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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2107/2023

ATA/474/2024 du 16.04.2024 ( FPUBL ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2107/2023-FPUBL ATA/474/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 16 avril 2024

 

dans la cause

 

A______ recourante
représentée par Me Arthur GUEORGUIEV, avocat

contre

INSTITUTION GENEVOISE DE MAINTIEN À DOMICILE intimée



EN FAIT

A. a. A______, née le ______ 1972, a été engagée, par contrat de durée indéterminée, en qualité d'aide à domicile à 70% à compter du 1er avril 2008, au sein de la Fondation des services d'aide et de soins à domicile, devenue plus tard l'Institution genevoise de maintien à domicile (ci-après : IMAD ou l'institution). L'affectation de l'employée dépendait des besoins de l'institution.

b. Le 31 mars 2008, elle a signé un cahier des charges. Selon celui-ci, l'aide à domicile avait entre autres responsabilités principales d'instaurer une relation de confiance et de respect mutuel avec le client et son entourage en adoptant une attitude respectueuse, chaleureuse, empathique et sécurisante.

c. Son taux d'activité a été réduit à 50% à partir du 1er août 2019.

B. a. Par courriel du 23 mai 2019, une gendarme de la police genevoise a informé les responsables de l'IMAD qu'une plainte pour vol avait été déposée auprès d'elle, faisant suite à la disparition au domicile de la bénéficiaire « S » d'une boîte contenant de l'argent liquide et divers documents, constatée après le départ de la femme de ménage « vraisemblablement » de l'IMAD. Elle demandait que lui soit transmise l'identité de cette dernière.

Le 18 juin 2019, A______ a été entendue au poste de police de B______.

b. a. Selon une fiche « incidents et événements graves » de l'IMAD, la bénéficiaire « P » et son fils s'étaient présentés à l'IMAD le 22 janvier 2020 pour faire part de leur perte de confiance en A______. Une somme de CHF 300.- avait disparu de l'une des chambres de l'appartement de la bénéficiaire le 15 janvier 2020, jour durant lequel celle-ci y avait effectué une prestation. La cliente avait déclaré porter cet incident à la connaissance de l'IMAD parce qu'une somme de CHF 100.- avait déjà disparu de son domicile le 11 novembre 2019. Elle avait vu ce jour-là une personne sortir de son appartement et étant allée à sa recherche, elle s'était retrouvée au bas de l'immeuble nez à nez avec A______, qui lui avait dit attendre qu'une cliente domiciliée au rez‑de-chaussée lui ouvrît sa porte. Elle avait des difficultés de mobilité, mais « avait toute sa tête » bien qu'elle ne se souvînt pas qu'en date du 11 novembre 2019, A______ l'avait raccompagnée chez elle.

Informée de la plainte, A______ avait dit avoir hésité à raccompagner la cliente chez elle le 11 novembre 2019, date à laquelle elle l'avait trouvée dans le hall de l'immeuble en chemise de nuit. Elle avait expliqué la situation au fils de la bénéficiaire.

b.b. Le 18 février 2020, un entretien a été organisé entre A______ et ses supérieurs hiérarchiques, au cours duquel elle a relaté le déroulement de son intervention chez la cliente ce jour-là et détaillé l'attitude générale et le comportement de celle-ci lors de ses prestations. Elle avait été atteinte dans ses valeurs. Il lui a été conseillé de prendre contact avec le service santé et sécurité au travail.

Elle a été informée que le fils de la bénéficiaire avait déposé plainte pénale contre inconnu. Il lui était rappelé l'importance de la levée du secret de fonction ainsi que la levée du secret professionnel avant toute audition.

b.c. Le 16 décembre 2020, A______ a été entendue par la police en qualité de personne appelée à donner des renseignements au sujet de l'incident du 15 janvier 2020.

c. a. Le 29 juin 2020, un inspecteur de la brigade des vols a contacté l'IMAD au sujet de la disparition d'une somme d'argent chez la bénéficiaire « E ». Il souhaitait identifier les deux aides à domicile qui étaient intervenues chez cette dernière.

c.b. Le 4 septembre 2020, A______ s'est vue décerner par la police un mandat de comparution en qualité de personne appelée à donner des renseignements en vue d'une audience du 8 octobre 2020.

d. Le 25 novembre 2021, l'IMAD a reçu une plainte du bénéficiaire « V ». Celui-ci avait constaté le même jour qu'une somme de CHF 1'200.-, qui se trouvait dans une poche interne de sa veste, avait disparu. Il soupçonnait A______ d'avoir subtilisé cette somme lors d'une prestation à son domicile le 24 novembre 2021, soit le lendemain du jour où il avait retiré l'argent, qu'il avait ensuite laissé dans le portefeuille rangé dans sa veste.

A______ avait indiqué au client n'avoir pas pris la somme perdue.

e. a. Le 16 mars 2022, l'IMAD a enregistré une plainte de la bénéficiaire « B ». Celle‑ci avait affirmé ne plus faire confiance à A______. Elle s'était rendu compte, après sa prestation du 8 mars 2022, qu'une enveloppe contenant une somme de CHF 200.- avait disparu de l'armoire dans laquelle elle avait été rangée. Elle n'avait pas vu l'aide à domicile commettre le larcin, mais n'avait reçu ni vu personne depuis le passage de celle-ci à son domicile.

e.b. Lors d'un entretien du 22 mars 2022, cette dernière a déclaré ne pas comprendre les dires de la bénéficiaire. Elle n'avait pas eu besoin d'ouvrir l'armoire pour prendre le matériel ou du linge. La cliente était présente lors de sa prestation.

f. a. Par courriel du 12 mai 2022, la cheffe d'équipe IMAD du C______, D_____, a rapporté deux incidents en lien avec des disparitions de sommes d'argent. Le 25 avril 2022, la bénéficiaire « A » avait constaté que son rouleau de pièces de CHF 5.-, d'un montant total de CHF 125.-, avait été ouvert et qu'il ne restait plus que CHF 80.-, soit un montant manquant de CHF 45.-.

f.b. Le 10 mai 2022, date de la prestation d'aide à domicile suivante, la bénéficiaire avait préparé un nouveau rouleau de dix pièces de CHF 5.- qu'elle avait pris en photo avant l'heure de la prestation. Une fois l'aide à domicile partie, elle avait constaté, photo à l'appui, que deux pièces de CHF 5.- avaient été subtilisées.

Les deux prestations avaient été exécutées par A______, qui avait nié être l'auteure des disparitions de pièces.

f.c. Le 15 juin 2022, une gendarme de la police de B______ a sollicité la transmission des renseignements personnels d'A______ en lien avec la disparition des pièces d'argent au domicile de la bénéficiaire « A ».

g. Le 26 août 2022, A______ a été convoquée à un entretien de service du 14 septembre 2022. Selon le compte rendu qui en a été fait, elle avait fait l'objet de six plaintes de la part des bénéficiaires entre mai 2019 et la date de l'entretien. Les faits à la base de celles-ci portaient sur la disparition de sommes d'argent allant de CHF 10.- à CHF 1'200.-. Certaines dénonciations avaient fait l'objet de dépôt de plaintes pénales auprès de la police. Elle avait été entendue à propos de chacune des plaintes.

S'agissant des faits dénoncés par la bénéficiaire « S », A______ avait précisé avoir été informée par la police que la fille de la bénéficiaire avait demandé le retrait de la plainte, sans indiquer la date à laquelle cette information lui avait été communiquée. Elle ajoutait que cette bénéficiaire était sujette à des pertes de mémoire.

La bénéficiaire « P » dormait avec la porte du palier ouverte (non verrouillée). Elle l'avait alertée sur les problèmes d'insécurité que cela pouvait engendrer. Elle se rappelait avoir rencontré la bénéficiaire en robe de nuit devant l'entrée de son immeuble et en avoir informé l'IMAD et la belle-fille de cette dernière. Elle ne comprenait pas l'accusation de vol la visant, étant donné que la bénéficiaire se déplaçait dans son logement toujours avec son sac à main et était présente en permanence avec elle dans la même pièce lors de ses prestations.

La bénéficiaire « E » avait confié à une collègue que sa petite-fille avait des problèmes d'argent et qu'elle lui en aurait prêté à plusieurs reprises. Une autre collègue avait par ailleurs signalé la présence d'une personne inconnue dans son logement lors d'une prestation de soins. La bénéficiaire avait affirmé lors de son audition à la police que la somme d'argent disparue était importante, sans pour autant en préciser le montant. Cette bénéficiaire étant décédée, elle n'avait pas eu de nouvelles concernant la suite donnée à la plainte pénale.

Elle continuait à effectuer des prestations chez le bénéficiaire « V » et qualifiait leur relation de très bonne. Celui-ci souffrait d'une addiction à l'alcool. Il lui avait offert pendant la période de Noël une boîte de chocolats et une enveloppe contenant la somme de CHF 30.- qu'elle s'était empressée de remettre à sa responsable hiérarchique.

Elle réalisait des prestations de ménage chez la bénéficiaire « B » et n'y ouvrait ni armoire ni placard. Celle-ci recevait régulièrement du « monde » chez elle. Elle regrettait que la cliente ne souhaitât plus recevoir ses prestations.

Elle n'avait pas ouvert le tiroir de la table de nuit et ne savait pas où se trouvait l'argent disparu au domicile de la bénéficiaire « A ». Elle ne se risquerait pas à se faire licencier pour une somme de CHF 55.-. La cliente était toujours présente lors de ses prestations chez elle. Elle ne voulait pas rembourser une somme qu'elle n'avait pas volée. La cliente se plaignait régulièrement d'actes de vol durant ses vacances.

Toujours selon le compte rendu, parmi les huit aides à domicile, elle était la seule personne visée par les plaintes de clients, à l'exception de la plainte de la bénéficiaire « E » qui ciblait une autre collègue. En dehors de l'équipe du C______, trois plaintes pour disparitions d'argent avaient été dirigées contre le personnel des autres équipes. Le nombre important de plaintes recueillies de plusieurs bénéficiaires à l'encontre d'A______, dans un intervalle très court et pour le motif de disparition de sommes d'argent, était extrêmement préoccupant. Cette récurrence avait fait naître un doute légitime quant à son innocence. Pour ces raisons, A______ avait été informée que le lien de confiance, absolument nécessaire à la continuation des rapports de service, avait été profondément ébranlé et qu'une nouvelle plainte de bénéficiaire serait susceptible de conduire à une résiliation de ses rapports de service.

A______ a dit trouver regrettable que les aides à domicile soient toujours ciblées par les plaintes pour vol. Elle était concierge de son immeuble et n'avait jamais été confrontée à une quelconque plainte, bien qu'elle fût en possession des clefs de nombreux logements. Elle percevait une rente de veuve et n'était pas dans une situation financière délicate.

h. Dans le délai fixé au 5 octobre 2022, A______ n'a pas fait valoir d'observations complémentaires, ni de divergences au sujet de l'entretien de service.

i. Par décision du 20 octobre 2022, l'IMAD a informé A______ qu'elle renonçait à prononcer à son encontre une sanction disciplinaire. Aucune infraction pénale ou aucun manquement aux devoirs de service n'avait pu être clairement établi. Il lui était accordé, une dernière fois, le bénéfice du doute. Toute nouvelle plainte était susceptible de conduire à la rupture totale du lien de confiance avec l'institution et, par conséquent, à la résiliation de ses rapports de service.

j. Le 31 octobre 2022, un vol d'argent au domicile de la cliente « PO » a été signalé à la responsable d'équipe du C______, qui s'était rendue chez celle-ci, pour prendre connaissance des faits. Le couple « PO » lui avait expliqué avoir réparti des sommes en espèces de l'ordre de EUR 800.- à EUR 1'000.- et de CHF 1'240.- dans deux enveloppes qui avaient été par la suite scotchées chacune dans un livre de leur bibliothèque. Souhaitant garder une trace de cette cachette, il avait noté de manière très explicite comment retrouver lesdites sommes sur une feuille posée sur un bureau situé dans une pièce de l'appartement autre que celle de la bibliothèque le 24 octobre 2022. Il avait découvert, le 28 octobre 2022, que les enveloppes avaient disparu. Il était persuadé que le vol avait été commis le 25 octobre 2022 lors du passage de l'aide à domicile, car celle-ci était la seule intervenante à se rendre dans toutes les pièces de l'appartement. Selon le relevé des passages au domicile du couple, A______ avait fourni les prestations d'aide pratique le jour indiqué.

La responsable d'équipe avait pu constater notamment que la pièce abritant le bureau était éloignée de la pièce dans laquelle se trouvait la bibliothèque, que l'endroit où était disposée la note explicative était accessible uniquement si l'on était dans la pièce et qu'il était impossible de savoir où chercher l'argent sans connaissance de cette note.

k. Par mandat de comparution du 11 novembre 2022, A______ a été convoquée à une audition au poste de police du C______, qui s'est tenue le 30 novembre 2022.

l. Par décision du 8 novembre 2022, A______ a été libérée temporairement de son obligation de travailler avec effet immédiat et ce jusqu'à nouvel avis. Son traitement était maintenu.

m. Le 22 novembre 2022, A______ a été convoquée à un entretien de service qui s'est déroulé le 6 décembre 2022.

Les faits reprochés lui étaient exposés. Il était en particulier fait mention de l'entretien du 14 septembre 2022 au cours duquel elle avait été entendue sur de multiples plaintes portant sur des suspicions de disparitions d'argent formulées à son encontre par différents bénéficiaires, ainsi que la décision du 20 octobre 2022 par laquelle l'IMAD avait renoncé à prononcer à son encontre une sanction disciplinaire. À l'instar dudit entretien, cette décision comporte la menace d'une résiliation des rapports de service en cas de nouvelle plainte à son encontre.

Faisant suite à la nouvelle plainte du 31 octobre 2022, A______ avait été entendue lors d'un entretien du 8 novembre 2022 et avait nié avoir subtilisé une quelconque somme d'argent chez le couple « PO ».

Elle était très étonnée d'être accusée de ce vol, car elle n'avait pas accédé à la chambre de la bénéficiaire. Celle-ci était toujours présente lorsqu'elle effectuait les prestations d'aide pratique chez elle. Elle demandait toujours si elle pouvait poser son sac à main sur une chaise vers l'entrée de l'appartement. Elle n'avait pas le temps de fouiller un logement de cinq pièces pendant le temps de la prestation qui durait une heure et demie. Elle souhaitait déposer une plainte en diffamation contre le couple. La police avait laissé entendre qu'une confrontation avec les plaignants n'était pas utile, car il était possible que chacune des parties maintienne sa position. Elle avait autorisé la police à contacter ses anciens employeurs. Elle ne voulait pas « mettre la faute » sur la cliente qui souffrait de troubles cognitifs dégénérescents.

