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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/17407/2013

ACPR/637/2015 (3) du 25.11.2015 sur OMP/15973/2014 ( MP ) , REJETE

Descripteurs : INTÉRÊT JURIDIQUEMENT PROTÉGÉ; PRÉVENU; PLAIGNANT; PARTIE À LA PROCÉDURE
Normes : CPP.382; CPP.115

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/17407/2013 ACPR/637/2015

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du mercredi 25 novembre 2015

 

Entre

A______, comparant par Me Robert HENSLER, avocat, Grand-Rue 25, case postale 3200, 1211 Genève 3,

recourant,

 

contre l'ordonnance d'acceptation de qualité de partie plaignante rendue le 18 décembre 2014 par le Ministère public,

 

et

B______, comparant par Me Cécile BERGER MEYER, avocate, route de Chêne 30, 1211 Genève 17,

C______, comparant par Me Richard CALAME, avocat, rue du Trésor 9, 2001 Neuchâtel,

D______, comparant par Me Miguel OURAL, avocat, route de Chêne 30, 1211 Genève 17,

E______, comparant par Me Jean-Marc REYMOND, avocat, avenue de la Gare 1, case postale 7255, 1002 Lausanne,

F______, comparant par Me Vincent JEANNERET, avocat, rue des Alpes 15bis, case postale 2088, 1211 Genève 1,

G______, p. a. ______, (VD),

H______, comparant par Me François LOGOZ, avocat, avenue des Mousquines 20, case postale 805, 1001 Lausanne,

I______, comparant par Mes Serge CALAME et Frédéric COTTIER, avocats, rue du Rhône 65, case postale 3199, 1211 Genève 3,

J______, comparant par Me Jean-Yves REBORD, avocat, rue François-Bellot 3, 1206 Genève,

K______, comparant par Me Pierre VUILLE, avocat, rue des Alpes 15, case potale 1592, 1211 Genève 1,

L______, comparant par Me Aude LONGET-CORNUZ, avocate, rue des Maraîchers 36, 1205 Genève,

M______, en faillite, p. a. Office des faillites, route de Chêne 54, case postale 115, 1211 Genève 17,

N______, comparant par Me Romain JORDAN, avocat, rue Général-Dufour 15, case postale 5556, 1211 Genève 11,

O______, comparant par Me Patrick MOUTTET, avocat, rue de l'Athénée 4, 1211 Genève 12,

P______, domicilié ______, (SZ), comparant en personne,

Q______, ______, comparant par Me Pritam SINGH, avocat, place du Marché 1, 1260 Nyon,

R______, comparant par Me Patrick HUNZIKER, avocat, rue Gourgas 5, case postale 31, 1211 Genève 8,

S______, comparant par Me Eric HESS, avocat, rue Saint-Léger 6, 1205 Genève,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés.


EN FAIT :

A. Par acte déposé au greffe de la Chambre de céans le 24 décembre 2014, A______ recourt contre la décision rendue par le Ministère public, le 18 décembre 2014, dans la cause P/17407/2013, par laquelle cette autorité a accepté la qualité de partie plaignante de la F______ ainsi que des Caisses de prévoyance membres de la F______.

Le recourant conclut, préalablement, à l'octroi d'un délai supplémentaire pour compléter son argumentation et déposer toutes pièces utiles et, principalement, à l'annulation de la décision querellée.

Il conclut, en outre, à ce que soit :

-        "constat[é] que la F______, D______, B______, W______, la X______, Z______, AA______, AB______, le AC______, AD______, AE______, AF______, AG______, AH______, AI______, AJ______, AK______, AL______, AM______. AN______, AO______, AP______, AQ______, AR______, AS______, AT______, AU______, AV______, AW______, AX______, AY______, AZ______, BA______, BB______, BC______, et BD______ [n'ont pas la qualité de partie plaignante].

-        [fait] de même à l'égard de toute autre partie plaignante non mentionnée au paragraphe précédent et qui serait incluse dans les "caisses de prévoyance membres de la F______, respectivement ayant investi par son biais" visées par le dispositif de l'ordonnance querellée du 18 décembre 2014.

-        [Écartées] toutes ces "parties plaignantes" de la procédure."

Il conclut, également, à ce que l'Etat de Genève soit condamné aux frais et au versement d'une indemnité de CHF 5'000.- au titre de frais d'avocats.

B. Les faits pertinents pour l'issue du litige sont les suivants :

a. La F______ (ci-après : F______) a pour but de développer la prévoyance en permettant à des investisseurs (institutions de prévoyance) de souscrire individuellement des créances hypothécaires – sous forme d'octroi de prêt ou de partie de prêt en faveur d'un ou plusieurs débiteurs – créances garanties par des cédules hypothécaires, les investisseurs souhaitant souscrire ce type de prêts donnant mandat de représentation à la F______.

Dans ce cadre, la F______ a conclu, avec T______, le 30 avril 2001, un contrat de gestion donnant à cette dernière un mandat général et exclusif d'organiser et de gérer l'octroi des crédits hypothécaires à des tiers. L'article 3 dudit contrat prévoyait que T______ "apporte toutes ses connaissances à l'exécution du mandat et veille à une fidèle promotion et défense des intérêts de la Fondation". T______, soit pour elle N______, son directeur et président du conseil d'administration, avait pour tâche de protéger les intérêts de la F______, dans le respect de son système d'évaluation et de suivi administratif des créances hypothécaires, ainsi que celui des caisses de prévoyance, dont les crédits octroyés devaient exclusivement servir à l'achat d'un bien immobilier et/ou à sa rénovation. Ce contrat a été résilié avec effet immédiat le 11 novembre 2013.

A ce titre, les institutions de prévoyance se voyaient régulièrement adresser par la F______ respectivement par T______, des dossiers de crédit constitués principalement d'une "offre de placement hypothécaire", avec notamment une évaluation des débiteurs ("rating"), ainsi, que d'un "dossier d'évaluation" du bien immobilier, sur la base desquels elles fondaient leurs décisions d'octroi de crédits.

