Aller au contenu principal

Décisions | Chambre des baux et loyers

1 resultats
C/13292/2020

ACJC/157/2023 du 06.02.2023 sur JTBL/297/2022 ( OBL ) , CONFIRME

Normes : CO.257f.al3; CO.262.al1
En fait
En droit
Par ces motifs

rŽpublique et

canton de genve

POUVOIR JUDICIAIRE

C/13292/2020                                                                                    ACJC/157/2023

ARRæT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des baux et loyers

DU LUNDI 6 FEVRIER 2023

 

Entre

A______ SA, sise ______ (VS), appelante d'un jugement rendu par le Tribunal des baux et loyers le 26 avril 2022, comparant par Me Serge PATEK, avocat, boulevard HelvŽtique 6, 1204 Genve, en l'Žtude duquel elle fait Žlection de domicile,

 

et

 

Madame B______, domiciliŽe ______ [GE], intimŽe, reprŽsentŽe par l'ASLOCA, rue du Lac 12, case postale 6150, 1211 Genve 6, en les bureaux de laquelle elle fait Žlection de domicile.

 

 

 


EN FAIT

A.        Par jugement JTBL/297/2022 du 26 avril 2022, communiquŽ pour notification aux parties le 27 avril 2022, le Tribunal des baux et loyers a dŽclarŽ inefficace le congŽ notifiŽ le 2 juin 2020 ˆ B______ pour le 31 juillet 2020 par A______ SA concernant les locaux commerciaux au 7me Žtage de l'immeuble sis no. ______, rue 1______ ˆ Genve (ch. 1 du dispositif), a dŽboutŽ les parties de toutes autres conclusions (ch. 2) et a dit que la procŽdure Žtait gratuite (ch. 3).

            En substance, les premiers juges ont considŽrŽ que B______ n'avait pas violŽ son devoir de diligence et que, quoi qu'il en soit, aucun motif de refus de sous-location n'Žtait rŽalisŽ en l'espce. Ds lors, la rŽsiliation du bail donnŽe en raison de l'existence de la sous-location et des conditions de cette dernire devait tre considŽrŽe comme inefficace.

B.        a. Par acte dŽposŽ le 25 mai 2022 au greffe universel et transmis le mme jour ˆ la Cour de justice, A______ SA forme appel contre ce jugement, dont elle sollicite l'annulation. Elle conclut ˆ ce que la Cour, cela fait, constate l'efficacitŽ du congŽ donnŽ ˆ B______, condamne cette dernire ˆ Žvacuer immŽdiatement les locaux litigieux et ordonne ˆ la force publique de procŽder ˆ l'expulsion de la locataire ds l'entrŽe en force du jugement d'Žvacuation.

            b. Par acte dŽposŽ le 28 juin 2022, B______ conclut ˆ la confirmation du jugement du Tribunal.

            c. A______ SA a rŽpliquŽ le 29 aožt 2022 et a persistŽ dans ses conclusions.

d. Les parties ont ŽtŽ avisŽes le 10 octobre 2022 par le greffe de la Cour de ce que la cause Žtait gardŽe ˆ juger, B______ n'ayant pas fait usage de son droit de dupliquer.

C.        Les faits pertinents suivants rŽsultent de la procŽdure :

            a. Le 31 aožt 2006, C______, bailleresse (ci-aprs la premire bailleresse), D______ et B______, locataires, ont conclu un contrat de bail ˆ loyer portant sur la location de bureaux de 146 m2 au 7me Žtage de l'immeuble sis rue 1______ no. ______ ˆ Genve.

Suite au dŽcs de D______ en avril 2019, B______ est restŽe seule titulaire du bail.

Le contrat de bail a ŽtŽ conclu pour une durŽe de cinq ans, du 1er novembre 2006 au 31 octobre 2011, renouvelable ensuite tacitement de cinq ans en cinq ans. Le prŽavis de rŽsiliation Žtait de six mois.

Les locaux Žtaient destinŽs ˆ l'usage d'un cabinet psychiatrique exclusivement.

Le loyer, indexŽ ˆ l'indice suisse des prix ˆ la consommation, a ŽtŽ fixŽ en dernier lieu, le 1er aožt 2017, ˆ 3'728 fr. par mois et les charges mensuelles ˆ 180 fr.

