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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/1365/2022

JTAPI/1437/2022 du 21.12.2022 ( OCPM ) , REJETE

ATTAQUE

Descripteurs : AUTORISATION DE SÉJOUR;ACCORD SUR LA LIBRE CIRCULATION DES PERSONNES;ASSISTANCE PUBLIQUE;RENVOI(DROIT DES ÉTRANGERS);CAS DE RIGUEUR;RESPECT DE LA VIE PRIVÉE
Normes : ALCP.4; OLCP.20; LEI.30.al1.letb; LEI.61a; CEDH.8
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1365/2022

JTAPI/1437/2022

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 21 décembre 2022

 

dans la cause

 

Monsieur A______, représenté par Me Benoît MORZIER, avocat, avec élection de domicile

 

contre

 

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

 


EN FAIT

1.             Monsieur A______, ressortissant français, est né à B______ (VD) le
______ 1972.

2.             Il a été mis au bénéfice d’une autorisation d’établissement à sa naissance du fait que sa mère disposait, à cette époque, d’une telle autorisation.

3.             Leurs autorisations d’établissement ayant expiré en août 1978, M. A______ et sa mère ont quitté la Suisse, tout en y revenant régulièrement.

4.             En novembre 1983, M. A______ s’est réinstallé avec sa famille dans la région lausannoise. Il a obtenu une nouvelle autorisation de séjour le 10 février 1987.

5.             En octobre 1988 et février 1992, il a été condamné successivement à dix jours de détention, avec sursis pendant un an, puis à trois mois de détention ferme et à la révocation du sursis pour, notamment, escroquerie et faux dans les titres. En novembre 1992 et février 1993, le Tribunal de district de Lausanne a converti respectivement six amendes infligées à M. A______ en dix-huit jours d’arrêts et six amendes en cinquante-et-un jours d’arrêts. En mars 1994, ledit tribunal l’a reconnu coupable d’escroquerie par métier, de faux dans les titres, de violation simple et grave de la circulation routière, de circulation après un retrait de permis de conduire et de contraventions tant à l’ordonnance réglant l’admission des personnes et des véhicules à la circulation routière du 27 octobre 1976 (OAC - RS 741.51) qu’à la loi fédérale sur les stupéfiants et les substances psychotropes, du
3 octobre 1951 (LStup - RS 812.121) ; il l’a de ce fait condamné à deux ans et demi d’emprisonnement et à une amende de CHF 1’000.-.

6.             En mai 1994, le service de la population du canton de Vaud (ci-après : SPOP ; à l’époque office cantonal de contrôle des habitants et de police des étrangers) a refusé de délivrer une autorisation de séjour à M. A______. Les recours interjetés contre ce refus ont été rejetés le 14 juin 1995 par le Tribunal administratif vaudois et le 19 octobre 1995 par le Tribunal fédéral.

7.             M. A______ a dès lors quitté la Suisse.

8.             En mai 1996, le Tribunal de district de Lausanne l’a condamné, par défaut, pour escroquerie et faux dans les titres, à trois mois d’emprisonnement. En mars 1997, ce même tribunal l’a condamné, pour escroquerie et faux dans les titres, à un mois d’emprisonnement. En mars 1999, il l’a condamné, par défaut, pour escroquerie, faux dans les titres, tentative d’escroquerie et infraction à la législation sur les étrangers, à huit mois d’emprisonnement, peine partiellement complémentaire à celle prononcée en mars 1997.

9.             Le 29 décembre 2000, M. A______ a épousé Madame C______, née le ______ 1978, ressortissante suisse, à Orbe, où il était incarcéré à cette époque.

10.         Deux enfants, D______ et E______ A______, sont nés les ______ 2001 et ______ 2007 de cette union. M. A______ est également le père d’un autre enfant, F______, fruit d’une précédente union.

11.         Le 10 septembre 2001, le juge d’instruction de l’arrondissement de Lausanne l’a condamné à vingt jours d’emprisonnement pour rupture de ban, violation simple des règles de la circulation routière et usage abusif de permis ou de plaques.

12.         Le 28 novembre 2002, M. A______ a déposé une demande d’autorisation de séjour pour vivre avec son épouse auprès de l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM ; à l’époque office cantonal de la population)

13.         Le 7 février 2003, celui-ci lui a délivré une autorisation de séjour UE/AELE, valable jusqu’au 27 novembre 2007 (cinq ans depuis le dépôt de la requête).

14.         Le 7 novembre 2003, le Procureur général genevois a condamné M. A______ à vingt jours d’emprisonnement pour lésions corporelles simples.

15.         Le 25 mai 2004, le juge d’instruction de La Côte Morges lui a infligé une amende de CHF 1’000.-, avec un sursis de deux ans, pour violation grave des règles de la circulation routière.

16.         Le 21 septembre 2005, le SPOP a informé l’OCPM de l’arrivée M. A______ dans le canton de Vaud.

17.         Le 14 décembre 2006, le Tribunal de police genevois l’a reconnu coupable de filouterie d’auberge et l’a condamné à quatre mois d’emprisonnement.

18.         Le 7 mars 2007, le SPOP a délivré à M. A______ une autorisation de séjour UE/AELE, valable jusqu’au 27 novembre 2007.

19.         Le 3 juillet 2008, compte tenu de son passé délictueux en Suisse, il a refusé de lui octroyer une autorisation d’établissement, mais a indiqué être disposé à renouveler son autorisation de séjour.

20.         Le 18 mars 2009, le Tribunal de l’arrondissement de Lausanne a, notamment, libéré M. A______ de l’accusation de filouterie d’auberge, constaté qu’il s’était rendu coupable d’escroquerie et de faux dans les titres et l’a ainsi condamné à une peine privative de liberté de dix mois, peine complémentaire à celle prononcée le 14 décembre 2006 par le Tribunal de police de Genève. Par arrêt du 22 juin 2009, la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal vaudois a constaté que M. A______ s’était rendu coupable d’escroquerie, de filouterie d’auberge et de faux dans les titres ; elle a pour le surplus confirmé le jugement du 18 mars 2009.

21.         Selon un rapport de la police vaudoise du 16 février 2010, M. A______ a indiqué, notamment, être séparé de son épouse de manière officielle et ne pas avoir de domicile fixe.

22.         Le 25 mars 2011, le SPOP a refusé de prolonger son autorisation de séjour et lui a imparti un délai au 25 avril 2011 pour quitter la Suisse. Le courrier recommandé notifiant cette décision n’a pas été réclamée par M. A______.

23.         Le 5 décembre 2013, le Tribunal de l’arrondissement de Lausanne a condamné M. A______ à une peine privative de liberté de six mois ainsi qu’à une amende de CHF 500.- pour vol d’importance mineure, obtention frauduleuse d’une prestation d’importance mineure, escroquerie, filouterie d’auberge, tentative de menaces qualifiées et violation d’une obligation d’entretien. Le 2 juin 2014, la Cour d’appel pénale du Tribunal cantonal vaudois a confirmé ce jugement.

24.         Le 21 septembre 2015, le Ministère public genevois a condamné M. A______ à une peine pécuniaire de nonante jours-amende et à une amende de CHF 200.- pour lésions corporelles simples et contravention selon l’art. 19a LStup.

25.         Le 21 octobre 2015, le Tribunal d’arrondissement de Lausanne l’a condamné à une peine privative de liberté de huit mois ainsi qu’à une amende de CHF 500.- pour appropriation illégitime, abus de confiance, vol d’importance mineure, escroquerie, filouterie d’auberge, obtention frauduleuse d’une prestation, faux dans les titres, faux dans les certificats, violation grave des règles de la circulation routière et contravention à la LStup. Le 11 avril 2016, la Cour d’appel pénale du Tribunal cantonal vaudois a confirmé ce jugement.

26.         Le 16 septembre 2016, le Ministère public genevois l’a condamné à une peine privative de liberté de vingt jours pour vol.

27.         Le 1er février 2017, suite à sa prise de domicile dans le canton de Genève, M. A______ a déposé une demande de changement de canton auprès de l’OCPM.

