Décisions | Tribunal administratif de première instance
JTAPI/75/2025 du 23.01.2025 ( LCI ) , REJETE
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||||
POUVOIR JUDICIAIRE
JUGEMENT DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE PREMIÈRE INSTANCE du 23 janvier 2025
|
dans la cause
Madame A______ et Monsieur B______ , représentés par Me Julien BLANC, avocat, avec élection de domicile
contre
DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE-OAC
Monsieur C______, représenté par Me Guerric CANONICA, avocat, avec élection de domicile
1. Monsieur C______ est propriétaire de la parcelle n° 1______ de la commune de D______ (ci-après : la commune), à l’adresse 2______, D______.
2. Madame A______ et Monsieur B______ sont propriétaires de la parcelle n° 3______, 4______, de la commune.
3. Ces parcelles, situées en zone 5, sont adjacentes. La parcelle n° 1______ est le fond servant d’une servitude de passage à pied et véhicule inscrite au Registre foncier.
4. Par requête déposée le 19 mars 2024, M. C______ a sollicité, par le biais de son mandataire, une autorisation de construire portant sur la construction d'un abri à vélos et la mise en conformité d'un couvert à voitures et d'un portail avec clôtures sur sa parcelle.
Cette requête a été enregistrée sous le numéro de référence APA 5______/1.
5. Dans le cadre de son instruction, les préavis suivants ont notamment été émis :
- favorable sans observations, le 15 mai 2024, de la direction des autorisations de construire (DAC). Ce préavis faisait suite à un premier préavis du 22 mars 2024, dans lequel elle requérait la modification du projet afin de respecter les 100 m2 de constructions de peu d'importance (CDPI) admis ;
- favorable sans observations, le 10 mai 2024, de la commune ;
- favorable sans observations, le 8 mai 2024 du service des monuments et des sites (ci-après : SMS), s’agissant de la pose d’une clôture entre parcelles privées.
6. Par décision du ______ 2024, le département du territoire (ci-après : DT ou le département) a délivré l'autorisation de construire requise, laquelle a été publiée dans la Feuille d'avis officielle de la République et canton de Genève (ci-après : FAO) du même jour.
7. Par acte du 24 juin 2024, agissant sous la plume d’un mandataire, les époux A______ et B______ ont recouru auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le TAPI) à l'encontre de cette décision concluant, sous suite de frais et dépens, à ce que la nullité de l'autorisation de construire APA 5______/1 soit constatée, respectivement à son annulation, et à ce qu’il soit dit et constaté que le couvert à voitures et le portail avec clôture construits sans autorisation par M. C______ n’étaient pas conformes au droit.
Au fond, la surface des constructions prévues par l'autorisation dépassait aussi bien la surface maximale relative de 50 m2 que la surface absolue de 100 m2 prévues pour les CDPI. Ils se référaient aux pièces 7, 9 et 11 du chargé qu’ils joignaient. D'autre part, la distance aux limites parcellaires prévue par l'art. 69 de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05) n’était pas respectée en l'espèce et nécessiterait une dérogation qui ne pouvait pas être accordée en procédure accélérée. L'autorisation, ne pouvant dès lors être délivrée en procédure accélérée, elle était nulle de plein droit.
La décision était par ailleurs gravement viciée. En effet, avec une distance à la limite de leur propriété variant entre 1,99 et 1,20 m pour le couvert à vélo, l'autorisation ne pouvait pas être délivrée. Quant au couvert à voitures, situé à moins de 5m de leur parcelle, il ne pouvait en aucun cas être autorisé sur mise en conformité, étant rappelé qu’une dérogation était en tout état impossible en procédure accélérée.
Ils ont joint un chargé de pièces.
8. Dans ses observations du 30 août 2024, le département a conclu au rejet du recours sous suite de frais et dépens. Il a transmis son dossier.
