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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1621/2021

ATA/1266/2021 du 23.11.2021 ( FPUBL ) , PARTIELMNT ADMIS

Recours TF déposé le 20.01.2022, rendu le 15.07.2022, REJETE, 8C_40/2022
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1621/2021-FPUBL ATA/1266/2021

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 23 novembre 2021

 

dans la cause

 

Monsieur A______
représenté par Me Margaux Broïdo, avocate

contre

HÔPITAUX UNIVERSITAIRES DE GENÈVE
représentés par Me Anne Meier, avocate



EN FAIT

1) Monsieur A______, né le ______ 1982, a été engagé aux Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : HUG) par contrat de droit privé, dans le cadre de sa formation, dès décembre 2004 en qualité de médecin stagiaire, puis dès juillet 2007 en qualité de médecin interne remplaçant non diplômé. Son statut a évolué au fil des années, toujours sous contrats de droit privé.

2) Lors d'un entretien du 10 octobre 2017, organisé à la demande de M. A______, concernant son avenir au service _______ (ci-après : ______), le Professeur B______ a décidé de ne pas entrer en matière sur une possible promotion de celui-là « compte tenu de la chronologie des événements et d’un climat de confiance détérioré ».

Référence était notamment faite à une discussion du 31 mars 2017 où la question d’une stabilisation future comme médecin adjoint avait été évoquée. Il avait été relevé que les critères de nomination n’étaient pas seulement cliniques, mais aussi en rapport avec le savoir-être, le leadership positif, la collégialité, la gestion de projets, critères sur lesquels il était prématuré de juger M. A______.

3) Le 4 décembre 2018, le Prof. B______ a sollicité du directeur médical des HUG la nomination de M. A______ en qualité de chef de clinique avec FMH, faisant fonction de médecin adjoint non agrégé, dès le 1er février 2019.

Il était relevé que « concernant les aspects de comportement et de
savoir-être, ce point a été largement discuté avec le Dr A______ qui est conscient qu’un comportement irréprochable est attendu de sa part, en tant que faisant fonction de médecin adjoint ».

4) Le 28 mai 2018, la direction des HUG a informé les Docteurs et Professeurs, médecins-chefs de service de l’évolution des conditions d’engagement dès la fonction de médecin adjoint.

Afin d’améliorer leur attractivité, tant pour les médecins hospitaliers que pour les médecins hospitalo-universitaires, les HUG avaient décidé d’émettre des contrats à durée indéterminée. La décision entrait en application au 1er juin 2018. La nomination en qualité de fonctionnaire interviendrait à l’issue de la période probatoire de deux ans, comme pour les autres fonctions.

5) Lors de l’évaluation du 20 mai 2019 dans le cadre de cette responsabilité ad interim, le Prof. B______ a relevé que « sur le plan du comportement, l’évolution est globalement positive. Certains points restent cependant à améliorer : bienveillance, respect dans l’interdisciplinarité, adaptation du discours. Il est nécessaire que le Dr A______ suive certaines formations institutionnelles sur la gestion d’un conflit, la gestion à un entretien, le leadership et l’évaluation des collaborateurs ».

Les plans clinique, de la gestion ainsi que de l’enseignement étaient aussi commentés.

L’évaluation globale était excellente.

6) M. A______ et Madame C______, infirmière, ont entretenu une relation privée de juillet 2018 à octobre 2019 selon celui-là, et d'avril 2018 à août 2019 selon celle-ci. C’est Mme C______ qui y a mis un terme.

7) Par courrier du 19 septembre 2019, le Prof. B______ a demandé la nomination de M. A______ comme médecin adjoint non agrégé dès le 1er décembre 2019.

« Sur le plan du comportement, l’évolution est positive. Le Dr A______ sait qu’un comportement irréprochable lui est demandé, ce qu’il a su montrer lors de ces derniers mois, et il s’est engagé de suivre des formations institutionnelles sur la gestion du conflit, la gestion d’un entretien et l’évaluation des collaborateurs ».

8) Par courrier du 3 décembre 2019, M. A______ a été engagé en qualité de médecin adjoint non agrégé dès le 1er décembre 2019 à 100 %. La promotion était faite à titre d’essai, pour une période de quatorze mois, tenant compte de sa période du 1er février au 30 novembre 2019 en qualité de médecin faisant fonction d’adjoint au ______. Une évaluation de ses prestations serait établie au plus tard trois mois avant la fin de sa période d’essai. La classification salariale était précisée et le cahier des charges joint.

9) Le 13 mai 2020, M. A______ a été convoqué par le médecin chef du ______ à un entretien de service prévu le 28 mai 2020. La convocation indiquait faire suite à un comportement inadéquat et répété envers une collaboratrice infirmière.

10) Lors de l’entretien de service du 28 mai 2020, en présence du Prof. B______, supérieur hiérarchique direct de M. A______, et de Madame  D______, responsable des ressources humaines (ci-après : RRH) aux HUG, il a été reproché à M. A______ un comportement non professionnel envers Mme C______.

Un compte rendu d’entretien a été remis à l’intéressé et signé par celui-ci le 8 juin 2020. Mme C______ avait évoqué une présence extrêmement constante de M. A______ à son égard dans le service, qu'elle estimait souvent injustifiée. Elle avait demandé de l'aide à sa hiérarchie. Des exemples de comportements étaient détaillés sur trois pages. Les réponses de l'intéressé étaient notées sur trois pages. Il était averti qu’il pourrait faire l’objet d’une éventuelle sanction pouvant aller jusqu’à la résiliation des rapports de service.

11) Le 26 juin 2020, après réception des observations écrites de M. A______ à la suite de l'entretien de service, les HUG lui ont indiqué que : « Suite à cette rencontre et au vu des éléments d’explications que vous nous avez fournis, notre appréciation des faits permet de vous informer qu’aucune sanction ne sera prise dans cette affaire. Vous avez pu vous exprimer avec une sincérité que nous avons perçue et nous avons relevé notamment qu’il n’y avait pas volonté de nuire à la collaboratrice concernée. Nous tenons cependant à souligner, par ce courrier, les points relevés dans cet entretien de service, à savoir le débordement d’une affaire privée au sein du milieu professionnel et votre lieu de travail, avec ses effets secondaires délétères sur la collaboration d’une part et sur l’environnement de travail. Aussi, nous vous invitons à éviter toute attitude mélangeant de façon inappropriée votre situation personnelle et professionnelle pouvant nuire au service et/ou à la collaboratrice, et à entretenir une attitude professionnelle en tout temps ».

12) Par pli du 20 août 2020, M. A______ a informé Mme D______ de rumeurs à son encontre liées à un prétendu harcèlement. Or, depuis avril 2020, il n’avait eu aucun contact personnel avec Mme C______ et que quelques brèves interactions professionnelles. Il faisait état de sa souffrance personnelle et professionnelle.

13) Le 24 août 2020, Mme D______ a indiqué à M. A______ qu’elle analyserait la situation. Dans l’immédiat, il était souhaitable qu'il rencontre un médecin-conseil des HUG.

14) Par courrier du 30 septembre 2020, Monsieur E______, directeur des RH aux HUG, a contacté le groupe de protection de la personnalité-HUG aux fins d'effectuer une « analyse exhaustive de la situation entre Mme C______ et M. A______ ».

Cette démarche a été interrompue à la demande de la direction générale des HUG le 2 octobre 2020.

15) Par pli du 9 octobre 2020, Mme D______ a sollicité du directeur général des HUG, Monsieur F______, l’ouverture d’une enquête administrative à l’encontre de M. A______.

Elle y décrivait la chronologie des faits relatifs à la situation de Mme C______ et de M. A______ et mentionnait que, fin juillet 2020, l’encadrement de cette dernière s’était plaint que son état se péjorait. L’intéressée avait également signalé un nouvel « inconfort » fin août 2020.

Ce même encadrement, à savoir, Madame G______et Monsieur H______, infirmiers responsables d'équipe de soins, avaient relevé que M. A______ était intervenu de façon inadéquate dans leur gestion des infirmières. Il les avait interpellés afin qu'ils « recadrent » Mesdames C______ et I______« (qu'il a[vait] reconnue comme un témoin à sa charge) ». M. A______ exigeait dorénavant de ces dernières le vouvoiement dans le service.

