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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2392/2021

ATAS/119/2022 du 17.02.2022 ( CHOMAG ) , ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/2392/2021 ATAS/119/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 17 février 2022

5ème Chambre

 

En la cause

Monsieur A______, domicilié à CHÂTELAINE, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Philippe GIROD

recourant

 

contre

OFFICE CANTONAL DE L'EMPLOI, sis rue des Gares 16, GENÈVE

 

intimé

 


EN FAIT

A. a. Monsieur A______ (ci-après : l’assuré ou le recourant), né en ______ 1985, de nationalité française, est domicilié à Genève depuis le 19 septembre 2016. Il est titulaire d’une licence en économie et en management d’entreprise délivrée en 2009 ainsi que d’un Master d’économie de l’Université de Lille délivré en 2010.

b. De novembre 2013 à juin 2016, l’assuré a été employé par B______, à l’aéroport de Genève.

c. En date du 20 septembre 2016, l’assuré s’est inscrit auprès de l’office régional de placement (ci-après : l’ORP) et un délai-cadre a été ouvert en sa faveur dès cette date jusqu’au 19 septembre 2018. Au cours du premier entretien avec son conseiller en placement, ce dernier a noté que l’assuré était très motivé dans ses recherches d’emploi, jusqu’à viser, de l’avis dudit conseiller, des postes difficilement accessibles au vu de son expérience professionnelle.

d. Par décision du 29 mai 2017, la caisse de chômage de l’assuré a nié le droit de celui-ci à percevoir des indemnités de chômage en Suisse en se basant sur un rapport d’enquête du service juridique de l’office cantonal de l’emploi (ci-après : l’OCE ou l’intimé) qui concluait que l’assuré résidait en France. Cette décision a été confirmée par décision sur opposition du 26 juillet 2017. Elle a cependant été annulée par la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre de céans) qui, par arrêt ATAS/645/2018, du 17 juillet 2018, a établi que le droit d’être entendu du recourant avait été violé, de façon particulièrement grave.

e. Malgré de nombreuses assignations et trois mesures de marché du travail, l’assuré n’est pas parvenu à retrouver un emploi durable au cours de son délai-cadre initial. En revanche, suite à plusieurs remplacements en tant qu’enseignant de mathématiques au cycle d’orientation, il a bénéficié d’un nouveau délai-cadre d’indemnisation.

f. En date du 14 octobre 2019, l’assurance de protection juridique de l’assuré a demandé à pouvoir consulter le dossier personnel de celui-ci auprès de l’OCE. L’assuré a alors découvert qu’au mois d’octobre 2017, dans un échange de courriels entre conseillers de l’office, dont la conseillère responsable de l’assuré, ceux-ci avaient qualifié l’assuré de « pénible » et de « boulet ».

g. Par courrier daté du 6 janvier 2020, l’assuré a requis un accès à son dossier personnel complet, lequel lui a été transmis en date du 13 janvier. Par courrier du 4 février 2020, l’assuré a en outre requis une copie des documents confirmant le retour des employeurs potentiels, pour les entretiens auxquels il avait été assigné.

h. Par courrier de son assurance de protection juridique daté du 20 février 2020, l’assuré a requis un changement de conseiller et une détermination de la direction de l’office sur les propos désobligeants échangés entre conseillers au mois d’octobre 2017.

i. Par courrier du 5 mars 2020, le directeur général de l’OCE, Monsieur C______, a admis que les termes utilisés par les conseillers en personnel dans leurs échanges d’e-mails étaient inadéquats et a informé l’assuré que les personnes concernées seraient convoquées. Il a cependant fait remarquer que l’assuré avait reçu, par l’intermédiaire de ses conseillers en personnel, quarante-et-une propositions d'assignation à des postes vacants et avait pu suivre trois mesures de marché du travail. Il a en outre refusé de donner accès à l’assuré aux formulaires de retour des employeurs potentiels, pour les postes auxquels celui-ci avait été assigné, vu le travail d’anonymisation que cela engendrerait.

j. Par courriers datés du même jour et adressés respectivement à M. C______ et au Conseiller d’État en charge du Département de la sécurité, de l’emploi et de la santé, l’assuré a, à nouveau, demandé à recevoir une copie des formulaires « retour employeur » de l’OCE, relatifs à chacune des quarante-et-une assignations dont il avait fait l’objet.

k. Par courrier de son conseil, daté du 19 mai 2020, l'assuré a, en outre, demandé à l’OCE de répondre à sept questions qui portaient, en substance, sur la qualité de l’accompagnement offert par l’office dans ses recherches d’emploi et sur un potentiel dommage causé à l’assuré en lien avec cet accompagnement.

l. L'OCE a répondu, en date du 4 juin 2020, que pour des raisons de protection des données, il ne pouvait pas entrer en matière sur la demande de l’assuré de recevoir copie des formulaires de retour des employeurs, pour les postes auxquels il avait été assigné, sans répondre aux autres questions figurant dans le courrier du 19 mai 2020.

m. Dans l’intervalle, l’assuré a obtenu une confirmation du Pouvoir judiciaire, datée du 17 décembre 2019, selon laquelle la direction des ressources humaines n’avait jamais reçu son dossier de candidature, de même qu’une seconde confirmation, provenant cette fois de l’aéroport de Genève et datée du 24 juin 2020 et ayant la même teneur.

n. Par courrier daté du 29 juin 2020, le conseil de l'assuré a rappelé à l’OCE qu’il n’avait toujours pas reçu de réponse aux sept questions posées dans le précédent pli du 19 mai 2020 et a ajouté une huitième question.

o. Suite à ce courrier, l’OCE a proposé deux entretiens avec l’assuré, lesquels ont eu lieu, respectivement, en date du 15 septembre et du 16 novembre 2020, en présence, notamment de l'assuré, de son conseil et de M. C______. Dans le cadre de ces entretiens, celui-ci a admis que l’OCE avait fauté s’agissant des termes utilisés dans les courriels du mois d’octobre 2017 pour décrire l’assuré, tout en confirmant à celui-ci qu’il s’était personnellement occupé de rappeler aux collaboratrices et collaborateurs concernés que leur comportement était inacceptable ; il considérait l’incident comme clos, et garantissait à l’assuré que ce dernier pouvait faire confiance aux collaborateurs de l’office dans le traitement de son cas.

p. En date du 27 janvier 2021, le cas d’assurance-chômage de l’assuré a été clos par l’OCE. Par courrier du 25 février 2021, l’office a admis que l’assuré résidait bien en Suisse.