La procédure accélérée avait, à juste titre, été appliquée dès lors que les constructions litigieuses étaient des CDPI. Il ressortait en effet des plans que la surface du couvert à voiture était de 29.16 m2 (Plan B03.01 Surfaces CDPI version du 14 mai 2024) alors que la surface totale des CDPI ne dépassait pas les 100 m2. La pièce 7 sur laquelle se fondaient les recourants représentait en réalité la surface totale des couverts, y compris les surfaces qui ne devaient pas être comptabilisées comme CDPI, selon sa directive relative aux CDPI (cf. Directive 024-v7 p. 3 ;
ci-après : la directive CDPI), soit les avant-toits. Quant aux pièces 9 et 11, elles concernaient la DD 6______ (sic) qui avait fait l'objet d'un refus d'entrée de la part de la DAC et étaient exorbitantes au présent litige.
La construction projetée respectait par ailleurs les prescriptions légales en matière de distance aux limites de propriété, la distance de 1.2 m jusqu’à la limite parcellaire étant parfaitement conforme aux art. 68 LCI et 243 du règlement d’application de la loi sur les constructions et les installations diverses du 27 février 1978 (RCI – L 5 05.01). Il ressortait d'ailleurs des plans au dossier que cette construction s'inscrivait parfaitement dans le gabarit décrit à l'art. 3 al. 3 RCI à la limite de propriété. Le raisonnement des recourants ne tenait pas compte du fait que le projet portait sur une CDPI.
9. Dans le délai prolongé au 30 septembre 2024 pour ses observations, M. C______, sous la plume d’un conseil, a conclu à l’irrecevabilité du recours à la forme et à son rejet sur le fond, sous suite de frais et dépens.
Les recourants faisaient un amalgame entre la DD 6______ (refus d’entrée) et l’APA 5______/1, objet de la présente procédure.
Ils ne démontraient pas leur qualité pour recourir.
Au fond, ils se fondaient sur des pièces irrelevantes ou dont ils faisaient une lecture erronée pour prétendre que la surface des constructions visées par l'autorisation dépasserait aussi bien la surface maximale relative de 50m2 que celle absolue de 100 m2 admises pour les CDPI. Or, en l’espèce, les avant-toits du couvert à voitures ne devant pas être pris en compte, sa surface était inférieure à 50 m2 et les constructions bien des CDPI permettant que la demande soit traitée en procédure accélérée. Enfin, s’agissant de CDPI, celles-ci pouvaient être édifiées à la limite de propriété ou à une distance inférieure à celles prévues à l'art. 69 LCI (art. 86 LCI et 243 al. 1 let. c RCI). Aucune dérogation au sens de l'art. 3 al. 1 let. a LCI n'était dès lors nécessaire.
Il a joint un chargé de pièces.
10. Par réplique du 22 octobre 2024, les recourants ont persisté dans leurs motifs et conclusions.
Voisins de l’intimé, il était évident qu’ils subissaient directement les impacts des constructions de ce dernier, réalisées initialement sans autorisation, implantées à une distance non autorisée de leur parcelle et sans que la procédure applicable n’ait été respectée.
Pour le surplus et pour rappel, la demande d'autorisation querellée portait sur une construction existante, dans sa grande majorité, puisque le couvert à voitures avait d'ores et déjà été construit, sans aucune autorisation. Or, il s'avérait que ce bâtiment était complètement différent du bâtiment prévu par les plans déposés à l'appui de cette demande, comme cela ressortait des photographies produites sous pièces n° 3 et 6. En l'état, il présentait donc une surface trop importante pour être considéré comme une CDPI. Or, les nouveaux plans, qui faisaient apparaître un avant-toit à l'arrière du garage, ne faisaient état d'aucun élément à démolir. On ne voyait donc pas comment les surfaces pourraient être diminuées. Ils contestaient dès lors que leurs pièces 9 et 11, dont il ressortait notamment que les constructions de l'intimé devaient être considérées dans leur intégralité, en prenant également en compte le couvert au-dessus de la terrasse, ne soient pas pertinentes en l’espèce.
