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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/161/2022

ATA/1025/2022 du 11.10.2022 sur JTAPI/669/2022 ( PE ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/161/2022-PE ATA/1025/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 11 octobre 2022

1ère section

 

dans la cause

 

Monsieur A______
représenté par Me Martin Ahlstrom, avocat

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 23 juin 2022 (JTAPI/669/2022)


EN FAIT

1) Monsieur A______, né le ______1969, est ressortissant du Kosovo. Il est marié et père de trois enfants, nés en 2005, 2008 et 2011, qui vivent avec leur mère au Kosovo.

2) Le 26 février 2014 il a été condamné par le Ministère public (ci-après : MP) de l’arrondissement de la Côte à Morges à une peine pécuniaire de 130 jours-amende à CHF 30.- l’unité, assortie du sursis, et à une amende de CHF 780.-  pour entrée illégale, séjour illégal et activité lucrative sans autorisation.

3) Le 4 avril 2014, il a été condamné par le MP du canton de Genève à une peine pécuniaire de 90 jours-amende à CHF 30.-, assortie du sursis, pour ces trois mêmes infractions.

4) Le 20 février 2019, il a été interpellé et entendu par la police. Il a, à cette occasion, déclaré avoir quitté le Kosovo en août 2011, afin de se rendre en Suisse. Depuis lors, il résidait et travaillait à Genève sans titre de séjour ni autorisation de travail.

5) À la suite de cette arrestation, il a été condamné, par ordonnance pénale du MP du 21 février 2019, à une peine pécuniaire de 180 jours-amende à CHF 40.- pour séjour illégal et activité lucrative sans autorisation.

6) Par décision du 21 février 2019, l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM ou l’office) a prononcé son renvoi de Suisse et de l’ensemble du territoire Schengen.

7) Par acte du 25 février 2019, M. A______ a interjeté recours auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) contre cette décision.

Il résidait et travaillait en Suisse depuis la fin de 2008 et avait toujours été autonome financièrement. Il remplissait donc les conditions pour déposer une demande de permis B auprès de l’OCPM, ce qu’il n’avait pas fait plus tôt faute d’avoir été suffisamment informé sur ses possibilités de régularisation. Il pensait devoir bénéficier d’un travail déclaré pour pouvoir déposer une demande « Papyrus ».

8) Le 17 mai 2019, le TAPI a rejeté le recours.

9) Le 7 juin 2019, M. A______ a déposé une demande d’autorisation de séjour et de travail pour ressortissants étrangers auprès de l’OCPM.

Il habitait à Genève et travaillait pour une durée indéterminée, depuis le 1er avril 2019, en tant qu’aide-peintre pour la société B______ à C______.

À l’appui de sa demande il a joint divers documents, notamment une attestation de l’Hospice général du 20 mars 2019, un extrait du registre des poursuites du 12 juillet 2019, un extrait de casier judiciaire du 22 mars 2019, une photocopie de son passeport Kosovar, un extrait de la caisse cantonale genevoise de compensation du 1er avril 2019, cinq certificats médicaux de 2014, 2017 et 2018, attestant d’une incapacité de travail pour cause d’accident pour des périodes allant de 5 jours à 1 mois, une liste des achats mensuels d’abonnements des transports publics genevois (ci-après : TPG) de fin 2011 à 2019, quatre quittances de paiement pour des cotisations au Syndicat interprofessionnel de travailleuses et travailleurs en 2014 et 2015, des attestations d’entreprises de 2009 et 2010.

10) À la demande de l’OCPM, M. A______ lui a transmis, le 16 juillet 2019 notamment, une attestation de l’office des poursuites de moins de 3 mois et une quittance du 24 juin 2019 pour un « test Papyrus A2 18/07/2019 à 8h30 ».

11) Le 20 août 2019, l’OCPM a informé M. A______ de son intention de refuser sa demande d’autorisation de séjour.

12) Faisant usage de son droit d’être entendu, M. A______ a relevé, le 17 septembre 2019, qu’il était arrivé à Genève en 2009. Depuis lors, il vivait séparé de sa femme et de ses enfants qui vivaient au Kosovo, où il n’était jamais retourné. Depuis son arrivée, il travaillait dans le bâtiment, ne faisait pas l’objet de poursuites et n’avait jamais bénéficié de l’aide sociale. Il n’avait été condamné que pour des faits relatifs à ses conditions de séjour. Il ferait parvenir à l’office l’attestation liée à l’examen de français. Il remplissait les conditions d’octroi d’un permis de séjour pour cas de rigueur.

