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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/2288/2023

JTAPI/83/2024 du 31.01.2024 ( OCIRT ) , REJETE

Descripteurs : AUTORISATION DE TRAVAIL;PRIORITÉ DES TRAVAILLEURS INDIGÈNES;LIMITATION DU NOMBRE DES ÉTRANGERS
Normes : LEI.11; LEI.18; LEI.21
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2288/2023

JTAPI/83/2024

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 31 janvier 2024

 

dans la cause

 

Monsieur A______

 

contre

OFFICE CANTONAL DE L’INSPECTION ET DES RELATIONS DU TRAVAIL

 


EN FAIT

1.             B______, société coopérative, succursale C______ (ci-après : B______), a pour but de gérer de manière autonome les activités qui se déroulent sur le canton de Genève dans le domaine de l’insertion de personnel.

2.             Monsieur A______, né le ______ 1983, est de nationalité américaine (USA). Il réside en Suisse depuis le 1er décembre 2011 au bénéficie d’une autorisation temporaire pour formation auprès de l’Université de Genève. Cette autorisation est arrivée à échéance le 30 septembre 2018. Depuis cette date, l’intéressé réside en Suisse sans autorisation.

3.             Par formulaire K daté du 30 octobre 2018, réceptionné le 23 novembre 2018, M. A______ a sollicité auprès de l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) le renouvellement de son autorisation de séjour pour études.

4.             En décembre 2019, M. A______ a entamé une procédure préparatoire de mariage auprès du service de l’état civil de la Ville de Genève.

5.             Par courrier du 15 janvier 2020, l’OCPM a informé M. A______ de son intention de refuser le renouvellement de son autorisation de séjour pour études et de prononcer son renvoi de Suisse, étant donné qu’il n’était plus immatriculé à l’Université de Genève depuis fin septembre 2019, suite à son élimination de la formation.

6.             Le même jour, il a réceptionné une demande d’autorisation de séjour en vue du mariage de l’intéressé avec sa compagne.

7.             Le 30 juin 2020, l’OCPM a délivré une attestation valable six mois autorisant M. A______ à séjourner en Suisse le temps de la procédure préparatoire au mariage.

8.             Le 30 novembre 2021, B______ a annoncé à l’office cantonal de l’emploi (ci-après : OCE) la vacance d’un poste de « formateur – coach métier comptabilité en insertion professionnelle » à un taux de 60 à 80 %.

L’annonce précisait que le candidat devait notamment avoir une expérience confirmée dans le domaine de l’insertion et/ou en agence de placement, d’excellentes connaissances de WinBiz et Cresus et une expérience confirmée dans la formation de ce type de solutions comptables, d’excellentes connaissances d’anglais, ainsi que de très bonnes connaissances du tissu économique et institutionnel genevois ainsi que du marché de l’emploi.

9.             Par courrier du 15 décembre 2021, l’OCE a informé B______ qu’il n’avait, à ce jour, malheureusement pu retenir aucun dossier de candidat répondant aux critères d’exigence du poste.

10.         Le 1er février 2022, B______ a engagé M. A______ en qualité de coach métier comptabilité pour une durée déterminée (du 1er février au 31 décembre 2022) à un taux de 65 % jusqu’au 31 mai 2022, puis de 70 %.

11.         Par décision du 13 septembre 2022, l’OCPM a refusé d’octroyer une autorisation de séjour à M. A______, son projet de mariage n’ayant pas abouti, et a prononcé son renvoi de Suisse, lui accordant un délai du 31 octobre 2022 pour quitter le territoire.

12.         Par jugement du 2 décembre 2022, le recours déposé par l’intéressé contre la décision précitée a été déclaré irrecevable par le Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal), faute de paiement de l’avance de frais dans le délai imparti.

13.         Par contrat du 15 décembre 2022, B______ a engagé M. A______ en qualité de coach métier comptabilité pour une durée indéterminée dès le 1er janvier 2023 à un taux de 70 %.

14.         Par courrier du 10 février 2023, M. A______, sous la plume de son conseil, a sollicité de l’OCPM une autorisation de séjour avec activité lucrative.

Était notamment joint à ladite demande une lettre de motivation de B______ du 30 janvier 2023, expliquant qu’après un mois de recherches et des annonces publiées auprès de l’OCE et sur un site de recrutement, elle n’avait reçu aucune candidature correspondant au profil du poste et s’était finalement arrêtée sur le profil de M. A______ qui détenait toute l’expertise professionnelle dont elle avait besoin et répondait parfaitement à ses attentes dans le cadre du développement de ses activités à Genève.