28.         Par jugement du 27 février 2017, le divorce requis unilatéralement le 15 juin 2012 par l’épouse de M. A______ a été prononcé et la convention sur les effets du divorce des parties a été ratifiée, de sorte que l’autorité parentale et la garde des enfants ont été attribuées à cette dernière, M. A______ a été mis au bénéfice d’un droit de visite sur sa fille, à exercer d’entente avec le service de la protection de la jeunesse, et il a été condamné à contribuer à l’entretien de ses enfants pour autant que son revenu mensuel net atteigne CHF 3'500.-.

Il ressort notamment de ce jugement que M. A______ était en détention depuis le 14 juillet 2016.

29.         Le 5 décembre 2019, le Ministère public valaisan a condamné M. A______ à une peine pécuniaire de trente jours-amende, avec sursis de deux ans, et à une amende de CHF 500.- pour contravention à l’art. 19a LStup et conducteur se trouvant en incapacité de conduire.

30.         Le 26 mai 2020, le Ministère public genevois l’a condamné à une peine pécuniaire de nonante jours-amende pour escroquerie.

31.         Le 17 décembre 2020, il l’a condamné à une peine pécuniaire de quarante-cinq jours-amende ainsi qu’à une amende de CHF 750.- pour escroquerie et vol d’importance mineure.

32.         Le 8 juin 2021, l’OCPM a adressé une demande de renseignements, en lien avec la relation entretenue par M. A______ avec ses deux enfants, à l’ex-épouse de l’intéressé ; celle-ci n’y a pas répondu.

33.         Les 15 et 22 mai ainsi que le 24 juillet 2021, faisant suite à une demande de renseignements, M. A______ a indiqué à l’OCPM être en attente d’obtenir un contrat de travail, qu’il transmettrait dès qu’il serait en sa possession, et a exposé avoir tous ses liens, familiaux, professionnels et sociaux en Suisse.

34.         Selon l’extrait de l’office des poursuites du 10 juin 2021, M. A______ faisait l’objet de quarante-trois poursuites et impossibilités de notifier le commandement de payer pour un montant total de CHF 247’379,78, dont CHF 96’533,50 était réclamé par le bureau de recouvrement et d’avances des pensions alimentaires du canton de Vaud. Il faisait aussi l’objet de cinq actes de défaut de biens pour un total de CHF 9'434,35.

35.         Le 18 octobre 2021, l’OCPM a informé M. A______ de son intention de refuser de lui octroyer une autorisation de séjour UE/AELE et de prononcer son renvoi de Suisse dans la mesure où il ne remplissait pas les conditions d’octroi d’une telle autorisation en application de l’accord du 21 juin 1999 entre la Confédération suisse d’une part, et la Communauté européenne et ses États membres, d’autre part, sur la libre circulation des personnes (ALCP - RS 0.142.112.681).

36.         Le 16 novembre 2021, le conseil de M. A______ a demandé à pouvoir consulter le dossier et à ce que le délai pour se déterminer sur l’intention du 18 octobre 2021 soit prolongé. Il a également indiqué que son mandant avait vécu quasi toute sa vie en Suisse.

37.         Le 5 décembre 2021, auditionné par la police genevoise, M. A______ a indiqué, notamment, être à l’aide sociale depuis deux ans, avoir trois enfants, dont deux majeurs et la troisième suivant une formation de danse en internat à G______ (F), et devoir de l’argent à diverses personnes (en particulier CHF 2’100.- au SAPEM, CHF 8’000.- à son bailleur - il faisait à ce sujet l’objet d’une procédure auprès du tribunal des baux et loyers - et CHF 20’000.- à son assurance-maladie).

38.         Il a été incarcéré le jour même, des amendes qui lui avaient été infligées n’ayant pas été réglées et ainsi converties en peine privative de liberté de substitution.

39.         M. A______ est venu consulter son dossier, seul, le 21 janvier 2022 dans les locaux de l’OCPM.

40.         Par décision du 15 mars 2022, l’OCPM a refusé d’octroyer une autorisation de séjour UE/AELE en faveur de M. A______, a prononcé son renvoi et lui a imparti un délai au 30 avril 2022 pour quitter la Suisse, l’exécution de cette mesure n’apparaissait pas impossible, illicite ou non raisonnablement exigible.

M. A______ avait régulièrement fait l’objet de condamnations pénales depuis 1990, dont pas moins de sept condamnations depuis 2013. Il faisait aussi l’objet de cinq actes de défaut de biens ainsi que de nombreuses poursuites et impossibilités de notifier un commandement de payer pour plusieurs milliers de francs. Il avait en outre bénéficié de prestation d’aide sociale tant dans le canton de Vaud que dans celui de Genève. À Genève, il avait bénéficié des prestations d’aide sociale du 1er juin 2017 au 28 février 2018, puis du 1er juillet 2020 à ce jour, pour un total de CHF 49’614.-. Il était sans emploi et donc sans moyens financiers autre que l’aide sociale. Dans ces circonstances, il ne remplissait pas les conditions d’octroi d’une autorisation de séjour au sens de l’ALCP. Il indiquait certes avoir des offres d’emploi depuis une année, mais sans les documenter, et lorsqu’elles l’étaient, la promesse d’embauche ne se concrétisait pas. Dès lors, la condition d’octroi d’une autorisation de séjour au sens de l’art. 6 annexe I ALCP n’était pas remplie, faute d’occuper un emploi à ce jour. Il en allait de même pour l’octroi d’une telle autorisation au sens de l’art. 24 annexe I ALCP ou d’une autorisation de séjour de courte durée en vue de recherche d’emploi au sens de l’art. 2 par. 1 annexe I ALCP, dans la mesure où il n’avait pas démontré disposer de ses propres moyens financiers et qu’il dépendait totalement de l’aide sociale depuis de nombreuses années. M. A______ ne remplissait pas non plus les conditions d’octroi d’une autorisation de séjour pour raison majeure. En effet, quand bien même il était né en Suisse et qu’il y avait vécu de nombreuses années, son intégration ne pouvait être qualifiée de réussie vu sa dépendance à l’aide sociale, ses nombreuses dettes et actes de défaut de biens et le fait qu’il était très défavorablement connu des forces de l’ordre depuis les années 1990.

M. A______ ne pouvait se prévaloir de l’art. 8 de la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101). Sur trois enfants, deux étaient majeurs et la troisième ne résidait pas en Suisse, suivant une formation en internat à G______. En tout état, même si elle vivait en Suisse, il n’avait pas démontré entretenir avec elle une relation étroite et effective d’un point de vue affectif et économique. Par ailleurs, il n’avait bénéficié d’aucun titre de séjour sur les dix dernières années et son comportement avait été délictueux en Suisse durant toutes ces années.

Au surplus, il lui était loisible de se domicilier en France, à quelque kilomètre de la Suisse, pour continuer à chercher un emploi et, le cas échéant, déposer une nouvelle autorisation de séjour UE/AELE ou encore une autorisation frontalière UE/ALCP.

41.         Par acte du 2 mai 2022, sous la plume de son conseil, M. A______ a interjeté recours contre cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal), concluant, avec suite de frais et dépens, à ce que la décision litigieuse soit réformée en ce sens qu’une autorisation de séjour avec activité lucrative lui soit accordée. Il a également sollicité de pouvoir compléter ses écritures.

Il avait obtenu une promesse de contrat de travail le 13 avril 2022 de la société H______ (ci-après : H______), qui avait proposé de l’engager dès le 1er mai 2022 en qualité de « Business Developer ». Dans la mesure où il ne disposait actuellement pas d’un permis de séjour valable, cette promesse d’embauche devait être concrétisée par une demande en bonne et due forme auprès de l’autorité compétente, processus en cours. Il devait donc être autorisé à compléter son argumentaire en produisant les pièces démontrant que cette promesse d’embauche précitée serait concrétisée.

S’agissant de l’absence de revenus et de sa dépendance à l’aide sociale depuis plus de deux ans, l’OCPM n’avait pas tenu compte des circonstances particulières et de la situation exceptionnelle liée à la pandémie de mars 2020 à avril 2022. Il était ingénieur du son de formation et avait toujours œuvré dans le domaine du divertissement ou du spectacle au sens large du terme. Or, il était notoire que son domaine d’activité avait été la cible principale des mesures restrictives prises par les autorités. Lui faire dès lors grief d’émarger à l’aide sociale parce qu’il n’avait pas obtenu un emploi, respectivement un contrat de travail dans son domaine d’activité de la même manière que si le monde n’avait pas connu la pandémie de COVID-19 apparaissait être arbitraire puisque cette décision écartait un élément de fait important pour juger de la cause. Cette conséquence financière imprévisible ne pouvait être retenue à sa charge sans lui laisser le temps de se retourner, étant rappelé que les dernières restrictions avaient été levées le 1er avril 2022. Une mauvaise intégration ne saurait donc être retenue sur cette base financière.

De manière étrange et « sans pousser plus avant la motivation », l’OCPM avait retenu qu’il était défavorablement connu des forces de l’ordre et qu’il avait fait l’objet de sept condamnations sur les neuf dernières années pour considérer qu’il n’aurait pas démontré qu’un retour dans son pays d’origine le mettrait dans une situation de rigueur. Il peinait à comprendre sur quel motif il devait se défendre. L’OCPM avait aussi fait fi du fait qu’il avait ouvert une procédure civile le 11 mai 2021, doublée d’une requête de mesures superprovisionnelles et provisionnelles pour obtenir l’autorité parentale sur sa fille E______ et un droit de visite élargi ; un mandat d’évaluation de la situation avait été mis en œuvre par prononcé du tribunal civil du 19 juillet 2021. Ainsi, s’il n’avait pas de contacts avec sa fille, il se battait pour rétablir ses droits parentaux ; il devait aussi être autorisé à compléter ses écritures sur ce point. À ce sujet, il ressortait d’un courrier du 20 juillet 2021 de la direction générale de l’enseignement obligatoire et de la pédagogie spécialisée du canton de Vaud que son ex-épouse souhaitait scolariser E______ à domicile et non dans un internat en France. Ainsi, si sa fille avait effectivement pu fréquenter une école en France, il n’était pas établi que cela soit définitif, de sorte qu’il pourrait être amené à exercer ses droits parentaux en Suisse lorsque la procédure civile en modification de jugement de divorce, respectivement l’application stricte dudit jugement serait effective. Dès lors, il existait potentiellement un cas de rigueur au sens de l’art. 8 CEDH, respectivement de l’art. 20 de l’ordonnance sur l’introduction progressive de la libre circulation des personnes entre, d’une part, la Confédération suisse et, d’autre part, l’Union européenne1 et ses États membres, ainsi qu’entre les États membres de l’Association européenne de libre-échange du 22 mai 2002 (OLCP - RS 142.203) en lien avec l’art. 31 de l’ordonnance relative à l’admission, au séjour et à l’exercice d’une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201). Il ne résultait pas de la décision litigieuse que cette question ait été traitée de manière approfondie, de sorte que l’instruction devait être reprise à cet égard de manière plus poussée.

42.         Le 28 juin 2022, l’OCPM a transmis son dossier au tribunal, accompagné de ses observations. Les arguments invoqués n’étaient pas de nature à modifier sa position et il maintenait sa décision. Le recourant n’ayant pas la qualité de travailleur et ne satisfaisant pas aux conditions présidant à l’octroi d’un titre de séjour UE/AELE sans activité lucrative, il ne pouvait se prévaloir d’aucun droit pour obtenir une autorisation de séjour sur la base de cet accord. De plus, la durée continue de son séjour et son intégration en Suisse ne revêtaient pas une importance suffisante. Il n’avait en outre pas démontré qu’en cas de retour en France, il serait exposé à des conditions socioéconomiques ou sanitaires autrement plus difficiles que celles auxquelles était confrontée la plupart de ses compatriotes restés au pays.

43.         Par réplique du 31 août 2022, le recourant a persisté dans ses conclusions. En sus de sa promesse de contrat de travail du 13 avril 2022, H______ avait déposé, le
9 mai 2022, une demande en vue du renouvellement et modification de situation pour titulaire d’un titre de séjour avec activité lucrative (formulaire K). Ce processus était toujours en cours auprès de l’OCPM, qui s’était bien gardé de le mentionner dans sa réponse. Ses perspectives de gain, en qualité de commercial apporteur d’affaires à 100%, étaient réelles et démontrées et ne dépendaient en définitive que de la conclusion du contrat qui ne pourrait être effective qu’une fois que le permis de séjour délivré respectivement renouvelé. Au vu de ce qui précédait, l’argument lié à sa situation financière perdait toute sa force.

44.         Par duplique du 23 septembre 2022, l’OCPM a maintenu sa position. Sauf erreur de sa part ou preuve contraire ressortant de son dossier transmis au tribunal, il n’avait jamais réceptionné le formulaire K produit par le recourant. En tout état, cette promesse d’embauche n’était pas de nature à apporter un regard différent sur la situation administrative du recourant. En effet, H______ avait promis de l’engager dès qu’il aurait obtenu un permis de séjour, pour un salaire mensuel brut de CHF 1’500.- plus commissions ; la durée du contrat de travail et le taux d’activité proposé n’étaient pas précisés. Dans ces circonstances, cette activité n’était qu’accessoire et marginale et ne permettait pas de reconnaître la qualité de travailleur au recourant. En outre, une activité lucrative exercée par un européen pouvant débuter dès l’envoi de la demande à l’autorité de migration compétente, on pouvait se demander pour quelles raisons le recourant, assisté par un avocat, n’avait pas commencé à travailler pour H______ depuis mai 2022 afin de ne plus dépendre de l’assistance publique.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions de l’office cantonal de la population et des migrations relatives au statut d’étrangers dans le canton de Genève (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 3 al. 1 de la loi d’application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 60 et 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

3.             Selon l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l’espèce.

Il y a en particulier abus du pouvoir d’appréciation lorsque l’autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu’elle viole des principes généraux du droit tels que l’interdiction de l’arbitraire et de l’inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_712/2020 du 21 juillet 2021 consid. 4.3 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2018, n. 515 p. 179).

4.             Saisi d’un recours, le tribunal applique le droit d’office. Il ne peut pas aller au-delà des conclusions des parties, mais n’est lié ni par les motifs invoqués par celles-ci (art. 69 al. 1 LPA), ni par leur argumentation juridique (ATA/1166/2021 du 2 novembre 2021 consid. 2).

5.             Selon la maxime inquisitoire, qui prévaut en particulier en droit public, l’autorité définit les faits pertinents et ne tient pour existants que ceux qui sont dûment prouvés. Elle ne dispense pas pour autant les parties de collaborer à l’établissement des faits ; il incombe à celles-ci d’étayer leurs propres thèses, de renseigner le juge sur les faits de la cause et de lui indiquer les moyens de preuves disponibles, spécialement lorsqu’il s’agit d’élucider des faits qu’elles sont le mieux à même de connaître (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_728/2020 du 25 février 2021 consid. 4.1 ; 2C_1156/2018 du 12 juillet 2019 consid. 3.3 et les références cités). En matière de droit des étrangers, l’art. 90 de la loi fédérale sur les étrangers et l’intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20) met un devoir spécifique de collaborer à la constatation des faits déterminants à la charge de l’étranger ou des tiers participants (ATF 142 II 265 consid. 3.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_728/2020 du 25 février 2021 consid. 4.1 ; 2C_323/2018 du 21 septembre 2018 consid. 8.3.3).

Lorsque les preuves font défaut ou s’il ne peut être raisonnablement exigé de l’autorité qu’elle les recueille pour les faits constitutifs d’un droit, le fardeau de la preuve incombe à celui qui entend se prévaloir de ce droit (cf. ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_27/2018 du 10 septembre 2018 consid. 2.2 ; 1C_170/2011 du 18 août 2011 consid. 3.2 et les références citées ; ATA/99/2020 du 28 janvier 2020 consid. 5b). Il appartient ainsi à l’administré d’établir les faits qui sont de nature à lui procurer un avantage et à l’administration de démontrer l’existence de ceux qui imposent une obligation en sa faveur (ATA/978/2019 du 4 juin 2019 consid. 4a ; ATA/1155/2018 du 30 octobre 2018 consid. 3b et les références citées).

