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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/3102/2024

JTAPI/132/2025 du 04.02.2025 ( LDTR ) , IRRECEVABLE

recours terminé sans jugement

Descripteurs : QUALITÉ POUR RECOURIR;VOISIN;OBJET DU LITIGE
Normes : LPA.60.letb
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3102/2024 LDTR

JTAPI/132/2025

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 4 février 2025

 

dans la cause

 

Madame A______, représentée par Me Fanny ROULET-TRIBOLET, avocate, avec élection de domicile

 

contre

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE-OAC

Madame B______, représentée par Me Bertrand REICH, avocat, avec élection de domicile


EN FAIT

1.             Madame A______ est propriétaire d'un appartement situé au 3ème étage de l'immeuble sis ______[GE] (ci-après : l’immeuble).

Cet appartement fait partie de la propriété par étages C______ (ci-après : la PPE), laquelle est administrée par la Régie ______ SA (ci-après : la Régie).

2.             En 2012, Madame B______ est devenue propriétaire du lot ______ correspondant à un appartement au 3ème étage (ci-après : l’appartement) de l’immeuble, soit en face de celui de Mme A______, suite à une donation de son père, Monsieur D______.

Ce dernier, qui s'en est réservé l'usufruit, habite dans l'appartement.

3.             Le 11 mars 2024, lors d’une assemblée extraordinaire de la PPE, les copropriétaires ont été informés du projet de D______ de réaménager son appartement. À cette occasion, Monsieur E______ du bureau F______ SA a expliqué que l’appartement, qui possédait deux portes d'entrées, serait séparé en deux parties dont l'une destinée à sa fille lors de ses passages à Genève. Il était notamment question d'édifier un mur de séparation et d'effectuer divers aménagements (cuisine, salle de bain, etc.), ceci notamment sans changer l'affectation des pièces. Ces travaux, planifiés et annoncés en amont, débuteraient en septembre 2024, pour une durée d'une année, dont deux mois au maximum pour les grosses nuisances.

4.             Divers échanges de courriel s’en sont suivis entre Mme A______, respectivement son conseil, et l'administrateur de la PPE.

5.             Par courrier du 10 juin 2024, faisant suite à l’avis aux habitants du 5 juin 2024 relatifs aux travaux de rénovation de l'appartement, Mme A______, sous la plume de son conseil, a interpellé l'office des autorisations de construire (ci-après : OAC) au sujet desdits travaux, souhaitant s'assurer qu'aucune autorisation n'était réellement nécessaire pour ces derniers, comme indiqué par M. E______.

6.             Le 18 juin 2024, Mme A______ a envoyé à l'OAC une photographie démontrant l'installation d'une sapine sur l’immeuble, après que le chef de l'inspection de la construction et des chantiers ait confirmé à son conseil « qu'interdiction a été faite à la famille Hofmann de poursuivre ses travaux et que le dépôt d'une autorisation de construire a été exigée ».

7.             Le même jour, elle a interpellé la Régie pour savoir si d'autres travaux étaient en cours dans l’immeuble.

8.             Par décision du ______ 2024, le département a délivré à B______ l'autorisation de construire APA 1______ portant sur la transformation et rénovation de son appartement, laquelle a été publiée dans la Feuille d'avis officielle de la République et canton de Genève (ci-après : FAO).

9.             Par acte du 13 septembre 2024, sous la plume de son conseil, Mme A______ a interjeté recours auprès du Tribunal administratif de première instance (ci‑après : TAPI ou le tribunal) contre cette décision, concluant, principalement, à son annulation, à ce qu’il soit dit que les travaux n’étaient pas en conformité avec la demande, respectivement l’APA 1______ et, subsidiairement, au renvoi de la cause au département pour nouvelle décision, le tout sous suite de frais et dépens.

Préalablement, elle a requis la tenue d’une audience de comparution personnelle des parties avec l’audition de M. E______, l’apport du dossier du département, un transport sur place et, à titre provisionnel, la suspension des travaux dans l’appartement. À cet égard, elle relevait que les travaux avaient commencé le 10 juin 2024 sans autorisation, soit illégalement. Une fois l’APA délivrée, l’intimée n'avait pas daigné attendre son entrée en force pour les reprendre. Partant, elle sollicitait la suspension des travaux jusqu'à ce qu'une décision au fond soit rendue, soit jusqu'à droit jugé de cette procédure.