15.         Par courriel du 17 février 2023 adressé à l’employeur, l’office cantonal de l’inspection et des relations du travail (ci-après : OCIRT), à qui la demande avait été transmise pour raison de compétence, a sollicité des informations complémentaires (comptes de la société 2021 et 2022, nouveau contrat de travail du candidat avec un taux d’activité à 100 % - l’OCIRT n’accordant pas d’autorisations pour du temps partiel -, curriculum vitae du candidat mis à jour, recherches plus récentes que celles au dossier datant de 2021, effectif du personnel à la date de la requête). Il était précisé que l’intéressé n’était pas autorisé à travailler.

16.         Le 21 février 2023, en réponse à la demande de l’OCIRT, B______ a produit diverses pièces, dont un nouveau contrat de travail prévoyant un taux d’activité de 100 % et le curriculum vitae actualisé de M. A______. S’agissant des recherches plus récentes, elle a exposé que la responsable du programme avait recherché dans son réseau, dès début janvier 2023, des candidatures pouvant effectuer le remplacement de M. A______, sans succès. Plus précisément, elle avait pris contact avec quatre personnes : la première n’était pas disponible pour le poste et les trois autres n’avaient aucun candidat à proposer.

17.         Par décision du 8 mars 2023, l’OCIRT a rejeté la demande d’autorisation de séjour avec activité lucrative déposée en faveur de M. A______, au motif que son admission ne servait pas les intérêts économiques de la Suisse. De plus, l’ordre de priorité n’avait pas été respecté, l’employeur n’ayant pas démontré qu’aucun travailleur en Suisse ou ressortissant d’un pays de l’Union européenne (ci-après : UE) ou de l’Association européenne de libre-échange (ci-après : AELE) n’avait pu être trouvé.

Cette décision est entrée en force, faute de recours.

18.         Le 16 mars 2023, faisant suite à la décision de refus précitée, B______ a annoncé à l’OCE la vacance d’un poste de « formateur – coach métier en comptabilité et gestion de projets en insertion professionnelle » à un taux de 60 %.

L’annonce précisait que le candidat devait notamment être titulaire d’un master en économie, gestion d’entreprise ou équivalent, connaître et utiliser des outils psychométriques, avoir une expérience confirmée dans l’enseignement de l’économie, la comptabilité et la gestion de projets, ainsi que dans la formation d’adultes/enseignement supérieur auprès d’un public en recherche d’emploi, avoir d’excellentes connaissances de WinBiz et Cresus et une expérience confirmée dans la formation de ce type de solutions comptables, maîtriser les outils de gestion de projets, maîtriser parfaitement le français et l’anglais, avoir de très bonnes connaissances du tissu économique et institutionnel genevois ainsi que du marché de l’emploi, et une capacité à adapter le contenu des ateliers aux profils des participants et à garantir leur cohérence en prenant en compte la variété des niveaux techniques.

19.         Par courrier du 31 mars 2023, l’OCE a informé B______ qu’il n’avait, à ce jour, malheureusement pu retenir aucun dossier de candidat répondant aux critères d’exigence du poste.

20.         Par courrier du 24 avril 2023, M. A______, sous la plume de son conseil, a sollicité auprès de l’OCPM la reconsidération de la décision négative de l’OCE du 8 mars 2023, faisant valoir l’existence d’éléments nouveaux, soit l’échec des démarches entreprises par B______ en mars 2023 afin de recruter une personne sur le marché indigène pour le poste vacant et l’intérêt économique indéniable dudit poste.

21.         Le 22 mai 2023, en réponse à une demande de renseignements de l’OCIRT, à qui la demande avait été transmise pour raison de compétence, B______ a transmis un récapitulatif des recherches effectuées pour le poste vacant et des candidatures reçues, ainsi qu’une copie du contrat de travail du candidat prévoyant un taux d’activité de 70 %. Elle précisait que sa situation budgétaire ne lui permettait plus de proposer un poste à plein temps, comme c’était le cas en début d’année.

