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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/699/2025

JTAPI/234/2025 du 05.03.2025 ( MC ) , CONFIRME

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/699/2025 MC

JTAPI/234/2025

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 5 mars 2025

 

dans la cause

 

Monsieur A______, représenté par Me Robert ZOELLS, avocat

 

contre

COMMISSAIRE DE POLICE

 


 

EN FAIT

1.             Monsieur A______ (connu sous de nombreux alias, notamment B______), né le ______ 1970, est originaire de Tunisie.

2.             Selon l'extrait du casier judiciaire suisse, dans son état au 10 octobre 2023, entre 2006 et 2023, l'intéressé a été condamné à cinq reprises, soit les 11 mai 2006, 27 septembre 2010, 23 avril 2013, 24 mai 2013, 25 août 2015, par les instances pénales suisses, principalement pour des infractions au code pénal (Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0); RS 311.0) (brigandage – art. 140 CP, vol – art. 139 al. 1 CP, escroquerie – art. 146 al. 1 CP, utilisation frauduleuse d'un ordinateur – art. 147 al. 1 CP) et à la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20) (entrée et séjour illégaux – art. 115 al. 1 let. a et b LEI).

3.             Par jugement du 31 mars 2023, le Tribunal correctionnel du canton de Genève l'a par ailleurs condamné à une peine privative de liberté de 3 ans, sans sursis exécutoire et a ordonné son expulsion de Suisse pour une durée de 5 ans (art 66a CP).

4.             Par jugement du 6 novembre 2023, le Tribunal d'application des peines et des mesures du canton de Genève (ci-après : le TAPEM) a ordonné la libération conditionnelle du précité [B______] avec effet au jour de son renvoi effectif de Suisse, mais au plus tôt le 7 novembre 2023, le solde de peine non exécuté étant égal à la durée entre la date de son renvoi et le 7 novembre 2024 et lui a imposé, au titre de règles de conduite pendant la durée du délai d'épreuve, de collaborer avec les autorités compétentes en vue de son renvoi en Tunisie, de quitter le territoire suisse et de ne plus y revenir sans y être autorisé, enfin fixé la durée du délai d'épreuve à un an, dès la date de son renvoi effectif de Suisse, en avertissant l'intéressé que s'il devait, durant ce délai, commettre un nouveau crime ou délit, sa réincarcération pour le solde de sa peine pourrait être ordonnée, nonobstant une nouvelle peine ou mesure, étant relevé que l'attention du précité a encore été attirée sur le fait que sa seule présence en Suisse était déjà constitutive d'une nouvelle infraction pouvant entraîner la révocation de la libération conditionnelle.

Selon le plan d'exécution de la sanction validé le 19 juillet 2023 par le SAPEM, en substance, l'intéressé faisait des allers-retours entre son pays d'origine et la Suisse depuis une dizaine d'années. Son épouse, atteinte de la sclérose en plaque, vivait en Tunisie avec leurs deux enfants âgés de 9 et 11 ans. Il venait en Suisse pour y travailler et ainsi subvenir aux besoins de sa famille, en particulier couvrir les frais médicaux de son épouse. Après sa libération, il souhaitait retourner en Tunisie et y ouvrir un café-restaurant. Pour ce faire, il avait fait appel à la C______ afin d'obtenir de l'aide dans le cadre d'un projet D______. Il a en outre expliqué qu'il souhaitait être présent pour ses enfants et son épouse, dont l'état se péjorait. Il semblait en outre déterminé à régler son problème d'addiction aux jeux. Il reconnaissait en substance les faits pour lesquels il avait été condamné et les expliquait par un besoin d'argent et son addiction aux jeux. Il collaborait en fournissant des documents permettant son identification.

5.             Depuis 2004, l'intéressé a été refoulé à six reprises à destination de son pays d'origine, la Tunisie, soit les 29 novembre 2002, 16 décembre 2004, 19 septembre 2007, 14 mai 2013, 5 octobre 2016, la dernière fois le 28 novembre 2023, en exécution de l'expulsion judiciaire précitée.

6.             Il sied de préciser que, dès lors que l'intéressé était démuni de documents d'identité, les autorités helvétiques avaient dû obtenir des laissez-passer auprès de son pays d'origine, procédures ayant duré quelques jours (en cas de déclaration de départ volontaire), à plusieurs mois.

7.             Le 28 février 2025, l'intéressé a été interpellé par les services de police genevois dans le secteur des E______.

8.             A teneur du rapport d'arrestation du 28 février 2025, depuis plusieurs années, l'intéressé adoptait un mode opératoire consistant à se rapprocher de personnes âgées, souvent vulnérables, afin de gagner leur confiance. Une fois cette relation instaurée, il parvenait à accéder à leurs informations bancaires, profitant de leur crédulité pour effectuer des retraits d'argent à leur insu, étant relevé qu'il opérait principalement à F______.

Le 28 février 2025, aux alentours de 15h10, lors d'une patrouille pédestre, dans le secteur des E______, les policiers avaient reconnu B______, né le ______ 1970, ressortissant tunisien. Contrôlé, ce dernier s'était légitimé avec un passeport tunisien et un titre de séjour français au nom d'une autre personne, soit le nommé G______, né le ______ 1981, ressortissant tunisien.

La fouille de sécurité par palpation effectuée sur place avait révélé des bijoux de provenance douteuse, un billet de train avec au dos le prénom H______ et un numéro de téléphone, ainsi que plusieurs dizaines de souches de paris sportifs de PMU confirmant que l'intéressé était toujours pris du « démon du jeu » comme cela ressortait de leur rapport d'arrestation du 8 novembre 2021.

Concernant le numéro de téléphone précité, il leur avait été possible de déterminer que la ligne était enregistrée au nom de Madame H______, née le ______ 1957, domiciliée à F______.

Avait également été trouvé, un reçu de contravention daté du 1er février 2025 à 15h09, dans la ligne 3 des TPG, pour un montant de CHF 140.-, établi au nom de G______, soit le document d'identité présenté par l'intéressé.

Au vu des faits cités supra et compte tenu des antécédents de l'intéressé, ce dernier avait été acheminé à la Brigade de répression des cambriolages et des vols pour la suite de la procédure. Le test du système automatique d'identification des empreintes digitales (ci-après : l'AFIS) avait confirmé son identité.

Les bijoux, ainsi que les documents d'identité au nom de M. G______ avaient été saisis et portés en inventaire.

9.             Entendu dans la foulée par la police en qualité de prévenu, M. A______ a déclaré que G______ était son cousin, lequel vivait en France, à I______. Il avait trouvé les documents de ce dernier en Tunisie, dans un endroit et les avait pris. Son cousin n'était pas au courant. Il était parti fin janvier 2025, en bateau jusqu'à J______, puis en train jusqu'à K______, puis L______ puis M______. Il était resté à M______ longtemps. Il n'était à Genève que depuis quinze jours environ. Il vivait aux E______, à la mosquée. Sur question, il a ajouté qu'il utilisait ces documents uniquement pour voyager. Il avait été amendé avec ces papiers pour défaut de titre de transport dans la tram 14 dix jours avant son arrestation. Ce n'était arrivé qu'une seule fois. Il n'avait pas pris d'hôtel. Il avait également contracté son numéro de téléphone sous cette identité usurpée.

Il avait été renvoyé en Tunisie, en novembre 2023, après deux ans de détention. Son avocat ne lui avait pas donné tous les papiers et il ignorait la durée de la validité de son expulsion. Il était revenu en pensant que l'expulsion était finie. Il voulait retrouver du travail dans la restauration, le marché aux puces, etc. A son arrivée, il était en possession d'environ EUR 700.-. Son épouse, au pays, avait la sclérose en plaques. Il avait besoin d'argent pour son traitement qui était cher.

Après lui avoir fait remarquer qu'au moment de son interpellation, il faisait la queue devant un tabac-presse, les poches pleines de billets de loterie et lui avoir demandé s'il était accro au jeu, il a déclaré qu'il jouait, bien sûr, mais par plaisir, plus comme avant.

