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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/907/2022

ATA/216/2024 du 13.02.2024 sur JTAPI/1297/2022 ( PE ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/907/2022-PE ATA/216/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 13 février 2024

2ème section

 

dans la cause

 

A______ recourante
représentée par Me Fernando Henrique FERNANDES DE OLIVEIRA, avocat

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS intimé

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 29 novembre 2022 (JTAPI/1297/2022)


EN FAIT

A. a. A______, née le ______ 1981, est ressortissante brésilienne et portugaise.

b. Le 6 janvier 2012, alors qu'elle ne possédait que la nationalité brésilienne, elle s'est mariée au Portugal avec B______, ressortissant portugais.

c. Le 29 mai 2020, A______ a obtenu la nationalité portugaise. Son nouveau passeport lui a été délivré le 7 juillet 2020 et est valable jusqu'au 7 juillet 2025.

B. a. À partir du 18 août 2013, A______ a été mise au bénéfice d'une autorisation de séjour de courte durée UE/AELE au titre du regroupement familial, puis, dès le 4 août 2014, d'une autorisation de séjour UE/AELE afin de vivre auprès de son époux. Le couple vivait dans le canton de Vaud.

b. Le 9 novembre 2016, le Tribunal d'arrondissement de Lausanne a statué par voie de mesures protectrices de l'union conjugale suite à la requête déposée par A______ le 13 septembre 2016, et a notamment autorisé les époux à vivre séparés pour une durée indéterminée et attribué le domicile conjugal à la précitée.

c. Le 31 octobre 2017, elle a déposé une demande de changement de canton en vue de s'établir à Genève. Elle indiquait être séparée et vivre à Genève depuis le 27 octobre 2017.

d. Le 22 novembre 2017, le service de la population du canton de Vaud (ci‑après : SPOP) a révoqué l'autorisation de séjour UE/AELE de A______ et a préavisé favorablement la poursuite de son séjour en Suisse ainsi que la délivrance d'une autorisation de séjour annuelle suite à la dissolution de l'union conjugale au sens de l'art. 77 al. 1 let. b de l'ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201) sous l'angle des violences conjugales. Il en a informé l'office cantonal de la population et des migrations (ci-après: OCPM) de Genève le 22 décembre 2017.

e. Par courrier du 4 juillet 2018, l'OCPM a informé A______ que sa demande de changement de canton était suspendue jusqu'à ce que le secrétariat d'État aux migrations (ci-après: SEM) statue sur son cas.

f. Par formulaire daté du 1er octobre 2019, elle a sollicité la délivrance d'une autorisation de séjour pour activité lucrative indépendante.

g. Par décision du 10 novembre 2020, le SEM a refusé de donner son approbation à la délivrance d'une autorisation de séjour suite à la dissolution de l'union conjugale en faveur de A______ et a prononcé son renvoi de Suisse.

Elle était entrée en Suisse en tant que ressortissante brésilienne et depuis l'acquisition de la nationalité portugaise, elle n'avait pas fait usage de son droit à la libre circulation des personnes. L'élément d'extranéité faisait donc défaut et elle ne pouvait se prévaloir d'un droit originaire au sens de l’accord du 21 juin 1999 entre la Confédération suisse d'une part, et la Communauté européenne et ses États membres, d'autre part, sur la libre circulation des personnes (ALCP – RS 0.142.112.681) pour prétendre à la poursuite de son séjour en Suisse. Elle n'entrait de toute façon pas dans une des différentes situations de libre circulation prévues par l'accord. Elle percevait des prestations de l'assistance publique dans le canton de Genève depuis le 1er novembre 2017, sans interruption, et avait précédemment perçu des prestations financières de l'assistance publique, entre août 2016 et octobre 2017, lorsqu'elle résidait dans le canton de Vaud. L'emploi qu'elle avait occupé en 2017 auprès de la société C______ devait être considéré comme accessoire au regard du salaire mensuel de CHF 890.- qu'elle en tirait en complément de l'aide sociale qu'elle percevait. En outre, elle s'était retrouvée en incapacité de travail dès le 9 janvier 2020 en raison de maladie et aucune demande de rente de l'assurance‑invalidité (ci-après : AI) n'avait été déposée.

Suite au retrait du recours interjeté par A______ contre cette décision, celle-ci est entrée en force.

h. Le 25 novembre 2020, A______ a formulé une demande de rente AI auprès de l'office cantonal des assurances sociales (ci‑après : OCAS).

i. Le 9 février 2021, A______ a sollicité de l'OCPM de pouvoir rester en Suisse durant l'instruction de sa demande de rente AI.

j. Par décision du 7 septembre 2021, l'OCAS a rejeté sa demande.

k. Par acte du 8 octobre 2021, A______ a formé recours contre la décision précitée auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après: la chambre des assurances sociales).

l. Le 10 décembre 2021, l'OCPM l'a informée de son intention de refuser sa requête du 9 février 2021 et de prononcer son renvoi de Suisse, lui impartissant un délai de 30 jours pour faire valoir ses observations.

m. Le 11 janvier 2022, A______ a transmis ses observations à l'OCPM. Elle sollicitait notamment un délai supplémentaire, dans la mesure où elle avait formé recours contre la décision de l'OCAS auprès de la chambre des assurances sociales, dont la décision devait être connue sous peu, pour se déterminer sur sa requête d'autorisation de séjour, ce d'autant plus qu'elle avait sollicité des examens médicaux supplémentaires.

n. Par arrêt du 1er février 2022 (ATAS/68/2022), la chambre des assurances sociales a annulé la décision du 7 septembre 2021 de l'OCAS et lui a renvoyé le dossier pour instruction complémentaire et nouvelle décision.

o. Par décision du 15 février 2022, l'OCPM a rejeté la demande du 9 février 2021 de A______ et a prononcé son renvoi de Suisse.