T______, devenue M______, a été déclarée en faillite par jugement du Tribunal de première instance le 4 ______ 2015 (JTPI/______/2015). Par arrêt du 29 ______ 2015 (ACJC/______/2015), la Chambre civile de la Cour de Justice a rejeté la requête d'effet suspensif à son recours contre ce jugement.

b. Suite aux plaintes pénales déposées par la F______ ainsi que par de nombreuses institutions de prévoyance, une instruction pénale a été ouverte le 19 novembre 2013 qui a mis à jour un système de fraude généralisée impliquant la commission de multiples infractions (abus de confiance, escroquerie, faux dans les titres, gestion déloyale) dans le cadre duquel les prévenus, dont A______, auraient déterminé les investisseurs respectifs à consentir à l'octroi, en faveur de débiteurs douteux, de crédits nettement supérieurs au prix d'acquisition des immeubles concernés, sur la base d'expertises largement surévaluées par rapport à la valeur vénale réelle des immeubles expertisés, et/ou tenant compte d'une valeur potentielle après travaux de rénovation fictifs, expertises qui étaient remises à la F______, par l'entremise de N______, et en violation totale des directives de la F______, lesquelles interdisaient notamment l'octroi de prêts allant au-delà de 80% de la valeur de gage des immeubles à financer. Les surfinancements ainsi obtenus avaient servi au remboursement des intérêts hypothécaires échus ou à des dépenses personnelles.

c. A______, R______, – autre débiteur de crédit hypothécaire –, N______, Q______ – comptable de A______ chargé de la gestion de ses affaires courantes –, P______ et S______ – signataires des expertises des immeubles gagés –, ont été mis en prévention pour gestion déloyale (art. 158 CP), abus de confiance (art. 138 CP), escroquerie (art. 146 CP) et faux dans les titres (art. 251 CP) à raison de ces faits.

A______ a notamment été mis en prévention d'abus de confiance dans la mesure où les prêts qu'il aurait obtenus devaient servir à l'acquisition de biens immobiliers ou à leur rénovation, et qu'il aurait détourné à des fins personnelles les prêts octroyés et ce à hauteur de près de CHF 55 millions.

d.a. Le tableau du Ministère public intitulé "Récapitulatif non exhaustif des prêts hypothécaires octroyés par T______", daté du 5 mars 2014, a mis en exergue 64 dossiers dans lesquels de tels surfinancements avaient été constatés.

Dans leur plainte et leurs observations, les institutions de prévoyance et la F______ ont indiqué les dossiers dans lesquelles elles avaient investis leurs fonds par l'entremise d'T______, soit notamment dans les dossiers répertoriés par le Ministère public.

Ainsi, de façon non exhaustive, ni du point de vue de l'ensemble des investissements ni des dossiers visés par le tableau, il apparaît que :

d.b. La F______, en son nom et pour son compte, avait investi CHF 2'892'000.- de son propre capital, dont CHF 500'000.- dans le dossier 22100 ______;

d.c. Les D______ avaient investi CHF 32'700'000.-, dont CHF 5 millions dans le dossier 22054 ______;

d.d. La B______ avait investi CHF 29'650'000.-, dont CHF 4 millions dans le dossier 21909 ______;

d.e. Les CAISSES DE COMPENSATION ci-après :

a.             La AJ______ – avait investi CHF 1'250'000.- soit CHF 750'000.- dans le dossier 22040 ______ et CHF 500'000.- dans le dossier 22094 ______;

b.             La AI______ avait investi CHF 7'200'000.-, dont CHF 1 million dans le dossier 22080 ______;

c.             La AK______ avait investi CHF 3'050'000.-, dont CHF 1'150'000.- dans le dossier 22157 ______;

d.             La AM______ avait investi CHF 2 millions, dont CHF 650'000.- dans le dossier 22016 ______;

e.             La BE______ avait investi CHF 119'066'202.-, dont CHF 4,5 millions dans le dossier 22174 ______;

f.              La AO______, avait investi CHF 17'313'000.-, dont CHF 1 million dans le dossier 22174 ______;

g.             K______ avait investi CHF 4'260'000.-, dont CHF 400'000.- dans le dossier 22039 ______;

d.f. E______ avait investi CHF 3'396'000.-, dont CHF 396'000.- dans le dossier 22111 ______;

d.g. E______ avait investi CHF 600'000.-, dont CHF 250'000.- dans le dossier 22168 ______;

d.h. H______ avait investi CHF 28'320'000.-, dont CHF 1'485'000.- dans le dossier 22100 ______;

d.i. Les CAISSES DE PENSIONS ci-après :

a.             La X______ avait investi CHF 17,8 millions, dont CHF 2 millions dans le dossier 22039 ______;

b.             La BF______ avait investi CHF 2 millions, soit CHF 1 million dans le dossier 22039 ______ et CHF 1 million dans le dossier 21954 ______;

c.             La W______ avait investi CHF 16,9 millions, dont CHF 1,5 million dans le dossier 21909 ______;

d.             La Z______ avait investi CHF 1'750'000.-, soit CHF 750'000.- dans le dossier 21968 ______ et CHF 1 million dans le dossier 22168 ______;

e.             Le AE______ avait investi CHF 450'000.-, dont CHF 200'000.- dans le dossier 22174 ______;

f.              I______ avait investi CHF 16'250'000.-, dont CHF 500'000.- dans le dossier 22187;

g.             Le AC______ avait investi CHF 250'000.- dans le dossier 22187 ______;

h.            Le BG______ avait investi CHF 200'000.- dans le dossier 22134 ______;

i.               Le AB______ avait investi CHF 2'550'000.-, dont CHF 200'000.- dans le dossier 22174 ______;

j.               Le AG______ avait investi CHF 1 million dont CHF 200'000.- dans le dossier 22174 ______;

k.             Le BH______ avait investi CHF 1,3 million soit CHF 1 million dans le dossier 22187 ______ et CHF 300'000.- dans le dossier 21999 ______;

l.               Le AF______ avait investi CHF 6'735'000.-, dont CHF 500'000.- dans le dossier 22169 ______;

m.          La BJ______ avait investi notamment CHF 1'500'000.- dans le dossier 22133 ______;

n.            La AH______ avait investi CHF 6 millions, dont CHF 2 millions dans le dossier 22069 ______;

o.             La AI______ avait investi CHF 17'100'000.-, dont CHF 1'500'000.- dans le dossier 22133 ______;

d.j. La C______, avait investi CHF 20'330'000.-, dont CHF 980'000.- dans le dossier 22031 ______;

d.k. Les CAISSES DE RETRAITE ci-après :

a.             La BK______ avait investi CHF 500'000.- dans le dossier 22119 ______;

b.             La AX______ avait investi CHF 3'740'000.-, dont CHF 990'000.- dans le dossier 22069 ______;