Il avait acheté les bijoux saisis en sa possession, soit une bague pour femme et un médaillon en forme de cœur, au marché aux puces. Ces bijoux étaient en plaqué or. Ils les avaient achetés pour CHF 13.-.

Interrogé sur le billet de train trouvé en sa possession pour un trajet Pont-Céard – Renens, valable du 20 au 29 janvier 2025, avec au dos le prénom H______ et un numéro de téléphone portable, il a expliqué qu'il se rendait à Renens pour jouer au jeu. Il était dans le train à Sécheron pour aller à Renens, sans billet. Il avait vu les contrôleurs, il était alors descendu à Pont-Céard en douce, et il avait acheté un billet. Il avait effectivement inscrit un numéro de téléphone. C'était celui d'une femme qu'il avait rencontrée en 2014. Ils avaient sympathisé. Il l'avait revue dans le train. Ils s'étaient parlés et elle lui avait donné son numéro de téléphone. Il ne l'avait pas appelée. Ils n'avaient pas non plus bu un verre, rien du tout.

Il n'avait aucune adresse en Suisse. Il reconnaissait enfin avoir séjourné en Suisse sans les autorisations nécessaires. Il n'a pas fait état de motifs qui s'opposeraient à son expulsion de Suisse.

10.         Prévenu de rupture de ban (art. 291 CP), il a été mis à disposition du Ministère public sur ordre du commissaire de police.

11.         Le lendemain, l’intéressé, après avoir été entendu par le procureur, a été condamné, par ordonnance pénale du Ministère public, pour faux dans les certificats étrangers (art. 252 CP cum art. 255 CP) et rupture de ban (art. 291 CP), à une peine privative de liberté de 180 jours, sous déduction d'un jour de détention avant jugement.

12.         Les démarches visant à obtenir un laissez-passer et un vol pour la Tunisie étaient en cours.

13.         Le même jour, à 15h25, le commissaire de police a émis un ordre de mise en détention administrative à l'encontre de M. A______ pour une durée de deux mois, considérant que l'intéressé faisait l'objet d'une expulsion de Suisse pour une durée de 5 ans, prononcée le 31 mars 2023 par le Tribunal correctionnel du canton de Genève, laquelle était toujours en cours.

Refoulé dans son pays d'origine le 26 novembre 2023 (pour la cinquième fois), M. A______ était revenu en Suisse pendant la période d'interdiction avec un passeport usurpé, démontrant ainsi un total mépris pour les ordres et instructions qui lui avaient été donnés par les autorités helvétiques. Partant, les conditions des art. 75 al. 1 let. c et 76 al. 1 let. b, ch. 1, 3 et 4 étaient réalisées et fondaient la détention administrative du précité.

Par ailleurs, au regard des motifs des condamnations de l'intéressé et de l'expulsion de Suisse prononcée à son encontre, l'assurance de son départ de Suisse répondait à un intérêt public certain et toute autre mesure moins incisive que la détention administrative serait vaine pour assurer sa présence au moment où il devrait monter à bord de l'avion devant le refouler, étant relevé pour le surplus, que M. A______ était démuni d'adresse fixe, de travail légal ou d'autres attaches à Genève.

Les autorités avaient agi avec célérité puisque les démarches relatives à l'obtention d'un document de voyage pour permettre la commande d'un vol avaient été entamées. Enfin, la durée de détention de deux mois respectait pleinement le cadre légal.

En conclusion, il apparaissait que la mise en détention administrative de M. A______ se justifiait pleinement et était proportionnée aux circonstances pour assurer son renvoi de Suisse.

Au commissaire de police, M. A______ a déclaré qu'il s'opposait à son renvoi en Tunisie, dans la mesure où il y avait des dettes. Il était en bonne santé, mais il était diabétique et suivait actuellement un traitement à base de comprimés. Il souhaitait être assisté d'un avocat.

14.         Le commissaire de police a soumis cet ordre de mise en détention au Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal) le même jour.

15.         Entendu le 4 mars 2025 par le tribunal, M. A______ a conformé qu'il avait été renvoyé de Suisse pour la dernière fois le 28 novembre 2023. Il avait compris qu'il faisait l'objet d'une mesure d'expulsion judiciaire, mais il pensait qu'elle n'était valable qu'un an. Il avait confondu avec la libération conditionnelle, ce qu'il a confirmé après que le tribunal lui avait fait remarquer que, tant le tribunal correctionnel que le TAPEM, avaient attiré son attention sur le fait que la mesure d'expulsion judiciaire prononcée à son encontre était d'une durée de cinq ans.

Sur question du tribunal, il a confirmé la teneur du jugement du TAPEM du 6 novembre 2023, à savoir : qu'en cas d'octroi de la libération conditionnelle, son intention était de retourner en Tunisie pour y ouvrir un café. Il avait effectivement bénéficié, à cette fin, du soutien de la C______. Il a ajouté que c'était la responsable de l'association qui avait acheté les chaises et les tables du café qu'il souhaitait exploiter en Tunisie, mais que cela avait coûté presque CHF 3'000.-. Il n'avait alors plus eu l'argent nécessaire à l'achat d'une machine à café neuve, et en avait donc acheté une d'occasion, mais elle tombait toujours en panne. Il avait besoin d'argent. Sa femme était malade. Elle souffrait d'une sclérose en plaques. Il était revenu en Suisse 13 février 2025 pour faire des petits boulots. Malheureusement, un jour, il avait été contrôlé par la police. Sur question, il a admis qu'il était peut-être revenu en Suisse plus tôt, soit courant janvier 2025, sans être en mesure de donner la date de son entrée en Suisse.

Sur question du tribunal, il a indiqué qu'il avait eu rendez-vous avec l'assistance sociale le jour-même et que cette dernière se chargerait de faire opposition à l'ordonnance pénale du 1er mars 2025.

Sur question du tribunal qui lui a demandé pourquoi il était revenu en Suisse alors qu'il avait été mis au bénéfice de la libération conditionnelle par trois fois, il a répondu qu'il savait. Il était une personne qui aimait le travail. Il avait toujours travaillé, y compris lorsqu'il avait été incarcéré. Son épouse était très malade et son traitement coûtait très cher.

Il a confirmé qu'il était d'accord de retourner en Tunisie, relevant qu'à l'époque, c'était possible de trouver des petits boulots en Suisse, mais ce n'était plus le cas sans permis. C'était désormais plus difficile.

Il avait deux enfants : sa fille de 13 ans et son fils de 11 ans. Ils pleuraient beaucoup de savoir qu'il avait été arrêté. Il souhaitait rentrer le plus vite possible auprès d'eux et de sa femme. A cette fin, il avait pris seul contact avec le social. Par ailleurs, avec l'aide de son avocate, il avait contacté hier (le 3 mars 2025) l'Ambassade de Tunisie à Berne afin de solliciter la délivrance d'un laissez-passer en sa faveur. Il lui avait été répondu que le nécessaire serait fait au plus vite dès réception des papiers.

La représentante du commissaire de police a transmis au tribunal une copie du mandat d'identification et obtention des documents de voyage sollicitant la délivrance d'un document d'identité de voyage supplétif en faveur du contraint. Cette demande avait été adressée le 3 mars 2025. Comme cela ressortait de ce mandat, le contraint n'avait pas de passeport valable dès lors que le sien était échu depuis 2016. Conformément à la procédure, la Brigade Migrations et Retour (BMR) réentendrait M. A______ prochainement afin de préparer son départ. Il était pris note de la volonté du contraint de retourner volontairement dans son pays d'origine.

S'agissant de la procédure d'obtention d'un document de voyage, lorsque la personne était formellement identifiée, l'Ambassade avait un entretien avec son ressortissant, lequel avait visiblement déjà eu lieu par téléphone pour autant que le contraint eût effectivement fait part de son souhait de retourner en Tunisie. A l'issue de cet entretien, un laissez-passer pourrait donc être délivré dans un délai de quinze jours ouvrables environ.

Selon M. A______, il était possible d'obtenir le laissez-passer beaucoup plus rapidement. Deux mois, c'était très long.

Interrogé par le tribunal sur sa situation personnelle, il a confirmé n'avoir, à ce jour, aucun lien avec la Suisse. Il n'avait pas de domicile : il vivait à la mosquée des E______. Il ne lui restait pas grand-chose des EUR 700.- dont il était en possession à son arrivée en Suisse. Son beau-frère, qui vivait en France, pourrait l'aider.

La représentante du commissaire de police a ajouté, qu'avec le concours de la BMR et du SEM, l'Ambassade de Tunisie serait contactée. Le SEM solliciterait, cas échéant en parallèle, la délivrance d'un laissez-passer. Conformément à la procédure, une fois l'accord des autorités tunisiennes obtenu quant à la délivrance du laissez-passer, un délai minimum de quinze jours ouvrables était nécessaire pour la réservation d'un vol, ce délai étant nécessaire à la délivrance effective du laissez-passer. Enfin, en raison de l'état de santé du contraint, se posait la question de l'aptitude au vol. Au vu des éléments précités, une détention de deux mois apparaissait proportionnée.

Interrogé quant à son état de santé, le contraint a indiqué être diabétique depuis cinq ans. Il prenait un traitement, à savoir 1000 mg matin et soir de Metformin. Il avait toujours ce médicament dans sa poche. Il était aussi asthmatique. Sur question du tribunal, il a ajouté avoir vu un infirmier avant la présente audience et avoir un rendez-vous avec le médecin le lendemain.

Sur questions de son conseil, il a ajouté qu'il était désormais conscient que l'expulsion judiciaire dont il faisait l'objet avait été prononcée pour cinq ans. Comme il l'avait expliqué, il avait confondu avec la libération conditionnelle. C'était la première fois qu'il était en détention administrative. Il voulait absolument rentrer en Tunisie, car sa femme souffrait et ses enfants aussi. Il n'y avait plus de boulot en Suisse et, même sans argent, il préférait rentrer auprès de sa famille. S'il était libéré, il lui faudrait moins d'une semaine pour avoir un laissez-passer. Il avait un endroit où aller, à savoir la mosquée des E______ qui le nourrissait gratuitement.

La représentante du commissaire de police a plaidé et conclu à la confirmation de l’ordre de mise en détention administrative prononcé à l’encontre de M. A______ le 1er mars 2025 pour une durée de deux mois, étant relevé qu'au vu des déclarations du contraint de ce jour, son aptitude au voyage devrait être confirmée, cas échéant, avec une réserve de médicaments.

M. A______, par l'intermédiaire de son conseil, a plaidé et conclu, principalement, à sa mise en liberté immédiate, subsidiairement à ce qu'il soit assigné à résidence, alternativement à ce qu'il soit soumis à l'obligation de se présenter chaque jour auprès d'une autorité, par exemple l'OCPM.


 

 

EN DROIT

1.            Le Tribunal administratif de première instance est compétent pour examiner d'office la légalité et l’adéquation de la détention administrative en vue de renvoi ou d’expulsion (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 7 al. 4 let. d de loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

Il doit y procéder dans les nonante-six heures qui suivent l'ordre de mise en détention (art. 80 al. 2 de la loi fédérale sur les étrangers et l’intégration du 16 décembre 2005 - LEI - RS 142.20 ; 9 al. 3 LaLEtr).

2.            En l'espèce, le tribunal a été valablement saisi et respecte le délai précité en statuant ce jour, la détention administrative ayant débuté le 1er mars 2025 à 15h00.