Il avait été convenu que le Prof. B______ revoie M. A______ pour qu'il cesse immédiatement tout acte d'intimidation et lui signaler que le vouvoiement ne faisait qu'attiser les rumeurs dont il se plaignait.

« Nous avons demandé la mise en suspens de la démarche d’investigation informelle auprès de nos conseillères en protection de la personnalité, car vous nous avez informés que M. A______ serait connu pour d’autres agissements ou propos inappropriés envers des femmes de l’institution, au-delà de son attitude envers Mme C______. Ceci corrobore par ailleurs les propos relevés par le dernier témoignage de Madame J______ précités ou les tentatives d’intimidation perçues dans ce dossier ».

Elle relevait avoir eu des échos d’une infirmière du ______ qui aurait porté plainte contre le Dr A______, hors des HUG, il y avait de cela plusieurs années.

16) Par décision du 13 octobre 2020 du Président du conseil d'administration des HUG, M. A______ a été provisoirement suspendu de son activité, avec traitement.

17) Par décision du 16 octobre 2020, le conseil d’administration des HUG
(ci-après : le conseil d’administration) a ordonné l’ouverture d’une enquête administrative ainsi que le maintien de la suspension provisoire de l’intéressé.

18) Vingt-neuf témoins ont été entendus par l'enquêtrice.

Il sera revenu en tant que de besoin sur le contenu de leurs déclarations dans la partie en droit du présent arrêt.

19) Dans ses observations à l'issue de l'enquête, M. A______ a repris en détail chacun des témoignages.

Si M. F______ avait indiqué se rappeler de trois témoignages reçus informellement au cours des deux dernières années à l'encontre de M. A______, provenant de deux femmes médecins et d'un membre du personnel soignant, aucune démarche n'avait été entreprise par la direction générale à cette occasion. M. F______ avait suggéré à l'enquêtrice de prendre contact avec l'association MEDFEM (association à but non lucratif, indépendante, et inclusive crée en 2018, composée de femmes et hommes médecins engagés pour relever les défis liés à la féminisation de la médecine, selon la description sur leur site internet), ce que l'enquêtrice avait fait.

Sur vingt-trois témoins entendus au sujet de son comportement, dix-huit avaient déclaré n’avoir jamais entendu de plaintes le concernant. Ils s’accordaient sur le fait qu’il n’avait jamais tenu de propos inadmissibles, sexistes ou grossiers, n’était pas tyrannique, n’avait pas une réputation de « dragueur lourdingue » ni de comportements inadaptés. Son caractère fort était toutefois unanimement reconnu. Seuls cinq témoins, dont le directeur général, mentionnaient des comportements inappropriés ou inadéquats, la plupart prescrits, s’étant déroulés en 2009, 2011 et 2014. Certains étaient par ailleurs intervenus dans un cadre privé. En tout état, ils étaient contestés.

20) L’enquêtrice a rendu son rapport le 24 décembre 2020.

Le Dr A______ avait été conditionnellement réintégré compte tenu de la période de pandémie dans un autre service que le ______.

Les déclarations des témoins avaient parfois été extrêmement divergentes. L'enquêtrice avait pris contact avec les associations MEDFEM et AMIG (Association des Médecins d’Institutions de Genève, section cantonale genevoise de l’Association suisse des médecins-assistant(e)s et chef(fe)s de clinique [ASMAC]). Les deux associations s'étaient montrées réticentes à ce que leurs membres viennent témoigner, considérant que cela pouvait être un frein pour leur carrière.

L'enquêtrice décrivait les contextes du ______ et de la nomination de l'intéressé comme adjoint.

Sous « reproches adressés au Dr A______ », elle détaillait « [sa] personne, la succession de relations avec des soignantes du service, la relation avec Madame K______, la fin problématique de la relation avec C______ et les allégations des autres témoins victimes du Dr A______ ».

Les « implications juridiques » portaient sur deux points : les problématiques de harcèlement sexuel et « du franc-parler et de l’humeur ».

Selon les conclusions de l’enquête, « le comportement du Dr A______ n’a pas été celui qu’on peut attendre d’un médecin adjoint dans ses interactions avec Mme C______ à la suite de leur rupture. Il est navrant qu’il ne l’ait admis que du bout des lèvres et en ait imputé aussi largement la responsabilité à Cassandra C______, dont il n’a pas même perçu la souffrance, comme cela ressort de l’audition récapitulative du 16 novembre 2020. La présente enquête a permis de mettre ce comportement en lien avec d’autres épisodes, à tout le moins avec un cas où la situation comporte de très nombreuses similitudes, même si le Dr A______ a dit ne pas les voir. Par ailleurs, le Dr A______ a encore de la peine à s’exprimer de manière appropriée dans le service, où l’absence de formes est presque unanimement relevée. Certes, tout n’est pas noir dans le tableau, les témoins entendus ayant tous rapporté des côtés positifs de A______ en tant que personne et surtout en qualité de médecin. Ceci n’excuse toutefois pas cela. Comme l’a expressément mentionné le Professeur  L______, "les qualités du Dr A______ comme médecin et clinicien n’ont rien à voir avec sa personnalité privée." Il ne s'agit pas de faire du Dr A______ un bouc émissaire du conflit médico-infirmier, ce qu'il n'est pas d'ailleurs, ayant été soutenu par plusieurs soignants, mais la présente enquête ne se résume pas à trancher un conflit interpersonnel, comme paraît le penser le témoin M______. À cet égard, on doit saluer la réaction de la hiérarchie de convoquer le Dr A______ à un entretien de service après avoir pris des mesures de protection de C______. De ne rien faire aurait été s'exposer au grief de refus de protection de la personne d'un collaborateur, avec les conséquences juridiques qui peuvent en découler, et on ne saurait parler de mesures non proportionnées à cet égard. Cela étant, la soussignée est d'avis qu'il y aurait lieu à investigations supplémentaires de la part de l'employeur pour amener les témoins ayant relevé des propos incorrects d'autres collaborateurs des urgences à préciser leurs dires ». 

La hiérarchie, en particulier le chef de service et les « encadrants des apprenants FSU » ne semblaient pas conscients de leurs obligations de protection du personnel en cas de harcèlement sexuel. « Les nouveaux outils de gestion des conflits dans le monde du travail ne semblaient pas être arrivés dans le ______, ce qui pouvait contribuer aux interactions extrêmement fréquentes avec les syndicats. Ces considérations générales relativisaient quelque peu les reproches qui pouvaient être faits au Dr A______ sans toutefois les excuser ».

« Enfin, de manière très générale, on p[ouvait] regretter l'absence de liberté de parole liée à une peur tangible pour la suite de leur carrière de la part des personnes qui os[aient] critiquer ; les réticences manifestées à collaborer à l'enquête par les associations MEDFEM et AMIG avaient clairement été placées sous le signe de la crainte des répercussions pour leurs membres ».

21) Par pli du 8 janvier 2021, l'enquêtrice a fait suite à l'envoi de son rapport. « Je tiens à préciser, à toutes fins utiles, que la relation de pouvoir sur laquelle m'a paru jouer, de manière constante, le Dr A______ est l'élément qui m'a fait pencher pour une qualification de harcèlement sexuel d'une grande partie de son attitude ».

22) Par pli du 11 janvier 2021, les HUG ont informé M. A______ de la prolongation de sa période probatoire en raison de l'enquête administrative ouverte à son encontre. L'examen de son dossier de nomination serait repris en fonction des résultats de l'enquête et de la décision y relative des instances concernées.

23) Le 8 mars 2021, M. A______ a transmis ses observations au président du conseil d’administration.

Le rapport était empreint de subjectivité et ne constituait pas un document circonstancié et objectif conformément à ce qu'il aurait dû être. Il en contestait le contenu. L'enquêtrice avait retenu des faits pour avérés, au motif de l'absence de de dénégation de sa part, sans toutefois lui poser de questions, étant rappelé qu'il avait été entendu entre le décès et les funérailles de sa mère. À titre d'exemple, l'enquêtrice remettait en doute l'origine d'un courrriel, mais n'avait pas vérifié qui en était l'expéditeur auprès de la personne concernée, dont il avait fourni les coordonnées. Elle avait de même interprété exclusivement à charge les plannings et les échanges de courriels qu'il avait fournis. Madame K______ ne s'était pas plainte et l'on ignorait pourquoi elle avait été impliquée dans l'enquête. Le franc-parler et l'humeur de M. A______ sortaient du cadre de l'enquête. Ce rapport causait un sentiment de malaise, résultant des appréciations personnelles de l'enquêtrice qui, vu la subjectivité manifestée, biaisait les conclusions. En l'absence de tout reproche à son encontre, la procédure devait être classée.

