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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/2849/2021

JTAPI/895/2021 du 02.09.2021 ( MC ) , CONFIRME

Descripteurs : DÉTENTION AUX FINS D'EXPULSION
Normes : LEI.75.al1.leth; LEI.76.al1.letb.ch1
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2849/2021 MC

JTAPI/895/2021

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 2 septembre 2021

 

dans la cause

 

Monsieur A______, représenté par Me Sara PEREZ, avocate

 

contre

COMMISSAIRE DE POLICE

 


 

EN FAIT

1.             Monsieur A______, né le ______1993, est originaire de Géorgie.

2.             Le 19 juin 2021, il a été arrêté par les services de police genevois, avec un compatriote, et prévenu de vol (art. 139 ch. 1 du code pénal suisse - RS 311.0), de violation de domicile (art. 168 CP), de dommages à la propriété (art. 144 al. 1 CP), d’infractions à l’art. 96 al. 1 de la loi fédérale sur la circulation routière (LCR ; RS 741.01) et à la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20).

Il ressort notamment du rapport de police établi à cette occasion que M. A______ et son comparse ont été surpris par les forces de l’ordre alors qu’ils étaient en train de cambrioler une villa sise ______à ______. Il a exposé à la police qu'il était arrivé en suisse, avec son comparse, depuis cinq jours, et à Genève depuis deux jours. C'était la première fois qu'il venait en Suisse.

3.             Le lendemain, après avoir été mis à disposition du Ministère public, M. A______ a été placé en détention provisoire dans l’attente de son jugement.

4.             Par jugement rendu en procédure simplifiée du 24 août 2021 du Tribunal de police, M. A______ a été condamné à une peine privative de liberté de 100 jours, sous déduction de 66 jours de détention avant jugement, avec sursis pour vol, dommages à la propriété, violation de domicile et infraction à l'art. 96 al. 1 LCR.

Le Tribunal pénal a également ordonné l’expulsion de Suisse de l’intéressé pour une durée de 5 ans, selon l’art. 66a al. 1 CP.

5.             Le 25 août 2021, un vol a été réservé auprès de SwissREPAT en vue de son expulsion en Géorgie.

6.             Le 1er septembre 2021, au terme de son maintien en détention pour des motifs de sûreté, M. A______ a été libéré par les autorités pénales et remis entre les mains des services de police en vue de son refoulement.

7.             Le même jour, M. A______ s'est vu notifier, par l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM), une décision de non-report de son expulsion judiciaire, après que la possibilité de s'exprimer à cet égard lui eut été donnée.

8.             Le 1er septembre 2021 toujouts, à 17h20, le commissaire de police a émis un ordre de mise en détention administrative à l'encontre de M. A______ pour une durée de cinq semaines.

Il était indiqué que swissREPAT attendait un complément d’informations de la part d’OSEARA SA sur son aptitude au vol, au vu de sa situation médicale ».

Au commissaire de police, M. A______ a déclaré qu'il était d’accord de retourner en Géorgie. Il était en bonne santé et ne poursuivait aucun traitement médical si ce n'était de la méthadone quotidiennement.

9.             Le commissaire de police a soumis cet ordre de mise en détention au Tribunal administratif de première instance (ci-après le tribunal) le même jour.

10.         Entendu ce jour par le tribunal, M. A______ a déclaré être d'accord de retourner en Géorgie, mais le plus rapidement possible. Il ne comprenait pas pourquoi il était encore là et détenu administrativement. Il aurait pu rester dans la première prison et le juge pénal lui avait indiqué qu'il serait libéré. La représentante du commissaire de police a indiqué avoir reçu ce jour la confirmation de l'OSEARA s'agissant de l'aptitude de l'intéressé au vol mais qu'il avait exigé une escorte policière. Le vol était en cours de planification eu égard aux effectifs de police. La date du vol n'était pas encore fixée. Elle devrait être fixée rapidement mais la représentante du commissaire de police ne pouvait pas garantir qu'il aurait lieu la semaine prochaine ou celle d'après. Le conseil de l'intéressé a indiqué qu'il s'en rapportait à justice autant quant au principe qu'à la durée de la détention.