La nécessité d'attendre la décision de la chambre des assurances sociales n'était pas déterminante dans la présente procédure, dès lors qu'elle était entrée et avait séjourné en Suisse dans le cadre du regroupement familial auprès de son époux de nationalité portugaise, alors qu'elle était de nationalité brésilienne. Elle avait acquis en mai 2020 la nationalité portugaise. Dans sa décision du 10 novembre 2020, le SEM avait constaté, sous l'angle de l'ALCP, qu'elle ne remplissait pas les conditions en lien avec le statut de travailleur UE/AELE, faute d'exercer un emploi lui permettant d'activer ledit accord. Cette décision n'avait pas été contestée. Il ne pouvait dès lors qu'être constaté que l'intéressée n'avait pas séjourné en Suisse dans le cadre de l'ALCP et qu'elle n'avait pas activé le statut de travailleur. Elle n'avait donc jamais bénéficié des droits conférés aux travailleurs selon cet accord et ne pouvait donc pas se prévaloir du droit de demeurer en Suisse sur cette base.

Aucune prise d'emploi depuis l'acquisition de sa nationalité portugaise ne ressortait du dossier. Elle émargeait à l'aide sociale depuis le 1er décembre 2017, alors qu'elle était encore exclusivement de nationalité brésilienne. Elle n'avait ainsi pas démontré qu'elle avait vécu en Suisse au titre de sa nationalité portugaise tout en occupant un emploi au sens de l'ALCP.

Concernant les examens médicaux supplémentaires sollicités dans le cadre du recours auprès de la chambre des assurances sociales, sa présence en Suisse serait possible dans le cadre d'un éventuel délai de départ prolongé ou encore dans le cadre de séjour de 90 jours non soumis à autorisation. En outre, une éventuelle rente AI pourrait le cas échéant être exportée au Portugal et elle pourrait continuer de se faire représenter par un avocat durant la procédure de recours.

Enfin, aucun élément ne démontrait que sa situation relevait d'un cas de rigueur au sens de l'art. 20 de l'ordonnance sur l’introduction progressive de la libre circulation des personnes entre, d’une part, la Confédération suisse et, d’autre part, la Communauté européenne et ses États membres, ainsi qu’entre les Etats membres de l’Association européenne de libre-échange du 22 mai 2002 (OLCP – RS 142.203), ce d'autant que le SEM avait déjà statué sur celle-ci. Elle ne pouvait pas non plus se prévaloir du droit au respect de la vie privée au sens de l'art. 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101), dès lors que son séjour autorisé en Suisse était inférieur à dix ans.

C. a. Par acte du 18 mars 2022, A______ a formé recours auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après: TAPI) contre la décision précitée, concluant, à titre préalable, à ce que sa comparution personnelle soit ordonnée et, à titre principal, à l'annulation de la décision, cela fait à ce qu'il soit ordonné à l'OCPM de lui octroyer une autorisation de séjour et de soumettre son dossier au SEM avec un préavis positif.

Elle était en Suisse depuis de nombreuses années et y avait régulièrement travaillé. Elle souffrait de divers problèmes de santé qui l'avaient poussée à solliciter une rente AI. Sa situation était actuellement en cours de clarification auprès de l'OCAS. Dès lors, il incombait l'OCPM de lui octroyer une autorisation de séjour jusqu'à droit connu sur sa demande de rente AI.

Les violences qu'elle avait subies de la part de son ex-époux ne s'étaient pas limitées à un acte isolé, mais avaient consisté en des violences morales et physiques durant de nombreux mois. Ces actes de violence étaient démontrés par les photographies produites, ainsi que par les certificats d'arrêt de travail d'août 2016. Sa situation personnelle ne s'était pas améliorée depuis. Vu l'impact psychologique des violences et son état de santé fragile, un renvoi devait être considéré comme un déracinement.

b. Le 17 mai 2022, l'OCPM a conclu au rejet du recours.

A______ vivait en Suisse depuis le 18 août 2013. Par décision du 10 novembre 2020, désormais entrée en force et exécutoire, le SEM avait refusé de donner son approbation à la prolongation de son titre de séjour suite à la dissolution de l'union conjugale.

À supposer que A______ pût se prévaloir de l'ALCP, puisqu'elle était au départ uniquement ressortissante brésilienne, n'avait acquis la nationalité portugaise qu'une fois en Suisse et y était venue dans le cadre du regroupement familial, elle n'entrait dans aucune des situations visées par l'ALCP.

Elle avait exercé en Suisse une activité accessoire ne lui permettant pas de prévaloir d'un statut antérieur de travailleuse salariée. Elle avait eu recours à l'aide sociale de manière ininterrompue depuis le 1er décembre 2017 et se trouvait en incapacité de travail pour des raisons de maladie. Or, la procédure AI n'était pas déterminante, étant rappelé qu'une éventuelle rente AI serait exportable au Portugal. Enfin, sa situation ne révélait pas un cas de rigueur ou un obstacle au renvoi.

c. Par jugement du 29 novembre 2022, le TAPI a rejeté le recours.

Elle bénéficiait de l'aide sociale depuis sa séparation, soit depuis août 2016. Son activité professionnelle devait ainsi être considérée comme marginale et accessoire, vu le nombre réduit d'heures de travail et le faible montant qu'elle en retirait. Elle n'avait ainsi pas le statut de « travailleur » au moment de la survenance de son incapacité totale de travailler et ne pouvait ainsi pas se prévaloir du droit de demeurer en Suisse sur cette base. Elle n'avait de plus jamais exercé d'activité professionnelle une fois sa nationalité portugaise obtenue, et ne rentrait dans aucune des autres hypothèses prévues par l'ALCP.