Il a notamment joint à ses observations une attestation d’inscription à un cours de français du 12 septembre 2019, à raison d’une heure par semaine, en vue de la préparation de l’examen « Fide ».

13) Par courrier du 1er mars 2021, l’OCPM a fait parvenir au MP une dénonciation s'agissant des soupçons portant sur les attestations de travail établies par les entreprises D______ et E______ en faveur de M. A______.

14) Le 14 juin 2021, M. A______ a déposé auprès de l’OCPM une demande de visa de retour au Kosovo d’une durée de 30 jours, pour motif familial, laquelle lui a été refusée.

15) Lors de son audition par la police le 9 août 2021, en présence d’un interprète en langue albanaise, M. A______ a reconnu avoir fourni une fausse adresse à l’OCPM et ne pas avoir souscrit à une assurance-maladie obligatoire. Il avait travaillé pour D______ et E______ et n’était pas au courant que les documents présentés à l’OCPM pouvaient être erronés.

16) Par ordonnance pénale du 8 octobre 2021, le MP a condamné M. A______ à une peine pécuniaire de 90 jours-amende à CHF 30.- pour séjour illégal, activité lucrative sans autorisation et délit à la loi fédérale sur l’assurance-maladie.

17) Par décision du 29 novembre 2021, l’OCPM a refusé l’octroi d’une autorisation de séjour en faveur de M. A______ et a prononcé son renvoi de Suisse.

Il n’avait pas réussi à démontrer son séjour à Genève pour les années 2008 à 2021. Il ne pouvait pas non plus se prévaloir d’une intégration professionnelle ou sociale particulièrement marquée. Une réintégration au Kosovo semblait tout à fait possible, étant donné qu’il y avait vécu depuis sa naissance jusqu’en 2011 et que son épouse et ses trois enfants y résidaient.

18) Par acte du 14 janvier 2022, M. A______ a formé recours au TAPI contre cette décision.

Le début de son séjour remontait à 2008, lorsqu’il avait commencé à travailler de manière ponctuelle dans le bâtiment. Par ordonnance de classement du 8 octobre 2021, le MP avait retenu qu’il n’avait pas produit de documents falsifiés à l’appui de sa demande d’autorisation de séjour. Des témoins avaient confirmé qu’il avait bien travaillé pour D______ et E______ en 2009 et 2010, ce qui prouvait sa présence en Suisse dès 2009. Par ailleurs, il ressortait de l’attestation d’achat d’abonnements TPG et de l’extrait de la caisse de compensation qu’il était à Genève depuis 2012. Ainsi, il justifiait d’une durée de séjour en Suisse depuis 2008, ou à tout le moins depuis 2012, soit de 10 ans.

Il n’avait été condamné que pour des faits relatifs à ses conditions de séjour. Il était financièrement indépendant. Il parlait le français et s'était bien intégré à Genève. Il était membre du Syndicat interprofessionnel de travailleuses et travailleurs à Genève.

Un retour au Kosovo l’exposerait à de graves difficultés personnelles et financières. Il serait astreint à quitter un logement stable et son emploi qui lui permettait de vivre. Au regard de son âge, il peinerait à retrouver un travail. Il était séparé de sa femme et de ses enfants. Il n’était pas retourné au Kosovo depuis sa venue en Suisse Un retour au Kosovo engendrerait une situation de détresse personnelle intense.

19) L’OCPM a conclu, le 16 mars 2022, au rejet du recours.

20) Dans sa réplique du 12 avril 2022, le recourant a ajouté que l’OCPM ne lui avait pas accordé de visa en juin 2021, de sorte qu’il n’avait pas pu se rendre au Kosovo. Tout son cercle social se trouvait dans le canton.

21) Le TAPI a rejeté le recours par jugement du 23 juin 2022.

M. A______ ne pouvait se prévaloir de l’« opération « Papyrus » qui avait pris fin avant le dépôt de sa première demande d’autorisation de séjour.