22.         Par décision du 7 juin 2023, après un nouvel examen du dossier par la commission tripartite, l’OCIRT a maintenu sa décision de refus du 8 mars 2023 au motif que l’admission de l’intéressé en vue de l’exercice d’une activité lucrative ne servait pas les intérêts économiques de la Suisse et que l’ordre de priorité n’avait pas été respecté, l’employeur n’ayant pas démontré qu’aucun travailleur en Suisse ou ressortissant d’un pays de l’UE et de l’AELE n’avait pu être trouvé. En outre, il n’était pas accordé d’autorisations pour une activité à temps partiel.

23.         Par acte du 6 juillet 2023, M. A______ (ci-après : le recourant), sous la plume de son conseil, a recouru contre la décision précitée auprès du tribunal en concluant, principalement, à son annulation et à l’octroi d’une autorisation de séjour avec activité lucrative en sa faveur, subsidiairement, à son annulation et au renvoi de la cause à l’OCIRT pour nouvelle décision d’octroi d’une autorisation de séjour avec activité lucrative en sa faveur et, plus subsidiairement, à son annulation, le tout sous suite de frais et dépens. Préalablement, il demandait qu’il soit dit que le recours emportait effet suspensif automatique.

Reprenant intégralement les éléments exposés dans sa requête du 24 avril 2023, il a confirmé qu’une annonce avait été publiée le 14 mars 2023 à l’interne de B______, sur son site Internet et sur LinkedIn, et le 16 mars 2023 sur le site de l’office régional de placement (ci-après : ORP), auprès de D______ et E______, et que plus d’un mois après la parution de l’annonce, aucun candidat répondant aux critères du poste n’avait pu être trouvé malgré des recherches approfondies. Le choix de B______, qui se portait pour des raisons objectives et légitimes sur sa candidature, respectait donc le principe de priorité, l’entreprise n’ayant pu trouver un autre candidat répondant aux attentes du poste, vu la spécificité du profil recherché et sa rareté.

Le poste mis en concours par B______, qui combinait les compétences d’accompagnateur en réinsertion professionnelle et celles d’encadrant métier en comptabilité et gestion, revêtait par ailleurs une importance économique pour le canton, en ce qu’il permettait de diminuer les coûts liés au chômage et d’augmenter le taux de réinsertion des personnes concernées par les mesures de retour à l’emploi.

À l’appui de son recours, il a notamment produit la confirmation de la publication de l’annonce sur le site de l’ORP le 16 mars 2023.

24.         Par courrier du 17 juillet 2023, sur demande du tribunal, B______ a confirmé être toujours disposée à engager le recourant à un taux d’activité de 70 %. Malgré ses nombreuses recherches, elle n’avait trouvé qu’une solution externe, qui ne correspondait malheureusement pas aux besoins du poste et n’était donc pas pérenne.

25.         Dans ses observations du 11 septembre 2023, l’OCIRT a conclu au rejet du recours et a transmis son dossier.

L’employeur avait annoncé la vacance du poste à l’OCE le 16 mars 2023 pendant une durée de quinze jours seulement et après la décision négative du 8 mars 2023. Quant à l’annonce faite le 30 novembre 2021 pendant une durée de quinze jours également, elle était trop ancienne. En outre, il n’était pas prouvé que l’employeur avait publié l’annonce sur son site internet et sur LinkedIn. Les recherches effectuées étaient donc insuffisantes, tardives, avaient été faites pour s’acquitter d’une obligation légale et ne permettaient pas d’affirmer que l’employeur s’était trouvé dans l’impossibilité absolue d’octroyer le poste à un candidat prioritaire.

En outre, l’intérêt économique était insuffisant, compte tenu de l’exiguïté du contingent cantonal, à savoir 92 permis B en 2023, laquelle empêchait l’octroi d’autorisations pour une activité à temps partiel.

26.         Le 4 octobre 2023, le recourant a répliqué.

Contrairement à ce qu’affirmait l’OCIRT, le processus de recherche d’un collaborateur pour le poste vacant avait pris plus de quinze jours et au bout de plus d’un mois, les recherches n’avaient pas abouti. B______ était d’ailleurs toujours à la recherche d’un candidat pour le poste.

Quant à l’intérêt économique, il prenait acte de l’argumentaire de l’autorité intimée, bien que l’intérêt économique du poste à l’aune de son impact sur l’économie suisse lui paraissait plus impactant que le taux d’activité pour lequel le poste était dédié.

Enfin, et à défaut de pouvoir « assurer un CDD d’un an au moins », il souhaitait obtenir une autorisation de travail temporaire de trois mois afin d’assurer les ateliers et former une personne pour le poste concerné.