EN DROIT

1.            Le Tribunal administratif de première instance est compétent pour examiner d'office la légalité et l’adéquation de la détention administrative en vue de renvoi ou d’expulsion (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 7 al. 4 let. d de loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

Il doit y procéder dans les nonante-six heures qui suivent l'ordre de mise en détention (art. 80 al. 2 LEI; 9 al. 3 LaLEtr).

2.            En l'espèce, le tribunal a été valablement saisi et respecte le délai précité en statuant ce jour, la détention administrative ayant débuté le 1er septembre 2021 à 17h10.

3.            La détention administrative porte une atteinte grave à la liberté personnelle et ne peut être ordonnée que dans le respect de l'art. 5 par. 1 let. f de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101) et de l'art. 31 de la Constitution fédérale suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), ce qui suppose en premier lieu qu'elle repose sur une base légale. Le respect de la légalité implique ainsi que la mise en détention administrative ne soit prononcée que si les motifs prévus dans la loi sont concrètement réalisés (ATF 140 II 1 consid. 5.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_256/2013 du 10 avril 2013 consid. 4.1 ; 2C_237/2013 du 27 mars 2013 consid. 5.1).

4.            Selon l'art. 76 al. 1 let. b ch. 1 LEI, après notification d'une décision de première instance de renvoi ou d'une décision de première instance d'expulsion au sens des art. 66a ou 66abis CP, l'autorité compétente peut, afin d'en assurer l'exécution, mettre en détention la personne concernée notamment si celle-ci a été condamnée pour crime (art. 75 al. 1 let. h LEI), par quoi il faut entendre une infraction passible d'une peine privative de liberté de plus de trois ans (cf. art. 10 al. 2 CP ; ATA/220/2018 du 8 mars 2018 consid. 4a ; ATA/997/2016 du 23 novembre 2016 consid. 4a).

5.            Selon la jurisprudence de la chambre administrative de la Cour de justice, pour qu'une personne puisse être mise en détention sur la base de cette disposition, elle doit avoir été condamnée par une juridiction pénale de première instance, sans qu'il ne soit nécessaire que le jugement soit définitif (ATA/127/2015 du 3 février 2015 consid. 6).

Comme cela ressort du texte même de l'art. 76 al. 1 LEI et de la jurisprudence constante, une mise en détention administrative n'implique en outre pas que la décision de renvoi ou d'expulsion qui la sous-tend soit entrée en force et exécutoire (cf. ATF 140 II 409 consid. 2.3.4 ; 140 II 74 consid. 2.1 ; 130 II 377 consid. 1).

6.            Le principe de la proportionnalité, garanti par l'art. 36 Cst., se compose des règles d'aptitude - qui exige que le moyen choisi soit propre à atteindre le but fixé -, de nécessité - qui impose qu'entre plusieurs moyens adaptés, on choisisse celui qui porte l'atteinte la moins grave aux intérêts privés - et de proportionnalité au sens étroit - qui met en balance les effets de la mesure choisie sur la situation de la personne concernée et le résultat escompté du point de vue de l'intérêt public (ATF 125 I 474 consid. 3 et les arrêts cités ; arrêt du Tribunal fédéral 1P.269/2001 du 7 juin 2001 consid. 2c ; ATA/752/2012 du 1er novembre 2012 consid. 7).

Il convient dès lors d'examiner, en fonction des circonstances concrètes, si la détention en vue d'assurer l'exécution d'un renvoi au sens de l'art. 5 par. 1 let. f CEDH est adaptée et nécessaire (ATF 135 II 105 consid. 2.2.1 ; 134 I 92 consid. 2.3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_26/2013 du 29 janvier 2013 consid. 3.1 ; 2C_420/2011 du 9 juin 2011 consid. 4.1).

