inconvénients graves (ATA/874/2018 du 28 août 2018 consid. 7a et les références citées).

Le grief de violation de l’art. 106 LCI sera rejeté dans la mesure où il est recevable.

7. Les prétentions de la recourante à une éventuelle indemnité d’expropriation sont exorbitantes au présent litige.

8. Au vu de ce qui précède, le recours sera rejeté.

Vu son issue, un émolument de CHF 1'000.- sera mis à la charge de la recourante, qui succombe (art. 87 al. 1 LPA), et aucune indemnité de procédure ne sera allouée, l’appelée en cause ayant par ailleurs mandaté un avocat sans conclure à l’octroi d’une telle indemnité (art. 87 al. 2 LPA).


PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

rejette, dans la mesure où il est recevable, le recours interjeté le 23 août 2017 par Madame Ghislaine MIRIGAY contre l’arrêté du Conseil d’État 3'040-2017 du 21 juin 2017 ;

met un émolument de CHF 1'000.- à la charge de Madame Ghislaine MIRIGAY ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 et ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Anaïs Loeffel, avocate de la recourante, au Conseil d'État, soit pour lui l’office du patrimoine et des sites, ainsi qu’à Me François Bellanger, avocat de l’appelée en cause.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, M. Thélin, Mme Junod, MM. Pagan et Verniory, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

 


 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

 

 

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

 

la greffière :