Copropriétaire d'un appartement sur le même palier que celui de B______, elle avait un intérêt personnel et actuel à ce que ce dernier, partiellement accolé au sien, ne soit pas modifié, respectivement, à l'annulation de l'autorisation délivrée.

Au fond, l'autorisation devait être annulée dès lors qu’elle ne correspondait pas à la réalité des transformations entreprises. Le bureau d'architecte mandaté par l’intimée avait déposé des plans non conformes à la réalité, respectivement à ce qui avait été annoncé lors de l'assemblée extraordinaire. Ainsi, alors qu’à cette occasion, il avait annoncé que l'appartement serait « sépar[é] en deux parties sans en modifier l'affectation des pièces », un « cellier » était apparu sur les plans, à la place des salles de bain de l'appartement avant transformation. Par ailleurs, il était surprenant de trouver, sous le titre « cuisines », un coût de CHF 661’000.-, qui correspondait en pratique au tarif usuel de deux cuisines, alors que les plans n’en faisaient apparaître qu'une seule. Tout portait à croire que le « cellier », dont l’emplacement questionnait, était en réalité une nouvelle cuisine. De plus, vu la configuration de l'appartement après travaux, il semblait s'agir, non pas d'une simple « séparation en deux parties » qui resteraient accessibles l'une avec l'autre, mais d’une réelle séparation en deux appartements, distincts l'un de l'autre. L'existence d'une deuxième cuisine, le positionnement des armoires dans le « salon » de l'appartement coté balcon 1 et de la salle à manger de l'appartement coté balcon 2 et l'installation d'un deuxième compteur, démontraient clairement l’édification de deux appartements distincts avec chacun ses propres chambres, cuisines, salles de bain et espaces de vie.

L’APA violait également la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05) et la loi sur les démolitions, transformations et rénovations de maisons d'habitation (mesures de soutien en faveur des locataires et de l'emploi) du 25 janvier 1996 (LDTR - L 5 20). Dans la mesure où le cellier était en réalité une nouvelle cuisine, cette nouvelle pièce technique ne respectait pas les art. 47 et 54 LCI en particulier, rien n'indiquant sur les plans après travaux qu'une ouverture et/ou des moyens de ventilations existaient.

Elle a joint un chargé de pièces.

10.         Par courrier du 1er octobre 2024, le département, se déterminant sur les mesures provisionnelles requises, a informé le tribunal s’en rapporter à justice.

11.         Dans ses observations sur mesures provisionnelles du 1er octobre 2024, B______, sous la plume d’un conseil, a conclu à ce que la recourante soit déboutée de toutes ses conclusions et au retrait de l’effet suspensif à son recours.

Le recours était irrecevable, faute de qualité pour recourir de la recourante, laquelle ne faisait valoir aucun avantage pratique qu'elle retirerait de son éventuelle admission. Ses griefs ne pouvaient davantage être pris en compte, dès lors qu'ils portaient sur l’aménagement intérieur de l'appartement. Partant, elle ne saurait également se prévaloir du moindre intérêt légitime à l’octroi de l’effet suspensif à son recours, alors que ce dernier entrainait, à l’inverse, des conséquences extrêmement fâcheuses pour elle et son père. Les travaux avaient en effet débuté en juin 2024, ses mandataires considérant qu’ils n’étaient pas soumis à autorisation, compte tenu de leur nature et leur modestie. Cela étant, le département ayant estimé que tel n’était pas le cas, elle avait requis et obtenu une autorisation de construire en procédure accélérée. Il ne s'agissait pas de créer deux appartements distincts. Les travaux ne comportaient pas de création d'une deuxième cuisine ni la pose d'un compteur électrique supplémentaire. Les pièces demeuraient affectées à du logement et les millièmes du lot n’étaient pas modifiés. Après comme avant les travaux, il s'agira toujours d'un seul logement, rénové et partiellement réaménagé. Ignorant qu’un recours avait été déposé, elle avait débuté de bonne foi les travaux autorisés, profitant de l'absence de son père. Ceux-ci avaient été immédiatement arrêtés à réception du courrier du tribunal. Cela étant, elle et son père se trouvaient désormais dans la situation très inconfortable d'un chantier interrompu dans le logement principal de celui-là, sans savoir si et quand les travaux pourraient reprendre et le cas échéant à quelles conditions, raison pour laquelle elle requérait le retrait de l’effet suspensif au recours afin de pouvoir les poursuivre.

12.         Dans ses observations au fond du 29 octobre 2024, l’intimée a conclu à l’irrecevabilité du recours, soit à son rejet au fond, sous suite de frais et dépens, reprenant en substance les explications données dans ses précédentes écritures.

Comme en attestaient les plans de l’appartement actuel et du projet autorisé qu’elle joignait, celui-ci serait légèrement remanié sur le plan de son organisation interne, avec un agrandissement de la salle à manger et une réduction de la surface de la cuisine, l’agrandissement des deux salles de bains existantes, le remplacement du dressing par un cellier et la création de placards intégrés. Après comme avant, cet appartement disposerait de trois chambres, un grand salon, une salle à manger, une cuisine, deux salles de bains, un WC visiteurs et deux balcons. Un cellier remplacerait le dressing. Faute d’impact desdits travaux sur la situation de la recourante, laquelle n’était par ailleurs pas visée plus que quiconque par les dispositions légales qu’elle invoquait, son recours devait être déclaré irrecevable.

En tout état, ses griefs ne pouvaient être pris en compte dès lors qu’ils portaient uniquement sur l’aménagement intérieur de l’appartement et que les travaux autorisés ne modifieraient en rien sa situation de fait ou de droit. L’examen de la conformité d’une construction à l’autorisation de construire échappait pour le surplus à l’examen des tribunaux. Enfin, l’emplacement du cellier relevait du choix de l’intimée et de son père qui ne saurait être remis en cause par la recourante.

13.         Dans sa réplique sur mesures provisionnelles et au fond et ses observations sur effet suspensif du 31 octobre 2024, la recourante a rappelé les procédés inappropriés de l’intimée consistant à entreprendre des travaux sans requérir d’autorisation puis à les poursuivre sans attendre l’entrée en force de ladite autorisation. Elle persistait à penser que l’appartement disposerait de deux cuisines, comme cela ressortait d’ailleurs des plans initiaux déposés auprès de la Régie et du devis du chantier. Or, c’était précisément cette deuxième cuisine qui serait susceptible de causer de graves dommages à l’immeuble et aux appartements voisins, avec, partant, un impact sur leur valeur. Doubler l’appartement multiplierait également les nuisances pour le voisinage, pouvant notamment permettre, au décès de D______, la location de la moitié de celui-ci. Elle s’interrogeait par ailleurs sur la nécessité de travaux d’une telle ampleur pour une cohabitation qui avait de grande chance d’être brève. Dans ces conditions, elle disposait incontestablement de la qualité pour recourir.

Elle s’opposait enfin au retrait de l’effet suspensif qui reviendrait à gratifier les propriétaires s’empressant de démarrer, sans droit, les travaux.

Elle a joint un avis de reprise des travaux fin août 2024 ainsi que les plans initiaux du 5 février 2024.

14.         Le 6 novembre 2024, le département a informé le tribunal s’en rapporter à justice quant à la demande de retrait de l’effet suspensif formulée par B______.

15.         Dans ses écritures du 11 novembre 2024, l’intimée a relevé que la perte de valeur d’un bien ne saurait conférer la qualité pour recourir. Or, il s’agissait ici de la seule allégation de la recourante, laquelle soutenait que les travaux autorisés auraient pour conséquences la création d’une deuxième cuisine et de deux logements, avec les nuisances et futures locations via AirBnb qui en découleraient. Cette position était contestée dès lors qu’avant comme après les travaux il n’y aurait en réalité qu'un seul logement. Le recours ne pouvait ainsi qu'être déclaré irrecevable et il ne se justifiait par conséquent pas de lui accorder le moindre effet.

16.         Par décision du 19 novembre 2024 (DITAI/563/2024), le tribunal, réservant la question de la recevabilité du recours, a rejeté la demande de mesures provisionnelles formée par Mme A______, rappelé en tant que de besoin que le recours avait effet suspensif, et rejeté la demande de retrait de l'effet suspensif au recours formée par B______.

17.         Dans ses observations du 22 novembre 2024, le département a conclu à l’irrecevabilité du recours, soit subsidiairement à son rejet, sous suite de frais et dépens.

Le recours était irrecevable faute d'intérêt personnel de la recourante à contester la décision querellée. La proximité avec l'objet du litige ne suffisait en effet pas à elle seule à conférer la qualité pour recourir contre l'octroi d'une autorisation de construire, les voisins devant en outre retirer un avantage pratique de l'annulation ou de la modification de la décision contestée qui permette d'admettre qu'ils étaient touchés dans un intérêt personnel se distinguant nettement de l'intérêt général des autres habitants de la collectivité concernée de manière à exclure l'action populaire. Les nuisances liées au chantier ne pouvaient par ailleurs à elles seules fonder un intérêt pratique à recourir. Or, en l'espèce, la décision litigieuse ne portait que sur la transformation et la rénovation de l'appartement, soit des travaux intérieurs à celui-ci et si le critère de proximité n'était pas contesté, il peinait à discerner l'atteinte directe que pourrait subir la recourante par le projet ou l'avantage pratique qu'elle retirerait de l'annulation ou de la modification de la décision litigieuse.

Subsidiairement, au fond, le recours était sans fondement, la recourante se contentant d’exprimer ses craintes quant à la mise en œuvre de l'autorisation de construire litigieuse, sans jamais remettre en cause son bien-fondé. La lecture du recours ne lui permettait au demeurant pas de comprendre quelle disposition légale aurait été violée par la délivrance de l’APA 1______. Le moment venu, il lui appartiendrait de veiller à la correcte exécution de sa décision, conformément aux compétences que lui octroyaient les art. 129 et ss LCI. Les griefs de la recourante étaient donc exorbitants au présent litige et devaient être déclarés irrecevables.

18.         La recourante a répliqué le 9 décembre 2024 persistant intégralement dans les conclusions de son recours.

L'autorisation avait été délivrée sur la base d’un dossier, à tout le moins, contestable, validant l'édification d'une deuxième cuisine et l'installation du nouveau compteur électrique, répertoriés dans l'estimation sommaire des coûts de construction.

Les travaux envisagés étaient avec certitude susceptibles d'engendrer de très nombreuses nuisances qui l’impacteraient incontestablement et durablement outre mesure, ainsi notamment les nuisances olfactives supplémentaires ou encore l'humidité qu'une cuisine impliquait, d'autant plus si ladite cuisine n'était pas dotée d'un système d'aération adéquat, avec un risque de diminution du loyer et de baisse de la valeur vénale de son bien. Elle rappelait en outre les nuisances qui pourraient découler de la location d’un tel appartement. Elle tirerait ainsi un avantage personnel et pratique à l'annulation de l'autorisation querellée.

Au fond, ne pas annuler l'autorisation reviendrait à compromettre la stabilité des autorisations de construire, dont le dossier fait normalement l'objet d'un contrôle par le département intimé et à tolérer qu’il délivre n'importe quelle autorisation sans la vérifier suffisamment.

19.         Dans sa duplique du 17 décembre 2024, B______ a persisté intégralement dans les termes et conclusions de son mémoire responsif sur le fond.

L'autorisation délivrée se basait sur le plan fourni qui ne comportait pas deux cuisines. Elle ne permettait donc pas la création d'une seconde cuisine, puisqu'elle n'avait pas été sollicitée. Un second compteur n'avait pas davantage été prévu. L'autorisation délivrée ne conduisait enfin pas à la création de deux logements. Les travaux réellement autorisés - et non ceux qui avaient été un temps envisagés et auxquels elle avait renoncé et qui n'avaient donc pas été autorisés - n'auraient ainsi pas le moindre impact à l'endroit de la recourante, ce qui ressortait a contrario de son écriture. Son recours était dès lors irrecevable, faute de qualité pour recourir. En outre, de jurisprudence constante, l'argument de la perte de valeur du bien « ressortit au droit privé et est exorbitant au litige » de sorte qu'il ne pouvait pas être pris en compte.

Le dossier de la cause étant complet et en état d'être jugé, les mesures d'instruction requises par la recourante pouvaient être déclinées.

Au fond, le recours interjeté ne pourrait qu'être rejeté, les travaux effectivement autorisés étant conformes aux dispositions légales et règlementaires en vigueur.

20.         Dans sa duplique du 10 janvier 2025, le département a également persisté dans les développement et conclusions prises dans ses précédentes écritures, rappelant que seuls les plans visés ne varietur faisaient foi. Disproportionnées et inutiles, les mesures d’instructions sollicitées devaient être écartées.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés contre les décisions prises par le département en application de la LDTR et de la LCI (art. 115 al. 2 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05, art. 143 et 145 al. 1 LCI ; art. 45 al. 1 LDTR).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

3.             Le droit d'être entendu garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) comprend notamment le droit, pour l'intéressé, de s'exprimer sur les éléments pertinents avant qu'une décision ne soit prise touchant sa situation juridique, d'avoir accès au dossier, de produire des preuves pertinentes, d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l'administration des preuves essentielles ou, à tout le moins, de s'exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre. Toutefois, le juge peut renoncer à l'administration de certaines preuves offertes, lorsque le fait dont les parties veulent rapporter l'authenticité n'est pas important pour la solution du cas, lorsque les preuves résultent déjà de constatations versées au dossier ou lorsqu'il parvient à la conclusion qu'elles ne sont pas décisives pour la solution du litige ou qu'elles ne pourraient l'amener à modifier son opinion (ATF 145 I 167 consid. 4.1 ; 140 I 285 consid. 6.3.1 et les arrêts cités ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_576/2021 du 1er avril 2021 consid. 3.1 ; 2C_946/2020 du 18 février 2021 consid. 3.1 ; 1C_355/2019 du 29 janvier 2020 consid. 3.1).

4.             Ces principes s'appliquent notamment à la tenue d'une inspection locale, en l'absence d'une disposition cantonale qui imposerait une telle mesure d'instruction (ATF 120 Ib 224 consid. 2b ; 112 Ia 198 consid. 2b ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_243/2013 du 27 septembre 2013 consid. 3.2.1), ce qui n'est pas le cas à Genève.

5.             Par ailleurs, le droit d’être entendu ne comprend pas le droit d’être entendu oralement (ATF 140 I 68 consid. 9.6.1 ; 134 I 140 consid. 5.3 ; 130 II 425 consid. 2.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_668/2020 du 22 janvier 2021 consid. 3.3), ni le droit à l'accomplissement d'une inspection locale (ATF 130 II 425 consid. 2.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_725/2019 du 12 septembre 2019 consid. 4.1 ; 2C; ATA/720/2012 du 30 octobre 2012).

6.             Sont en l'occurrence sollicités la tenue d’une audience de comparution personnelle des parties avec l’audition de M. E______, l’apport du dossier du département et un transport sur place. Or, il n'existe pas un droit à l'accomplissement de tels actes d'instruction et, compte tenu de ce qui suit, ceux-ci n'apparaissent pas nécessaires pour résoudre les questions que posent le litige, le dossier contenant les éléments utiles permettant au tribunal de statuer en connaissance de cause. Il n'y sera dès lors pas procédé.

7.             La recevabilité du recours suppose encore que son auteur dispose de la qualité pour recourir.

8.             À teneur de l'art. 60 let. b LPA, toute personne qui est touchée directement par une décision et a un intérêt personnel digne de protection à ce qu'elle soit annulée ou modifiée sont titulaires de la qualité pour recourir..

9.             L'intérêt digne de protection représente tout intérêt pratique ou juridique à demander la modification ou l'annulation de la décision attaquée. Il consiste donc dans l'utilité pratique que l'admission du recours apporterait au recourant, en lui évitant de subir un préjudice de nature économique, idéale, matérielle ou autre que la décision attaquée lui occasionnerait. Il implique que le recourant doit se trouver dans une relation spéciale, étroite et digne d'être prise en considération avec l'objet de la contestation et qu'il soit touché de manière directe, concrète et dans une mesure et avec une intensité plus grandes que la généralité des administrés de manière à empêcher l'action populaire. Cet intérêt digne de protection ne doit pas nécessairement être de nature juridique, un intérêt de fait étant suffisant
(ATF 144 I 43 consid. 2.1 ; 143 II 506 consid. 5.1; arrêts du Tribunal fédéral 1C_206/2019 du 6 août 2019 consid. 3.1 ; 1C_96/2017 du 21 septembre 2017 consid. 2.1).

10.         En matière d'autorisation de construire, le Tribunal fédéral reconnaît la qualité pour agir aux voisins s'ils invoquent la violation de dispositions du droit des constructions qui sont destinées à les protéger ou qui ont été édictées à la fois dans l'intérêt public et dans celui des voisins (ATF 127 I 44 consid. 2c p. 46). Outre les propriétaires voisins, les propriétaires par étage, les superficiaires, les locataires et les preneurs à ferme sont susceptibles de remplir cette condition (arrêt du Tribunal fédéral 1C_572/2011 du 3 avril 2012 consid. 1.2 ; ATA/205/2015 du 24 février 2015 ; Heinz AEMISEGGER/Stephan HAAG, Commentaire pratique de la protection juridique en matière d'aménagement du territoire, 2010, p. 53 n. 60 ad art. 33 de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire du 22 juin
1979 - LAT - RS 700).

La proximité avec l'objet du litige ne suffit pas à elle seule à conférer, par exemple, au voisin, respectivement au locataire d'un immeuble, la qualité pour recourir contre l'octroi d'une autorisation de construire. Celui-ci doit en outre retirer un avantage pratique de l'annulation ou de la modification de la décision contestée qui permette d'admettre qu'il est touché dans un intérêt personnel se distinguant nettement de l'intérêt général des autres habitants de la collectivité concernée, de manière à exclure l'action populaire ; il doit ainsi invoquer des dispositions du droit public des constructions susceptibles d'avoir une incidence sur sa situation de fait ou de droit (ATF 137 II 30 consid. 2.2.3 et 2.3 ; 133 II 249 consid. 1.3.1, 468 consid. 1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_61/2011 du 4 mai 2011 consid. 1).

Il incombe au recourant d'alléguer les faits propres à fonder sa qualité pour agir lorsqu'ils ne ressortent pas à l'évidence de la décision attaquée ou du dossier en cause (ATF 133 II 249 consid. 1.1 ; 120 Ia 227 consid. 1 ; 115 Ib 505 consid. 2), de prouver qu'il est atteint par la décision et de rendre vraisemblable que l'annulation ou la modification de la décision peut influencer sa situation de fait ou de droit (ATF 123 II 115 consid. 2a).

11.         En l'espèce, il s'agira dans un premier temps de définir l'objet du litige dès lors que la recevabilité du recours et des griefs invoqués en dépendra.

12.         A cet égard, il sera rappelé que les griefs soulevés dans le cadre d'un recours doivent se rapporter à l'objet du litige tel qu'il est circonscrit par la décision attaquée (cf. ATF 139 IV 1 consid. 4.3 ; 133 IV 119 consid. 6.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_313/2019 du 24 juillet 2019 consid. 6.2) et le recourant doit se référer à des motifs qui entrent dans le pouvoir d'examen de l'autorité de recours (ATA/99/2012 du 21 février 2012 consid. 4 ; Benoît BOVAY, Procédure administrative, 2000, p. 387).

De même, il doit invoquer des dispositions de droit des constructions susceptibles d'avoir une incidence sur sa situation de fait ou de droit (ATF 137 II 30 consid. 2.2.3 et 2.3 ; 133 II 249 consid. 1.3.1 ; 133 II 468 consid. 1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_61/2011 du 4 mai 2011 consid. 1). Le Tribunal fédéral considère en effet que le recourant n'est pas libre d'invoquer n'importe quel grief. Il ne peut en effet se prévaloir d'un intérêt digne de protection à invoquer des dispositions édictées dans l'intérêt général ou dans l'intérêt de tiers que si elles peuvent avoir une influence sur sa situation de fait ou de droit (ATF 137 II 30 consid. 2.2.3 ; 133 II 249 consid. 1.3.2 9). La jurisprudence a ainsi souligné que l'intérêt pratique est un élément central pour apprécier la recevabilité des griefs du recourant : le voisin peut être habilité à se prévaloir de normes qui ne sont pas destinées à le protéger si l'admission de son grief est susceptible de lui procurer un avantage pratique (ATF 139 II 499 consid. 2.2 ; 137 II 30 consid. 2.2.3-2.3 9). Un recours dont le seul but est de garantir l'application correcte du droit demeure en effet irrecevable, parce qu'assimilable à une action populaire (ATF 144 I 43 consid. 2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral
1C_ 593/2019 du 19 août 2020 consid. 1.2).

13.         La recourante conclut à l’annulation de l’APA délivrée. Cependant, il ressort des motifs invoqués à l’appui de son recours que sa volonté n’est pas de contester, en soi, les transformations et rénovations autorisées mais la séparation en deux de l’appartement, la création d’une deuxième cuisine et l’installation d’un deuxième compteur du fait des nuisances en découlant à son endroit et pour son appartement.

Or, en l’espèce et pour rappel, à teneur des plans et pièces produits dans le cadre de la requête en autorisation, cette dernière concerne la transformation et rénovation de l’appartement de l’intimée lequel est remanié sur le plan de son organisation interne, avec un agrandissement de la salle à manger et une réduction de la surface de la cuisine, l’agrandissement des deux salles de bains existantes, le remplacement du dressing par un cellier et la création de placards intégrés. Après comme avant, cet appartement disposera de trois chambres, d’un grand salon, d’une salle à manger, d’une cuisine, de deux salles de bains, d’un WC visiteurs et de deux balcons. Un cellier remplacera le dressing. Sur la base des plans visés ne varietur, le tribunal ne peut ainsi que constater qu’il ne s'agit pas de créer deux appartements distincts et que les travaux ne visent pas la création d'une deuxième cuisine ni la pose d'un compteur électrique supplémentaire.

Partant, dans la mesure où la décision attaquée délimite principalement, au même titre que les conclusions de la recourante, l’objet du litige, force est pour le tribunal de constater que les éléments dont se plaint la recourante sont exorbitants à la présente procédure.

Il n’en va pas différemment de l’allégation que l’autorisation aurait été délivrée sur la base d’un dossier contestable, étant rappelé que seuls les plans visés ne varietur font foi et que, partant, seuls les objets autorisés sur la base de ces derniers pourront être réalisés. Quant à la conformité de l'exécution de la décision attaquée, son contrôle échappe aux tribunaux (ATA/1829/2019 du 17 décembre 2019 ; ATA/1529/2019 du 15 octobre 2019 consid. 6).

Par conséquent, la condition posée par la jurisprudence, selon laquelle un recourant doit retirer un avantage pratique de l’annulation ou de la modification de la décision contestée pour que la qualité pour recourir lui soit reconnue, n’apparaît ici pas remplie, la recourante ne pouvant se prévaloir d’aucun intérêt juridiquement protégé à l’admission de son recours, lequel sera déclaré irrecevable.

14.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), la recourante est condamnée au paiement d'un émolument s'élevant à CHF 700.- ; il est couvert par l'avance de frais versée à la suite du dépôt du recours. Le solde de cette avance lui sera restitué.

15.         Vu l'issue du litige, une indemnité de procédure de CHF 700.-, à la charge de la recourante, sera allouée à l'intimée (art. 87 al. 2 à 4 LPA et 6 RFPA).


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

 

1.             déclare irrecevable le recours interjeté le 13 septembre 2024 par Madame A______ contre la décision du département du territoire du ______ 2024 ;

2.             met un émolument de CHF 700.-, à la charge de Madame A______, lequel est couvert par l’avance de frais ;

3.             ordonne la restitution à la recourante du solde de l’avance de frais de CHF 200.- ;

4.             condamne Madame A______, à verser à Madame B______ une indemnité de procédure de CHF 700.- ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Siégeant : Marielle TONOSSI, présidente, Suzanne AUBERT-LEBET, Claire BOLSTERLI, François HILTBRAND et Ricardo PFISTER, juges assesseurs

Au nom du Tribunal :

La présidente

Marielle TONOSSI

 

Copie conforme de cette décision est communiquée aux parties.

Genève, le

 

Le greffier