7.            Par ailleurs, les démarches nécessaires à l'exécution du renvoi doivent être entreprises sans tarder par l'autorité compétente (art. 76 al. 4 LEI). Il s'agit, selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, d'une condition à laquelle la détention est subordonnée (arrêt 2A.581/2006 du 18 octobre 2006 ; cf. aussi ATA/315/2010 du 6 mai 2010).

8.            En l'espèce, M. A______ fait l'objet d'une expulsion pénale prononcée par le Tribunal pénal, lequel l'a également condamné pour vol au sens de l'art. 139 ch. 1 CP, infraction constitutive de crime. Les conditions d'une détention administrative au sens des dispositions légales susmentionnées sont donc réalisées. Point n'est ainsi besoin de déterminer encore si, comme l'a retenu le commissaire de police, les motifs prévus par l'art. 76 al. 1 let. b ch. 3 et 4 LEI sont aussi réalisés.

9.            Il existe par ailleurs un intérêt public évident à pouvoir éloigner M. A______ de Suisse, lequel a commis un crime à peine après être arrivé dans notre pays et qu'à teneur du dossier, il ne dispose ni de moyens de subsistance légaux ni de lieu de séjour en Suisse.

10.        Les autorités chargées du renvoi ont par ailleurs agi avec diligence dès lors qu'elles ont d'ores et déjà réservé une place pour le précité à bord d'un vol qui aura lieu dès que l'examen de son aptitude au vol aura été effectué.

11.        Selon l'art. 79 al. 1 LEI, la détention en vue du renvoi ne peut excéder six mois au total. Cette durée maximale peut néanmoins, avec l'accord de l'autorité judiciaire cantonale, être prolongée de douze mois au plus, lorsque la personne concernée ne coopère pas avec l'autorité compétente (art. 79 al. 2 let. a LEI) ou lorsque l'obtention des documents nécessaires au départ auprès d'un État qui ne fait pas partie des États Schengen prend du retard (art. 79 al. 2 let. b LEI).

En outre, la durée de la détention administrative doit respecter le principe de la proportionnalité (ATF 125 I 474 consid. 3 et les arrêts cités ; arrêt du Tribunal fédéral 1P.269/2001 du 7 juin 2001 consid. 2c).

12.        En l'espèce, eu égard à l'ensemble des circonstances, il y a lieu de confirmer l'ordre de mise en détention administrative pour une durée de cinq semaines, qui respecte l'art. 79 LEI et n'apparaît pas disproportionnée. Sa portée s'avère au demeurant relative, car la détention de M. A______ prendra fin dès le moment où il est renvoyé dans son pays d'origine. En revanche, si pour une raison ou une autre (par exemple en cas d'annulation du vol), son renvoi ne pouvait avoir lieu à l'occasion du prochain vol DEPA qui serait réservé, la police devrait pouvoir disposer du temps nécessaire pour l'organiser par un autre vol.

13.        Au vu de ce qui précède, il y a lieu de confirmer l'ordre de mise en détention administrative de M. A______ pour une durée de cinq semaines.

14.        Conformément à l'art. 9 al. 6 LaLEtr, le présent jugement sera communiqué à M. A______, à son avocat et au commissaire de police. En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), il sera en outre communiqué au secrétariat d'État aux migrations.


 

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             confirme l’ordre de mise en détention administrative pris par le commissaire de police le 1er septembre 2021 à l’encontre de Monsieur A______ pour une durée de cinq semaines, soit jusqu’au 5 octobre 2021 inclus ;

2.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 10 al. 1 LaLEtr et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les dix jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.


Au nom du Tribunal :

La présidente

Michèle PERNET

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée à Monsieur A______, à son avocat, au commissaire de police et au secrétariat d'État aux migrations.

Genève, le 2 septembre 2021

 

La greffière