27.         Par duplique du 30 octobre 2023, l’autorité intimée a intégralement maintenu les conclusions de ses observations, la réplique du recourant n’étant pas de nature à changer sa décision.

S’agissant de sa demande d’obtenir une autorisation de travail temporaire, elle ne faisait pas l’objet de la procédure, toute nouvelle demande devant être déposée selon la procédure ordinaire par l’employeur.

Pour le surplus, elle rappelait que le recourant n’avait jamais été autorisé à travailler pour B______.

 

 

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions de l’OCIRT en matière de marché du travail (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ  - E 2 05  ; art. 3 al. 2 de la loi d’application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 60 et 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

3.             Selon l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l’espèce.

Il y a en particulier abus du pouvoir d’appréciation lorsque l’autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu’elle viole des principes généraux du droit tels que l’interdiction de l’arbitraire et de l’inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3 ; 140 I 257 consid. 6.3.1 ; 137 V 71 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_763/2017 du 30 octobre 2018 consid. 4.2 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2018, n. 515 p. 179).

4.             Saisi d’un recours, le tribunal applique le droit d’office. Il ne peut pas aller au-delà des conclusions des parties, mais n’est lié ni par les motifs invoqués par celles-ci (art. 69 al. 1 LPA), ni par leur argumentation juridique (cf. ATA/386/2018 du 24 avril 2018 consid. 1b ; ATA/117/2016 du 9 février 2016 consid. 2 ; ATA/723/2015 du 14 juillet 2015 consid. 4a).

5.             Le recourant conteste le refus de l’OCIRT de lui délivrer une autorisation de séjour avec activité lucrative.

6.             La loi fédérale sur les étrangers et l’intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20) et ses ordonnances d’exécution, en particulier l’ordonnance relative à l’admission, au séjour et à l’exercice d’une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201), règlent l’entrée, le séjour et la sortie de Suisse des étrangers dont le statut juridique n’est pas réglé par d’autres dispositions du droit fédéral ou par des traités internationaux conclus par la Suisse (art. 1 et 2 LEI), notamment par l’Accord du 21 juin 1999 entre, d’une part, la Confédération suisse, et, d’autre part, la Communauté européenne et ses Etats membres sur la libre circulation des personnes (ALCP - RS 0.142.112.681).

7.             En l’occurrence, le recourant étant ressortissant américain et non d’un pays membre de la Communauté européenne, la demande de permis de séjour avec activité lucrative déposée en sa faveur ne peut être examinée que sous l’angle de la LEI.

8.             Selon l’art. 11 LEI, tout étranger qui entend exercer en Suisse une activité lucrative doit être titulaire d’une autorisation, quelle que soit la durée de son séjour ; il doit la solliciter auprès de l’autorité compétente du lieu de travail envisagé (al. 1). Est considérée comme activité lucrative toute activité salariée ou indépendante, qui procure normalement un gain, même si elle est exercée gratuitement (al. 2). En cas d’activité salariée, la demande d’autorisation est déposée par l’employeur (al. 3).

9.             Lorsqu’un étranger ne possède pas de droit à l’exercice d’une activité lucrative, comme en l’espèce, une décision cantonale préalable concernant le marché du travail est nécessaire pour l’admettre en vue de l’exercice d’une activité lucrative (art. 40 al. 2 LEI). Dans le canton de Genève, la compétence pour rendre une telle décision est attribuée à l’OCIRT (art. 6 al. 4 du règlement d’application de la loi fédérale sur les étrangers, du 17 mars 2009 - RaLEtr - F 2 10.01). L’OCPM reçoit et traite les demandes d’autorisation d’admission pour d’autres motifs que ceux relevant de l’exercice d’une activité lucrative (art. 8 RaLEtr).

10.         À teneur de l’art. 18 LEI, un étranger peut être admis en vue de l’exercice d’une activité lucrative salariée aux conditions suivantes : son admission sert les intérêts économiques du pays (let. a), son employeur a déposé une demande (let. b) et les conditions fixées aux art. 20 à 25 LEI sont remplies (let. c), notamment les exigences relatives à l’ordre de priorité (art. 21 LEI), les conditions de rémunération et de travail (art. 22 LEI), ainsi que les exigences portant sur les qualifications personnelles requises (art. 23 LEI).

Ces conditions sont cumulatives (ATA/1094/2019 du 25 juin 2019 consid. 5b et les arrêts cités).