3.            La détention administrative porte une atteinte grave à la liberté personnelle et ne peut être ordonnée que dans le respect de l’art. 5 par. 1 let. f de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101) et de l’art. 31 de la Constitution fédérale suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), ce qui suppose en premier lieu qu’elle repose sur une base légale (arrêts du Tribunal fédéral 2C_584/2012 du 29 juin 2012 consid. 5.1 ; 2C_478/2012 du 14 juin 2012 consid. 2.1). La détention administrative en matière de droit des étrangers doit dans tous les cas respecter le principe de la proportionnalité (cf. art. 5 al. 2 et 36 Cst. et art. 80 et 96 LEI ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_765/2015du 18 septembre 2015 consid. 5.3 ; 2C_334/2015 du 19 mai 2015 consid. 2.2 ; 2C_218/2013 du 26 mars 2013 consid. 5.1 et les références citées). Il convient en particulier d'examiner, en fonction de l'ensemble des circonstances concrètes, si la détention en vue d'assurer l'exécution d'un renvoi ou d'une expulsion constitue une mesure appropriée et nécessaire (cf. art. 5 par. 1 let. f CEDH ; ATF 134 I 92 consid. 2.3 et 133 II 1 consid. 5.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_765/2015 du 18 septembre 2015 consid. 5.3 ; 2C_218/2013 du 26 mars 2013 consid. 5.1 ; 2C_624/2011 du 12 septembre 2011 consid. 2.1) et ne viole pas la règle de la proportionnalité au sens étroit, qui requiert l'existence d'un rapport adéquat et raisonnable entre la mesure choisie et le but poursuivi, à savoir l'exécution du renvoi ou de l'expulsion de la personne concernée (cf. arrêts du Tribunal fédéral 2C_765/2015du 18 septembre 2015 consid. 5.3 ; 2C_334/2015 du 19 mai 2015 consid. 2.2 ; 2C_218/2013 du 26 mars 2013 consid. 5.1 et les références citées ; cf. aussi ATF 130 II 425 consid. 5.2).

4.            Selon l'art. 76 al. 1 let. b ch. 1 LEI, en lien avec l'art. 75 al. 1 let. h LEI, après notification d'une décision de première instance de renvoi ou d'une décision de première instance d'expulsion au sens des art. 66a ou 66abis du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0), l'autorité compétente peut, afin d'en assurer l'exécution, mettre en détention la personne concernée lorsqu'elle a été condamnée pour crime, par quoi il faut entendre une infraction passible d’une peine privative de liberté de plus de trois ans (cf. art. 10 al. 2 CP ; ATA/220/2018 du 8 mars 2018 consid. 4a).

5.            La détention administrative est aussi possible si des éléments concrets font craindre que ladite personne entende se soustraire à son refoulement, en particulier parce qu'elle ne se soumet pas à son obligation de collaborer (art. 76 al. 1 let. b ch. 3 LEI) ou si son comportement permet de conclure qu'elle se refuse à obtempérer aux instructions des autorités (art. 76 al. 1 let. b ch. 4 LEI).

Ces deux dispositions décrivent toutes deux des comportements permettant de conclure à l'existence d'un risque de fuite ou de disparition, de sorte que les deux éléments doivent être envisagés ensemble (cf. arrêts du Tribunal fédéral 2C_381/2016 du 23 mai 2016 consid. 4.1 ; 2C_128/2009 du 30 mars 2009 consid. 3.1).

Selon la jurisprudence, un risque de fuite - c'est-à-dire la réalisation de l'un des deux motifs précités - existe notamment lorsque l'étranger a déjà disparu une première fois dans la clandestinité, qu'il tente d'entraver les démarches en vue de l'exécution du renvoi en donnant des indications manifestement inexactes ou contradictoires ou encore s'il laisse clairement apparaître, par ses déclarations ou son comportement, qu'il n'est pas disposé à retourner dans son pays d'origine. Comme le prévoit expressément l'art. 76 al. 1 let. b ch. 3 LEI, il faut qu'il existe des éléments concrets en ce sens (ATF 140 II 1 consid. 5.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_381/2016 du 23 mai 2016 consid. 4.1 ; 2C_105/2016 du 8 mars 2016 consid. 5.2 ; 2C_951/2015 du 17 novembre 2015 consid. 2.2 ; 2C_658/2014 du 7 août 2014 consid. 1.2).

Lorsqu'il existe un risque de fuite, le juge de la détention administrative doit établir un pronostic en déterminant s'il existe des garanties que l'étranger prêtera son concours à l'exécution du refoulement, soit qu'il se conformera aux instructions de l'autorité et regagnera son pays d'origine le moment venu, c'est-à-dire lorsque les conditions seront réunies ; dans ce cadre, il dispose d'une certaine marge d'appréciation (arrêts du Tribunal fédéral 2C_935/2011 du 7 décembre 2011 consid. 3.3 ; 2C_806/2010 du 21 octobre 2010 consid. 2.1 ; 2C_400/2009 du 16 juillet 2009 consid. 3.1).

6.            Comme toute mesure étatique, la détention administrative en matière de droit des étrangers doit respecter le principe de la proportionnalité (cf. art. 5 al. 2 et 36 Cst. et art. 80 et 96 LEI ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_765/2015 du 18 septembre 2015 consid. 5.3 ; 2C_334/2015 du 19 mai 2015 consid. 2.2 ; 2C_218/2013 du 26 mars 2013 consid. 5.1 et les références citées). Il convient en particulier d'examiner, en fonction de l'ensemble des circonstances concrètes, si la détention en vue d'assurer l'exécution d'un renvoi ou d'une expulsion constitue une mesure appropriée et nécessaire (cf. art. 5 par. 1 let. f CEDH ; ATF 134 I 92 consid. 2.3 et 133 II 1 consid. 5.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_765/2015 du 18 septembre 2015 consid. 5.3 ; 2C_218/2013 du 26 mars 2013 consid. 5.1 ; 2C_624/2011 du 12 septembre 2011 consid. 2.1 ; 2C_974/2010 du 11 janvier 2011 consid. 3.1 et 2C_756/2009 du 15 décembre 2009 consid. 2.1) et ne viole pas la règle de la proportionnalité au sens étroit, qui requiert l'existence d'un rapport adéquat et raisonnable entre la mesure choisie et le but poursuivi, à savoir l'exécution du renvoi ou de l'expulsion de la personne concernée (cf. arrêts du Tribunal fédéral 2C_765/2015 du 18 septembre 2015 consid. 5.3 ; 2C_334/2015 du 19 mai 2015 consid. 2.2 ; 2C_218/2013 du 26 mars 2013 consid. 5.1 et les références citées ; cf. aussi ATF 130 II 425 consid. 5.2).

7.            En l’espèce, M. A______ fait l'objet d'une mesure d'expulsion judiciaire de Suisse d'une durée de 5 ans prononcée le 31 mars 2023 par jugement du Tribunal correctionnel du canton de Genève, mesure exécutée le 23 novembre 2023. En application de l'art. 66c al. 5 CP, le calcul de la durée de l'expulsion judiciaire a débuté le jour du départ effectif de Suisse de l'intéressé, soit le 23 novembre 2023, date à laquelle il a été renvoyé vers la Tunisie. La durée de l'expulsion est ainsi loin d'être terminée.

Sur ce point, les explications du contraint, à teneur desquelles il aurait confondu la durée de la mesure d'expulsion judiciaire avec celle du délai d'épreuve, apparaissent pour le moins peu crédibles au vu du fait qu'il a admis être revenu en Suisse sous une identité usurpée, soit celle de son cousin. A cela s'ajoute que son attention avait été expressément attirée, tant par le tribunal correctionnel, que par le SAPEM sur la durée de l'expulsion judiciaire, étant relevé qu'il ne pouvait ignorer que la libération conditionnelle lui avait été accordée, le 6 novembre 2023, en raison notamment de son projet de réinsertion concret en Tunisie. Il a enfin été, entre 2004 et 2023, refoulé à six reprises du territoire helvétique. Il est ainsi revenu en Suisse, à tout le moins courant janvier 2025, en violation de dite mesure, dans le but, selon ses dires, de réaliser des « petits boulots ».

Il a par ailleurs été condamné, le 1er mars, pour rupture de ban (art. 291 CP) et faux dans les certificats étrangers (art. 252 cum art. 255 CP), à une peine privative de liberté de 180 jours, vu ses nombreux antécédents.

L'assurance de son départ effectif répond en outre à un intérêt public certain et, pour les motifs déjà évoqués ci-dessus, toute autre mesure moins incisive que la détention administrative serait vaine pour assurer sa présence au moment où il devra monter dans l'avion devant le reconduire dans son pays d'origine, étant de surcroit observé qu'à teneur du dossier, il ne dispose pas d'un document d'identité valable, de moyens de subsistance ni d'un domicile, expliquant dormir et être nourri à la mosquée des E______. Au vu des circonstances du cas d'espèce, les mesures de substitution que sont l'assignation à résidence ou l'obligation de se présenter dans un poste de police ne sauraient trouver application.

8.            Au vu de ce qui précède, il appert que les conditions légales de la détention administrative de M. A______ sont clairement réalisées.

9.            Les démarches nécessaires à l'exécution du renvoi doivent être entreprises sans tarder par l'autorité compétente (art. 76 al. 4 LEI). Il s'agit, selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, d'une condition à laquelle la détention est subordonnée (arrêt 2A.581/2006 du 18 octobre 2006 ; cf. aussi ATA/315/2010 du 6 mai 2010 ; ATA/88/2010 du 9 février 2010).

10.        En l'espèce, les autorités ont agi avec diligence et célérité puisqu'elles ont, le 3 mars 2025, sollicité la délivrance d'un document de voyage supplétif en faveur du contraint, le passeport tunisien de ce dernier étant échu. Par ailleurs, au vu des déclarations de M. A______ en audience, le SEM prendra contact avec l'Ambassade de Tunisie sans délai afin de solliciter, en parallèle de la demande formée par le contraint, avec l'aide de son conseil, un laissez-passer, lequel devrait être délivré dans un délai de quinze jours ouvrables environ.

11.        Selon l'art. 79 al. 1 LEI, la détention en vue du renvoi ou de l'expulsion ne peut excéder six mois au total. Cette durée maximale peut néanmoins, avec l’accord de l’autorité judiciaire cantonale, être prolongée de douze mois au plus lorsque la personne concernée ne coopère pas avec l’autorité compétente (art. 79 al. 2 let. a LEI) ou lorsque l’obtention des documents nécessaires au départ auprès d’un État qui ne fait pas partie des États Schengen prend du retard (art. 79 al. 2 let. b LEI).

12.        Dans tous les cas, la durée de la détention doit être proportionnée par rapport aux circonstances d'espèce (arrêts du Tribunal fédéral 2C_18/2016 du 2 février 2016 consid. 4.2 ; 2C_218/2013 du 26 mars 2013 consid. 2.3).

13.        En l'espèce, la durée de détention respecte le cadre légal et n'apparaît pas disproportionnée au vu des éléments rappelés ci-dessus et du fait, que, dès l'accord des autorités tunisiennes obtenu, un délai minimum de quinze jours ouvrables est nécessaire à la réservation d'un vol.

A cela s'ajoute, qu'au vu de la situation médicale de l'intéressé, qui a déclaré être diabétique et asthmatique, il ne peut être exclu qu'un certificat d’aptitude au vol en sa faveur soit nécessaire.

14.        Au vu de ce qui précède, il y a lieu de confirmer l'ordre de mise en détention administrative de M. A______ pour une durée de deux mois.

15.        Conformément à l'art. 9 al. 6 LaLEtr, le présent jugement sera communiqué à M. A______, à son avocat et au commissaire de police. En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), il sera en outre communiqué au secrétariat d'État aux migrations.


 

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             confirme l’ordre de mise en détention administrative pris par le commissaire de police le 1er mars 2025 à 15h25 à l’encontre de Monsieur A______ pour une durée de deux mois, soit jusqu'au 30 avril 2025 inclus ;

2.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 10 al. 1 LaLEtr et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les 10 jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Au nom du Tribunal :

La présidente

Laetitia MEIER DROZ

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée à de Monsieur A______, à son avocat, au commissaire de police et au secrétariat d'État aux migrations.

Genève, le

 

La greffière