24) Par décision du 30 mars 2021, notifiée le jour même, les HUG ont résilié les rapports de service de M. A______ pour le 30 juin 2021.

Le conseil d’administration avait pris acte des conclusions du rapport d’enquête, lesquelles démontraient la violation par l’intéressé de plusieurs articles, cités, du statut du personnel des HUG du 16 décembre 1999 (ci-après : statut).

25) Le 31 mars 2021, à 9h10, les Prof. B______ et L______ ont envoyé un courriel à tout le personnel du ______ faisant état de la révocation d’un médecin du service pour des raisons de harcèlement sexuel et de comportement inapproprié répété. Près de trente témoins avaient été entendus dans le cadre de l’enquête administrative. En leur qualité de chef de service et de chef de département, ils rappelaient que les comportements ou des propos sexistes portant atteinte à la dignité de la personne n’étaient pas tolérés et étaient inacceptables.

26) Le 1er avril 2021, le Prof. B______ a demandé à M. A______ le rapport. Il souhaitait le lire.

27) Par courriel du lendemain, M. A______ lui a indiqué « être effaré de constater, et cela après mon licenciement, et après l'envoi d'un mail y relatif signé de ta main à l'ensemble de l'équipe du ______, que tu n'as en définitive pas lu ce rapport d'enquête ni mes observations ».

28) Le 6 avril 2021, M. A______ s’est adressé à la direction des affaires juridiques des HUG pour signaler la situation et l’atteinte grave à sa personnalité. Il réservait ses droits à la suite du courriel du 31 mars 2021 qu’il considérait comme diffamatoire.

29) Le 8 avril 2021, il s’est adressé au directeur général pour lui faire part de son mal-être et de sa consternation quant à la tournure des événements, plus particulièrement concernant l’envoi du courriel du 31 mars 2021 à tout le ______.

30) Par pli du 16 avril 2021, le directeur général a indiqué à M. A______ que la communication aux équipes se fondait sur des faits établis sans équivoque par le rapport d’enquête et avait eu lieu après que du personnel des urgences, probablement informé par M. A______ ou d’autres sources, aient commencé à en parler de manière biaisée. Il contestait que les Prof. B______ et L______ n’aient reçu qu’un résumé oral de l’enquête administrative.

31) M. A______ a été déclaré en incapacité de travail à compter du 21 avril 2021.

32) Par acte du 10 mai 2021, M. A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre la décision de résiliation des rapports de service du 30 mars 2021. Il a conclu à son annulation et, cela fait, à ce qu’il soit dit que la résiliation des rapports de service était contraire au droit, que la chambre administrative propose aux HUG sa réintégration immédiate et, en cas de refus des HUG, à la condamnation de ceux-ci à lui verser une indemnité équivalant à six mois de son dernier traitement, soit CHF 106'597.10, treizième salaire inclus, avec intérêts à 5 % dès le 30 juin 2021. Préalablement, il sollicitait la comparution personnelle des parties.

La plupart des faits qui lui étaient reprochés étaient prescrits, à l’instar de ceux dénoncés par le Doctoresse N______ qui s’étaient déroulés en 2009. La Doctoresse O______ s’était référée à une situation de 2011, à l’occasion d’une soirée privée. L’autre épisode qu’elle avait évoqué datait de 2014. Madame P______ avait évoqué un épisode datant d’avant son arrivée au ______ en 2011. La prescription absolue de cinq ans était en conséquence acquise pour l’ensemble de ces faits.

L’autorité intimée avait violé le droit, y compris commis un abus du pouvoir d’appréciation. Il ressortait de l’audition du directeur général qu’au cours des deux dernières années, il avait reçu trois témoignages de collaborateurs s’étant plaints de M. A______, mais qu’aucune suite n’y avait été donnée. Cette inaction de l’intimée ne pouvait lui être reprochée, des années plus tard, dans un contexte général de « chasse aux sorcières » liée au harcèlement de manière générale. Un tel comportement violait sans équivoque le principe de la confiance et, partant, de la bonne foi. De plus, les faits en relation avec Mme C______, voire avec Mme K______, ne pouvaient fonder une violation des devoirs de service. À l’issue de l’entretien de service du 28 mai 2020, les HUG lui avaient expressément indiqué qu’aucune sanction ne serait prise, tenant ainsi compte de tous les éléments en leur possession. Le rapport d’enquête retenait que son comportement constituait du harcèlement sexuel pour la période avant ledit entretien. Ainsi, sauf à violer le principe ne bis in idem, les HUG ne pouvaient retenir ces faits à son encontre. La décision était contraire au droit.

Son mal-être et le comportement d’évitement qu’il avait adopté à l’égard de Mme C______ après l’entretien de service avaient été relevés par tous les témoins. Seul restait éventuellement discutable le témoignage de Mme K______. Or, il avait produit les échanges de messages démontrant la « parfaite réciprocité entre eux ». Enfin, les déclarations de Mme K______ évoquant son « insistance » avaient été contredites par les vérifications faites par l’enquêtrice sur l’utilisation des téléphones dans le ______. Il avait par ailleurs expliqué que leur « relation » s’était terminée au cours de l’été 2018, soit bien avant sa nomination de médecin adjoint faisant fonction, intervenue le 1er février 2019. De surcroît, à compter de cette date, il n’avait plus travaillé de nuit, ce qui infirmait les dires de Mme K______. Il n’avait en conséquence pas violé ses devoirs de service. En tous les cas la résiliation des rapports de service était disproportionnée, étant rappelé qu’il travaillait aux HUG depuis quatorze ans et que son activité n’avait jamais fait l’objet de critiques.

Le courriel adressé au personnel du ______ par les HUG le 31 mars 2021, lequel avait permis aux récipiendaires de l'identifier immédiatement, était choquant à plusieurs titres et constituait une grave atteinte à sa personnalité. Rien ne justifiait une telle annonce. Un simple communiqué annonçant la résiliation des rapports de service aurait suffi. Il était suspendu depuis de longs mois. Il n’existait aucune urgence à annoncer la décision des HUG. Ceux-ci avaient pris le risque de communiquer la révocation (sic) du recourant à tout un service avant même que le principal concerné en soit informé, la décision ayant été notifiée à son conseil. Le courriel laissait par ailleurs à penser que trente personnes s’étaient plaintes de son comportement. Enfin, les HUG avaient utilisé son cas pour en faire un exemple. Le congé était en conséquence abusif sous cet angle et, partant, contraire au droit.

33) La tentative de conciliation (art. 65B de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10) a échoué.

34) Les HUG ont conclu au rejet du recours. Préalablement, une audience de comparution personnelle des parties et l’audition de l’enquêtrice devaient être ordonnées.

La résiliation avait été donnée durant la période probatoire. Le recourant n’était qu’employé, non nommé fonctionnaire de sorte que le licenciement répondait à des normes légales moins strictes.

C’était à tort que le recourant invoquait la prescription, la résiliation ne s’étant pas inscrite dans le cadre d’une procédure disciplinaire.

Le recourant avait créé un climat de travail hostile envers plusieurs collaboratrices. Le congé était fondé. M. A______ lui-même avait communiqué l’existence d’une enquête administrative le concernant à plusieurs collaborateurs des HUG et avait reconnu avoir contribué aux rumeurs à son égard par le comportement adopté avec Mme C______. La communication était nécessaire pour mettre un terme aux rumeurs et était justifiée compte tenu des conclusions de l’enquête et du comportement grave du recourant. Les HUG pratiquaient une « tolérance zéro » en matière de harcèlement sexuel et de sexisme depuis plusieurs années. Ils s’efforçaient de prendre toutes les mesures nécessaires afin d’éradiquer ces fléaux. La communication querellée s’inscrivait dans le prolongement des actions menées par les HUG dans ce sens.