Au regard des pièces versées au dossier, il paraissait difficile de retenir la continuité de son séjour entre 2008 et 2011. Il avait fourni des indices allant dans le sens d’un séjour en Suisse plus ou moins continu depuis 2012, soit de sept ans jusqu’au dépôt de sa demande en juin 2019. Cette durée devait toutefois être relativisée vu le caractère illégal du séjour.

Son intégration professionnelle et sociale ne saurait être en aucun cas qualifiée d’exceptionnelle. Il n’attestait pas d’un niveau minimum A2 en français.

Il ne démontrait pas que ses difficultés, à son retour au Kosovo, où il avait conservé des liens familiaux, vu sa demande de visa du 14 juin 2021, seraient plus graves pour lui que pour n'importe lequel de ses concitoyens qui se retrouverait dans une situation similaire.

M. A______ n'obtenant pas d'autorisation de séjour, c'était à bon droit que l’OCPM avait prononcé son renvoi de Suisse, dont il n’apparaissait pas que l'exécution ne serait pas possible, serait illicite ou ne pourrait être raisonnablement exigée.

22) M. A______ a, par acte déposé le 3 août 2022, formé recours à la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre ce jugement. Il a conclu à son annulation et, cela fait, à ce qu’il soit dit que l’OCPM soumette son dossier avec un préavis positif au SEM, à ce qu’une autorisation de séjour lui soit octroyée et à ce qu’il ne soit pas procédé à son renvoi, subsidiairement au renvoi de la cause à l’OCPM pour complément d’instruction et nouvelle décision dans le sens de ses conclusions.

Le TAPI avait tenu un raisonnement erroné.

Selon l’état de fait, il était arrivé en Suisse en 2009, respectivement en 2008 selon le développement juridique. En tout état, la durée de son séjour était prouvée à satisfaction de droit depuis 2012 et la doctrine retenait que le fait que ce soit dans l’illégalité ne pouvait conduire à relativiser cette longue durée. Après avoir repris les éléments fondant son intégration, il a relevé qu’il serait disproportionné et constitutif d’un abus du pouvoir d’appréciation de lui refuser un titre de séjour au motif que cette intégration ne serait pas « exceptionnelle ».

Arrivé en Suisse en tant qu’adulte, il y avait développé tout son réseau professionnel et social. Il serait impossible pour lui de s’intégrer à nouveau au Kosovo, où il n’avait gardé aucun contact ni attache. Il courait donc le risque de se retrouver à la rue et dans une situation financière précaire, d’où une situation de détresse intense.

23) L’OCPM a conclu, le 30 août 2022, au rejet du recours.

24) M. A______ a indiqué, le 14 septembre 2022, ne pas avoir d’observation ou requête supplémentaire à formuler.

25) Les parties ont été informées, le 19 septembre 2022, que la cause était gardée à juger.

26) La teneur des pièces figurant à la procédure sera pour le surplus reprise ci-dessous dans la mesure nécessaire au traitement du litige.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a et 63 al. 1 let. b de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Le litige porte sur la conformité au droit de la décision de l’OCPM du 29 novembre 2021, confirmée par le TAPI, refusant de présenter au SEM le dossier du recourant avec un préavis positif en vue de la délivrance d’un titre de séjour et prononçant son renvoi de Suisse.

3) Selon l'art. 61 LPA, le recours devant la chambre administrative peut être formé pour violation du droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation, ainsi que pour constatation inexacte des faits (al. 1). En revanche, la chambre administrative ne connaît pas de l'opportunité des décisions prises en matière de police des étrangers, dès lors qu'il ne s'agit pas d'une mesure de contrainte (al. 2 ; art. 10 al. 2 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10, a contrario).

4) a. Le 1er janvier 2019 est entrée en vigueur une modification de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20) et de l’ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201). Conformément à l'art. 126 al. 1 LEI, les demandes déposées après cette date, à l’instar de la demande du recourant du 7 juin 2019, sont régies par le nouveau droit (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1075/2019 du 21 avril 2020 consid. 1.1).

b. L'art. 30 al. 1 let. b LEI permet de déroger aux conditions d'admission en Suisse, telles que prévues aux art. 18 à 29 LEI, notamment aux fins de tenir compte des cas individuels d'une extrême gravité ou d'intérêts publics majeurs.

c. Dans sa teneur depuis le 1er janvier 2019, l’art. 31 al. 1 OASA prévoit que, pour apprécier l'existence d'un cas individuel d'extrême gravité, il convient de tenir compte notamment de l'intégration de la personne requérante sur la base des critères d'intégration définis à l'art. 58a al. 1 LEI (let. a), de sa situation familiale, particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité des enfants (let. c), de sa situation financière (let. d), de la durée de sa présence en Suisse (let. e), de son état de santé (let. f), ainsi que des possibilités de réintégration dans l'État de provenance (let. g). Les critères énumérés par cette disposition, qui doivent impérativement être respectés, ne sont toutefois pas exhaustifs, d'autres éléments pouvant également entrer en considération, comme les circonstances concrètes ayant amené une personne étrangère à séjourner illégalement en Suisse (SEM, Directives et commentaires, Domaine des étrangers, 2013 - état au 1er janvier 2021, ch. 5.6.10 [ci-après : directives LEI] ; ATA/340/2020 du 7 avril 2020 consid. 8a).

d. L'art. 58a al. 1 LEI précise que pour évaluer l'intégration, l'autorité compétente tient compte des critères suivants : le respect de la sécurité et de l'ordre publics (let. a), le respect des valeurs de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) (let. b), les compétences linguistiques (let. c), la participation à la vie économique ou l'acquisition d'une formation (let. d).

e. Les dispositions dérogatoires des art. 30 LEI et 31 OASA présentent un caractère exceptionnel et les conditions pour la reconnaissance d'une telle situation doivent être appréciées de manière restrictive (ATF 128 II 200 consid. 4 ; ATA/257/2020 du 3 mars 2020 consid. 6c). Elles ne confèrent pas de droit à l'obtention d'une autorisation de séjour (ATF 138 II 393 consid. 3.1 ; 137 II 345 consid. 3.2.1). L'autorité doit néanmoins procéder à l'examen de l'ensemble des circonstances du cas d'espèce pour déterminer l'existence d'un cas de rigueur (ATF 128 II 200 consid. 4 ; 124 II 110 consid. 2 ; ATA/92/2020 du 28 janvier 2020 consid. 4d).

f. La reconnaissance de l'existence d'un cas d'extrême gravité implique que l'étranger concerné se trouve dans une situation de détresse personnelle. Parmi les éléments déterminants pour la reconnaissance d'un cas d'extrême gravité, il convient en particulier de citer la très longue durée du séjour en Suisse, une intégration sociale particulièrement poussée, une réussite professionnelle remarquable, la personne étrangère possédant des connaissances professionnelles si spécifiques qu'elle ne pourrait les mettre en œuvre dans son pays d'origine ou une maladie grave ne pouvant être traitée qu'en Suisse (arrêt du Tribunal fédéral 2A.543/2001 du 25 avril 2002 consid. 5.2).

Par durée assez longue, la jurisprudence entend une période de sept à huit ans (arrêt du Tribunal administratif fédéral C-7330/2010 du 19 mars 2012 consid. 5.3 ; Minh SON NGUYEN/Cesla AMARELLE, Code annoté de droit des migrations, LEtr, vol. 2, 2017, p. 269 et les références citées).

Les années passées en Suisse dans l'illégalité ou au bénéfice d'une simple tolérance – par exemple en raison de l'effet suspensif attaché à des procédures de recours – ne sont pas déterminantes (ATF 137 II 1 consid. 4.3 ; 134 II 10 consid. 4.3 ; arrêts 2C_603/2019 du 16 décembre 2019 consid. 6.2 ; 2C_436/2018 du 8 novembre 2018 consid. 2.2).

Bien que la durée du séjour en Suisse constitue un critère important lors de l'examen d'un cas d'extrême gravité, elle doit néanmoins être examinée à la lumière de l'ensemble des circonstances du cas particulier et être relativisée lorsque l'étranger a séjourné en Suisse de manière illégale, sous peine de récompenser l'obstination à violer la loi (ATF 130 II 39 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2D_13/2016 du 11 mars 2016 consid. 3.2).