Aucun motif important ne commandait que A______ pût demeurer en Suisse. La question de sa situation personnelle sous l'angle d'un cas de rigueur, y compris les conséquences traumatiques des violences conjugales qu'elle avait subies, avait déjà été examinée en détail par le SEM, lequel avait conclu que sa situation n'était pas assimilable à un cas d'une extrême gravité par décision du 20 novembre 2020, entrée en force. Rien ne laissait apparaître que la situation se serait modifiée depuis le prononcé de la décision du SEM. Enfin, les éventuelles rentes d’invalidité qui lui seraient versées en cas de décision positive de l'OCAS seraient exportables au Portugal.

D. a. Par acte posté le 16 janvier 2023, A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de Justice (ci‑après : la chambre administrative) contre le jugement précité, concluant à être entendue, à l'annulation du jugement attaqué, à la prolongation de son autorisation de séjour ainsi qu'à la mise à la charge de l'État des frais de la procédure.

Le jugement attaqué constatait les faits de manière inexacte ou incomplète, dans la mesure notamment où il passait sous silence son activité professionnelle avant de bénéficier de l'aide sociale, car elle avait travaillé plus longtemps que le seuil requis de deux ans requis par l'art. 2 § 1 let. b du règlement 1251/70 de la Commission européenne, du 29 juin 1970, relatif au droit des travailleurs de demeurer sur le territoire d'un État membre après y avoir occupé un emploi (ci-après : règlement 1251/70), ne considérant que la période immédiatement antérieure.

Il fallait prendre en compte ses problèmes de santé tant psychiques que somatiques du point de vue du cas de rigueur. Elle se trouvait dans une situation de migration de longue durée, son séjour en Suisse avoisinant les dix ans. Elle n'avait plus d'attaches ni au Brésil ni au Portugal, et ne disposait d'endroit où se loger dans aucun de ces deux pays. Elle participait actuellement à la vie sociale locale, notamment par le partage de sa culture d'origine. Un refus de prolonger son autorisation serait disproportionné. Enfin, au vu de ses problèmes de santé, un renvoi serait inexigible.

b. Le 24 avril 2023, l'OCPM a conclu au rejet du recours.

La recourante ne pouvait se prévaloir de l'ALCP dès lors que depuis l'acquisition de sa nationalité européenne en 2020, elle n'avait pas exercé d'activité lucrative propre à lui conférer le statut de travailleuse. Si des motifs médicaux pouvaient certes conduire à retenir un cas de rigueur ou l'inexigibilité d'un renvoi, la recourante ne démontrait pas qu'elle n'aurait pas accès aux soins nécessaires et adéquats au Portugal. Une éventuelle rente AI serait exportable au Portugal. Pour le surplus, rien ne permettait de s'écarter des conclusions du SEM au sujet des violences conjugales comme motif de cas de rigueur.

c. Le 10 mai 2023, le juge délégué a fixé aux parties un délai au 9 juin 2023 pour formuler toutes requêtes ou observations complémentaires, après quoi la cause serait gardée à juger.

d. Le 30 mai 2023, l'OCPM a indiqué ne pas avoir de requêtes ni d'observations à formuler.

e. La recourante ne s'étant pas manifestée, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10).

2.             La recourante sollicite son audition.

2.1 Garanti à l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d’être entendu comprend notamment le droit pour l’intéressé d’offrir des preuves pertinentes, d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes et de participer à l’administration des preuves essentielles lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 145 I 73 consid. 7.2.2.1). Le juge peut cependant renoncer à procéder à des mesures d’instruction lorsque les preuves administrées lui ont permis de forger sa conviction et que, procédant à une appréciation anticipée des preuves qui lui sont encore proposées, il a la certitude que ces dernières ne pourraient l’amener à modifier son opinion (ATF 145 I 167 consid. 4.1). Le droit d’être entendu découlant de l’art. 29 Cst. ne garantit pas, de façon générale, le droit d’être entendu oralement (ATF 140 I 68 consid. 9.6.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_67/2023 du 20 septembre 2023 consid. 3.1).

2.2 En l’espèce, la recourante a eu l’occasion d’exposer ses arguments et de produire les pièces qu’elle jugeait nécessaires pour appuyer son recours, tant devant le TAPI que devant la chambre de céans. Elle n’explique pas en quoi son audition serait de nature à apporter des éléments utiles à l’issue du litige, si ce n'est pour étayer au besoin les affirmations contenues dans son acte de recours et non prouvés par pièces, comme la difficulté de se réintégrer au Portugal ou encore le fait qu'elle n'a plus d'amis qu'en Suisse. Ce dernier point pouvait être prouvé par pièces : la recourante annonçait du reste vouloir produire différentes attestations de moralité, qu'elle n'a cependant jamais communiquées à la chambre de céans depuis le dépôt de son recours en janvier 2023. Quant au premier point, le fait de réitérer ses déclarations oralement ne lui permettrait pas de les prouver davantage. Il ne sera donc pas donné suite à la demande de la recourante, et un éventuel grief de violation du droit d’être entendu par le TAPI sera en tant que de besoin écarté, pour les mêmes motifs.

3.             Le litige porte sur le refus de l'OCPM de renouveler l'autorisation de séjour de la recourante, ainsi que sur son renvoi de Suisse.

3.1 Le 1er janvier 2019 est entrée en vigueur une modification de la loi sur les étrangers du 16 décembre 2005 (LEtr), qui a alors été renommée loi fédérale sur les étrangers et l'intégration (LEI – RS 142.20), et de l'ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201). Conformément à la règle générale posée à l'art. 126 al. 1 LEI, c'est le nouveau droit matériel qui est applicable en la cause, dès lors que l’OCPM a informé la recourante de son intention de ne pas prolonger son autorisation de séjour le 10 décembre 2021 (arrêts du Tribunal fédéral 2C_145/2022 du 6 avril 2022 consid. 5 ; 2C_586/2020 du 26 novembre 2020 consid. 3.1 et les arrêts cités).

3.2 Le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation, ainsi que pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (art. 61 al. 1 LPA). La chambre administrative n'a toutefois pas compétence pour apprécier l'opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), à savoir notamment s'il s'agit d'une mesure de contrainte prévue par le droit des étrangers (art. 10 al. 2 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10), hypothèse non réalisée en l'espèce.

3.3 L'ALCP, entré en vigueur pour la Suisse le 1er juin 2002, est applicable aux ressortissants des pays membres de l'UE, dont fait partie le Portugal, et de l'AELE et aux membres de leur famille, pour autant que le droit national – à savoir la LEI et ses ordonnances d'exécution, en particulier l'OASA – ne soit pas plus favorable ou que l'ALCP n'en dispose pas autrement (art. 12 ALCP ; art. 2 al. 2 et 3 LEI).

Il se justifie par conséquent d'examiner la situation juridique de la recourante, qui possède depuis 2020 la nationalité portugaise, sous l'angle de l'ALCP et de la LEI.

3.4 Les autorisations de séjour de courte durée, de séjour et frontalières UE/AELE peuvent être révoquées ou ne pas être prolongées, si les conditions requises pour leur délivrance ne sont plus remplies (art. 23 al. 1 OLCP).

3.5 Les droits d'entrée, de séjour et d'accès à une activité économique conformément à l'ALCP, y compris le droit de demeurer sur le territoire d'une partie contractante après la fin d'une activité économique, sont réglés par l'annexe I de l'accord (art. 3, 4 et 7 let. c ALCP).

3.5.1 Selon l'art. 6 § 1 annexe I ALCP, le travailleur salarié ressortissant d'une partie contractante qui occupe un emploi, d'une durée égale ou supérieure à un an, au service d'un employeur de l'État d'accueil reçoit un titre de séjour d'une durée de cinq ans au moins à dater de sa délivrance. Il est automatiquement prolongé pour une durée de cinq ans au moins. Lors du premier renouvellement, sa durée de validité peut être limitée, sans pouvoir être inférieure à un an, lorsque son détenteur se trouve dans une situation de chômage involontaire depuis plus de douze mois consécutifs.

Le titre de séjour en cours de validité ne peut être retiré au travailleur salarié du seul fait qu'il n'occupe plus d'emploi, soit que l'intéressé ait été frappé d'une incapacité temporaire de travail résultant d'une maladie ou d'un accident, soit qu'il se trouve en situation de chômage involontaire dûment constatée par le bureau de main-d'œuvre compétent (art. 6 § 6 annexe I ALCP). Ces périodes sont considérées comme des périodes d'emploi (art. 4 § 2 annexe I ALCP en lien avec les art. 2 al. 1 et 4 al. 2 du règlement CEE 1251/70).

3.5.2 En interprétant ces principes, le Tribunal fédéral a jugé qu'un travailleur peut perdre son statut de travailleur salarié s'il est (1) volontairement devenu chômeur, ou que (2) en raison de son comportement, il est certain qu'il n'y a aucune perspective sérieuse de retrouver un emploi dans un avenir proche, ou (3) que son comportement est constitutif d'un abus de droit, dans la mesure où il a acquis son autorisation de séjour de travailleur sur la base d'une activité professionnelle fictive ou courte dans le seul but d'obtenir des prestations d'assurance plus favorables que celles versées dans son pays d'origine ou dans un autre État contractant. Dans ce cas, les autorités peuvent révoquer ou refuser de prolonger l'autorisation de séjour, si les conditions requises pour leur délivrance ne sont plus remplies (ATF 144 II 121 consid. 3.1 in RDAF 2019 I p. 534 ; ATA/156/2020 du 11 février 2020 consid. 5b).

3.5.3 S'agissant des emplois d'insertion, le Tribunal fédéral a jugé qu'aucun motif de principe ne s'oppose à ce que des activités rémunérées proposées aux bénéficiaires de l'aide sociale dans le but de réinsertion sur le marché général de l'emploi soient réelles et effectives. Il a toutefois relevé que la notion d'activités réelles et effectives implique une appréciation au cas par cas, en fonction de toutes les circonstances d'espèce, ayant trait à la nature tant des activités concernées que de la relation de travail en cause (arrêts du Tribunal fédéral 2C_374/2018 du 15 août 2018 consid. 5.3.1 ; 2C_761/2015 du 21 avril 2016 consid. 4.5 concernant un emploi d'insertion dont le salaire mensuel s'élevait à CHF 3'000.-).

3.5.4 L'art. 4 § 1 annexe I ALCP consacre le droit de demeurer aux ressortissants d'une partie contractante et aux membres de leur famille après la fin de leur activité économique. Conformément à l'art. 2 al. 1 let. b du règlement 1251/70, auquel l'art. 4 § 2 annexe I ALCP se réfère, le travailleur dispose d'un droit de demeurer à la suite d'une incapacité permanente de travail s'il réside d'une façon continue sur le territoire de cet État depuis plus de deux ans. Le droit de demeurer suite à une incapacité de travail suppose donc un statut antérieur de travailleur salarié. Il est de plus nécessaire que le travailleur ait renoncé à exercer son activité professionnelle en raison de cette incapacité de travail. Quiconque peut se prévaloir d'un droit de demeurer conserve les droits qu'il a acquis en tant que travailleur salarié et peut, en particulier, prétendre aux prestations d'aide sociale (ATF 144 II 121 consid. 3.2 in RDAF 2019 I p. 534).

3.5.5 Selon la jurisprudence, pour pouvoir prétendre au droit de demeurer en Suisse sur la base de l'art. 2 § 1 let. b du règlement 1251/70, il faut que l'intéressé ait séjourné sur le territoire de l'État en question depuis plus de deux ans au moment où l'incapacité de travail intervient. En revanche, cette disposition ne prévoit pas une durée déterminée d'activité (ATF 144 II 121 consid. 3.5.3). Par ailleurs, ce droit suppose que l'intéressé ait effectivement eu la qualité de travailleur et qu'il ait cessé d'occuper un emploi salarié suite à une incapacité de travail (ATF 144 II 121 consid. 3.2 ; 141 II 1 consid. 4.2.3). Pour déterminer le moment où l'incapacité de travail survient, il convient de se référer aux résultats de la procédure d'octroi de la rente AI (ATF 144 II 121 consid. 3.6 ; 141 II 1 consid. 4.2.1 ; ATA/156/2020 précité consid. 5c).

Le délai de deux ans tombe si l'incapacité de travail découle d'un accident de travail ou d'une maladie professionnelle et qu'il existe un droit à une rente d'un assureur suisse. Dans un arrêt du Tribunal fédéral 2C_587/2013 du 30 octobre 2014, confirmé par la suite, le Tribunal fédéral a jugé que l'autorité de la migration ne peut en principe pas se prononcer sur le statut de séjour tant qu'une situation d'incapacité de travail est en cours de clarification. En cas de doute, il est nécessaire d'attendre la décision de l'office de l'AI. L'autorité de la migration ne peut se prononcer plus tôt sur le statut de séjour que si la situation juridique paraît claire (ATF 141 II 1 in RDAF 2016 I 429). L'attente ne se justifie toutefois que si les autres conditions du droit de demeurer en Suisse sont réalisées, à savoir que l'intéressé a cessé d'occuper un emploi à la suite d'une incapacité de travail et qu'il a exercé son droit de demeurer en Suisse dans le délai de deux ans prévu à l'art. 5 par. 1 du règlement 1251/70 ou de la directive 75/34/CEE du Conseil européen, du 17 décembre 1974, relative au droit des ressortissants d'un État membre de demeurer sur le territoire d'un autre État membre après y avoir exercé une activité non salariée (ci-après : directive 75/34 ; ATF 144 II 121 consid. 3.2 ; 141 II 1 consid. 4.2.3).

Dans un autre arrêt publié au recueil officiel, le Tribunal fédéral a précisé que le droit du travailleur migrant de demeurer en Suisse en cas d'incapacité de travail permanente fondée sur l'ALCP présupposait que la personne concernée ne puisse plus effectuer un travail que l'on peut raisonnablement exiger de lui. Si l'incapacité de travail se limite à l'activité usuelle, il n'y a pas de droit à une prolongation du séjour en Suisse (ATF 146 II 89).

3.6 Selon l'art. 2 § 1 al. 2 Annexe I ALCP, les ressortissants des parties contractantes ont aussi le droit de se rendre dans une autre partie contractante ou d’y rester après la fin d’un emploi d’une durée inférieure à un an pour y chercher un emploi et y séjourner pendant un délai raisonnable, qui peut être de six mois qui leur permette de prendre connaissance des offres d’emplois correspondant à leurs qualifications professionnelles et de prendre, le cas échéant, les mesures nécessaires aux fins d’être engagés. Les chercheurs d’emploi ont le droit, sur le territoire de la partie contractante concernée, de recevoir la même assistance que celle que les bureaux d’emploi de cet État accordent à ses propres ressortissants. Ils peuvent être exclus de l’aide sociale pendant la durée de ce séjour.

3.7  Selon l’art. 24 § 1 Annexe I ALCP, une personne ressortissante d’une partie contractante n’exerçant pas d’activité économique dans l’État de résidence et qui ne bénéficie pas d’un droit de séjour en vertu d’autres dispositions de l'accord reçoit un titre de séjour d’une durée de cinq ans au moins à condition qu’elle prouve aux autorités nationales compétentes qu’elle dispose pour elle-même et les membres de sa famille de moyens financiers suffisants pour ne pas devoir faire appel à l’aide sociale pendant leur séjour (let. a) et d’une assurance-maladie couvrant l’ensemble des risques (let. b). Les moyens financiers susvisés sont considérés comme suffisants lorsqu’ils dépassent le montant en dessous duquel les nationaux, eu égard à leur situation personnelle et, le cas échéant, et à celle des membres de leur famille, peuvent prétendre à des prestations d’assistance (art. 24 § 2 Annexe I ALCP).

Le requérant n’exerçant pas d’activité économique et ne disposant pas de revenus suffisants pour ne pas devoir faire appel à l’aide sociale ne saurait bénéficier d’une autorisation de séjour au sens de l’art. 24 § 1 annexe I ALCP (arrêts du Tribunal fédéral 2C_567/2017 du 5 mars 2018 consid. 5.1 ; 2C_59/2017 du 4 avril 2017 consid. 6).

3.8 Selon l’art. 20 OLCP, si les conditions d'admission sans activité lucrative ne sont pas remplies au sens de l'ALCP ou au sens de la Convention instituant l'AELE, une autorisation de séjour UE/AELE peut être délivrée lorsque des motifs importants l'exigent. Il n'existe cependant pas de droit en la matière, l'autorité cantonale statuant librement, sous réserve de l'approbation du SEM (art. 29 OLCP). Les autorités compétentes tiennent compte, en exerçant leur pouvoir d'appréciation, des intérêts publics, de la situation personnelle de l'étranger, ainsi que de son degré d'intégration (art. 96 al. 1 LEI).

S'agissant de la notion de « motifs importants », les conditions posées à l’admission de l’existence de tels motifs au sens de l'art. 20 OLCP correspondent à celles posées à la reconnaissance d’un cas de rigueur en vertu de l'art. 30 al. 1 let. b LEI en lien avec les précisions apportées par l’art. 31 OASA (arrêt du Tribunal administratif fédéral [ci-après : TAF] F-4332/2018 du 20 août 2019 consid. 6.2 et les arrêts cités).

Dès lors que l'admission des personnes sans activité lucrative dépend simplement de l’existence de moyens financiers suffisants et d’une affiliation à une caisse maladie, les cas visés par l’art. 20 OLCP et l'art. 31 OASA ne sont envisageables que dans de rares situations, notamment lorsque les moyens financiers manquent ou, dans des cas d’extrême gravité, pour les membres de la famille ne pouvant pas se prévaloir des dispositions sur le regroupement familial (par ex. frère et sœur, oncle, neveu, tante ou nièce ; directives OLCP ch. 8.5).

3.9 L'art. 31 al. 1 OASA prévoit que pour apprécier l'existence d'un cas individuel d'extrême gravité, il convient de tenir compte notamment de l'intégration du requérant sur la base des critères d’intégration définis à l’art. 58a al. 1 LEI (let. a), de sa situation familiale, particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité des enfants (let. c), de sa situation financière (let. d), de la durée de sa présence en Suisse (let. e), de son état de santé (let. f) ainsi que des possibilités de réintégration dans l'État de provenance (let. g). Les critères énumérés par cette disposition, qui doivent impérativement être respectés, ne sont toutefois pas exhaustifs, d'autres éléments pouvant également entrer en considération, comme les circonstances concrètes ayant amené un étranger à séjourner illégalement en Suisse (directives LEI, état au 1er septembre 2023, ch. 5.6.12).

Les dispositions dérogatoires des art. 30 LEI et 31 OASA présentent un caractère exceptionnel, et les conditions pour la reconnaissance d'une telle situation doivent être appréciées de manière restrictive (ATF 128 II 200 consid. 4). Elles ne confèrent pas de droit à l'obtention d'une autorisation de séjour (ATF 138 II 393 consid. 3.1 ; 137 II 345 consid. 3.2.1). L'autorité doit néanmoins procéder à l'examen de l'ensemble des circonstances du cas d'espèce pour déterminer l'existence d'un cas de rigueur (ATF 128 II 200 consid. 4 ; 124 II 110 consid. 2 ; ATA/38/2019 du 15 janvier 2019 consid. 4c ; directives LEI, ch. 5.6).

3.10 La reconnaissance de l'existence d'un cas d'extrême gravité implique que l'étranger concerné se trouve dans une situation de détresse personnelle. Parmi les éléments déterminants pour la reconnaissance d'un cas d'extrême gravité, il convient en particulier de citer la très longue durée du séjour en Suisse, une intégration sociale particulièrement poussée, une réussite professionnelle remarquable, la personne étrangère possédant des connaissances professionnelles si spécifiques qu'elle ne pourrait les mettre en œuvre dans son pays d'origine ou une maladie grave ne pouvant être traitée qu'en Suisse (arrêt du Tribunal fédéral 2A.543/2001 du 25 avril 2002 consid. 5.2).

La question est ainsi de savoir si, en cas de retour dans le pays d'origine, les conditions de sa réintégration sociale, au regard de la situation personnelle, professionnelle et familiale de l'intéressé, seraient gravement compromises (arrêts du Tribunal fédéral 2C_621/2015 du 11 décembre 2015 consid. 5.2.1 ; 2C_369/2010 du 4 novembre 2010 consid. 4.1).

3.11 Selon la jurisprudence, des motifs médicaux peuvent, selon les circonstances, conduire à la reconnaissance d'un cas de rigueur lorsque la personne concernée démontre souffrir d'une sérieuse atteinte à la santé qui nécessite, pendant une longue période, des soins permanents ou des mesures médicales ponctuelles d'urgence, indisponibles dans le pays d'origine, de sorte qu'un départ de Suisse serait susceptible d'entraîner de graves conséquences pour sa santé. En revanche, le seul fait d'obtenir en Suisse des prestations médicales supérieures à celles offertes dans le pays d'origine ne suffit pas à justifier une exception aux mesures de limitation. De même, la personne étrangère qui entre pour la première fois en Suisse en souffrant déjà d'une sérieuse atteinte à la santé ne saurait se fonder uniquement sur ce motif médical pour réclamer une telle exemption (ATF 128 II 200 consid. 5.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_861/2015 du 11 février 2016 consid. 4.2 ; arrêt du TAF F-6860/2016 du 6 juillet 2018 consid. 5.2.2 ; ATA/822/2023 du 9 août 2023 consid. 3.9).

3.12 En l'espèce, l'analyse à laquelle s'est livrée le TAPI ne prête pas le flanc à la critique. La recourante est en incapacité totale de travailler depuis le 9 janvier 2020, soit avant de se faire conférer la nationalité portugaise (29 mai 2020). Elle est aidée financièrement par l'hospice depuis août 2016. Son activité auprès de la société C______, qui lui procurait un revenu mensuel d'environ CHF 900.-, n'est pas suffisante pour lui conférer le statut de travailleuse au sens de l'ALCP ; à cet égard, le TAPI a pris en compte cette activité mais l'a jugée marginale, et la recourante n'indique dans son recours pas quelle autre activité devrait être prise en considération. La recourante n'avait donc pas le statut de « travailleur » au moment de la survenance de son incapacité totale de travailler et ne pouvait dès lors pas se prévaloir du droit de demeurer en Suisse sur cette base, étant rappelé qu'elle n'a jamais exercé d'activité professionnelle après l'obtention de la nationalité portugaise.

Il ne fait par ailleurs aucun doute que la recourante ne peut pas être considérée comme personne à la recherche d'un emploi, le délai raisonnable étant dépassé, et que sa dépendance de l'aide sociale depuis 2016 ne lui permet pas de bénéficier d'une autorisation de séjour en tant que ressortissante européenne sans activité lucrative.