11. Par dupliques des 11 et 15 novembre 2024, l’intimé et le département ont respectivement persisté dans leurs conclusions.
L’intimé a pour le surplus précisé que, contrairement à ce que soutenaient les recourants, des plans modifiés avaient été présentés dans le cadre de l’APA querellée. Ainsi, en particulier, la surface du réduit à jardin avait été diminuée, laquelle laissait place à un avant-toit à l’arrière, comme cela ressortait de la pièce 11 de son chargé.
Le département a quant à lui relevé qu’il n’était pas contesté que le projet portait sur un bâtiment déjà érigé, lequel serait régularisé par ce biais. Il ressortait pour le surplus des plans Coupe AA et BB (en jaune) visés ne varietur que le réduit de jardin actuel serait entièrement démoli et reconstruit. Le projet avait ainsi été modifié pour correspondre aux taux légaux, notamment s’agissant des CDPI.
12. Dans des écritures spontanées du 2 décembre 2024, les recourants ont encore relevé que les pièces au dossier ne permettaient pas de calculer la surface totale des CDPI de la parcelle. Ils sollicitaient donc que les plans émanant d’un mandataire professionnellement qualifié (MPQ), de toutes les CDPI de la parcelle de M. C______, avec emprises, dimensions et surfaces exactes, soient produits. Enfin, depuis la construction du portail d’entrée, l’accès à la propriété de M. C______ impliquait un empiètement illégal sur leur parcelle.
1. Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions prises par le département en application de la LCI (art. 115 al. 2 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 143 et 145 al. 1 LCI).
2. Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).
3. L’intimé conteste la qualité pour recourir des recourants.
4. Selon l'art. 60 al. 1 let. b LPA, ont qualité pour recourir toutes les personnes qui sont touchées directement par une décision et ont un intérêt digne de protection à ce qu'elle soit annulée ou modifiée.
5. La notion de l’intérêt digne de protection correspond aux critères exposés à l’art. 89 al. 1 let. c de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), que les cantons sont tenus de respecter en application de la règle d’unité de la procédure figurant à l’art. 111 al. 1 LTF (ATF 144 I 43 consid. 2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_433//2021 du 5 juillet 2022 consid. 3.1).
6. L'intérêt digne de protection représente tout intérêt pratique ou juridique à demander la modification ou l'annulation de la décision attaquée. Il consiste donc dans l'utilité pratique que l'admission du recours apporterait au recourant, en lui évitant de subir un préjudice de nature économique, idéale, matérielle ou autre que la décision attaquée lui occasionnerait. Le recourant doit se trouver dans une relation spéciale, étroite et digne d’être prise en considération avec l’objet de la contestation et retirer un avantage pratique de l’annulation ou de la modification de la décision en cause, qui permette d’admettre qu’il est touché dans un intérêt personnel se distinguant nettement de l’intérêt général, de manière à exclure l’action populaire. Cet intérêt digne de protection ne doit pas nécessairement être de nature juridique, un intérêt de fait étant suffisant (ATF 144 I 43 consid. 2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_472/2021 du 1er mars 2022 consid. 5.4).
7. D’une manière générale, la jurisprudence et la doctrine n’admettent que de manière relativement stricte la présence d’un intérêt propre et direct lorsqu’un tiers entend recourir contre une décision dont il n’est pas le destinataire (ATF 133 V 239 consid. 6.3). Les tiers ne sont en effet pas touchés par une décision de la même manière que son destinataire formel et matériel, dans la mesure où elle ne leur octroie pas directement des droits ou leur impose des obligations. En plus d’un intérêt concret, par exemple un intérêt économique au contenu de la décision litigieuse, la qualité pour agir du tiers suppose qu’il se trouve, avec l’objet de la contestation, dans un rapport suffisamment étroit, respectivement qu’il soit touché avec une intensité plus grande que les autres personnes, ce qui doit être examiné en rapport avec les circonstances concrètes (arrêt du Tribunal fédéral 9C_852/ 2017 du 25 juin 2018 consid. 2.2.2).
8. Le recourant doit ainsi se trouver dans un rapport suffisamment étroit et spécial avec la décision ; il doit être « spécialement atteint » par celle-ci (cf. ATF 133 II 468 consid. 1 ; ATA/149/2014 du 11 mars 2014 ; ATA/281/2012 du 8 mai 2012 ; François BELLANGER, « La qualité pour recourir », in Le contentieux administratif, 2013, p. 112, 116 et 119). S'il s'agit d'un tiers, il doit démontrer l'existence d'une communauté de fait entre ses intérêts et ceux du destinataire
(Ibid., p. 116). Ainsi, « pour qu'une relation suffisante existe, il faut qu'il y ait véritablement un préjudice porté de manière directe à la situation personnelle du recourant » (Pierre MOOR/Etienne POLTIER, Droit administratif, vol. II, 3ème éd., 2011, p. 734). En d'autres termes, la situation du tiers doit pouvoir être influencée de manière significative par l'issue de la procédure, l'intérêt digne de protection résidant dans le fait d'éviter de subir directement un préjudice, qui serait causé par la décision entreprise, alors qu'un simple intérêt indirect ou le seul intérêt public général - en l'absence de rapport étroit avec l'objet du litige - ne justifie pas la reconnaissance de la qualité de partie (cf. arrêt du Tribunal fédéral 2C_727/2016 du 17 juillet 2017 consid. 4.2.3 et les arrêts cités). Cela signifie que le recours d'un particulier formé dans l'intérêt général et abstrait à la correcte application du droit ou dans l'intérêt de tiers est irrecevable (cf. ATF 144 I 43 consid. 2.1 ; 139 II 499 consid. 2.2 ; 138 II 162 consid. 2.1.1 et les arrêts cités ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_170/2018 du 10 juillet 2018 consid. 4.1 ; ATA/1218/2015 du 10 novembre 2015 consid. 8 ; ATA/931/2014 du 25 novembre 2014 consid. 3c ; ATA/586/2013 du 3 septembre 2013). Il est à cet égard insuffisant de s'intéresser spécialement à une question ou à un projet pour des motifs idéaux ou par conviction personnelle (cf. ATF 123 II 376 consid. 4a ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_38/2015 du 13 mai 2015 consid. 3.3).
9. En matière de droit des constructions, le voisin direct de la construction ou de l'installation litigieuse, s'il a en principe la qualité pour recourir, doit en outre retirer un avantage pratique de l'annulation ou de la modification de la décision contestée qui permette d'admettre qu'il est touché dans un intérêt personnel se distinguant nettement de l'intérêt général des autres habitants de la collectivité concernée de manière à exclure l'action populaire (ATF 139 II 499 consid. 2.2 ; 137 II 30 consid. 2.2.3). Le voisin ne peut ainsi pas présenter n'importe quel grief ; il ne se prévaut d'un intérêt digne de protection, lorsqu'il invoque des dispositions édictées dans l'intérêt général ou dans l'intérêt de tiers, que si ces normes peuvent avoir une influence sur sa situation de fait ou de droit (ATF 139 II 499 consid. 2.2 ; 137 II 30 consid. 2.2.3 ; 133 II 249 consid. 1.3). Tel est souvent le cas lorsqu'il est certain ou très vraisemblable que l'installation ou la construction litigieuse sera à l'origine d'immissions – bruit, poussières, vibrations, lumière, fumée – atteignant spécialement les voisins. À défaut, il n'y a pas lieu d'entrer en matière sur le grief soulevé (arrêt du Tribunal fédéral 1C_27/2018 du 6 avril 2018 consid. 1.1 et les références citées).
10. En l'espèce, les recourants fondent leur qualité pour recourir sur la proximité de leur parcelle avec celle visée par l'autorisation querellée et font grief au département d’avoir violé les art. 3, 69 LCI et 3 al. 3 RCI. Dans cette mesure et dès lors qu’ils se prévalent de dispositions du droit public des constructions susceptibles d'avoir une incidence concrète sur leur situation de fait, leur qualité pour recourir doit être admise. Leur recours est ainsi recevable à cet égard également.
11. Selon l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l’espèce.
12. Il y a en particulier abus du pouvoir d’appréciation lorsque l’autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu’elle viole des principes généraux du droit tels que l’interdiction de l’arbitraire, l’égalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_712/2020 du 21 juillet 2021 consid. 4.3 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2018, n. 515 p. 179).
13. Les arguments formulés par les parties à l’appui de leurs conclusions respectives seront repris et discutés dans la mesure utile (ATF 145 IV 99 consid. 3.1; arrêt du Tribunal fédéral 1C_136/2021 du 13 janvier 2022 consid. 2.1 et les références citées), étant rappelé que, saisi d’un recours, le tribunal applique le droit d’office et que s’il ne peut pas aller au-delà des conclusions des parties, il n’est lié ni par les motifs invoqués par celles-ci (art. 69 al. 1 LPA), ni par leur argumentation juridique (ATA/84/2022 du 1er février 2022 consid. 3).
14. Selon les principes généraux du droit, il n'appartient pas à l'administration de s'immiscer dans les conflits de droit privé pouvant s'élever entre un requérant et un opposant. La législation genevoise en matière de police des constructions a pour seul but d'assurer la conformité des projets présentés aux prescriptions en matière de constructions et d'aménagements, intérieurs et extérieurs, des bâtiments et des installations (art. 3 al. 6 LCI ; cf. not. ATA/169/2020 du 11 février 2020 consid. 7b ; ATA/1724/2019 du 26 novembre 2019 consid. 8e ; ATA/97/2019 du 29 janvier 2019 consid. 5 ; ATA/517/2018 du 29 mai 2018 consid. 5g ; ATA/166/2018 du 20 février 2018 consid. 5 et les arrêts cités).
15. Dans leurs écritures spontanées, les recourants sollicitent la production des plans émanant d’un MPQ, de toutes les CDPI de la parcelle de M. C______, avec emprises, dimensions et surfaces exactes.
16. Le droit d’être entendu garanti par l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) comprend, classiquement, le droit, pour l’intéressé, de s’exprimer sur les éléments pertinents avant qu’une décision ne soit prise touchant sa situation juridique, d’avoir accès au dossier, de produire des preuves pertinentes, d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l’administration des preuves essentielles ou, à tout le moins, de s’exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 149 I 91 consid. 3.2 ; 145 I 167 consid. 4.1 ; 142 II 218 consid. 2.3).
Ce droit ne s’étend toutefois qu’aux éléments pertinents pour décider de l’issue du litige et le droit de faire administrer des preuves n’empêche pas le juge de renoncer à l’administration de certaines preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier s’il acquiert la certitude que celles-ci ne l’amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_159/2020 du 5 octobre 2020 consid. 2.2.1).
17. En l’espèce, le tribunal ne peut que constater que les plans requis par les recourants figurent déjà au dossier du tribunal (cf plan B03.01), qu’il leur était loisible de consulter. Il ne sera par conséquent pas entré en matière sur leur requête.
18. Les recourants soutiennent que l’APA est nulle dès lors que le dossier d'autorisation de construire a été instruit en la forme accélérée alors qu’il aurait dû l’être en la forme définitive, le département ayant considéré à tort que les constructions visées étaient des CDPI.
19. En vertu de l'art. 1 al. 1 LCI, sur tout le territoire du canton nul ne peut, sans y avoir été autorisé, notamment, élever en tout ou partie une construction ou une installation, notamment un bâtiment locatif, industriel ou agricole, une villa, un garage, un hangar, un poulailler, un mur, une clôture ou un portail (let. a), modifier même partiellement le volume, l'architecture, la couleur, l'implantation, la distribution ou la destination d'une construction ou d'une installation (let. b).
20. Selon l'art. 3 al. 7 LCI, le département peut traiter par une procédure accélérée les demandes d'autorisation relatives à des travaux soumis à l'art. 1 :
a) s'ils sont projetés en cinquième zone aux conditions prévues par le titre II, chapitre VI, de la présente loi et lorsqu'aucune dérogation n'est sollicitée;
b) s'ils portent sur la modification intérieure d'un bâtiment existant ou ne modifient pas l'aspect général de celui-ci;
c) pour des constructions nouvelles de peu d'importance ou provisoires ; ou
d) à titre exceptionnel, pour des travaux de reconstruction présentant un caractère d'urgence.
21. Dans ces cas, la demande n'est pas publiée dans la FAO et le département peut renoncer à solliciter le préavis communal. L'autorisation est, par contre, publiée dans la FAO et son bénéficiaire est tenu, avant l'ouverture du chantier, d'informer, par écrit, les locataires et, le cas échéant, les copropriétaires de l'immeuble concerné des travaux qu'il va entreprendre. Une copie de l'autorisation est envoyée à la commune intéressée.
22. L'art. 7 al. 8 LCI précise qu'en matière de procédure accélérée, sauf exception, les préavis des commissions officielles sont exprimés, sur délégation, par les services spécialisés concernés. Si nécessaire, les exceptions sont définies par lesdites commissions.
23. De jurisprudence constante, la chambre administrative estime que l'application de la procédure accélérée au lieu de la procédure ordinaire constitue un vice particulièrement grave, de sorte qu'il s'agit d'un cas de nullité ; est donc nulle une autorisation délivrée à la suite d'une procédure accélérée en lieu et place de la procédure ordinaire (cf. ATA/1602/2019 du 29 octobre 2019 consid. 6b ; ATA/1299/2019 du 27 août 2019 consid. 3b et les références citées ; cf. aussi arrêt du Tribunal fédéral 1C_641/2012 du 30 avril 2013 consid. 3.4).
24. Il s’agira dès lors préalablement d’examiner si, comme l’a retenu le département, les constructions visées par la décision querellée, en l’occurrence l’abri à vélo et le couvert à voitures, sont des CDPI et, cas échéant, si la surface totale de ces dernières sur la parcelle est inférieure à 100 m2.
25. Sont réputées construction de peu d’importance (ci-après : CDPI) au sens de l’art. 3 RCI, à la condition qu’elles ne servent ni à l’habitation, ni à l’exercice d’une activité commerciale, industrielle ou artisanale (al. 1 let. a), celles qui servent à couvrir, par une toiture, une surface utilisable au sol, ouverte ou fermée
(al. 1 let. b) ; celles dont la surface n’excède pas 50 m2 et qui s’inscrivent dans un gabarit limité par une ligne verticale dont la hauteur n’excède pas 2,5 m, une ligne oblique faisant avec l’horizontale partant du sommet de la ligne verticale un angle de 30°, une ligne horizontale de faîtage située à 4,5 m du sol au maximum
(al. 1 let. c). La surface totale des CDPI ne doit pas dépasser 100 m2 (al. 2). Dans le cadre d’un projet de construction en ordre contigu ou sous forme d’habitat groupé, et afin d’améliorer l’insertion dans le site et pour autant qu’il n’en résulte pas de gêne pour le voisinage, le département peut autoriser, après consultation de la commission d’architecture, des constructions de peu d’importance groupées d’une surface de plus de 50 m2 (al. 3 let. a) ; une surface totale des CDPI de plus de 100 m2 (al. 3 let. b). Dans tous les cas, la surface totale des constructions de peu d’importance ne doit pas excéder 8 % de la surface de la parcelle (art. 3 al. 4 RCI).
26. Les CDPI font l’objet d’une directive du département du 3 février 2014, modifiée le 10 mars 2017 sous le n° 024-v5, le 9 mars 2021 sous le n° 024-v7 et enfin le 20 septembre 2024 sous le n° 024-v8 (ci-après : la directive CDPI).
27. La directive CDPI a pour but de préciser le type de construction considéré comme telles et la manière de calculer les surfaces, hauteur et de prendre en compte les avant-toits ainsi que les éléments en saillies du bâtiment principal tels que les couvert, balcon, terrasse, surplomb d’étage. Sont réputées CDPI, selon cette directive, « les garages, ateliers non professionnels, couverts à voitures, couverts de plaisance, couverts à bois, abris ou cabanes de jardin, pool-house » (cf. arrêt du Tribunal fédéral 1C_159/2020 du 5 octobre 2020 consid. 4.2).
S’agissant des avant-toits d’une CDPI, il ressort de ladite directive qu’ils sont acceptés sur une profondeur de 1,50 m., par analogie à l'art. 25 RCI. Au-delà de 1,50 m. le supplément de profondeur sera compté dans la surface, les premiers 1,50 m n'étant pas comptés (p. 3).
28. De jurisprudence constante, la chambre administrative et le tribunal se fondent sur cette directive pour déterminer les surfaces à prendre en compte à titre de CDPI (ATA/129/2023 du 7 février 2023 consid. 4c).
29. Dans le cadre de l’application de l’art. 3 al. 3 RCI, la jurisprudence a notamment précisé qu’un aménagement extérieur au sol, non couvert et sans émergence, ne constituait pas, à l’instar d’une pergola ou de surfaces aménagées au sol destinées au stationnement des véhicules, une CDPI (JTAPI/1383/2022 du 14 décembre 2022 consid. 33, repris par l’ATA/129/2023 du 7 février 2023 consid. 4f).
30. Selon la jurisprudence, il n’appartient pas aux instances judiciaires d’examiner le projet de construction à l’aune de toutes les exigences des préavis antérieurs et défavorables, étant rappelé que le litige ne concerne que la conformité au droit de l’autorisation de construire délivrée, et non son opportunité (ATA/934/2019 du 21 mai 2019 consid. 8 confirmé par l’arrêt du Tribunal fédéral 1C_355/2019 du 29 janvier 2020 consid. 3.2).
31. En l’espèce, le projet concerne la construction d’un abri à vélos et la mise en conformité d’un couvert à voitures et d’un portail avec clôtures, réalisés sans autorisation.
A teneur des plans (Plan B03.01 Calcul surface CDPI version du 14 mai 2024), la surface du couvert à voiture existant, comprenant le réduit de jardin, est de 29.16 m2 et, s’agissant de l’abri à vélo, seul un avant-toit de 1.5 m est à créer. La parcelle compte pour le surplus les CDPI suivants au sens de l’art. 3 al. 1 RCI : un abri jardin (36.11 m2), une terrasse couverte (16.12 m2), un Poolhouse (18.02 m2). Conformément à la directive CDPI, ni l’avant-toit à vélos d’une profondeur de 1.50 m ni la pergola accolée au Poolhouse ne sont à prendre en compte dans le calcul des CDPI.
Au vu de ce qui précède, le tribunal considère que le raisonnement et les calculs auxquels le DT a procédé, et qu’il a explicités dans ses écritures, peuvent être suivis. Les recourants font quant à eux une lecture erronée des plans de l’APA 7______, prenant en compte la surface des avant-toits, respectivement se fondent sur un préavis portant sur une version différente du projet et des préavis et plans émis dans le cadre d’une autre procédure (DD 6______/1). Or les objets visés par cette dernière diffèrent de ceux de l’APA querellée (cf. à cet égard la pièce 10 du chargé recourants et les plans Coupes et Gabarits Annexe n° 1/2 de l’APA 5______/1 du 1er mars 2024), le réduit de jardin actuel voyant en particulier sa surface se réduire.
Il apparaît ainsi que la surface maximale relative de 50m2 est respectée et que la surface totale des CDPI autorisées sur la parcelle, de 99,41 m2, est inférieure à la limite de 100 m2, de sorte que l’art. 3 al. 1 et 3 RCI n’a pas été violé.
Il découle dès lors de ce qui précède que c’est à juste titre que le département a instruit la demande d'autorisation relative au projet litigieux selon la procédure accélérée (art. 3 al. 7 let. c LCI).
32. Les recourants soutiennent encore que l’autorisation viole l’art. 69 LCI du fait des distances insuffisantes entre les couverts à vélo et voitures et leur parcelle.
33. Les art. 67 et suivants LCI traitent du rapport des constructions avec les limites de propriétés.
34. L'art. 67 al. 1 LCI prévoit que les constructions ne peuvent être édifiées en dessus du sol, à la limite de deux propriétés privées.
35. Selon l'art. 68 LCI, des CDPI peuvent être édifiées à la limite de propriété ou à une distance inférieure à celles prévues à l'art. 69, dans les conditions fixées par le règlement d'application.
36. Lorsque les conditions d'une construction en limite de propriété ne sont pas réalisées, l'art. 69 LCI fixe les règles permettant de calculer la distance minimale entre une limite de propriété et une construction, en fonction de la hauteur de son gabarit, et prévoit qu'une distance d'au moins 5 m. doit être respectée dans tous les cas.
37. L'art. 243 al. 1 RCI précise quant à lui quelles sont les catégories de constructions qui peuvent, en dérogation à l'art. 67 al. 1 LCI, être édifiées en limite de propriété. On y trouve notamment les CDPI (let. c), dont on a vu plus haut que l'art. 68 LCI les autorisait en limite de propriété ou à une distance inférieure à celles prévues par l'art. 69 LCI.
38. En l’espèce, ayant été constaté ci-dessus que les couverts incriminés étaient des CDPI, ces derniers peuvent, sur la base des art. 68 LCI et 243 al. 1 let. c RCI être autorisés en limite de propriété. Partant, la distance de 1,2 m de la limite parcellaire du couvert à vélo est parfaitement conforme et aucune dérogation n’était à demander.
A toutes fins utiles, il sera constaté que l’autorisation querellée est également conforme au droit en ce qui concerne le portail avec clôtures, au sujet desquels les recourants ne font au demeurant valoir aucun grief du droit de la construction. Quant à l’allégation que, depuis la construction du portail d’entrée, l’accès à la propriété de M. C______ impliquerait un empiètement illégal sur leur parcelle, elle ressort du droit privé.
39. Au vu de ce qui précède, entièrement mal fondé, le recours sera rejeté.
40. En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), les recourants, qui succombent, sont condamnés au paiement d’un émolument s’élevant à CHF 900.-, il est couvert par l’avance de frais versée à la suite du dépôt du recours.
Vu l’issue du litige, une indemnité de procédure de CHF 1’000.-, à la charge conjointe et solidaire des recourants, sera allouée à M. C______, pour ses frais d’avocat (art. 87 al. 2 à 4 LPA et 6 RFPA).
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF
DE PREMIÈRE INSTANCE
1. déclare recevable le recours interjeté le 24 juin 2024 par Madame A______ et Monsieur B______ contre la décision du département du territoire du ______ 2024 ;
2. le rejette ;
3. met à la charge des recourants un émolument de CHF 900.-, lequel est couvert par l'avance de frais ;
4. condamne les recourants, pris conjointement et solidairement, à verser à Monsieur C______ une indemnité de procédure de CHF 1’000.- ;
5. dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les 30 jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.
Siégeant : Marielle TONOSSI, présidente, Oleg CALAME et Julien PACOT, juges assesseurs
Au nom du Tribunal :
La présidente
Marielle TONOSSI
Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties.
Genève, le |
| Le greffier |