Décisions | Chambre des baux et loyers
ACJC/1167/2024 du 25.09.2024 sur JTBL/868/2023 ( OBL ) , CONFIRME
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||
POUVOIR JUDICIAIRE C/5389/2022 ACJC/1167/2024 ARRÊT DE LA COUR DE JUSTICE Chambre des baux et loyers DU MERCREDI 25 SEPTEMBRE 2024 |
Entre
1) Monsieur A______, domicilié ______ [GE] et
2) Madame B______, domiciliée ______ [GE], appelants d'un jugement rendu par le Tribunal des baux et loyers le 16 octobre 2023, représentés par Me Delphine ZARB, avocate, rue Bartholoni 6, case postale, 1211 Genève 4,
et
Madame C______, domiciliée ______ [GE], intimée, représentée par l'ASLOCA, rue du Lac 12, case postale 6150, 1211 Genève 6.
A. Par jugement JTBL/868/2023 du 16 octobre 2023, reçu par les parties le 25 octobre 2023, le Tribunal des baux et loyers (ci-après : le Tribunal) a fixé à 24'900 fr., charges non comprises, dès le 1er avril 2014, le loyer annuel de l'appartement de 6 pièces situé au 4ème étage de l'immeuble sis avenue 1______ no. ______, à Genève (ch. 1 du dispositif), condamné B______ et A______ (ci-après également : les bailleurs) à rembourser à C______ (ci-après également : la locataire) le trop-perçu du loyer en découlant (ch. 2), fixé le montant forfaitaire des charges de l'appartement susmentionné à 250 fr. par mois à partir du 1er novembre 2022 (ch. 3), condamné B______ et A______ à rembourser à C______ le trop-perçu de charges en découlant, lequel correspondait à 100 fr. par mois du 1er avril 2014 au 31 octobre 2022, puis à 50 fr. par mois à partir du 1er novembre 2022 (ch. 4), condamné B______ et A______ à verser à C______ la somme de 6'000 fr. avec intérêts à 5% dès le 6 avril 2022 (ch. 5), débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 6) et dit que la procédure était gratuite (ch. 7).
B. a. Par acte expédié le 24 novembre 2023 au greffe de la Cour de justice (ci-après : la Cour), B______ et A______ ont formé appel contre ce jugement, dont ils sollicitent l'annulation. Cela fait, ils concluent, principalement à ce que la Cour fixe, pour la période du 1er avril 2014 au 28 février 2019, le loyer à 2'075 fr. par mois et le montant des charges à 300 fr. par mois, puis fixe, à compter du 1er mars 2019, le loyer à 3'300 fr. par mois et le montant des charges à 300 fr. par mois, donne acte à B______ et A______ de ce qu'ils s'engagent à restituer 4'200 fr. à C______, et déboute C______ de toutes autres conclusions.
Subsidiairement, ils concluent à ce que la Cour fixe, pour la période du 1er avril 2014 au 31 mars 2019, le loyer à 2'075 fr. par mois et le montant des charges à 300 fr. par mois, puis fixe, à compter du 1er avril 2019, le loyer à 4'035 fr. 70 par mois et le montant des charges à 300 fr. par mois, et déboute C______ de toutes autres ou contraires conclusions.
S'agissant de leurs prétentions, ils concluent à ce que la Cour condamne C______ à leur verser 23'056 fr. 30, avec intérêts à 5% l'an dès le 1er novembre 2020 (date moyenne).
b. Dans sa réponse du 22 décembre 2023, C______ conclut au déboutement de B______ et A______ de leurs conclusions et à la confirmation du jugement.
c. Les parties ont répliqué et dupliqué, persistant dans leurs conclusions respectives.
d. Par avis du greffe de la Cour du 29 avril 2024, les parties ont été avisées de ce que la cause était gardée à juger.
C. Les faits pertinents suivants résultent de la procédure :
a. B______ et A______ sont propriétaires d'un appartement de six pièces situé au 4ème étage de l'immeuble sis avenue 1______ no. ______, à Genève (ci-après : l'appartement).
Lors de son acquisition le 3 octobre 2012, l'appartement n'était pas encore créé et consistait en des combles aménagées.
b. Selon l'autorisation de construire délivrée le 6 août 2012, le loyer maximum de l'appartement précité a été fixé à 24'900 fr. par an pour une durée de cinq ans à compter de la première mise en location.
c. Le 11 mars 2014, B______ et A______, en qualité de bailleurs, d'une part, et C______, en qualité de locataire, d'autre part, ont conclu un contrat de bail à loyer portant sur l'appartement.
Le contrat a été conclu pour une durée de onze mois, du 1er avril 2014 au 28 février 2015, renouvelable tacitement d'année en année. A compter du 1er mars 2015, chaque partie pouvait résilier le bail en respectant un préavis de trois mois.
Le montant du loyer a été fixé à 2'600 fr. par mois, charges de 300 fr. par mois non comprises.
Selon les termes du contrat, le bail était conclu pour une durée maximale de cinq ans. En cas de refus de la locataire de quitter l'appartement, le loyer serait augmenté à 3'600 fr. par mois dès le 1er mars 2019.
d. Aucune formule officielle de fixation du loyer n'a été remise à la locataire.
e. Une garantie de loyer de 6'000 fr. était prévue par le contrat et a été versée par la locataire. Ce montant n'a pas été versé sur un compte bloqué.
f. A l'échéance du délai de cinq ans, les bailleurs ont demandé oralement à la locataire de verser le montant de 3'600 fr. par mois. Celle-ci a continué à verser le montant mensuel de 2'900 fr., charges comprises, après le 1er mars 2019.
Elle n'a rien versé aux bailleurs entre le 1er juillet et le 31 décembre 2022.
g. S'agissant des charges de copropriété relatives à l'appartement, les bailleurs ont acquitté, en 2019, les montants de 1'709 fr. 05 à titre de chauffage et 523 fr. 70 à titre d'eau chaude. Ces montants se sont élevés en 2020 à 1'586 fr. 70 pour le chauffage et 486 fr. 20 pour l'eau chaude et, en 2021, à 1'543 fr. 45 pour le chauffage et 635 fr. 05 pour l'eau chaude.
h. Les frais d'électricité de l'appartement se sont élevés à 750 fr. 27 du 27 février 2019 au 25 février 2020, 767 fr. 55 du 26 février 2020 au 25 février 2021 et 1'000 fr. 90 du 26 février 2021 au 23 février 2022.
Ces montants ont été acquittés par les bailleurs.
i. Le 17 mars 2022, C______ a saisi la Commission de conciliation en matière de baux et loyers d'une requête en fixation judiciaire du loyer et d'une demande en paiement. Vu l'échec de la tentative de conciliation, une autorisation de procéder lui a été délivrée le 24 juin 2022.
Le 16 août 2022, C______ a saisi le Tribunal d'une demande en fixation judiciaire du loyer et en paiement, concluant à ce que celui-ci fixe le loyer initial à 2'075 fr. par mois, condamne B______ et A______, conjointement et solidairement entre eux, à lui restituer 51'975 fr., plus intérêts moyens à 5% dès le 1er avril 2018, sous réserve d'amplification, fixe les charges forfaitaires à 200 fr. par mois, condamne B______ et A______, conjointement et solidairement, à lui restituer la somme de 10'000 fr. plus intérêts moyens à 5% l'an dès le 1er avril 2018, sous réserve d'amplification, et à lui verser, la somme de 6'000 fr. plus intérêt à 5% dès le 28 mars 2014.
Elle a allégué avoir consulté l'Association genevoise des locataires (ci-après : ASLOCA) en janvier 2022, afin de savoir si elle avait droit à une baisse de loyer; elle avait été informée à ce moment-là du fait que le loyer initial était nul. Le loyer de 2'075 fr. par mois fixé par décision administrative s'appliquait également après la période de contrôle, dans la mesure où aucune majoration ou modification contractuelle n'était intervenue ultérieurement. Elle ne versait plus le loyer depuis le 1er juillet 2022, afin de compenser la dette mensuelle de loyer avec sa créance. Elle estimait que le montant forfaitaire des charges de 300 fr. par mois était excessif et ne devait pas excéder 200 fr. par mois.
j. Dans leur réponse et demande reconventionnelle du 6 octobre 2022, B______ et A______ ont conclu, principalement, à ce qu'il soit dit que, pour la période du 1er avril 2014 au 31 mars 2019, le loyer était fixé à 2'075 fr. par mois et le montant des charges à 300 fr. par mois, puis, depuis le 1er mars 2019, que le loyer était fixé à 3'300 fr. par mois et le montant des charges à 300 fr. par mois, et qu'il leur soit donné acte de leur engagement à restituer 4'200 fr. à C______.
Subsidiairement, ils ont conclu à ce qu'il soit dit que, pour la période du 1er avril 2014 au 31 mars 2019, le loyer était fixé à 2'075 fr. par mois et le montant des charges à 300 fr. par mois, puis, depuis le 1er avril 2019, que le loyer était fixé à 4'035 fr. 70 par mois et le montant des charges à 300 fr. par mois.
Sur demande reconventionnelle, ils ont conclu à ce que C______ soit condamnée à leur verser un montant de 23'056 fr. 30, avec intérêts à 5% dès le 1er novembre 2020 (date moyenne).
Ils ont admis que durant la période de contrôle le loyer aurait dû être fixé à 2'075 fr. par mois, ce qui correspondait à un trop-perçu de loyer de 31'500 fr. pendant les cinq premières années. Dès la sixième année, le loyer contractuel devait trouver application, la locataire ayant accepté l'augmentation de loyer à 3'600 fr. par mois, charges comprises. La locataire n'ayant jamais payé ce montant et ayant continué à verser 2'600 fr. par mois, un montant de 27'300 fr. leur était dû à ce titre. Par compensation, le montant dû à la locataire s'élevait à 4'200 fr. à juin 2022. Si le Tribunal ne devait pas retenir la validité du loyer contractuel pour la période postérieure au contrôle, il y aurait lieu de procéder à un calcul de rendement. Le calcul de rendement effectué par les bailleurs faisait apparaître un loyer admissible de 4'035 fr. 70 par mois, soit une différence de 54'556 fr. 30 au 30 juin 2022. Compte tenu du montant dû (31'500 fr.) à la locataire pour la période de contrôle, la différence s'élevait à 23'056 fr. 30 en leur faveur.
k. Lors de l'audience du Tribunal du 9 janvier 2023, C______ a allégué de manière complémentaire qu'elle ignorait qu'elle pouvait contester son loyer initial, de même que le fait que le loyer avait été fixé à 2'075 fr. par le Département. Si elle l'avait su au moment de la conclusion du bail, elle aurait contesté le loyer initial dans le trente jours en tant qu'il avait été fixé à 2'600 fr. par mois pendant cinq ans, puis à 3'600 fr. ultérieurement. A l'échéance du contrat, au 31 mars 2019, elle n'aurait pas accepté de continuer à payer un loyer de 2'600 fr. par mois si elle avait su que le loyer initial devait être fixé à 2'075 fr.
l. Le Tribunal a entendu les parties à l'audience du 13 mars 2023. C______ a précisé ses conclusions. Elle a notamment conclu à ce que B______ et A______ soient condamnés à lui verser le montant de 45'200 fr., arrêté au 31 mars 2023, avec intérêts à 5% dès le 1er août 2018 (date moyenne) à titre de remboursement du trop-perçu de loyer, et 12'614 fr. avec intérêts à 5% dès le 1er août 2018 (date moyenne) à titre de remboursement des charges versées en trop. Elle a en outre conclu au déboutement de B______ et A______ de leur demande reconventionnelle.
La locataire a notamment déclaré que les loyers prévus dans le contrat étaient chers, mais qu'elle avait pris cet appartement car elle payait un montant encore plus élevé auparavant. Elle ignorait qu'elle pouvait contester le loyer initial, sinon elle l'aurait fait. Elle aurait également contesté le loyer augmenté à fin mars 2019 si elle avait su qu'elle pouvait agir de la sorte. Elle avait continué de verser 2'900 fr. par mois après le mois de mars 2019. Les bailleurs lui avaient demandé oralement de verser le loyer augmenté, mais ne l'avaient pas fait par écrit.
Les bailleurs ont déclaré qu'ils avaient eu connaissance de la limitation du montant du loyer par les autorités au lendemain de la vente de l'appartement. Interrogés par le Tribunal sur les charges, ils ont déclaré qu'aucun décompte de charges n'avait été établi depuis la conclusion du bail car le montant de 300 fr. était forfaitaire. Ce montant incluait l'électricité, qu'ils avaient toujours payée. Les parties avaient convenu oralement que les frais accessoires étaient dus forfaitairement. La locataire a indiqué que les bailleurs ne lui avaient pas expliqué ce qui était compris dans le montant des charges. Elle n'avait jamais payé de factures d'électricité en lien avec l'appartement.
m. Lors de l'audience du 19 juin 2023, les parties ont plaidé et persisté dans leurs conclusions.
La cause a été gardée à juger à l'issue de l'audience.
n. Dans le jugement querellé, le Tribunal a considéré que le contrat de bail était partiellement nul s'agissant du montant du loyer, dès lors que le loyer fixé contractuellement était supérieur au loyer fixé par le Département et qu'aucun avis de fixation du loyer initial n'avait été remis à C______. Les parties s'accordaient à dire que le loyer devait être fixé à 2'075 fr. par mois durant la période du contrôle, laquelle s'étendait sur cinq ans dès la première mise en location, soit du 1er avril 2014 au 31 mars 2019. Pour la période postérieure, dès lors qu'aucun avis de fixation du loyer initial n'avait été remis à C______, le loyer était nul dans son ensemble et pas seulement en ce qui concernait la période soumise au contrôle, de sorte que l'échelon ne pouvait pas être repris comme tel pour fixer le loyer à la sortie du contrôle. Faute pour B______ et A______ d'avoir notifié un avis de majoration sur formule officielle, le loyer n'avait pas été augmenté après le 31 mars 2019. Le Tribunal a ainsi fixé le loyer de l'appartement litigieux à 24'900 fr. par an, charges non comprises, à partir du 1er avril 2014.
S'agissant des charges mensuelles, le Tribunal a constaté que les parties s'accordaient pour dire que le montant des frais accessoires mentionné dans le contrat faisait l'objet d'un forfait. Cela étant, le contrat ne mentionnait pas quelles étaient les prestations incluses dans le contrat et la locataire avait relevé n'avoir reçu aucune explication quant au montant de 300 fr. La convention sur les frais accessoires était ainsi nulle, faute pour les bailleurs d'avoir mentionné avec précision les prestations incluses dans le forfait. La locataire ne contestait pas devoir payer des frais accessoires. Il y avait lieu de retenir que les prestations incluses dans le forfait étaient suffisamment déterminées depuis le dépôt de leur réponse par les bailleresses et non contestées par la locataire, de sorte que le Tribunal pouvait fixer le montant forfaitaire des frais accessoires à compter du 1er novembre 2022 à 3'000 fr. par an, soit 250 fr. par mois, correspondant à une moyenne des charges des trois dernières années (2019, 2020 et 2021). Le montant des frais accessoires était ainsi nul du 1er avril 2014 au 31 octobre 2022, puis fixé à 250 fr. par mois dès le 1er novembre 2022. La locataire ayant uniquement conclu au remboursement d'un montant de 100 fr. par mois à ce titre, seul le remboursement de ce montant lui sera accordé jusqu'au 31 octobre 2022; un remboursement de 50 fr. par mois devait lui être accordé à partir du 1er novembre 2022.
1. 1.1
1.1.1 L'appel est recevable contre les décisions finales et les décisions incidentes de première instance (art. 308 al. 1 let. a CPC). Dans les affaires patrimoniales, l'appel est recevable si la valeur litigieuse au dernier état des conclusions est de 10'000 fr. au moins (art. 308 al. 2 CPC).
Selon la jurisprudence constante du Tribunal fédéral, les contestations portant sur l'usage d'une chose louée sont de nature pécuniaire (arrêt du Tribunal fédéral 4A_388/2016 du 15 mars 2017 consid. 1).
Pour le calcul de la valeur litigieuse devant l'instance d'appel, seules sont déterminantes les dernières conclusions prises devant la juridiction de première instance, peu importe le montant que celle-ci a finalement alloué (art. 91 al. 1 CPC; arrêts du Tribunal fédéral 5D_13/2017 du 4 décembre 2017 consid. 5.2 et 5A_261/2013 du 19 septembre 2013 consid. 3.3; Jeandin, Commentaire romand, Code de procédure civile, 2019, n. 13 ad art. 308 CPC).
La valeur litigieuse correspond à la différence entre le montant annuel du loyer initial tel que fixé dans le contrat de bail et le montant requis par les appelants, sans les charges, multiplié par vingt (art. 92 al. 1 CPC; arrêt du Tribunal fédéral 4A_475/2012 du 6 décembre 2012 consid. 1.1).
1.1.2 Dans ses dernières conclusions prises en première instance, l'intimée a notamment conclu à la fixation judiciaire du loyer à 2'075 fr. par mois, charges non comprises, dès le 1er avril 2014, de même qu'au remboursement par les appelants du trop-perçu de loyer correspondant (soit 45'300 fr., sous réserve d'amplification).
La valeur litigieuse est ainsi supérieure à 10'000 fr., de sorte que la voie de l'appel est ouverte.
1.2 Interjeté contre une décision finale de première instance, dans le délai utile de 30 jours et selon la forme prescrite par la loi (art. 130, 131 et 311 al. 1 CPC), l'appel est ainsi recevable.
1.3 L'appel peut être formé pour violation du droit (art. 310 let. a CPC) et constatation inexacte des faits (art. 310 let. b CPC). L'instance d'appel dispose ainsi d'un plein pouvoir d'examen en fait et en droit; en particulier, le juge d'appel contrôle librement l'appréciation des preuves effectuée par le juge de première instance (art. 157 CPC en relation avec l'art. 310 let. b CPC) et vérifie si celui-ci pouvait admettre les faits qu'il a retenus (ATF 138 III 374 consid. 4.3.1).
1.4 S'agissant d'une procédure relative à la protection contre les loyers abusifs (art. 269ss CO), la cause est soumise à la procédure simplifiée (art. 243 al. 2 let. c CPC) et la maxime sociale est applicable (art. 247 al. 2 let. a CPC).
Le juge doit donc établir les faits d'office et n'est pas lié par les allégations des parties et leurs offres de preuve (ATF 139 III 457 consid. 4.4.3.2). Toutefois, les parties ne sont pas pour autant dispensées de collaborer activement à l'établissement des faits (ATF 142 III 402 consid. 2.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_360/2015 du 12 novembre 2015 consid. 4.2).
2. Les appelants formulent un premier grief de constatation inexacte des faits, reprochant au Tribunal de n'avoir pas retenu les faits relatifs au calcul de rendement qu'ils avaient requis. Ceux-ci sont sans incidence sur la résolution du litige, de sorte que les premiers juges n'ont pas erré en les écartant. En tout état de cause, à quelques rares exceptions, lesdits faits n'auraient quoiqu'il en soit pas été retenus, les appelants ayant échoué à en apporter la preuve.
Les appelants font également grief aux premiers juges de n'avoir pas tenu compte de certains faits relatifs aux frais accessoires. L'état de fait présenté ci-dessus a été complété dans la mesure utile, sur la base des actes et des pièces de la présente procédure, de sorte que le grief des appelants en lien avec la constatation des faits ne sera pas traité plus avant.
3. Les appelants reprochent au Tribunal d'avoir fixé le loyer à 2'075 fr. par mois pour la période postérieure au 28 février 2019.
3.1
3.1.1 Conformément à l'art. 270 al. 2 CO, les cantons peuvent, en cas de pénurie de logements, rendre obligatoire, sur tout ou partie de leur territoire, l'usage de la formule officielle mentionnée à l'art. 269d CO pour la conclusion de tout nouveau bail. Le canton de Genève a fait usage de cette faculté en adoptant l'art. 207 al. 1 LaCC.
Un vice de forme lors de la notification du loyer initial, comme par exemple la non-utilisation de la formule officielle, n'implique pas la nullité totale du contrat de bail, mais limite cette nullité à la seule fixation du loyer (art. 20 al. 2 CO; cf. ATF 120 II 341 consid. 5d). Cette nullité partielle, limitée au loyer, intervient de plein droit et se constate d'office; le locataire peut l'invoquer en tout temps, sous réserve de l'abus de droit (arrêt du Tribunal fédéral 4A_129/2011 du 28 avril 2011 consid. 2.2).
Lorsque le bail a été conclu sans que soit utilisée la formule officielle, le locataire peut donc agir en fixation judiciaire du loyer initial et en restitution de l'éventuel trop-perçu. Il s'agit là d'un cumul d'action (art. 90 CPC): la première tend, après constatation, à titre préjudiciel, de la nullité du loyer convenu, à la fixation judiciaire de celui-ci et la seconde, en tant que conséquence de la première, vise à la restitution des prestations effectuées sans cause conformément aux règles de l'enrichissement illégitime (art. 62ss CO). En application de ces dispositions, le locataire qui entend récupérer le trop-payé doit agir dans les trois ans suivant le jour où il a connu son droit à la restitution, mais au plus tard dans les dix ans dès la naissance du droit (art. 67 al. 1 CO; Lachat/Stastny, Le bail à loyer, 2019, p. 511).
La nullité partielle se constate d'office et intervient de plein droit (arrêt du Tribunal fédéral 4C.428/2004 du 1er avril 2005, in SJ 2006 I p. 19) et le locataire peut la faire valoir en tout temps sous la seule réserve de l'abus de droit (arrêt du Tribunal fédéral 4A_129/2011 du 28 avril 2011 et les références citées). Le Tribunal fédéral a retenu qu'une exception au droit de demander la restitution du trop-perçu selon les art. 62 ss CO peut être admise lorsqu’un locataire, conscient du vice de forme affectant le contrat, a gardé́ le silence dans l’intention d’en profiter plus tard (ATF 140 III 583, consid. 3.2.4). L'ignorance du locataire est présumée (ATF 140 III 583 précité). Le juge du fait doit vérifier, par appréciation des preuves, si le locataire demandeur doit bénéficier de la présomption d'ignorance compte tenu de l'ensemble des circonstances. Tel ne serait notamment pas le cas si le locataire avait des connaissances spécifiques en droit du bail, s'il avait déjà loué un appartement pour lequel il avait reçu la formule officielle, ou s'il avait été impliqué dans une précédente procédure de contestation du loyer initial (ATF 148 III 63 consid. 6). En cas de consultation d’un avocat avant l’invocation de la nullité du loyer initial, seul est décisif le fait de savoir si cette question a été́ ou non effectivement abordée lors de ladite consultation (arrêt du Tribunal fédéral 4A_254/2016 du 10 juillet 2017, consid. 3.2.2; cf. également Biéri, Formule officielle et présomption d’ignorance du locataire, Jusletter du 12 octobre 2020, n. 17).
3.1.2 Le juge appelé à fixer le loyer initial doit fonder sa décision sur toutes les circonstances du cas. Les facteurs à prendre en considération comprennent notamment le rendement admissible (art. 269 CO), les loyers pratiqués dans le quartier (art. 269a CO) et le cas échéant le loyer payé par le précédent locataire (ATF 120 II 341 consid. 6c). Jouissant d'un pouvoir plus étendu que dans la procédure en contestation d'un loyer fixé selon les formalités prescrites, le juge n'a pas à restreindre son examen au caractère abusif ou non du loyer convenu par les parties, lequel constitue la limite supérieure du loyer à fixer (ATF 124 III 62 consid. 2b). Lorsque le loyer initial est nul parce que la formule officielle n'a pas été communiquée, le juge doit compléter le contrat, en se basant sur toutes les circonstances du cas (ATF 124 III 62 précité, ibidem; arrêt du Tribunal fédéral 4A_517/2014 du 2 février 2015 consid. 5.1).
3.2
3.2.1 A teneur de l'art. 20 al. 1 et 2 CO, un contrat est nul s'il a pour objet une chose impossible, illicite ou contraire aux mœurs (al. 1). Si le contrat n'est vicié que dans certaines de ses clauses, ces clauses sont seules frappées de nullité, à moins qu'il n'y ait lieu d'admettre que le contrat n'aurait pas été conclu sans elles (al. 2).
Selon le Tribunal fédéral, cette disposition est une expression du principe de la favor negotii qui vise à maintenir le contrat en restreignant la nullité à ce qui est strictement nécessaire pour supprimer le désaccord avec la loi ou les mœurs. L'art. 20 al. 2 CO autorise le juge à réduire les engagements excessifs à la mesure permise par la loi, conformément à la volonté hypothétique des parties, cela même s'il s'agit d'un point essentiel du contrat. Conformément à l'art. 20 al. 2 CO, le juge doit rechercher la volonté hypothétique des parties, c'est-à-dire déterminer ce que celles-ci auraient convenu de bonne foi si elles avaient envisagé la possibilité de la nullité partielle (cf. Guillod/Steffen, Commentaire romand, CO I, 2021, n. 101 à 105 ad. art. 19-20 CO).
3.2.2 En matière de législation sur le logement, il est interdit aux cantons d'intervenir dans les rapports directs entre les parties au contrat de bail, réglés exhaustivement par le droit fédéral. Cela étant, les cantons demeurent libres d'édicter des mesures destinées à combattre la pénurie sur le marché locatif, par exemple en soumettant à autorisation la démolition, la transformation et la rénovation de maisons d'habitation. Si l'institution d'un contrôle permanent et général des loyers est incompatible avec le droit fédéral, il est en revanche possible d'assortir l'autorisation de rénover les logements à un contrôle des loyers pendant une durée de dix ans (arrêt du Tribunal fédéral 1P.20/2005 du 18 mars 2005, in SJ 2005 I 485 consid. 2.2).
La loi sur les démolitions, transformations et rénovations de maisons d'habitation (mesures de soutien en faveur des locataires et de l'emploi) du 25 janvier 1996 (LDTR – L 5 20) a pour but de préserver l'habitat et les conditions de vie existants ainsi que le caractère actuel de l'habitat dans les zones visées à l'art. 2 de la loi. Est soumis à la LDTR tout bâtiment situé dans l'une des zones de constructions prévues par l'art. 19 de la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire du 4 juin 1987 (LaLAT – L 1 30), ou construit au bénéfice des normes de l'une des quatre premières zones de construction en vertu des dispositions applicables aux zones de développement, et comportant des locaux qui, par leur aménagement ou leur distribution, sont affectés à l'habitation.
D'après l'art. 10 al. 1 LDTR, en cas de transformation d'une maison d'habitation, le Département fixe, comme condition de l'autorisation, le montant maximum des loyers des logements après travaux. Les loyers maximaux ainsi fixés sont soumis au contrôle de l'Etat, pendant une période de 5 à 10 ans pour les constructions nouvelles et pendant une période de 3 ans pour les immeubles transformés ou rénovés, durée qui peut être portée à 5 ans en cas de transformation lourde (art. 12 LDTR). Dès l'instant où l'art. 12 LDTR institue un contrôle des loyers après exécution des travaux de rénovation, l'obligation faite au propriétaire sous cet aspect inclut celle de rectifier les baux indiquant un loyer qui ne correspondrait pas à celui fixé par le Département cantonal. Cette solution n'influe pas sur la possibilité de majorer ultérieurement les loyers, à l'expiration de la période de contrôle. Le propriétaire doit alors notifier au locataire le nouveau loyer (loyer initial en cas de nouveau bail ou hausse de loyer si le locataire reste le même; cf. Gaide/Défago Gaudin, La LDTR - Démolition, transformation, rénovation, changement d'affection et aliénation d'immeubles de logements et appartements - Loi genevoise et panorama des autres lois cantonales, 2014, n. 7.2 p. 332). Le propriétaire peut également conclure un bail échelonné prévoyant comme premier échelon le loyer fixé par le département pendant la durée de contrôle retenue par ce dernier et un 2ème échelon supérieure entrant en vigueur à l'issue de la période de contrôle (Gaide/Défago Gaudin, op. cit., n. 7.4 p. 334). L'obligation de rectifier les baux initiaux n'a ainsi pas pour effet de prolonger le contrôle étatique au-delà du délai légal, ni d'empêcher le bailleur après la fin du contrôle de majorer le loyer selon les règles du droit civil. Dans ce cas, il est conforme à l'intérêt public lié à la bonne foi en affaires et à l'objectif poursuivi par la loi, qui est de préserver un parc locatif correspondant aux besoins de la population, que le loyer pris en compte pour une éventuelle majoration soit celui fixé par l'autorité cantonale (arrêts du Tribunal fédéral 4A_13/2013 du 28 mai 2013 consid. 2.3; 1C_468/2008 du 15 décembre 2008 consid. 2.2; 1P.20/2005 du 18 mars 2005 consid. 2.3.2, in SJ 2005 I 485; ACJC/1320/2010 du 15 novembre 2010 consid. 2; ACJC/1319/2007 du 05 novembre 2007 consid. 2). Il s'agit là d'un élément essentiel du contrat de bail (cf. arrêt du Tribunal fédéral 1P.20/2005 du 18 mars 2005 consid. 2.3.2, in SJ 2005 I 485 et la référence citée).
Conformément à la jurisprudence, le loyer fixé dans le contrat et ses modifications subséquentes ne redeviennent pas applicables à la fin de la période de contrôle. Il serait en effet contraire à l'objectif de la LDTR en matière de contrôle des loyers que le loyer initial convenu s'applique automatiquement à l'expiration de la période de contrôle. Toute majoration de loyer doit être notifiée sur la formule officielle, doit parvenir au locataire dix jours au moins avant le début du délai de résiliation et doit indiquer les motifs de majoration, sous peine de nullité (art. 269d al. 1 et 2 CO). Conformément à la jurisprudence précitée, la formule officielle doit, de surcroît, indiquer le montant de l'ancien loyer (art. 19 al. 1 let. a OBLF). Le Tribunal fédéral a eu l'occasion de préciser qu'un avis de majoration ne mentionnant pas le loyer fixé par l'autorité cantonale reposait sur une base fausse, ce qui entraînait la nullité de la majoration. En pareilles circonstances, le loyer devait être considéré comme étant fixé à son niveau au terme de la période de contrôle (arrêt du Tribunal fédéral 4A_13/2013 du 28 mai 2013, consid.2.3).
Dans un arrêt postérieur, le Tribunal fédéral a jugé que pour évaluer si la nullité partielle ne frappait que le loyer correspondant à la période de protection ou l'ensemble des clauses concernant le loyer initial, il fallait apprécier si à la date de la signature du bail, les parties auraient accepté un contrat hypothétique fixant un premier échelon au montant du loyer fixé par l'autorité administrative pour les trois premières années de bail, puis un échelon fixé à la hauteur du loyer prévu dans le contrat dès la quatrième année (arrêt du Tribunal fédéral 4A_356/2018 du 10 décembre 2018, consid.10).
Dans cet arrêt, dans lequel les parties avaient signé un contrat avec un loyer échelonné à 26'400 fr. pour la première année, 28'200 fr. pour la deuxième, 30'000 fr. pour la troisième, le loyer étant ensuite indexé alors que le loyer avait finalement été fixé par l'autorité administrative à 18'000 fr. pendant trois ans, le Tribunal fédéral a jugé que les locataires avaient accepté un contrat nettement plus onéreux. Ayant conclu ce contrat, ils n'avaient pas tenté de contester le loyer sur la base des articles 269 et 270 al. 1 CO. Le Tribunal fédéral a ainsi retenu que de toute évidence, les locataires auraient aussi accepté le contrat hypothétique envisagé en l'espèce. Certes, celui-ci aurait prévu une hausse très importante, de 18'000 fr. à 30'000 fr., à la fin de la troisième année, et la bailleresse aurait sans doute dû expliquer que le montant des premières années était particulièrement modique en raison de l'assujettissement au contrôle étatique durant ces années. Toutefois, rien ne dénotait que les locataires n'eussent pas accepté aussi ce contrat hypothétique. Le Tribunal fédéral a donc jugé que la nullité partielle du contrat effectivement conclu ne frappait que le loyer des trois premières années. Le loyer de l'appartement avait donc été fixé par le juge que pour les trois premières années du bail, le loyer ultérieur étant celui valablement convenu entre les parties.
3.3
3.3.1 En l'espèce, les appelants ne contestent pas que durant la période de contrôle, le loyer aurait dû être fixé mensuellement à 2'075 fr., et non à 2'600 fr., ni qu'il en est résulté un trop-perçu devant être restitué à l'intimée.
Il apparaît que les appelants considèrent que cette période s'est étendue jusqu'au 28 février 2019 et non au 31 mars 2019 comme retenu par le Tribunal. Ce faisant, ils ne formulent aucun grief distinct et motivé sur ce point, se contentant dans leurs écritures d'appel, s'agissant de la période postérieure à la période de contrôle, de considérer que celle-ci a débuté le 1er mars 2019. En l'absence de grief valablement formulé, il ne sera pas tenu compte de cette dernière date. En tout état, dès lors que la première mise en location du bien a eu lieu le 1er avril 2014, c'est à raison que les premiers juges ont considéré que la période de protection s'entendait du 1er avril 2014 au 31 mars 2019.
3.3.2 Les appelants reprochent au Tribunal de n'avoir pas correctement fixé le loyer pour la période postérieure à la période de contrôle. Ils font valoir que le Tribunal aurait dû appliquer les règles du droit privé pour fixer le loyer postérieur au contrôle étatique, en tenant principalement compte de la volonté des parties – soit en faisant application du contrat conclu entre elles – et, subsidiairement, en effectuant un calcul de rendement. En se contentant d'appliquer le loyer fixé par l'autorité administrative pour toute la durée du bail, le Tribunal aurait méconnu ces principes.
Par cette argumentation, les appelants se livrent à une lecture erronée du jugement attaqué. Contrairement à ce qu'ils soutiennent, le Tribunal n'a pas fixé le loyer postérieur à la période de contrôle en appliquant le loyer fixé par l'autorité administrative pour toute la durée du bail. Le Tribunal a uniquement considéré que, compte tenu de la décision administrative existante et, au demeurant, de l'accord des parties sur ce point, le loyer initial devait être fixé à 2'075 fr. par mois pour la période de contrôle. Par ailleurs, faute d'avis de fixation du loyer initial, le montant du loyer contractuellement prévu était nul dans son ensemble et non pas uniquement s'agissant de la période de contrôle. Dès lors que le loyer initial devait être fixé à 2'075 fr. par mois pour la période de contrôle et, que les appelants n'avaient pas valablement notifié à l'intimée un avis de majoration du loyer sur formule officielle à l'échéance de cette période, le loyer n'avait pas été augmenté après le 31 mars 2019.
Ce raisonnement n'est pas critiquable. Il est constant que les parties étaient liées depuis le 1er avril 2014, date correspondant à la première mise en location de l'appartement, par un contrat de bail conclu pour une durée initiale de onze mois, renouvelable d'année en année tacitement, pour une durée maximale de cinq ans, à l'issue de laquelle les relations contractuelles des parties se sont poursuivies. Le contrat prévoyait un loyer mensuel hors charges de 2'300 fr. pour les cinq premières années, puis de 3'300 fr. dès la cinquième année. Par décision du 6 juillet 2012, le Département cantonal compétent avait fixé le loyer pour une durée de cinq ans dès la première mise en location, soit à compter du 1er avril 2014, à 24'900 fr. par an. Conformément à la jurisprudence précitée, si, dans une telle situation, le bailleur entend augmenter le loyer à la suite de la période de contrôle, il lui appartient de notifier une hausse de loyer au locataire. Une telle notification doit être adressée par le biais d'un avis de majoration sur une formule officielle correctement remplie (art. 269d CO) et dans le respect des échéances des baux. Ce procédé permet ainsi au locataire, cas échéant, de contester la majoration. Or, dans le cas présent, le loyer initial contractuellement fixé était nul dans sa totalité, et non seulement pour la période correspondante à la période de protection. Dès lors, si le montant du loyer à l'échéance de la période de contrôle pouvait être modifié, il appartenait aux bailleurs de notifier à la locataire un avis de majoration du loyer sur formule officielle, ce qu'ils n'ont pas fait. Dans ces conditions, c'est à raison que les premiers juges ont retenu que le loyer n'avait pas été augmenté à l'issue de la période de protection.
Compte tenu de ce qui précède, les premiers juges se sont ainsi à raison limités à fixer le montant du loyer initial, soit le montant correspondant au loyer arrêté par le Département, et à constater qu'en l'absence d'avis de majoration valablement notifié à l'intimée à l'échéance de la période de protection, celui-ci avait continué de s'appliquer. C'est donc de manière erronée que les appelants soutiennent que le Tribunal aurait fixé le loyer pour la période postérieure à la période de contrôle.
Il est encore relevé qu'à l'appui de leur raisonnement, les appelants se réfèrent principalement à l'arrêt du Tribunal fédéral 4A_356/2018 précité. Ils ne peuvent à cet égard pas être suivis lorsqu'ils affirment que la situation de cet arrêt et celle du cas d'espèce seraient similaires et devraient conduire au même résultat. En effet, comme retenu à raison par les premiers juges, dans l'arrêt précité, le contrat liant les parties avait été valablement conclu s'agissant du montant du loyer, les bailleurs ayant fait usage de la formule officielle, de sorte que seul le loyer correspondant à la période de protection était nul et devait être fixé par le juge, le loyer postérieur devant être fixé selon la volonté exprimée par les parties dans leur contrat. Or, dès lors que dans le cas d'espèce aucun avis de fixation du loyer initial n'avait été valablement remis, entraînant la nullité du montant du loyer dans sa totalité, il ne se justifiait pas d'appliquer automatiquement le loyer contractuellement prévu à l'échéance de la période de protection.
Contrairement à ce que soutiennent les appelants dans un raisonnement subsidiaire, en l'absence d'avis de majoration du loyer valablement notifié par les appelants à l'échéance de la période de contrôle, il n'appartenait pas davantage aux premiers juges de déterminer le loyer postérieur sur la base d'un calcul de rendement. Au demeurant, bien qu'ils soutiennent le contraire, les appelants n'ont pas produit les pièces pertinentes et nécessaires pour procéder à un tel calcul, rien ne permettant de considérer que celles-ci ne seraient pas en leur possession.
Les appelants semblent avoir perdu de vue qu'au contraire des cas auxquels ils se réfèrent, ils avaient connaissance du loyer fixé par le Département, avant même la conclusion du contrat avec l'intimée, qu'ils ont cependant délibérément choisi d'ignorer. Ils ont également violé les règles en vigueur en s'abstenant de notifier à l'intimée l'avis de fixation du loyer initial. Dès lors, il n'appartenait pas au Tribunal et pas davantage à la Cour, de pallier les manquements – volontaires ou non – des bailleurs, en déterminant le loyer qui aurait pu être fixé à l'issue de la période de contrôle, en l'absence d'avis de majoration du loyer valablement notifié.
Au regard de ce qui précède, c'est à raison que le Tribunal a fixé le loyer initial de l'appartement à 24'900 fr. par an (soit 2'075 fr. par mois), charges non comprises, à partir du 1er avril 2024.
C'est également à raison qu'il a condamné les appelants à la restitution du trop-perçu en découlant, soit une différence de 525 fr. par mois (2'600 fr. – 2'075 fr.).
Les griefs des appelants sont donc infondés.
4. Les appelants reprochent au premier juge d'avoir constaté que la convention des parties sur les frais accessoires était nulle et, ce faisant, d'avoir considéré que des frais accessoires ne pouvaient pas être perçus avant le 1er novembre 2022, respectivement d'avoir fixé ces derniers à un montant de 250 fr. par mois.
4.1
4.1.1 Selon l'art. 257a al. 1 CO, les frais accessoires sont dus pour les prestations fournies par le bailleur ou un tiers en rapport avec l'usage de la chose.
Pour les habitations et les locaux commerciaux, on entend par frais accessoires les dépenses effectives du bailleur pour des prestations en rapport avec l'usage de la chose, telles que frais de chauffage, d'eau chaude et autres frais d'exploitation, ainsi que les contributions publiques qui résultent de l'utilisation de la chose (art. 257b al. 1 CO). Les art. 257a et 257b CO qui définissent les frais accessoires sont impératifs (ATF 137 I 135 consid. 2.4).
4.1.2 Les frais accessoires en rapport avec l'usage de la chose ne sont à la charge du locataire que si cela a été convenu spécialement (art. 257a al. 2 CO).
Cette obligation poursuit un but de protection des locataires. A défaut de convention, les frais accessoires sont réputés compris dans le loyer
(ATF 135 III 591 consid. 4.2.3; ATF 132 III 460 consid. 2a/aa; arrêt du Tribunal fédéral 4A_620/2021 du 18 juillet 2022 consid. 3.1.1).
Selon la jurisprudence, l'art. 257a al. 2 CO exige que les parties indiquent de manière suffisamment précise dans le contrat lui-même quels frais accessoires sont mis à la charge du locataire, en en détaillant les postes effectifs. Le locataire doit pouvoir comprendre facilement quels sont les postes qui lui seront facturés en plus du loyer net; ceux-ci doivent être décrits clairement et précisément dans le contrat (ATF 135 III 591 consid. 4.3). Même si la liste n'est pas formulée de manière exhaustive, les charges qui y sont mentionnées sont dues car le locataire peut comprendre facilement les postes qui lui seront facturés en sus du loyer (arrêt 4A_719/2016 du 31 août 2017 consid. 2.2.1 et la référence).
Une convention sur les frais n'étant pas soumise à une exigence de forme particulière, elle peut être conclue par écrit, oralement ou par actes concluants (ATF 135 III 591 consid. 4.3.4: arrêts 4A_622/2015 du 4 février 2016 consid. 3.1; 4C.224/2006 du 24 octobre 2006 consid. 2.1). Toutefois, si le contrat de bail a été conclu par écrit, il faut considérer que les parties ont également déterminé par écrit quels frais accessoires étaient mis à la charge du locataire (ATF 135 III 591 précité; arrêts du Tribunal fédéral 4C.224/2006 du 24 octobre 2006 consid. 2.3).
4.1.3 La contestation de l'obligation de verser des frais accessoires insuffisamment clairement définis dans un contrat de bail écrit, après le paiement de ces frais pendant plusieurs années, ne constitue pas, selon le Tribunal fédéral, un abus de droit notamment quand le locataire n'a pas protesté contre ces frais parce qu'il faisait confiance au bailleur et pensait que leur facturation relevait des usages locaux (arrêt du Tribunal fédéral 4C.224/2006 du 24 octobre 2006 consid. 2.3).
Le locataire pourra, sur la base des règles sur l'enrichissement illégitime (art. 62ss CO), réclamer au bailleur le remboursement de tout ou partie des montants dont il se sera acquitté à tort (Pereira, Jurisprudence et nouveautés en matière de frais accessoires, in 22ème Séminaire sur le droit du bail, 2022, n. 36 p. 239 et la référence).
4.1.4 Si le bailleur perçoit les frais accessoires de manière forfaitaire, il doit se fonder sur une moyenne calculée sur une période de trois ans (art. 4 al. 2 OBLF).
4.2
4.2.1 En l'espèce, les appelants soutiennent que l'intimée ne pourrait pas ignorer que le montant de 300 fr. dont elle s'acquittait mensuellement depuis le début du contrat constituait un forfait pour les frais accessoires de l'appartement loué, soit le chauffage, l'eau chaude et l'électricité, de sorte qu'il y avait lieu de retenir qu'une convention sur les frais accessoires avait été conclue entre les parties par actes concluants.
Ce faisant, les appelants substituent pour l'essentiel leur raisonnement à celui du Tribunal, sans démontrer en quoi la décision entreprise serait erronée sur ce point. La question de la recevabilité d'un tel grief peut néanmoins demeurer indécise compte tenu de l'issue du litige.
Les appelants ne contestent en effet pas à satisfaction que, dans la mesure où le contrat de bail a été conclu par écrit, une convention sur les frais accessoires devait l'être également. Ils ne contestent au demeurant pas que tel n'a pas été le cas en l'espèce, le contrat comportant seulement l'indication selon laquelle des charges d'un montant mensuel de 300 fr. étaient dues en sus du loyer. Les appelants ne peuvent en particulier pas être suivis lorsqu'ils soutiennent qu'une convention sur les frais accessoires aurait été conclue entre les parties par actes concluants, une telle convention ne satisfaisant en tout état pas aux exigences requises par la jurisprudence. Indépendamment de la forme que ladite convention aurait dû revêtir, les appelants n'ont pas démontré que l'intimée aurait été informée, de manière suffisamment précise, des frais accessoires mis à sa charge. Partant, c'est à raison que le Tribunal a retenu que la convention conclue entre les parties était nulle.
Les appelants se sont contentés de critiquer la décision du Tribunal en tant qu'il avait nié l'existence d'une convention valable sur les frais accessoires, sans formuler de véritable critique à l'encontre du raisonnement des premiers juges selon lequel les postes composant les frais accessoires avaient été déterminés pour la première fois au cours de la procédure de première instance – les pièces nécessaires ayant été produites avec la réponse des appelants du 6 octobre 2022, la date du 1er novembre 2022 étant retenue dans un souci de simplification – ou du montant retenu à ce titre. Il n'y a dès lors pas lieu de s'écarter du montant forfaitaire de 250 fr. par mois dès le 1er novembre 2022 ainsi que, par conséquent, des montants devant être remboursés à l'intimée, soit 100 fr. par mois pour la période du 1er avril 2014 au 31 octobre 2022, puis 50 fr. par mois à compter du 1er novembre 2022.
Les griefs des appelants sont donc infondés, dans la mesure de leur recevabilité.
Bien que l'intimée semble critiquer le raisonnement du premier juge, dès lors qu'elle indique que les postes compris dans les frais accessoires n'auraient pas été établis au cours de la procédure et que les pièces produites par les appelants ne seraient pas probantes, celle-ci n'a pas formé appel du jugement entrepris ni pris de conclusion à cet égard, de sorte qu'il ne sera pas tenu compte de ses éventuelles contestations.
5. Bien que les appelants aient conclu à l'annulation du jugement dans son ensemble, ils ne prennent aucune conclusion spécifique ni ne formulent aucun grief à l'encontre de leur condamnation à rembourser à l'intimée le montant de 6'000 fr. avec intérêts à 5% dès le 6 avril 2022, soit le montant versé par elle aux fins de garantie. Ce point ne sera donc pas examiné plus avant.
6. En définitive, au vu de ce qui précède, le jugement attaqué sera confirmé.
7. A teneur de l'art. 22 al. 1 LaCC, il n'est pas prélevé de frais dans les causes soumises à la juridiction des baux et loyers (art. 116 al. 1 CPC; ATF 139 III 182 consid. 2.6).
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La Chambre des baux et loyers :
A la forme :
Déclare recevable l'appel interjeté le 24 novembre 2023 par B______ et A______ contre le jugement JTBL/868/2023 rendu le 16 octobre 2023 par le Tribunal des baux et loyers dans la cause C/5389/2022‑1.
Au fond :
Confirme le jugement entrepris.
Déboute les parties de toutes autres conclusions.
Dit que la procédure est gratuite.
Siégeant :
Madame Nathalie LANDRY-BARTHE, présidente; Madame Sylvie DROIN, Monsieur Laurent RIEBEN, juges; Monsieur Jean-Philippe ANTHONIOZ, Monsieur Damien TOURNAIRE, juges assesseurs; Madame Maïté VALENTE, greffière.
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Indication des voies de recours :
Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.
Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.
Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 15'000 fr. cf. consid. 1.2