Décisions | Tribunal administratif de première instance
JTAPI/504/2025 du 13.05.2025 ( MC ) , CONFIRME
En droit
Par ces motifs
| RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||||
| POUVOIR JUDICIAIRE
JUGEMENT DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE PREMIÈRE INSTANCE du 13 mai 2025
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dans la cause
Monsieur A______, représenté par Me Goran ANTONIJEVIC, avocat
contre
COMMISSAIRE DE POLICE
1. Monsieur A______, né le ______ 1974, démuni de tout document d'identité, est ressortissant éthiopien.
2. Il est arrivé en Suisse en 1990 à l'âge de seize ans et déposé une demande d'asile le 28 septembre 1990, laquelle a été rejetée par décision du 21 juillet 1992, entrée en force. Cette décision était assortie d'un renvoi de Suisse. La prise en charge et l'exécution du renvoi de l'intéressé ont été confiées au canton de Genève.
3. Le 6 novembre 2000, l'intéressé a déposé une demande d'admission provisoire, laquelle a également été rejetée par décision du 15 décembre 2001.
4. Le 25 janvier 2001, l'Office cantonal de la population (devenu depuis lors l'Office cantonal de la population et des migrations, ci-après: OCPM) a introduit une demande de soutien auprès de l'Office fédéral des migrations, tendant à l'identification de M. A______.
5. Entre 2001 et 2018, cette demande de soutien a été interrompue et réinitialisée à cinq reprises par les autorités cantonales en raison des disparitions de l'intéressé.
6. Selon l'extrait de son casier judiciaire suisse, M. A______ a été condamné à 24 reprises entre le 31 janvier 2015 et le 10 mars 2025, notamment pour brigandage, lésions corporelles simples, vol, dommages à la propriété, violation de domicile, opposition aux actes de l'autorité, délits et contraventions contre la loi fédérale sur les stupéfiants et les substances psychotropes du 3 octobre 1951 (LStup - RS 812.121), infraction à la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20) et rupture de ban.
7. L'intéressé a fait l'objet de trois décisions d'expulsion judiciaire de Suisse, soit le 27 novembre 2018 par le Tribunal de police (ci-après : TP) pour une durée de 5 ans, le 26 mai 2020 par la Chambre pénale d'appel et de révision de la Cour de justice pour une durée de trois ans et le 10 mars 2025 par le TP pour une durée de 20 ans.
8. Il a également fait l'objet de trois interdictions de pénétrer au centre-ville de Genève, prononcées par le commissaire de police, respectivement le 27 novembre 2014 pour une durée de six mois, le 27 janvier 2016 pour une durée de douze mois, et le 16 août 2017 pour une durée de douze mois.
9. Le 13 mai 2016, le SEM a informé l'OCPM que seul le retour volontaire pour l'Éthiopie était possible actuellement.
10. Le 25 juillet 2018, les autorités genevoises ont réinitialisé la demande de soutien à l'identification de l'intéressé et à l'exécution de son renvoi auprès du SEM.
11. Lors de l'audience du 27 novembre 2018 par-devant le TP, M. A______ a déclaré être ressortissant éthiopien et né le ______ 1974 à B______ (Ethiopie). Il était célibataire et père d'un enfant de 18 ans, lequel vivait en Allemagne avec sa mère. Il n'avait plus de nouvelle de sa famille depuis 1998. Il n'avait pas de moyens de subsistance, ni de papier d'identité et n'avait aucune famille en Suisse. Arrivé en 1990, il n'avait jamais quitté la Suisse depuis lors. Il ne souhaitait pas retourner en Éthiopie car il n'avait plus personne là-bas et ne savait pas si son père, ses frères et ses sœurs y vivaient encore.
12. Le 7 septembre 2019, M. A______ a été libéré par les autorités pénales et remis aux services de police. Le Commissaire de police a ordonné sa mise en détention administrative, laquelle a été confirmée par jugement du 10 septembre 2019 (JTAPI/812/2019) du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal).