Elle avait été informée que la nouvelle plainte, soit la septième plainte depuis 2019, était propre à rompre le lien de confiance indispensable à la continuation des rapports de service, ce qui était susceptible de conduire à une résiliation de ses rapports de service.

n. Dans le délai fixé au 28 décembre 2022, A______ n'a pas formulé d'observations complémentaires sur le rapport de l'entretien de service du 6 décembre 2022.

o. Par courrier du 28 février 2023, A______ a requis la levée de son secret de fonction, afin qu'elle puisse se défendre convenablement dans le cadre d'une procédure pénale ouverte à la suite de trois plaintes pénales déposées par deux bénéficiaires distincts de l'IMAD contre elle.

p. Le 25 avril 2023, lors de la visite de la responsable d'équipe du C______ au domicile de la bénéficiaire « A », celle-ci l'avait informée que la police lui avait restitué, de la part d'A______, la somme de CHF 55.- dérobée à son domicile. Celle-ci avait confirmé ne pas être l'auteure du vol, mais aurait remis la somme à la police afin que le malentendu « n'aille pas plus loin ».

q. Le 15 mai 2023, l'IMAD a résilié les rapports de service d'A______ avec effet au 31 août 2023.

Elle totalisait sept plaintes de bénéficiaires à son encontre depuis mai 2019, ce qui correspondait, au moment du dernier entretien de service, à 70% des plaintes reçues pour disparitions de sommes d'argent sur l'ensemble du personnel du centre de maintien à domicile de E_____. Elle allait être entendue dans le cadre d'une procédure pénale déclenchée à la suite de trois plaintes pénales déposées à son encontre par deux bénéficiaires. Elle avait procédé par l'intermédiaire de la police au remboursement d'une somme d'argent dérobée au domicile de l'une des plaignantes.

Compte tenu de leur historique, de leur récurrence et de leur importance, les faits qui lui étaient reprochés étaient constitutifs d'infractions extrêmement graves à ses devoirs de service, de sorte que le lien de confiance avec l'institution, absolument nécessaire à la continuation des rapports de service, était totalement et définitivement rompu. Son traitement était maintenu jusqu'à l'échéance des rapports de service.

C. a. Par acte posté le 22 juin 2023, A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre cette décision. Elle a sollicité préalablement la suspension de la procédure jusqu'à droit connu s'agissant de la procédure pénale (P/_____), la production par l'IMAD de toutes les plaintes reçues depuis mai 2019, sa comparution personnelle ainsi que les auditions de F______ (fonctionnaire de l'IMAD au moment des faits) et de « G______ [à compléter]? ». Elle a conclu principalement à la nullité ou à l'annulation de la décision entreprise, subsidiairement au paiement en sa faveur, par l'IMAD, d'une indemnité de neuf mois de son dernier salaire brut, à savoir CHF 26'914.50.

L'IMAD n'avait fait que confirmer la décision de licenciement prise en violation flagrante de son droit d'être entendue. Le 6 décembre 2022, à la fin de l'entretien de service et hors procès-verbal, H______, responsable des ressources humaines de l'IMAD de E_____ lui avait dit : « je suis désolé pour vous, mais le lien de confiance est cassé, on va vous résilier votre contrat auprès de l'IMAD ». Il avait donc d'ores et déjà pris une décision à un moment où elle était encore invitée à remettre des observations écrites suite à cet entretien de service. Cette décision était nulle puisque « rendue par oral » par ledit responsable.

En l'absence de motif fondé, la résiliation de ses rapports de service était contraire au droit. Elle était arbitraire, contraire au principe de proportionnalité et violait la maxime inquisitoire.

Était annexée au recours une enveloppe scellée dont l'ouverture était subordonnée à la levée des secrets auxquels elle était soumise.

b. Le 14 juillet 2023, l'IMAD a délié la recourante de son obligation de garder le secret de fonction.

c. Le 25 juillet 2023, la bénéficiaire « A » a réitéré par courrier les indications selon lesquelles la recourante lui avait restitué par l'intermédiaire de la police la somme de CHF 55.-, qui avait été subtilisée à son domicile en avril 2022, afin de mettre fin aux « démarches », sans avouer toutefois être l'auteur du vol.

d. Le 29 août 2023, l'IMAD a conclu au rejet du recours.

Le sort de la procédure administrative ne dépendait pas de la procédure pénale pendante, de sorte que la demande de suspension devait être rejetée.

La recourante s'était déjà exprimée à de nombreuses reprises sur les faits reprochés et l'autorité intimée avait transmis à la chambre administrative tous les éléments essentiels de la cause, ce qui devrait lui permettre de se déterminer, sans que d'autres actes d'instruction soient nécessaires. De même, l'audition de personnes qui n'avaient pas été témoin des événements ayant donné lieu aux plaintes de clients, certainement à titre de témoins de moralité, n'était pas non plus pertinente.

Le grief de nullité tombait à faux, dès lors que la décision attaquée avait été prise par la directrice générale de l'autorité intimée, conformément au règlement relatif aux compétences et signatures de l'institution.

Sept plaintes avaient été recueillies dans le cadre des rapports de service de la recourante et portaient sur des disparitions de sommes d'argent aux domiciles des bénéficiaires. La recourante avait restitué, à l'insu de l'IMAD, la somme de CHF 55.- qu'elle avait été accusée d'avoir dérobé au domicile d'une cliente, ce qui s'apparentait à un aveu de sa part, dans la mesure où elle avait précisément déclaré ne pas vouloir rembourser une somme qu'elle n'avait pas volée lors de l'entretien du 14 septembre 2022. Une procédure pénale à son encontre, regroupant trois plaintes pénales initiées par deux bénéficiaires, était pendante. L'accumulation des suspicions de vol dans un laps de temps relativement court avait progressivement amoindri le lien de confiance avec l'institution jusqu'à sa rupture totale et définitive, de sorte que la décision entreprise reposait sur un motif fondé.

e. Le 15 septembre 2023, la recourante a indiqué que l'audition de F______ était sollicitée afin de démontrer que l'un des prétendus vols ne pouvait pas être son œuvre. Elle pouvait également expliciter davantage les circonstances ayant conduit à son licenciement « prémédité ».

f. Le 4 octobre 2023, une audience de comparution personnelle et d'enquêtes a eu lieu.

f.a. F______ était une aide familiale à l'IMAD, dont les tâches consistaient à prodiguer des soins et à faire des courses. Elle et la recourante ne réalisaient pas leurs prestations chez les bénéficiaires les mêmes jours et ne se croisaient pas, sauf peut-être de temps en temps en bas des immeubles où habitaient des clients. Elles n'étaient pas amies. Au domicile de la bénéficiaire « E », elle s'occupait des soins à la personne dans la salle de bains ainsi que des courses. Les aides à domicile comme la recourante avaient une présence plus longue et devaient faire le ménage dans l'appartement, lequel était assez ordonné. Il y avait eu des bruits de couloir sur les accusations formulées à l'encontre de la recourante, sans qu'elle en sache davantage. La précédente responsable d'équipe avait confirmé qu'une plainte avait été déposée par la famille de la bénéficiaire pour le vol d'une enveloppe. Elle n'avait pas entendu d'autres accusations et n'en avait jamais parlé avec la recourante ; elle n'en avait aucun souvenir et la bénéficiaire en tout cas était décédée depuis longtemps. Quand elle avait appris ces accusations, cela l'avait laissé pantoise, car elle n'imaginait pas qu'une collègue fasse cela à un bénéficiaire. Elle aurait eu la même réaction si les accusations avaient visé un ou une autre collègue.

f.b. La recourante a affirmé qu'une procédure pénale était pendante sous le numéro P/_____ s'agissant des dernières accusations portées par la cliente « PO ». Une ordonnance pénale avait été rendue le 20 février 2023 mais était contestée. Une audience s'était tenue au Ministère public et le procès-verbal serait produit dans la présente procédure. L'ordonnance pénale concernait trois plaintes déposées par trois bénéficiaires dont deux étaient décédés. La plainte de la bénéficiaire « E » n'avait pas été reprise par ses héritiers. Elle ne savait pas si les plaignants se connaissaient. Elle ne comprenait pas les accusations portées contre elle. Lors de ses prestations, elle essayait de faire participer un petit peu les bénéficiaires au ménage, ceux-ci étant souvent dans la même pièce qu'elle. Dans certaines situations, elle n'était pas seule à aller au domicile des clients, d'autres prestataires de l'IMAD, des amis ou proches s'y rendaient aussi. Elle avait certes fait l'objet de plaintes multiples, mais :

-          une des plaignantes s'était contredite devant le Ministère public, comme cela ressortait du procès-verbal ;

-          son innocence était prouvée par pièce concernant l'accusation du vol au domicile de « E » ;

-          concernant la plainte de la cliente « PO », le policier qui l'avait interrogée avait tenté de faire pression sur elle, déclarant disposer d'images de vidéosurveillance alors qu'il n'y avait jamais eu de vidéosurveillance, ni de dispositif de sécurité au domicile de cette bénéficiaire ;

-          un certain nombre de bénéficiaires de l'IMAD perdaient totalement la tête, notamment les clients « PO » et « S ».

Quant à l'accusation portée par la cliente « A », la police l'avait informée de la main‑courante pour le vol de CHF 50.- (recte : CHF 55.-). Après qu'elle eut clamé son innocence, la policière lui avait conseillé de restituer cette somme afin d'éviter le risque de perdre son travail. Elle n'avait pas parlé de cette restitution parce qu'il ressortait des propos de la policière que la restitution par son entremise permettait que cela restât discret. Elle avait effectivement peur d'en parler à son employeur vu les autres accusations. Elle voulait garder sa place de travail. Elle ne savait pas que cela pouvait constituer une violation des devoirs du rapport de service. Il lui avait été clairement dit lors de l'entretien de service du 14 septembre 2022 qu'en cas de nouvelle plainte à son encontre, elle serait renvoyée. Cela s'était confirmé lors de l'entretien de service de décembre 2022, lorsqu'il lui avait été dit que ses rapports de service allaient être résiliés à la suite d'une nouvelle plainte la visant. Lorsqu'elle avait reçu les procès-verbaux des deux entretiens de service, elle ne les avait pas lus. Après le second entretien de service, elle était allée voir son médecin, qui l'avait mise en arrêt maladie. Elle n'avait pas vu le délai fixé pour d'éventuelles rectifications.

Un délai était imparti à la recourante au 3 novembre 2023 pour communiquer les pièces relatives à la procédure pénale pendante et un autre au 8 décembre 2023 pour donner son accord au descellement de l'enveloppe scellée fournie avec le recours.

g. Le 8 novembre 2023, le juge délégué a rejeté la demande de suspension de la procédure soumise par la recourante. Les délais étaient prolongés au 8 décembre 2023 pour communiquer à la chambre administrative les preuves (pièces et autres compléments relatifs à la procédure pénale) et au 12 janvier 2024 pour donner son accord au descellement de l'enveloppe.

h. Le 14 décembre 2023, le secret professionnel de la recourante a été levé à l'égard de la cliente « PO ».

i. Le 20 décembre 2023, la chambre administrative a pris note de ce que les pièces n'avaient pas pu être déposées dans le délai imparti.

j. Le 12 janvier 2024, la recourante a transmis à la chambre de céans copie d'une décision rendue le 14 décembre 2023 levant son secret professionnel à l'égard de la bénéficiaire « PO » en précisant qu'en l'absence de recours contre cette décision, elle produirait alors une copie de la procédure pénale.

k. Le 19 janvier 2024, le juge délégué a informé la recourante que selon les informations en la possession de la chambre administrative, aucun recours n'avait été déposé contre la décision de levée de son secret professionnel. Un délai au 1er mars 2024 était imparti aux parties pour formuler toutes requêtes ou observations complémentaires, après quoi la cause serait gardée à juger.

l. Le 12 février 2024, après une autre prolongation de délai, la chambre administrative a obtenu le quitus de la recourante et procédé au descellement de l'enveloppe scellée remise avec le recours. Celle-ci contenait un complément d'acte de recours daté du 22 juin 2023 ainsi que deux pièces, soit une plainte pénale déposée par la recourante le 28 février 2023 et une photo d'un écran de téléphone portable indiquant le planning horaire de la recourante du 16 au 18 juin 2020.

Dans le complément d'acte de recours, la recourante concluait préalablement à l'audition de I______. Ce dernier était l'auteur de la plainte pénale mentionnée dans l'entretien du 6 décembre 2022. La bénéficiaire « S » avait déjà accusé fallacieusement une ancienne collègue. Elle peinait à comprendre la plainte du bénéficiaire « V » - pour J______ - qui insistait pour qu'elle continuât à travailler à son domicile. La cliente « B » était très âgée et atteinte de la maladie d'Alzheimer. Elle avait procédé au remboursement de la somme de CHF 50.- (recte : CHF 55.-) à la bénéficiaire « A » - pour K______ - à la demande insistante de la police, par pur gain de paix. Cela s'était produit pendant l'été 2022.

Sa plainte pénale était dirigée contre les clients « P », « E » et « PO » du chef de diffamation pour les accusations de vol portées par ceux-ci à son encontre :

-          la bénéficiaire « P » refusait de fermer à clef la porte de son logement et « tout l'immeuble était au courant » de cette situation. Elle était complètement sourde et « à cheval » sur ses finances ;

-          elle ne croyait pas avoir travaillé chez la bénéficiaire « E » le 18 juin 2020 puisque le jeudi matin était son jour de congé. L'une de ses collègues intervenait également au domicile de la plaignante. Celle-ci recevait de nombreuses visites ainsi que d'autres intervenants de santé à son domicile ;

-          la bénéficiaire « PO » la suivait partout lorsqu'elle faisait le ménage. Le 25 octobre 2022, elle lui avait interdit d'entrer dans la pièce comprenant un lit et une bibliothèque.

m. Le 1er mars 2024, l'IMAD a persisté dans ses conclusions.

Outre I______, deux autres clients avaient également déposé des plaintes pénales contre la recourante. À la suite de leur décès, ces plaintes avaient été classées sans suite. Le contexte allégué par la recourante en lien avec le vol chez le couple I______ ne pouvait être considéré comme impossible. Elle ne disposait pas de compétences nécessaires pour dresser un quelconque diagnostic médical des clients auprès desquels elle intervenait en qualité d'aide à domicile. Elle n'avait pas eu accès aux dossiers médicaux des bénéficiaires qui s'étaient plaints de ses agissements. La cliente « P » ne souffrait pas de surdité au moment de sa plainte. Aucune problématique de non-fermeture de la porte de son domicile à clef n'avait été constatée. La recourante était intervenue au domicile de la bénéficiaire « E » en date du 16 juin 2020 à 10h08. La bénéficiaire « B » n'était pas atteinte d'Alzheimer au moment de sa plainte, aucun problème de mémoire ne ressortant de son dossier médical. La recourante avait restitué la somme de CHF 55.- à la bénéficiaire « A » en omettant d'en informer son employeur et avait ensuite déclaré lors de l'entretien de service du 14 septembre 2022 ne pas vouloir rembourser une somme qu'elle n'avait pas volée. Elle n'avait pas pu établir que ladite restitution avait été effectuée sur insistance d'une agente de police. Elle avait également omis d'informer son employeur qu'une ordonnance pénale avait été rendue à son encontre le 20 février 2023.

L'audition de I______ n'était pas pertinente. En refusant de produire l'ordonnance pénale du 20 février 2023 en dépit de la levée de son secret professionnel, la recourante avait refusé de manière claire et assumée de collaborer à l'établissement de la vérité. Cette attitude non collaborative, largement pratiquée au cours des rapports de service envers son employeur, devait être jugée comme discréditant largement sa version des faits. Cela s'ajoutait au fait qu'elle avait instrumentalisé le secret professionnel pour obtenir plusieurs prolongations des délais qui lui avaient été impartis, pour finalement ne pas transmettre la procédure pénale promise. Sa condamnation par ordonnance pénale était un élément nouveau déterminant dans la mesure où il confirmait les doutes nourris à son sujet ensuite des sept plaintes, ceux-ci étant largement suffisants pour prononcer son licenciement.

n. Le 1er mars 2024, la recourante a apporté des observations complémentaires, y joignant deux nouvelles pièces, à savoir son planning mensuel d'août 2022 ainsi qu'un procès-verbal d'audience tenue au Ministère public dans le cadre de la procédure pénale P/_____.

En sus de la production des statistiques citées par l'autorité intimée (page 23 de son mémoire de réponse du 25 août 2023), elle sollicitait les auditions d'L______, soit sa collègue qui avait été également accusée par la cliente « E », de M______, la gendarme qui l'avait incitée à restituer la somme d'argent dérobée au domicile de la cliente « A », ainsi que la production des plannings des autres intervenants de l'IMAD auprès des bénéficiaires ayant dénoncé des vols, lesquels pourraient confirmer qu'elle n'était pas intervenue chez certains de ceux-ci lors des périodes pendant lesquelles des soupçons de vol pesaient sur elle. Les soupçons dirigés contre elle étaient « bien trop peu crédibles » pour justifier, même dans leur conjonction, la résiliation de ses rapports de service.

Selon le procès-verbal de l'audience pénale produit, elle avait fait l'objet d'une condamnation par ordonnance pénale du 20 février 2023, contre laquelle elle avait formé opposition le 3 mars 2023. I______ était sûr à 100% qu'elle avait subtilisé son argent, personne d'autre ne s'étant rendu à son domicile entre le passage de celle-ci le 25 octobre et la découverte de sa disparition le 28 octobre 2022. Elle réfutait avoir commis ce vol. Le plaignant contestait les allégations de la recourante selon lesquelles elle n'avait pas pu effectuer le ménage dans la pièce de son appartement abritant le bureau le 25 octobre 2022, parce que personne ne se rendait dans cette pièce qui n'était pas sale. Son épouse ne l'avait pas non plus empêchée d'y accéder en se positionnant devant la porte.

o. Par la même écriture du 1er mars 2024, A______ a formé recours auprès de la chambre administrative à l'encontre de la « décision orale par téléphone » de refus par l'IMAD de payer ses heures supplémentaires (6h32) ainsi que l'indemnité de vacances. Elle a sollicité au préalable la jonction des deux procédures. Pour le surplus, elle a requis l'octroi de l'assistance judiciaire pour l'ensemble de la procédure.

p. Le 7 mars 2024, le juge délégué a informé la recourante qu'il n'était pas possible d'interjeter un nouveau recours dans une telle écriture et qu'il valait mieux adresser un recours séparé à la chambre administrative. La jonction des procédures n'était pas envisageable. La demande d'assistance juridique devait être adressée au service compétent.

q. Le 10 avril 2024, la recourante a répondu à la chambre administrative et lui a demandé de bien vouloir malgré tout traiter ledit recours.

r. Les arguments des parties et la teneur des pièces de la procédure seront pour le surplus repris ci-dessous dans la mesure utile au traitement du litige.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours formé le 22 juin 2023 est recevable, étant précisé que la recourante a produit des pièces permettant de retenir que le pli contenant la décision litigieuse a été retiré à La Poste suisse le 23 mai 2023 (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 – LPA - E 5 10).

2.             La recourante demande que le recours qu'elle a mentionné dans son écriture du 1er mars 2024 contre la « décision orale par téléphone » de refus par l'IMAD de payer ses heures supplémentaires (6h32) ainsi que son indemnité de vacances soit traité.

2.1 Selon l’art. 132 al. 2 LOJ, le recours à la chambre administrative est ouvert contre les décisions des autorités et juridictions administratives au sens des art. 4, 4A, 5, 6 al. 1 let. a et e et 57 LPA.

Sont considérées comme des décisions au sens de l’art. 4 al. 1 LPA, les mesures individuelles et concrètes prises par l’autorité dans les cas d’espèce fondées sur le droit public fédéral, cantonal, communal et ayant pour objet : a) de créer, de modifier ou d’annuler des droits ou des obligations ; b) de constater l’existence, l’inexistence ou l’étendue de droits, d’obligations ou de faits ; c) de rejeter ou de déclarer irrecevables des demandes tendant à créer, modifier, annuler ou constater des droits ou obligations.

À teneur de l’art. 46 al. 1 LPA, les décisions doivent être désignées comme telles, motivées et signées en indiquant les voies et délais de recours. En outre, à teneur de l’art. 46 al. 2 LPA, elles doivent être notifiées à leurs destinataires.

2.2 Lorsqu’une autorité mise en demeure refuse sans droit de statuer ou tarde à se prononcer, son silence est assimilé à une décision (art. 4 al. 4 LPA). Une partie peut recourir en tout temps à la chambre administrative pour déni de justice ou retard non justifié, si l’autorité concernée ne donne pas suite rapidement à la mise en demeure prévue à l’art. 4 al. 4 LPA (art. 132 al. 2 LOJ; art. 62 al. 6 LPA). Toutefois, lorsque l'autorité compétente refuse expressément de rendre une décision, les règles de la bonne foi (art. 5 al. 3 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 - Cst. - RS 101) imposent que le recours soit interjeté dans le délai légal, sous réserve éventuelle d'une fausse indication quant audit délai (arrêt du Tribunal fédéral 2P.16/2002 du 18 décembre 2002 consid. 2.2).

2.3 En l'espèce, la recourante ne fait pas valoir un déni de justice et n'a de toute façon pas mis en demeure l'autorité, si bien qu'un recours pour déni de justice est exclu en l'état. Par ailleurs, une « décision orale » ne constitue pas une décision au sens des dispositions de procédure précitées et ne saurait constituer un acte attaquable devant la chambre de céans. Un tel recours est irrecevable et la recourante doit demander une décision écrite avant d'interjeter éventuellement recours contre celle-ci.

Les conclusions prises le 1er mars 2024 sont par conséquent irrecevables, ce qui rend la demande de jonction des recours sans objet.

3.             La recourante sollicite sa comparution personnelle ainsi que l'audition de F______, G______, I______, L______ et M______. A été requise en sus la production des statistiques citées par l'autorité intimée dans sa réponse au recours et des plannings des autres intervenants de l'IMAD.

3.1 Tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 Cst., le droit d'être entendu comprend notamment le droit pour l'intéressé d'offrir des preuves pertinentes et d'obtenir qu'il y soit donné suite (ATF 145 I 73 consid. 7.2.2.1 ; 142 III 48 consid. 4.1.1). Ce droit ne s'étend qu'aux éléments pertinents pour l'issue du litige et n'empêche pas le juge de renoncer à l'administration de certaines preuves et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, s'il acquiert la certitude que celles-ci ne l'amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 145 I 167 consid. 4.1 ; 140 I 285 consid. 6.3.1). Le droit d’être entendu n'implique pas le droit à l’audition orale ni à celle de témoins (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1).

De plus, le droit d'être entendu ne peut être exercé que sur les éléments qui sont déterminants pour décider de l'issue du litige (ATF 135 I 279 consid. 2.3 ; 132 V 368 consid. 3.1). L'autorité de décision peut donc se livrer à une appréciation anticipée de la pertinence du fait à prouver et de l'utilité du moyen de preuve offert et, sur cette base, refuser de l'administrer. Ce refus ne viole le droit d'être entendu que si l'appréciation à laquelle elle a ainsi procédé est entachée d'arbitraire (art. 9 Cst. ; ATF 138 III 374 consid. 4.3.2 ; 136 I 229 consid. 5.3).

3.2 En l'espèce, outre le fait qu'il n'y a pas de droit à une audition des témoins, une requête n'est en ce sens justifiée que pour autant que la pertinence de leur apport à l'administration des preuves soit démontrée. Tel n'est pas le cas de G______ à propos de laquelle la recourante n'indique pas en quelle qualité et sur quels faits contestés il serait nécessaire de l'auditionner. Il en va de même d'L______, dont on ne voit pas non plus en quoi son audition sur les accusations de vol qui ont été portées contre elle par une des plaignantes pourrait aider à l'appréhension des suspicions de vol qui concernent la recourante. I______ s'est déjà exprimé sur sa plainte pour vol à deux reprises, une première fois dans le cadre du rapport d'incident et une seconde fois lors de l'audition pénale, comme rapportés dans la présente procédure. Dès lors qu'il n'est pas contesté que la recourante a procédé au remboursement du montant d'une somme d'argent disparue au domicile d'une plaignante, le témoignage de la gendarme M______ paraît à cet égard superflu. Quant à F______, elle a été entendue par la chambre de céans, si bien que la requête a perdu son objet.

La production des statistiques et des plannings des autres intervenants de l'autorité intimée n'est pas non plus pertinente pour les raisons suivantes.

La chambre de céans est en possession d'un dossier complet comprenant les explications et les pièces que les parties ont fournies à l'appui de leurs conclusions, tant devant l'autorité intimée que pendant la présente procédure de recours, laquelle a été ponctuée de nombreux échanges d'écritures, de la comparution des parties ainsi que de l'audition d'une personne. Ainsi, elle dispose de suffisamment d'éléments pertinents lui permettant de trancher le litige en toute connaissance de cause, de sorte que les auditions des témoins et la production des pièces requises ne sont pas de nature à apporter au dossier des éléments autres que ceux déjà allégués par la recourante.

En conséquence, il ne sera pas fait droit aux réquisitions d'actes d'instruction complémentaires formulées par la recourante.

4.             La recourante fait valoir que la résiliation de ses rapports de service a été décidée bien avant la décision entreprise. Elle soulève sa nullité pour violation de son droit d'être entendue.

4.1 Le droit d'être entendu, comme mentionné supra, est garanti par les art. 29 al. 2 Cst. et 41 LPA, et sert non seulement à établir correctement les faits, mais constitue également un droit indissociable de la personnalité garantissant à un particulier de participer à la prise d'une décision qui touche sa position juridique (ATF 135 I 279 consid. 3.2 ; 132 II 485 consid. 3.2 et les références ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_37/2020 du 7 septembre 2020 consid. 3.1). L'étendue du droit de s'exprimer ne peut pas être déterminée de manière générale, mais doit être définie au regard des intérêts concrètement en jeu ; l'idée maîtresse est qu'il faut permettre à une partie de pouvoir mettre en évidence son point de vue de manière efficace (ATF 144 I 11 consid. 5.3 et les arrêts cités).

4.2 En matière de rapports de travail de droit public, la jurisprudence admet que des occasions relativement informelles de s'exprimer avant le licenciement peuvent remplir les exigences du droit constitutionnel d'être entendu, pour autant que la personne concernée ait compris qu'une telle mesure pouvait entrer en ligne de compte à son encontre (ATF 144 I 11 consid. 5.3 in fine). La personne concernée ne doit pas seulement connaître les faits qui lui sont reprochés, mais doit également savoir qu'une décision allant dans une certaine direction est envisagée à son égard (arrêts du Tribunal fédéral 8C_62/2014 du 29 novembre 2014 consid. 2.3.1 ; 8C_861/2012 du 20 août 2013 consid. 5.2). Il n'est pas admissible, sous l'angle du droit d'être entendu, de remettre à l'employé une décision de résiliation des rapports de service en se contentant de lui demander de s'exprimer s'il le désire (arrêt du Tribunal fédéral 8C_541/2017 du 14 mai 2018 consid. 2.2 et les arrêts cités).

Dans le cadre de la résiliation d'un rapport de travail, l'autorité ne peut prendre une décision qu'après avoir pris connaissance de l'ensemble des faits pertinents pour la décision et, par conséquent, qu'après avoir entendu la personne concernée. Ce droit est violé lorsqu'un licenciement est déjà établi de fait avant l'audition (ATA/1206/2023 du 7 novembre 2023, consid. 3.4 et les références citées).

4.3 Une décision entreprise pour violation du droit d’être entendu n’est pas nulle mais annulable (ATF 143 IV 380 consid. 1.4.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_31/2021 du 16 juillet 2021 consid. 2.1 ; ATA/547/2021 du 25 mai 2021 consid. 6a et les références). En effet, selon un principe général, la nullité d'un acte commis en violation de la loi doit résulter ou bien d'une disposition légale expresse, ou bien du sens et du but de la norme en question (ATF 122 I 97 consid. 3a ; 119 II 147 consid. 4a et les références). En d'autres termes, il n'y a lieu d'admettre la nullité, hormis les cas expressément prévus par la loi, qu'à titre exceptionnel, lorsque les circonstances sont telles que le système d'annulabilité n'offre manifestement pas la protection nécessaire (ATF 138 III 49 consid. 4.4.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_160/2017 du 3 octobre 2017 consid. 5.1 ; ATA/547/2021 du 9 juillet 2021 consid. 6a et les références). Ainsi, d'après la jurisprudence, la nullité d'une décision n'est admise que si le vice dont elle est entachée est particulièrement grave, est manifeste ou du moins facilement décelable et si, en outre, la constatation de la nullité ne met pas sérieusement en danger la sécurité du droit. Des vices de fond n'entraînent qu'à de rares exceptions la nullité d'une décision ; en revanche, de graves vices de procédure, ainsi que l'incompétence qualifiée de l'autorité qui a rendu la décision sont des motifs de nullité (ATF 144 IV 362 consid. 1.4.3 ; 139 II 243 consid. 11.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_171/2020 du 6 avril 2021 consid. 1.4.2).

4.4 La réparation d'un vice de procédure en instance de recours et, notamment, du droit d'être entendu, n'est possible que lorsque l'autorité dispose du même pouvoir d'examen que l'autorité inférieure (ATF 145 I 167 consid. 4.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_31/2021 du 16 juillet 2021 consid. 2.1 ; ATA/949/2021 du 14 septembre 2021 consid. 5b et les arrêts cités ; Pierre MOOR/Etienne POLTIER, Droit administratif, vol. 2, 3e éd., 2011, p. 322 ch. 2.2.7.4 et p. 362 ch. 2.3.3.1; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2e éd., 2018, p. 526 s. n. 1553 s.). Elle dépend toutefois de la gravité et de l'étendue de l'atteinte portée au droit d'être entendu et doit rester l'exception (ATF 142 II 218 consid. 2.8.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_66/2022 du 8 décembre 2022 consid. 3.2) ; elle peut cependant se justifier en présence d'un vice grave lorsque le renvoi constituerait une vaine formalité et aboutirait à un allongement inutile de la procédure (ATF 142 II 218 consid. 2.8.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_31/2021 du 16 juillet 2021 consid. 2.1 ; ATA/949/2021 du 14 septembre 2021 consid. 5b et les références). En outre, la possibilité de recourir doit être propre à effacer les conséquences de cette violation. Autrement dit, la partie lésée doit avoir le loisir de faire valoir ses arguments en cours de procédure contentieuse aussi efficacement qu’elle aurait dû pouvoir le faire avant le prononcé de la décision litigieuse (ATA/949/2021 du 14 septembre 2021 consid. 5b et les références).

4.5 En l'espèce, la décision querellée renvoie aux entretiens de service du 14 septembre 2022 et du 6 décembre 2022. Lors du premier, il a été exposé à la recourante les six plaintes de clients à son encontre, suivi d'une mise en garde quant à l'éventualité de la résiliation de ses rapports de service en cas de nouvelle plainte. Le second, qui faisait suite à une nouvelle plainte de vol, a fait état de ce que celle‑ci avait provoqué la rupture du lien de confiance avec l'autorité intimée, ce qui était susceptible de conduire à la résiliation de ses rapports de service. À teneur des comptes rendus de ces deux entretiens de service, elle avait été dûment informée de son droit de faire valoir ses observations complémentaires ou ses divergences dans des délais indiqués. Elle n'a pas saisi cette possibilité, expliquant n'avoir ni lu lesdits procès-verbaux, ni pris connaissance du délai fixé dans le second entretien de service. Elle a néanmoins pu largement exprimer sa position lors des échanges d'écritures dans le cadre de la présente procédure.

Aucun élément du dossier ne permet de retenir que la décision de licencier la recourante aurait été prise avant la décision querellée. Quant à son allégation concernant une décision de résiliation de ses rapports de service « rendue par oral » par le responsable des ressources humaines au sortir du second entretien de service, au‑delà du fait qu'elle n'est pas étayée, les propos prêtés à ce dernier pourraient, tout au plus, relever d'un comportement informel n'emportant aucune conséquence juridique, dans la mesure où il ne répond pas aux caractéristiques d'une décision au sens de l'art. 4 LPA.

Bien qu'ayant constaté que les plaintes récurrentes pour vol dirigées contre la recourante mettaient à mal la confiance inhérente à la fourniture des prestations d'aide à domicile, l'autorité intimée a au contraire cherché à éviter de la licencier. Elle lui a accordé vainement une dernière chance.

Partant, le droit d'être entendue de la recourante a été respecté, de sorte que le grief soulevé tombe à faux.

5.             La recourante conclut à l'annulation de la décision litigieuse au motif qu'elle serait infondée, subsidiairement au paiement d'une indemnité équivalente à neuf mois de son dernier salaire brut, à savoir CHF 26'914.50.

5.1 Selon l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée dans le cas d’espèce.

5.2 L’IMAD, établissement autonome de droit public, assure des prestations pour le maintien à domicile et l’autonomie des personnes (art. 174A al. 1 de la Constitution de la République et canton de Genève du 14 octobre 2012 - Cst-GE - A 2 00 - disposition entrée en vigueur le 17 octobre 2020 ; art. 1 de la loi sur l'institution de maintien, d'aide et de soins à domicile du 18 mars 2011 - LIMAD - K 1 07).

5.3 Selon l'art. 22 LIMAD, les relations entre l'institution et son personnel sont régies par la loi générale relative au personnel de l’administration cantonale, du pouvoir judiciaire et des établissements publics médicaux du 4 décembre 1997 (LPAC - B 5 05), sous réserve des dispositions spécifiques prévues par règlement interne liées aux missions de l'institution.

5.4 La recourante est soumise au règlement du statut du personnel de l'IMAD du 5 novembre 2012 (ci-après : le statut) qui renvoie également, sauf dérogation, à l'ensemble de la législation cantonale relative au personnel de l'administration cantonale, aux instructions de l'office du personnel de l'État contenues dans le memento ad hoc, au règlement relatif à la protection de la personnalité à l'État de Genève du 12 décembre 2012 (RPPers - B 5 05.10), notamment et, en cas de dispositions lacunaires, à la loi fédérale du 30 mars 1911, complétant le Code civil suisse (CO, Code des obligations - RS 220) à titre de droit public cantonal supplétif.

5.5 Aucune disposition du statut ne décrivant le statut des différents membres du personnel de l'IMAD ou les conditions de fin des rapports de service, ce sont donc les dispositions de la LPAC et du règlement d’application de celle-ci du 24 février 1999 (RPAC - B 5 05.01) qui s'appliquent, dans leur teneur au moment des faits (ATA/1356/2021 du 14 décembre 2021 consid. 7b et les arrêts cités).

5.6 En vertu de l'art. 21 al. 3 LPAC, l'autorité compétente peut résilier les rapports de service du fonctionnaire pour un motif fondé. Elle motive sa décision. Elle est tenue, préalablement à la résiliation, de proposer des mesures de développement et de réinsertion professionnelle et de rechercher si un autre poste au sein de l'administration cantonale correspond aux capacités de l'intéressé.

Il y a motif fondé lorsque la continuation des rapports de service n'est plus compatible avec le bon fonctionnement de l'administration, soit notamment en raison de l'insuffisance des prestations (art. 22 let. a LPAC), l'inaptitude à remplir les exigences du poste (art. 22 let. b LPAC), la disparition durable d'un motif d'engagement (art. 22 let. c LPAC).

5.7 Il y a motif fondé au sens de l'art. 22 LPAC, lorsque la continuation des rapports de service n'est plus compatible avec le bon fonctionnement de l'administration, soit notamment en raison de : l'insuffisance des prestations (let. a) ; l'inaptitude à remplir les exigences du poste (let. b) ; la disparition durable d'un motif d'engagement (let. c). Le motif fondé, au sens de l'art. 22 LPAC, n'implique pas l'obligation pour l'employeur de démontrer que la poursuite des rapports de service est rendue difficile, mais qu'elle n'est plus compatible avec le bon fonctionnement de l'administration (ATA/856/2020 du 8 septembre 2020 consid. 6b). L'intérêt public au bon fonctionnement de l'administration cantonale, déterminant en la matière, sert de base à la notion de motif fondé, lequel est un élément objectif indépendant de la faute du membre du personnel (ATA/493/2021 du 11 mai 2021 consid. 7a ; Mémorial du Grand Conseil 2005-2006/XI A 10420). Le premier cas de figure visé par la loi est aisé à saisir. Le second concerne par exemple un collaborateur incapable de s'adapter à un changement dans la manière d'exécuter sa tâche. Il en va ainsi de collaborateurs incapables de se former à de nouveaux outils informatiques. Le troisième cas concerne par exemple des collaborateurs frappés d'invalidité et, dès lors, durablement incapables de travailler (Rapport de la commission ad hoc sur le personnel de l'État chargée d'étudier le projet de loi modifiant la LPAC du 29 septembre 2015, PL 7'526-F, p. 3).

Au vu de la diversité des agissements susceptibles de constituer une violation des devoirs de service, le Tribunal fédéral admet le recours par le législateur cantonal genevois à des clauses générales susceptibles de saisir tous les agissements et les attitudes qui peuvent constituer des violations de ces devoirs (arrêt du Tribunal fédéral 8C_161/2019 du 26 juin 2020 consid. 4.2.2 et les références citées).

Selon la jurisprudence, les motifs fondés de renvoi des fonctionnaires ou d'employés de l'État peuvent procéder de toutes circonstances qui, selon les règles de la bonne foi, excluent la poursuite des rapports de service, même en l'absence de faute. De toute nature, ils peuvent relever d'événements ou de circonstances que l'intéressé ne pouvait éviter, ou au contraire d'activités, de comportements ou de situations qui lui sont imputables (arrêt du Tribunal fédéral 8C_585/2014 du 29 mai 2015 consid. 5.2).

Des manquements dans le comportement de l'employé ne peuvent constituer un motif de licenciement que lorsqu'ils sont reconnaissables également pour des tiers. Il faut que le comportement de l'employé perturbe le bon fonctionnement de l'entreprise ou qu'il soit propre à ébranler le rapport de confiance avec le supérieur (ATA/493/2021 du 11 mai 2021 consid. 7b et les références citées ; Valérie DÉFAGO GAUDIN, Conflits et fonction publique : instruments, in Jean‑Philippe DUNAND/Pascal MAHON [éd.], Conflits au travail, 2015, pp. 161-162).

5.8 Les membres du personnel sont tenus au respect de l’intérêt de l’État et doivent s’abstenir de tout ce qui peut lui porter préjudice (art. 20 RPAC). L'art. 21 RPAC prévoit que les membres du personnel se doivent, par leur attitude, d’entretenir des relations dignes et correctes avec leurs supérieurs, leurs collègues et leurs subordonnés, de permettre et faciliter la collaboration entre ces personnes (let. a), ainsi que d'établir des contacts empreints de compréhension et de tact avec le public (let. b). Les membres du personnel se doivent, par leur attitude, de justifier et de renforcer la considération et la confiance dont la fonction publique doit être l'objet (let. c). Quant à l'exécution du travail, ils se doivent notamment de remplir tous les devoirs de leur fonction consciencieusement et avec diligence (art. 22 al. 1 RPAC). Le fonctionnaire doit s'acquitter de sa tâche, dans la mesure qui correspond à ses fonctions, en respectant notamment la légalité et l'intérêt public. Le fonctionnaire doit par ailleurs veiller à la conformité au droit de ses actes ; il lui appartient d'informer ses supérieurs des problèmes qui pourraient se poser et des éventuelles améliorations à apporter au service (Pierre MOOR/François BELLANGER/Thierry TANQUEREL, Droit administratif, vol. III, 2e éd., 2018, n° 7.3.3.1).

5.9 L'employeur jouit d'un large pouvoir d'appréciation pour juger si les manquements d'un fonctionnaire sont susceptibles de rendre la continuation des rapports de service incompatible avec le bon fonctionnement de l'administration. Les rapports de service étant soumis au droit public (ATA/1343/2015 du 15 décembre 2015 consid. 8 ; ATA/82/2014 du 12 février 2014 consid. 11 et les références citées), la résiliation est en outre assujettie au respect des principes constitutionnels, en particulier ceux de la légalité (art. 5 al. 1 Cst.), de l’égalité de traitement (art. 8 Cst.), de l’interdiction de l’arbitraire (art. 9 Cst.) et de la proportionnalité (art. 5 al. 2 et 36 al. 3 Cst. ; ATA/993/2021 du 28 septembre 2021 consid. 4e ; ATA/562/2020 du 9 juin 2020 consid. 6e et les références citées).

5.10 En l'espèce, la recourante a fait l'objet de sept dénonciations pour des suspicions de vol par des particuliers aux domiciles desquels elle fournissait des prestations d'aide à domicile pour le compte de l'autorité intimée. Certaines de ces dénonciations ont été suivies de dépôts de mains-courantes ou de plaintes pénales, ayant abouti pour un premier cas à la restitution par la recourante d'un montant annoncé comme dérobé et, dans un autre cas, à une ordonnance pénale, contre laquelle celle-ci a formé opposition.

Il ressort du dossier que les incidents rapportés ne sont pas isolés. Leur constance et leur concordance sont de nature à faire admettre que le comportement de la recourante était problématique, quand bien même elle conteste certains faits reprochés. Tant le nombre important des plaintes (sept), sur une période de trois ans et demi à compter de mai 2019, que l'échec de la dernière chance pouvaient ainsi faire craindre à l'autorité intimée que de nouveaux incidents puissent se reproduire. Le fait que la recourante ait remis en cause la capacité de discernement de certains plaignants – sans étayer ses affirmations – ne change rien à cette conviction. Dans le cas de la bénéficiaire A, qui l'accuse de lui avoir subtilisé par deux fois des pièces contenues dans des rouleaux, le récit de la plaignante est particulièrement articulé. À cela s'ajoute que la recourante a omis sciemment de porter à la connaissance de son employeur la restitution de la somme de CHF 55.- et sa condamnation par ordonnance pénale. On notera enfin qu'elle a fait preuve d'une mauvaise collaboration dans l'établissement des faits en attendant, en dépit des rappels de la chambre de céans, la fin de l'instruction pour produire un seul élément de la procédure pénale, soit un procès-verbal d'une audience pénale en lieu et place d'une copie du dossier pénal comme promis.

Ces circonstances, prises dans leur ensemble, permettent de retenir que la recourante a, par ses agissements, rompu le lien de confiance avec l'autorité intimée et que ceux-là étaient donc incompatibles avec un fonctionnement adéquat, celui‑ci reposant sur la confiance des bénéficiaires de ses prestations d'aide à domicile. C'est à bon droit que l'autorité intimée s'est prévalue d'un tel motif pour procéder à la résiliation de ses rapports de service.

Dès lors que la menace de la résiliation des rapports de service ainsi que de la renonciation à la prise de sanctions à son encontre à la suite de l'entretien du 14 septembre 2022 n'ont pas empêché une nouvelle plainte contre elle, on ne voit pas quelles autres mesures auraient pu être prises à son encontre, de sorte que la décision querellée respecte le principe de proportionnalité.

Au vu de la confirmation de la résiliation des rapports de travail de la recourante, sa réintégration n'est pas envisageable, de sorte qu'il n'y a pas lieu d'entrer en matière sur ses prétentions en indemnisation.

Partant, le grief sera écarté.

À l'aune des faits reprochés à la base de la résiliation des rapports de service, on ne pouvait raisonnablement attendre de l'autorité intimée qu'elle cherchât à maintenir la recourante en son sein. C'est ainsi à juste titre qu'elle n'a pas initié de procédure de reclassement, ce que la recourante ne conteste par ailleurs pas.

En tous points mal fondé, le recours sera rejeté.

6.             Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 1'500.- sera mis à la charge de la recourante, qui succombe (art. 87 al. 1 LPA), et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

Compte tenu des conclusions du recours, la valeur litigieuse est supérieure à CHF 15'000.- (art. 112 al. 1 let. d de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 - LTF - RS 173.110).

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

rejette, dans la mesure de sa recevabilité, le recours interjeté le 22 juin 2023 par A______ contre la décision de l'Institution genevoise de maintien à domicile du 15 mai 2023 ;

met à la charge d'A______ un émolument de CHF 1'500.- ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss LTF, le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière de droit public. Le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral 29, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Arthur GUEORGUIEV, avocat de la recourante ainsi qu'à l'Institution genevoise de maintien à domicile.

Siégeant : Florence KRAUSKOPF, présidente, Jean-Marc VERNIORY, Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, Eleanor McGREGOR, Claudio MASCOTTO, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

J. PASTEUR

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. KRAUSKOPF

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

la greffière :