En raison de sa formulation potestative, l’art. 18 LEI ne confère aucun droit au recourant (cf. arrêts du Tribunal fédéral 2C_798/2018 du 17 septembre 2018 consid. 4.1 ; 2D_4/2015 du 23 janvier 2015 consid. 3 ; ATA/1094/2019 du 25 juin 2019 consid. 5b) et les autorités compétentes bénéficient d’un large pouvoir d’appréciation dans le cadre de son application (arrêts du Tribunal administratif fédéral C-5184/2014 du 31 mars 2016 consid. 5.1 ; C-5420/2012 du 15 janvier 2014 consid. 6.2 ; ATA/1094/2019 du 25 juin 2019 consid. 5b). De même, en tant qu’employeur, B______ ne dispose d’aucun droit à engager ce dernier en vue de l’exercice d’une activité lucrative en Suisse (cf. not. arrêt du Tribunal fédéral 2D_57/2015 du 21 septembre 2015 consid. 3 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral C-5184/2014 du 31 mars 2016 consid. 3 ; ATA/1094/2019 du 25 juin 2019 consid. 5b).

11.         La notion d’« intérêt économique du pays », formulée de façon ouverte, concerne au premier chef le domaine du marché du travail. Il s’agit, d’une part, des intérêts de l’économie et de ceux des entreprises. D’autre part, la politique d’admission doit favoriser une immigration qui n’entraîne pas de problèmes de politique sociale, qui améliore la structure du marché du travail et qui vise à plus long terme l’équilibre de ce dernier (Message du Conseil fédéral du 8 mars 2002 concernant la loi sur les étrangers, in FF 2002 3469 ss, p. 3485 s. et 3536). En particulier, les intérêts économiques de la Suisse seront servis lorsque, dans un certain domaine d’activité, il existe une demande durable à laquelle la main d’œuvre étrangère en cause est susceptible de répondre sur le long terme (arrêt du Tribunal administratif fédéral F-4226/207 du 8 octobre 2019 consid. 4.5.1). L’activité économique est dans l’intérêt économique du pays si l’étranger offre par là une prestation pour laquelle il existe une demande non négligeable et qui n’est pas déjà fournie en surabondance (ATA/184/2022 du 22 février 2022 consid. 8e et les références citées).

12.         Un étranger ne peut en outre être admis en vue de l’exercice d’une activité lucrative que s’il est démontré qu’aucun travailleur en Suisse ni aucun ressortissant d’un État avec lequel a été conclu un accord sur la libre circulation des personnes correspondant au profil requis n’a pu être trouvé (art. 21 al. 1 LEI).

En d’autres termes, l’admission de ressortissants d’États tiers n’est possible que si, à qualifications égales, aucun travailleur en Suisse ou ressortissant d’un État membre de l’UE ou de l’AELE ne peut être recruté. Le principe de la priorité des travailleurs résidants doit être appliqué à tous les cas, quelle que soit la situation de l’économie et du marché du travail (arrêt du Tribunal fédéral 2C_434/2014 du 8 août 2014 consid. 2.2 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral F-4226/2017 du 8 octobre 2019 consid. 4.5.2 ; ATA/387/2023 du 18 avril 2023 consid. 5c).

Les conditions d’admission ont matériellement pour but de gérer de manière « restrictive » l’immigration ne provenant pas de la zone UE/AELE, de servir conséquemment les intérêts économiques à long terme et de tenir compte de manière accrue des objectifs généraux relatifs aux aspects politiques et sociaux du pays et en matière d’intégration (cf. notamment ATAF 2011/1 consid. 6.1 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral C-5184/2014 du 31 mars 2016 consid. 5.3.1).

Les employeurs sont tenus d’annoncer le plus rapidement possible aux offices régionaux de placement les emplois vacants qu’ils présument ne pouvoir repourvoir qu’en faisant appel à du personnel venant de l’étranger. Les offices de placement jouent un rôle clé dans l’exploitation optimale des ressources offertes par le marché du travail sur l’ensemble du territoire suisse. L’employeur doit, de son côté, entreprendre toutes les démarches nécessaires - annonces dans les quotidiens et la presse spécialisée, recours aux médias électroniques et aux agences privées de placement - pour trouver un travailleur disponible. On attend des employeurs qu’ils déploient des efforts en vue d’offrir une formation continue spécifique aux travailleurs disponibles sur le marché suisse du travail (arrêt du Tribunal administratif fédéral F-4226/2017 du 8 octobre 2019 consid. 4.5.2 ; ATA/387/2023 du 18 avril 2023 consid. 5c et les références citées).