35) Dans sa réplique, le recourant s’est opposé à l’audition de l’enquêtrice, qui ne s’était pas circonscrite à son rôle.

La période probatoire avait commencé le 1er février 2019 et devait arriver à échéance le 1er février 2021.

Il contestait tout comportement de harcèlement sexuel à l’encontre de Mme C______, au demeurant non allégué par celle-ci.

Le 25 mai 2021, plusieurs personnes entendues dans le cadre de l’enquête s’étaient plaintes auprès de la direction générale quant à son déroulement : « ayant nous-mêmes passé ces auditions, nous pouvons être témoins d’une enquête qui semblait être aboutie avant même d’avoir débuté. Madame l’enquêtrice nous a posé des questions orientées, avec des propositions de réponses dans les questions à certains moments. Les reformulations de nos propos n’étaient pas toujours fidèles à ce que nous voulions exprimer. Nous pouvions même percevoir, à certains moments, une pointe d’agacement de l’enquêtrice quand nous étions à son goût peut-être trop insistants sur des éléments qui ne l’intéressaient pas. Il sied de préciser que ce collectif, tout comme une grande partie de l’équipe, a été grandement choqué par la forme de l’annonce ainsi que le contenu de celle-ci. Le compte rendu de cette enquête interne porte à l’interprétation et ne laisse à penser qu’aucun doute n’est permis sur les accusations portées à l’encontre de ce médecin ».

Par ailleurs, l’association des médecins adjoints des HUG (ci-après : AMAHUG) était intervenue auprès du directeur général, après avoir été sollicitée par plusieurs de ses membres au sein du ______. Elle se questionnait sur plusieurs points tels que le décalage entre l’interdiction initiale totale de communiquer sur l’enquête administrative portant sur le cas de M. A______ et la diffusion ultérieure très large de l’information, l’injonction de faire preuve d’allégeance totale à la décision sous peine de licenciement ou la partialité de l’enquête. L’AMAHUG sollicitait plusieurs clarifications.

Il persistait à considérer, au vu de la chronologie des faits et du contexte exposé, que l’inaction des HUG et l’actualité liée au mouvement #MeToo avaient contribué à sa mise en cause afin d’en faire un exemple.

36) Sur ce, les parties ont été informées, le 30 septembre 2021, que la cause était gardée à juger.

37) Les HUG ont dupliqué spontanément détaillant notamment la différence entre la période probatoire et la période d’essai. Il était hautement vraisemblable que le recourant ait transmis lui-même certains documents de l’enquête à des tiers. La circulation de ces éléments avait eu pour effet de diviser les équipes. Par ailleurs, le courrier reçu par la direction des HUG quant au déroulement de certaines auditions devant l’enquêtrice administrative, sept mois après la clôture de l’enquête, était surprenant, tous les témoins ayant signé le procès-verbal de leur audition et n’ayant jamais sollicité de rectification.

38) Invité à produire d’éventuelles observations finales, le recourant ne s’est pas manifesté.

39) Les parties ont été informées que la cause restait gardée à juger.

40) Le contenu des pièces sera repris en tant que de besoin dans la partie en droit du présent arrêt.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a LPA).

2) Les parties sollicitent une audience de comparution personnelle et l'autorité intimée l'audition de l'enquêtrice.

a. Tel qu’il est garanti par l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d’être entendu comprend notamment le droit pour les parties de faire valoir leur point de vue avant qu’une décision ne soit prise, de fournir des preuves pertinentes quant aux faits de nature à influer sur la décision, d’avoir accès au dossier, de participer à l’administration des preuves, d’en prendre connaissance et de se déterminer à leur propos (ATF 145 I 73 consid. 7.2.2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_467/2020 du 14 juin 2021 consid. 4.1). Le droit de faire administrer des preuves n’empêche cependant pas le juge de renoncer à l’administration de certaines preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier s’il acquiert la certitude que celles-ci ne l’amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 145 I 167 consid. 4.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_467/2020 précité consid. 4.1).

Cela n’implique pas une audition personnelle de l’intéressé, celui-ci devant simplement disposer d’une occasion de se déterminer sur les éléments propres à influer sur l’issue de la cause (art. 41 LPA ; ATF 140 I 68 consid. 9.6 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1003/2017 du 21 juin 2018 consid. 3 et les arrêts cités ; ATA/723/2018 du 10 juillet 2018 et les arrêts cités).

b. En l'espèce, les parties ont été entendues dans le cadre de l'enquête administrative, le recourant ayant été auditionné les 16 novembre et 4 décembre 2020 pendant plus de sept heures. Il a pu se déterminer à plusieurs reprises par écrit, notamment les 15 décembre 2020 et 8 mars 2021 sur le rapport d'enquête. Il a déposé un acte de recours détaillé, à l'instar de la réponse de l'autorité intimée. Le recourant a pu répliquer le 28 septembre 2021 et n’a pas souhaité fournir d’ultimes observations à la suite de la duplique du 13 octobre 2021. Par ailleurs, les parties ont pu produire toute pièce utile. Elles n'indiquent au surplus pas en quoi leur audition serait indispensable et sur quels points précis elle devrait porter.

Dans ce contexte, il apparaît que la chambre de céans dispose d'un dossier complet lui permettant de trancher le litige en connaissance de cause, sans qu'il soit nécessaire de procéder à une audience de comparution personnelle.

L'audition de l'enquêtrice n'est pas nécessaire compte tenu des considérants qui suivent.

Par conséquent, il ne sera pas fait droit aux demandes d'actes d'instruction complémentaires.

3) L'objet du litige concerne la conformité au droit de la décision de résiliation des rapports de service du recourant du 30 mars 2021.

a. En tant que membre du personnel des HUG, le recourant est soumis au statut en application de l'art. 1 al. 1 let. e de la loi générale relative au personnel de l'administration cantonale et des établissements publics médicaux du 4 décembre 1997 (LPAC - B 5 05) et de l'art. 7 let. e de la loi sur les établissements publics médicaux du 19 septembre 1980 (LEPM - K 2 05). Il est aussi soumis à la LPAC, au règlement d'application de la loi générale relative au personnel de l'administration cantonale, du pouvoir judiciaire et des établissements publics médicaux du 24 février 1999 (RPAC - B 5 05.01), à la loi concernant le traitement et les diverses prestations alloués aux membres du personnel de l'État, du pouvoir judiciaire et des établissements hospitaliers du 21 décembre 1973 (LTrait -
B 5 15), ainsi qu'au règlement d'application de la loi concernant le traitement et les diverses prestations alloués aux membres du personnel de l'État et des établissements hospitaliers du 17 octobre 1979 (RTrait - B 5 15.01).

b. Selon l'art. 4 al. 1 LPAC, le personnel de la fonction publique se compose de fonctionnaires, d'employés, d'auxiliaires, d'agents spécialisés et de personnel en formation. Est un employé le membre du personnel régulier qui accomplit une période probatoire (art. 6 al. 1 LPAC).

La nomination en qualité de fonctionnaire intervient au terme d'une période probatoire de deux ans, sous réserve de prolongation de cette dernière (art. 47 al. 1 RPAC ; 5A RTrait ; art. 49 al. 2 statut).

c. La promotion d’un titulaire à un nouveau poste est faite à titre d’essai pour une période de douze à vingt-quatre mois (art. 8 al. 1 RTrait).

d. En l'espèce, le recourant a travaillé plusieurs années sous contrats de droit privé avec les HUG, avant d'être engagé, le 1er décembre 2019, sous statut de droit public, impliquant une période probatoire de deux ans, ce qu’il ne remet pas en cause.

Les parties divergent sur le dies a quo de la période probatoire, et par conséquent, sur son terme. Le recourant soutient que celle-ci s'est étendue du 1er février 2019 au 1er février 2021. Dans sa réplique, le recourant affirme avoir eu des échanges de courriels avec Mme D______ confirmant que sa période probatoire avait commencé le 1er février 2019. Il offre de prouver ce fait par sa comparution. Selon l'autorité intimée, la période probatoire a débuté le 1er décembre 2019.

Le recourant confond la période probatoire et la période d’essai.

Il ressort du dossier que le recourant a été engagé par contrat de droit public à compter du 1er décembre 2019. La période probatoire de deux ans, en application des art. art. 6 al. 1 LPAC, 47 al. 1 RPAC et 49 al. 2 statut, a dès lors commencé à courir dès cette date et prendra fin le 30 novembre 2021, sous réserve encore de la prolongation de celle-ci annoncée au recourant le 11 janvier 2021.

Autre est la question de la période d’essai suite à la promotion du recourant, en application de l’art. 8 al. 1 RTrait, dont la durée a été fixée, au moment de son engagement, à quatorze mois, soit du 1er décembre 2019 jusqu’au 31 janvier 2021, afin de tenir compte de la période de dix mois pendant laquelle il avait exercé en qualité de chef de clinique avec FMH, faisant fonction de médecin adjoint non agrégé, dès le 1er février 2019.

En conséquence, le recourant se trouvait encore en période probatoire lors de la résiliation des rapports de service le 30 mars 2021 et revêt la qualité d'employé au sens de l'art. 6 al. 1 LPAC et du Titre VII du statut.

4) a. Pendant le temps d'essai et la période probatoire, chacune des parties peut mettre fin aux rapports de service moyennant le respect des délais de résiliation ; le membre du personnel n'ayant pas qualité de fonctionnaire est entendu par l'autorité compétente ; il peut demander que le motif de résiliation lui soit communiqué (art. 21 al. 1 LPAC). Lorsque les rapports de service ont duré plus d'une année, le délai de résiliation est de trois mois pour la fin d'un mois (art. 20 al. 3 LPAC).

b. Le conseil d'administration est l'autorité compétente pour prononcer la fin des rapports de service (art. 17 al. 1 LPAC). Il peut déléguer cette compétence à la direction générale de l'établissement (art. 17 al. 4 LPAC). Le conseil d'administration peut autoriser la sous-délégation de cette compétence en faveur des services de l'établissement pour les membres du personnel n'ayant pas la qualité de fonctionnaire (art. 17 al. 6 LPAC). Selon l'art. 62 du statut, la direction est compétente pour procéder à la résiliation des rapports de service d'un employé.

c. En l'espèce, le recourant se trouvait, au moment de la résiliation des rapports de service, au cours de sa seconde année d'emploi. Le délai de résiliation était donc de trois mois pour la fin d'un mois. Notifié le
30 mars 2021 avec effet au 30 juin 2021, le congé respecte le délai fixé à l'art. 30 al. 3 LPAC. Une éventuelle suspension de celui-ci en raison d'une incapacité de travail ne fait pas l'objet du présent litige.

Signée par le directeur général et un directeur des ressources humaines, ad interim, la décision querellée a été prise par une personne qui en avait la compétence, conformément aux art. 17 al. 6 LPAC et 62 du statut.

La décision de licenciement respecte donc les exigences formelles.

5) a. Conformément à l’art. 5 RTrait, les prestations du nouveau collaborateur font l'objet, au terme de la période d'essai de trois mois et des 1ère et 2ème années probatoires, d'une analyse qui porte notamment sur les capacités, le travail effectué et le comportement du titulaire. Si la période probatoire a été prolongée, les prestations de l’intéressé font également l’objet d’une analyse avant le terme de la prolongation (al. 1). Les résultats de l’analyse sont portés à la connaissance du titulaire et discutés au cours d’un entretien avec son chef direct et le supérieur hiérarchique. La formule d’analyse des prestations doit être signée par tous les intéressés. Le titulaire a la possibilité de rédiger une note contestant tout ou partie de l’analyse. Cette note fait partie intégrante du dossier d’analyse (al. 2).

Si les résultats ne sont pas jugés satisfaisants, l’intéressé est avisé par écrit qu’une nouvelle analyse doit être faite dans un délai maximum de douze mois, au plus tard avant la fin de la période probatoire (art. 5 al. 4 let. c RTrait).

b. Contrairement aux fonctionnaires qui ne peuvent être licenciés qu’en présence d’un motif objectivement fondé, dûment constaté, démontrant que la poursuite des rapports de service est rendue difficile en raison de l’insuffisance des prestations, du manquement grave ou répété aux devoirs de service ou de l’inaptitude à remplir les exigences du poste, la présence d’un motif fondé n’est pas nécessaire pour licencier un employé (art. 21 al. 1; 21 al. 3 et 22 LPAC a contrario).

c. L’administration doit jauger, au vu des prestations fournies par l’employé et du comportement adopté par celui-ci pendant la période probatoire, les chances de succès de la collaboration future et pouvoir y mettre fin si nécessaire avant la nomination s’il s’avère que l’engagement à long terme de l’agent public ne répondra pas aux besoins du service (ATA/1784/2019 du 10 décembre 2019 consid. 5b ; ATA/115/2016 du 9 février 2016 et les arrêts cités). Elle dispose dans ce cadre d’un très large pouvoir d’appréciation quant à l’opportunité de la poursuite des rapports de service. Dans sa prise de décision, elle reste néanmoins tenue au respect des principes et droits constitutionnels, notamment celui de la légalité, de la proportionnalité, de l’interdiction de l’arbitraire et du droit d’être entendu (ATA/1784/2019 consid. 5b ; ATA/115/2016 précité et les arrêts cités).

La résiliation des rapports de service peut être attaquée devant la chambre administrative, mais compte tenu du large pouvoir d’appréciation laissé à l’autorité compétente, le pouvoir d’examen de celle-ci sera limité, sauf violation des droits et principes constitutionnels, à l’application des délais légaux de congé (ATA/1140/2018 du 30 octobre 2018 consid. 5a et les références citées).

En particulier, le grief d'arbitraire ne doit être admis que dans des cas exceptionnels, par exemple lorsque les motifs allégués sont manifestement inexistants, lorsque des assurances particulières ont été données à l'employé ou en cas de discrimination. En revanche, l'autorité de recours n'a pas à rechercher si les motifs invoqués sont ou non imputables à une faute de l'employé ; il suffit en effet que la continuation du rapport de service se heurte à des difficultés objectives, ou qu'elle n'apparaisse pas souhaitable pour une raison ou une autre (arrêt du Tribunal fédéral 8C_182/2013 du 7 novembre 2013 consid. 2.2 ; ATA/115/2016 précité).

6) En l'espèce, par décision du 16 octobre 2020, l'autorité intimée a ouvert une enquête administrative à l'encontre de l'employé au sens de l'art. 27 LPAC, soit dans le cadre d'une procédure pour sanction disciplinaire.

Elle a finalement décidé de le licencier en application des art. 17, 20 et
21 LPAC pour avoir violé le statut des HUG, en particulier les art. 20, 21 let. a et c et 23 let. f.

Ce faisant, les HUG ont opté pour un licenciement ordinaire en lieu et place d'une sanction disciplinaire, ce qu'ils sont autorisés à faire, au motif que le congé ordinaire a un impact moindre que la révocation disciplinaire, laquelle revêt l'aspect d'une peine et a un caractère infamant (arrêt du Tribunal fédéral 8C_244/2014 du 17 mars 2015).

7) Les membres du personnel sont tenus au respect de l'intérêt de l'établissement et doivent s'abstenir de tout ce qui peut lui porter préjudice
(art. 20 statut).

Les membres du personnel se doivent, par leur attitude, notamment, d'entretenir des relations dignes et correctes avec leurs supérieurs, leurs collègues et leurs subordonnés ; de permettre et de faciliter la collaboration entre ces personnes (let. a), de justifier et de renforcer la considération et la confiance dont la fonction publique doit être l'objet (let. c, art. 21 statut).

Les membres du personnel chargés de fonctions d'autorité sont tenus, en outre, notamment, de veiller à la protection de la personnalité des membres du personnel (art. 23 let. f statut).

8) Le rapport d’enquête administrative retient, à l’égard du recourant, deux problèmes : le harcèlement sexuel d’une part et le franc-parler et l’humeur d’autre part.

Sous le titre marginal « Harcèlement sexuel; discrimination », l'art. 4 de la loi fédérale sur l’égalité entre femmes et hommes du 24 mars 1995 (loi sur l’égalité, LEg - RS 151.1) définit le comportement discriminatoire comme un « comportement importun de caractère sexuel ou tout autre comportement fondé sur l'appartenance sexuelle, qui porte atteinte à la dignité de la personne sur son lieu de travail, en particulier le fait de proférer des menaces, de promettre des avantages, d'imposer des contraintes ou d'exercer des pressions de toute nature sur une personne en vue d'obtenir d'elle des faveurs de nature sexuelle ». Bien que les exemples cités dans cette disposition ne se réfèrent qu'à des cas d'abus d'autorité, la définition englobe tous les comportements importuns fondés sur le sexe, soit également ceux qui contribuent à rendre le climat de travail hostile, par exemple les plaisanteries déplacées, les remarques sexistes et les commentaires grossiers ou embarrassants (ATF 126 III 395 consid. 7b/bb p. 397 et les références; arrêts 4A_544/2018 du 29 août 2019 consid. 3.1; 4A_18/2018 du 21 novembre 2018 consid. 3.1; 8C_422/2013 du 9 avril 2014 consid. 7.2 et les arrêts cités). Selon les procédés utilisés, plusieurs incidents peuvent être nécessaires pour constituer une discrimination au sens de l'art. 4 LEg; la répétition d'actes ou l'accumulation d'incidents n'est toutefois pas une condition constitutive de cette forme de harcèlement sexuel (CLAUDIA KAUFMANN, in Commentaire de la loi sur l'égalité, Margrith Bigler-Eggenberger/ Claudia Kaufmann [éd.], 2000, n° 59 ad art. 4 LEg p. 118 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_74/2019 du 21 octobre 2020 consid. 3.1.1)

Les remarques et plaisanteries sexistes peuvent avoir un impact important sur la victime selon leur durée et leur fréquence. Le potentiel de nuisance de ce type de harcèlement est également susceptible d'être accru lorsque plusieurs personnes y prennent part (arrêt du Tribunal fédéral 8C_74/2019 précité consid. 3.3.4).

Si une intention de nuire pourrait peser comme facteur de gravité du harcèlement sexuel, l'absence d'une telle intention ne saurait en atténuer le caractère inadmissible. En effet, sauf lorsqu'il s'agit d'établir l'existence d'un chantage sexuel, la motivation de l'auteur est sans pertinence pour la qualification du harcèlement sexuel (Karine LEMPEN, in Commentaire de la loi fédérale sur l'égalité, Gabriel Aubert et Karine Lempen [éd.], 2011, n° 9 ad art. 4 LEg p. 103 s.).

En cas de harcèlement sexuel, l'employeur a l'obligation de protéger son personnel contre des actes commis par la hiérarchie, des collègues ou des personnes tierces (art. 4 LEg, 6 LTr, 2 OLT 3). Son devoir de diligence comporte deux aspects, à savoir prévenir les actes de façon générale et y mettre fin dans les cas concrets.

9) a. En l’espèce, l'objet du présent litige porte exclusivement sur le comportement du recourant indépendamment du contexte décrit par l'enquêtrice en matière de harcèlement sexuel dans l'institution, « d'omerta », voire de conflits entre certaines professions.

b. Les compétences professionnelles du recourant sont unanimement louées. Seuls des reproches de type comportemental lui sont adressés.

c. Le recourant considère que l'enquêtrice a outrepassé son mandat, tel que délimité par courrier du 9 octobre 2020, lequel se référerait quasi exclusivement à la problématique avec Mme C______.

La décision du 16 octobre 2020 d’ouverture d’enquête administrative ne comporte toutefois pas cette limitation, le conseil d’administration indiquant avoir été « nanti de l’ensemble des éléments mettant en cause votre comportement, en particulier dans vos relations avec des collègues féminines ». De surcroît, la lettre du 9 octobre 2020 mentionnée par le recourant fait certes principalement référence à la situation avec Mme C______, mais mentionne aussi des « événements d’intimidation » auprès de trois personnes, l’information provenant de M. F______ que l’intéressé serait connu pour d’autres agissements ou propos inappropriés envers des femmes de l’institution et l’existence d’une plainte ancienne, hors HUG, contre le recourant, la femme concernée ayant toutefois finalement renoncé à être entendue aux motifs de l’écoulement du temps, de sa satisfaction actuelle à travailler dans son service et de craintes des suites pour son activité professionnelle.

Le grief sera écarté.

10) L’enquêtrice a retenu cinq éléments comme « comportements factuellement à charge » du recourant en matière de harcèlement sexuel : le refus de respecter la volonté de Mme C______ de mettre fin à leur relation ; une certaine insistance vis-à-vis de Mme K______ alors qu'elle était au travail, des remarques inadmissibles à l'égard de la Dresse O______, un comportement déplacé à tout le moins verbal vis-à-vis de la Dresse N______, des blagues grivoises ou remarques sexistes « même s'il n'est pas l'un des pires selon la Dresse  Q______ ».

a. L'enquêtrice a précisé dans son rapport que « dans le cadre des auditions, il a été en particulier demandé aux différentes personnes entendues comme témoins de décrire le Dr A______ et Mme C______, de faire état de ce qu'ils auraient entendus au sein des HUG ou de leur service et de se prononcer sur les relations du Dr A______ vis-à-vis des femmes, notamment sous l'angle du langage ».

Toutefois, les propos rapportés n'ayant qu'une valeur probante moindre et les appréciations personnelles des personnes entendues ne constituant des faits pertinents pour trancher le litige, seules les déclarations factuelles déterminantes les plus importantes seront reprises ci-dessous.

b. Certains témoins se sont référés à d'autres services des HUG pour indiquer que la situation du ______ n'était pas pire ou était du même ordre.

L'éventuelle existence d'un comportement problématique ailleurs ne pouvant servir à le légitimer, il ne peut pas en être tenu compte.

11) Le premier reproche retenu par l’enquêtrice porte sur le refus de respecter la volonté de Mme C______ de mettre fin à leur relation.

a. Le recourant et Mme C______ ont entretenu une relation privée de juillet 2018 à octobre 2019 selon le recourant, et d'avril 2018 à août 2019 selon Mme C______. Il n'est pas contesté que c'est cette dernière qui y a mis fin.

L’autorité intimée a indiqué, par pli du 26 juin 2020, à l'issue de l'entretien de service du 28 mai 2020, qu’aucune sanction ne serait prise à l'encontre du recourant concernant la situation avec Mme C______. Seuls sont ainsi pertinents des faits ultérieurs au 26 juin 2020 ou antérieurs, mais inconnus de l'employeur à cette date.

b. Il ressort des enquêtes que, selon Madame J______, il y a eu deux épisodes pendant lesquels elle avait travaillé avec Mme C______ depuis juin 2020, au cours desquels M. A______ avait passé à de nombreuses reprises. Cela « constituait la goutte d'eau qui a fait déborder le vase ». « Si A______ est là, il observe C______ et cela me dérange car elle n'a plus la même écoute du patient ».

Madame I______ a indiqué avoir constaté la présence constante de M. A______ autour de Mme C______ jusqu'à fin septembre 2020.

Mme C______ a confirmé avoir été dérangée par la présence de M. A______ au-delà de juin 2020 et par le vouvoiement qu'il lui avait imposé.

Le Prof. L______ a relevé n'avoir jamais eu vent d'une relation aux HUG qui finisse en posant des problèmes de cette ampleur. Elle était, de surcroît, hiérarchique, induisant une responsabilité supérieure du cadre concerné.

Mme G______ a rapporté que le recourant était venu la voir en juillet 2020, lui indiquant avoir été blanchi. Il avait expliqué avoir demandé que Mmes C______ et I______ (avec qui il avait entretenu une relation privée entre 2016 et 2018) soient « recadrées » au motif qu'elles lui avaient « causé beaucoup de tort en ayant menti. Il ne voulait pas que cela en reste là ». Il reprochait à Mme I______ d'avoir violé le secret professionnel, ce qui avait eu pour conséquence que des collègues du service avaient désormais connaissance des plaintes de Mme C______ à son encontre. Par ailleurs, elle avait travaillé le 15 juillet 2020 avec Mme C______ et avait constaté les nombreux passages de M. A______ « au tri » alors qu'il ne devait pas s'y trouver. Ils avaient eu des altercations, notamment quant à sa façon dure et directe de s'adresser aux collaborateurs. Il ne se remettait pas en question.

De nombreux témoins ont constaté un mal-être ou une souffrance chez les deux intéressés au-delà de juin 2020. Mme C______ avait, par deux fois, sollicité son transfert au CHUV, « n'en pouvant plus de la situation ».

Le recourant relève que seuls cinq témoins mentionnent des comportements inappropriés ou inadéquats de sa part avec Mme C______. Si certaines collaboratrices n’avaient effectivement aucun reproche à formuler à son encontre, il existe des témoins, directs, de la présence accrue du recourant autour de Mme C______ jusqu’à fin septembre 2020 environ. Cette présence a importuné l'intéressée, mais aussi d’autres personnes du service. Elle a eu une influence sur la qualité de la prestation professionnelle de Mme C______, moins à l’écoute des patients selon un témoin. De surcroît, certains collègues ont été surpris que le recourant vouvoie Mme C______, mettant ainsi publiquement de la distance à son encontre. L’intéressé n’a d’ailleurs pas contesté que la fin de leur relation avait été difficile et qu'il avait mal géré la frontière entre le privé et le professionnel. Il a de même admis avoir eu une attitude ambiguë à l’égard de Mme C______.

L'enquêtrice a relevé que la fin problématique de cette relation et les difficultés du praticien à gérer la rupture présentaient de grandes similitudes avec le comportement qu'il avait adopté dans le cadre d'une précédente relation avec une autre collègue, Mme K______. Entendue en qualité de témoin, cette dernière a confirmé que le recourant avait de la peine à respecter sa volonté lorsqu'elle lui demandait de cesser un comportement. Il lui était ainsi arrivé de recevoir plus de cinquante messages quotidiens, qu'il se présente sur son lieu de travail, voire la fasse venir dans son bureau pendant qu'elle travaillait. Il l'avait de même menacée de venir chez sa mère si elle ne se rendait pas disponible.

Si, certes, l’autorité intimée avait indiqué, par pli du 26 juin 2020, à l'issue de l'entretien de service du 28 mai 2020, qu’aucune sanction ne serait prise à l’encontre du recourant concernant la situation avec Mme C______, celle-ci est en conséquence restée problématique au-delà de cette date et des faits nouveaux ont été mis à jour dans le cadre de l'enquête. Les comportements du recourant constituent ainsi des violations des art. 21 A et 21 C du statut du personnel. Ces comportements répondent à la définition du harcèlement sexuel. Ainsi, par exemple, l'annexe du commentaire de l'art. 2 de l'ordonnance 3 de la loi sur le travail (Secrétariat d'État à l'économie, ad art. 2, p. 302-F) mentionne expressément, parmi une liste exemplative de comportements proscrits, les pratiques consistant à suivre des collègues à l'intérieur ou à l'extérieur de l'entreprise. De même, créer un climat de travail hostile répond à la définition du harcèlement sexuel.

c. La faute est d'autant plus grave que le recourant l'a commise en sa qualité de supérieur de Mme C______. Or, il lui appartenait de contribuer à la protection de la personnalité de celle-ci, ce qu’il n’a pas fait, dès lors que son attitude, de l’avis de nombreux témoins, a contribué à un mal-être profond de l'intéressée, la contraignant à solliciter à deux reprises son transfert dans un autre établissement hospitalier.

d. Au vu de ces seuls éléments, l’autorité intimée n’a pas abusé de son pouvoir d’appréciation en résiliant les rapports de service du recourant en période probatoire. Les reproches formulés par l’autorité intimée n’apparaissent pas manifestement dénués de fondement et constituent des motifs qui lui permettaient, au vu de son large pouvoir d’appréciation, de retenir que la continuation des rapports de service n'apparaissait pas opportune.

Partant, la décision de licenciement prise par les HUG en période probatoire est dénuée d’arbitraire, respecte le principe de la proportionnalité et est, en tous points, conforme au droit.

e. Il n’est dès lors pas nécessaire d’analyser les autres faits en lien avec le grief du harcèlement sexuel.

f. De surcroît, le grief relatif à la problématique autour du franc-parler et de l’humeur, est confirmé par de nombreux témoins et n’est pas contesté par le recourant, qui admet que son mode de communiquer n’est pas toujours bien reçu, même s’il est reconnu qu’il a fait des efforts et qu’il est aujourd’hui capable de travailler avec des personnes avec lesquelles il n’est pas forcément d’accord. L’enquêtrice a retenu, à cet égard, un « problème de communication personnel qui constitue un manque de finesse et d’à-propos » en violation de l’art. 21 let. a du statut.

12) Le recourant se plaint d'une « résiliation des rapports de service abusive et partant, contraire au droit », au vu de l'envoi du courriel à tout le personnel du ______ le 31 mars 2021 et de son contenu, ce qui aurait porté atteinte à sa personnalité.

a. La notion de protection de la personnalité de l'agent public et l'obligation qui en découle pour l'employeur est typiquement un concept dont la portée et la valeur matérielle sont identiques en droit public et en droit privé (Valérie DÉFAGO GAUDIN, Conflits et fonctions publiques : Instruments, in
Jean-Philippe DUNAND/Pascal MAHON [éd.], Conflits au travail. Prévention, gestion, sanctions, 2015, p. 156). Il incombe à l'employeur public, comme à l'employeur privé (art. 328 CO), de protéger et respecter la personnalité du travailleur.

Les modalités d’une résiliation peuvent constituer une violation de
l'art. 328 CO qui oblige l'employeur à protéger la personnalité du travailleur, notamment son honneur personnel et professionnel. L'employeur ne doit pas stigmatiser, de manière inutilement vexatoire et au-delà du cercle des intéressés, le comportement du travailleur. Même si les faits sont exacts, la stigmatisation à l'égard de tiers peut constituer, de la part de l'employeur, une violation de son devoir de protéger la personnalité du travailleur (arrêt du Tribunal fédéral 4A_485/2016 et 4A_491/2016 précité consid. 2.2 et les arrêts cités).

b. L’art. 336 CO contient une liste non exhaustive de motifs selon lesquels la résiliation des rapports de travail peut être considérée comme abusive.

Toutefois, alors que l’art. 336 CO s’attache aux motifs de résiliation, le Tribunal fédéral considère qu’un congé peut aussi être abusif en raison de la manière dont il est donné (Rémy WYLER/Boris HEINZER, Droit du travail, 2019, p. 814, n° 1.4.3). Ainsi, même lorsque le motif de la résiliation est en soi légitime, celui qui exerce son droit de mettre fin au contrat doit agir avec des égards. Si l’employeur porte une grave atteinte aux droits de la personnalité du travailleur dans le contexte d’une résiliation, celle-ci doit être considérée comme abusive ; un comportement simplement inconvenant ne suffit cependant pas
(ATF 132 III 115 consid. 2.3 ; 131 III 535 consid. 4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 4A_485/2016 et 4A_491/2016 du 28 avril 2017 consid. 2.2.2 et les arrêts cités.).

Le point de savoir si et, le cas échéant, quand une réaction est indiquée dépend largement de l'appréciation du cas concret (ATF 137 I 58 consid. 4.2.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 8C_340/2009 précité consid. 4.3.2).

c. La chambre de céans a déjà retenu que l'envoi d'un courriel aux collaborateurs d'un cadre afin de les informer de son licenciement, contenant comme explications qu’il était responsable de graves dysfonctionnements, portait atteinte à sa personnalité. De plus, l’intimée évoquait l’existence d’un conflit d’intérêt entre l’emploi du recourant et ses activités accessoires, alors que ce motif n’avait finalement pas été retenu. Toutefois, bien que ce courriel fût inutile et inconvenant, il ne constituait pas une atteinte à la personnalité du recourant suffisamment grave pour rendre le licenciement abusif, au regard de l’ensemble des circonstances particulières (ATA/1807/2019 du 17 décembre 2019 consid. 15 confirmé par arrêt du Tribunal fédéral 8C_104/2020 du 12 janvier 2021).

d. En l'espèce, le courriel du 31 mars 2021 a été adressé à tout le personnel du ______ à 9h10, soit le lendemain de la notification du licenciement au mandataire du recourant, intervenue à 15h48. À juste titre, le recourant relève que son employeur n'avait aucune garantie que son avocat ait pu le joindre la veille et qu'il soit au courant, avant que la nouvelle ne soit communiquée à ses collègues. Rien ne justifiait de prime abord cet empressement, l'intéressé étant libéré de son obligation de travailler depuis plusieurs mois, sous réserve du fait qu'il avait été rappelé, dans un autre service, dans le cadre de la gestion de la pandémie. Le recourant ayant toutefois été informé de la résiliation des rapports de service avant la diffusion du courriel, cet élément ne lui a pas causé d'atteinte à sa personnalité.

Le courriel, bien que signé par deux professeurs, dont le supérieur direct de l'intéressé, engage la responsabilité de l'autorité intimée (arrêt du Tribunal fédéral 4A_310/2019 du 10 juin 2020 consid. 4.3.1). Interpellé par le recourant, le directeur général a d'ailleurs confirmé son contenu.

Le recourant soutient que la formulation « dans le cadre de cette enquête près de trente témoins ont été entendus » laisse à penser, pour des non-juristes, que trente personnes s'étaient plaintes de son comportement. Ce n'est toutefois pas ce que le texte dit, ce qui est de surcroît aisément explicable à toute personne qui l'aurait mal compris. Cette formulation ne cause en conséquence pas d'atteinte à la personnalité du recourant d'autant plus que certaines personnes ont expressément demandé à l'enquêtrice à pouvoir être entendues afin de témoigner de leur estime à l'égard du praticien.

Autre est la question de la phrase « Le Conseil d'administration des HUG, après avoir pris connaissance d'une enquête administrative approfondie, a pris la décision de révoquer un médecin du service des urgences pour des raisons de harcèlement sexuel et de comportement inapproprié répété ». Le terme « révoquer », concerne la sanction administrative la plus sévère à l’encontre d’un employé ou d’un fonctionnaire (art. 16 al. 1 let. c ch. 5 LPAC), significative de commission de faute grave. Or, les HUG ont abandonné la voie disciplinaire envisagée tant dans la correspondance du 9 octobre 2020 que dans celle du 2 février 2021 du président du conseil d’administration, pour, finalement, procéder à un licenciement, en période probatoire, ne nécessitant pas l'existence d'un motif fondé. Rien n’indique que les conditions strictes d’une révocation soient remplies. L’usage de ce terme est en conséquence attentatoire à la personnalité du recourant.

Le courriel mentionne par ailleurs expressément « pour des raisons de harcèlement sexuel et de comportement inapproprié répété ». Cette mention n'était pas nécessaire, ce d'autant plus que l’autorité intimée ne fait nulle mention du harcèlement sexuel dans la lettre de licenciement, même pas dans les dispositions légales applicables. Les termes « pour des raisons de harcèlement sexuel et de comportement inapproprié répété » sont par ailleurs couplés avec un rappel des règles prévalant en matière de prévention du harcèlement sexuel dans l'établissement. À ce titre, ces mentions sont inutiles et inconvenantes. Elles portent atteinte à la personnalité du recourant et sont suffisamment graves pour rendre le licenciement abusif.

13) a. Ni le statut ni la LPAC ne renvoient à l'art. 336 de la loi fédérale du 30 mars 1911, complétant le Code civil suisse (CO, Code des obligations - RS 220).

Une résiliation qui viole clairement la protection de la personnalité de l’employé serait abusive, même si le statut du personnel ne mentionne pas une telle éventualité (Héloïse ROSELLO, op. cit., p 286, n° 584).

b. La LPAC prévoit, à l’art. 22, une liste de motifs fondés de résiliation (insuffisance des prestations ; inaptitude à remplir les exigences du poste ; disparition durable d'un motif d'engagement), mais ne dresse pas de liste de motifs abusifs. L’art. 31 al. 2 LPAC se limite à interdire toute résiliation qui serait contraire au droit (Héloïse ROSELLO, op. cit., p. 285, n° 581).

L’alinéa précité, prévu dans le cas où « le fonctionnaire » serait licencié sans qu’un motif fondé le justifie, ne trouve pas application en l’espèce, l’intéressé n’ayant pas été « injustement licencié » (MGC [en ligne], Séance 61 du
16 octobre 2015 à 17h15, disponible sur https://ge.ch/grandconseil/ memorial/seances/010209/61/26/).

c. À teneur de l’art. 31 al. 3 LPAC, si la chambre administrative retient que la résiliation des rapports de service est contraire au droit, elle peut proposer à l’autorité compétente la réintégration (al. 3). En cas de décision négative de l’autorité compétente ou en cas de refus du recourant, la chambre administrative fixe une indemnité dont le montant ne peut être inférieur à un mois et supérieur à vingt-quatre mois du dernier traitement brut à l’exclusion de tout autre élément de rémunération ; concernant un employé, l’indemnité ne peut être supérieure à six mois.

La chambre administrative a pour pratique de fixer l'indemnité pour refus de réintégration à un certain nombre de mois du dernier traitement brut de l'employé, conformément à l'art. 31 al. 4 LPAC (ATA/1042/2016 du 13 décembre 2016 consid. 13c ; ATA/258/2014 du 15 avril 2014 consid. 7). L'indemnité fondée sur cette disposition comprend le treizième salaire au prorata du nombre de mois fixés et n'est pas soumise à la déduction des cotisations sociales (ATA/1042/2016 précité consid. 13c ; ATA/590/2016 du 12 juillet 2016 consid. 17). En l'absence de conclusion sur ce point, les intérêts moratoires n'y sont pas additionnés (art. 69 al. 1 LPA ; ATA/273/2015 du 17 mars 2015 consid. 17c ; ATA/193/2014 du 1er  avril 2014 consid. 17).

d. En l’espèce, l’autorité intimée ayant déclaré s’opposer à la réintégration du recourant, il convient de fixer le montant de l’indemnité.

Aux fins d’en fixer la quotité, il sera retenu que la communication litigieuse a été envoyée à l’entier du ______. Le courriel comporte près de cinquante noms et plusieurs listes d’adressage. Toutefois, le recourant se trouvait en période probatoire et sous contrat de droit public depuis le 1er décembre 2019 seulement. À ce titre la durée des relations de travail doit être qualifiée de courte. Le congé en tant que tel est par ailleurs fondé et seules les circonstances entourant sa communication à des tiers le rendent contraire au droit. Le recourant est jeune, en bonne santé et pourra faire valoir ailleurs ses qualités professionnelles, unanimement reconnues.

Compte tenu de l'ensemble des circonstances susmentionnées, l'indemnité sera arrêtée au minimum légal, soit un mois de son dernier traitement mensuel brut, somme portant intérêts, dûment réclamés, à 5 %, à compter du 30 juin 2021.

14) Vu l’issue du litige, un émolument, légèrement réduit, de CHF 800.- sera mis à charge du recourant (art. 87 al. 1 LPA) et une indemnité réduite de CHF 500.- lui sera allouée à la charge des HUG (art. 87 al. 2 LPA, ATA/1653/2019 du 12 novembre 2019 et les références citées).

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 10 mai 2021 par Monsieur A______ contre la décision de licenciement des Hôpitaux universitaires de Genève du 30 mars 2021 ;

au fond :

l’admet partiellement ;

condamne les Hôpitaux universitaires de Genève à verser à Monsieur A______ une indemnité correspondant à un mois de son dernier traitement brut, avec intérêts à 5 % l'an dès le 30 juin 2021 ;

rejette le recours pour le surplus ;

met un émolument de CHF 800.- à la charge de Monsieur A______ ;

alloue à Monsieur A______ une indemnité de procédure de CHF 500.-, à la charge des Hôpitaux universitaires de Genève ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public, s’il porte sur les rapports de travail entre les parties et que la valeur litigieuse n’est pas inférieure à CHF 15'000.- ;

- par la voie du recours en matière de droit public, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- et que la contestation porte sur une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Margaux Broïdo, avocate du recourant, ainsi qu'à Me Anne Meier, avocate des Hôpitaux universitaires de Genève.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, Mmes Krauskopf et Pedrazzini Rizzi, M. Verniory, Mme Lauber, juges.

 

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

D. Werffeli Bastianelli

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

la greffière :