A une date indŽterminŽe, A______ SA est devenue propriŽtaire de l'immeuble susmentionnŽ.

L'immeuble a ŽtŽ gŽrŽ par [la rŽgie immobilire] E______ jusqu'au 31 dŽcembre 2017, puis par [la rŽgie immobilire] F______ ds cette date.

D______ Žtait l'interlocuteur principal des rŽgies susmentionnŽes.

            b. Par courrier du 3 juin 2006, B______ a fait part ˆ la premire bailleresse de son souhait de s'installer dans les locaux en question en tant que psychiatre, avec deux collgues psychologues, tout en Žtant seule responsable du bail, D______ faisant office de garant.

Il Žtait Žgalement convenu avec E______ et la premire bailleresse que des cloisons soient installŽes afin de constituer des bureaux sŽparŽs dans les locaux qui Žtaient alors en Ç open space È. A teneur du bail, les travaux ont ŽtŽ pris en charge pour partie par la bailleresse et pour partie par B______.

Aprs la rŽalisation des travaux, les locaux se composaient de quatre bureaux, d'une salle d'attente, d'un hall d'entrŽe, d'une salle de rŽunion avec kitchenette et de deux pices d'eau.

c. B______ exerce son activitŽ de psychiatre dans l'un des bureaux et sous-loue les trois autres.

Le deuxime bureau est exploitŽ par G______, psychologue, qui exerce son activitŽ ˆ plein temps. Au dŽbut du bail, elle partageait le bureau avec H______, chacune exerant ˆ mi-temps.

Le troisime bureau est occupŽ par I______, psychologue.

Le quatrime bureau a ŽtŽ occupŽ par J______ de juin 2016 ˆ mars 2018. Depuis mi-avril 2019, il est occupŽ par K______, psychiatre-psychothŽrapeute, qui exerce son activitŽ ˆ 80%.

Chaque thŽrapeute a l'usage exclusif d'un bureau. Les autres pices (salle d'attente, salle de confŽrence avec kitchenette, sanitaires et hall) sont utilisŽes de manire commune.

d. Sur le plan financier, le loyer et les charges, ainsi que tous les frais du cabinet (assurance mŽnage, femme de mŽnage, frais administratifs) et les achats divers (meubles, produits de nettoyage, matŽriel de bureau commun, fax et photocopieuse, cafŽtŽria, entretien gŽnŽral et dŽcoration) sont partagŽs en quatre parts.

Les frais mensuels sont rŽpartis entre les quatre thŽrapeutes de la faon suivante :

- Loyer et provision pour chauffage et eau chaude                          977 fr.

- Assurance mŽnage / RC                                                                 3 fr. 51

- Acompte pour frais de fonctionnement et dŽpenses communes    150 fr.

(ŽlectricitŽ, frais de mŽnage, achat de matŽriel, etc.), adaptŽ selon

les besoins et spŽcificitŽs dans le bilan de fin d'annŽe.

Total                                                                                                  1'130 fr. 50

e. B______ Žtablit chaque annŽe un dŽcompte des montants dus et versŽs par chacune des sous-locataires et leur rembourse l'Žventuel trop-peru. Le loyer, les charges et toutes les dŽpenses et achats communs y sont consignŽs et partagŽs en quatre. Si l'une des sous-locataires effectue un achat, la locataire la rembourse et consigne le montant au bilan.

f. Le nom de chaque thŽrapeute figure sur la plaque au bas de l'immeuble, ainsi que sur la porte palire et sur la porte du bureau qu'elle occupe.

Au dŽbut du bail, le 11 septembre 2006, la premire bailleresse avait Žtabli un bulletin de commande de plaquettes pour la porte des locaux et la bo”te aux lettres, aux noms de B______, de H______ et de G______.

g. Par jugement du 7 dŽcembre 2020, le Tribunal a notamment accordŽ ˆ B______ une rŽduction de loyer de 30% du 4 septembre 2016 au 29 novembre 2017, les locaux Žtant affectŽs d'un dŽfaut liŽ ˆ des infiltrations d'eau.