B. a. Par courrier de son conseil daté du 26 avril 2021, l’assuré a requis que l’OCE statue dans une décision formelle portant sur : la suppression des éléments contenus dans son dossier qui portaient atteinte à sa personnalité, l’existence d’une violation du devoir de renseigner par l’OCE, et sur une indemnisation pour le dommage et le tort moral qui lui auraient été causés par l’office. Il a en outre requis de l’OCE qu’il réponde par voie de décision aux huit questions contenues dans son courrier du 29 juin 2020.

b. N'ayant pas reçu de réponse, le conseil de l’assuré a fixé, par courrier du 9 juin 2021, un ultime délai à l’OCE, en l'informant qu’à défaut de réponse au 30 juin 2021, une action pour déni de justice serait introduite.

c. Par courrier du 16 juin 2021, l'OCE a répondu aux courriers susmentionnés. L’OCE considérait que ses collaborateurs avaient déjà répondu aux diverses questions de l’assuré par une dizaine de courriers et courriels et que l’assuré avait été reçu par le directeur général à deux reprises ; il y avait donc lieu de se référer aux précédentes réponses et au contenu des entretiens. En ce qui concernait son obligation de conseil et de renseignements, l'OCE considérait qu'il y avait eu un suivi qui démontrait que les conseillers en personnel successifs de l’assuré l’avaient reçu régulièrement et lui avaient proposé de nombreux emplois. Quant à la demande de suppression des données contraires aux droits de la personnalité de l’assuré, il n’en existait aucune dans son dossier à la connaissance du directeur général. Enfin, comme cela avait déjà été évoqué, l’OCE ne pouvait pas être tenu pour responsable du fait que l’assuré n’avait pas trouvé un emploi durant sa période de chômage car le choix d’un candidat était du ressort exclusif des employeurs.

C. a. En date du 9 juillet 2021, l’assuré a déposé, devant la chambre de céans, une action en déni de justice dirigée contre l’OCE, en prenant des conclusions subsidiaires en constatation de droit, en suppression de données et en paiement, le tout sous suite de frais et dépens.

b. Par réponse du 5 août 2021, l’OCE a conclu principalement à l’irrecevabilité de l’action en déni de justice du recourant, faute d’intérêt digne de protection. Si toutefois, la chambre de céans devait estimer qu’une décision devait être rendue, l’OCE souhaitait que l’objet de celle-ci lui soit indiqué de manière très précise. S’agissant des conclusions subsidiaires du demandeur, l’intimé a considéré qu’elles étaient, soit irrecevables, soit sans objet. L’OCE concluait en outre à ce qu’une amende pour témérité soit infligée au recourant.

Une audience de comparution personnelle des parties et d’audition du témoin D______ s’est tenue le 30 septembre 2021.

Le directeur de l’OCE, M. C______, a exposé qu’il s’était occupé personnellement du dossier du recourant. Il a rappelé que l’OCE traitait plus de 18’000 dossiers de demandeurs d'emploi et que ces dernières années, les exigences en matière de titres et diplômes s’étaient encore relevées, ce qui était, selon lui, une des raisons pour lesquelles le recourant avait des difficultés à retrouver un emploi, étant précisé qu’il avait demandé à l'équipe « employeurs » de proposer le poste de taxateur pour lequel le recourant avait les compétences sociales et techniques notamment en maths. Il y avait environ 150 candidats pour ce poste et il n’avait ni le droit ni les moyens d'imposer le recourant à un employeur, même s'il s'agissait de l'État.

S'agissant de la collaboratrice qui s'était permis des propos inappropriés, M. C______ avait eu un entretien avec elle et l’avait « recadrée ». Par ailleurs, il confirmait qu’aucun propos dénigrant n’avait jamais été formulé, ni même suggéré à l'égard de certains employeurs potentiels.

Le conseil du recourant a confirmé que M. C______ avait reconnu la responsabilité de l'OCE en leur présence et qu’il avait l'impression qu’après cet entretien, l'affaire allait se terminer. Il était tout de même préoccupé par la question de l'existence ou de la diffusion des e-mails en question, et la question de la « neutralisation » du dossier du recourant. Sachant que les propos inappropriés figuraient au dossier du recourant, constitué par l’OCE, et qu'ils devaient être qualifiés de données sensibles, le conseil du recourant voulait savoir quelles mesures l’OCE avait prises pour protéger le recourant de leur utilisation pour aujourd'hui et pour l'avenir. Madame E______, directrice du service juridique de l’OCE, a affirmé qu’elle avait consulté le dossier PLASTA du recourant et que les propos inappropriés n’y figuraient plus.

Mme D______, conseillère en personnel au sein de l’OCE, a confirmé s’être occupée du dossier du recourant avant de le transmettre à une conseillère plus expérimentée. Par le terme de « boulet », elle entendait un dossier qui allait demander plus de traitement qu’un autre mais ne portait pas de jugement de valeur sur le recourant qu’elle n’avait jamais rencontré. Elle ne pouvait pas certifier que les emails contenant les propos inappropriés avaient totalement disparu de la base de donnée de l’OCE et envisageait qu’ils soient peut-être encore présents dans les dossiers « emails envoyés » ou « emails reçus » des boîtes emails.

