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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3281/2025

ATA/1093/2025 du 07.10.2025 ( PROC ) , IRRECEVABLE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3281/2025-PROC ATA/1093/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 7 octobre 2025

 

dans la cause

 

A______ demandeur

contre

DÉPARTEMENT DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE,
DE LA FORMATION ET DE LA JEUNESSE
défendeur

et

COUR DE JUSTICE – CHAMBRE ADMINISTRATIVE


EN FAIT

A. a. Par arrêt du 19 août 2025 (ATA/883/2025) dans la procédure A/2122/2025, la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) a déclaré irrecevable le recours formé par A______ contre la décision du 28 mai 2025 de la conseillère d’État d’ouvrir la procédure de reclassement.

Il ressortait du suivi des envois de la Poste suisse que la décision litigieuse avait été distribuée par voie recommandée le 3 juin 2025 à l’adresse de notification indiquée par l’intéressé. Le délai de recours de dix jours avait donc commencé à courir le lendemain et s’était échu le 13 juin 2025. Le recours, déposé au greffe de la chambre administrative le 17 juin 2025, était donc tardif. L’intéressé ne pouvait sans autre se fier à l’indication de la réceptionniste de son hôtel, selon laquelle la décision litigieuse avait été notifiée le 7 juin 2025, étant précisé qu’une simple recherche sur le site Internet de la Poste, avec le numéro d’envoi indiqué sur l’enveloppe, lui aurait permis de comprendre que le pli litigieux avait été distribué le 3 juin 2025. Dans la mesure où l’adresse de notification correspondait à l’adresse qu’il avait lui‑même indiquée à l’intimé, quelques semaines avant de recevoir la décision litigieuse, il lui appartenait de prendre ses dispositions pour sauvegarder ses droits. Il supportait ainsi le risque, à l'intérieur de sa sphère d'influence, de prendre connaissance tardivement des courriers envoyés par recommandé.

b. L’arrêt a été notifié à l’intéressé le 22 août 2025.

B. a. Par acte mis à la poste le 22 septembre 2025, A______ a saisi la chambre administrative d’une demande de révision, motif pris que son argument de la grippe n’avait pas été pris en compte.

En raison d’une grippe, il avait dû se reposer et éviter les contacts avec autrui. Il avait sollicité en vain l’audition de la réceptionniste de l’hôtel, qui aurait pu en témoigner. Il n’avait certes pas de certificat médical. Ce document n’était toutefois pas nécessaire, puisque la réceptionniste lui avait indiqué « sans équivoque » avoir reçu le courrier le 7 juin 2025. Il sollicitait à nouveau l’audition de la réceptionniste de l’hôtel, ainsi que celle de B______, responsable des ressources humaines du département de l'instruction publique, de la formation et de la jeunesse (ci-après : DIP) et de C______, assistante administrative du DIP.

Il a ajouté qu’il n’avait aucune raison de douter des déclarations de la réceptionniste quant à la date de réception du courrier litigieux. Le raisonnement de la chambre de céans était partant « de mauvaise foi ». Pour le reste, il acceptait « avec probité le raisonnement rigoureux développé par les juges », confirmant au demeurant que le courrier litigieux avait bien été distribué le 3 juin 2025, puisque la Poste de Chambéry le lui avait confirmé.

Il a notamment produit un courriel de la réceptionniste de l’hôtel du 18 septembre 2025, confirmant qu’il avait annoncé être grippé lors de son séjour en juin 2025, raison pour laquelle il ne s’était pas présenté à la réception pour retirer ses courriers.

b. Aucun échange d’écritures n’a été ordonné.

c. Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1. La compétence de la chambre administrative est acquise, dès lors que la procédure vise à la révision de l’un de ses arrêts. Sous cet angle, la demande de révision est recevable (art. 81 al. 1 in fine de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

1.1 En vertu de l’art. 80 LPA, une demande de révision suppose que l'affaire soit réglée par une décision définitive.

1.2 En vertu de l’art. 81 LPA, la demande de révision doit être adressée par écrit à la juridiction qui a rendu la décision dans les trois mois dès la découverte du motif de révision (al. 1) et au plus tard dans les dix ans à compter de la notification de la décision. Le cas de révision de l’art. 80 let. a LPA est réservé. Dans ce cas, la révision peut avoir lieu d’office, notamment sur communication du Ministère public (al. 2). Les art. 64 et 65 LPA sont applicables par analogie. La demande doit, en particulier, indiquer le motif de révision et contenir les conclusions du requérant pour le cas où la révision serait admise et une nouvelle décision prise (al. 3).

1.3 Selon l’art. 80 let. b LPA, il y a lieu à révision lorsque des faits ou des moyens de preuve nouveaux et importants existent, que le recourant ne pouvait connaître ou invoquer dans la procédure précédente.

L'art. 80 let. b LPA vise uniquement les faits et moyens de preuve qui existaient au moment de la première procédure, mais n'avaient alors pas été soumis au juge (faits nouveaux « anciens » ; ATA/627/2020 du 30 juin 2020 consid. 1b et 1c ; ATA/362/2018 du 17 avril 2018 consid. 1c ; ATA/294/2015 du 24 mars 2015 consid. 3c). Sont « nouveaux », au sens de cette disposition, les faits qui, survenus à un moment où ils pouvaient encore être allégués dans la procédure principale, n'étaient pas connus du requérant malgré toute sa diligence (ATF 134 III 669 consid. 2.2 ; 134 IV 48 consid. 1.2 ; ATA/362/2018 précité consid. 1c). Ces faits nouveaux doivent en outre être importants, c'est-à-dire de nature à modifier l'état de fait qui est à la base de l'arrêt entrepris et à conduire à un jugement différent en fonction d'une appréciation juridique correcte (ATF 134 III 669 consid. 2.2 ; 134 IV 48 consid. 1.2 ; 118 II 199 consid. 5).

1.4 Une révision est également possible lorsqu'un crime ou un délit, établi par une procédure pénale ou d’une autre manière, a influencé la décision (art. 80 let. a LPA), que, par inadvertance, la décision ne tient pas compte de faits invoqués et établis par pièce (let. c), que la juridiction n’a pas statué sur certaines conclusions des parties de manière à commettre un déni de justice formel (let. d), ou encore que la juridiction qui a statué n’était pas composée comme la loi l’ordonne ou que les dispositions sur la récusation ont été violées (let. e).

Une demande de révision dans le cas de figure de l’art. 80 let. c LPA ne peut être admise que si l’inadvertance commise a entraîné une conséquence sur le dispositif du jugement. L’inadvertance au sens de cette disposition se distingue de la fausse appréciation, soit des preuves administrées devant le tribunal, soit de la portée juridique des faits établis. Elle doit se rapporter au contenu même du fait, à sa perception par le tribunal, mais non pas à son appréciation juridique. Elle consiste soit à méconnaître, soit à déformer un fait ou une pièce. La révision n’entre donc pas en considération lorsque le juge a sciemment refusé de tenir compte d’un fait, parce qu’il ne le tenait pas pour décisif, car un tel refus relève du droit (ATA/1092/2022 du 1er novembre 2022 consid. 3a ; Stéphane GRODECKI/ Romain JORDAN, Code annoté de procédure administrative genevoise, 2017, n. 974 ad art. 80 LPA).

Les motifs de révision prévus par l'art. 80 LPA sont exhaustifs.

1.5 La révision ne permet pas de supprimer une erreur de droit, de bénéficier d'une nouvelle interprétation, d'une nouvelle pratique, d'obtenir une nouvelle appréciation de faits connus lors de la décision dont la révision est demandée ou de faire valoir des faits ou des moyens de preuve qui auraient pu ou dû être invoqués dans la procédure ordinaire (ATA/478/2021 du 4 mai 2021 consid. 2b ; ATA/362/2018 précité consid. 1d et les références citées).

1.6 Lorsqu'aucune condition de l'art. 80 LPA n'est remplie, la demande est déclarée irrecevable (ATA/232/2022 du 1er mars 2022 ; ATA/1748/2019 du 3 décembre 2019 ; ATA/1149/2019 du 19 juillet 2019 consid. 2).

1.7 En l'espèce, le demandeur n’allègue aucun élément nouveau, qu’il s’agisse d’un fait ou d’un moyen de preuve, au sens de l’art. 80 let. b LPA. En effet, dans sa réplique du 14 juillet 2025, formée dans la procédure A/2122/2025, il avait déjà mentionné avoir été « cloué dans [s]a chambre avec une grippe pendant cette semaine-là ». Il ne s’agit donc pas d’un fait qui n’a pas été soumis au juge, faute d’avoir été connu de l’intéressé au sens de l’art. 80 let. b LPA.

On ne se trouve pas non plus dans l’hypothèse visée par l’art. 80 let. c LPA, la grippe invoquée par le demandeur dans sa réplique du 14 juillet 2025 n’ayant pas été établie par pièce, comme l’intéressé l’admet d’ailleurs lui-même. La chambre de céans relèvera au demeurant qu’il ne suffit pas de se prévaloir d’un état de santé déficient, sans autre précision sur la nature et la gravité de celui-ci, pour admettre un empêchement non fautif d’agir dans le délai fixé. La maladie, de même que l’impossibilité de rédiger un recours ou de mandater un tiers à cet effet, doivent en effet être établies par des attestations médicales pertinentes. Ainsi, le fait que des témoins auraient été en mesure de confirmer un état grippal n’y change rien. On rappellera, à toutes fins utiles, que l’intéressé admet avoir pris connaissance de la décision litigieuse le 7 juin 2025 et qu’il lui restait, à ce moment-là, encore six jours pour former recours contre la décision litigieuse.

Il appert ainsi que l’argumentation de l’intéressé consiste avant tout à remettre en cause l’arrêt de la chambre de céans afin d’obtenir une nouvelle appréciation de faits connus lors du prononcé de cet arrêt. Or, si un tel grief aurait pu être invoqué à l’appui d’un recours contre ledit arrêt, il ne s’agit pas d’un cas de révision.

Au vu de ce qui précède, les conditions d'un motif de révision au sens de l'art. 80 LPA ne sont manifestement pas réalisées. La demande de révision est en conséquence manifestement irrecevable, ce que la chambre de céans peut constater sans échange d’écritures (art. 72 LPA).

2.             Vu les circonstances, il sera exceptionnellement renoncé à un émolument (art. 87 al. 1 LPA), et vu son issue, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

déclare irrecevable la demande de révision de l’arrêt de la chambre administrative de la Cour de justice du 19 août 2025 formée par A______ ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument, ni alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à A______ ainsi qu'au département de l'instruction publique, de la formation et de la jeunesse.

Siégeant : Claudio MASCOTTO, président, Florence KRAUSKOPF, Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, Patrick CHENAUX, Eleanor McGREGOR, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. SCHEFFRE

 

 

le président siégeant :

 

 

C. MASCOTTO

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :