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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/401/2024

JTAPI/788/2024 du 19.08.2024 ( ICCIFD ) , ADMIS

Descripteurs : RÉCLAMATION DE DROIT PUBLIC;RETARD;RECONSIDÉRATION;RÉVISION(DÉCISION)
Normes : LPFisc.39.al1; LIFD.132.al1; LPFisc.41.al3; LIFD.133.al3
En fait
En droit
Par ces motifs

république et

canton de genève

POUVOIR JUDICIAIRE

A/401/2024 ICCIFD

JTAPI/788/2024

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 19 août 2024

 

dans la cause

 

Monsieur A______

 

contre

ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE

ADMINISTRATION FÉDÉRALE DES CONTRIBUTIONS

 


 

EN FAIT

1.             Le 20 mai 2022, Monsieur A______ a déposé sa déclaration fiscale pour la période 2021, concernant les impôts cantonaux et communaux (ci-après : ICC) et l’impôt fédéral direct (ci-après : IFD), auprès de l’administration fiscale cantonale (ci-après : AFC).

2.             Les bordereaux ICC et IFD 2021, datés du 21 octobre 2022, lui ont été notifiés le 2 novembre 2022, par pli simple.

3.             Le 4 novembre 2022, le contribuable a accusé réception de ces bordereaux et sollicité un arrangement de paiement.

4.             Egalement par pli simple, l’AFC a envoyé un rappel de paiement au contribuable pour l’ICC 2021, le 13 janvier 2023 ainsi qu’une sommation, par courrier A+, le 11 mars 2023, réceptionnée par l’intéressé le 14 mars 2023.

5.             Le 8 décembre 2023, M. A______ a écrit à l’AFC concernant sa situation fiscale 2021 et 2022 indiquant qu’il n’était pas d’accord avec ces décisions.

Jusqu’à fin 2022, son fils B______, né le ______ 1997, avait vécu avec lui. Ce dernier étant étudiant, il était sous sa responsabilité. La décision devait être revue afin d’éliminer ce malentendu. De plus, il souhaitait que l’AFC lui explique ce qu’il avait fait de la somme de CHF 1'000.- qu’il avait payée au mois d’octobre de la même année.

6.             Par décisions sur réclamation du 9 janvier 2024 concernant l’ICC et l’IFD 2021, l’AFC a déclaré irrecevable la réclamation du contribuable pour cause de tardiveté.

Il n’avait pas présenté sa réclamation dans le délai légal et impératif de 30 jours à compter de la réception du bordereau d’impôt, comme l’art. 39 al. 1 de la loi de procédure fiscale du 4 octobre 2001 (LPFisc - D 3 17) l’imposait.

7.             Par acte du 3 février 2024, M. A______, a formé recours contre cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal), concluant implicitement à son annulation.

Pour les périodes fiscales 2021 et 2022, il avait été taxé comme vivant seul alors que ce n’était pas le cas, son fils vivant encore avec lui. L’AFC avait corrigé son erreur pour l’année fiscale 2022 mais pas pour l’année 2021.

8.             Dans ses observations du 27 mars 2024, l’AFC a conclu au rejet du recours. En réclamant que le 13 décembre 2023, soit treize mois après la notification des bordereaux ICC et IFD 2021, le recourant avait agi tardivement. Au surplus, il n’avait ni allégué ni prouvé l’existence d’un motif légal ou la survenance d’un cas de force majeure qui l’aurait concrètement empêché d’agir en temps utile ou de désigner un tiers pour s’en charger.

9.             Dans sa réplique du 22 avril 2024, le recourant a persisté dans son argumentaire.

10.         Par duplique du 29 avril 2024, l’AFC a quant à elle, persisté dans les considérants et conclusions de sa réponse précédente.

EN DROIT

1.             Le Tribunal connaît des recours contre les décisions sur réclamation de l’administration fiscale cantonale (art. 115 al. 2 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 49 LPFisc ; art. 140 de la loi fédérale sur l’impôt fédéral direct du 14 décembre 1990 - LIFD - RS 642.11).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable, au sens des art. 49 LPFisc et 140 LIFD.

3.             Percevant la demande du recourant du 8 décembre 2023 comme une « réclamation » formée contre les bordereaux ICC et IFD 2021, l'AFC l'a déclarée irrecevable, motif pris de sa tardiveté.

4.             À teneur des art. 39 al. 1 LPFisc et 132 al. 1 LIFD, le contribuable peut adresser à l'autorité de taxation une réclamation écrite contre la décision de taxation dans les trente jours qui suivent sa notification. Ce délai commence à courir le lendemain de la notification. Il est considéré comme respecté si la réclamation est remise à l'autorité de taxation, à un office de poste suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse à l'étranger le dernier jour ouvrable du délai au plus tard (art. 41 al. 1 LPFisc ; art. 133 al. 1 LIFD).

5.             Aux termes des art. 41 al. 3 LPFisc et 133 al. 3 LIFD, une réclamation tardive n'est recevable que si le contribuable établit que, par suite de service militaire, de service civil, de maladie, d'absence du pays ou pour d'autres motifs sérieux, il a été empêché de présenter son acte en temps utile et qu'il l'a déposé dans les trente jours après la fin de l'empêchement.

6.             Les conditions pour admettre un empêchement sont très strictes. La restitution du délai suppose que le contribuable n'a pas respecté le délai légal en raison d'un empêchement imprévisible, dont la survenance ne lui est pas imputable à faute (ATF 119 II 86 ; 112 V 255 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_40/2018 du 8 février 2018 consid. 5.1 et 5.2 et les références citées ; ATA/463/2018 du 8 mai 2018 ; ATA/1245/2017 du 29 août 2017 ; ATA/417/2017 du 11 avril 2017).

7.             Selon la jurisprudence, la maladie peut être considérée comme un empêchement non fautif et, par conséquent, permettre une restitution d'un délai, si elle met l'administré ou son représentant légal objectivement ou subjectivement dans l'impossibilité d'agir par soi-même ou de charger une tierce personne d'agir en son nom dans le délai (arrêt du Tribunal fédéral 9C_209/2012 du 26 juin 2012).

8.             Selon la casuistique, un contribuable produisant un certificat médical attestant du suivi du patient durant les dix dernières années ne peut être retenu, compte tenu des imprécisions dans l'incapacité d'agir ou de donner les instructions nécessaires à un tiers, alors que l'intéressé a pu rédiger à la main la réclamation, pendant la période concernée (ATA/168/2012 du 27 mars 2012). L'existence d'une maladie ne suffit pas pour admettre de jure qu'il y a un motif à restitution de délai. Encore faudrait-il établir qu'elle empêchait la recourante d'effectuer toutes démarches que ce soit, directement envers l'administration, ou en recourant au service d'un tiers (ATA/481/2011 du 26 juillet 2011 ; ATA/169/2011 du 15 mars 2011 ; ATA/50/2009 du 27 janvier 2009 ; ATA/446/2007 du 4 septembre 2007).

9.             En l’espèce, si l’on devait considérer la requête du recourant du 8 décembre 2023 comme une réclamation au sens des art. 39 al. 1 LPFisc et 132 al. 1 LIFD, alors que les bordereaux concernés datent du 21 octobre 2022, elle est manifestement tardive, ce que ce dernier ne conteste d’ailleurs pas. En outre, il est manifeste qu’il ne saurait se prévaloir de l'un des motifs envisagés par les art. 41 al. 3 LPFisc et 133 al. 3 LIFD pour prétendre à une restitution du délai de réclamation.

10.         Cela étant, le tribunal a, à maintes reprises, jugé que lorsqu'un contribuable demande à l'AFC de réexaminer sa taxation, alors que le délai de réclamation a expiré depuis plusieurs mois, cette dernière doit envisager une telle requête comme une demande de reconsidération (ou de révision, au sens des art. 55 LPFisc et 147 LIFD) (cf. JTAPI/724/2019 du 19 août 2019 ; JTAPI/325/2018 du 9 avril 2018 ; JTAPI/954/2017 du 11 septembre 2017 ; JTAPI/182/2016 du 22 février 2016 ; JTAPI/954/2016 du 19 septembre 2016 ; JTAPI/1007/2016 du 4 octobre 2016 ; JTAPI/1376/2015 du 23 novembre 2015 ; JTAPI/394/2015 du 30 mars 2015).

11.         Or, il est patent, au vu de la date de dépôt et de son contenu, que la requête du recourant du 8 décembre 2023 devait être comprise comme une demande de ce type, que l'autorité intimée aurait dû considérer et traiter comme telle, d'autant que le terme « être revu » était utilisé. Cette question relevant de la seule compétence de l'autorité intimée (art. 57 al. 1 LPFisc, art. 48 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA-GE - E 5 10) et 149 al. 1 LIFD)), la cause doit lui être renvoyée (art. 11 al. 3 LPA par renvoi de l’art. 2 al. 2 LPFisc) pour qu'elle statue sous cet angle.

12.         Dès lors, le recours sera admis et la cause renvoyée à l’AFC afin qu’elle traite la requête du 8 décembre 2023 comme une demande de reconsidération au sens des art. 55 LPFisc et 147 LIFD.

13.         Vu l’issue du litige il ne sera pas perçu d’émolument ni indemnité allouée au recourant qui n’y a pas conclu et n’est pas représenté par un avocat (art. 87 al. 2 à 4 LPA et 6 RFPA).

 


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 3 février 2024 par Monsieur A______ contre les décisions de l'administration fiscale cantonale du 9 janvier 2024 ;

2.             l'admet ;

3.             renvoie le dossier à l'administration fiscale cantonale pour nouvelle décision dans le sens des considérants ;

4.             dit qu'il n'est pas perçu d'émolument et ordonne la restitution au recourant de son avance de frais de CHF 700.- ;

5.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

6.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les 30 jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Siégeant: Gwénaëlle GATTONI, présidente, Federico ABRAR et Stéphane TANNER, juges assesseurs.

Au nom du Tribunal :

La présidente

Gwénaëlle GATTONI

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties.

Genève, le

 

La greffière