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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4031/2023

ATA/253/2024 du 27.02.2024 ( DIV ) , ADMIS

Descripteurs : COMPÉTENCE;QUALITÉ POUR RECOURIR;CONTRAT DE DROIT ADMINISTRATIF;LÉGALITÉ
Normes : Cst.5; Cst.68; LPA.60; LOJ.132; LSport.2; LSport.3; LSport.5
Résumé : Recours contre une décision de paiement de la Commune de Genthod pour la location de salles de gymnastique à une association, alors que le contrat qui les liait prévoyait la gratuité. La commune ne prévoyait pas le paiement des frais de location dans un règlement et les contrats prévoyaient la gratuité, de sorte qu’elle ne pouvait pas, à titre rétroactif, demander le remboursement de l’occupation de la salle.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4031/2023-DIV ATA/253/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 27 février 2024

1ère section

 

dans la cause

 

A______ recourant

contre

COMMUNE DE B______ intimée



EN FAIT

A. a. A______ est président du C______ (ci-après : également le club). Il occupe depuis plusieurs années une salle de gymnastique au sein de l’école de la commune de B______ (ci-après : la commune), afin d’y dispenser des cours de basketball.

b. A______ a notamment signé quatre contrats le 15 mai 2023 et un contrat le 31 août 2023 prévoyant la réservation de la salle de gymnastique de l’école de B______ (halle de gym), sise au chemin D______, à B______, les mardis de 16h00 à 18h00, les mercredis de 12h00 à 14h00 et de 19h00 à 20h00, les vendredis de 20h00 à 22h00 et les dimanches de 09h00 à 17h00, pour la durée de l’année scolaire 2023/2024.

Tous les contrats de locations ont été conclus à titre gratuit. En effet, sous « ressource(s) réservée(s) » pour la salle de gymnastique, chaque contrat prévoit le montant de CHF 0.-.

c. Le 25 septembre 2023, le secrétaire général de la commune a adressé un courriel à A______, lui indiquant qu’à la suite de leur séance du 31 août 2023, il était toujours en attente des documents demandés, à savoir les budgets et comptes des trois dernières années et l’extrait du compte bancaire ou postal du C______ pour l’année 2022 et pour le premier trimestre 2023.

d. A______ a répondu par courriel du 15 octobre 2023.

Toute l’énergie de C______ allait à la promotion du basket. Vers la fin de l’année 2022, il avait invité E______, directeur et fondateur de F______, à rejoindre C______ afin de développer des équipes « jeunesse ». Ce dernier était devenu membre du club de basket et avait dispensé des entraînements.

C______ avait décidé de se lier à la renommée de F______ afin d’exploiter son image pour la promotion de ses équipes, ce qui lui avait permis de surmonter les difficultés de recrutement.

C______ était autofinancé et n’avait pas bénéficié des subventions de la commune depuis plusieurs années. Lui-même, en sa qualité de président et d’entraîneur, ne s’était pas versé de salaire outre les frais de déplacement. Les dépenses du club n’étaient pas couvertes par les cotisations des membres et la collaboration avec F______ permettait de soutenir financièrement le club.

e. Par courriel du 19 octobre 2023, le secrétaire général a réitéré sa demande de pièces du 25 septembre 2023, soit les budgets 2022 et 2023, les comptes des trois dernières années et l’extrait du compte bancaire ou postal du C______ pour les années 2022 et 2023. Il a fixé un délai au 3 novembre 2023 à cet effet.

f. Le 3 novembre 2023, E______ a écrit un courriel à l’adjointe au maire afin de solliciter un rendez-vous, qui lui a été refusé par courriel du 7 novembre 2023.

g. Par courrier du 9 novembre 2023, la commune a constaté que A______ renonçait à fournir les documents demandés, de sorte qu’il était retenu qu’une partie de la salle de gymnastique qui lui avait été attribuée en début de saison bénéficiait à une structure privée et non à son club, ce qui impliquait le paiement d’une location annuelle. Se fiant au site internet du C______, elle avait estimé que les cours étaient bien dispensés les mardis et jeudis par le club, de sorte que la location restait gratuite pour ces jours. Les cours du mercredi, du vendredi et du dimanche devaient par contre être facturés au tarif horaire de CHF 12.50, soit un montant total pour la période 2023/2024 de CHF 6'825.-.