13. Le 13 novembre 2024, M. A______ a été incarcéré à la prison de Champ-Dollon en exécution de peines pénales.
14. Dans le cadre de l'audition effectuée par la Brigade migration et retour le 17 mars 2025, M. A______ a déclaré avoir pris connaissance de son expulsion de Suisse pour une durée de 20 ans. Il n'avait pas de papiers d'identité mais était d'accord de collaborer avec les autorités suisses pour en obtenir auprès de l'ambassade d'Éthiopie. Il ne pouvait pas encore se déterminer s'il était d'accord de se rendre en Éthiopie, étant précisé qu'il avait quitté le pays il y avait longtemps. Au sujet de sa situation personnelle il a déclaré avoir un fils en Allemagne de 25 ans avec lequel il n'avait pas de liens, loger à Genève dans des foyers, ne pas travailler, suivre un traitement médical à base de méthadone, treticot et temesta.
15. Le 1er mai 2025, le SEM a informé les autorités genevoises que M. A______ avait été reconnu comme ressortissant éthiopien par les autorités de ce pays.
16. Le 9 mai 2025, M. A______ a été libéré de détention pénale.
17. Le même jour, à 17h30, le commissaire de police a émis un ordre de mise en détention administrative à l'encontre de M. A______ pour une durée de trois mois. Les démarches relatives à l'organisation de son refoulement en Éthiopie étaient en cours.
Au commissaire de police, M. A______ a déclaré qu'il s'opposait à son renvoi en Ethiopie, dans la mesure où cela faisait 35 ans qu'il vivait à Genève et qu'il n'avait pas de famille en Ethiopie. Il avait un fils de 25 ans qui vivait en Allemagne. Il ne pouvait pas retourner en Ethiopie en raison de la guerre entre l'Erythrée et l'Ethiopie.
18. Le commissaire de police a soumis cet ordre de mise en détention au Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal) le même jour.
19. Entendu ce jour par le tribunal, M. A______ a déclaré qu’il n’était pas d’accord de retourner en Ethiopie. Il était né en Ethiopie mais ses parents étaient érythréens. Il avait quitté l’Ethiopie à l’âge de 16 ans, en 1990. L’Erythrée avait été indépendante en 1991 et il pensait que sa famille s’y trouvait, soit son père, sa mère, ses deux frères et ses deux sœurs. Il n’avait plus de contact avec eux depuis 1998. Il préférait retourner en Erythrée pour voir ses parents. Il pourrait obtenir un passeport érythréen. Il allait faire toutes les démarches pour obtenir son passeport auprès de la représentation diplomatique érythréenne. Lorsqu’il n’était pas en prison, il dormait à l’C______. Ils lui donnaient également à manger. Il recevait CHF 340.- par mois du service social. Il n’avait pas de famille en Suisse, mais il avait des amis. Il avait également un fils de 25 ans en Allemagne. Il avait perdu contact avec lui, mais essayait de renouer contact avec lui. Il n’avait jamais quitté le territoire suisse depuis qu’il y était arrivé. Il devait se faire opérer le 6 juin 2025 d’une hernie aux HUG. Il n’avait pas encore reçu la convocation. Son avocat a versé différentes pièces à la procédure, notamment des rapports sur la situation en Ethiopie.
La représentante du commissaire de police a versé à la procédure le procès-verbal d’entretien de départ de M. A______ du 9 mai 2025, transmise au SEM le 10 mai 2025. Ils attendaient que le service médical de FAVRA complète la demande de rapport médical, ensuite le rapport de l’OSEARA. Une fois qu’ils seraient en possession du rapport de l’OSEARA, ils réserveraient un vol en faveur de M. A______ et demanderaient le laissez-passer aux autorités éthiopiennes. Ces démarches devaient prendre plusieurs semaines mais au minimum un mois. Elle a plaidé et conclu à la confirmation de l’ordre de mise en détention administrative pour une durée de trois mois.
Le conseil de M. A______ a plaidé et conclu à l’annulation de l’ordre de mise en détention et à la mise en liberté immédiate de son client, subsidiairement à ce qu’il soit demandé à l’Ethiopie des garanties suffisantes sur son suivi médical ainsi que sa nationalité.
1. Le Tribunal administratif de première instance est compétent pour examiner d'office la légalité et l’adéquation de la détention administrative en vue de renvoi ou d’expulsion (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 7 al. 4 let. d de loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).
Il doit y procéder dans les nonante-six heures qui suivent l'ordre de mise en détention (art. 80 al. 2 de la loi fédérale sur les étrangers et l’intégration du 16 décembre 2005 - LEI - RS 142.20 ; 9 al. 3 LaLEtr).
2. En l'espèce, le tribunal a été valablement saisi et respecte le délai précité en statuant ce jour, la détention administrative ayant débuté le 9 mai 2025 à 16h40.