c.             La AY______ avait investi notamment CHF 500'000.- dans le dossier 22133 ______;

d.             La AZ______ avait investi CHF 58'750'000.-, dont CHF 2 millions dans le dossier 22133 ______;

e.             La BA______ avait investi notamment CHF 960'000.- dans le dossier 21968 ______;

f.              La BL______ avait investi CHF 6'150'000.-, dont CHF 1,5 million dans le dossier 22172 ______;

g.             La BM______ avait investi CHF 1'950'000.-, dont CHF 500'000.- - dans le dossier 22172 ______;

h.            La BN______ avait investi CHF 1,3 million, dont CHF 300'000.- dans le dossier 22172 ______;

i.               La BO______ avait investi CHF 500'000.-, dont CHF 100'000.- dans le dossier 22100 ______;

j.               La BP______ avait investi CHF 1,2 million, dont CHF 500'000.- dans le dossier 22069 ______;

k.             La AU______ avait investi plus CHF 50 millions, dont CHF 1 million dans le dossier 22085 ______;

l.               La J______ avait investi notamment CHF 750'000.- dans le dossier 22069 ______;

m.          La AQ______ avait investi notamment CHF 500'000.- dans le dossier 22120 ______;

n.            La BQ______ avait investi notamment CHF 500'000.- dans le dossier 22171 ______;

o.             Le AT______ avait investi notamment CHF 1 million dans le dossier 22108 ______;

p.             La AS______ avait investi notamment CHF 1 million dans le dossier 22108 ______;

q.             La AR______ avait investi notamment CHF 336'000.- dans le dossier 21909 ______;

r.              La AP______ avait investi notamment CHF 750'000.- dans le dossier 22111 ______;

s.              La AV______ avait investi notamment CHF 250'000.- dans le dossier 22070 ______;

d.l. Les caisses représentées par G______ ci-après :

a.             la BR______ avait investi CHF 10,5 millions, dont CHF 500'000.- dans le dossier 22111 ______;

b.             La BS______ avait investi CHF 6,4 millions, dont CHF 300'000.- dans le dossier 22106 ______;

c.             la BT______ avait investi CHF 7,1 millions, dont CHF 500'000.- dans le dans le dossier 22111 ______;

d.             la BU______ liées avait investi CHF 5,4 millions, dont CHF 300'000.- dans le dossier 22106 ______;

e.             la BV______ avait investi CHF 11'550'000.-, dont CHF 1 million dans le dossier 22133 ______;

f.              la BW______ avait investi CHF 4,7 millions, dont CHF 500'000.- dans le dossier 22133 ______;

g.             La BX______ avait investi CHF 1'850'000.-, dont CHF 250'000.- dans le dossier 22133 ______;

h.            La BY______ avait investi CHF 3,2 millions, dont CHF 1,2 million dans le dossier 22106 ______;

i.               la BZ______avait investi CHF 380'000.-, dont CHF 100'000.- dans le dossier 22133 ______;

j.               la CA______ avait investi CHF 19'850'000.-, dont CHF 1'250'000.- dans le dossier 22133 ______;

d.m. Les BD______ avaient investi CHF 1 million (dont CHF 40'000.- remboursés) dans le dossier 21909 ______;

d.n. La BC______ avait investi CHF 1,5 million dans le dossier 21954 ______;

d.o. La CB______ avait investi CHF 1,5 million, dont CHF 500'000.- dans le dossier 21955 ______.

e. La F______ a également exposé qu'T______ avait conclu, en son nom et pour son compte, en dehors de tout pouvoir de représentation, et sans référence à aucune cédule hypothécaire, des conventions de crédits-pont avec certaines institutions de prévoyance, consistant pour celles-ci à avancer à la F______ les fonds nécessaires au financement d'un dossier lorsque les souscriptions obtenues n'atteignaient pas, temporairement, le montant total du prêt sollicité. Plus de CHF 53 millions avaient ainsi été prêtés à la F______ pour des dossiers financés parfois à 50% voire 100% par ces crédits-pont, et cinq dossiers, financés à hauteur de CHF 16 millions par ces crédits-pont, n'avaient pas encore été remplacés par des souscriptions. En particulier, un tel crédit, de CHF 1'950'000.-, avait été souscrit, en mars 2013, dans le dossier 21969 ______ pour permettre le remboursement du capital du crédit hypothécaire aux investisseurs.

f. La AU______ apparaît également créancière de crédits-ponts pour plus de
CHF 16 millions dans six dossiers.

g. Le 11 août 2014, A______ a saisi le Ministère public d'une requête visant notamment à écarter la qualité de partie plaignante de la F______ et de toute partie se prétendant lésée mais qui ne le serait en réalité qu'indirectement, subsidiairement d'écarter la qualité de partie plaignante de toutes les parties plaignantes membres de la F______, respectivement ayant investi par son biais.

h. Par déterminations écrites du 26 septembre 2014, les plaignantes dont la qualité de partie était querellée ont toutes conclu au rejet de sa requête.

i. Lors de l'audience du 19 novembre 2014, U______ a été déclaré avoir obtenu des financements de CHF 60 à 70 millions de la part d'T______ qui acceptait de financer des immeubles contrairement aux banques. Les surfinancements étaient destinés aux travaux de rénovation. Il avait revendu quatre ou cinq immeubles financés par T______, à un prix supérieur au financement obtenu.

[Aucun des dossiers évoqués à cette audience n'est répertorié dans le tableau du Ministère public].

C. Dans sa décision querellée, le Ministère public a retenu la qualité de partie plaignante de la F______, considérant que le patrimoine de cette dernière avait été directement mis en danger par les actes de gestion déloyale reprochés à T______ qui, par le biais de N______, avait conclu des contrats impliquant l'octroi de surfinancements ainsi que des conventions de crédits-pont. Ces agissements avaient engendré pour la F______ de nombreux frais ainsi que le risque de devoir participer aux pertes liées aux montants non recouvrables et de se retrouver débitrice de crédits-pont.

Il a également retenu cette qualité pour les institutions de prévoyance. Leur dommage résultait, d'une part, du non-paiement, notamment par A______, des intérêts hypothécaires et amortissements liés à ces prêts et, d'autre part, du risque de non recouvrement du montant des prêts octroyés en raison de la surévaluation frauduleuse de la valeur des gages immobiliers, de la situation économique des débiteurs et de la valeur réelle des immeubles sur lesquels elles pourraient disposer d'un droit de gage en garantie de leurs créances. En raison de ce risque, elles avaient constitué des provisions substantielles au bilan, qui influençaient nécessairement le compte de résultat et le montant des fonds libres disponibles pour les assurés.