Elle a annexé à son courrier un bulletin de paiement sur lequel il était mentionné que la décision était sujette à recours auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) dans un délai de dix jours.

B. a. Par acte du 27 novembre 2023, A______ a formé recours auprès du TAPI contre la lettre du 9 novembre 2023.

La commune avait connaissance de la collaboration entre C______ et F______ depuis le mois de juin 2022. Elle avait d’ailleurs fait appel à cette dernière pour l’organisation d’un tournoi.

Les documents demandés dans le courriel du 19 octobre 2023 portaient sur une période antérieure à son association avec F______ et n’étaient donc pas relevants.

La facture de CHF 6'825.- concernait notamment une période rétroactive (année scolaire 2023). Or, si la commune était en désaccord avec les agissements du club, elle aurait dû annuler les contrats, comme elle avait d’ailleurs pu le faire par le passé pour le créneau horaire des lundis et mercredis.

b. Par jugement du 1er décembre 2023, le TAPI a déclaré irrecevable le recours et l’a transmis à la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) pour raison de compétence.

c. Par courrier du 19 décembre 2023, la commune a conclu au rejet du recours.

Les contrats conclus avec C______ portaient sur toute l’année scolaire. Pour les clubs sans activité lucrative, sa pratique était de ne pas demander de contrepartie financière. Tel n’était cependant pas le cas pour les entités privées à but lucratif.

Les demandes de locations par A______ de la salle de gymnastique avaient fortement augmenté en 2023. C’était alors qu’elle avait été informée de la collaboration entre C______ et F______. Afin de mieux comprendre ce partenariat avec une structure privée non associative, une séance s’était tenue le 31 août 2023, lors de laquelle il avait été demandé à C______ de fournir des pièces relatives à ses finances. L’objectif était de s’assurer que C______ occupait toutes les plages horaires octroyées avec des professeurs payés par le club et que les cotisations payées par les membres étaient bien reversées au club.

C______ n’avait pas coopéré en ne remettant pas les documents demandés, ne permettant ainsi pas de déterminer le problème que pourrait poser le partenariat avec F______. Elle avait fait preuve de patience, accordant plusieurs délais, sans succès. L’envoi d’une facture plutôt que l’annulation des contrats était au demeurant proportionné, car il permettait de maintenir les activités en lien avec F______.

d. A______ a répliqué par courrier du 13 janvier 2024.

Le club ne percevait aucune subvention de la commune et ne subsistait que grâce aux cotisations de ses membres. Le rapport de confiance qui existait avec la commune depuis plus de dix ans avait été amoindri par la venue d’un autre club, ce qui avait conduit à l’annulation de tranches horaires pour C______.

Il n’avait jamais signé de contrat de location payante et la commune ne l’avait pas informé sur les tarifs qu’elle comptait appliquer. Elle transformait ainsi des contrats gratuits en des contrats payants. Or, s’il avait su qu’un tel montant lui serait réclamé, il ne les aurait pas conclus. Aucun document n’avait d’ailleurs été demandé à C______ lors de leur conclusion en mai 2023.

Le club avait investi beaucoup d’argent pour préparer la saison. Selon l’issue du litige, il demanderait une réparation de CHF 5'000.-.

e. Sur ce, les parties ont été informées, le 16 janvier 2024, que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1.             1.1 La chambre administrative examine d’office sa compétence (art. 1 al. 2, art. 6 al. 1 let. b et art. 11 al. 2 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

1.2 La chambre administrative est l'autorité supérieure ordinaire de recours en matière administrative (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05). Le recours à la chambre administrative est ouvert contre les décisions des autorités et juridictions administratives au sens des art. 4, 4A, 5, 6 al. 1 let. a et e et 57 LPA. Sont réservées les exceptions prévues par la loi (art. 132 al. 2 LOJ).