Quant à l'existence de motifs importants au sens de l'art. 20 OLCP, ils ne sont pas davantage donnés. La recourante réside en Suisse depuis neuf ans, soit une durée qui ne peut encore être qualifiée de très longue, mais la raison de son séjour, soit la vie commune avec son époux, a disparu en 2016, après un peu plus de trois ans de séjour. Son intégration socio-culturelle en Suisse ne peut de plus être considérée comme exceptionnelle, car même si elle possède des rudiments de français, elle ne travaille pas, émarge au budget de l'assistance publique de manière durable et n'apparaît pas impliquée à un titre quelconque dans la société civile. C'est sans aucunement l'étayer qu'elle soutient que toutes ses relations se trouvent désormais en Suisse. Il n'apparaît pourtant pas qu'une réintégration dans l'un des pays dont elle est ressortissante, qu'elle a quitté à l'âge à adulte pour le Brésil, et dont elle parle la langue tant pour le Brésil que pour le Portugal, serait gravement compromise – le fait que les conditions de vie y soient moins avantageuses qu'en Suisse ne constituant pas non plus un motif important au sens de la jurisprudence.

Enfin, comme relevé par l'intimé dans sa réponse, la recourante ne démontre aucunement qu'elle n'aurait pas accès aux soins nécessaires et adéquats au Portugal.

C'est dès lors de manière conforme au droit que l'instance précédente a estimé que la recourante ne pouvait se prévaloir ni de l'ALCP ou de l'OLCP, ni d'un cas d'extrême gravité au sens de la LEI pour obtenir la prolongation de son autorisation de séjour.

4.             La recourante invoque aussi, du moins matériellement car son argumentation à cet égard est confuse, le droit au respect de sa vie privée.

4.1 Sous l'angle étroit de la protection de la vie privée, l'art. 8 CEDH ouvre le droit à une autorisation de séjour, mais à des conditions restrictives, l'étranger devant établir l'existence de liens sociaux et professionnels spécialement intenses avec la Suisse, notablement supérieurs à ceux qui résultent d'une intégration ordinaire (ATF 130 II 281 consid. 3.2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_255/2020 du 6 mai 2020 consid. 1.2.2). Lorsque l'étranger réside depuis plus de dix ans en Suisse, il y a lieu de partir de l'idée que les liens sociaux qu'il y a développés sont suffisamment étroits pour qu'il bénéficie d'un droit au respect de sa vie privée ; lorsque la durée de la résidence est inférieure à dix ans, mais que l'étranger fait preuve d'une forte intégration en Suisse, le refus de prolonger ou la révocation de l'autorisation de rester en Suisse peut également porter atteinte au droit au respect de la vie privée (ATF 144 I 266 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_734/2023 du 3 mai 2023
consid. 5.3.5). Les années passées en Suisse dans l'illégalité ou au bénéfice d'une simple tolérance ne sont pas déterminantes (ATF 137 II 1 consid. 4.3 ; 134 II 10 consid. 4.3).

4.2 Récemment le Tribunal fédéral a expressément admis que la reconnaissance finale d’un droit à séjourner en Suisse issu du droit au respect de la vie privée garanti par l'art. 8 § 1 CEDH pouvait s’imposer même sans séjour légal de dix ans à condition toutefois que le requérant atteste d’une intégration particulièrement réussie (ATF 144 I 266 consid. 3.8 et 3.9 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_734/2022 du 3 mai 2023 consid. 5.3).

4.3 En l'espèce, si la la recourante est entrée en Suisse légalement le 13 août 2013, depuis le 10 novembre 2020 elle y séjourne uniquement au bénéfice de l'effet suspensif lié à ses différents recours, si bien que la première hypothèse prévue par la jurisprudence, soit un séjour légal d'au moins dix ans, n'est a priori pas remplie. Quoi qu'il en soit, comme analysé au considérant précédent, on ne saurait décrire l'intégration du recourant comme exceptionnelle ou particulièrement réussie, si bien que le grief lié à la violation de l'art. 8 CEDH sera écarté.

5.             Enfin, la recourante soutient que son renvoi serait illicite ou inexigible, revendiquant donc matériellement d'être mis au bénéfice d'une admission provisoire.

5.1 Selon l'art. 64 al. 1 let. c LEI, toute personne étrangère dont l'autorisation est refusée, révoquée ou qui n'est pas prolongée après un séjour autorisé est renvoyée. La décision de renvoi est assortie d'un délai de départ raisonnable (art. 64 let. d al. 1 LEI).

5.2 Le renvoi d'une personne étrangère ne peut être ordonné que si l'exécution de celui-ci est possible, licite ou peut être raisonnablement exigée (art. 83 al. 1 LEI). L'exécution n'est pas possible lorsque la personne concernée ne peut quitter la Suisse pour son État d'origine, son État de provenance ou un État tiers ni être renvoyée dans un de ces États (art. 83 al. 2 LEI). Elle n'est pas licite lorsqu'elle serait contraire aux engagements internationaux de la Suisse (art. 83 al. 3 LEI). Elle n'est pas raisonnablement exigible si elle met concrètement en danger la personne étrangère, par exemple en cas de guerre, de guerre civile, de violence généralisée ou de nécessité médicale (art. 83 al. 4 LEI).

5.3 L'art. 83 al. 4 LEI s'applique en premier lieu aux « réfugiées et réfugiés de la violence », soit aux personnes étrangères qui ne remplissent pas les conditions de la qualité de réfugiée ou réfugié parce qu'elles ne sont pas personnellement persécutées, mais qui fuient des situations de guerre ou de violence généralisée (Minh Son NGUYEN/Cesla AMARELLE [éd.], Code annoté de droit des migrations, volume II : loi sur les étrangers, 2017, p. 949). En revanche, les difficultés socio-économiques qui sont le lot habituel de la population locale, en particulier des pénuries de soins, de logement, d'emplois et de moyens de formation, ne suffisent pas en soi à réaliser une telle mise en danger (ATAF 2010/54 consid. 5.1 ; arrêt du TAF E-5092/2013 du 29 octobre 2013 consid 6.1 ; ATA/515/2016 du 14 juin 2016 consid. 6b).

S'agissant plus spécifiquement de l'exécution du renvoi des personnes en traitement médical en Suisse, celle-ci ne devient inexigible que dans la mesure où ces dernières ne pourraient plus recevoir les soins essentiels garantissant des conditions minimales d'existence. Par soins essentiels, il faut entendre les soins de médecine générale et d'urgence absolument nécessaires à la garantie de la dignité humaine. L'art. 83 al. 4 LEI, disposition exceptionnelle, ne saurait en revanche être interprété comme impliquant un droit général d'accès en Suisse à des mesures médicales visant à recouvrer la santé ou à la maintenir, au simple motif que l'infrastructure hospitalière et le savoir-faire médical dans le pays d'origine ou de destination de l'intéressé n'atteignent pas le standard élevé qu'on trouve en Suisse (ATAF 2011/50 consid. 8.3). La gravité de l'état de santé, d'une part, et l'accès à des soins essentiels, d'autre part, sont déterminants. Ainsi, l'exécution du renvoi demeure raisonnablement exigible si les troubles physiologiques ou psychiques ne peuvent être qualifiés de graves, à savoir s'ils ne sont pas tels qu'en l'absence de possibilités de traitement adéquat, l'état de santé de l'intéressé se dégraderait très rapidement au point de conduire d'une manière certaine à la mise en danger concrète de sa vie ou à une atteinte sérieuse, durable, et notablement plus grave de son intégrité physique (arrêt du TAF F-1602/2020 du 14 février 2022 consid. 5.3.4).

5.4 Selon la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme (ci‑après : CourEDH), l'exécution du renvoi ou de l'expulsion d'un malade physique ou mental est exceptionnellement susceptible de soulever une question sous l'angle de l'art. 3 CEDH si la maladie atteint un certain degré de gravité et qu'il est suffisamment établi que, en cas de renvoi vers l'État d'origine, la personne malade court un risque sérieux et concret d'être soumise à un traitement interdit par cette disposition (ACEDH N. c. Royaume-Uni du 27 mai 2008, req. n° 26565/05, § 29 ss ; arrêt du Tribunal fédéral 2D_3/2021 du 14 avril 2021 consid. 4.2). C'est notamment le cas si sa vie est en danger et que l'État vers lequel elle doit être expulsée n'offre pas de soins médicaux suffisants et qu'aucun membre de sa famille ne peut subvenir à ses besoins vitaux les plus élémentaires (ACEDH N. c. Royaume-Uni précité § 42; ATF 137 II 305 consid. 4.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2D_14/2018 du 13 août 2018 consid. 4.1 ; 2C_1130/2013 du 23 janvier 2015 consid. 3).

Le renvoi d'un étranger malade vers un pays où les moyens de traiter sa maladie sont inférieurs à ceux disponibles dans l'État contractant reste compatible avec l'art. 3 CEDH, sauf dans des cas très exceptionnels, en présence de considérations humanitaires impérieuses (ACEDH N. c. Royaume-Uni précité, § 42 ; Emre c. Suisse du 22 mai 2008, req. n° 42034/04, § 89). Dans un arrêt du 13 décembre 2016 (ACEDH Paposhvili c. Belgique, req. n° 41738/10, § 173 ss, not. 183), la Grande Chambre de la CourEDH a clarifié son approche en rapport avec l'éloignement de personnes gravement malades et a précisé qu'à côté des situations de décès imminent, il fallait entendre par « autres cas très exceptionnels » pouvant soulever un problème au regard de l'art. 3 CEDH les cas d'éloignement d'une personne gravement malade dans lesquels il y a des motifs sérieux de croire que cette personne, bien que ne courant pas de risque imminent de mourir, ferait face, en raison de l'absence de traitements adéquats dans le pays de destination ou de défaut d'accès à ceux-ci, à un risque réel d'être exposée à un déclin grave, rapide et irréversible de son état de santé entraînant des souffrances intenses ou à une réduction significative de son espérance de vie ; ces cas correspondent à un seuil élevé pour l'application de l'art. 3 CEDH dans les affaires relatives à l'éloignement des étrangers gravement malades. La CourEDH a aussi fixé diverses obligations procédurales dans ce cadre (ACEDH Savran c. Danemark du 7 décembre 2021, req. n° 57467/15, § 130).

5.5 En l'espèce, sans minimiser les problèmes de santé auxquels la recourante est confrontée, ils ne sont pas d'une gravité telle qu'en l'absence de possibilités de traitement adéquat, son état de santé se dégraderait très rapidement au point de conduire d'une manière certaine à la mise en danger concrète de sa vie ou à une atteinte sérieuse, durable, et notablement plus grave de son intégrité. De plus, comme déjà examiné, on peut partir de l'idée que des possibilités de poursuivre ses traitements existent au Portugal.

Quant au fait que la recourante n'ait pas encore d'endroit où se loger, que ce soit au Portugal ou au Brésil, cela ne saurait rendre l'exécution de son renvoi inexigible.

Le renvoi de la recourante s'avère ainsi exigible. Entièrement mal fondé, le recours sera rejeté.

6.             Vu l'issue du recours, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge de la recourante (art. 87 al. 1 LPA), et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 16 janvier 2023 par A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 29 novembre 2022 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge de A______ un émolument de CHF 400.- ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral suisse, av. du Tribunal fédéral 29, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Fernando Henrique FERNANDES DE OLIVEIRA, avocat de la recourante, à l'office cantonal de la population, au Tribunal administratif de première instance ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.

Siégeant : Florence KRAUSKOPF, présidente, Jean-Marc VERNIORY, Claudio MASCOTTO, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

J. BALZLI

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. KRAUSKOPF

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :

 

 

 

 


 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l’entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l’admission provisoire,

4. l’expulsion fondée sur l’art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d’admission,

6. la prolongation d’une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d’emploi du titulaire d’une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d’asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l’objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l’acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

______________________________________________

Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l’objet d’aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

___________________________________________

 

Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.