Les parties se sont largement exprimées. Dans ce cadre, le recourant, par la voix de son conseil, a exposé à l’issue de l’audience qu’il considérait qu’il avait été répondu à ses questions, mais qu’il maintenait, en l’état, son action en déni de justice.

c. Par courrier daté du 6 décembre 2021, le recourant a déposé des déterminations complémentaires et a requis des offres de preuve complémentaires, sous la forme d’auditions de témoins et d’apport de pièces par l’intimé.

d. En date du 10 décembre 2021, l’OCE a encore produit à la procédure les fiches de retour, qu’il avait reçues des employeurs potentiels, auprès desquels l’assuré avait été assigné.

e. Sur ce, la cause a été gardée à juger.

 

EN DROIT

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 8 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité, du 25 juin 1982 (loi sur l’assurance-chômage, LACI - RS 837.0).

En vertu de la LPGA, un recours peut être formé lorsque l'assureur, malgré la demande de l'intéressé, ne rend pas de décision ou de décision sur opposition (art. 56 al. 2 LPGA). Il ne fait pas de doute que l'art. 134 al. 1 LOJ couvre également les recours en déni de justice, et notamment les recours pour déni de justice dans le cadre de l’assurance-chômage (dans le même sens : ATF 130 V 90 consid. 2 ; ATAS/1316/2021 du 15 décembre 2021 consid. 2.1 ; ATAS/1157/2021 du 15 novembre 2021 consid. 1.2 ; ATAS/941/2021 du 13 septembre 2021 consid. 2 ; ATAS/419/2021 du 6 mai 2021 consid. 4 ; ATAS/220/2020 du 16 mars 2020 consid. 2).

L’assuré réside en outre sur le territoire du canton de Genève.

La compétence de la chambre de céans en raison de la matière et du lieu est ainsi établie.

2.             En matière sociale, un recours pour déni de justice doit respecter les formes prévues par l’art. 61 let. b LPGA, respectivement par l’art. 89B de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10). Il peut être déposé en tout temps selon l’art. 4 al. 4 LPA.

Il ressort de l’écriture du 9 juillet 2021 du recourant, telle que précisée par les déclarations de son conseil lors de l’audience du 30 septembre 2021, que le recours en déni de justice de celui-ci porte sur sa requête de décision formelle du 26 avril 2021 qui a pour objet la réponse par l’OCE à huit questions de l’assuré (1), la constatation d’une violation de son devoir de renseigner par l’office (2), l’existence d’une prétention en dommages-intérêts du recourant envers l’intimé (3) et enfin, la suppression de données pour atteinte à la personnalité (4).

2.1 Selon la jurisprudence, lorsqu’il existe un intérêt actuel à un recours pour déni de justice au moment où celui-ci est formé, mais que celui-ci disparait en cours de procédure, le recours pour déni de justice doit être déclaré sans objet et rayé du rôle (ATF 125 V 373 consid. 1 ; ATAS/1157/2021 du 15 novembre 2021 consid. 2.1).

S’agissant de la réponse aux questions de l’intimé, il semble douteux qu’il existe un droit d’un assuré à ce que l’autorité réponde à des questions aussi précises de sa part, même à l’aune de l’art. 27 al. 2 LPGA. La question peut toutefois rester ouverte dès lors qu’il a été répondu en détail à ces questions, par le directeur de l’OCE, lors de l’audience du 30 septembre 2021, ce que son conseil a admis : « Je considère qu’il a été répondu à mes questions, tout en réservant mes appréciations sur la qualité des réponses en question » (cf. PV de comparution personnelle des parties du 30 septembre 2021, p. 6).

Dans ces circonstances, il faut considérer que la conclusion datée du 9 juillet 2021 et portant sur un déni de justice en lien avec un refus de répondre précisément aux questions en cause est de toute manière devenue sans objet dès le 30 septembre 2021, sans préjuger de son éventuelle recevabilité initiale.

2.2 Selon un principe général du droit de procédure suisse, une conclusion constatatoire n'est recevable que lorsqu'une conclusion condamnatoire ou formatrice visant le même objectif est exclue (ATF 142 V 2 consid. 1.1 ; ATF 141 II 113 consid. 1.7 ; ATF 135 III 378 consid. 2.2 ; ATF 129 V 289 consid. 2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 4A_51/2021, du 23 mars 2021 consid. 1.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_652/2014 du 24 décembre 2014 consid. 1.2).

S’agissant de la conclusion en déni de justice portant sur le droit à une décision en constatation de l’assuré, et ayant donc médiatement pour objet une conclusion constatatoire, elle se recoupe avec la conclusion du recourant en déni de justice portant sur son droit à des dommages-intérêts dus par l’intimé pour violation de ses obligations légales, laquelle a médiatement pour objet une prétention condamnatoire.

En conséquence, il apparaît que la conclusion en déni de justice du recourant liée à sa requête d’une décision constatatoire portant sur des violations alléguées de ses obligations légales par l’autorité, n’a pas de portée propre mais est absorbée par sa conclusion en déni de justice portant sur sa requête d’une décision formelle, s’agissant de dommages-intérêts lui étant dus, de ce fait, par l’autorité.

2.3 En ce qui concerne la conclusion en déni de justice portant sur le droit de l’assuré à une décision formelle ayant pour objet son indemnisation par l’intimé, elle a été interjetée par-devant l’autorité compétente et dans les formes prévues par la loi, et est par conséquent recevable.

Il en va de même de la conclusion en déni de justice portant sur le droit de l’assuré à une décision formelle ayant pour objet la suppression de contenus portant, selon lui, atteinte à sa personnalité.

Pour le surplus, la question de savoir s’il existe un cas de déni de justice relève du fond, et non de la recevabilité.