1.3 En vertu de l'art. 4 al. 1 LPA, sont considérées comme des décisions au sens de l'art. 1 LPA les mesures individuelles et concrètes prises par l'autorité dans les cas d'espèce fondées sur le droit public fédéral, cantonal, communal et ayant pour objet de créer, de modifier ou d'annuler des droits ou des obligations (let. a), de constater l'existence, l'inexistence ou l'étendue de droits, d'obligations ou de faits (let. b), de rejeter ou de déclarer irrecevables des demandes tendant à créer, modifier, annuler ou constater des droits ou obligations (let. c). Lorsqu’une autorité mise en demeure refuse sans droit de statuer ou tarde à se prononcer, son silence est assimilé à une décision (al. 4).

Pour qu’un acte administratif puisse être qualifié de décision, il doit revêtir un caractère obligatoire pour les administrés en créant ou constatant un rapport juridique concret de manière contraignante. Ce n’est pas la forme de l’acte qui est déterminante, mais son contenu et ses effets (ATA/327/2023 du 28 mars 2023 consid. 2.1 et les arrêts cités).

En droit genevois, la notion de décision est calquée sur le droit fédéral (ATA/649/2023 du 20 juin 2023 consid. 1.3 ; ATA/141/2020 du 11 février 2020 consid. 1b et les arrêts cités). Toute décision administrative au sens de l’art. 4 LPA doit avoir un fondement de droit public. Il ne peut en effet y avoir décision que s’il y a application, au travers de celle-ci, de normes de droit public (Jacques DUBEY/Jean-Baptiste ZUFFEREY, Droit administratif général, 2014, p. 314
n. 857 ; Pierre MOOR/Étienne POLTIER, Droit administratif, vol. 2, 3e éd., 2011, p. 194 n. 2.1.1.1). De nature unilatérale, une décision se réfère à la loi dont elle reproduit le contenu normatif de la règle (Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2e éd., 2018, p. 285 n. 798 ; MOOR/POLTIER, op. cit., p. 174 n. 2.1.1.1). Une décision tend à modifier une situation juridique préexistante. Il ne suffit pas que l’acte visé ait des effets juridiques, encore faut-il que celui-ci vise des effets juridiques. Sa caractéristique en tant qu’acte juridique unilatéral tend à modifier la situation juridique de l’administré par la volonté de l’autorité, mais sur la base et conformément à la loi (ATA/29/2023 du 17 janvier 2023 consid. 3b et l’arrêt cité ; Jacques DUBEY/Jean-Baptiste ZUFFEREY, op. cit., p. 320 n. 876).

1.4 À Genève, chaque commune constitue une corporation de droit public (art. 1 al. 2 de la loi sur l'administration des communes du 13 avril 1984 [LAC - B 6 05]).

1.5 La chambre administrative connaît en instance cantonale unique des actions fondées sur le droit public qui ne peuvent pas faire l'objet d'une décision au sens de l'art. 132 al. 2 LOJ et qui découlent d'un contrat de droit public (art. 132 al. 3 LOJ). L'action contractuelle de l'art. 132 al. 3 LOJ est une voie de droit réservée au contentieux découlant des contrats de droit public (ATA/1301/2015 du 8 décembre 2015 consid. 2b et les références citées). Pour que l'action soit recevable, il faut ainsi que les conclusions prises par la personne concernée ne puissent faire l'objet d'une décision (ATA/1139/2018 du 30 octobre 2018 consid. 3b ; ATA/119/2013 du 26 février 2013 consid. 2).

1.6 Selon la doctrine, le contrat de droit administratif est un acte régi par le droit public qui résulte de la concordance de deux ou plusieurs manifestations de volonté concrétisant la loi dans un cas d'espèce, ayant pour objet l'exécution d'une tâche publique et visant à produire des effets bilatéraux obligatoires. Le contrat de droit administratif est ainsi une forme de contrat de droit public. Le contrat de droit administratif se caractérise, d'une part, par sa nature bilatérale, ce qui le distingue de la décision, et, d'autre part, par son inscription dans l'exécution d'une tâche publique prévue par la loi, ce qui le distingue du contrat de droit privé (Thierry TANQUEREL, op. cit., n. 970 et 971).