Il a contesté la qualité pour recourir des prévenus contre cette décision, se référant à la jurisprudence de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral qui considère que le prévenu n'a, en règle générale, pas d'intérêt juridiquement protégé à l'annulation ou à la modification d'une décision d'admission de partie plaignante car le préjudice qu'il subit est un inconvénient de fait.

D. a. Dans son recours, A______ requiert un délai supplémentaire pour compléter ses écritures. Il avait la qualité pour recourir contre la décision querellée. L'admission des intimés à la procédure violait les art. 104, 105 et 118 CPP. Il avait un intérêt juridiquement protégé à ne pas être confronté à d'autres accusateurs que le Ministère public, en raison des conséquences liées à l'accès au dossier mais également des contraintes juridiques induites par la présence de parties, ne présentant pas les qualités requises, qui avaient mis à disposition du Procureur, qui avait la charge de la preuve, un dossier monumental et structuré. Le Tribunal fédéral s'était prononcé sur cette question sous l'angle du préjudice irréparable au sens de l'art. 93 al. 1 let. a LTF mais jamais sous celui de l'application de l'art. 382 CPP. Il conteste la qualité de partie plaignante à la F______, qui en tant que représentante des créanciers, n'avait subi aucun dommage, tout au plus un dommage indirect s'agissant d'éventuelles actions récursoires. Les institutions de prévoyance n'avaient pas, non plus, subi de dommage. La valeur des immeubles avait augmenté dans la plupart des cas, le créancier se retrouvant avec un gage conforme à ses attentes, voire qu'un prix de réalisation qui lui permettrait de recouvrer l'intégralité de ses prétentions, comme cela avait été le cas pour U______.

b. Dans ses observations, le Ministère public a persisté et précisé que si U______ avait pu vendre certains immeubles avec un bénéfice, cela n'impliquait pas "qu'il puisse en être de même s'agissant des centaines de prêts démesurés octroyés par les caisses de pension dans le cadre de cette procédure".

c. La F______ a conclu à l'irrecevabilité du recours et subsidiairement à son rejet. Elle réclame une indemnité de CHF 3'800.- correspondant à dix heures de travail d'avocat au taux horaire de CHF 300.- et une heure au taux de CHF 500.-. Se référant à la jurisprudence de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral, elle conteste la qualité pour recourir du recourant qui n'a pas d'intérêt juridiquement protégé à l'annulation de la décision faute de préjudice irréparable. Elle était titulaire des biens juridiques protégés par les infractions poursuivies et était directement touchée par les agissements des prévenus, ayant investi, sur base de fausses expertises, ses propres fonds dans 11 dossiers, dans lesquels des surfinancements avaient été octroyés avec un risque de non-recouvrement. Son patrimoine était également mis en danger par la conclusion, sans droit, des crédits-pont par T______. Enfin, son patrimoine était entamé par le fait qu'elle avait dû reprendre en urgence l'opérationnel jusque-là effectué par T______.

d. Les D______ ont conclu à l'irrecevabilité du recours, subsidiairement à son rejet et à la condamnation du recourant à une indemnité de CHF 3'000.- correspondant à six heures de travail d'avocat au taux horaire de CHF 500.-. La demande d'un délai supplémentaire pour compléter le recours devait être rejetée. Au vu de la jurisprudence du Tribunal pénal fédéral, le recourant n'avait pas qualité pour recourir faute d'intérêt juridiquement protégé à recourir contre la décision. La contestation de sa qualité de partie plaignante par le recourant était tardive. Leur dommage consistait en ce que leurs créances, souscrites dans les dossiers répertoriés, présentaient des risques de non-recouvrement en raison de la surévaluation frauduleuse de la valeur de gage des immeubles, de l'absence de gage pour certains immeubles, du montant du crédit octroyé supérieur au prix d'acquisition du bien, de la situation économique des débiteurs dont certains avaient cessé de payer les intérêts et les amortissements.

e. La B______ a conclu à l'irrecevabilité du recours, subsidiairement à son rejet et à la condamnation du recourant à une indemnité de CHF 2'000.- correspondant à quatre heures de travail d'avocat au taux horaire de CHF 500.-. La demande d'un délai supplémentaire pour compléter le recours devait être rejetée. Au vu de la jurisprudence du Tribunal pénal fédéral, le recourant n'avait pas qualité pour recourir faute d'intérêt juridiquement protégé à recourir contre la décision. Son dommage résultait du risque de non recouvrement des créances souscrites dans les dossiers répertoriés du fait de la surévaluation frauduleuse.

f. Les CAISSES DE COMPENSATION (cf. d.f.) ont conclu au rejet du recours et à la condamnation du recourant à une indemnité de CHF 1'800.-. La demande de délai supplémentaire pour compléter le recours devait être rejetée. Au vu de la jurisprudence du Tribunal pénal fédéral, le recourant n'avait pas qualité pour recourir faute d'intérêt juridiquement protégé à recourir contre la décision. La mise en danger de leur patrimoine avait justifié la constitution de provisions, parfois pour 100% du prêt lorsqu'il n'y avait pas de cédule hypothécaire. Les intérêts non payés s'ajoutaient, en outre, à ce dommage.

g. La H______ a conclu à l'irrecevabilité du recours et subsidiairement à son rejet, avec suite de frais et dépens. Le recours était irrecevable faute d'intérêt juridiquement protégé du recourant à recourir contre sa qualité de partie plaignante, son préjudice éventuel étant un inconvénient de fait au sens de la jurisprudence du Tribunal pénal fédéral, sans que l'exception retenue par cette autorité justifie de faire exception. Elle était titulaire des biens juridiquement protégés par les infractions visées, soit ses intérêts pécuniaires. Elle était partie, suite à des expertises inexactes, à des contrats de prêts hypothécaires accordés pour des montants qui n'étaient pas garantis par la valeur des immeubles. Elle avait subi une atteinte directe par la mise en danger de ses intérêts pécuniaires, la valeur de ses créances devant être rectifiée à la baisse. Elle avait subi un dommage lors de la conclusion des contrats, même si la valeur des immeubles avait, prétendument, augmenté. Elle avait rendu vraisemblable le préjudice direct qu'elle subissait et pouvait chiffrer son dommage jusqu'aux plaidoiries.