Par ailleurs, en procédure administrative, tant fédérale que cantonale, la constatation des faits est gouvernée par le principe de la libre appréciation des preuves (art. 20 al. 1 2ème phr. LPA ; ATF 139 II 185 consid. 9.2 ; 130 II 482 consid. 3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_668/2011 du 12 avril 2011 consid. 3.3 ; ATA/978/2019 du 4 juin 2019 consid. 4b). Le juge forme ainsi librement sa conviction en analysant la force probante des preuves administrées et ce n’est ni le genre, ni le nombre des preuves qui est déterminant, mais leur force de persuasion (ATA/978/2019 du 4 juin 2019 consid. 4b et les arrêts cités).

6.             Le recourant invoque, dans un premier grief, une violation de son droit d’être entendu, sous l’angle d’un défaut de motivation de la décision attaquée.

7.             L’art. 46 al. 1 LPA fait obligation aux autorités administratives de rendre des décisions motivées. L’obligation de motivation constitue un principe général du droit administratif découlant du droit d’être entendu (ATF 138 I 232 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_478/2017 du 8 mai 2018 consid. 2.1).

Selon une jurisprudence constante, l’obligation de motiver n’impose pas à l’autorité d’exposer et de discuter tous les faits, moyens de preuve et griefs invoqués par les parties (ATF 143 III 65 consid. 5.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_298/2017 du 30 avril 2018 consid. 2.1). Elle peut, au contraire, se limiter à ceux qui, sans arbitraire, lui paraissent pertinents. Une motivation est suffisante lorsque le destinataire de la décision est en mesure de se rendre compte de la portée de cette dernière, d’en comprendre les raisons et de la déférer à l’instance supérieure en connaissance de cause (ATF 141 V 557 consid. 3.2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_404/2019 du 5 décembre 2019 consid. 4.2.1 ; ATA/1192/ 2021 du 9 novembre 2021 consid. 2a). Dès lors que l’on peut discerner les motifs qui ont guidé la décision de l’autorité, le droit à une décision motivée est respecté, même si la motivation présentée est erronée. La motivation peut pour le reste être implicite et résulter des différents considérants de la décision (ATF 138 IV 81 consid. 2.2). L’autorité peut passer sous silence ce qui, sans arbitraire, lui paraît à l’évidence non établi ou sans pertinence. Il n’y a ainsi violation du droit d’être entendu que si elle ne satisfait pas à son devoir minimum d’examiner les problèmes pertinents (ATF 129 I 232 consid. 3.2).

La jurisprudence admet qu’une violation du droit d’être entendu en instance inférieure peut être réparée lorsque l’intéressé a eu la faculté de se faire entendre en instance supérieure par une autorité disposant d’un plein pouvoir d’examen en fait et en droit (ATF 145 I 167 consid. 4.4). Une telle réparation dépend de la gravité et de l’étendue de l’atteinte portée au droit d’être entendu et doit rester l’exception (ATF 142 II 218 consid. 2.8.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_819/2018 du 25 janvier 2019 consid. 3.8). Elle peut cependant se justifier en présence d’un vice grave, lorsque le renvoi constituerait une vaine formalité et aboutirait à un allongement inutile de la procédure (ATF 142 II 218 consid. 2.8.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C/72/2019 du 13 mai 2019 consid. 3.1). En outre, la possibilité de recourir doit être propre à effacer les conséquences de cette violation. Autrement dit, la partie lésée doit avoir le loisir de faire valoir ses arguments en cours de procédure contentieuse aussi efficacement qu’elle aurait dû pouvoir le faire avant le prononcé de la décision litigieuse (ATA/779/2021 du 27 juillet 2021 consid. 4b).

8.             En l’espèce, le recourant se plaint d’un défaut de motivation de la décision entreprise en indiquant ne pas comprendre sur quel motif il devait se défendre lorsque l’OCPM lui reprochait d’être défavorablement connu des forces de l’ordre, d’avoir fait l’objet de sept condamnations sur les neuf dernières années et de ne pas avoir « ainsi » démontré qu’un retour en France le mettrait dans une situation de rigueur. Si cette formulation est certes difficilement compréhensible, puisqu’il n’y a, en soi, pas de corrélation entre, d’une part, un comportement délictuel et, partant, une absence d’intégration en Suisse et, d’autre part, le fait que les conditions de réintégration dans le pays d’origine soient gravement compromises, le tribunal ne peut toutefois retenir que cela constitue une violation du droit d’être entendu du recourant. En effet, le refus de d’octroyer une autorisation de séjour sous l’angle du cas de rigueur est motivé, même si la formulation employée est, sur ce point, peu claire, voire incompréhensible.

Au surplus, dans sa réponse du 28 juin 2022, l’autorité intimée a indiqué qu’une telle autorisation de séjour ne pouvait être octroyée au recourant aux motifs que la durée continue de son séjour et son intégration en Suisse ne revêtaient pas une importance suffisante et qu’il n’avait « en outre » pas démontré qu’il serait exposé, en cas de retour en France, à des conditions socioéconomiques ou sanitaires autrement plus difficiles que celles auxquelles était confrontée la plupart de ses compatriotes restés au pays. On constate ainsi que l’erreur de plume commise dans la décision, à savoir l’utilisation du terme « ainsi » au lieu de « en outre », a été corrigée. Le recourant a eu la possibilité de se prononcer à cet égard, ce qu’il a d’ailleurs fait en répliquant le 31 août 2022. Partant, force est de constater que même à retenir une violation du droit d’être entendu, celle-ci aurait été réparée en cours de procédure. Ce grief sera par conséquent écartée.

9.             Le recourant soutient remplir les conditions pour obtenir une autorisation de séjour du fait qu’il a un emploi, H______ lui ayant fait une promesse de contrat de travail le 13 avril 2022 et ayant déposé, le 9 mai 2022, une demande en vue du renouvellement et modification de situation pour titulaire d’un titre de séjour avec activité lucrative.

10.         La LEI et ses ordonnances d’exécution, en particulier l’OASA, règlent l’entrée, le séjour et la sortie des étrangers dont le statut juridique n’est pas réglé par d’autres dispositions du droit fédéral ou par des traités internationaux conclus par la Suisse (art. 1 et 2 LEI), notamment par l’ALCP. La loi ne s’applique aux ressortissants des États membres de l’Union européenne que lorsque l’ALCP n’en dispose pas autrement ou lorsqu’elle prévoit des dispositions plus favorables (art. 12 ALCP et 2 al. 2 LEI).

11.         En l’espèce, le recourant étant de nationalité française, sa situation doit dès lors être examinée sous l’angle de l’ALCP.

12.         Les droits d’entrée, de séjour et d’accès à une activité économique conformément à l’ALCP, y compris le droit de demeurer sur le territoire d’une partie contractante après la fin d’une activité économique, sont réglés par l’Annexe I ALCP (art. 3, 4 et 7 let. c ALCP).

13.         Selon l’art. 4 ALCP, le droit de séjour et d’accès à une activité économique est garanti sous réserve des dispositions de l’art. 10 et conformément aux dispositions de l’annexe I. Les ressortissants d’une partie contractante ont le droit de séjourner et d’exercer une activité économique sur le territoire de l’autre partie contractante selon les modalités prévues aux chapitres II à IV de l’Annexe I ALCP (art. 2 al. 1 Annexe I ALCP). L’art. 6 al. 1 Annexe I ALCP prévoit que le travailleur salarié ressortissant d’une partie contractante qui occupe un emploi d’une durée égale ou supérieure à un an au service d’un employeur de l’État d’accueil reçoit un titre de séjour d’une durée de cinq ans au moins à dater de sa délivrance. Celui-ci est automatiquement prolongé pour une durée de cinq ans au moins. Lors du premier renouvellement, sa durée de validité peut être limitée, sans pouvoir être inférieure à un an, lorsque son détenteur se trouve dans une situation de chômage involontaire depuis plus de douze mois consécutifs.

14.         La qualité de travailleur salarié constitue une notion autonome de droit de l’UE, qui doit s’interpréter en tenant compte de la jurisprudence de la Cour de Justice de l’Union européenne (ci-après: CJUE ; ATF 140 II 460 consid. 4.1 ; 131 II 339 consid. 3.1). Le Tribunal fédéral a déjà eu l’occasion de préciser que, conformément à la jurisprudence de la CJUE, la notion de travailleur, qui délimite le champ d’application du principe de la libre circulation des travailleurs, doit être interprétée de façon extensive, tandis que les exceptions et dérogations à cette liberté fondamentale doivent, au contraire, faire l’objet d’une interprétation stricte. Doit ainsi être considérée comme un « travailleur » la personne qui accomplit, pendant un certain temps, en faveur d’une autre personne et sous la direction de celle-ci, des prestations en contrepartie desquelles elle touche une rémunération (existence d’une prestation de travail, d’un lien de subordination et d’une rémunération). Cela suppose l’exercice d’activités réelles et effectives, à l’exclusion d’activités tellement réduites qu’elles se présentent comme purement marginales et accessoires (ATF 141 II 1 consid. 2.2.4 ; arrêt 2C_945/2021 du 11 août 2022 consid. 6.2).

Pour apprécier si l’activité exercée est réelle et effective, on peut tenir compte de l’éventuel caractère irrégulier des prestations accomplies, de leur durée limitée ou de la faible rémunération qu’elles procurent. Ainsi, le fait qu’un travailleur n’effectue qu’un nombre très réduit d’heures - dans le cadre par exemple d’une relation de travail fondée sur un contrat de travail sur appel - ou qu’il ne gagne que de faibles revenus, peut être un élément indiquant que l’activité exercée n’est que marginale et accessoire. À cet égard, le Tribunal fédéral a eu l’occasion de préciser qu’un travail exercé au taux de 80% pour un salaire mensuel de CHF 2’532,65 ne représentait pas un emploi à tel point réduit ou une rémunération si basse qu’il s’agirait d’une activité purement marginale et accessoire sortant du champ d’application de l’art. 6 Annexe I. En revanche, il a considéré qu’une activité à taux partiel donnant lieu à un salaire mensuel d’environ CHF 600.- à 800.- apparaissait tellement réduite et peu rémunératrice qu’elle devait être tenue pour marginale et accessoire (arrêt 2C_945/2021 du 11 août 2022 consid. 6.2 et les références citées).

15.         Un étranger au bénéfice d’une autorisation de séjour UE/AELE peut ainsi perdre le statut de travailleur au sens de l’ALCP et par conséquent se voir refuser la prolongation, respectivement se voir révoquer l’autorisation de séjour dont il est titulaire si 1) il se trouve dans un cas de chômage volontaire ; 2) on peut déduire de son comportement qu’il n’existe (plus) aucune perspective réelle qu’il soit engagé à nouveau dans un laps de temps raisonnable ou 3) il adopte un comportement abusif, par exemple en se rendant dans un autre État membre pour y exercer un travail fictif ou d’une durée extrêmement limitée dans le seul but de bénéficier de prestations sociales meilleures que dans son État d’origine ou que dans un autre État membre. Dans ce cas, en vertu de l’art. 23 al. 1 de l’OLCP, les autorités peuvent révoquer ou refuser de prolonger l’autorisation de séjour, si les conditions requises pour leur délivrance ne sont plus remplies (ATF 144 II 121 consid. 3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_945/2021 du 11 août 2022 consid. 6.3 ; ATA/655/2022 du 23 juin 2022 consid. 5c).

Par ailleurs, l’art. 61a LEI prévoit que le droit de séjour des ressortissants des États membres de l’UE ou de l’AELE titulaires d’une autorisation de courte durée prend fin six mois après la cessation involontaire des rapports de travail. Le droit de séjour des ressortissants des États membres de l’UE ou de l’AELE titulaires d’une autorisation de séjour prend fin six mois après la cessation involontaire des rapports de travail lorsque ceux-ci cessent avant la fin des douze premiers mois de séjour (al. 1). Si le versement d’indemnités de chômage perdure à l’échéance du délai de six mois prévu à l’al. 1, le droit de séjour prend fin à l’échéance du versement de ces indemnités (al. 2).

16.         Selon l’art. 4 al. 1 Annexe I ALCP, les ressortissants d’une partie contractante ont le droit de demeurer sur le territoire d’une autre partie contractante après la fin de leur activité économique. L’art. 4 al. 2 Annexe I ALCP renvoie, conformément à l’art. 16 ALCP, au règlement (CEE) 1251/70 (pour les travailleurs salariés) et à la directive 75/34/CEE (pour les indépendants), « tels qu’en vigueur à la date de la signature de l’accord ».

L’art. 2 par. 1 let. b du règlement (CEE) 1251/70 prévoit, en substance, que chaque État reconnaît un droit de demeurer à titre permanent sur son territoire à celui qui, résidant d’une façon continue sur le territoire de cet État depuis plus de deux ans, cesse d’y occuper un emploi salarié à la suite d’une incapacité permanente de travail. Selon la jurisprudence, pour pouvoir prétendre au droit de demeurer en Suisse sur la base de cette disposition, il faut que l’intéressé ait effectivement eu la qualité de travailleur et qu’il ait cessé d’occuper un emploi salarié suite à une incapacité de travail (ATF 144 II 121 consid. 3.2).

17.         À teneur de l’art. 24 par. 1 Annexe I ALCP, une personne ressortissant d’une partie contractante n’exerçant pas d’activité économique dans le pays de résidence reçoit un titre de séjour d’une durée de cinq ans au moins, à condition qu’elle prouve aux autorités nationales compétentes qu’elle dispose pour elle-même et les membres de sa famille de moyens financiers suffisants pour ne pas devoir faire appel à l’aide sociale pendant son séjour (let. a) et d’une assurance-maladie couvrant l’ensemble des risques (let. b).

Le droit de séjour demeure tant que les bénéficiaires de ce droit répondent à ces conditions (art. 24 par. 8 Annexe I ALCP).

L’art. 24 par. 2 Annexe I ALCP précise que les moyens financiers nécessaires sont réputés suffisants s’ils dépassent le montant en-dessous duquel les nationaux, eu égard à leur situation personnelle, peuvent prétendre à des prestations d’assistance. Selon l’art. 16 al. 1 OLCP, tel est le cas si ces moyens dépassent les prestations d’assistance qui seraient allouées en vertu des directives « Aide sociale : concepts et normes de calcul » de la Conférence suisse des institutions d’action sociale, à un ressortissant suisse, éventuellement aux membres de sa famille, sur demande de l’intéressé et compte tenu de sa situation personnelle. En d’autres termes, on considère que la condition de l’art. 16 al. 1 OLCP est remplie si les moyens financiers d’un citoyen suisse, dans la même situation, lui fermeraient l’accès à l’aide sociale (ATF 144 II 113 consid. 4.1 ; ATA/655/2022 du 23 juin 2022 consid. 8a).

18.         En l’occurrence, le recourant n’exerce aucune activité lucrative depuis plus de deux ans et émarge par conséquent entièrement à l’assistance publique depuis le mois de juillet 2020. À cet égard, le fait que cette situation puisse découler de la pandémie de COVID-19 n’a, en soi, pas pour effet ni de modifier la législation en vigueur ni de justifier que le recourant demeure et vive en Suisse sans y exercer un emploi lucratif grâce à l’aide sociale. Il faut relever qu’il n’était d’ailleurs pas contraint de se cantonner à son domaine d’activité et qu’il pouvait, voire devait rechercher un emploi dans un autre secteur économique moins impacté par les restrictions liées à la pandémie. Au surplus, ces restrictions ont été levées le
1er avril 2022 soit il y a plus de huit mois, de sorte que même à retenir qu’il était dans l’impossibilité de travailler jusqu’à cette date, le recourant aurait largement eu le temps (plus de six mois) de trouver depuis lors un emploi lui conférant la qualité de travailleur au sens de l’ALCP.