1.7 Une fois établi qu'une relation avec l'administration est de nature bilatérale, donc contractuelle, il faut encore déterminer si elle relève du droit public ou du droit privé. Le critère privilégié par la jurisprudence est celui de l'objet du contrat, considéré sous l'angle des intérêts en présence, et de sa fonction. Il s'agit d'un contrat de droit public lorsque l'intérêt public est directement en jeu, à savoir lorsque le contrat a pour objet direct l'exécution d'une tâche publique ou qu'il concerne un objet réglementé par le droit public (Thierry TANQUEREL, op. cit., n. 978 et 981).

1.8 Le Tribunal fédéral a retenu dans le cadre d’une affaire genevoise que l’avenant d’un contrat conclu entre une association, à savoir une crèche, qui n’était pas délégataire du pouvoir public, mais à laquelle certaines tâches publiques avaient été déléguées, et des particuliers qui contestaient le barème appliqué par cette dernière relevait du droit public (arrêt du Tribunal fédéral 2C_849/2021 du 17 janvier 2023).

1.9 Conformément à l’art. 68 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst - RS 101), la Confédération encourage le sport, en particulier la formation au sport (let. a) et peut légiférer sur la pratique du sport par les jeunes et déclarer obligatoire l’enseignement du sport dans les écoles (let. c).

Selon le message du Conseil fédéral du 11 novembre 2009, les effets positifs du sport, au-delà de l’activité sportive en soi, étant nombreux, il est dans l’intérêt de la société de l’encourager. L’encouragement du sport est donc une tâche d’intérêt public à laquelle la Confédération peut apporter une contribution utile dans des domaines choisis (FF 2009 7401 ss).

2.             En l’espèce, l’objet des contrats conclus en mai et août 2023 entre la commune et le recourant porte sur l’occupation de la salle de gymnastique de l’école de B______ pour y exercer une activité physique, le basket.

Ces contrats lient un particulier, a priori une association, à une entité de droit public, de sorte que, conformément à la jurisprudence du Tribunal fédéral, ils relèvent du droit public.

La question de savoir si l’activité sportive qui est exercée par une association dans des locaux publics, en dehors-du cadre scolaire, est d’intérêt public peut rester ouverte.

La facture adressée par la commune le 9 novembre 2023 doit être considérée comme une décision au sens de l’art. 4 LPA, dans la mesure où elle émane d’une entité publique et déploie des effets sur la situation de C______.

La chambre administrative est ainsi compétente pour se prononcer sur le recours du 25 novembre 2023.

3.             Se pose la question de la qualité pour recourir de A______.

3.1 À teneur de l'art. 60 LPA, ont qualité pour recourir les parties à la procédure qui a abouti à la décision attaquée (let. a) et toute personne qui est touchée directement par une décision et a un intérêt personnel digne de protection à ce qu'elle soit annulée ou modifiée (let. b).

3.2 La chambre administrative a déjà jugé que les let. a et b de la disposition précitée doivent se lire en parallèle : ainsi, le particulier qui ne peut faire valoir un intérêt digne de protection ne saurait être admis comme partie recourante, même s'il était partie à la procédure de première instance (ATA/577/2014 du 29 juillet 2014 et les références citées).

3.3 En l’espèce, A______ s’est présenté comme président de C______, ce qui n’est pas contesté par la commune qui lui a d’ailleurs adressé la décision litigieuse et toutes ses communications. Les contrats précités ont également été conclus avec A______, de sorte qu’il convient de retenir qu’il est compétent pour représenter en personne les intérêts de C______, dont la forme juridique n’est pas déterminée, si ce n’est que son président dit qu’elle est sans but lucratif, puisqu’elle ne vit que grâce aux cotisations de ses membres.

Sa qualité pour recourir doit dès lors être admise.

Pour le reste, le délai de recours de 30 jours de l’art. 62 al. 1 let. a LPA a été respecté, étant précisé qu’une fausse indication à cet égard, tout comme sur la juridiction compétente pour connaître du recours, dans la décision attaquée (à savoir dix jours et le TAPI), ne saurait porter préjudice au recourant.

Le recours est recevable.

4.             Le recours devant la chambre administrative peut être formé pour violation du droit y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (art. 61 al. 1 let. a LPA), ainsi que pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (art. 61 al. 1 let. b LPA). Les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA).