h. LES CAISSES DE PENSION (cf. d.j.) ont conclu au rejet du recours et à la condamnation du recourant à une indemnité à titre de dépens pour les honoraires d'avocat. Elles soutiennent que le recourant n'a pas qualité pour recourir contre la décision. Le recours était mal fondé dans la mesure où les conclusions prises n'indiquaient pas ce qu'il entendait faire constater. Des infractions avaient été commises à l'encontre de leur patrimoine qui était mis en danger, sans que le dommage soit, en l'état quantifiable; les intérêts et amortissements n'étaient plus payés par les prévenus; les pertes liées aux encaissements manqués devaient être inscrites au bilan et des provisions devaient être constituées pour les investissements qui ne seraient pas remboursés; des prélèvements supplémentaires avaient dû être consentis, en faveur de la F______, sur les versements faits par les quelques débiteurs qui s'acquittaient encore de leur dette.

i. E______ se sont opposées aux conclusions du recourant. Les infractions reprochées portaient atteinte à leurs intérêts pécuniaires, dans la mesure où plusieurs prêts octroyés, dont les intérêts n'étaient plus payés, risquaient de ne pas être remboursés lors de la réalisation des immeubles gagés, au vu de leur surévaluation.

j. Les BD______ ont conclu au rejet du recours et à la condamnation du recourant à une indemnité de CHF 2'000.- correspondant à quatre heures de travail d'avocat. Elles avaient été trompées par les affirmations contenues dans l'offre de placement du dossier 21909 ______, ce qui avait notamment permis de dégager des surfinancements "surréalistes". Le dommage correspondant au non remboursement de l'amortissement et des intérêts relatifs aux années 2014 et 2015, résultait de cette tromperie, ce d'autant que les cédules hypothécaires garantissant son prêt avaient été conservées par Y______ (anciennement T______) qui exerçait des poursuites en réalisation de gage dans le cadre du litige avec la F.

k. La BC______ a conclu – dans des observations, dont la structure et la motivation concernant le dossier 21954 ______ sont similaires à celles des BD______, représentées par le même conseil – au rejet du recours et à la condamnation du recourant à une indemnité de CHF 2'000.- correspondant à quatre heures de travail d'avocat.

l. Les CAISSES DE RETRAITE (cf. d.l.) ont conclu au rejet du recours avec suite de frais et dépens. Leur dommage résultait des provisions qu'elles avaient dû constituer, suite aux prêts hypothécaires supérieurs au 80% de la valeur de gage, au défaut de paiement des intérêts hypothécaires et des amortissements par les sociétés, du recourant, propriétaires des immeubles déclarées en faillite.

m. N______ s'en est rapporté à justice.

n. O______, qui a indiqué avoir été entendu en qualité de personne appelée à donner des renseignements dans la procédure, s'en est remis à justice avec suite de frais et dépens.

o. L______ a indiqué n'avoir aucune observations à formuler et s'en est rapporté à justice.

p. Q______ a soutenu la position du recourant. La F______ avait agi comme représentante des investisseurs et n'était pas partie à la relation contractuelle. Elle n'avait pas démontré qu'elle avait agi comme investisseur direct dans les onze dossiers allégués dans ses observations. Son dommage serait tout au plus indirect, lié aux éventuelles actions récursoires des caisses de pensions. S'agissant de ces dernières, aucune atteinte directe n'était démontrée. Il était, au contraire, établi que des bénéfices avaient été retirés de la vente de certains biens immobiliers et que le risque de contrepartie était largement compensé par l'intérêt rémunérateur plus élevé que dans une situation moins risquée. L'admission de qualité de partie plaignante de l'une excluait celles des autres, la F______ et les Caisses de pensions ne pouvaient être toutes deux titulaires de la créance prétendument mise en péril.

q. Y______ (anciennement T______) s'en est rapporté à justice.

r. S______ n'a pas présenté d'observations et s'en est rapporté à justice.

s. A______ a répliqué déplorant que la Chambre de céans ne lui ait pas octroyé le délai supplémentaire sollicité. Les parties plaignantes ne se prévalaient pas d'un dommage en lien avec la délivrance d'un certificat d'insuffisance de gage alors qu'elles reprochaient que les crédits avaient été octroyés sur la base d'expertise surévaluée ou utilisés sans lien avec les immeubles. Les allégations de faits des parties plaignantes étaient, pour certaines, fausses.

t. La F______ a répliqué contestant les allégués du recourant et maintenant sa position.

EN DROIT :

1. 1.1. Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1, 390 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner une ordonnance du Ministère public sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 20 al. 1 let. b et 393 al. 1 let. a CPP).

1.2. L'intérêt juridiquement protégé du recourant, prévenu dans la procédure est, cependant, contesté par le Ministère public et les parties intimées qui se réfèrent à la jurisprudence de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral.

1.2.1. Selon l'art. 382 al. 1 CPP, toute partie qui a un intérêt juridiquement protégé à l'annulation ou à la modification d'une décision a la qualité pour recourir contre celle-ci. Le recourant, quel qu'il soit, doit être directement atteint dans ses droits et doit établir que la décision attaquée viole une règle de droit qui a pour but de protéger ses intérêts et qu'il peut, par conséquent, en déduire un droit subjectif. Le recourant doit en outre avoir un intérêt à l'élimination de cette atteinte, c'est-à-dire à l'annulation ou à la modification de la décision dont provient l'atteinte (A. KUHN / Y. JEANNERET (éds), Commentaire romand : Code de procédure pénale suisse, Bâle 2011, n. 2 ad art. 382; DCPR/139/2011 du 10 juin 2011).

Selon l'art 93 al 1 let. a LTF, le recours, au Tribunal fédéral, contre les décisions préjudicielles ou incidentes, n'est recevable que si la décision attaquée peut causer un préjudice irréparable (let. a) ou si l'admission du recours peut conduire immédiatement à une décision finale qui permet d'éviter une procédure probatoire longue et coûteuse (let. b).

A teneur de l'art. 104 CPP, la partie plaignante a la qualité de partie à la procédure avec les droits qui en découlent.