3.             En l’espèce, il convient d’examiner, en premier lieu, s’il existe un droit du recourant à ce que l’OCE rende une décision, s’agissant d’éventuels dommages-intérêts qui lui seraient dus par cette autorité, en raison de la violation par celle-ci de ses devoirs légaux.

3.1 Selon le recourant, l’art. 78 LPGA implique que si l’assureur social viole son obligation de renseignement et de conseil, il doit réparer le préjudice qui en résulte. En matière de droit du chômage, l’art. 85h al. 1 LACI, en lien avec l’art. 78 LPGA prévoit que l’OCE est compétent pour statuer en première instance par voie de décision sur une demande de réparation le visant. Or, le recourant a formulé une telle demande par ses courriers datés du 29 juin 2020, du 21 juillet 2020, du 26 avril 2021 et du 9 juin 2021. Dès lors que le courrier de réponse de l’intimé du 16 juin 2021 n’a, de l’avis du recourant, pas qualité de décision, il existe un déni de justice.

3.2 Selon l’intimé, il n’existe pas d’intérêt à un tel recours en déni de justice vu qu’il aurait agi conformément à la loi. Par ailleurs, cette conclusion est irrecevable, l’autorité compétente en matière de responsabilité de l’État n’étant pas l’autorité sociale, et en particulier par la chambre des assurances sociales selon l’art. 134 LOJ.

4.             Le droit de recours prévu par l'art. 56 al. 2 LPGA sert à mettre en œuvre l'interdiction du déni de justice formel prévue par l'art. 29 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101).

4.1 Il y a retard injustifié à statuer lorsque l'autorité administrative ou judiciaire compétente ne rend pas la décision qu'il lui incombe de prendre, dans un délai légal ou dans un délai, que la nature de l'affaire ainsi que toutes les autres circonstances du cas d’espèce, font apparaître comme raisonnable (ATF 144 I 318 consid. 7.1 ; ATF 135 I 265 consid. 4.4 ; ATF 131 V 407 consid. 1.1 ; ATF 130 I 312 consid. 5.1 ; ATF 125 V 188 consid. 2a ; arrêt du Tribunal fédéral 1B_582/2020 du 22 décembre 2020 consid. 2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1B_232/2018 du 4 juin 2018 consid. 3 ; ATAS/419/2021 du 6 mai 2021 consid. 5). La durée objectivement raisonnable d'une procédure dépend, en particulier, de la complexité d'une procédure, du comportement des parties et des processus décisionnels devant être mis en œuvre par l'autorité étatique ; en revanche les problèmes structurels d'une autorité ne sont pas un motif pouvant justifier un retard à statuer (ATF 144 II 486 consid. 3.2 ; ATF 130 I 312 consid. 5.2 ; ATF 124 I 139 consid. 2c ; ATAS/1316/2021 du 15 décembre 2021 consid. 3 ; ATAS/1157/2021 du 15 novembre 2021 consid. 3.2). Il ne peut logiquement exister un déni de justice que lorsque le recourant est susceptible d’avoir la légitimation active à la procédure qu’il réclame (ATF 141 I 172 consid. 5.2).

4.2 L'autorité saisie d'un recours pour déni de justice, au sens strict, ne saurait se substituer à l'autorité précédente pour statuer au fond ; elle doit ordonner à l'autorité concernée de statuer à bref délai (ATAS/1316/2021 du 15 décembre 2021 consid. 3 ; ATAS/419/2021 du 6 mai 2021 consid. 5 ; en ce sens également : arrêt du Tribunal fédéral 1B_232/2018 du 4 juin 2018 consid. 4). L’art. 69 al. 4 LPA, applicable en procédure sociale vu l’art. 89A LPA, prévoit à cet égard que si la juridiction administrative admet le recours pour déni de justice ou retard injustifié, elle renvoie l’affaire à l’autorité inférieure en lui donnant des instructions impératives. Par ailleurs, le retard à statuer en violation de l'art. 29 al. 1 Cst. constitue un acte illicite susceptible d'engager la responsabilité de l'entité étatique concernée (si les autres conditions d’une telle responsabilité sont remplies) (ATF 144 I 318 consid. 7.3.2 ; ATF 130 I 312 consid. 5.3 ; ATF 129 V 411 consid. 1.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 1B_582/2020 du 22 décembre 2020 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_218/2018 du 18 décembre 2018 consid. 4.1).

5.             Le recourant se prévaut de l’art. 78 LPGA et de l’art. 85h LACI pour exiger de l’intimé qu’il rende une décision portant sur l’indemnisation du préjudice qu’il allègue avoir subi, du fait d’actes illicites qui auraient été commis par l’OCE.

5.1  

5.1.1 Selon l’art. 78 al. 1 LPGA, les corporations de droit public, les organisations fondatrices privées et les assureurs répondent, en leur qualité de garants de l’activité des organes d’exécution des assurances sociales, des dommages causés illicitement à un assuré ou à des tiers par leurs organes d’exécution ou par leur personnel. Selon l’al. 2 de la même disposition, l’autorité compétente rend une décision sur les demandes en réparation. Selon l’al. 4, aucune procédure d’opposition n’a lieu ; pour le surplus, les règles de la LPGA et les art. 3 à 9, 11, 12, 20, al. 1, 21 et 23 de la loi sur la responsabilité du 14 mars 1958 (LRCF - RS 170.32) sont applicables par analogie. Selon l’art. 85h al. 1 LACI, les assurés et les tiers présentent les demandes en réparation visées à l’art. 78 LPGA à l’autorité cantonale compétente, qui statue par voie de décision.

La responsabilité instituée par l’art. 78 LPGA est subsidiaire en ce sens qu’elle ne peut intervenir que si la prétention invoquée ne peut pas être obtenue par les procédures administrative et judiciaire ordinaires en matière d’assurances sociales (ATF 133 V 14 consid. 5 ; ATAS/635/2013 du 26 juin 2013 consid. 5a).

5.1.2 L’art. 78 LPGA fonde une responsabilité causale qui est susceptible de fonder un droit à des dommages-intérêts à l’encontre d’une autorité si tant est que celle-ci ait commis un acte illicite (1) qui a causé naturellement et adéquatement (2) un dommage (3) à la personne qui demande réparation (ATF 133 V 14 consid. 7 ; FREY/MOSIMANN/BOLLINGER, OFK AHVG/IVG Kommentar, 2018, n. 2 ad. art. 78 LPGA). Une omission de l’autorité ne peut constituer un acte illicite que si l’autorité disposait d’une position de garant envers le lésé, notamment sur la base d’un devoir légal d’agir (ATF 137 V 76 consid. 3.2 ; ATF 133 V 14 consid, 8.1).

Selon l’art. 78 al. 4 LPGA en lien avec l’art. 20 al. 1 LRCF et l’art. 60 al. 1 de la loi fédérale du 30 mars 1911, complétant le Code civil suisse (CO, Code des obligations - RS 220), le délai pour faire valoir sa demande en réparation est de trois ans dès la connaissance suffisante des faits. Dans un arrêt récent, le Tribunal fédéral a établi que, depuis le 1er janvier 2020, ce délai n’est plus un délai de péremption (cf. ATF 133 V 14 consid. 6), mais un délai de prescription (arrêt du Tribunal fédéral 2E_3/2020, 2E_4/2020 du 11 novembre 2021 consid. 3.1 ; voir également : FF 2014 221, p. 252). L’art. 85h al. 2 LACI contient toutefois une règle spéciale, sous la forme d’un délai relatif de péremption d’un an, sans que la question de la primauté de cette règle spécifique plus ancienne sur le nouvel art. 20 al. 1 LRCF n’ait encore été tranchée.

5.1.3 L’existence de la procédure spéciale de l’art. 78 LPGA est un choix volontaire du législateur fédéral (arrêt du Tribunal fédéral 8C_162/2010 du 11 mars 2011 consid. 5.2.2). Il appartient aux lois spéciales de déterminer quelle autorité est compétente pour statuer pour quelle autorité sociale recherchée en responsabilité (ATF 133 V 14 consid. 5 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_214/2017 du 2 février 2018 consid. 3.1). La procédure débute par une réclamation du prétendu lésé adressée à l’autorité compétente (arrêt du Tribunal fédéral 9C_214/2017 du 2 février 2018 consid. 3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_245/2016 du 17 mai 2016 consid. 8 ; Ueli KIESER, ATSG Kommentar, 4ème éd. 2020, n. 95 ad. art. 78 LPGA ; Volker PRIBNOW, Basler Kommentar ATSG, 2020, n. 39 ad. art.78 ATSG ; Alexis OVERNEY, Commentaire romand LPGA, 2018, n. 55 ad art. 78 LPGA). L’autorité compétente doit ensuite instruire la cause (Alexis OVERNEY, Commentaire romand LPGA, 2018, n. 57-58 ad art. 78 LPGA), puis statuer par voie de décision sujette à recours, comme prévu par l’art. 78 al. 2 LPGA (voir également : ATAS/562/2018 du 21 juin 2018 consid. 3 ; ATAS/179/2016 du 9 mars 2016 consid. 9) ; il n’y a donc pas lieu à une procédure par voie d’action comme prévu par l’art. 7 de la loi sur la responsabilité de l'État et des communes du 24 février 1989 (LREC - A 2 40).

5.1.4 La notion de décision au sens de l’art. 49 LPGA est une notion matérielle : est une décision tout acte d'une autorité qui influe sur un droit ou une obligation ou constate l'état de ceux-ci ou encore rejette une demande en ce sens ; l'absence de certains éléments formels, comme l'indication des voies de droit, ne prive pas un acte de l'autorité de sa qualité de décision au sens matériel (ATF 143 III 162 consid. 2.2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_282/2017 du 4 décembre 2017 consid. 2.1).

5.2 En l’occurrence, l’assuré a clairement exprimé qu’il faisait valoir des prétentions en dommages-intérêts, pour un montant total de CHF 50'000.- à l’encontre de l’OCE, par courrier recommandé du 26 avril 2021. Il n’a certes pas produit le suivi postal dudit courrier, ni collé sur son courrier le code de suivi qui aurait permis à la chambre de céans de procéder directement à la vérification de la date de réception ; cependant, il y a lieu de considérer que ce courrier a été reçu par l’autorité visée, au plus tard le mercredi 28 avril 2021, en l’absence d’affirmations contraires de l’intimé sur ce point. Il a ensuite relancé l’autorité par courrier recommandé, avec accusé de réception daté du 9 juin 2021, avec mention expresse de la possibilité d’un recours pour déni de justice. Par courrier du 16 juin 2021, l’intimé lui a répondu par un bref courrier pour contester ses affirmations et nier tout acte illicite de sa part, mais sans statuer formellement sur les prétentions avancées, ni motiver de manière satisfaisante son point de vue, ni faire référence à des pièces précises qui soutiendraient sa position, ni indiquer les voies de recours.

À la lecture de ce courrier, il n’est pas possible de considérer que l’autorité a, par celui-ci, statué sur les prétentions en dommages-intérêts avancées par l’assuré. Celui-ci était, certes, assisté d’un professionnel qualifié, ce qui a pour conséquence des exigences plus élevées en matière de reconnaissance d’une décision incorrectement présentée sur le plan formel. Cette incombance ne saurait toutefois aller jusqu’à contester, dans le doute, tout courrier d’une autorité se déterminant sommairement sur des prétentions ou griefs de l’assuré, au risque de multiplier les procédures judiciaires inutiles, ce à quoi s’opposent tant le principe d’économie de la procédure que l’utilisation diligente des deniers publics. Dans ses déterminations datées du 5 août 2021, l’intimé ne prétend d’ailleurs pas avoir statué sur la demande en indemnisation du recourant. Au contraire, il défend le point de vue que celui-ci n’a pas d’intérêt à son action et indique que si le recours devait être admis, il désirerait savoir très précisément quel serait le ou les objet(s) de la décision à rendre. Cette dernière explication est de nature à confirmer le fait que l’OCE n’avait pas l’intention de rendre une décision.

Au vu de ce qui précède, il apparaît que l’OCE n’a pas encore rendu, ni n’a l’intention de rendre, une décision relative aux prétentions en dommages-intérêts que le recourant fait valoir à son encontre.

Ce comportement constitue une violation manifeste de l’art. 78 LPGA en lien avec l’art. 85h al. 1 LACI, dès lors que l’intimé est l’autorité compétente au sens de cet article et de l’art. 3 du règlement d'exécution de la loi en matière de chômage du 23 janvier 2008 (RMC - J 2 20.01) pour rendre une décision relative aux prétentions clairement identifiables du recourant. À cet égard, on peine à comprendre l’argumentation de l’intimé qui, dans son mémoire de réponse, affirme que l’absence d’intérêt digne de protection devrait conduire à l’irrecevabilité du recours pour déni de justice, et ce malgré la lettre claire tant de l’art. 56 al. 2 LPGA que de l’art. 29 al. 1 Cst., qui fondent un droit de l’assuré à recevoir une décision, même négative, lorsque la loi le prévoit.

On peine également à comprendre l’argumentation de l’intimé selon laquelle le recourant devrait être condamné à une amende pour plaideur téméraire, étant ici rappelé que l’OCE avait déjà gravement violé les droits fondamentaux de procédure du recourant comme cela ressort de l’ATAS/645/2018 du 17 juillet 2018. S’il semble que l’assuré a effectivement nécessité un travail notable de ses conseillers, il n’en reste pas moins que ses droits fondamentaux de procédure doivent être strictement respectés par l’intimé, ne serait-ce qu’afin de couper court à d’éventuelles accusations de « discrimination » de certains assurés plus exigeants que la moyenne.

5.3 Au vu de ce qui précède, le recours en déni de justice relatif à l’art. 78 LPGA doit être admis et l’intimé doit être condamné à rendre, dans un délai de soixante jours suivant la date de l’entrée en force du présent arrêt, une décision ayant pour objet le caractère bien-fondé ou non des prétentions que l’assuré a fait valoir dans son courrier du 26 avril 2021, à savoir un dommage et un tort moral résultant de l’absence de retour à l’emploi en raison de violations alléguées de ses devoirs (prévus par le droit de l’assurance-chômage) par l’OCE.

5.4 Dans cette optique, il convient de faire encore deux remarques complémentaires.

D’une part, il faut souligner que, bien que la maxime d’instruction de l’art. 43 LPGA trouve application, l’assuré qui fait valoir une prétention en dommages-intérêts est obligé par un devoir de coopération accru s’agissant de la motivation de ses prétentions (ATF 145 V 90 consid. 3.2 ; ATF 115 V 133 consid. 8a), et qu’il supporte l’éventuelle absence de preuve de tout ou partie des faits permettant d’établir la responsabilité de l’autorité selon l’art. 78 al. 1 LPGA (spécifiquement pour l’art. 78 LPGA : Volker PRIBNOW, Basler Kommentar ATSG, 2020, n. 44 ad. art.78 ATSG ; Alexis OVERNEY, Commentaire romand LPGA, 2018, n. 57 ad art. 78 LPGA ; en général : ATF 145 V 90 consid. 3.2 ; ATF 138 V 218: consid. 6 ; ATF 115 V 133 consid. 8a), sauf si un fait ne peut pas être prouvé en raison du comportement de l'autorité (ATF 138 V 218 consid. 8.1.1). Ainsi, bien que les exigences de la procédure civile ne trouvent pas application à une éventuelle responsabilité de l’intimé dans ses fonctions relatives à l’assurance-chômage fédérale, on peut légitimement attendre d’un assuré qui se prévaut de l’existence d’un droit à des dommages-intérêts à l’encontre de l’autorité de détailler précisément quel est le comportement illégal qu’il reproche à l’autorité et dans quelle mesure celui-ci lui a causé un dommage, lequel doit également être détaillé.

D’autre part, il apparait que si le comportement de l’intimé, dans le cas concret, pouvait initialement objectivement susciter certains doutes quant à la qualité de l’accompagnement procuré au recourant (cf. pièces 8, 10 et 17 recourant), le directeur général de l’OCE est ensuite personnellement intervenu. Il a reconnu les fautes commises dans le traitement qui avait été réservé à l’assuré et a agi pour améliorer la qualité de l’assistance apportée à l’assuré, notamment par la tenue d’un entretien et d’un entretien de suivi avec le recourant et son conseil en date, respectivement, du 15 septembre 2020 et du 16 novembre 2020. Il a en outre personnellement répondu aux questions de l’assuré lors de l’audience du 30 septembre 2021. De plus, les pièces caviardées produites à la procédure par l’intimé en date du 9 décembre 2021 laissent penser que les craintes initiales de l’assuré, selon lesquelles ses postulations n’auraient systématiquement ou fréquemment pas été transmises aux employeurs auprès desquels il était assigné, sont infondées, dès lors que les retours des employeurs mentionnent, dans leur très grande majorité, qu’ils ont eu un contact avec l’assuré, excepté, notamment, quelques offres en 2019. En outre, les procès-verbaux récapitulatifs des entretiens avec ses conseillers en placement successifs ne relèvent pas de manque manifeste dans l’accompagnement de l’assuré par lesdits conseillers.

Or, il convient de rappeler que l’on ne saurait reconnaître à l’OCE une responsabilité fondée sur le rejet, à tort ou à raison, par de nombreux employeurs, de l’offre de service du recourant. Il n’existe, en effet, pas de devoir de l’autorité de placement de trouver du travail à un demandeur d’emploi.

On peut néanmoins regretter que les pièces caviardées susmentionnées n’aient été fournies au recourant qu’après l’introduction d’une procédure judiciaire, alors que celui-ci souhaitait y avoir accès depuis le 4 février 2020 déjà, afin précisément de clarifier la question susmentionnée. Si le caviardage des pièces représente certes un certain travail pour l’autorité, celui-ci apparaît, cependant, sans commune mesure avec le travail engendré, tant pour l’intimé, que pour la chambre de céans par la présente procédure.

6.             En second lieu, il faut déterminer s’il existe un droit du recourant à ce que l’OCE rende une décision ayant pour objet la suppression de contenus portant, selon lui, atteinte à sa personnalité.

6.1 Le recourant se prévaut de l’art. 126 de l’ordonnance sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité du 31 août 1983 (ordonnance sur l’assurance-chômage, OACI - RS 837.02), qui, de l’avis du recourant, fonde un droit de l’assuré à une suppression de ses données personnelles traitées en violation de la loi, ce qui serait le cas en l’espèce, celles-ci violant ses droits de la personnalité.

6.2 Selon l’intimé, les courriels visés par le recourant auraient été supprimés de son dossier, ce qui ferait perdre son objet à la conclusion y afférente du recourant.

7.             Dès lors que l’objet de la conclusion principale du recourant est un déni de justice, il faut examiner s’il existe un droit du recourant à une décision de l’OCE s’agissant de la suppression des contenus visés par le recourant et, si tel s’avérait être le cas, si l’office n’a pas déjà agi de manière à rendre cette demande sans objet.

7.1 Contrairement à ce que fait valoir le recourant, l’art. 126 OACI ne saurait constituer le fondement de son droit à une telle décision. En effet, si cette norme donne effectivement un droit à ce que les données d’un administré traitées par l’autorité sociale soient rectifiées si elles s’avèrent incorrectes, il apparait à la lecture du courrier du 26 avril 2021 du recourant que celui-ci vise en réalité la suppression des courriels faisant référence à sa personne comme un « pénible » et un « boulet ». Le recourant fait donc valoir une atteinte à ses droits de la personnalité par l’OCE, lequel devrait statuer sur ce point, par voie de décision.

7.2 Selon l’art. 25a al. 1 de la loi fédérale sur la procédure administrative du 20 décembre 1968 (PA - RS 172.021), applicable par le truchement de l’art. 55 al. 1 LPGA (ATAS/662/2020 du 18 août 2020 consid. 4), toute personne qui a un intérêt digne de protection peut exiger que l'autorité compétente pour des actes fondés sur le droit public fédéral et touchant à des droits ou des obligations, s'abstienne d'actes illicites, cesse de les accomplir ou les révoque et/ou élimine les conséquences d'actes illicites et/ou constate l'illicéité de tels actes. Selon l’al. 2 de la même norme, l’autorité statue par une décision.

7.2.1 L’art. 25a PA ne trouve application qu’en présence d’un acte matériel de l’autorité (ATF 146 I 145 consid. 4.2 ; ATF 144 II 233 consid. 4.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_464/2019 du 5 décembre 2019 consid. 6). L'acte matériel (étatique) se distingue de l'acte juridique (étatique) en ce sens qu'il constitue, dans la réalité, un résultat de fait, alors que l'acte juridique vise un résultat juridique (ATF 146 I 145 consid. 4.2 ; ATF 144 II 233 consid. 4.1). Une omission d’agir de l’autorité peut constituer un acte matériel (ATF 146 I 145 consid. 4.1 ; ATF 144 II 233 consid. 4.1 ; ATF 140 II 315 consid. 2.1). Un avertissement officiel est par exemple un acte matériel étatique (général et abstrait) (ATF 146 II 265 consid. 5.3).

7.2.2 Les conditions du droit à une décision selon l’art. 25a PA sont l’impact d’un acte matériel étatique sur « les droits et obligations » de l’administré (1) et l’existence d’un intérêt digne de protection (2) (ATF 140 II 315 consid. 4.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_150/2020 du 24 septembre 2020 consid. 5.3.2). La première condition est remplie lorsque la situation de l’administré concerné sur le plan juridique est affectée par l'acte matériel en cause, sans qu'il soit nécessaire que le droit impacté en question soit un droit fondamental (ATF 146 I 145 consid. 4.4 ; ATF 144 II 233 consid. 7.3.1 ; ATF 140 II 315 consid. 4.3) ; il n'est pas nécessaire qu'une atteinte soit réalisée, il suffit que l'acte matériel en cause engendre un risque d'atteinte d'un certain degré de gravité (ATF 146 I 145 consid. 4.4 ; ATF 144 II 233 consid. 7.3.2). En ce qui concerne l’intérêt digne de protection, il est nécessaire que l’intéressé soit plus impacté par l'acte matériel concerné que le commun des administrés (ATF 146 I 145 consid. 4.1), la notion correspondant à celle de l’art. 48 al. 1 PA (ATF 144 II 233 consid. 7.2 ; ATF 140 II 315 consid. 4.1 ; ATAS/280/2012 du 14 mars 2012 consid. b/cc) ; l'intensité nécessaire dépend toutefois du domaine juridique concerné et des possibilités alternatives d'agir sur le plan juridique (ATF 146 I 145 consid. 4.1).

7.3 En l’espèce, le dictionnaire Larousse en ligne donne la définition suivante de pénible (personne) « qu'il est difficile de supporter » et de boulet « personne constituant une charge, une obligation dont on ne peut se libérer ». Compte tenu de ces définitions, il est vraisemblable que les droits de la personnalité du recourant ont été affectés par les courriels des employés de l’office le décrivant comme tel, même si cela ne représente pas formellement l’objet de la présente procédure de déni de justice. L’OCE est d’ailleurs du même avis. Il ne fait pas de doute que ces courriels constituent des actes matériels, et non juridiques, de l’autorité.

7.4 Ces courriels se trouvant dans le dossier de l’assuré, celui-ci dispose d’un intérêt théorique à ce qu’ils en soient retirés, ou, si tel a déjà été le cas, que l’atteinte soit constatée par voie de décision au sens de l’art. 25a al. 1 let. a PA. En effet, pour des motifs de sécurité juridique et de transparence, on ne saurait reconnaitre comme suffisantes des excuses orales, le législateur ayant d’ailleurs spécifiquement prévu la voie de la décision qui permet, le cas échéant, de garantir le respect de l’art. 13 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101) (en ce sens : ATF 140 II 315 consid. 4.4) et de l’art 29a Cst. (ATAS/280/2012 du 14 mars 2012 consid. b/bb ; voir également : arrêt du Tribunal fédéral 2C_709/2020 du 18 juin 2021 consid. 4.1).

7.5 Par courrier du 5 mars 2020, le directeur général de l’intimé a mentionné que les courriels en cause étaient « totalement inadéquat » et qu’il allait convoquer les agents en cause. Par courrier du 16 juin 2021, il a en outre ajouté, qu’à sa connaissance, il n’existait aucune donnée violant la personnalité de l’assuré dans son dossier.

Cette dernière affirmation a toutefois été remise en doute par le témoignage de Mme D______, conseillère en placement au sein de l’OCE et autrice d’un des courriels problématiques, qui a affirmé, pendant son audition devant la chambre de céans, qu’on ne lui avait pas demandé de mesures particulières, telles que la suppression du courriel concerné de sa boîte mail, et qu’elle ne savait pas s’il avait été archivé ou détruit.

C’est précisément pour éviter ce genre de situation équivoque que le législateur a prévu la voie de la décision, par le biais de l’art. 25a al. 2 PA. À cette aune, le courrier du 5 mars 2020 précité, qui ne constate pas formellement d’atteinte à la personnalité, ni n’ordonne la suppression des courriels problématiques, ne peut à l’évidence constituer une décision. Il en va de même du courrier du 16 juin 2021 pour les motifs mentionnés au considérant 5.2.

Il faut en conclure qu’à ce jour, l’intimé n’a toujours pas rendu de décision ayant pour objet la suppression de l’atteinte aux droits de la personnalité du recourant causé par les courriels litigieux, subsidiairement le constat de celle-ci. Or, l’art. 25a PA donne à l’assuré un droit à ce qu’une telle décision formelle soit rendue.

7.6 Au vu de ce qui précède, le recours en déni de justice relatif à l’art. 25a PA doit être admis et l’intimé doit être condamné à rendre, dans un délai de soixante jours suivant la date de l’entrée en force du présent arrêt, une décision ayant pour objet l’existence ou non d’une atteinte aux droits de la personnalité du recourant, en lien avec les courriels litigieux, et, si une atteinte venait à être établie, sur la suppression définitive de ces courriels des dossiers écrits et/ou numériques de l’OCE.

8.             Au vu de ce qui précède, le recours en déni de justice doit être admis. En conséquence, par appréciation anticipée des preuves (sur cette notion cf : ATF 146 III 73 consid. 5.2.2 ; ATF 143 III 297 consid. 9.3.2 ; ATF 141 I 60 consid. 3.3 ; ATF 140 I 285, consid. 6.3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 4A_388/2021 du 21 décembre 2021 consid. 5.4.1), il convient de renoncer à administrer les mesures d’instruction complémentaires requises par le recourant dans son courrier du 6 décembre 2021.

9.             Le recourant obtenant gain de cause et étant assisté d’un avocat, une indemnité de CHF 3'000.- lui sera accordée à titre de participation à ses frais et dépens (art. 61 let. g LPGA ; art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en matière administrative du 30 juillet 1986 [RFPA - E 5 10.03]).

10.         Pour le surplus, en l’absence de loi spéciale prévoyant des frais judiciaires, la procédure est gratuite (art. 61 let. fbis LPGA en lien avec l’art. 1 al. 1 LACI).


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours en déni de justice de Monsieur A______ recevable s’agissant de sa conclusion portant sur un droit à une décision sur indemnisation et de sa conclusion portant sur un droit à une décision sur violation de ses droits de la personnalité.

2.        Déclare le recours comme étant sans objet pour le surplus.

Au fond :

3.        L’admet.

4.        Condamne l’office cantonal de l'emploi à rendre, dans un délai de 60 jours suivant la date de l’entrée en force du présent arrêt, une décision ayant pour objet le caractère bien-fondé ou non des prétentions que Monsieur A______ a fait valoir dans son courrier du 26 avril 2021, à savoir un dommage et un tort moral résultant de son absence de retour à l’emploi, en raison de violations alléguées de ses devoirs par l’office cantonal de l'emploi.

5.        Condamne l’office cantonal de l'emploi à rendre, dans un délai de 60 jours suivant la date de l’entrée en force du présent arrêt, une décision ayant pour objet l’existence ou non, d’une atteinte aux droits de la personnalité de Monsieur A______, en lien avec les courriels litigieux faisant l’objet de la pièce 10 recourant, et, si une atteinte venait à être établie, sur la suppression définitive de ces courriels des dossiers écrits et/ou numériques de l’office cantonal de l'emploi.

6.      Alloue à Monsieur A______ une indemnité de CHF 3'000.-, à titre d’indemnité de procédure, à la charge de l’office cantonal de l'emploi.

7.        Dit que la procédure est gratuite.

8.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Véronique SERAIN

 

Le président

 

 

 

 

Philippe KNUPFER

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’au Secrétariat d'État à l'économie par le greffe le