Tel n’a toutefois pas été le cas. En effet, sa relation avec H______ ne suffit pas pour considérer que le recourant bénéficie de la qualité de travailleur au sens de l’ALCP. D’une part, eu égard au salaire mensuel brut de CHF 1’500.- fixe promis, il faut retenir que cette activité n’est que marginale et accessoire, les commissions n'étant nullement assurées, ce d’autant plus qu’il ne résulte pas que le recourant possède la moindre expérience dans le domaine des travaux de rénovation du bâtiment et des opérations immobilières, champ d’activité d’H______ à teneur du registre du commerce vaudois. De plus, l’absence d’indication sur la durée du contrat de travail et le taux d’activité proposé conduisent également à penser que l’activité en cause n’est en fait ni réelle ni effective. D’autre part, alors qu’une activité lucrative exercée par un ressortissant français peut débuter dès l’envoi de la demande à l’OCPM, ce que le recourant assisté d’un avocat devait savoir déjà au mois de mai 2022 et qu’il a, en tout état, appris à la lecture de la duplique du 23 septembre 2022, il n’a produit aucune pièce, alors que le fardeau de la preuve lui incombe, sur les revenus qu’il aurait réalisés grâce à cet emploi ni sur le fait qu’il ne dépendrait plus de l’assistance publique. À titre superfétatoire, le tribunal relève que les promesses d’embauche remises par le passé à l’OCPM ne se sont jamais concrétisées. Ainsi, le simple dépôt d’une promesse d’embauche et d’un formulaire K, qui ne figure d’ailleurs pas au dossier de l’OCPM, ne permettent pas de conclure que le recourant déploie effectivement une activité pour le compte de la société H______. Il eût été préférable qu’il produise une pièce émise par une instance officielle, telle que le service des assurances-sociales, démontrant qu’il travaillait réellement auprès d’H______ et précisant le montant effectif de sa rémunération. Au vu de ce qui précède, l’activité du recourant auprès d’H______ n’est pas démontré et ne serait, quoi qu’il en soit, pas susceptible de lui conférer le statut de travailleur au sens de l’ALCP. C’est donc à juste titre que l’OCPM a retenu qu’il ne pouvait pas se prévaloir du droit de demeurer en Suisse sur cette base.

En outre, le recourant n’est pas en mesure de bénéficier d’un droit de séjour en Suisse en qualité de personne à la recherche d’un emploi, les six mois impartis pour retrouver un travail étant largement échus. Il ne peut aussi pas bénéficier d’une autorisation de séjour sans activité lucrative au sens de l’art. 24 al. 1 annexe I ALCP, dans la mesure où il émarge à l’aide sociale depuis le 1er juillet 2020 et qu’il ne dispose donc à l’évidence pas des moyens financiers nécessaires.

En conclusion, faute de se trouver dans l’une des situations de libre circulation prévues par l’ALCP et d’en remplir les conditions, le recourant ne peut prétendre à l’octroi d’une autorisation de séjour, de quelque type que ce soit, fondée sur cet accord international.

19.         Enfin, la question se pose de savoir si le recourant peut bénéficier d’un permis de séjour pour « cas d’extrême gravité ».

20.         Aux termes de l’art. 20 OLCP, si les conditions d’admission sans activité lucrative ne sont pas remplies notamment au sens de l’ALCP, une autorisation de séjour UE peut être délivrée lorsque des motifs importants l’exigent. Il n’existe cependant pas de droit en la matière, l’autorité cantonale statuant librement, sous réserve de l’approbation du secrétariat d’État aux migrations (ci-après : SEM ; art. 29 OLCP ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_59/2017 du 4 avril 2017 consid. 1.3 ; ATA/655/2022 du 23 juin 2022 consid. 9a). Les autorités compétentes tiennent compte, en exerçant leur pouvoir d’appréciation, des intérêts publics, de la situation personnelle de l’étranger, ainsi que de son degré d’intégration (art. 96 al. 1 LEI). Cette liberté d’appréciation est toutefois limitée par les principes généraux de droit tels que notamment l’interdiction de l’arbitraire et l’égalité de traitement (arrêt du Tribunal administratif fédéral F-1734/2019 du 23 mars 2020 consid. 8.1).

Les conditions posées à l’admission de l’existence de motifs importants au sens de cette disposition correspondent à celles posées à la reconnaissance d’un cas de rigueur en vertu de l’art. 30 al. 1 let. b LEI, en lien avec l’art. 31 OASA, de sorte qu’une application de l’art. 30 al. 1 let. b LEI ne saurait entrer en ligne de compte si les exigences prévues par l’art. 20 OLCP ne sont pas réalisées (arrêt du Tribunal administratif fédéral F-1734/2019 du 23 mars 2020 consid. 8.1).

21.         À teneur de l’art. 30 al. 1 let. b LEI, il est possible de déroger aux conditions d’admission notamment dans le but de tenir compte des cas individuels d’une extrême gravité ou d’intérêts publics majeurs.

L’art. 31 OASA énumère, à titre non exhaustif, une liste de critères qui sont à prendre en considération dans l’examen de l’art. 30 al. 1 let. b LEI, à savoir l’intégration, le respect de l’ordre juridique, la situation familiale, la situation financière et la volonté de prendre part à la vie économique et d’acquérir une formation, la durée de la présence en Suisse et l’état de santé, étant précisé qu’il convient d’opérer une appréciation globale de la situation personnelle de l’intéressé. Aussi, les critères précités peuvent jouer un rôle déterminant dans leur ensemble, même si, pris isolément, ils ne sauraient fonder en soi un cas de rigueur (ATF 137 II 345 consid. 3.2.3).

22.         Selon la jurisprudence constante relative à la reconnaissance des cas de rigueur en application de l’art. 30 al. 1 let. b LEI, applicable par analogie à l’art. 20 OLCP, il s’agit de normes dérogatoires présentant un caractère exceptionnel et les conditions auxquelles la reconnaissance d’un cas de rigueur est soumise doivent être appréciées de manière restrictive. Il est nécessaire que l’étranger concerné se trouve dans une situation de détresse personnelle. Cela signifie que ses conditions de vie et d’existence, comparées à celles applicables à la moyenne des étrangers, doivent être mises en cause de manière accrue, autrement dit qu’une décision négative prise à son endroit comporte pour lui de graves conséquences (ATF 138 II 393 consid. 3.1).

23.         Lors de l’appréciation d’un cas de rigueur, il y a lieu de tenir compte de l’ensemble des circonstances du cas particulier. La reconnaissance d’un cas individuel d’une extrême gravité n’implique pas forcément que la présence de l’étranger en Suisse constitue l’unique moyen pour échapper à une situation de détresse. Par ailleurs, le fait que l’étranger ait séjourné en Suisse pendant une assez longue période, qu’il s’y soit bien intégré (au plan professionnel et social) et que son comportement n’ait pas fait l’objet de plaintes ne suffit pas, à lui seul, à constituer un cas individuel d’une extrême gravité ; encore faut-il que la relation de l’intéressé avec la Suisse soit si étroite qu’on ne puisse exiger de lui qu’il aille vivre dans un autre pays, notamment dans son pays d’origine (arrêts du Tribunal administratif fédéral F-1734/2019 du 23 mars 2020 consid. 8.5).

24.         Parmi les éléments déterminants pour la reconnaissance d’une telle situation, il convient en particulier de citer la très longue durée du séjour en Suisse, une intégration sociale particulièrement poussée, une réussite professionnelle remarquable, la personne étrangère possédant des connaissances professionnelles si spécifiques qu’elle ne pourrait les mettre en œuvre dans son pays d’origine, une maladie grave ne pouvant être traitée qu’en Suisse et la situation de ses enfants, notamment une bonne intégration scolaire aboutissant après plusieurs années à une fin d’études couronnée de succès. Constituent en revanche des facteurs allant dans un sens opposé le fait que la personne concernée n’arrive pas à subsister de manière indépendante et doive recourir aux prestations de l’aide sociale ou des liens conservés avec le pays d’origine, par exemple sur le plan familial, susceptibles de faciliter sa réintégration (arrêt du Tribunal fédéral 2A.543/2001 du 25 avril 2002 consid. 5.2 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral F-1734/2019 du 23 mars 2020 consid. 8.5).

Les Directives OLCP (ch. 8.5) précisent que dans la mesure où l’admission des personnes sans activité lucrative dépend simplement de l’existence de moyens financiers suffisants et d’une affiliation à une caisse maladie, les cas visés par l’art. 20 OLCP en relation avec l’art. 31 OASA ne sont envisageables que dans de rares situations, notamment lorsque les moyens financiers manquent ou, dans des cas d’extrême gravité, pour les membres de la famille ne pouvant pas se prévaloir des dispositions sur le regroupement familial (arrêt du Tribunal administratif fédéral F-1734/2019 du 23 mars 2020 consid. 8.5).

25.         En l’occurrence, après un examen circonstancié du dossier et des pièces versées à la procédure, le tribunal ne peut que constater qu’aucun motif important ne commande que le recourant puisse demeurer en Suisse, de sorte que l’OCPM n’a pas mésusé de son large pouvoir d’appréciation en refusant de lui octroyer une autorisation de séjour en vertu de l’art. 20 OLCP.

En effet, si le recourant est certes né en Suisse et y a passé une quarantaine d’années, dont quelques-unes en détention, son séjour a néanmoins été entrecoupé de plusieurs années vécues à l’étranger. En outre, il ne semble pas s’y être particulièrement intégré, tant sur le plan professionnel que sur le plan social. Il ne soutient pas s’être engagé dans la vie associative ou culturelle à Genève et ne fait pas état de liens personnels particulièrement forts qu’il y aurait tissés au-delà du réseau de connaissances pouvant être raisonnablement attendu de tout étranger ayant séjourné une quarantaine d’années en Suisse. En outre, le recourant ne peut se prévaloir d’un comportement irréprochable dans la mesure où il fait l’objet de poursuites et de multiples actes de défaut de bien ainsi que de très nombreuses condamnations pénales, loin d'être insignifiantes. Son intégration sociale ne peut ainsi à l’évidence être qualifiée de bonne. Son intégration professionnelle ne peut être qualifiée d’exceptionnelle - il a certes travaillé, mais a également été à la charge de l’assistance publique de nombreuses années - et il ne résulte en outre pas qu’il ait acquis des connaissances spécifiques qui ne pourraient être utilisées en France.

Enfin, le fait de devoir quitter la Suisse ne peut réellement impliquer un déracinement et des difficultés d’adaptation pour un ressortissant français à même de s’installer à proximité de la Suisse, dans une localité sise à la frontière, à savoir dans un bassin de vie partageant les mêmes valeurs, et qui pourrait continuer à fréquenter ses amis et connaissances. Le tribunal ne voit par ailleurs pas en quoi - et le recourant ne l’explique d’ailleurs pas - les conditions de sa réintégration sociale en France, au regard de sa situation familiale, personnelle et professionnelle, seraient gravement compromises. Une impossibilité ou une difficulté particulièrement élevée de réintégration dans ce pays ne peuvent dès lors pas être retenues.

En définitive, l’examen des circonstances et la pesée des intérêts en présence, dont ressort la prépondérance de l’absence d’intégration sociale et économique par rapport à la durée du séjour du recourant en Suisse et des difficultés qu’il pourrait connaître en cas de renvoi en France, ne font pas apparaître le refus litigieux comme disproportionné, ni comme contraire à l’art. 20 OLCP.

26.         Le recourant fait encore valoir sa relation avec sa fille E______, et la protection de sa vie familiale au sens de l’art. 8 CEDH pour obtenir l’octroi d’un titre de séjour.

27.         Selon la jurisprudence, exceptionnellement et à des conditions restrictives, un étranger peut, en fonction des circonstances, se prévaloir du droit au respect de sa vie privée et familiale, au sens de l’art. 8 par. 1 CEDH, pour s’opposer à une éventuelle séparation de sa famille, à condition qu’il entretienne une relation étroite et effective avec un membre de celle-ci ayant le droit de résider durablement en Suisse (ATF 145 I 227 consid. 3.1 ; 141 II 169 consid. 5.2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_325/2019 du 3 février 2020 consid. 3.1). Les relations ici visées sont avant tout celles qui existent entre époux, ainsi que les relations entre parents et enfants mineurs vivant en ménage commun (ATF 140 I 77 consid. 5.2 ; 137 I 113 consid. 6.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_293/2018 du 5 octobre 2018 consid. 1.4). Pour autant, les liens familiaux ne sauraient conférer de manière absolue, en vertu de cette disposition, un droit d’entrée et de séjour (ATF 139 I 330 consid. 2.1 ; 138 I 246 consid. 3.2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_325/2019 du 3 février 2020 consid. 3.1).

Une personne est en droit de résider durablement en Suisse si elle a la nationalité suisse ou si elle est au bénéfice d’une autorisation d’établissement ou d’un droit certain à une autorisation de séjour en Suisse (ATF 135 I 143 consid. 1.3.1 ; 130 II 281 consid. 3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_537/2012 du 8 juin 2012 consid. 3.2).

28.         Le parent étranger qui n’a pas la garde d’un enfant mineur disposant d’un droit durable de résider en Suisse ne peut d’emblée entretenir une relation familiale avec celui-ci que de manière limitée, en exerçant le droit de visite dont il bénéficie. Il n’est en principe pas nécessaire que, dans l’optique de pouvoir exercer son droit de visite, il soit habilité à résider durablement dans le même pays que son enfant. Sous l’angle du droit à une vie familiale, il suffit en règle générale que le parent vivant à l’étranger exerce son droit de visite dans le cadre de séjours brefs, au besoin en aménageant ses modalités quant à la fréquence et à la durée ou par le biais de moyens de communication modernes. Le droit de visite d’un parent sur son enfant ne doit en effet pas nécessairement s’exercer à un rythme bimensuel et peut également être organisé de manière à être compatible avec des séjours dans des pays différents (ATF 144 I 91 consid. 5.1 et les références citées ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_303/2018 du 20 juin 2018 consid. 4.2; ATA/1175/2021 du 2 novembre 2021 consid. 6e).

29.         Selon la jurisprudence, un droit de séjourner dans le même pays que son enfant ne peut exister qu’en présence de liens familiaux particulièrement forts d’un point de vue affectif et économique, lorsque cette relation ne pourrait pratiquement pas être maintenue en raison de la distance qui sépare le pays de résidence de l’enfant du pays d’origine de son parent, et que l’étranger a fait preuve en Suisse d’un comportement irréprochable. Ces exigences doivent être appréciées ensemble et faire l’objet d’une pesée des intérêts globale (cf. ATF 144 I 91 consid. 5.1 et les références citées ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_844/2019 du 28 février 2020 consid. 3.1).

30.         Le lien affectif particulièrement fort est tenu pour établi lorsque les contacts personnels sont effectivement exercés dans le cadre d’un droit de visite usuel selon les standards d’aujourd’hui (en Suisse romande, il s’agit d’un droit de visite d’un week-end toutes les deux semaines et durant la moitié des vacances) ; seuls importent les liens personnels, c’est-à-dire l’existence effective de liens familiaux particulièrement forts d’un point de vue affectif et non pas seulement les décisions judiciaires ou les conventions entre parents se répartissant l’autorité parentale et la garde des enfants communs ou encore l’introduction de l’autorité parentale conjointe en cas de divorce résultant de la modification du code civil entrée en vigueur le 1er juillet 2014 (ATF 143 I 21 consid. 5.5.4). En outre, le parent étranger doit entretenir une relation économique particulièrement forte avec son enfant et avoir fait preuve en Suisse d’un comportement irréprochable (ATF 140 I 145 consid. 3.2). C’est seulement à ces conditions que l’intérêt privé du parent étranger à demeurer en Suisse peut l’emporter sur l’intérêt public que revêt une politique migratoire restrictive (arrêt du Tribunal fédéral 2C_881/2014 d 24 octobre 2014 consid. 3.1).