Lors de l'audience du 29 janvier 2019 qui s'est tenue dans le cadre de cette procŽdure, L______, reprŽsentant [de la rŽgie] E______, a dŽclarŽ que la sous-location n'Žtait pas autorisŽe.

h. Par courrier du 10 mars 2020, A______ SA a invitŽ B______ ˆ lui transmettre l'intŽgralitŽ des contrats de sous-location en cours.

i. B______ a rŽpondu le 31 mars 2020 ˆ A______ SA que cette dernire n'ignorait pas que les locaux avaient toujours ŽtŽ partiellement sous-louŽs, selon accord intervenu entre les parties au dŽbut du bail. Elle lui a remis la copie des contrats de sous-location et avenants, ainsi que la feuille de calcul concernant la rŽpartition des frais entre elle et les sous-locataires.

j. Le 1er avril 2020, A______ SA a invitŽ B______ ˆ lui communiquer la surface des locaux louŽs aux sous-locataires.

k. Le 8 avril 2020, B______ a rŽpondu ˆ A______ SA que les bureaux de I______ et de G______ mesuraient 26 m2, celui de K______ et le sien mesuraient 25 m2.

l. Dans son courrier du 9 avril 2020, A______ SA a considŽrŽ que les conditions des sous-locations Žtaient manifestement abusives. Elle a mis B______ en demeure de ne plus les pratiquer d'ici au 31 mai 2020.

m. Le 28 mai 2020, B______ a contestŽ ces allŽgations aux motifs qu'elle partageait de manire tout ˆ fait Žgale l'ensemble de la surface des locaux avec les sous-locataires et ne pratiquait aucune majoration de loyer.

n. Par avis officiel du 2 juin 2020, A______ SA a rŽsiliŽ le bail pour le 31 juillet 2020, en se fondant sur l'article 257f al. 3 CO.

o. Par requte dŽposŽe le 3 juillet 2020 par-devant la Commission de conciliation, dŽclarŽe non conciliŽe lors de l'audience du 14 janvier 2021 et portŽe devant le Tribunal le 12 fŽvrier 2021, B______ a conclu, principalement, ˆ ce que le Tribunal constate l'inefficacitŽ du congŽ notifiŽ le 2 juin 2020 pour le 31 juillet 2020 portant sur les locaux commerciaux et, subsidiairement, ˆ ce qu'il annule le congŽ.

A l'appui de sa requte, B______ a notamment produit un courrier du 20 octobre 2020 signŽ par les trois sous-locataires expliquant de manire dŽtaillŽe le fonctionnement du cabinet sur un plan organisationnel et financier, ainsi que les factures relatives aux frais de fonctionnement et aux dŽpenses communes mentionnŽes dans le bilan adressŽ ˆ chaque sous-locataire pour la pŽriode de janvier ˆ octobre 2020.

p. Dans sa rŽponse du 19 avril 2021, A______ SA a conclu ˆ la validation de la rŽsiliation. Elle a pris des conclusions reconventionnelles en Žvacuation et en exŽcution directe de celle-ci.

En substance, elle a fait valoir que les contrats de sous-location avaient ŽtŽ conclus sans son accord prŽalable. Les conditions de la sous-location Žtaient abusives, la participation aux prŽtendus frais communs induisant une majoration de loyer de 15,7% injustifiŽe.

q. Lors de l'audience du 29 juin 2021 du Tribunal, les parties ont chacune dŽposŽ un chargŽ de pices complŽmentaire.

Le conseil de A______ SA a exposŽ que la prŽcitŽe n'avait pas ŽtŽ informŽe de l'identitŽ des hŽritiers de feu D______ et partant des titulaires du bail que le 25 novembre 2019, de sorte qu'elle n'avait pu adresser de mise en demeure plus t™t.

B______ a dŽclarŽ qu'elle avait louŽ les locaux dans le but de les partager avec deux collgues. La bailleresse et les locataires avaient participŽ aux travaux d'amŽnagement des locaux. Elle Žtait venue voir comment se dŽroulaient les travaux et conna”tre l'organisation du cabinet. Les locaux avaient ŽtŽ sous-louŽs depuis le dŽbut du bail. Il y avait eu quelques changements de sous-locataires dont elle n'avait pas avisŽ sa bailleresse. Celle-ci ne l'avait jamais interpelŽe au sujet des sous-locations alors qu'elle-mme et sa reprŽsentante avaient effectuŽ plusieurs visites dans le cabinet.

r. Lors des audiences des 5 octobre, 23 novembre 2021 et 18 janvier 2022 le Tribunal a procŽdŽ ˆ l'audition de tŽmoins.

I______ a dŽclarŽ qu'elle avait suivi les discussions au dŽbut du bail, confirmant qu'il Žtait clairement Žtabli que les locaux, qui sont vastes, seraient partagŽs entre plusieurs personnes. Il lui Žtait arrivŽ d'tre prŽsente dans les locaux lors des visites de la rŽgie gŽrant l'immeuble. A une ou deux reprises, elle avait tŽlŽphonŽ ˆ la rŽgie en s'annonant par son nom, sans prŽciser qu'elle Žtait sous-locataire. Elle utilisait plusieurs fois par jour le Ç secrŽtariat/cafŽtŽria È o se trouvent le fax, la photocopieuse, le frigo et les machines ˆ cafŽ.

G______ a exposŽ qu'il Žtait prŽvu depuis le dŽbut que les locaux soient partagŽs. Elle avait participŽ aux discussions avec l'architecte et [la rŽgie] E______ concernant les travaux d'amŽnagement des locaux. Elle ne figurait pas sur le bail car il Žtait plus simple vis-ˆ-vis de la rŽgie d'avoir un seul interlocuteur. Elle a confirmŽ les montants des charges facturŽes figurant au bilan et indiquŽ qu'elle faisait confiance ˆ B______, ne demandant pas ˆ voir les pices comptables.

K______ a dŽclarŽ que les chiffres du bilan correspondaient aux frais partagŽs. Elle n'avait pas demandŽ les pices comptables mais y avait accs.

L______, directeur auprs de F______ jusqu'au 31 dŽcembre 2020, a dŽclarŽ qu'il n'avait pas eu de contacts directs avec la locataire, mais qu'il Žtait au courant des Žchanges concernant la rŽfection de la toiture, des infiltrations ainsi que d'Žventuelles sous-locations, problŽmatiques qui Žtaient discutŽes avec la bailleresse. Il a confirmŽ les propos inscrits dans le procs-verbal du 29 janvier 2019. Il ne se souvenait pas avoir ŽtŽ informŽ des changements de locataires. A l'occasion d'une visite dans l'immeuble, il avait vu des noms sur la porte palire diffŽrents de ceux des locataires et souponnŽ une sous-location. Il en avait informŽ A______ SA. Il avait aussi regardŽ dans le dossier et constatŽ qu'il n'y avait pas de sous-location autorisŽe. Il ne savait pas pourquoi un dŽlai de plus d'une annŽe s'Žtait ŽcoulŽ entre ce constat et l'avis de rŽsiliation. Il ignorait si tout le dossier avait ŽtŽ remis ˆ [la rŽgie] F______, mais il partait du principe que tel Žtait le cas.

M______, en charge de l'immeuble en question auprs de [la rŽgie] E______ jusqu'au 31 dŽcembre 2017, a dŽclarŽ qu'elle avait rencontrŽ ˆ trois reprises la locataire. A l'Žpoque, elle avait visitŽ les locaux et constatŽ qu'il y avait plusieurs mŽdecins qui occupaient des salles diffŽrentes, ce qui ne posait pas de problme. Elle ne s'occupait que des aspects techniques et ne connaissait pas les liens existants entre la locataire et les autres personnes qui utilisaient les locaux.

s. Dans leurs plaidoiries finales Žcrites des 21 fŽvrier et 8 mars 2022, les parties ont persistŽ dans leurs conclusions.

t. Les 24 et 25 mars 2022, les parties ont adressŽ au Tribunal des dŽterminations spontanŽes.

u. Le Tribunal a gardŽ la cause ˆ juger le 26 mars 2022.


EN DROIT

1.       1.1 L'appel est recevable contre les dŽcisions finales et les dŽcisions incidentes de premire instance (art. 308 al. 1 let. a CPC). Dans les affaires patrimoniales, l'appel est recevable si la valeur litigieuse au dernier Žtat des conclusions est de 10'000 fr. au moins (art. 308 al. 2 CPC).

Selon la jurisprudence constante du Tribunal fŽdŽral, les contestations portant sur l'usage d'une chose louŽe sont de nature pŽcuniaire (arrt du Tribunal fŽdŽral 4A_388/2016 du 15 mars 2017 consid. 1).

Lorsque l'action ne porte pas sur le paiement d'une somme d'argent dŽterminŽe, le Tribunal dŽtermine la valeur litigieuse si les parties n'arrivent pas ˆ s'entendre sur ce point ou si la valeur qu'elles avancent est manifestement erronŽe (art. 91 al. 2 CPC). La dŽtermination de la valeur litigieuse suit les mmes rgles que pour la procŽdure devant le Tribunal fŽdŽral (RŽtornaz in : ProcŽdure civile suisse, Les grands thmes pour les praticiens, Neuch‰tel, 2010, p. 363; SpŸhler, Basler Kommentar, Schweizeriche Zivilprozessordnung, 3me Ždition, 2017, n. 9 ad art. 308 CPC).

Dans une contestation portant sur la validitŽ d'une rŽsiliation de bail, la valeur litigieuse est Žgale au loyer de la pŽriode minimum pendant laquelle le contrat subsiste nŽcessairement si la rŽsiliation n'est pas valable, pŽriode qui s'Žtend jusqu'ˆ la date pour laquelle un nouveau congŽ peut tre donnŽ ou l'a effectivement ŽtŽ. Lorsque le bail bŽnŽficie de la protection contre les congŽs des art. 271 ss CO, il convient, sauf exceptions, de prendre en considŽration la pŽriode de protection de trois ans ds la fin de la procŽdure judiciaire qui est prŽvue par l'art. 271a al. 1 let. e CO (ATF 137 III 389 consid. 1.1; 136 III 196 consid. 1.1; arrt du Tribunal fŽdŽral 4A_388/2016 du 15 mars 2017 consid. 1).

En l'espce, le loyer annuel des locaux, charges comprises, s'Žlve ˆ 46'896 fr., de sorte que la valeur litigieuse est supŽrieure ˆ 10'000 fr.

La voie de l'appel est donc ouverte.

1.2 L'appel a ŽtŽ interjetŽ dans le dŽlai et suivant la forme prescrite par la loi (art. 130, 131, 311 al. 1 CPC). Il est ainsi recevable.

1.3 L'appel peut tre formŽ pour violation du droit (art. 310 let. a CPC) et constatation inexacte des faits (art. 310 let. b CPC). L'instance d'appel dispose ainsi d'un plein pouvoir d'examen de la cause en fait et en droit; en particulier, le juge d'appel contr™le librement l'apprŽciation des preuves effectuŽe par le juge de premire instance (art. 157 CPC en relation avec l'art. 310 let. b CPC) et vŽrifie si celui-ci pouvait admettre les faits qu'il a retenus (ATF 138 III 374 consid. 4.3.1).

1.4 Selon l'art. 243 al. 2 let. c CPC, la procŽdure simplifiŽe s'applique aux litiges portant sur des baux ˆ loyer d'habitations et de locaux commerciaux en ce qui concerne la consignation du loyer, la protection contre les loyers abusifs, la protection contre les congŽs ou la prolongation du bail. La maxime inquisitoire sociale rŽgit la procŽdure (art. 247 al. 2 let. a CPC).

2.       L'appelante reproche au Tribunal d'avoir dŽclarŽ inefficace le congŽ litigieux, alors que les conditions de l'art. 257f al. 3 CO Žtaient remplies et que l'intimŽe s'adonnait ˆ une sous-location ˆ des conditions abusives, en violation de l'art. 262 al. 2 CO.

2.1 En vertu de l'art. 257f al. 1 et 2 CO, le locataire est tenu d'user de la chose avec le soin nŽcessaire et, s'il s'agit d'un immeuble, d'avoir pour les habitants et les voisins les Žgards qui leur sont dus.

Aux termes de l'art. 257f al. 3 CO, lorsque le maintien du bail est devenu insupportable pour le bailleur ou les personnes habitant la maison parce que le locataire, nonobstant une protestation Žcrite du bailleur, persiste ˆ enfreindre son devoir de diligence ou ˆ manquer d'Žgards envers les voisins, le bailleur peut rŽsilier le contrat avec effet immŽdiat; les baux d'habitations et de locaux commerciaux peuvent tre rŽsiliŽs moyennant un dŽlai de congŽ minimum de 30 jours pour la fin d'un mois.

Ainsi, en cas de violation persistante des devoirs ŽnoncŽs ci-dessus, l'art. 257f al. 3 CO confre au bailleur un droit de rŽsiliation anticipŽe (ACJC/929/2022 du 7 juillet 2022 consid. 4.1.1; Wessner, in : Droit du bail ˆ loyer et ˆ ferme, Commentaire pratique, 2e Žd., B‰le 2017, n. 3 ad art. 257f CO).

L'art. 257f al. 3 CO suppose la rŽalisation des conditions cumulatives suivantes : la violation de la diligence incombant au locataire, un avertissement Žcrit du bailleur, la persistance du locataire ˆ ne pas respecter son devoir en relation avec les manquements ŽvoquŽs par le bailleur dans sa protestation, le caractre insupportable du maintien du contrat pour le bailleur et, enfin, le respect d'un prŽavis de 30 jours pour la fin d'un mois (arrts du Tribunal fŽdŽral 4A_87/2012 du 10 avril 2012 consid. 4.1 et 4C_306/2003 du 20 fŽvrier 2004 consid. 3.1).

La rŽsiliation anticipŽe du bail en vertu de l'art. 257f al. 3 CO prŽsuppose l'envoi d'une protestation Žcrite du bailleur qui a pour but de faire cesser une violation en cours et d'en empcher une nouvelle; elle doit indiquer prŽcisŽment l'obligation violŽe par le locataire et les mesures qu'il lui revient de prendre pour que la situation redevienne normale. La protestation Žcrite du bailleur doit mentionner l'Žtat de fait constituant un usage contraire au bail et ce qu'il est demandŽ au locataire (ACJC/929/2022 du 7 juillet 2022 consid. 4.1.1; ACJC/1282/2013 du 4 novembre 2013 consid. 4.2 et autres arrts citŽs). Seules des circonstances exceptionnelles justifient de priver le locataire d'une telle possibilitŽ (arrts du Tribunal fŽdŽral 4A_162/2014 du 26 aožt 2014 consid. 2.2 et 4A_456/2010 du 18 avril 2011 consid. 3.2).

Ainsi, le congŽ doit correspondre ˆ un fait pour lequel un avertissement initial a dŽjˆ ŽtŽ donnŽ et ne peut pas survenir longtemps aprs ce dernier (arrts du Tribunal fŽdŽral 4A_457/2013 consid. 3.1; 4C_270/2001 du 26 novembre 2001 consid. 3b dd et ACJC/1141/2003 du 10 novembre 2003).

La persistance du locataire ˆ ne pas respecter ses devoirs exige que les perturbations se poursuivent malgrŽ la mise en demeure (arrt du Tribunal fŽdŽral 4A_173/2017 du 11 octobre 2017 consid. 3.1.2).

Il appartient au bailleur de prouver la rŽalisation desdites conditions. Lorsque ces conditions ne sont pas remplies, la rŽsiliation anticipŽe est inefficace; elle ne peut pas tre convertie en une rŽsiliation ordinaire (ATF 135 III 441 consid. 3.3; arrt du Tribunal fŽdŽral 4A_140/2019 du 26 septembre 2019 consid. 4.2).

L'exigence du caractre insupportable du maintien du contrat pour le bailleur n'a pas de portŽe indŽpendante, lorsque le bail est rŽsiliŽ en raison d'une sous-location dŽnuŽe d'autorisation prŽalable et que la sous-location aurait pu tre refusŽe ˆ bon droit par le bailleur pour l'un des motifs prŽvus ˆ l'art. 262 al. 2 CO (ATF
134 III 300 consid. 3.1; 134 III 446 consid. 2.2).

2.2 Le locataire peut sous-louer tout ou partie de la chose avec le consentement du bailleur (art. 262 al. 1 CO).

L'art. 262 al. 1 CO n'exige pas que le consentement ˆ la sous-location soit donnŽ par Žcrit par le bailleur. Le consentement peut donc tre donnŽ oralement ou mme tacitement (actes concluants, silence du bailleur) (arrt du Tribunal fŽdŽral 4A_290/2015 du 9 septembre 2015 consid. 3.1).

Le locataire qui sous-loue totalement ou partiellement le logement remis ˆ bail sans requŽrir le consentement du bailleur viole son devoir de diligence et s'expose ˆ une rŽsiliation anticipŽe du contrat au sens de l'art. 257f al. 3 CO lorsque le bailleur aurait disposŽ d'un motif valable au sens de l'art. 262 al. 2 CO pour s'opposer ˆ la sous-location (ATF 134 III 300 consid. 3.1).

Les cas dans lesquels le bailleur peut refuser son consentement, ŽnumŽrŽs de manire exhaustive ˆ l'art. 262 al. 2 CO, sont les suivants : lorsque le locataire refuse de lui communiquer les conditions de la sous-location (a), lorsque les conditions de la sous-location, comparŽes ˆ celle du contrat de bail, sont abusives (b), et lorsque la sous-location prŽsente pour le bailleur des inconvŽnients majeurs (c).

Enfin, la jurisprudence a prŽcisŽ que la sous-location partielle est conue notamment pour le cas d'un appartement devenu trop grand ˆ la suite, par exemple, du dŽcs ou du dŽpart de l'un de ses occupants et qui est sous-louŽ ˆ un tiers pour partie seulement (ATF 138 III 59 consid. 2.2.1; arrts du Tribunal fŽdŽral 4A_507/2012 du 19 dŽcembre 2012 consid. 3.2 ; 4A_367/2010 du 4 octobre 2010 consid. 2.1).

2.3 En l'espce, l'intimŽe a d'emblŽe prŽcisŽ par Žcrit, lorsqu'elle a manifestŽ son intŽrt ˆ louer les locaux litigieux, qu'elle entendait les partager avec d'autres thŽrapeutes, mais serait seule locataire. A la suite de ce courrier, des cloisons ont ŽtŽ montŽes afin de crŽer quatre espaces de bureaux distincts, d'entente entre la premire bailleresse et l'intimŽe, qui ont participŽ chacune financirement aux travaux. Des plaques ont ŽtŽ Žmises aux noms de plusieurs thŽrapeutes par E______ et la premire bailleresse a eu accs aux locaux. Au vu de ces ŽlŽments et de la volontŽ clairement exprimŽe de B______ d'en sous-louer une partie, ce qui a ŽtŽ fait depuis la prise du bail, il ne peut tre retenu que la sous-location n'Žtait pas admise par la premire bailleresse ou n'aurait pas ŽtŽ portŽe ˆ sa connaissance. L'argument de l'appelante selon lequel la prŽsence d'autres thŽrapeutes dans les locaux ou les discussions au sujet de l'amŽnagement de ces derniers avec E______ n'entra”nait pas encore leur qualitŽ de sous-locataire ne convainc pas, au vu des circonstances dŽcrites ci-dessus.

Il convient ainsi de retenir, avec le Tribunal, que la sous-location Žtait connue et admise, ˆ tout le moins par actes concluants par la premire bailleresse.

Le fait que l'appelante ait rŽalisŽ de manire fortuite qu'une partie des locaux Žtait sous-louŽe dans la mesure o cette information ne figurait pas explicitement au dossier de location ne dŽcoule pas d'un manque de diligence de la part de l'intimŽe, les conditions du bail n'ayant pas ŽtŽ modifiŽes par le changement de propriŽtaire de l'immeuble.

Par ailleurs, l'absence de contacts directs entre les sous-locataires et F______ ne permet pas de remettre en cause ce qui prŽcde.

L'absence d'information ˆ la bailleresse des changements de sous-locataires ne conduit pas ˆ elle seule de constater la violation de son devoir de diligence par l'intimŽe, dans la mesure o il n'est pas dŽmontrŽ qu'il s'agirait d'une pratique nouvelle qui n'Žtait pas acceptŽe par la premire bailleresse, respectivement que celle-ci requŽrait de donner son accord ˆ chaque changement de sous-locataire.

Enfin, l'appelante n'explique pas en quoi le Tribunal aurait considŽrŽ ˆ tort que les autres conditions de l'art. 257f al. 3 CO Žtaient remplies. Il convient de retenir, ˆ l'instar du Tribunal, que les conditions posŽes au prononcŽ d'un congŽ anticipŽ ne sont pas remplies.

2.4 Par ailleurs, il ressort des faits Žtablis que B______ et ses trois sous-locataires disposent chacune de la jouissance d'un bureau de taille quasiment identique aux autres, ainsi que d'un accs Žgal aux parties communes des locaux et paient chacune un quart du loyer du bail principal. Elles partagent de manire Žgale les frais de fonctionnement du cabinet, qui sont clairement distinguŽs du loyer, et ceux-ci font l'objet de dŽcomptes desquels il ne peut tre considŽrŽ qu'ils ne correspondraient pas aux dŽpenses effectives. Les acomptes, puis les montants finaux effectivement versŽs pour les frais de fonctionnement, ne correspondent ainsi nullement ˆ un loyer majorŽ, mais bien ˆ des autres dŽpenses, liŽes aux activitŽs des occupants.

Contrairement ˆ ce que prŽtend l'appelante, le Tribunal n'a pas errŽ en considŽrant que la rŽalitŽ de ces frais et de leur rŽpartition Žgale entre les occupantes des locaux Žtait admise, quand bien mme les sous-locataires ne procŽdaient pas ˆ une vŽrification systŽmatique et minutieuse de toutes les pices comptables. De mme, les critiques de l'appelante quant ˆ la crŽdibilitŽ de ces pices ne permettent pas de retenir que ce serait ˆ tort que le Tribunal a ŽtŽ convaincu de leur valeur probante, ce d'autant plus qu'il s'agit, pour la plupart, d'achats nŽcessaires au fonctionnement d'un cabinet (matŽriel de nettoyage, d'imprimante, masques chirurgicaux, etc.). De plus, dans la mesure o les faits ont ŽtŽ Žtablis en dŽtail et o l'Žtablissement des faits n'est pas critiquŽ dans l'appel, il n'appara”t pas nŽcessaire d'y revenir plus en avant.

Il sied au surplus de rappeler que les conditions de la sous-location ont ŽtŽ transmises ˆ l'appelante ds qu'elle l'a demandŽ et que celle-ci ne fait pas Žtat d'un inconvŽnient majeur autre que la sous-location reprŽsenterait pour elle.

Aprs examen des conditions de la sous-location, il en dŽcoule que l'appelante ne pouvait la refuser, dans la mesure o les conditions posŽes par la loi sont respectŽes.

Ainsi, les conditions posŽes au prononcŽ d'un congŽ selon l'art. 257f al. 3 CO ne sont pas rŽunies, de sorte que le jugement querellŽ sera intŽgralement confirmŽ.

3.       Au vu de ce qui prŽcde, il n'est pas nŽcessaire d'examiner la question de l'annulabilitŽ du congŽ.

De mme, l'appelante sera dŽboutŽe de ses conclusions en Žvacuation, ce d'autant plus qu'elle n'explique pas en quoi le Tribunal aurait errŽ sur ce point.

4.       A teneur de l'art. 22 al. 1 LaCC, il n'est pas prŽlevŽ de frais dans les causes soumises ˆ la juridiction des baux et loyers (ATF 139 III 182 consid. 2.6).

* * * * *

 


PAR CES MOTIFS,
La Chambre des baux et loyers :

A la forme :

DŽclare recevable l'appel interjetŽ le 25 mai 2022 par A______ SA contre le jugement JTBL/297/2022 rendu le 26 avril 2022 par le Tribunal des baux et loyers dans la cause C/13292/2020-1-OSB.

Au fond :

Confirme le jugement entrepris.

Dit que la procŽdure est gratuite.

DŽboute les parties de toutes autres conclusions.

SiŽgeant :

Madame Nathalie LANDRY-BARTHE, prŽsidente; Madame Sylvie DROIN et Monsieur Laurent RIEBEN, juges; Monsieur Nicolas DAUDIN et Madame
ZoŽ SEILER, juges assesseurs; Madame Ma•tŽ VALENTE, greffire.

 

La prŽsidente :

Nathalie LANDRY-BARTHE

 

La greffire :

Ma•tŽ VALENTE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

ConformŽment aux art. 72 ss de la loi fŽdŽrale sur le Tribunal fŽdŽral du 17 juin 2005 (LTF ; RS 173.110), le prŽsent arrt peut tre portŽ dans les trente jours qui suivent sa notification avec expŽdition complte (art. 100 al. 1 LTF) par devant le Tribunal fŽdŽral par la voie du recours en matire civile.

Le recours doit tre adressŽ au Tribunal fŽdŽral, 1000 Lausanne 14.