Il revient à l’employeur de démontrer qu’il a entrepris des recherches à une grande échelle afin de repourvoir le poste en question par un travailleur indigène ou ressortissant d’un État membre de l’UE/AELE et qu’il s’est trouvé dans une impossibilité absolue de trouver une personne capable d’exercer cette activité (ATA/387/2023 du 18 avril 2023 consid. 5c et les références citées). L’employeur doit être en mesure de rendre crédibles les efforts qu’il a déployés, en temps opportun et de manière appropriée, en vue d’attribuer le poste en question à des candidats indigènes ou à des candidats ressortissants de l’UE/AELE. Des ressortissants d’États tiers ne seront contactés que dans le cas où les efforts entrepris n’ont pas abouti. Il convient dès lors de veiller à ce que ces démarches ne soient pas entreprises à la seule fin de s’acquitter d’une exigence. Elles doivent être engagées suffisamment tôt, dans un délai convenable avant l’échéance prévue pour la signature du contrat de travail. En outre, il faut éviter que les personnes ayant la priorité ne soient exclues sur la base de critères professionnels non pertinents tels que des séjours à l’étranger, des aptitudes linguistiques ou techniques qui ne sont pas indispensables pour exercer l’activité en question, etc. (arrêt du Tribunal administratif fédéral F-3286/2017 du 18 décembre 2017 consid. 6.2 ; ATA/387/2023 du 18 avril 2023 consid. 5c et les références citées).

Même si la recherche d’un employé possédant les aptitudes attendues de la part de l’employeur peut s’avérer ardue et nécessiter de nombreuses démarches auprès des candidats potentiels, de telles difficultés ne sauraient, à elles seules, conformément à une pratique constante des autorités en ce domaine, justifier une exception au principe de la priorité de recrutement énoncée à l’art. 21 LEI (arrêt du Tribunal administratif fédéral C_8717/2010 du 8 juillet 2011 consid. 8.1 ; ATA/387/2023 du 18 avril 2023 consid. 5c et les références citées).

La seule publication d’une annonce auprès de l’OCE, bien que diffusée également dans le système D______, ne peut être considérée comme une démarche suffisante. Par ailleurs, des démarches intervenues après un refus d’octroi d’autorisation de séjour avec activité lucrative doivent être considérées comme entreprises dans le seul but de s’acquitter des exigences légales (ATA/274/2022 du 15 mars 2022 consid. 3c).

13.         Enfin, conformément à l’art. 90 LEI, l’étranger et les tiers participant à une procédure prévue par la loi doivent collaborer à la constatation des faits déterminants pour son application. Ils doivent en particulier fournir des indications exactes et complètes sur les éléments déterminants pour la réglementation du séjour (let. a) et fournir sans retard les moyens de preuves nécessaires ou s’efforcer de se les procurer dans un délai raisonnable (let. b).

14.         En l’espèce, c'est à juste titre que l’OCIRT a refusé de donner une suite favorable à la demande d'autorisation de travail déposée en faveur du recourant.

Il n’est en effet pas démontré que B______ aurait effectué des recherches suffisantes sur le marché du travail suisse et européen en vue de trouver un collaborateur compétent. S’il est établi que la vacance du poste a été annoncé à l’OCE, le 16 mars 2023, il n’apparaît pas, à teneur des pièces au dossier, que la société aurait entrepris d’autres démarches, telles que la publication de l’annonce dans les quotidiens et la presse spécialisée ou le recours aux médias électroniques et aux agences privées de placement, afin de repourvoir le poste en question par un travailleur indigène ou ressortissant d’un État membre de l’EU/AELE. Il n’est notamment pas prouvé qu’elle aurait publié l’annonce sur son site internet et sur LinkedIn comme allégué par le recourant.

En tout état, de telles démarches n’atteignent pas le niveau de recherches requis par la loi et la jurisprudence pour considérer que la société se serait acquittée de ses obligations légales en matière de priorité du marché suisse ou européen.

Il faut aussi relever que le processus de recrutement n’a été initié par la société que postérieurement à la décision négative du 8 mars 2023. De plus, l’autorité intimée indique, sans être contredite, que la vacance du poste à l’OCE n’a été annoncée que pendant quinze jours. À cela s’ajoute que le profil du poste publié en mars 2023 semble avoir été calqué sur celui du recourant, ce qui laisse à penser que les recherches entreprises l’ont été avant tout pour des questions de forme alors que le choix de la société s’était en fait déjà porté sur le recourant, avec qui elle souhaitait prolonger la collaboration. Le tribunal observera que les exigences posées dans le cadre de l'appel à candidatures étaient excessivement resserrées pour un poste tel que celui dont il était question, et ce de manière contraire à la jurisprudence précitée (consid. 12). En particulier, le fait de lier de multiples compétences techniques à de très bonnes connaissances du tissu économique institutionnel genevois diminuait artificiellement et drastiquement les chances de trouver des candidatures répondant à un tel profil et faisait abstraction de la réalité qui consiste, pour les employeurs, à devoir en partie former leurs nouveaux collaborateurs.

S’agissant des recherches entreprises par la société en décembre 2021, lesquelles se sont également limitées à une annonce auprès de l’OCE, elles sont trop anciennes pour être pertinentes dans le contexte de la demande déposée en février 2023.

Dans ces conditions, force est de retenir, avec l’autorité intimée, que le recourant n’est pas parvenu à démontrer que B______ aurait réellement et concrètement été dans l’impossibilité de trouver un travailleur correspondant aux exigences du poste sur le marché local ou européen, en particulier parce qu'elle aurait, en vain, entrepris toutes les recherches utiles et nécessaires susceptibles d’être attendues d’elle qui permettraient de retenir que la condition de l'ordre de priorité de l'art. 21 al. 1 LEI serait remplie.

L'une des conditions légales cumulatives applicables (art. 18 let. c cum 21 al. 1 LEI) n’ayant pas été respectée, il n’est pas nécessaire d’examiner si les autres conditions sont réalisées. À toutes fins utiles, il sera toutefois relevé qu'aucun élément du dossier ne permet de considérer que l'activité du recourant au sein de B______ pourrait représenter un intérêt économique pour la Suisse au sens de l'art. 18 let. a LEI, tel que défini plus haut, que ce soit en termes de création de places de travail, d'investissements ou de diversification de l'économie régionale. Le poste en question, qui vise à aider des personnes sans emploi à se réinsérer professionnellement, est certes utile socialement, mais ne correspond pas aux objectifs de l'art. 18 let. a LEI, puisqu'il vise à pourvoir des places de travail déjà existantes. Il faut encore rappeler qu'il convient de ne pas confondre l'intérêt économique de la Suisse avec celui de l’employeur à engager le recourant en vue de développer son activité.

En conclusion, l'autorité intimée n'a ni violé le droit, ni excédé son pouvoir d'appréciation en refusant de délivrer au recourant le titre requis.

15.         À titre subsidiaire, le recourant sollicite la délivrance d’une autorisation de courte durée.

Selon la jurisprudence, si un recourant est libre de contester tout ou partie de la décision attaquée, il ne peut pas prendre, dans son mémoire de recours, des conclusions qui sortent du cadre des questions traitées dans la procédure antérieure (ATA/85/2022 du 1er février 2022 consid. 3a).

Il en résulte que cette conclusion subsidiaire doit être déclarée irrecevable, car exorbitante de l’objet du litige, lequel ne concerne, à teneur de la décision attaquée, que l’octroi d’une autorisation de séjour avec activité lucrative (permis B).

16.         Dès lors que le présent jugement tranche le fond du litige, la conclusion du recourant portant sur l’effet suspensif se révèle dépourvue d’objet.

17.         Au vu de ce qui précède, le recours sera rejeté et la décision contestée confirmée.

18.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), le recourant, succombe, est condamné au paiement d’un émolument s’élevant à CHF 500.- ; il est couvert par l’avance de frais du même montant versée à la suite du dépôt du recours. Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

19.         En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent jugement sera communiqué au secrétariat d’État aux migrations.

 


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 7 juillet 2023 par Monsieur A______ contre la décision de de l’office cantonal de l’inspection et des relations du travail du 7 juin 2023 ;

2.             le rejette ;

3.             met à la charge du recourant un émolument de CHF 500.-, lequel est couvert par l’avance de frais de CHF 500.- ;

4.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l’objet d’un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L’acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d’irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Au nom du Tribunal :

Le président

Olivier BINDSCHEDLER TORNARE

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties, ainsi qu’au secrétariat d’État aux migrations.

Genève,

 

La greffière