31.         Les conditions posées par la jurisprudence pour pouvoir invoquer l’art. 8 CEDH sont cumulatives (arrêts du Tribunal fédéral 2C_520/2016 du 13 janvier 2017 consid. 4.4 ; 2C_209/2015 du 13 août 2015 consid. 3.3.2).

32.         La possibilité d’exercer le droit de visite depuis le pays d’origine, pour éviter qu’il ne s’agisse que d’une possibilité théorique, doit être examinée concrètement et notamment, tenir compte de l’âge des intéressés, des moyens financiers, des techniques de communication et des types de transport à disposition ainsi que de la distance entre les lieux de résidence: l’impossibilité pratique à maintenir la relation sera tenue pour réalisée si le pays de l’étranger qui bénéficie d’un droit de visite est très éloigné de la Suisse (par exemple: le Mexique, cf. ATF 139 I 315 consid. 3.1).

33.         Il doit également être tenu compte de l’art. 3 par. 1 de la Convention relative aux droits de l’enfant, conclue à New York le 20 novembre 1989, approuvée par l’Assemblée fédérale le 13 décembre 1996. Instrument de ratification déposé par la Suisse le 24 février 1997 (CDE - RS 0.107), qui impose d’accorder une importance primordiale à l’intérêt supérieur de l’enfant (cf. arrêts du Tribunal fédéral 2C_639/2012 du 13 février 2013 consid. 4.3 ; 2C_247/2012 du 2 août 2012 consid. 3.2). Les dispositions de la CDE ne font toutefois pas de l’intérêt de l’enfant un critère exclusif, mais un élément d’appréciation, dont l’autorité doit tenir compte lorsqu’il s’agit de mettre en balance les différents intérêts en présence (cf. ATF 139 I 315 consid. 2.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_851/2014 du 24 avril 2015 consid. 4.2), étant relevé que les dispositions de cette convention ne confèrent aucune prétention directe à l’octroi d’une autorisation de séjour (ATF 139 I 315 consid. 2.4 ; 126 II 377 consid. 5).

34.         En l’espèce, s’agissant de la relation existant entre le recourant et sa fille, il convient de retenir que ce dernier ne s’était vu confier ni l’autorité parentale ni la garde sur sa fille par le jugement de divorce du 27 février 2017, que cette enfant a été scolarisée en France, en internat, et que le recourant a été incarcéré à diverses reprises depuis le prononcé de ce jugement, de sorte que leurs relations ont été forcément limitées. Le fait que le recourant doive entreprendre des démarches par devant la justice civile pour voir sa fille, âgée à ce jour de 15 ans et demi, laisse également songeur quant à l’intensité de leur relation affective. Une adolescente pourrait en effet rencontrer son père, pour autant d’ailleurs qu’elle soit effectivement en Suisse, sans forcément besoin de modifier le jugement de divorce.

En outre, il n’a pas été prouvé - ni même allégué – que le recourant entretiendrait des relations économiques étroites avec sa fille. Au contraire, compte tenu que le bureau vaudois de recouvrement et d’avances des pensions alimentaires lui réclame un montant de CHF 96’533,50 à teneur de l’extrait de l’office des poursuites du 10 juin 2021, il semble que le recourant n’a presque jamais versé les contributions alimentaires qu’il devait. Il ne peut donc, en l’état du dossier, être admis que le recourant puisse se prévaloir d’entretenir une relation économique forte avec sa fille en contribuant de manière significative aux frais d’entretien de cette dernière. Enfin, au vu de son comportement et de ses multiples condamnations pénales, le recourant ne saurait se prévaloir d’un comportement irréprochable.

Pour le surplus, s’il est de manière générale préférable qu’un enfant puisse grandir avoir son père à ses côtés, il faut rappeler que la CDE n’accorde ni à l’enfant ni à ses parents un droit à la réunion de la famille dans un État particulier ou une prétention directe à l’obtention d’une autorisation de séjour (cf. ATF 144 I 91 consid. 5.2 ; 140 I 145 consid. 3.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_752/2019 du 27 septembre 2019 consid. 3.2.4 ; 2C_107/2018 du 19 septembre 2018 consid. 4.7.3).

En tout état, le renvoi du recourant en France n’aura pas pour conséquence de mettre un terme aux relations qu’il pourra entretenir avec sa fille. Il leur sera en effet loisible de maintenir des contacts réguliers par le biais des moyens de communication actuels et de visites, étant rappelé que, conformément à la jurisprudence, un droit de visite d’un parent sur son enfant peut être organisé de manière à être compatible avec des séjours dans des pays différents. A cet égard, il sera rappelé qu’en tant que ressortissante français, le recourant peut demeurer sur le territoire suisse, sans visa, jusqu’à trois mois par période de six mois, ce qui est largement compatible avec l’organisation de visites à E______. La relation père-fille pourra donc être maintenue depuis la France sans difficultés particulières.

35.         Enfin, s’il est exact que dans sa jurisprudence récente, le Tribunal fédéral a jugé qu’un séjour légal d’environ dix ans permettait en principe de se prévaloir de l’art. 8 CEDH sous l’angle de la vie privée (ATF 144 I 266 consid. 3.9), le recourant ne peut invoquer cette disposition qui, sous cet angle étroit, n’ouvre le droit à une autorisation de séjour qu’à des conditions très restrictives, l’étranger devant en effet établir l’existence de liens sociaux et professionnels spécialement intenses avec la Suisse, notablement supérieurs à ceux qui résultent d’une intégration ordinaire. En effet, il ne séjourne pas légalement en Suisse depuis dix ans et les conditions très restrictives précitées ne sont pas remplies en l’espèce, tel que cela ressort des considérants qui précèdent (cf. ATF 130 II 281 consid. 3.2.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_170/2017 du 15 février 2017 consid. 3.1 ; 2C_1110/2015 du 14 décembre 2015 consid. 3 ; 2C_64/2015 du 23 avril 2015 consid. 3.3).

36.         En conséquence, le recourant ne peut se fonder sur l’art. 8 CEDH ni sur aucune autre disposition conventionnelle pour justifier la poursuite de son séjour en Suisse. Au vu de ce qui précède, le tribunal considère que l’OCPM n’a violé ni le droit conventionnel, ni le droit fédéral, ni encore excédé ou abusé de son pouvoir d’appréciation (cf. art. 96 LEI) en rejetant la demande d’autorisation de séjour formulée par le recourant.

37.         Selon l’art. 64 al. 1 let. c LEI, l’autorité compétente rend une décision de renvoi ordinaire à l’encontre d’un étranger auquel l’autorisation de séjour est refusée ou dont l’autorisation n’est pas prolongée. Elle ne dispose à ce titre d’aucun pouvoir d’appréciation, le renvoi constituant la conséquence logique et inéluctable du rejet d’une demande d’autorisation (ATA/1118/2020 du 10 novembre 2020 consid. 11a).

En l’espèce, étant donné qu’il a refusé d’octroyer une autorisation de séjour au recourant, l’OCPM devait ordonner son renvoi de Suisse.

38.         Pour le surplus, rien ne permet de retenir que l’exécution du renvoi du recourant ne serait pas possible, licite ou raisonnement exigible au sens de l’art. 83 LEI. La décision de l’OCPM se révèle également conforme au droit sur ce point.

39.         Ne reposant sur aucun motif valable, le recours doit être rejeté.

40.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), le recourant, qui succombe, est condamné au paiement d’un émolument s’élevant à CHF 500.- ; il est couvert par l’avance de frais versée à la suite du dépôt du recours.

Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

41.         En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent jugement sera communiqué au SEM.

 


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 2 mai 2022 par Monsieur A______ contre la décision de l’office cantonal de la population et des migrations du 15 mars 2022 ;

2.             le rejette ;

3.             met à la charge du recourant un émolument de CHF 500.-, lequel est couvert par l’avance de frais ;

4.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l’objet d’un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L’acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d’irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Au nom du Tribunal :

Le président

Endri GEGA

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties, ainsi qu’au secrétariat d’État aux migrations.

Genève,

 

La greffière