L’intégration professionnelle doit être exceptionnelle : le requérant doit posséder des connaissances professionnelles si spécifiques qu'il ne pourrait les utiliser dans son pays d'origine ou alors son ascension professionnelle est si remarquable qu'elle justifierait une exception aux mesures de limitation (arrêt du Tribunal fédéral 2A.543/2001 du 25 avril 2002 consid. 5.2 ; ATA/981/2019 du 4 juin 2019 consid. 6c et l'arrêt cité).

La question est de savoir si, en cas de retour dans le pays d'origine, les conditions de sa réintégration sociale, au regard de la situation personnelle, professionnelle et familiale de l'intéressé, seraient gravement compromises (ATA/353/2019 du 2 avril 2019 consid. 5d ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_621/2015 du 11 décembre 2015 consid. 5.2.1 ; 2C_369/2010 du 4 novembre 2010 consid. 4.1).

5) En l'espèce, le recourant a, au fil de ses interpellations par la police, des informations données à l’OCPM, au TAPI ou encore à la chambre de céans, varié s’agissant de sa date d’arrivée à Genève, à savoir en 2008, en 2009 ou en 2011. Force est de relever qu’il s’est trouvé au Kosovo à tout le moins au moment de la conception de son dernier enfant né en 2011, étant relevé qu’il n’allègue pas que son épouse lui aurait rendu visite en Suisse à un quelconque moment.

Il ne remet pas en cause le fait qu’il n’a produit aucun document attestant de son arrivée en Suisse en 2008. Les attestations d’entreprises versées au dossier permettent certes de constater sa présence en Suisse depuis 2009, mais pour des périodes de quelques jours, voire quelques mois tout au plus, à savoir du 9 au 13 mars 2009 et du 1er juin au 30 septembre 2009, alors qu’il travaillait pour les sociétés D______ et E______, puis du 10 au 14 mai 2010 et du 1er janvier au 30 avril 2010. Pour l’année 2011, le recourant ne démontre une présence que d’un mois, en octobre 2011, par l’achat d’un abonnement TPG. Il ne démontre ainsi nullement un séjour continu pour les années 2009 à 2011 incluses, étant rappelé qu’il est le mieux à même de renseigner l’autorité sur les éléments de sa situation personnelle et son devoir de collaboration (art. 90 LEI).

Dans la situation qui lui est plus favorable, et telle que retenue par le TAPI et l’OCPM, il peut être retenu sur la base des documents produits une présence en Suisse du recourant depuis 2012, quand bien même la continuité du séjour n’est pas certaine. Cette durée de séjour de sept ans au jour du dépôt de sa demande de régularisation en juin 2019 doit être fortement relativisée, conformément à la jurisprudence susmentionnée et quand bien même tel ne serait pas l’avis d’une partie de la doctrine, par le caractère illégal du séjour, et alors même que le recourant faisait l’objet d’une décision de renvoi du 21 février 2019. Il a ensuite séjourné en Suisse sous le régime d'une tolérance, le temps que soit instruite sa demande d'autorisation.

Par ailleurs, s'il n'est en l'espèce pas remis en cause que le recourant n'a jamais émargé à l'aide sociale, ni fait l'objet de poursuites, son activité d’ouvrier dans la construction n’est toutefois pas constitutive d'une ascension professionnelle remarquable et ne l'a pas conduit à acquérir des connaissances professionnelles spécifiques à la Suisse qu'il ne pourrait mettre à profit dans un autre pays, en particulier son pays d'origine. Ces emplois ne lui permettent pas de se prévaloir d'une intégration professionnelle exceptionnelle au sens de la jurisprudence précitée. Le fait qu’il soit affilié à un syndicat, supposé défendre ses droits, n’y change rien.

C'est vainement que le recourant cherche à relativiser ses condamnations des 26 février et 4 avril 2014, 21 février 2019 et du 8 octobre 2021 inscrites à son casier judiciaire, quand bien même elles sont liées uniquement à son statut illégal en Suisse. Toujours est-il qu’il a contrevenu par quatre fois à l'ordre juridique suisse et qu’il ne s’est nullement amendé, puisque depuis 2014 et nonobstant déjà deux premières condamnations, il a persisté à séjourner en Suisse en toute illégalité.

Le recourant ne met nullement en avant des attaches personnelles particulières avec la Suisse, ni a fortiori n'en étaye. Il ne démontre pas une intégration sociale particulièrement poussée, étant rappelé que les relations de travail, d'amitié ou de voisinage qu'il aurait pu nouer pendant son séjour ne constitueraient en tout état normalement pas des liens si étroits avec la Suisse qu'ils justifieraient une exception aux mesures de limitation. Il ne démontre pas maîtriser la langue française, mais tout au plus avoir suivi quelques cours depuis 2019, étant relevé que lors de son audition à la police le 9 août 2021, il a dû être assisté d’un interprète en langue albanaise.

S'agissant des possibilités de réintégration dans son pays d'origine, le recourant, bientôt âgé de 53 ans, est né au Kosovo, pays dont il parle la langue où il a vécu toute son enfance, son adolescence et une grande partie de sa vie d’adulte. Il a donc passé au Kosovo les années déterminantes pour le développement de sa personnalité et en connaît les us et coutumes.

Finalement, de retour dans son pays d'origine, le recourant, en bonne santé, pourra faire valoir l'expérience professionnelle acquise en Suisse, étant relevé qu’il entendait s’y rendre, à teneur du visa demandé, en juin 2021. Il indique ne plus avoir de contact avec son épouse et ses trois enfants, dans le dernier est âgé de 11 ans, ce qui est toutefois douteux vu le visa demandé pour raisons familiales. Il ne démontre au demeurant pas qu’une procédure de divorce aurait été initiée.

Dans ces circonstances, il ne ressort pas du dossier que les difficultés auxquelles le recourant devrait faire face en cas de retour au Kosovo seraient pour lui plus graves que pour la moyenne des étrangers, en particulier des ressortissants du Kosovo retournant dans leur pays.

Au vu de ce qui précède, le recourant ne se trouve pas dans une situation de détresse personnelle au sens de l'art. 30 al. 1 let. b LEI. S'il est vrai qu'un retour dans son pays d'origine pourra engendrer pour lui certaines difficultés, il ne se trouve pas dans une situation si rigoureuse que l'on ne saurait exiger son retour au Kosovo.

Il ne se justifie dès lors pas de déroger aux conditions d'admission en Suisse en faveur du recourant, de sorte que l'autorité intimée était fondée à refuser de donner une suite positive à sa demande d'autorisation de séjour et l'instance précédente à confirmer ledit refus.

6) a. Selon l'art. 64 al. 1 let. c LEI, l'autorité compétente rend une décision de renvoi ordinaire à l'encontre d'un étranger auquel l'autorisation de séjour est refusée ou dont l'autorisation n'est pas prolongée. Elle ne dispose à ce titre d'aucun pouvoir d'appréciation, le renvoi constituant la conséquence du rejet d'une demande d'autorisation (ATA/1798/2019 du 10 décembre 2019 consid. 6 et les arrêts cités). Le renvoi d'une personne étrangère ne peut être ordonné que si l'exécution de celui ci est possible, licite ou peut être raisonnablement exigée (art. 83 al. 1 LEI).

b. En l'espèce, dès lors qu'il a, à juste titre, refusé l’octroi d’une autorisation de séjour au recourant, l'intimé devait prononcer son renvoi. Pour le surplus, aucun motif ne permet de retenir que le renvoi du recourant ne serait pas possible, licite ou ne pourrait raisonnablement être exigé ; celui-ci ne le fait d'ailleurs pas valoir.

Mal fondé, le recours sera rejeté.

7) Vu l'issue du recours, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge du recourant, qui succombe, et aucune indemnité de procédure ne lui sera allouée (art. 87 LPA).

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 3 août 2022 par Monsieur A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 23 juin 2022 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 400.- à la charge de Monsieur A______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Martin Ahlstrom, avocat du recourant, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.

Siégeant : Mme Lauber, présidente, M. Mascotto, Mme McGregor, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

 

la présidente siégeant :

 

 

V. Lauber

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

la greffière :

 

 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l’entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l’admission provisoire,

4. l’expulsion fondée sur l’art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d’admission,

6. la prolongation d’une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d’emploi du titulaire d’une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d’asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l’objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l’acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

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Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l’objet d’aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

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Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.