3. La détention administrative porte une atteinte grave à la liberté personnelle et ne peut être ordonnée que dans le respect de l’art. 5 par. 1 let. f de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101) et de l’art. 31 de la Constitution fédérale suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), ce qui suppose en premier lieu qu’elle repose sur une base légale (arrêts du Tribunal fédéral 2C_584/2012 du 29 juin 2012 consid. 5.1 ; 2C_478/2012 du 14 juin 2012 consid. 2.1). La détention administrative en matière de droit des étrangers doit dans tous les cas respecter le principe de la proportionnalité (cf. art. 5 al. 2 et 36 Cst. et art. 80 et 96 LEI ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_765/2015du 18 septembre 2015 consid. 5.3 ; 2C_334/2015 du 19 mai 2015 consid. 2.2 ; 2C_218/2013 du 26 mars 2013 consid. 5.1 et les références citées). Il convient en particulier d'examiner, en fonction de l'ensemble des circonstances concrètes, si la détention en vue d'assurer l'exécution d'un renvoi ou d'une expulsion constitue une mesure appropriée et nécessaire (cf. art. 5 par. 1 let. f CEDH ; ATF 134 I 92 consid. 2.3 et 133 II 1 consid. 5.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_765/2015 du 18 septembre 2015 consid. 5.3 ; 2C_218/2013 du 26 mars 2013 consid. 5.1 ; 2C_624/2011 du 12 septembre 2011 consid. 2.1) et ne viole pas la règle de la proportionnalité au sens étroit, qui requiert l'existence d'un rapport adéquat et raisonnable entre la mesure choisie et le but poursuivi, à savoir l'exécution du renvoi ou de l'expulsion de la personne concernée (cf. arrêts du Tribunal fédéral 2C_765/2015du 18 septembre 2015 consid. 5.3 ; 2C_334/2015 du 19 mai 2015 consid. 2.2 ; 2C_218/2013 du 26 mars 2013 consid. 5.1 et les références citées ; cf. aussi ATF 130 II 425 consid. 5.2).
4. Selon l'art. 76 al. 1 let. b ch. 1 LEI, renvoyant à l’art. 75 al. 1 LEI, après notification d'une décision de première instance de renvoi ou d'une décision de première instance d'expulsion au sens des art. 66a ou 66abis du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0), l'autorité compétente peut, afin d'en assurer l'exécution, mettre en détention la personne concernée notamment lorsqu'elle a été condamnée pour crime, par quoi il faut entendre une infraction passible d'une peine privative de liberté de plus de trois ans (let. h) (cf. art. 10 al. 2 CP ; ATA/220/2018 du 8 mars 2018 consid. 4a).
5. L'autorité compétente peut également placer la personne concernée en détention administrative notamment si des éléments concrets font craindre qu'elle ne se soustraie au renvoi ou à l'expulsion, en particulier parce qu'elle ne se soumet pas à son obligation de collaborer (art. 76 al. 1 let.b ch. 3 LEI) et si son comportement permet de conclure qu'elle se refuse à obtempérer aux instructions des autorités compétentes (ch. 4).
6. Ces deux dispositions décrivent toutes deux des comportements permettant de conclure à l'existence d'un risque de fuite ou de disparition, de sorte que les deux éléments doivent être envisagés ensemble (cf. arrêts du Tribunal fédéral 2C_381/2016 du 23 mai 2016 consid. 4.1 ; 2C_128/2009 du 30 mars 2009 consid. 3.1).
7. Selon la jurisprudence, un risque de fuite - c'est-à-dire la réalisation de l'un des deux motifs précités - existe notamment lorsque l'étranger a déjà disparu une première fois dans la clandestinité, qu'il tente d'entraver les démarches en vue de l'exécution du renvoi en donnant des indications manifestement inexactes ou contradictoires ou encore s'il laisse clairement apparaître, par ses déclarations ou son comportement, qu'il n'est pas disposé à retourner dans son pays d'origine. Comme le prévoit expressément l'art. 76 al. 1 let. b ch. 3 LEI, il faut qu'il existe des éléments concrets en ce sens (ATF 140 II 1 consid. 5.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_381/2016 du 23 mai 2016 consid. 4.1 ; 2C_105/2016 du 8 mars 2016 consid. 5.2 ; 2C_951/2015 du 17 novembre 2015 consid. 2.2 ; 2C_658/2014 du 7 août 2014 consid. 1.2).
8. Lorsqu'il existe un risque de fuite, le juge de la détention administrative doit établir un pronostic en déterminant s'il existe des garanties que l'étranger prêtera son concours à l'exécution du refoulement, soit qu'il se conformera aux instructions de l'autorité et regagnera son pays d'origine le moment venu, c'est-à-dire lorsque les conditions seront réunies ; dans ce cadre, il dispose d'une certaine marge d'appréciation (arrêts du Tribunal fédéral 2C_935/2011 du 7 décembre 2011 consid. 3.3 ; 2C_806/2010 du 21 octobre 2010 consid. 2.1 ; 2C_400/2009 du 16 juillet 2009 consid. 3.1).
9. Selon le texte de l'art. 76 al. 1 LEI, l'autorité « peut » prononcer la détention administrative lorsque les conditions légales sont réunies. L'utilisation de la forme potestative signifie qu'elle n'en a pas l'obligation et que, dans la marge d'appréciation dont elle dispose dans l'application de la loi, elle se doit d'examiner la proportionnalité de la mesure qu'elle envisage de prendre.
10. Le principe de la proportionnalité, garanti par l'art. 36 Cst., se compose des règles d'aptitude - qui exige que le moyen choisi soit propre à atteindre le but fixé -, de nécessité - qui impose qu'entre plusieurs moyens adaptés, on choisisse celui qui porte l'atteinte la moins grave aux intérêts privés - et de proportionnalité au sens étroit - qui met en balance les effets de la mesure choisie sur la situation de la personne concernée et le résultat escompté du point de vue de l'intérêt public (ATF 125 I 474 consid. 3 et les arrêts cités ; arrêt du Tribunal fédéral 1P.269/2001 du 7 juin 2001 consid. 2c ; ATA/752/2012 du 1er novembre 2012 consid. 7).
11. Il convient dès lors d'examiner, en fonction des circonstances concrètes, si la détention en vue d'assurer l'exécution d'un renvoi au sens de l'art. 5 par. 1 let. f CEDH est adaptée et nécessaire (ATF 135 II 105 consid. 2.2.1 ; 134 I 92 consid. 2.3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_26/2013 du 29 janvier 2013 consid. 3.1 ; 2C_420/2011 du 9 juin 2011 consid. 4.1 ; 2C_974/2010 du 11 janvier 2011 consid. 3.1 ; 2C_756/2009 du 15 décembre 2009 consid. 2.1).
12. En l’espèce, M. A______ fait l’objet de trois expulsions pénales de Suisse, l’une en cours prononcée par le Tribunal de police le 10 mars 2025 pour une durée de 20 ans. Malgré ces décisions, l’intéressé est resté sur le territoire suisse. Il a par ailleurs fait l’objet de nombreuses condamnations, notamment pour brigandage et vol, soit des infractions qualifiées de crime. Sans attaches avec Genève, il n'a ni domicile ni lieu de résidence fixe et ne dispose d’aucune source de revenu. Vu les nombreuses infractions commises et les déclarations de l’intéressé quant à son refus d’être renvoyé dans son pays d'origine, préférant un renvoi vers l'Erythrée pays dont il prétend posséder la nationalité, l'assurance de son départ effectif répond à un intérêt public certain. De plus, les autorités suisses doivent s'assurer du fait qu'il quittera effectivement le territoire à destination de l’Ethiopie et toute autre mesure moins incisive que la détention administrative serait vaine pour assurer sa présence lorsqu’il devra être emmené à bord du vol sur lequel une place lui aura été réservée.
Par conséquent, il appert que les conditions légales de la détention administrative de M. A______ sont clairement réalisées.
13. Les démarches nécessaires à l'exécution du renvoi doivent être entreprises sans tarder par l'autorité compétente (art. 76 al. 4 LEI). Il s'agit, selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, d'une condition à laquelle la détention est subordonnée (arrêt 2A.581/2006 du 18 octobre 2006 ; cf. aussi ATA/315/2010 du 6 mai 2010 ; ATA/88/2010 du 9 février 2010).
14. En l’espèce, les autorités ont agi avec diligence et célérité dès lors qu’elles ont été informées le 1er mai 2025 que les autorités éthiopiennes avaient reconnues M. A______ comme ressortissant éthiopien, qu'elles se trouvent dans l'attente du rapport médical de l'OSEARA avant de pouvoir réserver un vol et solliciter un laisser-passer.
15. Selon l'art. 79 al. 1 LEI, la détention en vue du renvoi ou de l'expulsion ne peut excéder six mois au total. Cette durée maximale peut néanmoins, avec l’accord de l’autorité judiciaire cantonale, être prolongée de douze mois au plus lorsque la personne concernée ne coopère pas avec l’autorité compétente (art. 79 al. 2 let. a LEI) ou lorsque l’obtention des documents nécessaires au départ auprès d’un État qui ne fait pas partie des États Schengen prend du retard (art. 79 al. 2 let. b LEI).
16. Dans tous les cas, la durée de la détention doit être proportionnée par rapport aux circonstances d'espèce (arrêts du Tribunal fédéral 2C_18/2016 du 2 février 2016 consid. 4.2 ; 2C_218/2013 du 26 mars 2013 consid. 2.3).
17. En l’espèce, la durée de la détention requise, de trois mois, n'apparaît pas d'emblée disproportionnée au vu des démarches encore en cours et du risque non négligeable que M. A______ s’oppose à son renvoi en Ethiopie le jour où une place sur un vol lui aura été réservée. Cas échéant, les autorités disposeront encore du temps nécessaire pour organiser un nouveau renvoi ou solliciter la prolongation de la détention.
18. M. A______ soulève l'inexigibilité et l'inexécutabilité de son renvoi.
19. La détention doit être levée notamment si l'exécution du renvoi ou de l'expulsion s'avère impossible pour des raisons juridiques ou matérielles (art. 80 al. 6 let. a LEI). Dans ce cas, la détention dans l'attente de l'expulsion ne peut en effet plus être justifiée par une procédure d'éloignement en cours ; elle est, de plus, contraire à l'art. 5 par. 1 let. f CEDH (ATF 130 II 56 consid. 4.1.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_955/2020 du 10 décembre 2020 consid. 5.1). Les raisons juridiques ou matérielles empêchant l'exécution du renvoi ou l'expulsion doivent être importantes (« triftige Gründe »).
20. Le renvoi d'une personne étrangère ne peut être ordonné que si l'exécution de celui-ci est possible, licite ou peut être raisonnablement exigée (art. 83 al. 1 LEI). L'exécution n'est pas possible lorsque la personne concernée ne peut quitter la Suisse pour son État d'origine, son État de provenance ou un État tiers ni être renvoyée dans un de ces États (art. 83 al. 2 LEI). Elle n'est pas licite lorsqu'elle serait contraire aux engagements internationaux de la Suisse (art. 83 al. 3 LEI). Elle n'est pas raisonnablement exigible si elle met concrètement en danger la personne étrangère, par exemple en cas de guerre, de guerre civile, de violence généralisée ou de nécessité médicale (art. 83 al. 4 LEI).
21. S'agissant plus spécifiquement de l'exécution du renvoi des personnes en traitement médical en Suisse, celle-ci ne devient inexigible que dans la mesure où ces dernières ne pourraient plus recevoir les soins essentiels garantissant des conditions minimales d'existence. Par soins essentiels, il faut entendre les soins de médecine générale et d'urgence absolument nécessaires à la garantie de la dignité humaine. L'art. 83 al. 4 LEI, disposition exceptionnelle, ne saurait en revanche être interprété comme impliquant un droit général d'accès en Suisse à des mesures médicales visant à recouvrer la santé ou à la maintenir, au simple motif que l'infrastructure hospitalière et le savoir-faire médical dans le pays d'origine ou de destination de l'intéressé n'atteignent pas le standard élevé qu'on trouve en Suisse (ATAF 2011/50 du 2 mai 2011 consid. 8.3). La gravité de l'état de santé, d'une part, et l'accès à des soins essentiels, d'autre part, sont déterminants. Ainsi, l'exécution du renvoi demeure raisonnablement exigible si les troubles physiologiques ou psychiques ne peuvent être qualifiés de graves, à savoir s'ils ne sont pas tels qu'en l'absence de possibilités de traitement adéquat, l'état de santé de l'intéressé se dégraderait très rapidement au point de conduire d'une manière certaine à la mise en danger concrète de sa vie ou à une atteinte sérieuse, durable, et notablement plus grave de son intégrité physique (arrêt du TAF F-1602/2020 du 14 février 2022 consid. 5.3.4).
22. Le renvoi d'un étranger malade vers un pays où les moyens de traiter sa maladie sont inférieurs à ceux disponibles dans l'État contractant reste compatible avec l'art. 3 CEDH, sauf dans des cas très exceptionnels, en présence de considérations humanitaires impérieuses (ACEDH N. c. Royaume-Uni précité § 42 ; Emre c. Suisse du 22 mai 2008, req. n° 42034/04, § 89). Dans un arrêt du 13 décembre 2016 (ACEDH Paposhvili c. Belgique, req. n° 41738/10, § 173 ss, not. 183), la Grande Chambre de la CourEDH a clarifié son approche en rapport avec l'éloignement de personnes gravement malades et a précisé qu'à côté des situations de décès imminent, il fallait entendre par « autres cas très exceptionnels » pouvant soulever un problème au regard de l'art. 3 CEDH les cas d'éloignement d'une personne gravement malade dans lesquels il y a des motifs sérieux de croire que cette personne, bien que ne courant pas de risque imminent de mourir, ferait face, en raison de l'absence de traitements adéquats dans le pays de destination ou de défaut d'accès à ceux-ci, à un risque réel d'être exposée à un déclin grave, rapide et irréversible de son état de santé entraînant des souffrances intenses ou à une réduction significative de son espérance de vie ; ces cas correspondent à un seuil élevé pour l'application de l'art. 3 CEDH dans les affaires relatives à l'éloignement des étrangers gravement malades. La CourEDH a aussi fixé diverses obligations procédurales dans ce cadre (ACEDH Savran c. Danemark du 7 décembre 2021, req. n° 57467/15, § 130).
23. En l'espèce, M. A______ indique suivre un traitement médical à base de méthadone, treticot et temesta. Ce suivi peut être poursuivi dans son pays d'origine et ne saurait faire opposition à son renvoi, l'intéressé n'étant pas exposé à un risque grave et concret de déclin dans sa santé s'il recouvre son pays d'origine, au sens de la jurisprudence précitée. Par ailleurs, il échoue à démontrer qu'il subirait un traitement dégradants et inhumains en cas de renvoi en Ethiopie ou qu'il y serait mis concrètement en danger, les pièces que son conseil a transmis à l'audience de ce jour faisant état de généralités, essentiellement dans la partie nord du pays.
Le grief sera ainsi écarté.
24. M. A______ considère que sa détention administrative serait contraire à l'art. 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101) au vu de son très long séjour en Suisse et de ses liens sociaux dans ce pays, lequel ne lui est d'aucun secours puisque c'est dans le cadre de la procédure de renvoi ou d'expulsion pénale que l'art. 8 CEDH doit être allégué et non pas dans le cadre de la présente procédure qui n'est qu'une mesure d'exécution. A noter que vu les antécédents judiciaires de M. A______ et son absence de liens étroits familiaux, son long séjour en Suisse ne lui serait d'aucun secours.
25. Enfin, il n'y a pas lieu d'interpeller les autorités éthiopiennes aux fins d'obtenir des garanties sur les soins possibles dans ce pays ni de solliciter d'autres garanties que celles déjà obtenues sur sa nationalité. S'agissant d'un éventuel retour en Erythrée, il y a lieu de relever que M. A______ pourrait s'y rendre aisément une fois renvoyé en Ethiopie, ce d'autant qu'il prétend pouvoir obtenir aisément des documents d'identité provenant de ce pays.
26. Au vu de ce qui précède, il y a lieu de confirmer l'ordre de mise en détention administrative de M. A______ pour une durée de trois mois.
27. Conformément à l'art. 9 al. 6 LaLEtr, le présent jugement sera communiqué à M. A______, à son avocat et au commissaire de police. En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), il sera en outre communiqué au SEM.
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF
DE PREMIÈRE INSTANCE
1. confirme l’ordre de mise en détention administrative pris par le commissaire de police le 9 mai 2025 à 17h30 à l’encontre de Monsieur A______ pour une durée de trois mois, soit jusqu'au 8 août 2025 inclus ;
2. dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 10 al. 1 LaLEtr et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les 10 jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.
Au nom du Tribunal :
La présidente
Gwénaëlle GATTONI
Copie conforme de ce jugement est communiquée à Monsieur A______ à son avocat, au commissaire de police et au SEM.
| Genève, le |
| La greffière |