Elle peut intervenir activement dans la procédure en faisant usage des droits que lui reconnaît la loi et en exerçant un certain contrôle sur la marche du procès. En tant que partie, on reconnaît généralement au lésé le droit de participer à la procédure et de se faire assister d'un conseil juridique, de proposer ses moyens de preuve et de solliciter des actes d'instruction; le droit d'être informé de l'issue de l'instruction et d'en critiquer le résultat en faisant valoir ses moyens; le droit d'obtenir l'assistance judiciaire gratuite et la désignation d'un mandataire d'office en cas d'indigence aux conditions posées aux articles 136 à 138 CPP, du moins (ce qui est critiquable) si son action civile n'apparaît pas d'emblée vouée à l'échec; le droit de recourir contre les décisions et les jugements qui le lèsent, aux plans civil comme pénal (G. PIQUEREZ / A. MACALUSO, Procédure pénale suisse, 3e éd., Genève / Bâle / Zurich 2011,
n. 864, p. 300).

Le Tribunal fédéral a précisé que la partie plaignante pouvait en particulier former appel sur la culpabilité, indépendamment de la prise de conclusions civiles, ce non seulement pour contester un acquittement mais également pour mettre en cause la qualification juridique retenue contre le prévenu en première instance (ATF 139 IV 84 consid. 1.1).

La Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral, "à la lumière de la jurisprudence du Tribunal fédéral sur la notion de préjudice irréparable de nature juridique (v. arrêt du Tribunal fédéral 1B_347/2009 du 25 janvier 2010, consid. 2), a posé le principe selon lequel, lorsque la partie plaignante est un Etat, le prévenu est susceptible d'encourir un préjudice au sens de l'art. 382 al. 1 CPP en raison de l'admission dudit Etat comme partie à la procédure. En effet, de par leur souveraineté, les Etats disposent, pour agir - au sens large - contre des individus et leur patrimoine, de moyens autrement supérieurs à ceux d'une partie plaignante ordinaire et qui excèdent le cadre prévisible de la procédure pénale. Aussi y a-t-il lieu de considérer que, comme la qualité de partie plaignante accorde des droits - notamment relatifs à la connaissance des autres parties et à l'accès au dossier - que toutes les cautèles envisageables (restriction d'accès, etc.) ne peuvent suspendre indéfiniment, le prévenu est susceptible d'encourir un préjudice de nature juridique de par l'admission de la partie plaignante". La qualité pour agir a également été reconnue lorsque le sujet de droit en question est de nature "quasi-étatique" (arrêts du Tribunal pénal fédéral BB.2014.188 du 24 juin 2015 consid. 2.2; BB.2013.38 du 29 juillet 2013, consid. 1.2; BB.2012.107 du 15 mai 2013, consid. 1.3; BB.2012.194 du 2 juillet 2013, consid. 2.1; BB.2011.107 du 30 avril 2012 consid. 1.5).

1.2.2. La Chambre de céans ne fera pas sienne la jurisprudence de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral, qui a été rendue sur la question spécifique de la participation à la procédure pénale d'un Etat étranger ou d'un sujet de droit de nature "quasi-étatique".

Pour ce premier motif, les considérations du Tribunal pénal fédéral ne peuvent pas être transposées à la question litigieuse en l'espèce.

En outre, cette autorité a considéré la question de la recevabilité du recours du prévenu contre l'admission du statut de partie plaignante à la lumière de la jurisprudence du Tribunal fédéral qui examine les recours portés devant lui sous l'angle du préjudice irréparable de l'art. 93 LTF (arrêt du Tribunal fédéral 1B_347/2009 du 25 janvier 2010, consid. 2).

Or, de tels recours portés devant l'autorité cantonale sont à analyser sous l'angle du CPP et non de la LTF, et l'art. 382 al. 1 CPP ne pose pas la condition du préjudice irréparable mais celle de l'existence d'un intérêt juridiquement protégé. La Chambre de céans a toujours admis un tel intérêt du prévenu lorsqu'il contestait, en matière d'infraction contre le patrimoine, la constitution de partie plaignante du lésé (ACPR/279/2015 du 27 mai 2015; ACPR/534/2014 du 14 novembre 2014).

Il convient d'admettre que le prévenu a un tel intérêt à s'opposer à l'admission d'une partie plaignante, sa situation étant péjorée par la présence de ces accusateurs privés autorisés à faire valoir leurs droits procéduraux, à prendre des conclusions, tant civiles que pénales, contre lui et à faire appel d'un éventuel acquittement.

1.3. Le recours de A______ est dès lors recevable.

2. Il n'y a pas lieu d'octroyer au recourant, comme il le sollicite à titre préliminaire dans ses conclusions, un délai supplémentaire pour compléter ses écritures.

En effet, seuls les délais fixés par le juge, et non ceux imposés par le CPP, peuvent être prolongés (art. 92 CPP a contrario). Le délai de recours de 10 jours prévu à l'art. 396 al. 1 CPP n'est ainsi pas prolongeable.

3. Le recourant n'a entrepris la décision d'admission de la qualité de partie plaignante des intimés que sur la question de l'existence d'un dommage en lien de causalité directe avec l'infraction. Il a ainsi limité son recours à cet aspect de la décision, qui sera examiné par la Chambre de céans (art. 385 al. 1 let. a CPP).

Il affirme que les conditions posées à l'art. 115 al. 1 CPP ne sont réalisées pour aucune des parties plaignantes visées dans son acte de recours.

3.1. Selon l'art. 115 al. 1 CPP, il faut entendre par lésé toute personne dont les droits ont été touchés directement par une infraction. Le Tribunal fédéral a précisé que seul doit être considéré comme lésé celui qui est personnellement et immédiatement touché, c'est-à-dire celui qui est titulaire du bien juridique ou du droit protégé par la loi, contre lequel, par définition, se dirige l'infraction (ATF 119 Ia 342 consid. 2
p. 345; 119 IV 339 consid. 1d/aa p. 343). Il convient d'interpréter le texte de l'infraction pour en déterminer le titulaire et ainsi savoir qui a qualité de lésé. Lorsque les faits ne sont pas définitivement arrêtés, il faut se fonder sur les allégués de celui qui se prétend lésé pour déterminer si tel est effectivement le cas (A. KUHN / Y. JEANNERET (éds), op. cit., Bâle 2011, n. 8 ad art. 115). Seuls les biens juridiques protégés par l'infraction en cause peuvent, s'ils sont atteints ou menacés, fonder la qualité de lésé. Le fait que le bien juridique individuel soit protégé pénalement n'est pas non plus décisif, il faut que ce soit l'infraction qui fait l'objet de la procédure à laquelle le lésé entend participer qui tende à sa protection (A. KUHN / Y. JEANNERET (éds), op. cit., n. 9 ad art. 115). Le critère sus-évoqué de la titularité du bien juridique attaqué a pour corollaire que l'existence ou non d'un préjudice civil (par exemple sous la forme d'un dommage patrimonial) est dénuée de pertinence, sous l'angle de l'art. 115 al. 1 CPP, lorsqu'il s'agit de déterminer si une personne revêt la qualité de lésé.

Pour être directement touché, l'intéressé doit, en outre, subir une atteinte en rapport de causalité directe avec l'infraction poursuivie, ce qui exclut les dommages par ricochet (arrêt du Tribunal fédéral 1B_678/2011 du 30 janvier 2012 consid. 2.1 et les références doctrinales citées), soit notamment le cessionnaire, la personne subrogée ex contractu, l'actionnaire ou l'ayant droit économique d'une personne morale, en cas d'infraction commise à son détriment (arrêt du Tribunal fédéral 1B_294/2013 du 24 septembre 2013 consid. 2.1.).

Le dommage est, par ailleurs, défini comme une lésion du patrimoine sous la forme d'une diminution de l'actif, d'une augmentation du passif, d'une non-augmentation de l'actif ou d'une non-diminution du passif, mais aussi d'une mise en danger du patrimoine telle qu'elle a pour effet d'en diminuer la valeur du point de vue économique (ATF 123 IV 17 consid. 3d p. 22; 122 IV 279 consid. 2a; 121 IV 104 consid. 2c p. 107). Ainsi, dans une opération de crédit, le dommage peut résulter d'un accroissement du risque de non-recouvrement de la créance, lorsque ce risque est plus élevé que celui qu'avait admis l'institution de prêt sur la base des informations qui lui avaient été fournies. Encore faut-il que cela induise une diminution de la valeur de la garantie sur le marché. Le désavantage patrimonial constituant le dommage doit, en outre, correspondre à l'avantage patrimonial constituant l'enrichissement (ATF 134 IV 210 consid. 5.3 p. 213, arrêts du Tribunal fédéral 6B_543/2009 du 9 mars 2010, consid. 2; 6B_371/2007 du 5 octobre 2007 consid. 6.6).

Tant que les faits déterminants ne sont pas définitivement arrêtés, il y a lieu de se fonder sur les allégués de celui qui se prétend lésé pour déterminer si tel est effectivement le cas (arrêt du Tribunal fédéral 6B_361/2013 du 5 septembre 2013; A. KUHN / Y. JEANNERET (éds), op. cit., n. 8 ad art. 115). La partie plaignante doit toutefois rendre vraisemblable le préjudice et le lien de causalité entre celui-ci et l'infraction dénoncée (arrêt du Tribunal fédéral 1B_678/2011 du 30 janvier 2012 consid. 2.1; ACPR/198/2014 du 9 avril 2014).

3.2. En l'espèce, les infractions retenues par le Ministère public, soit l'escroquerie, l'abus de confiance et la gestion déloyale, sont incorporées dans le Titre deuxième du Code pénal, soit dans les infractions contre le patrimoine. A ce titre, ces dispositions visent à protéger, en tant que bien juridique, le patrimoine d'autrui, soit les intérêts pécuniaires du lésé (ATF 129 IV 230 consid. 2.1.1).

En l'occurrence, la F______ allègue être partie à des contrats de prêt, en son nom propre et pour son propre compte, pour plus de CHF 2 millions, dans le cadre de plusieurs dossiers dont certains répertoriés dans le tableau du Ministère public comme étant des investissements ayant fait l'objet de surfinancements frauduleux et qui n'étaient, ainsi, pas garantis par la valeur des immeubles, et être liée par des crédits-ponts à hauteur de plus de CHF 53 millions conclus également en son nom et pour son compte, mais à son insu, par T______.

Elle a rendu suffisamment vraisemblable, à ce stade de la procédure, l'atteinte directe, par la mise en danger de ses intérêts pécuniaires, – dans la mesure où la valeur de ses créances doit être rectifiée dans son bilan –, voire son dommage, même si la valeur des immeubles aurait, prétendument, augmenté, notamment au regard du non-versement des amortissements et des intérêts hypothécaires, cause, ou l'une des causes, des contrats de prêts, qui a dû être pris en compte dans le bilan.

Ainsi, le dommage allégué est un dommage direct sans qu'il soit nécessaire de déterminer si l'éventuelle action récursoire des institutions de prévoyance lui causerait, ou non, un dommage direct.

La F______ doit donc être considérée comme lésée au sens de l'art. 115 CPP, et sa qualité de partie à la procédure admise.

3.3. Il en va de même des institutions de prévoyance qui ont investi leur patrimoine dans ces contrats hypothécaires litigieux et qui, mis en danger, les a conduites à inscrire des provisions dans leur bilan, notamment pour couvrir des pertes en cas de réalisation forcée à laquelle le non-versement des intérêts hypothécaires pourrait aboutir.

Faute pour le recourant d'exposer en détail et de façon circonstanciée en quoi tel contrat conclu par telle institution ne causerait pas de dommage ou d'atteinte, autrement qu'en faisant valoir qu'un emprunteur avait revendu avec bénéfice des immeubles achetés par l'intermédiaire d'T______, le non-versement des amortissements et des intérêts hypothécaires et la mise en danger du patrimoine investi de ces institutions suffisent à retenir qu'elles ont rendu vraisemblable, à ce stade de la procédure, être lésées par les infractions retenues.

Leur qualité de partie plaignante doit ainsi également leur être reconnue.

3.4. Le grief sera rejeté et l'ordonnance querellée confirmée.

4. Le recourant, qui succombe, supportera les frais envers l'Etat (art. 428 al. 1 CPP), y compris un émolument de décision de CHF 3'000.- (art. 3 cum art. 13 al. 1 Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale [RTFMP; E 4 10 03]).

5. La juste indemnité, notion qui laisse un large pouvoir d'appréciation au juge, couvre les dépenses et les frais nécessaires pour faire valoir le point de vue de la partie plaignante dans la procédure pénale. Il s'agit en premier lieu des frais d'avocat de la partie plaignante (cf. arrêt du Tribunal fédéral 6B_965/2013 du 3 décembre 2013 consid. 3.1.1; MIZEL / RÉTORNAZ, in Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, 2011, nos 8 ss ad art. 433 CPP; SCHMID, Schweizerische Strafprozessordnung : Praxiskommentar, 2e éd., Zurich 2013, n. 3 ad art. 433 CPP).

Les honoraires d'avocat se calculent selon le tarif local, à condition qu'ils restent proportionnés (SCHMID, op. cit., n. 7 ad art. 429); encore faut-il que l'assistance d'un avocat ait été nécessaire, compte tenu de la complexité de l'affaire en fait ou en droit, et que le volume de travail de l'avocat était ainsi justifié (Message relatif à l'unification du droit de la procédure pénale (CPP) du 21 décembre 2005, FF 2006 1309); le juge dispose d'une marge d'appréciation à cet égard, mais ne devrait pas se montrer trop exigeant dans l'appréciation rétrospective qu'il porte sur les actes nécessaires à la défense du prévenu (M. NIGGLI / M. HEER / H. WIPRÄCHTIGER, Schweizerische Strafprozessordnung / Schweizerische Jugendstrafprozessordnung, Basler Kommentar StPO/JStPO, Bâle 2011, n. 19 ad art. 429); la Chambre de céans applique un tarif horaire de CHF 450.- (ACPR/112/2014 du 26 février 2014, renvoyant au tarif "usuel" de CHF 400.- ressortant de la SJ 2012 I 175; cf. aussi ACPR/279/2014 du 27 mai 2014, ACPR/21/2014 du 13 janvier 2014, ACPR/442/2012 du 17 octobre 2012) ou de CHF 400.- (ACPR/282/2014 du 30 mai 2014), notamment si l'avocat concerné avait lui-même calculé sa prétention à ce taux-là (ACPR/377/2013 du 13 août 2013).

5.1. Aucun des prévenus intimés n'a demandé d'indemnité pour les dépenses obligatoires occasionnées par la procédure (art. 429 al. 2 et 436 al. 1 CPP).

Il y a d'autant moins lieu de leur en accorder que leurs conseils n'ont pas communiqué d'observations, certains s'en rapportant à justice voire soutenant le recourant.

5.2. D'après l'art. 433 al. 1 CPP, applicable par le renvoi de l'art. 436 al. 1 CPP, la partie plaignante peut obtenir une juste indemnité pour les dépenses obligatoires occasionnées par la procédure pénale.

La F______ réclame une indemnité de CHF 3'800.-, correspondant à dix heures de travail aux taux de CHF 300.- et une heure au taux de CHF 500.-. Au vu du travail accompli, du degré de difficulté des questions litigieuses et de l'admission de ses conclusions, il sera, en définitive, retenu quatre heures d'activité soit trois heures au taux de CHF 300.- demandé, et une heure au taux de CHF 450.- soit une indemnité de CHF 1'458.-, TVA incluse.

Les D______ concluent à une indemnité de CHF 3'000.- correspondant à six heures de travail au taux horaire de CHF 500.-. Au vu du travail accompli, du degré de difficulté des questions litigieuses et de l'admission de leurs conclusions, il sera, en définitive, retenu trois heures d'activité au taux de CHF 450.-, soit une indemnité de CHF 1'458.-, TVA incluse.

La B______ conclut à une indemnité de CHF 2'000.- correspondant à quatre heures de travail au taux horaire de CHF 500.-. Au vu du travail accompli, du degré de difficulté des questions litigieuses et de l'admission de ses conclusions, il sera retenu deux heures d'activité au taux de CHF 450.-, soit une indemnité de CHF 972.-, TVA incluse.

Les BD______ et la BC______ réclament quant à elles une indemnité de
CHF 2'000.-, chacune, correspondant à quatre heures de travail. Au vu du travail accompli, de ce que le même conseil a rédigé les deux actes très similaires, du degré de difficulté des questions litigieuses analysées et de l'admission de leurs conclusions, il sera, en définitive, retenu deux heures de travail pour chacune des observations à CHF 450.- et alloué à chacune des intimées une indemnité de
CHF 972.-, TVA incluse.

Les CAISSES DE COMPENSATION réclament quant à elles une indemnité de
CHF 1'800.- qu'elles n'ont pas justifiée. Au vu du travail accompli, du degré de difficulté des questions litigieuses abordées et de l'admission de leurs conclusions, il sera, en définitive, retenu deux heures de travail à CHF 450.-, soit une indemnité de CHF 972.-, TVA incluse.

La H______, les CAISSES DE PENSION, les CAISSES DE RETRAITE n'ont ni chiffré, ni a fortiori justifié, leurs prétentions en indemnité, au sens de l'art. 433 al. 2 CPP, applicable en instance de recours (art. 436 al. 1 CPP), de sorte que la Chambre pénale de recours ne peut pas entrer en matière sur ce point (art. 433 al. 2, 2e phrase, CPP).

La E______ n'ont pas demandé d'indemnité.

5.3. Ces indemnités seront mises à la charge du recourant, cette solution étant conforme au système élaboré par le législateur et rejoignant l'approche prévue en matière de frais de recours, lesquels sont à la charge de la partie qui succombe (ATF 139 IV 45 consid. 1.2).

* * * * *


 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Reçoit le recours formé par A______ contre l'ordonnance d'admission de partie plaignante rendue 18 décembre 2014 par le Ministère public dans la procédure P/17407/2013.

Le rejette.

Condamne A______ aux frais de la procédure de recours, qui comprennent un émolument de CHF 3'000.-.

Condamne A______ à verser une indemnité (TVA de 8% incluse) de :

-                      CHF 1'458.-, à la F______,

-                      CHF 1'458.-, aux D______,

-                      CHF 972.-, à la B______,

-                      CHF 972.-, aux BD______,

-                      CHF 972.-, à la BC______,

-                      CHF 972.-, à la AJ______, la AL______, AK______, la AM______, BE______, la AO______, le AN______, – tous pris conjointement et solidairement –.

Notifie le présent arrêt ce jour, en copie, au recourant, soit pour lui son conseil, aux parties intimées, soit pour elles leurs conseils, et au Ministère public.

Siégeant :

Monsieur Christian COQUOZ, président; Mesdames Corinne CHAPPUIS BUGNON et Alix FRANCOTTE CONUS, juges; Monsieur Julien CASEYS, greffier.

 

Le greffier :

Julien CASEYS

 

Le président :

Christian COQUOZ

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.


 

P/17407/2013

éTAT DE FRAIS

ACPR/637/2015

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

200.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

0.00

- délivrance de copies (let. b)

CHF

0.00

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

3'000.00

-

CHF

 

Total

CHF

3'275.00