5.             Selon l'art. 5 al. 1 de la Cst., le droit est la base et la limite de l'activité de l'État. Le principe de la légalité se compose de deux éléments : le principe de la suprématie de la loi et le principe de l'exigence de la base légale. Le premier signifie que l'autorité doit respecter l'ensemble des normes juridiques ainsi que la hiérarchie des normes. Le second implique que l'autorité ne peut agir que si la loi le lui
permet ; son action doit avoir un fondement dans une loi (Pierre MOOR/Alexandre FLÜCKIGER/Vincent MARTENET, Droit administratif, vol. I, 3e éd., 2012, p. 621ss, 624 et 650 ; Thierry TANQUEREL, op. cit., n. 448, 467 ss et 476 ss).

5.1 Si la base légale délègue à l'organe exécutif la compétence d'établir une contribution, la norme de délégation ne peut constituer un blanc-seing en faveur de cette autorité; elle doit indiquer, au moins dans les grandes lignes, le cercle des contribuables, l'objet et la base de calcul de cette contribution. Sur ces points, la norme de délégation doit être suffisamment précise (ATF 143 I 220 consid. 5.1.1 ; 131 II 271 consid. 6.1). Il importe en effet que l'autorité exécutive ne dispose pas d'une marge de manoeuvre excessive et que les citoyens puissent cerner les contours de la contribution qui pourra être prélevée sur cette base (ATF 143 I 220 consid. 5.1 ; 143 I 227 consid. 4.2 ; 136 I 142 consid. 3.1)

5.2 Le principe de la couverture des frais s'applique aux contributions causales dépendantes des coûts, pour lesquelles il n'existe aucune base légale formelle (suffisamment déterminée) ou pour lesquelles le législateur a exprimé clairement ou tacitement que la contribution qu'il doit fixer est dépendante des coûts. Ce principe implique que le produit de l'émolument ne dépasse pas, ou seulement dans une mesure minime, l'ensemble des coûts engendrés par la branche, ou subdivision, concernée de l'administration, y compris, dans une mesure appropriée, les provisions, les amortissements et les réserves (ATF 126 I 180 consid. 3a/aa ; Adrian Hungerbühler, Grundsätze des Kausalabgabenrechts, ZBl 2003 p. 505 ss, p. 520/521).

S'il n'est pas nécessaire que l'émolument corresponde exactement au coût de l'opération administrative visée, il doit toutefois être établi selon des critères objectifs et s'abstenir de créer des différences qui ne seraient pas justifiées par des motifs pertinents. Le taux de l'émolument ne doit notamment pas empêcher ou rendre difficile à l'excès l'utilisation de certaines institutions (ATF 120 Ia 171 consid. 2a ; 106 Ia 241 consid. 3b et 249 consid. 3a ; Adrian Hungerbühler, op. cit., p. 522 ss).

Les contributions causales constituent la contrepartie d'une prestation spéciale ou d'un avantage particulier appréciable économiquement accordé par l'État. Elles reposent ainsi sur une contre-prestation étatique qui en constitue la cause (ATF 135 I 130 consid. 2 ; Ernst BLUMENSTEIN/Peter LOCHER, System des schweizerischen Steuerrechts, p. 2, 4 s. ; Ernst HÖHN/Robert WALDBURGER, Steuerrecht, vol. I, 9e éd., 2000, § 1 n.3 s. ; Arian HUNGERBÜHLER, op. cit., p. 505 ss, p. 507 ; Xavier OBERSON, Droit fiscal suisse, 4e éd., 2012, § 1 n° 5, 6, 10). Généralement, les contributions causales se subdivisent en trois sous‑catégories : les émoluments, les charges de préférence et les taxes de remplacement (ATF 135 I 130 consid. 2 ; Ernst BLUMENSTEIN/Peter LOCHER, op. cit., p. 2 ; Xavier OBERSON, op. cit., § 1 n.6). L'émolument représente la contrepartie de la fourniture d'un service par l'État – émolument administratif – ou de l'utilisation d'une infrastructure publique – émolument d'utilisation. Il en existe d'autres sortes, telles que les taxes régaliennes (ATF 135 I 130 consid. 2 ; Ernst BLUMENSTEIN/ Peter LOCHER, op. cit., p. 2 s. ; Xavier OBERSON, op. cit., § 1 n° 7).  

5.3 La loi sur le sport du 14 mars 2014 (LSport - C 1 50) définit le rôle et les tâches du canton en matière de politique du sport (art. 2 LSport).

Selon l’art. 3 al. 2 LSport, le canton et les communes encouragent et soutiennent les activités physiques et sportives dans la mesure où cette tâche n’est pas assumée par la Confédération.

Le canton collabore notamment avec les communes pour soutenir les efforts des organisations sportives en matière d'activités physiques et sportives, notamment dans le domaine de la formation et favoriser le développement de la pratique individuelle des activités physiques et sportives (art. 5 al. 2 let. a et b LSport).

Conformément à l’art. 17 al. 3 LSport, le canton et les communes mettent les infrastructures sportives sous leur responsabilité respective à disposition, sous certaines conditions, des organisations sportives. Les frais liés à leur utilisation peuvent être facturés.

5.4 Dans la mesure où la commune a facturé la location de la salle de gymnastique, cette prestation doit être qualifiée d’émolument d’utilisation. Reste à déterminer si son principe et sa quotité reposent sur une base légale suffisante. Le canton de Genève, s’il a légiféré sur la possibilité de facturer les frais relatifs à l’utilisation des infrastructures sportives, ne prévoit pas de tarifs dans une loi en matière de location des bâtiments publics pour la pratique du sport. La loi se contente d’indiquer que les frais liés à leur utilisation peuvent être facturés, sans préciser à quelles conditions ni si les frais peuvent être mis à la charge d’un particulier, étant précisé qu’elle se réfère uniquement à des « organisations sportives ». La commune de B______ n’a de son côté a priori pas usé de son pouvoir législatif pour édicter un règlement de location et d’utilisation de la salle de gymnastique de l’école et ne le soutient pas. Les conditions ainsi que les tarifs appliqués à la location de cette salle ne résultent dès lors pas de la loi ou d’un règlement, mais semblent ressortir plutôt de la pratique de la commune. Cette dernière n’a à aucun moment indiqué que l’utilisation de la salle de gymnastique serait payante à certaines conditions.

De plus, la commune a eu des suspicions d’un partenariat entre C______ et F______ courant 2023, ce qui l’a conduite à organiser une séance le 31 août 2023. Le même jour, elle a néanmoins décidé de conclure un nouveau contrat à titre gratuit avec C______ portant sur l’occupation de la salle de gymnastique. Or, si elle nourrissait des doutes quant à l’utilisation de la salle par un tiers, il lui appartenait, par précaution, d'attendre la réponse de A______ sur ce point avant de conclure ce nouveau contrat ou à tout le moins, et vu les contraintes de temps liées à la rentrée, de ne pas augmenter les plages horaires de réservation avant d’avoir obtenu ces précisions.

Ainsi, c’est en l’absence de base légale suffisante que la commune a facturé, pour un montant qui ne ressort d’aucun règlement, la location de la salle de gymnastique.

Les contrats conclus entre le recourant et la commune ne permettent pas plus à cette dernière de facturer l’occupation des locaux, puisqu’ils indiquent bien qu’ils le sont à titre gratuit.

Ainsi, en l’absence de base légale ou contractuelle, c’est à tort que la commune a réclamé au recourant le paiement de CHF 6'825.- afférant à la location des locaux pour l’année 2023-2024.

Il résulte de ce qui précède que le recours, bien fondé, sera admis et la décision attaquée annulée.

6.             Le recourant obtenant gain de cause, aucun émolument ne sera mis à sa charge
(art. 87 al. 1 LPA). Aucune indemnité de procédure ne lui sera allouée, ce dernier, agissant en personne et n’alléguant pas avoir exposé de frais pour sa défense
(art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 27 novembre 2023 par A______ contre la décision de la commune de B______ du 9 novembre 2023 ;

au fond :

l’admet ;

annule la décision de la commune de B______ du 9 novembre 2023 ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument, ni alloué d'indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à A______ ainsi qu'à la commune de B______.

Siégeant : Eleanor McGREGOR , présidente, Valérie LAUBER, juge, Louis PEILA, juge suppléant.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. SCHEFFRE

 

 

la présidente siégeant :

 

 

E. McGREGOR

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :